Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Taux de rémunération - Nomination par intérim - Augmentation salariale rétroactive - le 21 juin 2000, le poste d'attache du fonctionnaire s'estimant lésé était classifié WP-4 - le 20 décembre 2000, le fonctionnaire s'estimant lésé s'est fait offrir par l'employeur un poste intérimaire de WP-5 rétroactif au 5 septembre 2000, ce qu'il a accepté - le 16 juillet 2001, le fonctionnaire s'estimant lésé a été confirmé pour une période indéterminée comme titulaire d'un poste de WP-05 - le 19 novembre 2001, une nouvelle convention collective applicable au groupe WP a été signée, les révisions de la rémunération étant rétroactives au 21 juin 2000 - les dispositions de la Politique sur les conditions d'emploi dans la Fonction publique ont été incorporées par renvoi à la convention collective - l'employeur a informé le fonctionnaire s'estimant lésé que son traitement de WP-5 ne serait pas l'objet d'un nouveau calcul pour la période de rémunération rétroactive - l'arbitre a conclu que, conformément au paragraphe 46 c)(1) de la Politique sur les conditions d'emploi dans la Fonction publique, " [l]'employé qui touche une rémunération d'intérim a droit à un nouveau calcul du taux de la rémunération d'intérim . lorsqu'il se produit . des révisions salariales dans son niveau de titularisation " - le fonctionnaire s'estimant lésé avait par conséquent droit à un nouveau calcul de sa rémunération d'intérim. Grief accueilli. Décisions citées : Procureur général c. Lajoie, [1992] A.C.F. no 101; Buchmann, 2002 CRTFP 14 (166-34-30637).

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2003-03-10
  • Dossier:  166-2-31338
  • Référence:  2003 CRTFP 19

Devant la Commission des relations de travail dans la fonction publique



ENTRE

WAYNE ALEXANDER COPELAND
fonctionnaire s'estimant lésée

et

LE CONSEIL DU TRÉSOR
(Solliciteur général Canada - Service correctionnel)

employeur

Devant :   D.R. Quigley, commissaire

Pour le fonctionnaire s'estimant lésé :   Barry Done, Alliance de la Fonction publique du Canada

Pour l'employeur :   Richard E. Fader, avocat


Affaire entendue à London (Ontario),
le 26 novembre 2002.


[1]      Le fonctionnaire s'estimant lésé, Wayne Alexander Copeland, agent de libération conditionnelle WP-5 à Service correctionnel Canada, conteste la décision de l'employeur de ne pas recalculer son taux de rémunération comme WP-5 durant la période de rémunération rétroactive. Il allègue que cette décision de l'employeur est (traduction) « extrêmement injuste, punitive et inacceptable, en plus de constituer de la discrimination contre [lui] en tant que fonctionnaire syndiqué » (les soulignés sont de lui). Il réclame que son traitement « soit immédiatement rajusté pour correspondre à celui qui [lui] est dû et qu'on [lui] verse rétroactivement les sommes auxquelles [il] est convaincu d'avoir droit ».

[2]      Les parties ont déposé un « Exposé conjoint des faits » (pièce A-1), qui se lit comme il suit :

[Traduction]
Exposé conjoint des faits
convenu entre le
Conseil du Trésor
(Service correctionnel Canada - SCC)
et
l'Alliance de la fonction publique du Canada (AFPC)
Renvoi à l'arbitrage 166-2-31338
Wayne Alexander Copeland

  1. Wayne Alexander Copeland est fonctionnaire au Service correctionnel depuis le 28 octobre 1991. Le 21 juin 2000, son poste d'attache était classifié WP-4, avec une rémunération annuelle de 53 006 $ (en révision).

  2. Le 20 décembre 2000, M. Copeland s'est fait offrir une nomination intérimaire rétroactive au 5 septembre 2000 dans un poste de WP-5. Il a accepté cette offre, qui constituait une promotion conformément à l'article 24 du Règlement sur les conditions d'emploi dans la fonction publique. On a calculé que la rémunération à laquelle il avait droit s'élevait à 56 948 $ (en révision).

  3. Le 16 juillet 2001, M. Copeland a été confirmé pour une période indéterminée comme titulaire d'un poste de WP-05.

  4. Le 10 septembre 2001, comme M. Copeland occupait son poste de WP-5 depuis 12 mois, il a obtenu une augmentation d'échelon qui a porté son traitement à 59 148 $ (en révision).

  5. Le 19 novembre 2001, la convention collective entre le Conseil du Trésor et l'Alliance de la Fonction publique du Canada à l'égard des Services des programmes de l'administration (tous les employé-e-s), applicable notamment au groupe WP, a été signée. Par suite de la signature de cette convention collective et en application du sous-alinéa 64.03(b)(iii), le traitement de M. Copeland a été rajusté de la façon suivante :

    Date Traitement Groupe
    et niveau
    Intervention
    de paye
    21 juin
    2000
    56 890 $ WP-4 Restructuration
    et révision
    5 septembre
    2000
    58 770 $ WP-5 Révision de la
    rémunération
    d'intérim
    21 juin
    2001
    60 416 $ WP-5 Révision
    10 septembre
    2001
    62 750 $ WP-5 Augmentation
    d'échelon

  6. Le 11 décembre 2001, la direction a informé M. Copeland que son traitement de WP-5 ne serait pas recalculé pour la période de rémunération rétroactive. Cette décision était fondée sur " l'arrêt Lajoie " de la Cour d'appel fédérale.

  7. Le 11 janvier 2002, M. Copeland a présenté un grief protestant contre l'interprétation de la rémunération rétroactive qui lui est due.

LES PARTIES SE RÉSERVENT LE DROIT DE DÉPOSER DES DOCUMENTS ET DES TÉMOIGNAGES COMPATIBLES AVEC CE QUI PRÉCÈDE.

[3]      Les remarques d'ouverture du représentant du fonctionnaire s'estimant lésé se résument essentiellement à déclarer que le grief porte sur le droit de l'intéressé à une révision rétroactive de sa rémunération pendant qu'il assumait à titre intérimaire des fonctions de WP-5.

[4]      Le 21 juin 2000, le poste d'attache du fonctionnaire s'estimant lésé était classifié WP-4, et sa rémunération annuelle (en révision) s'élevait à 53 006 $. M. Copeland a commencé peu après une série d'affectations intérimaires, conformément à l'article 24 du Règlement sur les conditions d'emploi dans la fonction publique (pièce E-2), la première du 5 septembre 2000 au 31 mars 2001 et la seconde du 31 mars au 30 septembre 2001.

[5]      Quand il a accepté sa première nomination à titre intérimaire comme WP-5, la convention collective entre le Conseil du Trésor et l'Alliance de la Fonction publique du Canada (AFPC) à l'égard des Services des programmes et de l'administration avait expiré (le 21 juin 2000).

[6]      Le 16 juillet 2001, le fonctionnaire s'estimant lésé a accepté une nomination pour une période indéterminée à un poste de WP-5. La nouvelle convention collective a été signée par le parties à Ottawa le 19 novembre 2001. Les augmentations étaient rétroactives au 21 juin 2000; le 11 décembre 2001, l'employeur a informé le fonctionnaire s'estimant lésé qu'il ne calculerait pas de nouveau la rémunération qui lui avait été versée comme WP-5 durant ses périodes d'intérim. Par conséquent, à titre de superviseur WP-5, le fonctionnaire s'estimant lésé était moins bien payé que ses subordonnés WP-4.

[7]      Le représentant du fonctionnaire s'estimant lésé a conclu son exposé en déclarant que la décision rendue dans l'affaire Buchmann, 2002 CRTFP 14 (166-34-30637) devrait s'appliquer en l'espèce.

[8]      Les déclarations d'ouverture de l'avocat de l'employeur peuvent être résumées comme il suit.

[9]      L'employeur n'est pas lié par la décision de l'Agence des douanes et du revenu du Canada (ADRC), qui est un employeur distinct, de ne pas demander de contrôle judiciaire de la décision Buchmann. Le Conseil du Trésor est d'avis que cette décision n'est pas fondée. L'arrêt rendu dans l'affaire Procureur général c. Lajoie, [1992] A.C.F. no 101 et la décision Buchmann sont inconciliables, et un arbitre nommé en vertu de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP) est lié par ce que la Cour d'appel fédérale a statué dans Lajoie.

[10]      Le fonctionnaire s'estimant lésé a témoigné que, le 21 juin 2000, il était agent de libération conditionnelle WP-4 rémunéré au maximum de l'échelle, au cinquième échelon (53 006 $). Quelques jours avant le 5 septembre 2000, le directeur régional Dan MacDonald lui a demandé s'il aimerait assurer un intérim comme superviseur d'agents de libération conditionnelle, dans un poste de WP-5. Le fonctionnaire s'estimant lésé a accepté une série de nominations intérimaires ininterrompue qui a commencé le 5 septembre 2000 et s'est terminée le 30 septembre 2001.

[11]      Le 16 juillet 2001, le fonctionnaire s'estimant lésé a été nommé pour une période indéterminée à un poste de WP-5, conformément au Règlement sur les conditions d'emploi dans la fonction publique (pièce E-2).

[12]      Le 19 novembre 2001, l'AFPC et le Conseil du Trésor ont signé une convention collective prévoyant des augmentations de traitement rétroactives au 21 juin 2000. L'appendice « A » de cette convention collective est une liste des nouveaux taux de rémunération annuels (en dollars), les dates d'entrée en vigueur étant précisées pour les restructurations et les révisions salariales (augmentations économiques) de la façon suivante :
**APPENDICE " A "
WP - GROUPE PROGRAMMES DE BIEN-ÊTRE SOCIAL
TAUX DE RÉMUNÉRATION ANNUELS
(en dollars)

X) Restructuration : en vigueur le 21 juin 2000
A) En vigueur le 21 juin 2000
Y) Restructuration : en vigueur le 21 juin 2001
B) En vigueur le 21 juin 2001
C) En vigueur le 21 juin 2002

WP-4
De : $ 45707 47539 49362 51184 53006
À : X 45707 47539 49362 51184 53006 55126
 A 47170 49060 50942 52822 54702 56890
 Y 47170 49060 50942 52822 54702 56890 59166
 B 48491 50434 52368 54301 56234 58483 60823
 C 49703 51695 53677 55659 57640 59945 62344
 
 
WP-5
De : $ 54759 56948 59148 61348 63548
À : X 54759 56948 59148 61348 63548 66090
 A 56511 58770 61041 63311 65582 68205
 Y 56511 58770 61041 63311 65582 68205 70933
 B 58093 60416 62750 65084 67418 70115 72919
 C 59545 61926 64319 66711 69103 71868 74742

[13]      Le 21 juin 2000, le fonctionnaire s'estimant lésé était rémunéré au maximum de l'échelle des WP-4 (53 006 $), autrement dit au cinquième échelon. Avec la signature de la nouvelle convention collective, il avait droit à la restructuration « X » en vigueur le 21 juin 2000, qui le faisait passer au « nouveau sixième échelon » des WP-4 (55 126 $). En outre, à compter du 21 juin 2000, avec l'augmentation économique (la révision salariale) « A », sa rémunération était portée à 56 890 $.

[14]      Le 5 septembre 2000, le fonctionnaire s'estimant lésé étant à titre de WP-5 par intérim, l'employeur a calculé son taux de rémunération d'intérim en le fixant au taux suivant dans l'échelle de rémunération, c'est-à-dire au deuxième échelon (58 770 $). Le fonctionnaire s'estimant lésé est convaincu que le nouveau calcul de sa rémunération d'intérim aurait dû le faire passer au troisième échelon de l'échelle des WP-5 (à 61 041 $).

[15]      Le fonctionnaire s'estimant lésé estime aussi qu'il avait droit le 21 juin 2000 à une augmentation économique « B » (révision salariale) pour rester au troisième échelon de l'échelle des WP-5 (62 750 $).

[16]      Le 10 septembre 2001, le fonctionnaire s'estimant lésé était WP-5 depuis un an; il pense par conséquent qu'il aurait dû passer au quatrième échelon de l'échelle de rémunération (à 65 084 $). Il a déclaré que le calcul de l'employeur avait fixé sa rémunération au 21 juin 2001 au deuxième échelon des WP-5 (à 60 416 $) alors qu'un de ses subordonnés WP-4 était payé 60 823 $ (au septième échelon), soit 407 $ de plus que lui, alors que c'est lui qui avait été promu.

[17]      Le 11 décembre 2001, le fonctionnaire s'estimant lésé a été informé que l'employeur refusait de calculer de nouveau sa rémunération comme WP-5 durant la période de rémunération rétroactive. Il a déclaré n'avoir jamais été averti qu'accepter d'assurer un intérim comme WP-5 pouvait jouer à son détriment en matière de rémunération.

[18]      En contre-interrogatoire, le fonctionnaire s'estimant lésé a admis n'avoir pas consulté l'agent négociateur quant aux implications pour sa rémunération de son acceptation d'un intérim comme WP-5. Il a déclaré qu'il n'est pas normal de communiquer avec le syndicat sur des questions de rémunération en cas de nomination intérimaire.

[19]      Toujours en contre-interrogatoire, l'avocat de l'employeur a déclaré que, à la date de l'audience, la rémunération du fonctionnaire s'estimant lésé comme WP-5 (66 711 $) était plus élevée que celle d'un WP-4 au maximum de l'échelle (62 344 $); le fonctionnaire s'estimant lésé l'a reconnu. L'avocat de l'employeur a aussi déclaré qu'il y avait des recoupements dans certains cas; par exemple, une personne embauchée comme WP-5 de l'extérieur de la fonction publique aurait été payée au premier échelon (59 545 $), tandis qu'un WP-4 au maximum de l'échelle est payé 62 344 $, comme dans ce cas-ci, où le fonctionnaire s'estimant lésé a été moins payé que ses subordonnés pendant un certain temps.

[20]      Suzanne Marchand-Bigras a témoigné au nom de l'employeur. Elle est actuellement analyste des politiques à la Division des relations de travail de la Direction des ressources humaines du Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada. Elle a déclaré que, après les gels de la rémunération des années 1990, la négociation collective à l'égard du groupe WP a repris en 1997 et que, dans la présente affaire, c'est de la troisième convention collective négociée depuis qu'il s'agit. La témoin a aussi déclaré que l'article 64 de la convention collective actuelle est identique à celui de la convention collective antérieure. Cet article se lit comme il suit :
ARTICLE 64
ADMINISTRATION DE LA PAYE

64.01   Sauf selon qu'il est stipulé dans le présent article, les conditions régissant l'application de la rémunération aux employé-e-s ne sont pas modifiées par la présente convention.

64.02   L'employé-e a droit, pour la prestation de ses services :

a)   à la rémunération indiquée à l'appendice « A » pour la classification du poste auquel l'employé-e est nommé, si cette classification concorde avec celle qu'indique son certificat de nomination;

ou

b)   à la rémunération indiquée à l'appendice « A » pour la classification qu'indique son certificat de nomination, si cette classification et celle du poste auquel l'employé-e est nommé ne concordent pas.

64.03

a)   Les taux de rémunération indiqués à l'appendice « A » entrent en vigueur aux dates stipulées.

b)   Lorsque les taux de rémunération indiqués à l'appendice « A » entrent en vigueur avant la date de signature de la présente convention, les modalités suivantes s'appliquent :

(i)   pour les fins des sous-alinéas (ii) à (v), l'expression « période de rémunération rétroactive » désigne la période qui commence à la date d'entrée en vigueur de la révision rétroactive à la hausse des taux de rémunération et se termine le jour de la signature de la présente convention ou le jour où la décision arbitrale est rendue à cet égard;

(ii)   la révision rétroactive à la hausse des taux de rémunération s'applique aux employé-e-s, aux anciens employé-e-s ou, en cas de décès, à la succession des anciens employé-e-s qui faisaient partie des unités de négociation mentionnées à l'article 9 de la présente convention pendant la période de rétroactivité;

(iii)   les taux de rémunération sont payés en un montant équivalant à ce qui aurait été versé si la présente convention avait été signée ou si une décision arbitrale avait été rendue à cet égard à la date d'entrée en vigueur de la révision des taux de rémunération;

(iv)   pour permettre aux anciens employé-e-s ou, en cas de décès, aux représentants des anciens employé-e-s de toucher le paiement conformément au sous-alinéa b(iii), l'Employeur informe ces personnes, par courrier recommandé adressé à leur dernière adresse connue, qu'ils ou elles disposent de trente (30) jours à compter de la date de réception de la lettre recommandée pour demander ce paiement par écrit, l'Employeur étant dégagé de toute obligation concernant ledit paiement après ce délai;

(v)   il n'y a ni paiement ni notification en vertu de l'alinéa 64.03(b) lorsque le montant en question ne dépasse pas un dollar (1 $).

64.04   Lorsqu'une augmentation d'échelon de rémunération et une révision des rémunérations se produisent à la même date, l'augmentation d'échelon de rémunération est apportée en premier et le taux qui en découle est révisé conformément à la révision de la rémunération.

. . .

[21]      D'après la témoin, la Politique sur les conditions d'emploi (pièce G-1) fait partie de la convention collective et, à quelques corrections mineures et renumérotations près, elle n'a pas changé depuis 1991. (Les parties en sont convenues à l'audience.)

[22]      La témoin a expliqué que la rémunération du fonctionnaire s'estimant lésé s'élevait à 53 006 $ au 21 juin 2000. Sous la rubrique « Restructuration » de la convention collective, la note sur la rémunération 4 précise que : « Les employé-e-s des niveaux WP-1 à WP-6 qui, au 21 juin 2000, auront été rémunérés au maximum de leur niveau depuis au moins douze (12) mois passent au maximum du nouvel échelon le 21 juin 2000. »

[23]      Le fonctionnaire s'estimant lésé était au maximum de son niveau comme WP-4 (au cinquième échelon, soit 53 006 $) depuis 1998, de sorte qu'il avait droit à l'augmentation de restructuration, passant donc au nouveau maximum de l'échelle de rémunération des WP-4 (le sixième échelon, soit 55 126 $). De plus, le 21 juin 2000, on devait ajouter à sa rémunération une augmentation économique (révision salariale) qui allait la porter à 56 890 $, par suite des négociations.

[24]      Le 5 septembre 2000, le fonctionnaire s'estimant lésé a commencé à occuper à titre intérimaire un poste de WP-5, ce qui signifiait qu'il allait être assujetti aux articles 22, 23 et 24 de la Politique sur les conditions d'emploi (Taux de rémunération à la nomination ou mutation), qui stipulent ce qui suit (pièce G-1) :
Taux de rémunération à la nomination ou mutation

22. Sous réserve du présent règlement et de tout autre édit du Conseil du Trésor, le taux de rémunération d'une personne nommée à un service de la partie I doit être le taux minimum applicable au poste auquel elle accède.

23. Le taux de rémunération à la nomination ou aux mutations d'un employé, d'un fonctionnaire, d'un membre de la Gendarmerie royale du Canada ou des Forces armées canadiennes à un poste auquel le présent règlement s'applique, doit être établi en conformité avec les règles régissant la promotion, la mutation et mutation par nomination ou la rétrogradation, selon le cas.

Taux de rémunération à la promotion

24.(1) La nomination d'un employé désigné à l'article 23 constitue une promotion lorsque le taux de rémunération maximal applicable au poste auquel cette personne est nommée dépasse le taux de rémunération maximal applicable au niveau de titularisation de l'employé avant cette nomination :

a) d'un montant au moins égal à la plus faible augmentation prévue pour le poste auquel elle est nommée, lorsque le poste comporte plus d'un taux de rémunération; ou

b) d'un montant au moins égal à quatre pour cent du taux maximal pour le poste qu'elle occupait immédiatement avant cette nomination, lorsque le poste auquel elle est nommée ne comporte qu'un seul taux de rémunération.

24.(2) Sous réserve des articles 27 et 28, à la promotion, le taux de rémunération sera le taux le plus proche du taux de rémunération auquel l'employé avait droit à son niveau de titularisation immédiatement avant la nomination qui lui vaut une augmentation tel que le stipule le paragraphe 1) du présent article; ou d'un montant au moins égal à quatre pour cent du taux maximal pour le poste auquel il est nommé, lorsque la rémunération du poste auquel se fait la nomination est fondée sur le rendement.

[25]      Le fonctionnaire s'estimant lésé, dont la rémunération au sixième échelon de l'échelle des WP-4 s'élevait à 56 890 $, est donc passé au deuxième échelon de celle des WP-5 (56 948 $). Le 21 juin 2001, il n'avait pas droit à la restructuration puisqu'il ne satisfaisait pas aux conditions de la note sur la rémunération 4 (il n'était pas au maximum de son niveau depuis 12 mois). Par contre, il avait droit à l'augmentation économique, c'est-à-dire à la révision salariale qui le faisait passer à l'échelon suivant (58 770 $).

[26]      Une autre restructuration s'est ajoutée le 21 juin 2001, mais, à ce moment-là, ce sont les notes sur la rémunération 5 et 6 qui s'appliquaient. La première prévoit que : « Tous les employé-e-s touchés par une restructuration à compter du 21 juin 2001 sont rémunérés selon l'échelle de taux « Y » à l'appendice « A », au taux indiqué juste au dessous de leur ancien taux ou au taux le plus près, sans être inférieur à leur ancien taux de rémunération. »

[27]      La note sur la rémunération 6 prévoit que : « Les employé-e-s des niveaux WP-1 à WP-6 qui, au 21 juin 2001, auront été rémunérés au maximum de leur niveau depuis au moins douze (12) mois passent au maximum du nouvel échelon le 21 juin 2001. »

[28]      Le fonctionnaire s'estimant lésé ne satisfaisait pas aux conditions de ces deux notes sur la rémunération, mais il avait droit à l'augmentation économique de la révision salariale, de sorte que sa rémunération s'élevait alors à 60 416 $.

[29]      Le 10 septembre 2001, il avait aussi droit à son augmentation d'échelon (après un an comme WP-5), ce qui faisait passer sa rémunération au troisième échelon (62 750 $).

[30]      En contre-interrogatoire, la témoin a reconnu que, dans ses calculs de la rémunération rétroactive, l'employeur s'était inspiré des notes sur la rémunération ainsi que de l'arrêt Lajoie, supra, qui signifie que l'histoire ne se répète pas et que les révisions de la rémunération sont versées rétroactivement, mais que le taux de rémunération à la promotion continue d'être calculé à partir de la rémunération de l'intéressé à sa nomination; il ne devrait pas être calculé de nouveau.

ARGUMENTS

Pour le fonctionnaire s'estimant lésé

[31]      Les arguments avancés pour le fonctionnaire s'estimant lésé se résument de la façon suivante.

[32]      Les dispositions pertinentes de la convention collective sont l'alinéa 64.03a), qui précise que : « Les taux de rémunération indiqués à l'appendice « A » entrent en vigueur aux dates stipulées ", ainsi que le sous-alinéa 64.03b)(iii), où l'on peut lire que » les taux de rémunération sont payés en un montant équivalant à ce qui aurait été versé si la présente convention avait été signée ou si une décision arbitrale avait été rendue à cet égard à la date d'entrée en vigueur de la révision des taux de rémunération ».

[33]      L'alinéa 46.C)(1) Nouveau calcul du taux de rémunération de la Politique sur les conditions d'emploi (pièce G-1) stipule que :

46.C) Nouveau calcul du taux de rémunération

(1) L'employé qui touche une rémunération d'intérim a droit à un nouveau calcul du taux de la rémunération d'intérim, en vertu des articles 24 ou 26, lorsqu'il se produit des augmentations et des révisions salariales dans son niveau de titularisation. Si, à la suite du nouveau calcul, le taux de rémunération du niveau de classification supérieur est moindre que celui qu'il recevait juste avant ledit calcul, l'employé est rémunéré au taux de rémunération qu'il recevait avant le nouveau calcul.

(2) Tout employé qui touche une rémunération d'intérim a droit aux révisions salariales du niveau de classification supérieur.

[34]      Comme le paragraphe 46.C) fait partie intégrante de la convention collective, le fonctionnaire a le droit absolu de bénéficier d'un nouveau calcul de sa rémunération d'intérim.

[35]      En l'espèce, le raisonnement de l'employeur fondé sur l'arrêt Lajoie, supra, est absurde, étant donné que le fonctionnaire s'estimant lésé, un superviseur WP-5 en date du 21 juin 2000, supervisait huit subordonnés WP-4 et qu'il était moins bien payé qu'eux. C'est absurde; actuellement - et peut-être aussi dans l'avenir -, les fonctionnaires pourraient refuser d'accepter des affectations intérimaires à cause de cette décision d'administration de la paye de l'employeur qui leur est préjudiciable.

[36]      Si une personne raisonnable a le moindre souci d'équité dans sa façon de procéder, pourquoi l'employeur, qui a demandé au fonctionnaire s'estimant lésé de l'aider en acceptant une affectation intérimaire comme WP-5, l'a-t-il promu à ce niveau en l'y nommant pour une période indéterminée, pour calculer sa rémunération à son détriment deux ans après? L'employé n'a jamais averti le fonctionnaire s'estimant lésé avant sa nomination intérimaire - ni pendant qu'il exerçait un intérim - du changement qui allait s'appliquer au calcul de sa rémunération rétroactive. Non seulement le fonctionnaire subit-il une perte financière immédiate à cause de ces nouvelles règles, mais il en subira aussi les conséquences quand on calculera la moyenne de ses cinq meilleures années ouvrant droit à pension en vertu de la Loi sur la pension de la fonction publique.

Pour l'employeur

[37]      L'avocat de l'employeur a analysé et disséqué l'arrêt Lajoie, en me rappelant qu'il me lie. Il a aussi déclaré que la formulation du paragraphe 46.C) Nouveau calcul du taux de rémunération de la Politique sur les conditions d'emploi (pièce G-1) est écrit au présent, dans une optique tournée vers l'avenir, et qu'il n'y est pas question de rémunération rétroactive.

Réplique

[38]      Le représentant du fonctionnaire s'estimant lésé a déclaré que c'est la décision Buchmann, supra, qui s'applique dans la présente affaire, plutôt que l'arrêt Lajoie.

[39]      Il a aussi affirmé que le paragraphe 46.C) ne mentionne pas de niveau, mais précise bel et bien que : « L'employé qui touche une rémunération d'intérim a droit à un nouveau calcul du taux de la rémunération d'intérim »....

MOTIFS DE LA DÉCISION

[40]      Dans une affaire d'interprétation ou d'application de la convention collective, le fardeau de la preuve incombe au fonctionnaire s'estimant lésé. L'intéressé était rémunéré au maximum (cinquième échelon) des WP-4 jusqu'au 20 juin 2000, avec un traitement de 53 006 $, conformément à la convention collective. C'était la rémunération à partir de laquelle l'employeur est parti pour calculer sa rémunération quand il a commencé à exercer un intérim comme WP-5, le 5 septembre 2000. L'employeur s'est alors fondé pour son calcul sur l'alinéa 24.(1)a) Taux de rémunération à la promotion de la Politique sur les conditions d'emploi (pièce G-1), ainsi que sur le paragraphe 46.B) de la même Politique, qui stipule que :

46.B) Taux de rémunération

Le taux de rémunération d'intérim est identique au taux que l'employé recevrait s'il était muté ou nommé au niveau de classification supérieur, calculé conformément aux articles 24 ou 26 du présent règlement.

[41]      L'employeur a appliqué ces dispositions pour calculer la rémunération du fonctionnaire s'estimant lésé quand celui-ci a commencé à occuper à titre intérimaire un poste de WP-5; son traitement est alors passé de 53 006 $ à 56 948 $. Ce nouveau taux de rémunération est resté en vigueur jusqu'au 19 novembre 2001, quand le Conseil du Trésor et l'AFPC ont signé une nouvelle convention collective à l'égard du groupe Services des programmes et de l'administration.

[42]      L'alinéa 46.C)(1) de la Politique sur les conditions d'emploi stipule clairement que :

46.C) Nouveau calcul du taux de rémunération

(1) L'employé qui touche une rémunération d'intérim a droit à un nouveau calcul du taux de la rémunération d'intérim, en vertu des articles 24 ou 26, lorsqu'il se produit des augmentations et des révisions salariales dans son niveau de titularisation. Si, à la suite du nouveau calcul, le taux de rémunération du niveau de classification supérieur est moindre que celui qu'il recevait juste avant ledit calcul, l'employé est rémunéré au taux de rémunération qu'il recevait avant le nouveau calcul.

[C'est nous qui soulignons.]

[43]      À mon avis, le 21 juin 2000, en application de la nouvelle convention collective, le fonctionnaire s'estimant lésé aurait dû passer du cinquième (53 006 $) au sixième échelon de rémunération des WP-4 (55 126 $), comme on peut le constater dans la grille des taux de rémunération, à la suite d'une restructuration, ce qu'il a fait. Le 21 juin 2000, toujours au cinquième échelon de rémunération des WP-4, son traitement était de 56 890 $ avec l'augmentation économique (révision salariale).

[44]      Le 5 septembre 2000, le fonctionnaire s'estimant lésé a commencé à occuper à titre intérimaire un poste de WP-5, ce qui constituait une promotion conformément à l'article 24 de la Politique sur les conditions d'emploi et au paragraphe 46.B) de cette même Politique. Il aurait dû donc être rémunéré à un taux de 59 148 $ et, avec l'augmentation économique (révision salariale) correspondante dans la grille, sa rémunération serait passée à 61 041 $.

[45]      Le nouveau calcul des taux de rémunération effectué en vertu du paragraphe 46.C) est applicable dans la convention collective, comme l'indique la clause 64.01, qui précise expressément que :

64.01 Sauf selon qu'il est stipulé dans le présent article, les conditions régissant l'application de la rémunération aux employé-e-s ne sont pas modifiées par la présente convention.

[46]      En outre, le sous-alinéa 64.03b)(iii) stipule que :

(iii) les taux de rémunération sont payés en un montant équivalant à ce qui aurait été versé si la présente convention avait été signée ou si une décision arbitrale avait été rendue à cet égard à la date d'entrée en vigueur de la révision des taux de rémunération [...]

[47]      La Politique sur les conditions d'emploi (pièce G-1) prévoit notamment le nouveau calcul des taux de rémunération et précise à cet égard que les fonctionnaires ont droit à un nouveau calcul de leur taux de rémunération d'intérim « lorsqu'il se produit des augmentations et des révisions salariales dans [leur] niveau de titularisation ». Il s'ensuit que, à compter du 5 septembre 2000, après la révision de la rémunération du fonctionnaire s'estimant lésé dans son poste d'attache rétroactivement au 21 juin 2000, il avait droit à un nouveau calcul de sa rémunération d'intérim à compter de cette date.

[48]      J'ai examiné l'arrêt Lajoie et la décision Buchmann, supra, et ni l'un, ni l'autre ne contiennent une interprétation de l'alinéa 46.C)(1), ni du nouveau calcul du taux de rémunération d'intérim qu'il nous faudrait dans cette affaire.

[49]      Le taux de rémunération révisé du fonctionnaire s'estimant lésé le 21 juin 2000 dans son poste d'attache s'élevait à 56 890 $ (pièce A-1); par conséquent, sa rémunération d'intérim au 5 septembre 2000 aurait dû être de 61 041 $.

[50]      Pour tous les motifs qui précèdent, ce grief est accueilli. J'ordonne à l'employeur de payer au fonctionnaire s'estimant lésé la rémunération qui lui est due, conformément aux calculs suivants :

Date

Rémunération

Groupe et niveau

Intervention de paye

21 juin 2000 56 890 $ WP-4 Restructuration et révision salariale
5 septembre 2000 61 041 $ WP-5 Nomination intérimaire
(nouveau calcul)
21 juin 2001 62 750 $WP-5 Révision salariale
10 septembre 2001 65 084 $ WP-5 Augmentation d'échelon

D.R. Quigley,
commissaire

OTTAWA, le 10 mars 2003.

Traduction de la C.R.T.F.P.

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