Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Emploi extérieur - Conflit d'intérêts - Domaine d'activité désigné comme pouvant présenter un risque de conflit d'intérêts - Convention collective du Groupe Vérification (AU) - Code régissant les conflits d'intérêts et l'après-mandat s'appliquant à la fonction publique (Code) - Lignes directrices supplémentaires sur les conflits d'intérêts à l'intention des employés de Revenu Canada (Lignes directrices) - les fonctionnaires s'estimant lésés, vérificateurs à Revenu Canada, ont présenté des demandes d'autorisation pour exercer d'autres emplois à l'extérieur de leurs heures de travail et se sont engagés à ne pas se placer en situation de conflit d'intérêts - ils voulaient être autorisés à exercer des activités touchant la comptabilité et la tenue de livres pour d'autres, la préparation de déclarations d'impôt pour d'autres et la vente d'immeubles résidentiels - l'employeur a refusé d'autoriser les fonctionnaires s'estimant lésés à exercer ces activités au motif qu'ils se placeraient en situation de conflit d'intérêts - les fonctionnaires s'estimant lésés ont allégué que les dispositions du Code et des Lignes directrices ne sont pas claires et que l'employeur les a interprétées de façon trop restrictive - ils ont ajouté que l'employeur n'a pas évalué leurs demandes en tenant compte des circonstances de chacun et n'a pas exercé le pouvoir discrétionnaire dont il disposait - l'employeur a répondu que la convention collective du Groupe AU lui donnait le droit de désigner certains domaines d'activité comme pouvant présenter un risque de conflit d'intérêts et qu'il a exercé ce droit en publiant le Code et les Lignes directrices - il a ajouté que les autorisations recherchées par les fonctionnaires s'estimant lésés touchaient toutes de telles activités - il a prétendu que les demandes présentées par les fonctionnaires s'estimant lésés étaient vagues et hypothétiques - l'arbitre a conclu que la convention collective du Groupe AU ne limitait pas le pouvoir de désignation de l'employeur, qu'il a exercé en publiant le Code et les Lignes directrices - elle a souligné que l'ambiguïté du Code et des Lignes directrices, ainsi que les manquements de l'employeur dans la communication de ses modifications ont contribué au problème dont elle était saisie - elle a conclu que les activités pour lesquelles les fonctionnaires s'estimant lésés ont présenté leurs demandes d'autorisation avaient toutes été désignées par l'employeur comme pouvant présenter un risque de conflit d'intérêts - elle a cependant invité l'employeur et l'agent négociateur des fonctionnaires s'estimant lésés à discuter de la désignation des activités reliées à la vente d'immeubles résidentiels. Griefs rejetés.

Contenu de la décision

Dossiers : 166-2-28527 à 28533 Loi sur les relations de travail Devant la Commission des relations dans la fonction publique de travail dans la fonction publique ENTRE GUY BOUTHILLETTE, PIERRE CHARTRAND, SERGE CLAIROUX, JACQUES DUVAL, BENOIT GUAY, GASTON LAMPRON, JACQUES MORNEAU

fonctionnaires s’estimant lésés et LE CONSEIL DU TRÉSOR (Revenu Canada - Douanes, Accise et Impôt)

employeur

Devant : Evelyne Henry, présidente suppléante Pour les fonctionnaires s’estimant lésés : Luc Quesnel, l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada

Pour l’employeur : Stéphane Arcelin, avocat

Affaire entendue à Montréal (Québec), du 26 au 30 octobre 1998.

Décision DÉCISION Page 1 Il s’agit de sept griefs, déposés en vertu de la convention collective du groupe Vérification (AU) (Code 204/88), concernant l’application de l’article 13 de cette convention collective.

Les parties sont d’accord pour dire que la procédure des griefs a été suivie correctement et que l’arbitre a pleine compétence pour trancher des questions devant elle.

Les pièces S1 à S31 ont été mises en preuve par les fonctionnaires s’estimant lésés avec le consentement de l’employeur. Il a été convenu que le témoin de l’employeur, Georges H. Clouthier, serait fonctionnaires s’estimant lésés, vu sa non-disponibilité les 28 et 29 octobre 1998, et cela sans préjudice au fardeau qui incombe aux fonctionnaires s’estimant lésés de prouver qu’il y a eu contravention de l’article 13 de la convention collective.

Preuve Pour l’employeur M. Clouthier est directeur du bureau des services fiscaux de Revenu Canada à Laval depuis le 5 janvier 1987. Il est comptable agréé et détient une licence en sciences comptables de l’Université Laval. Il a acquis une longue expérience dans le secteur privé et dans le secteur public avant de joindre Revenu Canada en 1970, il a occupé des postes de vérificateur, de chef de section et surveillant, de directeur des opérations régionales et d’assistant du sous-ministre adjoint pour la région du Québec pour tous les programmes de l’impôt, y compris la vérification.

Depuis onze ans dans son poste de directeur des services fiscaux de Revenu Canada à Laval, M. Clouthier a répondre à des demandes d’employés concernant les conflits d’intérêts. Le témoin indique que Revenu Canada gère un programme d’auto-cotisation la confiance du public est très importante, cette organisation dépend de l’image de confiance que les employés projettent, image qui doit être à l’abri de toute enquête sur leur comportement. Il faut s’assurer que des biens, des affaires et des intérêts personnels ne viennent pas en conflit avec les intérêts de l’employeur, à qui les employés doivent loyauté et service. Le jugement des employés est extrêmement important, ainsi que leur comportement et leur attitude. Les

Commission des relations de travail dans la fonction publique

entendu avant les témoins des

Décision Page 2 fonctionnaires s’estimant lésés sont tous des experts comptables et fiscaux, la connaissance de l’information détenue au ministère, des contribuables, des lois, des interprétations varie d’un individu à l’autre mais elle leur est accessible.

M. Clouthier explique qu’il y a des conflits d’intérêts réels et évidents, il y a des conflits apparents, la perception joue un rôle, et des conflits potentiels qui pourraient se développer, « l’occasion fait le larron ». Les décisions dans les cas menant aux griefs n’ont pas été prises par M. Clouthier, qui a pourtant décidé du cas d’un employé qui avait fait une demande semblable à celles des plaignants. Il s’agissait d’un employé qui désirait être membre du conseil d’administration d’une caisse populaire. M. Clouthier a acquiescé à la demande de l’employé.

M. Clouthier indique qu’il a vu une évolution au cours des années sur la question des conflits d’intérêts, avec des changements plus marqués en 1995, on a explicité davantage et permis qu’on puisse évaluer de nouveau facteurs. Anciennement, on excluait tout bonnement le courtier en immeubles, mais, depuis, on applique les lignes directrices avec une certaine souplesse et les exemples qui y apparaissent ne sont pas limitatifs. Ces lignes directrices ont fait l’objet de consultations entre l’employeur et les agents négociateurs dans un but de relations harmonieuses de partenariat et d’échange en vue de l’unification de l’administration des douanes et de l’impôt sous un seul sous-ministre.

Selon M. Clouthier, les vérificateurs ont connaissance d’informations au niveau des systèmes, de la loi et certaines ne font pas partie du domaine public, comme les opinions juridiques du ministère de la Justice, qui ne sont pas données aux représentants des contribuables. Le vérificateur a un accès privilégié à cette information mais, il se doit de limiter cet accès à l’information nécessaire pour faire son travail. S’il accède à de l’information dont il n’a pas besoin aux fins de son travail, il est passible de mesures disciplinaires. La vérification par l’employeur de l’information à laquelle les employés ont accédé de façon non conforme se fait par sondage, et le danger existe que les employés puissent se servir de l’information sans être détectés.

Les employés sont avisés une fois par année qu’ils n’ont accès qu’à l’information dont ils ont besoin aux fins de leur travail. Ils en sont informés dans les

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 3 cours de formation et par avis sur les écrans cathodiques, comme on peut le voir à la pièce S25, qui en reproduit le texte.

M. Quesnel s’est objecté à ce que M. Clouthier explique la position prise par l’employeur dans chacun des griefs. J’ai permis au témoin d’indiquer, de façon générale, comment la gestion traite des questions soulevées dans les demandes des fonctionnaires s’estimant lésés.

À l’égard des pièces S2 à S4, M. Clouthier a indiqué que, si la demande lui était soumise, il ne l’accepterait pas, puisque M. Bouthillette demande d’agir avec rémunération à titre de consultant en fiscalité. Selon lui, un vérificateur est un expert comptable et fiscal. Pour monsieur tout-le-monde, M. Bouthillette serait perçu comme avantagé face à d’autres fiscalistes à cause de son poste au sein du ministère. Il serait dans une situation de conflit apparent. S’il advenait qu’il agisse comme conseiller d’un contribuable saisi pour fraude, ou s’il recevait une cotisation très élevée suite à de l’information qu’il aurait fournie et qui serait contraire à celle émise par la suite par le ministère, il serait en situation de conflit réel. Ses intérêts comme consultant en fiscalité sont différents de ceux du ministère. Son jugement pourrait être influencé par ses intérêts personnels, qui ne seraient pas nécessairement ceux de la fonction publique. L’exemple le plus important serait dans un cas de fraude : ces cas sont très médiatisés et la possibilité que les médias s’emparent de cette information présente un danger réel. Le concept de loyauté dans le processus décisionnel est aussi très important. Lorsqu’on est un employé, on a une obligation de loyauté envers l’employeur. Lorsqu’une personne donne des conseils en fiscalité contre rémunération, elle se doit d’être loyale envers le client qui la rémunère pour ce service. Dans le cas de M. Bouthillette, il pourrait se voir contraint de réévaluer son allégeance en cas de conflit entre les intérêts de ses clients et ceux du ministère : il est impossible de servir deux maîtres.

Le témoin réfère ensuite au deuxième paragraphe de la page 22 de la pièce S23, Code régissant les conflits d’intérêts et l’après mandat s’appliquant à la fonction publique Conseil du Trésor du Canada et Lignes directrices supplémentaires sur les conflits d’intêts à l’intention des employés de Revenu Canada Revenu Canada qui se lit comme suit :

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 4 L’alinéa 80e) de la Loi sur la gestion des finances publiques exige de tout percepteur, gestionnaire ou ordonnateur de fonds publics qui savent qu’il y a eu infraction aux dispositions de cette loi, ou de toute autre loi concernant les revenus, qu’ils signalent les fraudes dont ils connaissent l’existence. S’ils ne le font pas, ils s’exposent à une pénalité importante.

Le témoin ajoute que, si M. Bouthillette s’affiche comme consultant en fiscalité, ce dernier sera perçu comme avantagé à cause des connaissances sur l’interprétation et de l’application de la Loi de l’impôt sur le revenu qu’il a acquises en tant que vérificateur. Le conflit d’intérêts serait également apparent.

Renvoyé à la demande de Pierre Chartrand et aux pièces S5 à S7, M. Clouthier indique qu’une déclaration T1 est un document officiel du ministère et, comme dans le cas précédent, il y avait conflit d’intérêts réel et apparent, les connaissances fiscales et comptables de M. Chartrand seraient vues comme un avantage pour les clients potentiels et un désavantage pour ses compétiteurs qui remplissent des T1 contre rémunération. Le conflit serait réel, qu’il s’agisse de T1 ou TP1 car le même genre d’information est requis dans les deux cas et les ministères provincial et fédéral échangent l’information pour élargir leur champ de connaissances.

Au sujet de la demande de Serge Clairoux, aux pièces S8 à S10, le témoin nous renvoie aux pages 20 et 21 de la pièce S23. Il indique que le point n’est pas limitatif et que le conflit peut se produire du fait que M. Clairoux est expert comptable et fiscal et que, advenant des difficultés financières, ses associés pourraient l’accuser de ne pas pouvoir contourner la loi. Ces mêmes personnes pourraient l’encourager à ne pas déclarer tous les revenus de leur entreprise. Comment serait-il vu puisqu’il ne peut aller à l’encontre de l’article 80e) de la Loi sur la gestion des finances publiques, qui l’oblige à dénoncer toute violation de cette loi ou à une loi fiscale quelconque? Le conflit d’intérêts pourrait être apparent si son interprétation de la loi était différente de celle du ministère.

Au sujet des pièces S11 à S13, l’activité souhaitée par M. Duval est la préparation d’états financiers, M. Clouthier a déclaré que les états financiers sont à la base même de la production de rapports d’impôt, c’est l’enregistrement fidèle de toutes les transactions avec les clients et les fournisseurs. Même en faisant abstraction de l’obligation de loyauté qu’a le fonctionnaire s’estimant lésé envers le

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 5 ministère, la perception du public, des clients, des fournisseurs, avocats et comptables pourrait en être une de conflit. Il est possible que des personnes, des clients ne veuillent pas de factures ou exigent des factures trompeuses, l’employé s’estimant lésé pourrait ainsi faire partie d’un stratagème sans en être conscient. S’il découvre l’existence d’une telle situation, il aurait le devoir de dénoncer la fraude.

En ce qui concerne la demande de Benoit Guay, pièces S14 à S16, de « faire la comptabilité, tenir les livres, préparer les états financiers et les déclarations d’impôt d’une entreprise dont j’ai une participation de moins de 50 % », M. Clouthier indique que le conflit d’intérêts dans ce cas est de faire la comptabilité, la tenue de livres, la préparation d’états financiers et de déclarations d’impôt dans une société il n’est pas celui qui détient le contrôle. Il y est plutôt comme un employé. Ceux qui ont le contrôle sont davantage les patrons de M. Guay, tout comme Revenu Canada l’est, et tous les dangers déjà mentionnés sont existants. À la page 21 de la pièce S23, les exemples sont liés à la notion de contrôle ou relation de subordination. Cela pourrait venir brimer la confiance que le public place dans le système fiscal.

Au sujet des pièces S17 à S19, selon lesquelles M. Lampron veut faire la préparation de déclarations T2 provinciales et fédérales, le témoin indique que la déclaration T2 est le rapport d’impôt des corporations alors que la T1 est le rapport d’impôt des particuliers. Ce qui est vrai pour les T1 l’est pour les T2. encore, M. Lampron est un expert fiscal et comptable et les T2 comportent tous les états financiers et informations comptables d’une entreprise. Toutes les implications mentionnées précédemment pourraient surgir ici.

En ce qui a trait aux pièces S20 à S22, M. Morneau dit vouloir offrir ses services à titre d’agent immobilier, M. Clouthier nous réfère à la pièce E1, qui contient les Lignes directrices à l’intention des gestionnaires délégués sur les Conflits d’intérêts. Le témoin nous dit faire une différence entre l’évaluation dans le secteur immobilier résidentiel et commercial. Deuxièmement, il fait une différence selon le genre de client, la capacité de payer, le besoin d’évaluer pour le bénéfice de créanciers hypothécaires ainsi que la provenance des montants en argent sonnant. On doit se questionner sur la mise de fonds, elle pourrait venir de gains illicites de clients de M. Morneau. Comme courtier, il pourrait être appelé à comparaître devant les tribunaux, pour répondre d’où venaient les fonds : il s’expose à toute sorte de

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 6 situations. Le conflit d’intérêts est potentiel quand on fait ce travail contre rémunération.

En contre-interrogatoire, le témoin indique que la pièce E1 est un document interne de gestion qui existe depuis le 1 er mars 1992. Il admet que le Code de janvier 1995, suite à l’unification avec Douanes et Accise, donne plus de discrétion aux gestionnaires. Le document S23 est remis aux nouveaux employés; les employés en poste depuis 1992 en ont reçu une copie et ils reçoivent chaque année une lettre les avisant sur les conflits d’intérêts et les reportant au Code. Le témoin identifie la pièce S32 comme une partie du Code qui s’appliquait à Revenu Canada avant 1995.

M. Clouthier indique que le nouveau Code permet aux gestionnaires d’analyser chaque cas en particulier. Au dernier paragraphe de la page 22 de la pièce S23, M. Clouthier aborde le texte et les exemples comme des aides. Selon lui les deux critères extrêmement importants se retrouvent dans les principes énoncés au paragraphe 20, qui commence en page 8, et au paragraphe 26, en page 10. Le paragraphe 26 se lit ainsi : 26.*Les employés peuvent occuper un emploi extérieur ou participer à d’autres activités à moins que cet emploi ou ces activités risquent d’entraîner un conflit d’intérêts. Ils doivent présenter à l’administrateur désigné un rapport confidentiel des activités extérieures qui pourraient les soumettre à des exigences incompatibles avec leurs fonctions officielles ou remettre en question leur capacité d’accomplir les devoirs de leur charge en toute objectivité. L’administrateur désigné peut exiger que ces activités soient réduites, modifiées ou abandonnées s’il a été déterminé qu’il existe un risque réel ou potentiel de conflit d’intérêts.

Le témoin explique ce qu’il veut dire par « l’occasion fait le larron », il ne s’agit pas de risque réel mais de situation potentielle. Par exemple, l’agent d’immeubles court le risque d’être en conflit d’intérêts, d’être amené à faire un budget avec un acheteur potentiel, de faire face à des fonds d’un autre pays, en provenance de jeu ou qui donnent lieu à des potentiels de fraude et pouvant impliquer l’article 80(e). La différence entre ces circonstances et celles de vérificateur actif réside dans le type de relation existant entre un vérificateur et un contribuable d’une part, et entre un agent d’immeubles et son client d’autre part. À la question de savoir qui va décider

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 7 d’intenter des poursuites en vertu de l’article 80(e), le témoin indique que le vérificateur aux enquêtes spéciales fait une recommandation au ministère de la Justice, qui prend la décision.

M. Clouthier indique qu’il a approuvé la demande d’un employé de siéger au conseil d’administration d’une caisse populaire. Cet employé n’est pas impliqué dans les activités courantes et les transactions bancaires, il a à traiter de politiques et de directives. Il siège comme administrateur et partage ses responsabilités avec d’autres. Dans ce dossier, les risques sont nuls, l’employé a indiqué qu’il démissionnerait s’il s’apercevait qu’il y avait des risques. La caisse populaire est régie par la Fédération des caisses populaires et le travail d’administrateur s’apparente, en grande partie, à du bénévolat.

Le risque que le témoin accepte est le risque indirect inhérent à tout travail extérieur; cependant, quand le domaine de la comptabilité ou de la gestion fiscale entre en jeu, les risques sont directs et M. Clouthier s’attendrait que l’employé démissionne si c’était le cas. Le témoin donne comme exemple d’emplois susceptibles de ne pas présenter de risques de conflit : les emplois de vendeurs d’autos ou de souliers, de serveurs dans un restaurant, les emplois ou l’apparence de conflit n’est pas là.

M. Clouthier explique que la première partie des inquiétudes concerne la fraude et le potentiel de fraude; la deuxième concerne le patrimoine, c’est-à-dire toutes les informations confidentielles qui existent au ministère et, finalement, l’image de l’expert comptable qui donnerait de l’information ou encore une opinion contraire à celle de Revenu Canada.

Le témoin a été contre-interrogé sur le travail de vérificateur, sur la mise en garde à la pièce S25, sur les informations disponibles et sur l’accès à ces informations, il a réitéré l’information décrite plus haut.

Pour les fonctionnaires s’estimant lésés M. Guy Bouthillette est vérificateur depuis dix ans, employé par Revenu Canada depuis 1973 et représentant syndical depuis 1989.

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 8 Le témoin a préparé les pièces S26 et S27 à partir d’informations reçues des fonctionnaires s’estimant lésés, qui viennent de quatre bureaux différents, soit Montréal, Laval, Montérégie et Sherbrooke. Il explique que neuf demandes ont été soumises le 30 septembre 1996, dont il a fait parvenir copies à Danielle Vincent, Sous-ministre adjointe, région du Québec, sous le couvert de la pièce S28. Il a rencontré M m e Vincent, à qui il a fourni plus d’information sur chacune des demandes. M. Bouthillette a agi comme représentant de tous les fonctionnaires s’estimant lésés. À ce titre, il a reçu copie des notes de service que M me Vincent a fait parvenir aux gestionnaires des fonctionnaires s’estimant lésés, déposées comme pièce S33. M. Bouthillette avait indiqué à M m e Vincent que, si des renseignements additionnels étaient requis, il les lui fournirait en compagnie de chaque fonctionnaire s’estimant lésé, mais aucune rencontre n’a eu lieu. Il a fourni des informations additionnelles dans son cas, qui a trait à un rôle d’intermédiaire entre un client et le gouvernement. Par la suite, il y a eu une réponse positive de M. Clouthier dans le cas de M. Bégin et des réponses négatives dans tous les autres cas. Il en a été surpris car il s’attendait à avoir des rencontres avec les gestionnaires délégués, qui sont aussi les représentants de l’employeur du deuxième palier de la procédure des griefs, avant qu’ils émettent leur réponse.

M. Bouthillette a reçu une réponse de M me Vincent, (voir pièce S30) le 15 mai 1997, à laquelle il a répondu par une lettre en date du 23 juillet 1997 (pièce S31), dans laquelle il demande que les griefs soient déposés au dernier palier, il désire une rencontre avec le gestionnaire qui doit décider. Il obtient une rencontre avec une personne des ressources humaines, à qui il a fait un exposé en deux volets.

M. Bouthillette a affirmé que : Le Conseil du Trésor était autorisé à déléguer en vertu de l’article 12 de la Loi sur la gestion des finances publiques et Revenu Canada s’est vu confier le pouvoir de faire des directives sur les conflits d’intérêts en vertu de l’article 50 des règlements sur les Conditions d’emploi dans la Fonction publique. Ces conditions doivent être raisonnables, claires et non équivoques. On a pris le Code régissant les conflits d’intérêts et on a présenté à l’employeur les points pas très clairs. À l’exception de l’article 26 en page 10 c’est pas très clair. On a voulu discuter les pages 19 et 20 et les numéros de 1 à 10 qui représentaient des exemples.

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 9 Ceux qui intéressent le témoin sont les titres 1, 2 et 8 du chapitre B de la pièce S23 et il a lu : 1. Comptabilité et tenue de livres pour d’autres Faire de la comptabilité et de la tenue de livres pour d’autres ne vous place pas nécessairement en conflit d’intérêts. Toutefois, il faut tenir compte de la loi ou des lois que vous êtes chargé d’appliquer dans l’exercice de votre emploi gouvernemental. À titre d’exemple, si vous êtes impliqué dans les activités de vérification des lois de l’impôt sur le revenu, de la TPS ou de l’accise, vous pourriez n’être autorisé à vous adonner qu’à certaines formes de tenue de livres limitée pour une autre personne ou compagnie, lesquelles ne vous rendent pas responsable de toute la fonction comptabilité et tenue de livres. Par exemple, vous pourriez vous occuper des comptes clients et des comptes créditeurs, procéder à un comptage de caisse, effectuer des reports ou vous livrer à des activités de recouvrement informatisé pour des grands magasin nationaux, des compagnies ou des corporations.

Même si vos fonctions et responsabilités à Revenu Canada peuvent restreindre vos activités dans le domaine de la comptabilité ou de la tenue de livres pour d’autres, il n’existe pas de restrictions dans l’un ou l’autre des cas suivants:

vous êtes le trésorier, le comptable ou le teneur de livres d’une oeuvre de charité ou d’une organisation sans but lucratif;

vous (ou votre conjoint) possédez au moins 50 % de l’entreprise concernée;

vous (ou votre conjoint) possédez directement au moins 25 % d’un bien locatif. Si vous possédez ce bien indirectement, c’-à-d. si ce bien est détenu par une entité constituée, vous devez posséder au moins 50 % des actions;

vous êtes chargé de gérer les biens d’une autre personne, comme exécuteur testamentaire, administrateur, curateur ou tuteur, ou en vertu d’une procuration. Dans ce cas, on vous encourage toutefois à en informer votre gestionnaire délégué.

2. Planification financière, vente de biens immobiliers et évaluations

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision D’ordinaire, la vente de produits d’assurance, comme l’assurance-vie individuelle l’assurance-invalidité, ne donne pas lieu à un conflit d’intérêts. Toutefois, selon la loi ou les lois que vous êtes chargé d’appliquer, il se peut que vous vous placiez en conflit d’intérêts lorsque vous vous livrez à des activités comme les suivantes:

courtage en hypothèques ou en biens immobiliers; vente de moyens de placement (p. ex., prêts hypothécaires, comptes de dépôt du marché monétaire, fonds d’investissement non enregistrés, certificats de placement garanti non enregistrés, régimes enregistrés d’épargne-retraite);

vente de bien immobiliers; évaluation de biens immobiliers. Si vous vous adonnez à ces genres d’activités, il se peut que vous vous trouviez en conflit d’intérêts, réel ou potentiel, pour les raisons suivantes:

Lorsqu’il donne des conseils financiers ou des conseils en placement, le vendeur renseigne quelquefois sur les conséquences fiscales de placements. Si vos clients savaient que vous êtes un employé de Revenu Canada, ils pourraient s’attendre à recevoir des conseils fiscaux judicieux, et pourraient être portés à considérer la situation comme avantageuse.

L’alinéa 80e) de la Loi sur la gestion des finances publiques exige de tout percepteur, gestionnaire ou ordonnateur de fonds publics qui savent qu’il y a eu infraction aux dispositions de cette loi, ou de toute autre loi concernant les revenus, qu’ils signalent les fraudes dont ils connaissent l’existence. S’il ne le font pas, ils s’exposent à une pénalité importante.

Ainsi, lorsque vous examinez la situation financière de vos clients afin de déterminer les sommes qu’ils pourraient placer, il se peut fort bien qu’ils vous communiquent des renseignements qu’ils n’auraient pas révélés à Revenu Canada. Vous pourriez alors avoir à choisir entre votre loyauté envers vos clients et celle envers le Ministère laquelle consiste en l’obligation de signaler les fraudeurs de l’impôt.

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Page 10 ou de groupe ou

Décision Page 11 Le public pourrait mal comprendre une situation donnée, puisque vous avez la possibilité, comme employé, d’accéder à des renseignements ministériels confidentiels.

8. Préparation et production, au nom d’autres personnes, de documents ministériels

Dans le cadre de vos fonctions quotidiennes ou d’un programme de bénévoles, vous pouvez préparer et produire des documents ministériels (p. ex., des déclarations de revenus, des déclarations relatives à la TPS) afin d’aider les clients qui sont incapables de les remplir eux-mêmes en raison de leur âge avancé, de problèmes de langue, d’invalidités, d’analphabétisme, ou pour d’autres raisons semblables. Toutefois, vous ne devez ni demander ni recevoir aucun cadeau, aucune rémunération ou faveur d’un client.

Dans vos temps libres, sans devoir obtenir l’autorisation au préalable, vous pouvez préparer et produire des documents ministériels pour votre famille et vos amis si:

vous de demandez ni ne recevez aucun cadeau, aucune rémunération ou faveur;

vous ne fournissez que les renseignements qui pourraient être obtenus d’ordinaire à un bureau de Revenu Canada;

le document à être préparé n’a pas trait à une compagnie. Vous ne pouvez en aucun temps préparer ou produire de documents ministériels contre rémunération, cadeau ou faveur.

Le titre 8 a été modifié par la pièce S24(b). Cependant, beaucoup d’employés ont reçu des Codes sans l’ajout de la modification. Ce qui a été changé, c’est la dernière phrase du titre 8, et trois paragraphes ont été ajoutés dans la pièce S24(b). Ce changement est important, il a eu lieu en juillet 1996 suite à la fusion des deux ministères. M. Serge Bastien a dit qu’il s’agissait de « changements extraordinaires, que ce serait plus souple, » lorsqu’il a présenté les lignes directrices.

M. Bouthillette a fait partie d’un comité syndical qui a consulté tous les membres AU et produit un rapport. Il a participé à des rencontres patronales-syndicales, l’ébauche des lignes directrices ont été discutées. Le témoin indique que la gestion n’a jamais remis au syndicat les demandes qui avaient été présentées par les employés ni précisé si elles étaient acceptées ou pas. C’est par les employés qu’il a pu savoir quelles activités extérieures étaient le plus souvent Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 12 acceptées ou refusées. Il n’a pas trouvé d’employés dont la demande fut acceptée. La seule chose qui semblait clairement avoir changé est une participation de moins de 25 % dans un bien immobilier. Cependant, dans le cas de M. Clairoux, ou le changement semblait pertinent, la demande n’a pas été acceptée par M. Gagnon (voir pièce S9). Autrefois, c’était clair : on n’avait pas droit aux activités extérieures, comme on peut le voir à la pièce S32. On a parlé de grande ouverture, mais les refus arbitraires ont eu lieu comme autrefois. Au quatrième palier, des explications spécifiques ont été fournies. Par exemple, M. Morneau voulait être un agent d’immeubles s’occupant exclusivement de ventes résidentielles. Il n’est pas intéressé à donner des conseils financiers; il veut vendre des maisons. Il n’aurait pas deux maîtres à servir. Pourquoi le vendeur d’immeubles serait-il différent des vendeurs de piscines, d’autos rares, de bateaux ou d’avions ? On n’en parle pas dans la directive.

Pour celui qui veut faire la comptabilité de son immeuble, il n’y a pas de restriction s’il est propriétaire à plus de 25 %. M. Clairoux a donné cette information à M. Bouthillette, qui l’a communiquée à la gestion. Ce que M. Clairoux veut, c’est de percevoir des loyers, les déposer à la banque, faire des chèques pour les travailleurs qui font des réparations. Il est copropriétaire et veut connaître les entrées et sorties de fonds. Comme citoyen il a l’obligation de présenter sa déclaration d’impôt, comme fonctionnaire il est dangereux pour lui de la vérifier, mais, dans son travail, il ne vérifie pas normalement de T1 et cette éventualité est improbable.

Ce fut la même présentation pour Benoit Guay, qui voulait faire la comptabilité, tenir les livres, préparer les états financiers et les déclarations d’impôt d’une entreprise dans laquelle il aurait une participation de moins de 50 %. À la pièce S15, on lui a répondu que : « Selon le paragraphe 1 des lignes directrices sur les conflits d’intérêts à l’intention des employés de Revenu Canada, le fait que vous ayez une participation dans une entreprise qui soit inférieure à 50 % restreint considérablement votre champ d’action. »

L’agent négociateur a dit à l’employeur, au quatrième palier, que ce sont ses déclarations d’impôt fédérale et provinciale que le fonctionnaire s’estimant lésé veut remplir, pas celle des autres copropriétaires.

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 13 Jacques Duval désire faire la préparation des états financiers d’entreprises, sans préparer les T1 et T2 afférents. Il veut préparer des états financiers seulement pour des petites entreprises une personne veut savoir si elle fait des profits, et est intéressée à connaître à tous les mois les pertes et les profits de son entreprise. Deuxièmement, à quoi servent les états financiers, si ce n’est pour obtenir du crédit de la banque. Ils servent également dans l’analyse qui mènent à vendre des actions et à acheter d’autres entreprises. Des états financiers peuvent exister en dehors de la fiscalité car, s’il ne fait pas de profits, le contribuable n’est pas obligé de faire de déclaration d’impôt, puisqu’il n’a pas de revenus.

M. Bouthillette affirme qu’il n’y a pas de connaissances qui pourraient aider à contourner la loi, sauf si on est un fraudeur. M. Bouthillette ne peut donner de conseils frauduleux car il connaît les conséquences. Toutes les activités suggérées ont pour but d’apporter un revenu d’appoint, les fonctionnaires s’estimant lésés n’ont pas un nombre d’heures extraordinaire à y consacrer. Ces activités ne sont pas reliées au travail.

Si on regarde le titre 8 du chapitre B de la pièce S23, on peut faire des déclarations d’impôt dans certaines circonstances. Lorsqu’on a accès à un dossier avec lequel on est familier, comme dans le cas d’un membre de la famille, d’amis, etc… on a cependant l’obligation d’en aviser son superviseur. Dans le cas de l’employé en cause, il serait obligé de remettre les dossiers au superviseur s’ils lui étaient familiers.

M. Bouthillette explique que M. Lampron a deux beaux-frères, qui ont chacun une entreprise. Il ne veut pas « devenir Samson Bélair », il veut seulement rendre service à des parents qui ont une entreprise. Il aurait la même responsabilité si cette entreprise était la sienne et qu’il en préparait la déclaration d’impôt. Ces entreprises ont quelqu’un d’autre pour tenir leurs livres. De plus, jamais Revenu Canada n’a poursuivi de comptable ou d’avocat, car ce sont leurs clients qui sont responsables de leur déclaration d’impôt.

M. Bouthillette déclare : « Dans mon cas, j’ai expliqué que je veux devenir conseiller gouvernemental, être intermédiaire entre le contribuable et les différents gouvernements à tous les paliers : provincial, municipal et fédéral, incluant Revenu

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 14 Canada. Par exemple, si quelqu’un cherche une subvention pour de la recherche et veut savoir comment la présenter, je vais lui recommander des gens. Je suis connu à Rosemont à travers des activités bénévoles, j’aimerais le faire avec rémunération. »

L’employeur a répondu au grief au quatrième palier. M. Bouthillette déclare ne pas avoir de numéro d’accès à l’information. Le seul accès qu’il a par ordinateur c’est l’accès par e-mail. Il n’a jamais eu d’information confidentielle autre que les dossiers en mains. « De l’information avantageuse cela n’existe pas. » Le service ne serait plus confidentiel. M me Gouin prend des mois à répondre et ne lui dit pas si on lui permet de le faire ou si on le lui refuse, par exemple, au municipal, au provincial et les autres ministères fédéraux.

La quatrième chose que M. Bouthillette a signalé est le traitement qu’on a accordé à un ex-sous-ministre adjoint, en ce qui a trait à l’après-mandat. Il se reporte à la pièce S34, qui a été émise suite à l’annonce qu’un ancien sous-ministre adjoint avait un nouvel emploi avec Richter, Usher & Weinberg. Dans cette note de service, on indique que le Conseil du Trésor a autorisé une réduction de la partie de la restriction des activités d’après-mandat et on demande la collaboration des directeurs et coordonnateurs des opérations.

Au sujet du témoignage de M. Clouthier, M. Bouthillette affirme qu’il n’a jamais reçu de tuyaux sur une façon d’éviter la fiscalité. Les tuyaux honnêtes que pourraient donner les fonctionnaires s’estimant lésés ne sont pas plus susceptibles d’avantager un contribuable que ceux qu’il pourrait recevoir d’une firme comptable.. Pour ce qui est de la tolérance administrative, la vérification se fait deux ans en arrière : en ‘98 on vérifie ‘96. Ce qu’on a décidé de faire en ‘96 n’a pas d’effet en ‘98. M. Bouthillette n’était au courant d’aucune tolérance administrative.

En contre-interrogatoire, M. Bouthillette précise qu’il a eu au moins une dizaine de rencontres avec M me Vincent, il a offert plus de précisions sur des cas particuliers. Il avoue que seule sa demande n’était pas complète, mais que les autres l’étaient, et qu’il n’y avait pas de cachette à l’intérieur de ces demandes.

Le témoin a eu trois rencontres avec la gestion en compagnie d’un collègue syndical, M. Jacques Lajoie. Il affirme que les demandes n’étaient pas hypothétiques. Le syndicat avait fait une enquête à travers le pays et avait reçu 300 réponses et

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 15 commentaires de ses membres qui ont regardé le guide. Chacun des fonctionnaires s’estimant lésés est représentant syndical. Il y avait une cinquantaine de griefs à travers le Québec et l’agent négociateur a choisi neuf cas représentatifs et a préféré choisir ceux de ses représentants pour s’assurer que les griefs se rendent à terme et pour plus de facilité. Selon le témoin, M me Vincent était contente de ne traiter que de neuf griefs plutôt que de cinquante. Le témoin connaissait chacun des représentants, leur situation et pouvait communiquer facilement avec chacun.

M. Bouthillette indique que, aux enquêtes spéciales, les enquêteurs de Douanes et Accise travaillent côte-à-côte avec les vérificateurs-enquêteurs de l’impôt. Ils utilisent les mêmes systèmes informatiques et peuvent accéder aux mêmes informations.

Sur la question des informations privilégiées, le témoin réitère qu’il n’y en a pas, « que le Manuel de l’Impôt explique comment les entreprises doivent être faites. » Il indique que le ministère permet aux contribuables de consulter les « M.O.I. » Au sujet des procédures de vérification, le témoin indique que ce sont les vérificateurs qui décident de la procédure à suivre. Il existe des procédures sur la manière d’insérer les informations dans la machine, faire des rapports, etc… Il y a beaucoup de matériel ou de formules à remplir couverts par les procédures mais la manière de vérifier est déterminée par chacun des vérificateurs.

Concernant son cas personnel, le témoin indique qu’il veut défendre les contribuables qui ne reçoivent pas l’assurance-emploi et qui, d’après lui, y auraient droit. Les gens se présentent aux mauvaises portes et il voudrait les aider. Il précise que le seul rôle des fonctionnaires de l’Impôt est de vérifier dans la Loi sur l’assurance-emploi si un contribuable y est assujetti et doit cotiser, ou il va voir si les compagnies doivent payer la partie de l’employeur.

Le deuxième témoin pour la partie syndicale est Jacques Morneau qui est conseiller technique à la section de l’économie clandestine. Auparavant, il travaillait en vérification comme telle et était responsable du développement du secteur automobile, particulièrement le travail au noir. M. Morneau confirme l’information le concernant dans le tableau à la pièce S26, soit qu’il y a treize ans qu’il travaille à Revenu Canada, qu’il a commencé comme PM-2 aux recouvrements, qu’il a passé cinq

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 16 ans aux enquêtes spéciales, a transité un an comme vérificateur et est devenu conseiller technique. Au moment de son témoignage il est chef d’équipe depuis six semaines.

M. Morneau explique que sa demande, pièce S20, visait à vendre des immeubles résidentiels à temps partiel. Ayant vérifié le Code et constaté qu’il n’y avait pas d’empêchement, il s’attendait à ce qu’on lui dise oui.

Concernant l’accès à de l’information confidentielle, M. Morneau indique qu’il doit se restreindre aux dossiers qui lui sont assignés. Il connaît le terme « tolérance administrative », il pense que c’est un guide émit par Shawinigan au sujet des barèmes de choix de dossiers. Il n’a pas personnellement connaissance des informations liées à la tolérance administrative.

M. Morneau a lu le titre 2 du chapitre B du Code (pièce S23), à la page 21, et a vu « il se peut » comme un terme tellement général. Il ne voit pas de conflits d’intérêts et s’attendait à une réponse positive. Au sujet de la lettre de Patrice Allard (pièce S21), il explique qu’il n’a jamais été question de quelconques conseils fiscaux, il veut faire de la vente, être l’intermédiaire entre celui qui veut vendre sa maison et celui qui en cherche une. Quand il a acheté sa maison, c’est la banque qui a fourni l’hypothèque qui a vérifié sa capacité de payer, pas l’agent d’immeubles.

Son travail n’a aucun lien avec le secteur immobilier, M. Morneau travaille dans le secteur automobile. Il a dénoncé quelqu’un qu’il connaissait en dehors du travail et qui travaillait au noir. Il ne va pas devenir fraudeur du fait qu’il vend des maisons. M. Morneau a été « insulté », « outré » par le témoignage de M. Clouthier, qui se référait au mauvais larron. Il demeure à St-Hubert et joue au hockey le lundi soir; il ne veut pas faire de l’immobilier sur une grande échelle.

En contre-interrogatoire, M. Morneau indique qu’il sait qu’il doit suivre un cours spécialisé pour devenir agent d’immeubles. Il a attendu pour suivre le cours que sa demande soit acceptée. Cela a pris trois mois à avoir une réponse. Il pensait commencer ses activités en janvier 1997.

En ce qui a trait à l’information qu’il pourrait avoir sur des entreprises dans des situations précaires, M. Morneau indique que l’on met en doute son intégrité. S’il était

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 17 malhonnête, il pourrait en faire bénéficier qui il veut car l’information existe présentement.

Le troisième témoin, Gaston Lampron est vérificateur à l’impôt depuis seize ans et demi et travaille à Montérégie - Rive sud. Il a fait du recouvrement au niveau PM-1 et, par la suite, de la vérification comme AU.

M. Lampron explique que sa demande (pièce S17) faisait suite aux changements sur la politique sur les conflits d’intérêts. Son beau-frère et sa femme ont une entreprise, le Groupe Attel Inc. Ils ont un comptable sur place, ils doivent contracter avec quelqu’un de l’extérieur pour faire préparer les T2 et C17. Vu les changements au titre 8 du chapitre B de la pièce S23, M. Lampron croyait qu’on avait ouvert la porte à ce qu’il puisse faire ce travail. Il a un autre beau-frère qui possède Gaumont et Lemire Enregistré, qui, lui aussi, lui a demandé de compléter les rapports d’impôt de son entreprise. M. Lampron aurait eu deux clients qui lui auraient remis une centaine de dollars chacun.

M. Lampron indique que la pièce S24 vient de son bureau et il croyait que son gestionnaire délégué allait accéder à sa demande.

Au sujet de la situation de conflit, si jamais il y avait une irrégularité dans les dossiers d’un de ses beaux-frères, M. Lampron explique que la situation serait la même que s’il faisait la déclaration sans rémunération.

M. Serge Clairoux témoigne qu’il travaille comme vérificateur auprès des grandes entreprises. Il a commencé en juin 1981 comme vérificateur aux dossiers sur place. Le tableau à la pièce S26 reflète bien le profil de ses affectations à Revenu Canada.

M. Clairoux identifie la pièce S8 comme sa demande et explique qu’il avait et a toujours l’intention d’acheter, en copropriété, un immeuble avec quatre ou cinq de ses amis. Il pourrait acheter une part de 20 % et faire la comptabilité. Cette comptabilité consisterait à payer le gaz, l’électricité, les taxes et les divers contractants. Il serait en charge d’inscrire ces montants dans un livre. Au niveau des revenus, il lui incomberait de « collecter les loyers » et de les déposer dans le compte de banque de cette propriété. À la fin de l’année, il ferait le sommaire des revenus et dépenses

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 18 encourues, c’est-à-dire, les états financiers qui seraient par la suite soumis aux autres copropriétaires. Ils verraient ensemble si les montants s’équilibrent et s’ils les acceptent. M. Clairoux pourrait mettre ces états financiers dans sa déclaration d’impôt. Il ne ferait pas la déclaration des autres propriétaires.

Les états financiers sont un sommaire des revenus et des dépenses. Si on doit faire une déclaration, on attache une copie des états financiers. M. Clairoux explique : Je peux réclamer un amortissement sur ma partie de la bâtisse. Les dépenses d’amortissement que je peux choisir ou pas de réclamer sont une question de planification fiscale. En général, plus les revenus sont élevés plus on a intérêt à les réclamer. Les quatre ou cinq autres copropriétaires ont l’obligation de faire leur déclaration d’impôt.

En contre-interrogatoire, M. Clairoux précise que les partenaires possibles sont identifiés et que, en 1997, ils avaient identifié des immeubles à revenus sur lesquels ils auraient pu faire une offre. Ils n’ont pas fait d’offre d’achat car il fallait préparer l’entente sur la mise de fonds et les tâches que chacun accomplirait. Il faut avoir des règlements clairs dans une copropriété, déterminer qui va travailler, le nombre d’heures, qui fait quoi. Dans un groupe, chacun a sa valeur, certain font la peinture, l’entretien, d’autres ont des connaissances utiles; son copain est meilleur en électricité, lui en comptabilité.

Le témoin suivant, Jacques Duval, est à Revenu Canada depuis le 5 janvier 1981. Il est vérificateur informaticien depuis un an, il a été vérificateur d’impôt durant sept ans et a occupé divers autres postes pendant dix ans. Il a débuté comme cotiseur, à vérifier les déclarations des contribuables non-incorporés. Il est comptable général agréé (CGA) depuis 1990.

M. Duval identifie la pièce S11 comme sa demande. Il a un titre de comptable et aimerait l’utiliser à autre chose que l’impôt, c’est pourquoi il aimerait faire des états financiers. Il ne veut pas faire de comptabilité ni de tenue de livres mais seulement les états financiers pour les petites entreprises, comme le dépanneur du coin.

Le témoin introduit en preuve le chapitre 10 du manuel de l’Institut canadien des comptables agréés (ICCA) (pièce S35). Le chapitre 10 dit ce qu’implique dresser ou monter des états financiers. M. Duval a un logiciel avec lequel il est très facile de le

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 19 faire, il n’a qu’à reporter les chiffres dans un ordre suggéré par l’ICCA. Les états financiers doivent être signés par le client et par la personne qui les a préparés, dans son cas « Jacques Duval, CGA » serait indiqué. Il voudrait faire un commerce d’états financiers, il croit qu’il y a un gros marché pour cela. Certaines petites entreprises doivent fournir des états financiers aux banques aux trois mois, d’autres en ont besoin pour savoir comment va leur affaire. Les états financiers ne servent pas comme tels pour les déclarations d’impôt; le comptable doit effectuer un nombre d’opérations pour produire des états financiers à soumettre à Revenu Canada. Il doit additionner des choses et en retrancher d’autres, ce qui fait appel à des connaissances fiscales. Les états financiers que M. Duval veut préparer sont un report de chiffres, le portrait financier d’une entreprise.

M. Duval a demandé à son surveillant de ne pas assister aux sessions sur la mise à jour de la Loi de l’impôt sur le revenu et ne voit pas en quoi faire des états financiers aurait quelque chose à voir avec son travail actuel. Il s’assurerait n’avoir rien à faire dans le contexte de son emploi avec les compagnies pour lesquelles il aurait dressé des états financiers. Il n’a trouvé aucune mention dans le Code (pièce S23) on disait qu’on ne pouvait dresser des états financiers. En terme général, il n’envisage pas de faire des « balances de vérification ». Dresser des états financiers c’est reporter des chiffres aux bons endroits, cela ne prend pas de temps car le client arrive avec ses livres et le comptable utilise un logiciel à cet effet. Comme CGA, M. Duval est régi par un code de déontologie.

En contre-interrogatoire, M. Duval mentionne qu’il avait indiqué le 1 er janvier 1997 pour commencer ses activités car beaucoup de petites entreprises alignent leur année financière sur l’année civile et, au 1 er janvier, beaucoup de propriétaires de petites entreprises ont besoin d’un bilan. Il indique qu’il y a beaucoup de teneurs de livres mais peu de gens capable de faire des états financiers. Il ne veut pas faire des états financiers vérifiés, et l’exactitude des livres ne lui est pas imputable, car c’est le client qui signe et qui en est responsable. Si l’entreprise se faisait vérifier par Revenu Canada, M. Duval se trouverait dans la même situation que s’il préparait des états financiers pour la famille sans rémunération. Il soutient qu’il va refuser de faire des états financiers pour fins fiscales. Il indique que les dépenses fiscales sont différentes des dépenses réelles; il donne l’exemple de l’achat de 1 000 $ de madriers, qui est une dépense réelle, mais qui peut aussi être considéré comme un Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 20 investissement en capital. Il sera inscrit au bas des états financiers que ces derniers sont pour des fins comptables et non fiscales.

M. Benoit Guay travaille à Revenu Canada depuis juin 1981 : comme vérificateur sur route de 1981 à 1984, un an comme enquêteur spécial, un an et demi aux enquêtes criminelles, de 1985-1986 à 1989 aux enquêtes spéciales, il a eu des promotions et est retourné à la vérification de 1991 à 1994 et, depuis la fin de 1994 début 1995, il est conseiller technique à la vérification.

M. Guay identifie la pièce S14 comme sa demande et explique que son beau-frère voulait lancer une entreprise de serveurs sur l’internet et l’avait approché pour gérer l’entreprise et en faire la comptabilité. Il avait également besoin d’investissement. Les clients paient un montant mensuel pour ce service. L’entreprise existe depuis avril 1997, sans la participation du témoin, car son beau-frère s’est vu dans l’obligation d’embaucher quelqu’un de l’extérieur. M. Guay ne pouvait investir de grosses sommes, d’où la raison d’une participation de moins de 50 %. Au début, il aurait fait la comptabilité sans rémunération mais, si l’entreprise avait pris de l’ampleur et nécessité de sept à dix heures de travail par semaine, il aurait demandé une rémunération. M. Guay a déjà participé à deux projets, dont le premier fut l’achat d’un immeuble par une société par actions, dans laquelle son épouse et son beau-frère participaient. La participation de M. Guay était de 15 % et celle de son épouse, de 35 %. À cette occasion, il avait présenté une demande qui avait été acceptée.

M. Guay aime faire la comptabilité mais ne veut pas faire de déclarations d’impôt. Il est trésorier de trois associations de base-ball, il fait leur comptabilité. Il aide Distribution Source de Vie Humanitaire Inc. en supervisant la tenue de livres. Il est instructeur au base-ball et père de cinq enfants et, en hiver, participe aux activités de son agent négociateur à temps perdu. Il a peu de temps. Il avait fait, en 1995, une deuxième demande, qui avait été approuvée par M. Martineau; il s’agissait d’une affaire avec deux de ses frères, il possède 25 % des actions. Ils avaient acquis douze immeubles, comptant 57 locataires, et il en fait la comptabilité, jusqu’aux états financiers. Il fut surpris d’apprendre qu’on n’avait plus de copie de sa première demande.

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 21 M. Guay a été membre de la Corporation professionnelle des comptables en management accrédité du Québec (CMA) de 1981 à 1997; il a été radié en février 1997, lorsqu’il a cessé de leur envoyer les 700 $ de cotisation annuelle. M. Guay explique qu’il a étudié la comptabilité au CÉGEP pendant trois ans et qu’il a obtenu deux certificats en comptabilité à l’Université du Québec à Montréal en 1979.

M. Guay s’est senti insulté des remarques de M. Clouthier, qu’il considère une attaque contre son intégrité. Lorsqu’il s’est associé à son frère, en 1995, il s’est assuré que la comptabilité soit en règle pour n’avoir aucun conflit fiscal. La femme de M. Guay ne travaille pas, ils ont cinq enfants, il n’est pas prêt à perdre son emploi. Sa deuxième demande, ayant trait aux immeubles, a été autorisée même si sa participation ne s’élevait qu’à 25 % : l’ampleur de sa participation ne change rien à ce qu’il s’assure que « les livres soient montés conformes » pour tous les paliers de gouvernement. Comme membre actif de son Église, M. Guay doit « rendre à César ce qui est à César », mais considère avoir les mêmes droits que tout autre contribuable.

En contre-interrogatoire, M. Guay précise que sa participation projetée à l’entreprise de serveurs de son beau-frère vacillait entre 15 et 35 %, tout dépendant d’une mise de fonds de 1 000 $ à 5 000 $, plus la comptabilité. Il fallait faire une demande de lignes téléphoniques et il est possible que, à la fin, sa participation aurait pu atteindre 50 %, mais il en doute. Son beau-frère a rejeté sa participation quand il a su qu’il ne pouvait pas faire la comptabilité. Au début, M. Guay prévoyait consacrer une ou deux heures semaine à cette entreprise car, avec ses connaissances et l’ordinateur, la comptabilité aurait été très facile à faire. Pour quelqu’un d’autre, n’ayant pas les connaissances, c’est plus long, plus compliqué.

M. Guay a rédigé la pièce S14 et son directeur ne lui en a jamais parlé avant de lui répondre.

Le dernier témoin des fonctionnaires s’estimant lésés, M. Pierre Chartrand, est à Revenu Canada depuis huit ans; il indique que le tableau à la pièce S26 décrit bien son parcours. À partir de 1990, il a été vérificateur AU à Douanes et Accise et, en 1995, il est passé à l’Impôt comme vérificateur d’impôt, AU-3. Il reconnaît la pièce S5 comme sa demande à M. Gagnon de faire des T1 au provincial et au fédéral pour des particuliers. Son intention n’était pas de concurrencer les bureaux de comptables

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 22 mais d’accéder aux demandes de sa famille et de ses amis et d’avoir un revenu d’appoint.

Comme AU-3, M. Chartrand effectue la vérification des corporations dont le chiffre d’affaires varie entre 15 et 400 millions de dollars. Ce sont des sociétés par actions. Il se peut que M. Chartrand vérifie certains actionnaires, mais il n’est pas dans son mandat de vérifier les particuliers.

Depuis 1995, Douanes et Accise et l’Impôt forment un seul ministère. Avant 1995, M. Chartrand était autorisé à faire des déclarations d’impôt et, présentement, les employés de Douanes et Accise en ont encore la permission, même s’ils ont accès aux mêmes informations que M. Chartrand, dans le même immeuble. M. Chartrand a un code d’accès à Douanes et Accise, au même système informatique, comme les fonctionnaires de Douanes et Accises ont un code d’accès à l’Impôt.

M. Chartrand visait à faire un total de 15 à 20 déclarations par année, soit à raison de deux ou trois heures semaine durant la période de janvier à avril, pour des personnes qu’il connaissait. Il ne ferait pas de déclarations pour des corporations. Le témoin perçoit la deuxième partie de la pièce S24(b) comme un élément de souplesse lui permettant cette activité puisque, dans son cas, son travail consiste à vérifier les corporations.

M. Chartrand indique qu’il n’a aucune information ou connaissance quant à la tolérance administrative.

En contre-interrogatoire, M. Chartrand précise que ses clients potentiels étaient tous des salariés ou des professionnels. Avec un ordinateur, on insère les donnés et on peut créer des déclarations provinciales et fédérales et il avait l’intention de procéder ainsi.

Plaidoiries Pour les fonctionnaires s’estimant lésés M. Quesnel rappelle qu’il faut se placer dans le contexte général des rapports entre les employés et la gestion. Il note une remarque importante de M. Clouthier, seul témoin patronal, qui démontre la conception que l’employeur a de ses employés.

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 23 M. Clouthier nous dit que tous et chacun des vérificateurs qui ont présenté une demande sont des experts dans le domaine comptable et dans le domaine fiscal. Il fait, une distinction entre les deux. M. Quesnel dit que les témoins des deux côtés ont établi des distinctions au niveau conceptuel; il y a des différences significatives entre la comptabilité, la tenue de livres, la préparation d’états financiers et aussi, plus particulièrement, la fiscalité - et que la fiscalité est un domaine autonome et indépendant. Il souligne que le témoin Duval a déposé la pièce S35 à l’appui de son raisonnement et que le témoignage de M. Duval faisait une distinction entre la préparation d’états financiers destinés à des fins fiscales et celle d’états financiers destinés à des fins autres, soit des fins comptables. Les témoins ont dit que ce dernier exercice était différent de la préparation d’états financiers destinés à des fins fiscales. Il doit y avoir une conciliation entre les états financiers annuels d’une entreprise et ceux qui sont préparés sur une base ponctuelle, pour dépôt auprès d’une banque par exemple, et en règles fiscales; des normes différentes s’appliquent, tout dépendant du cas.

M. Quesnel m’invite à une lecture approfondie de la pièce S23, plus particulièrement des titres signalés. On voit bien que, tout au long du texte du chapitre B, aux pages 19 et 20 du Code (pièce S23), on ne traite pas des matières vedettes de la comptabilité ou de la fiscalité. Ce n’est que dans la suite offerte à la brochure, du bas de la page 20 jusqu’à la page 24, que l’on voit d’une façon passablement évidente qu’il y a plusieurs concepts différents.

La pièce S23, émanant du Conseil du Trésor, qui est l’employeur en l’espèce, vient corroborer l’analyse faite par les témoins des fonctionnaires s’estimant lésés, à l’effet qu’il y a des distinctions importantes au niveau sémantique et au niveau de la terminologie. De plus, le témoignage de M. Duval est corroboré par la pièce S35. Toujours au niveau du contexte, et de façon prépondérante, il se dégage du témoignage de MM. Clouthier et Bouthillette que les vérificateurs, en plus d’être des experts comptables, sont appelés à traiter de dossiers spécifiques, soit ceux des grandes entreprises. Lorsque M. Quesnel a demandé à M. Clouthier s’il s’agissait de dossiers complexes, ce dernier a acquiescé. De plus, les individus qui ont à prendre des décisions dans les dossiers des grandes entreprises sont des professionnels accrédités lorsque le cas est pertinent, soumis à une corporation professionnelle et, de ce fait, aux obligations éthiques que leur impose cette dernière. M. Quesnel retient de Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 24 ces témoignages que, lorsqu’on parle des dossiers dont on effectue la vérification, il s’agit de dossiers d’entreprises, ayant un chiffre d’affaires de plus de 15 000 000 $, et qui sont des corporations. Exceptionnellement, les vérificateurs ont affaire à des contribuables et à des particuliers ayant un lien direct avec l’entreprise faisant l’objet de la vérification, par exemple ses actionnaires. L’employeur a voulu faire une distinction à l’égard de ce fait en présentant des hypothèses plus saugrenues les unes que les autres; sa démarche est tendancieuse et porte à conclure que, d’une corporation à l’autre, il n’y a pas de distinction et que des avantages accordés à leurs employés devaient être vérifiés. Ce n’est pas la façon d’aborder cette question.

La pièce S23 est certainement utile, mais les griefs sont évidemment présentés en vertu de la convention collective. Les fonctionnaires s’estimant lésés ont droit à un traitement non discriminatoire. Lorsqu’on veut faire des exceptions, on doit être en mesure de les justifier.

À la clause 13.01 de la convention collective, intitulée Restrictions concernant l’emploi à l’extérieur, on lit : 13.01 Sauf s’il s’agit d’un domaine désigné par l’employeur comme pouvant présenter un risque de conflit d’intérêts, les employés ne se voient pas empêchés d’exercer un autre emploi hors des heures aux cours desquelles ils sont tenus de travailler pour l’employeur.

Pour les fonctionnaires s’estimant lésés, la règle est qu’ils ne se voient pas empêchés de travailler à l’extérieur. Le document T4140F (pièce S23), à la page 10, traite des activités extérieures. Est-ce qu’il s’agit d’un document qu’il faut adjoindre à la convention collective ? Dans l’affirmative, il faut bien lire le Code. Comment aborde-t-on la question ? M. Quesnel attire l’attention au paragraphe 26, intitulé Activités extérieures. Est-ce que les titres nous lient ou sont-ils simplement indicatifs ? M. Quesnel allègue que le texte du paragraphe 26 prévaut sur son titre. Ce paragraphe se lit : 26.*Les employés peuvent occuper un emploi extérieur ou participer à d’autres activités à moins que cet emploi ou ces activités risquent d’entraîner un conflit d’intérêts. Ils doivent présenter à l’administrateur désigné un rapport confidentiel des activités extérieures qui pourraient les soumettre à des exigences incompatibles avec leurs fonctions officielles ou remettre en question leur capacité

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 25 d’accomplir les devoirs de leur charge en toute objectivité. L’administrateur désigné peut exiger que ces activités soient réduites, modifiées ou abandonnées s’il a été déterminé qu’il existe un risque réel ou potentiel de conflit d’intérêts.

Ces risques doivent être réels ou potentiels. S’agit-il d’une qualification des activités ou de l’exercice d’un droit ? La détermination prévue au paragraphe 26 doit être justifiable. Toujours dans le contexte, il réitère que le Code ne peut être vu que comme une norme de discipline. Le non-respect de ces dispositions entraîne une sanction. On verra plus tard le type de cette sanction.

À la Fonction publique, dans les décisions McKendry (Dossier 166-2-674), Fraser et Skinner (Dossiers s 166-2-25464 et 25465) et Coté (Dossiers s 166-2-19604, 19605 et 20866), il était question de mesures disciplinaires. On avait enfreint la norme sur les conflits d’intérêts, les lignes directrices, les mesures supplémentaires de Revenu Canada, telles qu’elles figurent à la pièce S32. M. Quesnel indique que personne n’a enfreint la norme sur les conflits d’intérêts ici. Cela n’empêche pas de référer à des décisions à l’effet qu’enfreindre ces normes peut entraîner des peines disciplinaires allant jusqu’au licenciement.

M. Quesnel m’a invitée à lire l’article 50 de la Politique du Conseil du Trésor sur les conditions d’emploi. Les critères que contiennent des normes de ce genre doivent être clairs, pour ne pas dire limpides. Ils doivent être non équivoques. Pourquoi ? En principe, les normes de discipline sont distribuées aux employés et ils se doivent de les avoir entre les mains. Ce sont les fonctionnaires s’estimant lésés les premiers concernés, à cause de leurs fonctions à Revenu Canada, ils sont les mieux informés, et c’est eux qui doivent exercer leur jugement. Ils doivent faire la part des choses et ne pas obliger les gestionnaires à répondre à des demandes capricieuses. La conséquence de tout cela, si on regarde le paragraphe 26, ou la pièce S24, plus particulièrement S24(b), dans laquelle on nous dit : ... Votre gestionnaire délégué tiendra compte des principes de base énoncés dans ce document (particulièrement les pages 4, 5, 19 et 20) afin de s’assurer qu’il n’y a pas de conflit d’intérêts réel, potentiel ou apparent. Votre gestionnaire délégué évaluera chaque cas selon son mérite.

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 26 est une étude cas par cas. Cette formulation et la modification au titre 8 du chapitre B de la pièce S23 permet de concevoir et de renforcer la prétention des fonctionnaires s’estimant lésés à l’effet que les titres 1 à 10 ne sont que des exemples. M. Clouthier a déclaré « c’est non limitatif, c’est relatif » lorsqu’il réfère au titre 2. Quand on lit la pièce S24(b) et qu’on regarde la directive de M. Bastien à la pièce S24(a), on ne peut qu’arriver à la conclusion qu’on aurait inscrire la modification à l’intérieur du livret S23. À deux reprises, la modification n’a pas été faite dans les livrets. La pièce S24(b) réfère aux principes de base apparaissant au paragraphe 6 de la page 4, seul point intitulé « principe », qui couvre les pages 4 et 5. Toujours à la pièce S24(b), on se reporte aux pages 19 et 20 du chapitre B de la pièce S23, et le tout s’arrête à la page 20. Prétendre que les exemples ne sont pas relatifs et indicatifs, et insinuer ce qui est à la page 24 de la pièce S23, crée une tautologie c’est-à-dire que l’argument se justifie par référence à lui-même. Le témoin Clouthier est venu confirmer la position des fonctionnaires s’estimant lésés face à cet instrument de gestion. M. Bouthillette a consacré plusieurs heures pour tenter d’obtenir la modification de cet outil de gestion. Si on se place dans le contexte de l’interprétation et de l’application d’une norme si impérative, ce sont les principes à la page 20 de la pièce S23 qui comptent et le language utilisé se lit : Par conséquent, on peut dire qu’il y a conflit d’intérêts dans l’une ou l’autre des situations suivantes :

vos biens, vos affaires ou vos intérêts vous placent dans un conflit réel, potentiel ou apparent avec vos fonctions officielles;

votre jugement est influencé de telle façon qu’il vous est impossible d’agir dans le meilleur intérêt de la fonction publique.

S’il vous faut traiter le dossier d’un client, d’un concurrent, d’un fournisseur ou d’un associé, vous devez en aviser votre superviseur. Lorsque vous ne savez pas si une situation donnée peut entraîner un conflit d’intérêts, vous devez remettre un rapport écrit à votre gestionnaire délégué. De plus, vous devez toujours avoir votre situation à l’esprit, et procéder à des divulgations supplémentaires si nécessaire (consulter l’article 8 du Code).

Il est important de noter qu’on y parle du jugement. Maintenant, quand M. Clouthier mentionne que « l’occasion fait le larron », il accorde de l’importance au

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 27 jugement du laron. Les motifs pour limiter l’exercice d’activités extérieures doivent être fournis dans chaque cas; l’employeur doit faire la démonstration d’un risque potentiel ou d’un risque réel. L’ensemble de la preuve n’a révélé ni la démarche, ni les motifs, ni la justification du rejet des demandes présentées par les fonctionnaires s’estimant lésés. L’employeur a choisi de ne pas faire témoigner les gestionnaires délégués qui ont pris les décisions. Les fonctionnaires s’estimant lésés allèguent que, dans chaque cas, l’exercice d’évaluation d’une demande doit être tenu selon le critère de la personne bien informée. Comment pourrait-on prendre une décision sans être bien informé ? Dans les cas présents, le gestionnaire délégué doit être informé des tâches et des fonctions du vérificateur impliqué et de la démarche qu’il veut entreprendre. Cela implique de revoir les tâches et les affectations du fonctionnaire en question. Tous les fonctionnaires sont venus témoigner sur les grandes lignes de leurs tâches et de leurs affectations. Le gestionnaire délégué doit être également bien informé de la norme de décision. Les fonctionnaires s’estimant lésés ont démontré qu’ils comprennent la norme, en autant qu’elle soit intelligible, et leurs demandes d’autorisation étaient accompagnées d’assurance, ce qui est significatif et porteur de gage, tel que confirmé par M. Clouthier. Ces assurances, se retrouvent dans chacune des demandes présentées par les fonctionnaires s’estimant lésés et M. Quesnel prend celle de M. Chartrand comme exemple il est écrit : [...] Il est important ici de préciser que pour l’exercice de cette activité, je n’utiliserai, en aucune occasion, les biens mis à ma disposition ainsi que les renseignements officiels obtenu [sic] en raison de mes fonctions.

Je verrai également à ce que ces activités extérieures ne nuisent en rien à ma disponibilité ou à mon efficacité dans l’exercice de mes fonctions.

Du même coup, il est évident que jamais je n’annoncerai ou ferai savoir publiquement que je travaille pour Revenu Canada dans le but d’obtenir des contrats ou de favoriser mes affaires.

Je ferai preuve d’honnêteté, d’objectivité et d’impartalité [sic], dans la conduite de mes affaires personnelles. Ainsi, si je dois traiter le dossier d’un de mes clients, j’en aviserai mon superviseur immédiatement.

[...] Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 28 Il est important de noter que, selon M. Chartrand, il s’agit d’une activité saisonnière, c’est-à-dire un total de 15 à 20 déclarations de particuliers, au niveau provincial et fédéral, qu’il avait l’intention de faire sur une base annuelle et il avait bien précisé qu’il n’utiliserait pas les biens de l’employeur et qu’il verrait à ce que cela ne nuise pas à sa disponibilité et son efficacité en tant que vérificateur de Revenu Canada. Il faut préciser, et c’est le bât blesse, que, s’il n’y avait pas rémunération, l’activité serait permise. Dans les cas qui nous intéressent, toutes les assurances sont données de ne pas ternir l’image de l’employeur de ne pas s’annoncer publiquement. Dans la réalité, les fonctionnaires s’estimant lésés sont prêts à se désister des dossiers qui pourraient être reliés à leurs activités extérieures. Dans le cas de M. Guay, c’est lui qui a été obligé de ressortir de ses propres dossiers les autorisations obtenues dans le passé. Il est surprenant que, dans une situation pouvant ternir l’image de l’employeur de façon aussi dramatique, celui-ci n’ait pas conservé copie des autorisations qu’il a accordées. S’il y avait eu un changement de directeur, le fonctionnaire s’estimant lésé aurait pu se voir congédié. Les gestionnaires n’ont pas tenu compte des faits, c’est ce qui se dégage de la preuve documentaire, qui est la meilleure preuve : des documents supportés par le témoignage des fonctionnaires s’estimant lésés, au sujet desquels on a plutôt entendu des éloges et dont les dossiers sont irréprochables. Les gestionnaires délégués qui ont pris les décisions sur les demandes présentées par les fonctionnaires s’estimant lésés n’ont pas suivi l’approche de M. Clouthier; ils ont copié des exemples en porte-à-faux. Par exemple si on compare les motifs énoncés à la pièce S21, la réponse que Patrice Allard a donnée à la demande de M. Morneau, au texte de la pièce S23, plus particulièrement à la page 2 (en bas) et à la page 22, on s’aperçoit que le texte de la pièce S21 reprend celui de la pièce S23. ... il se peut que vous vous trouviez en conflit d’intérêts, réel ou potentiel, pour les raisons suivantes:

Lorsqu’il donne des conseils financiers ou des conseils en placement, le vendeur renseigne quelquefois sur les conséquences fiscales de placements. Si vos clients savaient que vous êtes un employé de Revenu Canada, ils pourraient s’attendre à recevoir des conseils fiscaux judicieux, et pourraient être portés à considérer la situation comme avantageuse.

L’alinéa 80e) de la Loi sur la gestion des finances publiques exige de tout percepteur, gestionnaire ou ordonnateur de fonds publics qui savent qu’il y a eu

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 29 infraction aux dispositions de cette loi, ou de toute autre loi concernant les revenus, qu’ils signalent les fraudes dont ils connaissent l’existence. S’ils ne le font pas, ils s’exposent à une pénalité importante.

Ainsi, lorsque vous examinez la situation financière de vos clients, afin de déterminer les sommes qu’ils pourraient placer, il se peut fort bien qu’ils vous communiquent des renseignements qu’ils n’auraient pas révélés à Revenu Canada. Vous pourriez alors avoir à choisir entre votre loyauté envers vos clients et celle envers le Ministère laquelle consiste en l’obligation de signaler les fraudeurs de l’impôt.

Le public pourrait mal comprendre une situation donnée, puisque vous avez la possibilité, comme employé, d’accéder à des renseignements ministériels confidentiels.

Selon M. Quesnel, voilà une bonne illustration de la langue de bois. Peut-on considérer cela comme une justification? La réponse ne fait aucune référence à la situation de M. Morneau. Il y a absence de référence aux particularités du cas Morneau. De plus, M. Morneau a confirmé que personne ne l’avait approché pour faire une évaluation de son dossier ou pour en débattre. M. Morneau n’est peut-être pas aussi occupé que M. Guay, mais l’activité qu’il entendait poursuivre était la vente, à temps perdu, d’immeubles résidentiels. Rien n’indique que son superviseur ait été intéressé à le savoir.

M. Quesnel allègue que l’employeur encourage des stéréotypes, des réponses générales qui, en elles-mêmes, constituent des erreurs grossières. Dans le cas de M. Clairoux, le fonctionnaire s’estimant lésé voulait, et veut toujours, faire la comptabilité relative à ses intérêts dans un bien locatif et on lui répond, à la pièce S9 : Je vous informe qu’en vertu du Code sur les conflits d’intérêts et l’après-mandat s’appliquant à la Fonction publique vous ne pouvez, avec ou sans rémunération faire la comptabilité, tenir les livres, préparer des états financiers et les déclarations d’impôt d’un bien immobilier dont vous possédez une participation de moins de 25%.

Le Code (pièce S23), dans ses 20 premières pages, ne mentionne rien de cela. En fait, la seule déduction à laquelle on puisse en venir est que l’activité extérieure recherchée par M. Clairoux est permise parce qu’elle n’est pas interdite. Sous l’effet d’une interprétation erronée du texte, qu’on ne peut s’expliquer, le gestionnaire délégué n’a

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 30 pas analysé la demande : il a donné une réponse stéréotypée et erronée, du fait qu’elle n’est pas justifiée. L’employeur ne peut maintenant prétendre que l’activité est interdite. En fait, la demande a été confirmée par le témoignage du témoin Clairoux et appuyée par MM. Bouthillette et Clouthier.

Dans le cas de M. Guay, l’employeur l’avait déjà autorisé à effectuer la comptabilité d’une entreprise dans laquelle lui et son épouse détenaient une participation de 50 % (lui 15 % et son épouse 35 %); il avait donné des assurances et il avait démontré comment il comprenait ses obligations. La réponse qui a été donnée à la demande faisant l’objet de son grief est confuse, comme on peut le voir à la page 1 de la réponse qu’il a reçue (pièce S15). Cette réponse est arbitraire : les circonstances de cette demande n’ont pas été étudiées; on ne fait pas référence à l’activité recherchée; et la réponse est ambiguë.

La preuve démontre que la préparation d’états financiers n’a aucun lien avec l’aspect fiscal. Personne n’est venu contredire M. Duval sur la partie de son témoignage traitant des états financiers. Dans ce cas, comme dans le précédent, personne n’a tenu compte des assurances que les fonctionnaires s’estimant lésés avaient données à l’appui de leurs demandes. L’employeur n’a pas présumé de leur bonne foi. Il a présumé de leur mauvaise foi. Il a repris le mot-à-mot de la réponse à la demande de M. Guay. M. Guay n’a pas été rencontré par M. Dextraze, qui n’a pas cherché à obtenir plus d’informations. Comment le gestionnaire délégué peut arriver à une conclusion autre que négative sans chercher des détails plutôt que de se reporter à des exemples qui ne servent pas à grand chose. Que la participation baisse à 24 % ou 49 %, qu’est-ce que cela change ? Rien - sauf la notion de contrôle qui ne s’applique pas vraiment.

La réponse donnée à la demande de M. Chartrand se retrouve à la pièce S6. Le gestionnaire a mal interprété les exemples donnés dans le Code (pièce S23), il n’a pas tenu compte du titre 8 du chapitre B, qui a été amendé par la pièce S24(b). Il ne dit pas sur quoi il base sa décision; il se réfère aux modifications, sans tenir compte de l’ouverture qu’elles introduisent. M. Chartrand ne vérifie pas les dossiers de contribuables, mais, ceux de grandes entreprises. La réponse à sa demande est donc arbitraire.

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 31 Dans le cas de la réponse donnée à la demande de M. Lampron, que l’on trouve à la pièce S18, le gestionnaire s’est servi de la page 24 du Code pour donner une réponse stéréotypée; ça aussi est arbitraire. D’après le témoignage de M. Clouthier sur les renseignements confidentiels, et selon la pièce S25, qui traite des conditions sur l’utilisation des informations confidentielles, il est évident que l’accès aux renseignements confidentiels est contrôlé de façon aléatoire par sondage mais aussi de façon directe : il y a des registres auxquels les fonctionnaires ne peuvent accéder que dans le traitement de leurs dossiers.

Tous les fonctionnaires s’estimant lésés ont donné l’assurance que, si des éléments pouvant donner lieu à des conflits d’intérêts se présentaient, ils iraient voir le directeur ou demanderaient à leur superviseur de changer de dossier. L’article 80e) de la Loi sur la gestion des finances publiques crée une infraction criminelle de l’utilisation frauduleuse des informations confidentielles et l’utilisation de ces renseignements peut mener jusqu’au licenciement.

M. Quesnel est d’avis qu’il n’y a eu que des références à des avis juridiques comme informations confidentielles. L’ensemble des témoins a confirmé qu’ils utilisent toujours les opinions juridiques en relation avec des dossiers que les vérificateurs doivent traiter. Il faut noter l’incapacité de M. Clouthier de dire pourquoi il est si important de contrôler les avis juridiques donnés dans le passé. Ils ne peuvent être utiles pour l’avenir. L’ensemble des fonctionnaires s’estimant lésé a assuré qu’ils ne révéleraient pas ces informations dans le cadre des activités extérieures qu’ils recherchent.

L’employeur a prétendu que, depuis la fusion de Douanes et Accise et Revenu Canada Impôt, la pièce S23 ouvrait la porte à une plus grande ouverture de la politique sur les conflits d’intérêts. Il n’y a eu aucune démonstration concrète d’une telle ouverture.

Les pièces S2 et S4 démontrent la démarche de M. Bouthillette. L’employeur a pensé, à tort, que M. Bouthillette voulait faire de la planification financière. Il veut agir à titre d’intermédiaire. Personne n’est venu le voir. M. Clouthier répond que l’occasion fait le larron et qu’on ne peut servir deux maîtres à la fois. L’employeur a

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 32 attaqué l’intégrité des fonctionnaires s’estimant lésés. M. Morneau est offusqué de faire l’objet d’une présomption de malhonnêteté.

Aucun des fonctionnaires s’estimant lésés n’a connaissance d’une pratique de tolérance administrative. Par contre, bien qu’il y ait des garde-fous partout, la gestion reste campée dans ses vieilles attitudes.

M. Quesnel poursuit que, pour ce qui est de la position que prend l’employeur dans le cas des agents d’immeubles, le gros bon sens mène à s’interroger sur la position qu’il prend vis-à-vis les vendeurs d’objets de luxe. Selon l’employeur, l’agent d’immeubles résidentiels tomberait dans le panneau de l’attrait du luxe ou du blanchiment d’argent - c’est ridicule. Les gestionnaires n’ont motivé aucune des réponses qu’ils ont données aux demandes présentées par les fonctionnaires s’estimant lésés. L’employeur cultive une certaine image : il « démonise » les vérificateurs, mystifie la comptabilité et les règles fiscales, ne fait aucune évaluation des circonstances individuelles et n’interprète pas les règles en faveur des fonctionnaires. La coïncidence d’entreprendre les activités extérieures recherchées le 1 er janvier 1997 s’explique par le fait que la démarche était coordonnée par les fonctionnaires s’estimant lésés pour donner la chance à la gestion de traiter de leurs demandes dans le cadre d’une réponse globale à la problématique que représentaient les changements dans la politique concernant les conflits d’intérêts. Cette approche se fondait sur la conviction que chaque demande aiderait à en régler d’autres. L’employeur a cependant préféré traiter la situation de façon stéréotypée, ce qui ne règle pas la problématique.

Pour l’employeur M e Arcelin a décidé, dans un premier temps, de répondre aux arguments des fonctionnaires s’estimant lésés. D’abord, il soumet que la tenue de livres et les états financiers font partie de la comptabilité et sont intimement liés à cette dernière.

En réponse à l’allégation selon laquelle le Code régissant les conflits d’intérêts (pièce S23) est une norme de discipline, M e Arcelin soutient que nous ne faisons pas face à une forme de mesure disciplinaire imposée, conséquemment il n’y a pas lieu de lire l’article 50 de la Politique du Conseil du Trésor sur les conditions d’emploi. Il

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 33 s’agit de domaines désignés et non de mesure disciplinaire. La mesure disciplinaire survient seulement s’il y a contravention au Code.

Au sujet des pièces S24(b) et S23, les fonctionnaires s’estimant lésés prétendent que les mesures supplémentaires arrêtent à la fin de la page 20 et se basent sur la pièce S24(b) pour tirer cette conclusion. L’employeur renvoit à la clause 13.01 de la convention collective, qui mentionne des domaines désignés et allègue que les domaines désignés sont énumérés à partir de la page 20. Il est vrai que la pièce S24(b) fait référence aux principes de base relatifs aux domaines désignés. Contrairement aux prétentions des fonctionnaires s’estimant lésés sur le témoignage de M. Clouthier, il est clair que les titres 1 à 10 du chapitre B de la pièce S23 sont des exemples et que ces exemples font partie des lignes directrices.

L’employeur n’accepte pas le raisonnement développé dans la décision Fraser et Skinner (supra), à l’effet qu’il est nécessaire de donner des motifs pour rejeter les demandes. L’employeur a choisi de ne pas faire témoigner les gestionnaires délégués parce que le fardeau de la preuve repose sur les fonctionnaires s’estimant lésés. Bien que les parties aient convenu que M. Clouthier témoignerait, au nom de l’employeur, avant les témoins des fonctionnaires s’estimant lésés, le fardeau de la preuve incombe toujours à ces derniers. Contrairement à ce qu’avancent les fonctionnaires s’estimant lésés, il n’y a aucune preuve que les gestionnaires délégués n’étaient pas bien informés des demandes qui leur ont été présentées.

En ce qui concerne les assurances données par les fonctionnaires s’estimant lésés, il est vrai qu’ils en ont tous données, mais elles ne diminuent pas les risques de conflits potentiels. Il n’y a aucune garantie à cet effet-là.

Au sujet des informations confidentielles, il est en preuve que les vérificateurs ont accès à une panoplie d’informations confidentielles. Il est vrai que les vérificateurs ne doivent avoir accès qu’aux renseignements nécessaires au traitement des dossiers sur lesquels ils travaillent, mais ils ont la possibilité d’accéder à d’autres dossiers et les contrôles sont limités.

Pour ce qui est des attaques contre l’intégrité des fonctionnaires s’estimant lésés, celle-ci n’est pas en jeu; l’employeur veut simplement limiter les possibilités de conflits potentiels, réels ou apparents.

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 34 En ce qui concerne l’allégation de perte de documents et le fait que la pièce S24(b) n’est pas toujours jointe à la pièce S23, la bonne foi se présume. Il est vrai que M. Guay a remettre à son gestionnaire une copie de l’autorisation d’exercer certaines activités qu’il avait reçue dans le passé, mais le fait que le gestionnaire ne l’ait pas conservée ne prouve pas que l’employeur ne l’avait pas fait.

Pour ce qui est de la tolérance administrative, M. Chartrand a confirmé son existence en contre-interrogatoire. M. contre-interrogatoire ne pas la connaître, mais que les informations sont accessibles.

Quant à l’obligation d’informer, il faut se demander qui a l’obligation d’informer et quelle doit être la qualité de cette information ? La jurisprudence établit clairement qu’il incombe à ceux qui demandent l’autorisation de pratiquer des activités extérieures de fournir l’information pertinente au soutien de leur demande. Lorsqu’il y a eu demandes vagues et des activités connexes menant à des conflits d’intérêts, il y a eu quand même de mesures disciplinaires imposées dans ces situations.

Les demandes présentées par les fonctionnaires s’estimant lésés sont d’ordre général et très hypothétiques, dans le but inavoué de faire modifier les règles sur les conflits d’intérêts. La procédure de règlement des griefs est-elle le bon forum pour régler cette question ?

La notion de contrôle est importante dans le contexte de la Loi de l’impôt sur le revenu, c’en est une notion essentielle. Lorsqu’il a décidé de créer les domaines désignés, l’employeur a fait référence indirectement à la notion de contrôle, avec la règle de 25 % sur la question des immeubles. De façon directe, il a cru bon de diminuer l’ancienne règle de 50 %. Il ne faut pas trop s’attarder à ces pourcentages, mentionnés à la pièce S24(b). L’important est que l’employé contrôle la destinée de l’entreprise, qu’il puisse imposer ses décisions et ne se voit pas imposer celles des autres.

Dans un deuxième temps, M e Arcelin allègue que la désignation de domaines fait partie du droit de gestion de l’employeur. La clause 13.01 de la convention collective permet des activités extérieures, sauf s’il s’agit d’un domaine désigné. Il y a une discrétion donnée à l’employeur par la clause 13.01, suite à la négociation, et cette

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Bouthillette a indiqué dans son

Décision Page 35 disposition a été reconduite telle quelle. Le critère a appliquer est celui du caractère raisonnable. Si on peut raisonnablement arriver à la conclusion que les activités extérieures tombent dans un domaine désigné par l’employeur, l’arbitre n’a pas compétence pour substituer son jugement à celui des gestionnaires. Si on ne peut pas arriver à conclure raisonnablement qu’une activité extérieure tombe dans un domaine désigné par l’employeur, on évalue les circonstances en l’espèce pour déterminer si la décision de l’employeur est correcte.

M e Arcelin se réfère à la décision Grignon (Dossier 166-2-27602), interprétant une convention collective, il est question de l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire de l’employeur. Le quatrième paragraphe de la page 4 se lit : J’ai passé en revue la jurisprudence et la doctrine citées par les parties. Il en découle que l’arbitre ne doit intervenir dans les circonstances décrites dans une affaire comme la présente que lorsque la décision de l’employeur est discriminatoire, capricieuse, abusive ou arbitraire. Rien dans la preuve ne démontre que tel est le cas dans cette affaire.

Selon M e Arcelin, cette phrase s’applique à la situation présente. Ensuite, l’employeur nous invite à lire l’affaire Perras (Dossier 166-2-16335), il est question de la clause 16.01 de la convention collective Administration des programmes. Cette clause équivaut à la clause 13.01 de la convention collective devant moi. M. Perras, un employé de Douanes et Accise, voulait vendre des produits Amway et offrir un service personnel d’établissement de déclarations d’impôt sur le revenu. M. Perras avait aussi une concession de produits multiples. L’employeur avait permis la vente de produits Amway et la préparation de déclarations d’impôts sous certaines conditions, mais interdit la concession de produits multiples. La conclusion de l’arbitre fut à l’effet que la décision de l’employeur n’était pas déraisonnable et était très claire. Le grief fut rejeté. Dans le cas présent, il n’y a aucune preuve à l’effet que les emplois demandés ne peuvent pas faire partie des domaines désignés. Il y a donc une absence de compétence de l’arbitre pour intervenir. Dans le cas je serais d’avis qu’il y a une telle preuve dans tous les griefs, M e Arcelin soumet l’affaire Lalla (Dossier n o 166-2-23969) et invite à lire le dernier paragraphe de la page 25 et la page 26, qui, selon lui, est le critère à appliquer dans les cas présents.

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 36 Par la suite, il soumet l’affaire Patterson (Dossiers n os 166-2-10263, 10491 et 10492), en version anglaise, et renvoie aux pages 35 et 36, au quatrième paragraphe de la page 37 et au dernier paragraphe de la page 39. Vient ensuite la décision Liske (Dossiers n os 166-2-8153, 8405 à 8408), dont il est question dans la décision précédente, il fut décidé que l’employeur avait exercé son droit de gestion de façon raisonnable.

Finalement, M e Arcelin se réfère à la cause Fraser et Skinner (supra), qui est la seule cause il est question de la clause 13.01 de la convention collective qui nous intérèsse. L’arbitre n’a pas appliqué le critère de l’arbitraire. C’est une affaire très intéressante. M e Arcelin cite la page 137 de la version anglaise (qu’on trouve à la page 155 du texte français). Il soumet que, dans le cas de tous les fonctionnaires s’estimant lésés, il y a un conflit d’intérêts apparent, réel ou potentiel.

Abordant le cas particulier de M. Bouthillette, M e Arcelin soutient que les activités que désire entreprendre le fonctionnaire s’estimant lésé ne sont pas claires. D’abord M. Bouthillette écrit « conseiller en fiscalité », et ensuite, « conseiller gouvernemental ». Il donne comme exemple des activités reliées à l’assurance-emploi; les alinéas 5(2)c et 3(2)c de la Loi sur l’assurance-emploi impliquent une discrétion ministérielle, car c’est le ministère du Revenu qui détermine l’assurabilité de l’emploi des contribuables. Comment ne pas avoir deux maîtres quand on fait ce genre d’activités ?

En contre-interrogatoire, Serge Clairoux a admis que la tolérance administrative existait, alors que, selon M. Bouthillette, elle n’existait pas. M. Bouthillette a introduit la pièce S27, qui démontre l’expertise très complète des fonctionnaires s’estimant lésés. Des « tuyaux honnêtes », des connaissances comptables et fiscales ainsi que le statut de fiscaliste, cela existe. Dans le cas de M. Bouthillette, la demande n’a pas été refusée; il lui a été demandé de fournir plus d’information. M. Bouthillette ne s’est pas déchargé de son fardeau de préciser clairement quelles activités il allait exercer et son grief devrait être rejeté.

Pour M. Chartrand, qui veut préparer des déclarations T1 pour des particuliers, il s’agit ici de servir deux maîtres. Il y a apparence de conflit clair et pouvant être dommageable. La modification apportée par la pièce S24(b) vise les douaniers, vu la

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 37 fusion et vu que, anciennement, ils avaient la permission de préparer des déclarations d’impôt. L’employeur accorde encore cette permission aux gens qui n’administrent pas la Loi de l’impôt sur le revenu, et il y a une distinction fondamentale entre le travail d’un douanier et celui d’un vérificateur. La vérification des grandes entreprises implique la vérification de leurs actionnaires, employés et fournisseurs. La vérification n’est pas statique : elle peut bifurquer sur des tiers. La page 4 et le chapitre B de la pièce S23 s’applique. Il faut tenir compte de tous ces concepts. M. Chartrand serait en position de servir deux maîtres. Il est à noter que M. Duval a dit dans son témoignage : « si je faisais des T1 et T2, je serais en conflit ». Le grief devrait être rejeté.

En ce qui concerne la demande de Serge Clairoux (pièces S8 à S10), elle est vague et hypothétique et l’employeur met en doute son bien-fondé. Face à la participation de 25 % de M. Clairoux, l’employeur assouplissait ses règles dans le cas des employés qui possédaient des immeubles, mais il faut garder à l’esprit les principes généraux et le problème de crédibilité. L’employeur a désigné ce domaine comme un des domaines désignés. Il n’y a pas lieu d’accueillir le grief.

Pour le cas de Jacques Duval, qui veut préparer des états financiers et qui n’aime pas préparer de déclarations d’impôt, il demeure que, malgré les ajustements, les états financiers sont le reflet de transactions et peuvent avoir un effet sur la déclaration fiscale d’une entreprise. M. Duval a admis que les états financiers pouvaient être utilisés pour la préparation des déclarations d’impôts et qu’il pourrait être appelé à témoigner dans de telles circonstances. Cela constitue un conflit d’intérêts apparent. La comptabilité inclut et la tenue de livres, et les états financiers. Pour les petits commerces, que vise M. Duval, la tenue de livres et les états financiers sont intimement liés. Son grief doit être rejeté.

Pour Benoit Guay, c’est l’importance du concept de contrôle qui prévaut. D’après la pièce S14, il s’agit d’une entreprise dans laquelle il a une participation de moins de 50 %. Il y a risque de conflit d’intérêts potentiel lorsqu’il s’agit d’une entreprise ou l’employé ne détient pas le contrôle. M. Guay serait appelé à servir deux maîtres car, comme actionnaire, il aura un autre maître. C’est de que la notion de contrôle prend son importance et c’est pourquoi le grief de M. Guay doit aussi être rejeté.

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 38 Dans le cas de Gaston Lampron, celui-ci veut préparer des déclarations T2, c’est-à-dire des documents ministériels. Il serait ainsi appelé à servir deux maîtres, d’où le conflit d’intérêts potentiel et même réel. La relation entre M. Lampron et son beau-frère serait contraire aux principes énoncés aux pages 4 et 5, ainsi qu’aux pages 19 et 20 du Code (pièce S23). Le grief de M. Lampron devrait être rejeté et la demande de Pierre Chartrand devrait être traitée de la même façon.

Jacques Morneau veut être agent d’immeubles résidentiels. L’employeur s’interroge sur le sérieux de cette demande car, afin d’exercer cette profession, il faut suivre un cours. M. Morneau a fait la demande sans s’informer des cours à suivre. Il a admis qu’il soit possible qu’il fasse la vérification d’entreprises en difficultés financières, et par conséquent, qu’il lui soit possible d’obtenir, de façon privilégiée, de l’information sur des biens immeubles qui seraient éventuellement vendus judiciairement suite à une négociation avec Revenu Canada. Il y a des situations possibles de conflits, conséquemment ce grief doit être rejeté.

En dernier lieu, M e Arcelin réfère à la pièce E1, qui démontre que l’employeur a pris des mesures pour que les règles soient plus flexibles dans des cas de tâches particulières, mais il demeure que les décisions des quatre gestionnaires délégués ne sont pas révisables.

Réplique M. Quesnel réplique que les employés sont victimes des tares du système et de préjugés. Les décisions sur les demandes présentées par les fonctionnaires s’estimant lésés ont été prises à partir de documents qui datent d’une période qui précède la mise en vigueur des nouvelles normes communiquées aux employés.

Il faut se concentrer sur la preuve. Il n’a pas été établi que la pièce S23 établissait la liste des domaines désignés. Le problème est dans l’approche de l’employeur. La page 19 de la pièce S23 invite à l’exercice d’un jugement. Si l’arbitre détermine que l’évaluation des circonstances entourant les demandes n’a pas été faite, cela ne constitue pas un « appel » de la décision. La décision de Canada (Director of Investigation and Research Competition Act) Southam Inc., [1997] 1 S.C.R. 748, traite de la norme d’intervention dans l’exercise d’un pouvoir discrétionnaire sur la base du caractère raisonnable « simpliciter » ou totalement déraisonnable d’une décision.

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 39 La désignation de domaines ne doit pas être confondue avec des permissions d’exercer des activités extérieures.

Dans le cas Fraser et Skinner (supra), la pièce S23 n’était pas en vigueur à ce moment-là.

Selon l’article 26 du Code (pièce S23), les activités extérieures sont permises. Dans le cas de M. Bouthillette, il ne veut pas faire des déterminations selon les articles 3(2)c et 5 de la Loi de l’impôt sur le revenu, il a rencontré la gestion à trois reprises à ce sujet.

Il n’y a pas de preuve qu’il existe une différence entre la vérification à l’impôt et la vérification aux douanes.

Les gestionnaires voient peut-être des conflits dans leur conception des choses, mais ils ont l’obligation de venir justifier le refus des demandes.

Et en ce qui concerne la jurisprudence soumise, elle concerne des mesures disciplinaires et n’est pas pertinente.

Les griefs devraient être accueillis, car les activités visées sont permises, du fait qu’elles ne sont pas désignées.

MOTIFS La question en litige consiste à déterminer si l’employeur a contrevenu à l’article 13 de la convention collective du groupe Vérification (AU), en n’autorisant pas les activités extérieures souhaitées par les fonctionnaires s’estimant lésés. Lorsqu’on lit la clause 13.01, 13.01 Sauf s’il s’agit d’un domaine désigné par l’employeur comme pouvant présenter un risque de conflit d’intérêts, les employés ne se voient pas empêchés d’exercer un autre emploi hors des heures aux cours desquelles ils sont tenus de travailler pour l’employeur.

on voit que la condition requise pour que l’activité extérieure soit autorisée est qu’elle ne soit pas dans un domaine désigné par l’employeur comme pouvant présenter un risque de conflit d’intérêts. Il n’y a aucune restriction imposée à l’employeur sur la

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 40 désignation de quelque domaine que ce soit, ni aucune indication sur la façon dont il doit s’y prendre pour désigner ces domaines. La preuve a révélé que l’employeur a publié un Code régissant les conflits d’intérêts et l’après-mandat s’appliquant à la fonction publique (pièce S23). Ce Code aurait fait l’objet d’une révision en 1987 et d’une réimpression en 1990 et en 1995. Il n’est donc pas étonnant que les parties soient familières avec cette pièce et l’aient soumise de consentement.

La question que je dois trancher est à savoir si le Code (pièce S23) désigne les domaines les fonctionnaires s’estimant lésés désirent œuvrer comme domaines pouvant présenter un risque de conflit d’intérêts.

La pièce S23 comporte deux parties, une générale, qui s’applique à toute la fonction publique, et le chapitre B, qui s’applique plus particulièrement à Revenu Canada. Le titre 8 du chapitre B a fait l’objet d’une modification que l’on retrouve à la pièce S24(b). Il ne fait aucun doute que les pièces S23 et S24(b) énumèrent un nombre de domaines pouvant présenter un risque de conflit d’intérêts. La partie I du chapitre A du Code (pièce S23), à la page 4, illustre les principes généraux qui s’appliquent à tous les fonctionnaires. La partie II du chapitre A couvre les méthodes d’application, sur la divulgation que doit faire tout fonctionnaire sur tous les biens, intérêts, engagements et exigibilités qui ne sont pas spécifiquement exemptés au paragraphe 20. Les parties III et IV du chapitre A couvrent l’après-mandat et des cas spéciaux. Je ne peux donc que conclure que le « Code régissant les conflits d’intérêts et l’après-mandat s’appliquant à la fonction publique » sert, entre autres, à désigner des domaines qui peuvent présenter un risque de conflit d’intérêts. trouve-t-on, dans le Code (pièce S23), des exemples de domaines désignés ? On les trouve au paragraphe 20 de la partie I du chapitre A et au chapitre B, pour les employés de Revenu Canada. Au chapitre B, dix domaines sont mentionnés spécifiquement et des explications permettent l’application de certaines exceptions. C’est de ces exceptions qu’est le présent litige, car elles soulèvent de nombreux doutes sur ce qu’elles ne mentionnent pas. Une grande discrétion est laissée aux gestionnaires délégués pour apprécier les exceptions. La pièce E1 constitue les lignes directrices à l’intention des gestionnaires délégués devant exercer cette discrétion. Malheureusement, ce document, qui date du 19 février 1992, ne semble pas avoir été amendé depuis pour refléter les changements de 1995 (pièce S23) et 1996 (pièce S24). Le présent litige aurait sans doute pu être évité si l’employeur avait republié les lignes directrices à Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 41 l’intention des gestionnaires délégués et s’il en avait fait part au syndicat. Le manque de transparence dans l’application des changements a donné lieu à des attentes de la part des employés et a contribué à la prolifération d’interprétations, toutes aussi valables les unes que les autres, mais qui ne sont d’aucune utilité pour appliquer la convention collective.

Dans le cas de M. Bouthillette, qui désire devenir conseiller gouvernemental et être intermédiaire entre des clients et les différents paliers de gouvernement provincial, municipal et fédéral, incluant Revenu Canada, l’employeur a demandé plus d’information, mais, selon ce que M. Bouthillette a décrit, le fonctionnaire s’estimant lésé serait en contravention du principe f) du paragraphe 6, qui se lit : il lui est interdit d’outrepasser ses fonctions officielles pour venir en aide à des personnes, physiques ou morales, dans leurs rapports avec le gouvernement, lorsque cela peut donner lieu à un traitement de faveur;

M. Bouthillette est d’avis que le gestionnaire désigné avait l’obligation de s’informer davantage sur les activités extérieures faisant l’objet de sa demande et de lui fournir une réponse à l’égard de la représentation auprès des paliers de gouvernement autres que fédéral. Je ne suis pas d’accord. M. Bouthillette désire commercialiser les connaissances qu’il a acquises grâce à ses fonctions syndicales et activités bénévoles au cours des années il a travaillé à Revenu Canada. Il lui incombe de préciser dans un rapport confidentiel, tel que requis par les paragraphes 16(b) et 19 du Code (pièce S23), les activités extérieures qu’il désire entreprendre. Il doit fournir suffisamment de détails pour permettre au gestionnaire délégué de décider si ces activités peuvent donner lieu à un conflit d’intérêts. Il est possible que, une fois bien éclairé, le gestionnaire délégué accède à la demande de M. Bouthillette. Le fait que M. Bouthillette s’occupe de syndicat presqu’à temps plein, et qu’il utilise l’intermédiaire d’autres employés pour accéder au système informatique, ne change rien à ses obligations de fonctionnaire et ne diminue en rien son expertise fiscale et comptable. Il n’est pas clair que l’activité qu’il désire exercer ne serait pas influencée par les activités gouvernementales auxquelles il participe. Le grief de M. Bouthillette ne peut donc pas être maintenu.

M. Pierre Chartrand désire faire la préparation de déclarations T1 pour 15 à 20 particuliers salariés ou professionnels par année. L’employeur a désigné comme

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 42 domaine pouvant donner lieu à des conflits d’intérêts la « Préparation et production, au nom d’autres personnes, de documents ministériels » voir le Code (pièce S23) et la modification (pièce S24(b), titre 8). L’employeur a introduit de la confusion dans ce domaine en voulant faire preuve de souplesse et tenir compte des différentes lois qu’appliquent les employés de Revenu Canada. Il semble que les modifications apportées au chapitre B du Code (pièce S23) sont à la source des attentes des fonctionnaires qui interprètent le Code comme leur permettant d’exercer leur discrétion sur les activités extérieures qu’ils veulent pratiquer. M. Chartrand ne voit pas plus de conflit à préparer des T1 contre rémunération, tout en travaillant à la section Impôt de Revenu Canada, parce qu’il vérifie les grosses entreprises, qu’il n’y en avait lorsqu’il était employé à Douanes et Accise. Malheureusement, comme l’activité souhaitée tombe sous le coup d’un domaine désigné, il se doit de convaincre son gestionnaire délégué en fournissant à ce dernier suffisamment de détails pour lui démontrer qu’il n’y a pas de conflit d’intérêts réel, ni potentiel, ni apparent. L’employeur aurait pu prévenir les malentendus en remettant à l’agent négociateur la pièce E1 et en lui confirmant que ce guide demeurait en vigueur malgré les modifications au Code (pièce S23). L’employeur aurait intérêt à clarifier auprès des fonctionnaires et des gestionnaires délégués quelles sont les lignes directrices qui s’appliquent depuis l’introduction des modifications. Cependant, le grief de M. Chartrand doit être rejeté.

Dans le cas de Serge Clairoux, qui désire participer à l’achat d’immeubles en copropriété et en faire la comptabilité, cette activité a été désignée au titre 1, page 20, et au titre 6 de la page 23 du chapitre B de la pièce S23, mais il en est également question au paragraphe 22, au point d), de la page 9 du Code. Il n’est pas certain que l’activité souhaitée par M. Clairoux n’aurait pas de liens directs avec la loi qu’il est chargé d’appliquer. Il lui incombe donc de fournir assez de détails à son gestionnaire délégué pour convaincre ce dernier de lui accorder une autorisation. Le manque de clarté entourant l’importance que l’employeur semble accorder à la notion de contrôle prête à confusion. Elle est aussi source de frustration pour les fonctionnaires, qui peuvent difficilement comprendre quelle est la différence entre posséder 25 et 20 % d’un bien locatif. Si je ne peux faire droit au grief de M. Clairoux, je peux recommander fortement aux parties de s’asseoir ensemble et de clarifier les notions qui doivent guider les gestionnaires délégués dans leur application du Code face aux

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 43 demandes concernant la comptabilité et la tenue de livres pour d’autres et de leur implication dans des entreprises personnelles en coparticipation ou en société.

M. Jacques Duval désire dresser des états financiers à des fins comptables, et non fiscales. Cette activité, à mon avis, tombe sous le coup du domaine « comptabilité et tenue de livres ». La pièce S35 et le témoignage de M. Duval m’ont convaincue que les états financiers font partie de la comptabilité générale. Il incombe à M. Duval de convaincre son gestionnaire délégué, avec suffisamment de précisions sur le commerce qu’il veut entreprendre, que cela n’aura pas de liens directs sur les lois qu’il est chargé d’appliquer. L’activité souhaitée étant dans un domaine désigné, il ne m’appartient pas de décider si elle pourrait faire l’objet d’une exception. Le grief de M. Duval est donc rejeté.

M. Benoit Guay voulait participer à une entreprise avec son beau-frère et en faire la comptabilité. Sa situation est semblable à celle de M. Clairoux, en ce qu’elle tombe sous le coup du paragraphe 1, page 20 de la pièce S23. Encore une fois, l’incompréhension et des frustrations sont créées par un manque de clarté sur les principes qui gouvernent les exceptions. Bien que je ne puisse faire droit à son grief, j’invite M. Guay à discuter avec son gestionnaire délégué des lignes directrices et des détails de sa participation dans une telle entreprise. Je ne suis pas convaincue qu’ils ne pourraient pas en arriver à une réponse plus satisfaisante.

M. Gaston Lampron voudrait préparer les déclarations d’impôt pour les entreprises de ses beaux-frères contre rémunération. Cette activité tombe sous le coup du titre 8 du chapitre B de la pièce S23, la « préparation et production, au nom d’autres personnes, de documents ministériels ». Cette activité a un lien direct avec la loi qu’il est chargé d’appliquer. Il incombe à M. Lampron de fournir à son gestionnaire délégué les informations nécessaires sur les entreprises en cause et sur ses activités pour le convaincre de lui accorder une autorisation. Le grief de M. Lampron ne peut être maintenu.

M. Jacques Morneau désire vendre des maisons résidentielles à temps partiel. Cette activité fait partie d’un domaine désigné au paragraphe 2, page 21, « Planification financière, vente de biens immobiliers et évaluations ». Même si les raisons invoquées pour désigner cette activité peuvent rendre perplexe, il n’en

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 44 demeure pas moins qu’il s’agit d’un domaine désigné. L’employeur aurait intérêt à revoir cette activité avec l’agent négociateur, surtout si on la compare à la vente d’autres articles tout aussi dispendieux. Je ne peux faire droit au grief de M. Morneau.

Évelyne Henry, Présidente suppléante.

OTTAWA, le 8 février 1999.

Commission des relations de travail dans la fonction publique

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.