Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Suspension (20 jours) - Conseillère en immigration - Traitement irrégulier d'un dossier - Conflit d'intérêts - Traitement de faveur accordé à un membre de la famille - à la demande de son cousin, la fonctionnaire s'estimant lésée, qui était une conseillère en immigration, a elle-même mené une entrevue avec la nièce de sa tante, puis traité et approuvé sa demande de résidence permanente - l'employeur a imposé une suspension de vingt jours à la fonctionnaire pour son traitement irrégulier du dossier et pour avoir accordé un traitement de faveur à un membre de la famille - la preuve a établi qu'à l'époque pertinente ce genre de travail n'était pas exécuté au lieu de travail de la fonctionnaire - l'arbitre a conclu que la fonctionnaire avait exécuté un travail qui n'était pas censé être fait à son lieu de travail et qu'elle avait enfreint le Code régissant les conflits d'intérêts et l'après-mandat en accordant un traitement de faveur à un membre de la famille - l'employeur avait tenu compte des trente-deux années de service de la fonctionnaire sans mesure disciplinaire lorsqu'il avait imposé la sanction disciplinaire, moins sévère que celle qu'il aurait normalement infligée - l'arbitre a conclu que la sanction était raisonnable compte tenu de toutes les circonstances pertinentes. Grief rejeté. Décision citée :Da Cunha (166-2-24725).

Contenu de la décision

Dossier : 166-2-28988 Loi sur les relations de travail Devant la Commission des relations dans la fonction publique de travail dans la fonction publique ENTRE MARIA BLAIR-MARKLAND fonctionnaire s’estimant lésée et LE CONSEIL DU TRÉSOR (Citoyenneté et Immigration Canada)

employeur

Devant : Joseph W. Potter, président suppléant Pour la fonctionnaire s’estimant lésée : Barry Done, Alliance de la Fonction publique du Canada Pour l’employeur : Kathryn A. Hucal, avocate Affaire entendue à Toronto (Ontario), les 27 et 28 septembre 1999

Décision DÉCISION Page 1 DÉCISION La fonctionnaire s’estimant lésée, M me Maria Blair-Markland, est conseillère en immigration au Centre d’Immigration Canada à Etobicoke et son poste est classifié dans le groupe Administration des programme (PM), niveau 2. Le 24 juillet 1997, elle a reçu de M. Gerry LeBlanc, gestionnaire régional, une lettre lui imposant une suspension de 20 jours. La lettre est ainsi rédigée :

[Traduction] On m’a remis l’information recueillie par votre gestionnaire au sujet de votre participation au traitement irrégulier du dossier d’une cliente.

Selon cette information, il est évident que la façon dont vous avez traité ce dossier est allée à l’encontre des procédures du Ministère, en ce sens que le dossier n’a pas été reçu ni transmis par les voies appropriées. À cet égard, je remarque que le traitement de tels cas ne relève pas du CIC d’Etobicoke et qu’il ne comptait pas parmi les fonctions qui vous sont assignées. En analysant l’explication que vous avez fournie, j’ai en outre remarqué qu’une amie personnelle avait d’abord communiqué avec vous afin de discuter de la situation dans laquelle se trouvait la personne en question et que, subséquemment, vous aviez pris des dispositions pour rencontrer cette personne en tant que cliente. À la lumière de cette explication, je crois comprendre que la tante de la cliente, qui a accompagné celle-ci à l’entrevue que vous avez vous-même fixée, était quelqu’un avec qui vous entreteniez une relation personnelle. L’examen du dossier révèle en outre que les facteurs dont vous avez tenu compte dans votre décision n’ont pas été confirmés, en ce sens qu’aucun renseignement à l’appui n’a été demandé ni obtenu. Je remarque par ailleurs que cette entrevue n’a été consignée nulle part, pas plus que vous n’avez discuté de vos activités à cet égard avec votre surveillant.

Le contenu et les principes du Code régissant les conflits d’intérêt et l’après-mandat et le Code de conduite du Ministère énoncent nos obligations à titre de ministère et à titre individuel afin que nous évitions les activités ou situations qui risquent de nous placer, collectivement ou individuellement, dans un conflit d’intérêts réel, potentiel ou apparent. Il est en outre interdit aux employés d’accorder un traitement de faveur ou un semblant de traitement de faveur à des membres de leur famille ou à des amis concernant quel que sujet officiel que ce soit; chacun doit par ailleurs se conduire de manière à rehausser la confiance en notre intégrité et objectivité. En évaluant ce qui s’est produit en l’occurrence, j’accepte l’appréciation de votre gestionnaire, à savoir que vous avez manqué aux responsabilités que vous

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Décision Page 2 avez, c’est-à-dire éviter tout conflit d’intérêts et que vous saviez ou auriez raisonnablement savoir que cela était inacceptable. Je conviens également qu’il s’agit d’une grave faute de conduite de votre part et qu’une sanction disciplinaire en ce sens est justifiée.

En tentant de déterminer la sévérité de la sanction disciplinaire qui s’impose, j’ai remarqué que, dans la jurisprudence pertinente, on a rapporté des cas des fonctionnaires qui avaient de longs états de service et aucun antécédent disciplinaire s’étaient vu licencier ou recevoir une suspension de plusieurs semaines ou plusieurs mois à la suite d’une faute de conduite semblable. Votre poste d’agente à l’immigration, le niveau de confiance et de professionnalisme requis chez les titulaires de ces postes et les conséquences de vos actes constituent également des facteurs importants. En appréciant les facteurs atténuants additionnels pertinents dans votre cas, j’ai remarqué la coopération dont vous avez fait preuve au cours de l’enquête effectuée par votre gestionnaire et le remords que vous avez exprimé par la suite à l’égard de votre conduite. J’ai en outre dûment pris en considération la confiance que votre gestionnaire a exprimée en votre sens du professionnalisme et de l’engagement dans sa recommandation de vous imposer une suspension de 20 jours.

Après avoir pesé tous ces facteurs et en vertu des pouvoirs qui me sont conférés, j’en conclus qu’une suspension de 20 jours est appropriée et suffisante et me permet de croire que, à l’avenir, vous respecterez les normes et vous vous y conformerez. Je dois vous dire que n’eût été la confiance manifestée par votre gestionnaire je n’aurais pas considéré cette suspension comme une mesure corrective suffisante. Je dois en outre vous aviser qu’une récidive de votre part ne sera pas tolérée et pourrait entraîner une autre sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’au licenciement.

Le gestionnaire intérimaire vous communiquera quand vous devrez purger cette suspension. Étant donné les répercussions financières et autres que vous risquez de subir, je vous rappelle que vous pouvez vous prévaloir du Programme d’aide aux employés offert aux fonctionnaires et aux membres de leur famille. De plus, veuillez noter que vous avez le droit de présenter un grief concernant ma décision conformément aux dispositions de votre convention collective.

Enfin, j’ai demandé à votre gestionnaire de vous rencontrer personnellement une fois votre suspension purgée et à votre retour au travail afin de revoir le Code régissant les conflits d’intérêt et l’après-mandat, le Code de conduite, etc. Je vous recommande de soulever toutes les questions que vous pourriez avoir à cet égard afin d’en arriver à une

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Décision Page 3 compréhension claire et commune. Par ailleurs, si vous voulez discuter davantage de cette affaire avec moi, n’hésitez pas à communiquer avec moi à l’avenir.

Le 11 août 1997, la fonctionnaire s’estimant lésée a présenté le grief suivant : [Traduction] Je conteste par ce grief la sanction disciplinaire qui m’a été imposée par M. G. Leblanc, gestionnaire régional, dans sa lettre du 24 juillet 1997.

Comme mesure corrective, je demande que la suspension soit annulée et que tous les documents concernant cette sanction disciplinaire soient retirés et qu’on m’indemnise intégralement.

Veuillez accuser réception de ce grief par écrit. Le présent grief a été renvoyé à l’arbitrage le 29 avril 1999. Au début de l’audience, j’ai acquiescé à la demande d’exclusion des témoins qui m’a été présentée. L’employeur a cité deux témoins et produit trois pièces. L’agent négociateur a cité deux témoins et produit deux pièces.

Preuve M m e Blair-Markland est entrée dans la fonction publique fédérale le 3 mai 1965 et est devenue agente à l’immigration le 26 juillet 1988. À l’époque des événements qui ont mené à sa suspension, la fonctionnaire comptait quelque 32 années de service et possédait un dossier disciplinaire vierge. Son surveillant, M. James Hogan, a déclaré que, exception faite de sa participation à cet incident, la fonctionnaire était et continue d’être une bonne employée, consciencieuse, ce que confirme son évaluation de rendement du 30 juin 1999 (pièce G-2).

La fonctionnaire a expliqué que, un peu avant le 27 avril 1997, elle a reçu de son cousin un appel lui disant que leur tante avait une nièce de la Jamaïque qui était en visite au Canada et qui voulait obtenir la résidence permanente. À ce moment-là la fonctionnaire a fourni des renseignements généraux à propos des formulaires de demande qu’il fallait remplir.

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Décision Page 4 Le cousin a rappelé la fonctionnaire une deuxième fois pour lui dire qu’ils avaient rempli les formulaires requis et qu’ils voulaient que la fonctionnaire les revoie. M me Blair-Markland y a consenti tout en mentionnant à son cousin qu’elle voulait rencontrer leur tante et sa nièce à son bureau le 27 avril au matin. En contre- interrogatoire, M me Blair-Markland a reconnu que si son cousin n’avait pas demandé à la rencontrer, elle n'aurait pas rencontré la requérante.

La fonctionnaire s’estimant lésée s’est rendue au bureau des dossiers pour obtenir un numéro d’identification et ouvrir un dossier pour la requérante. Le 27 avril, vers 11 h, elle a rencontré la requérante et sa tante au cours d’une entrevue qui, a-t-elle dit, a duré environ deux heures. Pendant l’entrevue, la fonctionnaire a pris des notes concernant les réponses que lui ont données la requérante et sa tante; ces notes ont toutefois été retirées du dossier par la suite. Durant l’interrogatoire principal, la fonctionnaire a indiqué que la réunion avait eu simplement pour objet d’examiner la demande pour voir si elle était complète et de répondre aux questions éventuelles de la requérante. Finalement, elle a mené une entrevue de deux heures, a perçu les frais de traitement nécessaires (qu’elle a remis à la section des comptes et pour lesquels elle a fourni un reçu en bonne et due forme à la requérante) et a approuvé la demande en principe. La fonctionnaire a témoigné avoir discuté du traitement de la demande avec un collègue puisqu’elle ne cherchait pas à cacher le fait qu’elle traitait la demande. Le collègue en question, Volney Campbell, a corroboré son témoignage, mais il a également reconnu qu’il n’aurait pas fait d’entrevue à la demande d’un cousin parce que cela pouvait être perçu comme un conflit d’intérêts.

Si la fonctionnaire a reçu une sanction disciplinaire, c’est notamment parce que la demande n’avait pas été traitée comme elle aurait l’être. À cet égard, le surveillant de M me Blair-Markland, M. Hogan, a expliqué dans son témoignage que, à la suite d’une réorganisation du travail en 1993 ou 1994, il était maintenant interdit aux conseillers en immigration à Etobicoke d’interroger personnellement les requérants qui demandaient la résidence permanente. Selon la procédure établie, la demande devait être transmise à Vagreville pour y être traitée et, lorsqu’une entrevue se révélait nécessaire, seuls les fonctionnaires de certains bureaux désignés pouvaient mener l’entrevue. En l’occurrence, l’entrevue aurait été menée par le personnel du bureau de l’immigration de Mississauga.

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Décision Page 5 La fonctionnaire s’estimant lésée a témoigné qu’elle estimait avoir le pouvoir de faire une telle entrevue en raison de sa description de travail datée de janvier 1997 (pièce G-1); elle avait d’ailleurs exécuté des fonctions semblables par le passé. Normalement, les autorisations de résidence permanente sont entrées dans l’ordinateur, mais, après l’entrevue, la fonctionnaire s’est aperçue que les ordinateurs étaient en panne. Elle a quitté le bureau à la fin de la journée et déposé le dossier dans sa corbeille d’entrée. Le jour ouvrable suivant, elle était en congé de maladie et son agent de relève a pris les dossiers de sa corbeille d’entrée afin de les traiter. Le lundi 30 avril, on a porté le dossier à l’attention de Craig Morrison, qui était gestionnaire du Centre d’Immigration d’Etobicoke à l’époque. Au départ, il y avait des doutes à propos du dossier parce qu’il s’agissait d’une tâche qu’on n’effectuait pas au bureau d’Etobicoke, ce que M. Morrison a lui aussi confirmé; en fait, depuis 1994 les demandes de ce genre étaient traitées à Vagreville. Cette procédure était toujours en vigueur en 1997 lorsque M m e Blair-Markland a fait l’entrevue en question. Le 5 ou le 6 mai 1997, M. Morrison a rencontré la fonctionnaire s’estimant lésée afin de discuter de ses préoccupations au sujet du traitement du dossier. La fonctionnaire s’est vu offrir la possibilité de se faire accompagner par un représentant syndical à la réunion, mais elle l’a refusée.

La fonctionnaire a expliqué à M. Morrison qu’un ami lui avait demandé comment quelqu’un pouvait devenir résident permanent et qu’elle lui avait donné des renseignements généraux. Puis, vers le 25 avril, l’ami a rappelé la fonctionnaire et lui a demandé si elle pouvait le rencontrer avec la requérante. M me Blair-Markland a acquiescé à cette demande et a fixé un rendez-vous pour 11 h le vendredi 27 avril à son bureau. La fonctionnaire a dit à M. Morrison qu’elle avait rencontré l’ami et la requérante comme prévu et qu’elle avait mené une entrevue, à la suite de laquelle elle avait approuvé la demande en principe. Cela voulait dire que la requérante pouvait devenir une résidente permanente, sous réserve des vérifications courantes d’ordre criminel et médical. M me Blair-Markland a dit à M. Morrison qu’elle avait approuvé la demande pour des motifs humanitaires.

M. Morrison a demandé à la fonctionnaire si elle était au courant des lignes directrices régissant les conflits d’intérêts et M l’affirmative. M. Morrison lui a fait part de ses préoccupations du fait qu’elle avait fait

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m e Blair-Markland a répondu par

Décision Page 6 une entrevue en présence d’un ami. Il lui a dit qu’il chercherait conseil à ce sujet et qu’il communiquerait de nouveau avec elle à propos de la décision à prendre. M. Hogan, le surveillant de la fonctionnaire s’estimant lésée, a déclaré que les fonctionnaires du Centre d’Immigration sont au courant du Code régissant les conflits d’intérêts et l’après-mandat s’appliquant à la fonction publique et il a reconnu ce document admis en preuve sous la cote E-2. On peut y lire au paragraphe 30 : Refus d’accorder des traitements de faveur 30. Il est interdit aux employés d’accorder, relativement à des questions officielles, un traitement de faveur à des parents ou amis, ou à des organismes dans lesquels eux-mêmes, leurs parents ou amis ont des intérêts. Les employés doivent éviter de se placer ou de sembler se placer dans des situations ils seraient redevables à une personne ou à un organisme qui pourrait tirer parti d’un traitement de faveur de leur part.

M. Hogan a déclaré qu’il interprétait cette partie de la pièce comme voulant dire que les fonctionnaires ne devaient accorder de traitements de faveur à personne, et que si des parents ou amis étaient partie à une demande, le dossier devait être réassigné à un autre fonctionnaire.

Au cours d’une deuxième rencontre avec la fonctionnaire, M. Morrison a informé cette dernière qu’elle s’était placée dans une situation de conflit d’intérêts et qu’on envisageait de prendre des mesures disciplinaires à son endroit. M déclaré qu’elle ne considérait pas ses actes comme inappropriés puisqu’elle ne connaissait pas la requérante.

M. Morrison a consulté le personnel du contentieux du Ministère, qui l’a informé qu’il n’était pas tenu de respecter la décision qu’avait prise M me Blair-Markland à propos de la demande. Par conséquent, conformément à la procédure établie, la demande a été transmise au bureau de Vagreville, qui l’a ensuite envoyée au bureau de Mississauga pour qu’on y mène l’entrevue nécessaire. À la suite de l’entrevue effectuée avec la requérante, la demande de résidence permanente a été refusée. M. Hogan a reconnu que l’approbation d’une demande de résidence permanente était quelque peu subjective et que deux agents qui étudient le même dossier pouvaient en arriver à des conclusions différentes; l’un pouvait refuser la demande et l’autre l’accorder.

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m e Blair-Markland a

Décision Page 7 M. Morrison a jugé les actes de M me Blair-Markland comme très graves et inappropriés. Il estimait qu’une suspension de 20 jours représentait un juste équilibre étant donné la gravité des gestes de la fonctionnaire s’estimant lésée, mais tout en tenant compte de ses longs états de service et de son dossier disciplinaire sans tache. De plus, il a noté que la fonctionnaire avait collaboré et semblait avoir du remords. En contre-interrogatoire, la fonctionnaire a admis qu’elle s’était mal conduite et qu’elle était au courant des lignes directrices concernant les conflits d'intérêts; toutefois, elle a souligné qu’elle n’avait pas profité de ses actes.

Plaidoiries Au nom de l’employeur M m e Blair-Markland s’est vu imposer une sanction disciplinaire parce qu’elle avait traité une demande de résidence permanente et qu’il s’agissait d’une tâche qui n’incombait pas normalement au Centre d’Immigration d’Etobicoke. De plus, elle se retrouvait en conflit d’intérêts puisqu’elle avait interrogé une requérante qui lui avait été adressée par un cousin. La fonctionnaire a déclaré que, si l’appel avait été fait par une personne autre que son cousin, elle n’aurait pas procédé à l’entrevue de la requérante. Elle savait que le bureau d’Etobicoke n’effectuait pas ce genre de travail et la preuve a montré que, suite à une réorganisation en 1993, ce type de travail se faisait désormais à Vagreville, qui assurait le traitement des demandes.

En agissant comme elle l’a fait, la fonctionnaire a miné la confiance qu’avait le public dans le système d’immigration. La demande a été approuvée en principe et c’est uniquement grâce à l’intervention rapide de l’employeur que le processus a pu être interrompu et la procédure adéquate respectée. Le dossier a été envoyé à Vagreville et, au bout du compte, la demande a été rejetée.

L’employeur a pris en considération les 32 années de service sans tache de la fonctionnaire, mais cela ne permet pas à cette dernière de s’en tirer indemne. La suspension de 20 jours s’imposait pour lui démontrer que ses gestes étaient déplacés et allaient à l’encontre des lignes directrices régissant les conflits d’intérêts.

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Décision L’avocate cite les décisions d’arbitrage suivantes : Commission 166-2-27766 et 166-2-27865); Commission 166-2-24725); et Casselot (dossier de la Commission 166-2-3352).

Au nom de la fonctionnaire s'estimant lésée La fonctionnaire estime qu’une certaine réduction de la peine est justifiée en l’occurrence. La fonctionnaire offre un bon rendement, tel que l'a signalé son surveillant. Elle compte 32 années de service et possède un dossier disciplinaire vierge, et il n’est pas nécessaire de tenter de retenir son attention au moyen d’une suspension de 20 jours. Elle a répondu à toutes les questions que lui a posées M. Morrison et a dit regretter son comportement. La fonctionnaire n’a jamais cherché à cacher ses actes.

Elle a fait l’entrevue à son bureau et elle en a discuté avec un collègue. Elle a obtenu le numéro de dossier approprié du bureau des dossiers et elle a remis les frais d’administration requis, délivrant le reçu nécessaire. À la fin de la journée, elle a laissé le dossier à la vue de tous dans sa corbeille d’entrée. À l’époque pertinente, la fonctionnaire ne pensait pas s’être mal conduite, mais elle reconnaît maintenant son erreur. Elle ne conteste nullement ce fait.

La fonctionnaire s’estimant lésée ne connaissait pas la requérante et son seul tort en l’occurrence est d’avoir manqué de jugement. Elle n’a retiré aucun profit personnel de l’incident et l’employeur le sait.

Le rejet de la demande, au bout du compte, n’est pas pertinent puisque l’évaluation de telles demandes est subjective. M. Hogan a même déclaré que deux personnes qui étudiaient la même demande pouvaient en arriver à des conclusions différentes.

Selon la preuve, des demandes qui étaient envoyées à Mississauga pouvaient ensuite être acheminées au bureau d’Etobicoke, qui procédait à l’entrevue du requérant; la fonctionnaire avait elle-même traité de telles demandes par le passé et le fait encore aujourd’hui. Par conséquent, le travail aurait très bien pu avoir été fait à Etobicoke.

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Page 8 Renouf (dossiers de la Da Cunha (dossier de la

Décision Page 9 Dans la présente situation, la suspension, qui équivaut à une peine d’environ 3 200 $, est exagérée compte tenu de tous les facteurs en cause.

M. Done cite les décisions d’arbitrage suivantes : Tosh (dossier de la Commission 166-2-23614); Perry (dossier de la Commission 166-2-17340); Danku (dossier de la Commission 166-2-18515); Bastie (dossier de la Commission 166-2-22285); Vaillancourt (dossier de la Commission 166-2-3617); et Conte (dossier de la Commission 166-2-22281).

Réplique D’après le témoignage des personnes citées par l’employeur, lequel n’a pas été contesté, en 1997, les demandes écrites devaient être acheminées au bureau de Vagreville. Ensuite, lorsqu’on déterminait qu’une entrevue était requise, les demandes étaient envoyées à Mississauga. Les fonctionnaires du bureau d’Etobicoke ne traitaient pas les demandes de ce genre en 1997.

Motifs de la décision Dans la lettre disciplinaire on peut lire que M m e Blair-Markland a traité de façon irrégulière le dossier d’une cliente. Le Ministère prétend que ce travail ne relevait pas du bureau d’Etobicoke; or M me Blair-Markland a de son propre chef décidé de traiter la demande.

La sanction disciplinaire a été imposée en partie parce que la fonctionnaire a exécuté des fonctions qui ne relèvent pas du bureau d’Etobicoke. Bien que la fonctionnaire ait témoigné qu’elle effectuait ce genre de travail à une époque, et qu’elle le fait encore aujourd’hui, j’estime que l’employeur a démontré que, en 1997, ce genre de travail était envoyé à Vagreville. Si une entrevue était nécessaire, elle se faisait au bureau de Mississauga. Lorsqu’un autre fonctionnaire a trouvé le dossier le lendemain, il l’a porté à l’attention du gestionnaire, qui l’a immédiatement acheminé au bureau de Vagreville aux fins de traitement. Par conséquent, je conclus que l’employeur a prouvé que la fonctionnaire avait effectivement accompli du travail qui ne relevait pas du bureau d’Etobicoke.

Deuxièmement, l’employeur argue que la fonctionnaire a contrevenu à la politique régissant les conflits d’intérêts. Puisque la fonctionnaire a témoigné qu’elle Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 10 avait mal agi et qu’elle était au courant des lignes directrices régissant les conflits d’intérêts, cette allégation n’est pas contestée. En agissant comme elle l’a fait, la fonctionnaire s’estimant lésée a contrevenu à l’article 30 du Code régissant les conflits d’intérêts et l’après-mandat, en ce sens qu’elle a accordé un traitement de faveur à la requérante en faisant l’entrevue elle-même au lieu de suivre la procédure établie.

Dans l’affaire Da Cunha (supra), l’arbitre avait à statuer sur le congédiement d’un fonctionnaire, un conseiller en immigration, qui avait contrevenu aux lignes directrices régissant les conflits d’intérêts en accordant un traitement de faveur à des membres de sa famille. Le congédiement était en outre fondé sur des éléments de fraude. En se prononçant sur le congédiement, la commissaire R. Simpson a jugé que tous les faits reprochés constituaient de graves manquements aux devoirs d’un fonctionnaire. Toutefois, la sanction a été ramenée à une suspension de neuf mois étant donné que « le fonctionnaire s'estimant lésé [avait] à son crédit onze années de service au cours desquelles il n'[avait] jamais fait l'objet de mesures disciplinaires » (page 15).

En l’occurrence nous sommes également en présence, à mon avis, d’un grave manquement aux devoirs d’un fonctionnaire.

J’estime que les faits reprochés à M qualité de conseillère en immigration, lorsqu’elle doit traiter avec des personnes qui demandent la résidence permanente, la fonctionnaire devient, en fait, une agente de première ligne. Le public doit pouvoir avoir confiance aux titulaires de ces postes; il s’agit d’un élément essentiel à leurs fonctions. Or, M confiance en traitant un dossier de façon irrégulière, et ce, à la demande d’un parent. Elle a accordé à la requérante la résidence permanente que celle-ci demandait, ce qu’elle n’avait pas le pouvoir de faire à ce moment-là.

M. Done affirme que les 32 années de service sans sanction disciplinaire doivent être prises en considération. Je suis d’accord. Toutefois, la preuve démontre que l’employeur est du même avis et que, n’eût été ce fait, la sanction imposée aurait été beaucoup plus sévère, selon M. Morrison. Je ne vois aucune raison de modifier cette décision car, à mon avis, la sanction est raisonnable compte tenu de tous les faits.

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me Blair-Markland, sont très graves. En sa m e Blair-Markland a trahi cette

Décision Page 11 Par conséquent, pour tous ces motifs, le grief est rejeté.

Joseph W. Potter, président suppléant

OTTAWA, le 3 novembre 1999. Traduction certifiée conforme

Serge Lareau

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