Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Jours fériés désignés payés - Horaire de travail variable (poste de 12 heures) - Le fonctionnaire s'estimant lésé devrait-il avoir droit à tout le poste de congé ou aurait-il dû travailler la différence de quatre heures entre les heures normales prévues à l'horaire et les heures journalières normales? - le fonctionnaire s'estimant lésé est agent de correction à l'Établissement de l'Atlantique à Renous (N.-B.) - l'horaire de travail variable à l'établissement prévoyait l'alternance de postes de 12 heures et de postes de 8 heures sur une période de deux semaines - pour la semaine du 16 avril 2001, on avait attribué au fonctionnaire s'estimant lésé un poste de 12 heures le lundi de Pâques - toutefois, parce qu'il s'agissait d'un jour férié, il était prévu que le fonctionnaire s'estimant lésé travaillerait de 11 h à 15 h (quatre heures) et serait en congé de 7 h à 11 h et de 15 h à 19 h (pour un total de huit heures) - le fonctionnaire s'estimant lésé a contesté qu'il était prévu qu'il travaillerait quatre heures un jour férié désigné payé, et il a prétendu avoir droit à tout le poste de 12 heures - le fonctionnaire s'estimant lésé a fait valoir que le régime d'horaire de travail variable n'était pas censé modifier les droits fondamentaux des employés ni censé aboutir à la division d'un jour férié désigné payé - le fonctionnaire s'estimant lésé a fait valoir également que le fait de lui accorder tout le poste de 12 heures à titre de congé n'entraînerait aucun coût supplémentaire à l'employeur, tel que le prévoyait l'article 34 (Horaire variable) - l'employeur a fait valoir que la disposition relative à l'horaire de travail variable ne créait pas une catégorie particulière d'employés et que ceux qui étaient assujettis à un tel régime avaient droit aux mêmes avantages que les employés qui n'étaient pas assujettis à un régime de travail par poste, c.-à-d. à un crédit de 7,5 heures pour un jour férié désigné payé - l'employeur a fait valoir que les " heures journalières normales " différaient des " heures normales prévues à l'horaire " - l'arbitre a statué que la convention collective établissait une distinction entre les " heures journalières normales " et les " heures normales prévues à l'horaire " - il a conclu que les " heures normales prévues à l'horaire effectuées " est un renvoi aux heures de chaque poste que l'employé doit travailler - il a conclu que les " heures journalières normales " signifiaient huit heures - il a déterminé également que les décisions rendues dans les affaires King et Holzer et Canada (Procureur général) c. King n'étaient pas pertinentes, au motif que l'interprétation de la " journée " de travail n'était pas en litige dans la présente affaire et que le libellé de la convention collective dans cette affaire différait du libellé en question dans la présente affaire. Grief rejeté. Décisions citées : King et Holzer, [2003] A.C.F. no 777; 2001 CRTFP 117 (166-34-30346, 30638 et 30639); Canada (Procureur général) c. King [2002] A.C.F. no 673; [2000] A.C.F. no 1987; (166-34-28332 et 28333).

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2003-06-05
  • Dossier:  166-2-31221
  • Référence:  2003 CRTFP 40

Devant la Commission des relations de travail dans la fonction publique



ENTRE

DOUG DWAIN WHITE
fonctionnaire s'estimant lésé

et

LE CONSEIL DU TRÉSOR
(Solliciteur général du Canada - Service correctionnel)

employeur

Devant:  Ian Mackenzie, commissaire

Pour le fonctionnaire
s'estimant lésé :   
   John Mancini, avocat, UCCO-SACC-CSN

Pour l'employeur :   Richard Fader, avocat


Affaire entendue à Moncton (Nouveau-Brunswick),
le 5 mars 2003.


[1]      Le grief en l'instance se rapporte à l'interprétation de la disposition de la convention collective ayant trait aux jours fériés désignés payés et à son application aux agents correctionnels qui sont assujettis à un régime d'horaire de travail variable. M. Doug White, agent correctionnel à l'établissement de l'Atlantique situé à Renous (Nouveau-Brunswick), a déposé un grief le 22 avril 2001. La réponse au dernier palier de la procédure de règlement des griefs est datée du 6 février 2002 et le grief a été renvoyé à l'arbitrage le 20 mars 2002. Le fonctionnaire s'estimant lésé a témoigné pour son compte et l'employeur a appelé deux témoins.

La preuve

[2]      M. White est assujetti à un régime d'horaire de travail variable, ainsi qu'il est prévu dans la convention collective conclue entre l'employeur et l'agent négociateur, UCCO-SACC-CSN, (pièces G-1). L'article 34 est libellé comme suit :
ARTICLE 34
HORAIRE DE TRAVAIL VARIABLE

L'Employeur et l'Agent négociateur conviennent que les conditions suivantes s'appliquent aux employé-e-s à l'intention desquels des horaires de travail variables sont approuvés conformément aux dispositions pertinentes de la présente convention collective.

La convention est modifiée par les présentes dispositions dans la mesure indiquée. Il est convenu que la mise en ouvre de cet assouplissement des horaires ne doit pas entraîner de dépenses ou de coûts supplémentaires du seul fait d'un tel assouplissement.

1. Conditions générales

Les heures de travail figurant à l'horaire d'une journée quelconque peuvent être supérieures ou inférieures à l'horaire de travail de la journée normale de travail qu'indique la présente convention; les heures du début et de la fin du travail, des pauses-repas et des périodes de repos seront fixées en fonction des nécessités du service déterminées par l'Employeur et les heures journalières de travail seront consécutives.

Dans le cas des employé-e-s travaillant par postes, ces horaires doivent prévoir que leur semaine normale de travail correspondra, en moyenne, au nombre d'heures hebdomadaires de travail prévues dans la présente convention pendant toute la durée de l'horaire. La durée maximale d'un horaire sera de six (6) mois.

Dans le cas des employé-e-s travaillant le jour, ces horaires doivent prévoir que leur semaine de travail normale correspondra, en moyenne, au nombre d'heures hebdomadaires de travail prévues dans la présente convention pendant toute la durée de l'horaire. La durée maximale d'un horaire sera de vingt-huit (28) jours. Lorsqu'un employé-e modifie son horaire variable ou qu'il ne travaille plus selon un tel horaire, tous les rajustements voulus seront faits.

2. Conversion des jours en heures

Lorsque les dispositions de la présente convention font mention de jours, ceux-ci sont convertis en heures conformément à l'article 21 de la présente convention.

Nonobstant les dispositions qui précèdent, dans le paragraphe 30.02, Congé de deuil payé, le mot « jour » aura la même signification que dans les dispositions de la convention collective.

Dans le cas d'une semaine de travail de trente-sept heures et demie (37 1/2), le jour est converti en sept heures et demie (7 1/2).

3. Mise en ouvre/Cessation

À compter de la date à laquelle le présent article s'applique à un employé-e, ses crédits journaliers de congés acquis sont convertis en heures.

Tout retour d'un employé-e au régime des heures hebdomadaires normales de travail nécessitera la reconversion des crédits horaires en jours selon le taux de conversion modifié.

À compter de la date à laquelle le présent article cesse de s'appliquer à un employé-e, ses crédits horaires de congés annuels, de congés de maladie et de jours de remplacement acquis sont convertis en jours.

4. Congés - Généralités

Les congés sont accordés en heures, le nombre d'heures débitées pour chaque jour de congé correspondant au nombre d'heures de travail normalement prévues à l'horaire de
l'employé-e pour la journée en question.

Lorsque les dispositions relatives aux congés mentionnent des jours dans la présente convention collective, ces jours sont convertis en heures de la façon suivante :

 HEURES
7 ½
- cinq douzièmes (5/12) de jour3,125
- une demi-journée (1/2) 3,750
- cinq sixièmes (5/6) de jour 6,250
- une (1) journée 7,500
- un jour et quart (1 1/4) 9,375
- un jour et deux tiers (1 2/3) 12,500
- deux jours et un douzième (2 1/12) 15,625
- deux jours et demi (2 ½) 18,750

5. Champ d'application particulier

Pour plus de précision, les dispositions suivantes sont appliquées comme suit :

Interprétation et définitions

« taux de rémunération journalier » - ne s'applique pas.

Heures supplémentaires

Des heures supplémentaires sont payées pour tout travail exécuté par l'employé-e en sus des heures de travail prévues à son horaire un jour de travail normal ou les jours de repos sont payées à tarif et trois quarts (1 3/4).

Déplacements

La rémunération en heures supplémentaires dont il est question au paragraphe 27.04 de la présente convention ne s'applique qu'aux heures qui dépassent l'horaire normal de travail journalier de l'employé-e au cours d'une journée normale de travail.

Jours fériés désignés payés

a) Un jour férié désigné payé correspond au nombre d'heures journalières normales prévues dans la présente convention.

b) Lorsque l'employé-e travaille un jour férié désigné payé, il est rémunéré, en plus de sa rémunération horaire journalière normale prévue dans la convention particulière du groupe concerné, à tarif et demi (1 1/2) jusqu'à concurrence des heures normales prévues à son horaire effectuées et à tarif double (2) pour toutes les heures effectuées en sus des heures normales prévues à son horaire.

Congés annuels

Les employé-e-s acquièrent des crédits de congés annuels au rythme prévu en fonction de leurs années de service, conformément à l'article 29 de la présente convention. Les congés sont accordés en heures, le nombre d'heures débitées pour chaque jour de congé annuel correspondant au nombre d'heures de travail normalement prévues à l'horaire de l'employé-e pour la journée en question.

Les employé-e-s qui doivent travailler pendant une partie quelconque d'une année financière en vertu des dispositions concernant l'horaire de travail variable de la présente convention collective, ne bénéficient pas de l'arrondissement, à la demi-journée suivante, des fractions de jours de congés annuels de plus ou de moins d'une demi-journée (1/2).

Congés de maladie

Les employé-e-s acquièrent des crédits de congés de maladie au rythme prévu à l'article 31 de la présente convention collective. Les congés seront accordés en heures, le nombre d'heures débitées pour chaque jour de congé de maladie correspondant au nombre d'heures de travail normalement prévues à l'horaire de l'employé-e pour la journée en question.

[…].

Échange de postes

Lorsque des employé-e-s échangent leurs postes, si la présente convention collective le permet, l'Employeur verse la rémunération comme s'il n'y avait pas eu d'échange.

[…]

[3]      Pour la semaine du 16 avril 2001, on avait attribué à M. White un poste de 12 heures le 16 et le 17, un jour de repos le 18 et le 19, puis trois postes de huit heures chacun le reste de la semaine (tableau de service; pièce E-2). Le 16 avril, c'est-à-dire le lundi de Pâques, un jour férié désigné payé, il était prévu que le fonctionnaire s'estimant lésé travaille de 11 h à 15 h (quatre heures) et soit en congé de 7 h à 11 h et de 15 h à 19 h (pour un total de huit heures) (pièce E-4).

[4]      M. White a contesté le fait qu'on l'avait mis en congé pendant huit heures et qu'il avait été obligé de travailler quatre heures. À titre de réparation, il indiquait ce qui suit « Quand on accorde un congé dans le cadre d'un poste de 12 heures, le congé devrait englober les 12 heures.»

[5]      L'horaire de travail variable en place à l'établissement de l'Atlantique prévoit l'alternance de postes de 12 heures et de huit heures sur une période de deux semaines. La durée de chaque poste est déterminée par M. Dale Lawson, surveillant correctionnel à l'établissement de l'Atlantique, qui établit le tableau de service. Le nombre d'heures travaillées pendant une période de 12 semaines s'établit à 450, ou à 37,5 par semaine, en moyenne. Trois journées consécutives de repos sont prévues aux deux semaines. Les employés qui ne sont pas assujettis à un horaire de travail variable travaillent 37,5 heures par semaine.

[6]      Mme Donna Crowell, conseillère en rémunération au bureau régional de Moncton, a témoigné que les employés assujettis au régime d'horaire de travail variable sont rémunérés aux deux semaines pour 37,5 heures de travail hebdomadaires, quel que soit le nombre d'heures réellement travaillées. À la fin de la période de 12 semaines, le nombre d'heures hebdomadaires travaillées s'établit en moyenne à 37,5. Les heures supplémentaires et les autres indemnités payables font l'objet d'un chèque distinct.

[7]      Mme Crowell a également affirmé qu'il appartenait à celui ou celle qui établit le tableau de service de déterminer le nombre d'heures à attribuer à un employé pour arriver au total requis. C'est M. Dale Lawson, surveillant correctionnel (CX-3), qui avait la charge d'établir les tableaux de service à l'établissement de l'Atlantique.

[8]      Dans une note de service adressée à tous les agents correctionnels le 7 avril 2001 (pièce E-4), M. Lawson indique ce qui suit :
[Traduction]

[…] dans les cas où on ne vous attribue que quatre heures de travail, vous avez la possibilité de prendre un congé annuel ou un congé non rémunéré de quatre heures […]

[9]      M. Lawson a indiqué que, si un agent correctionnel auquel on a attribué un poste de 12 heures doit s'absenter pour cause de maladie pendant une partie de son poste, on déduit des 12 heures le nombre exact d'heures d'absence.

[10]      M. White a indiqué qu'il existait une autre possibilité, c'est-à-dire se faire remplacer pendant la période d'absence. C'est ce qu'il a fait le 16 avril. S'il n'avait pas trouvé un remplaçant et n'avait pas travaillé pendant les quatre heures prévues, il aurait été obligé d'utiliser quatre heures de congé. S'il avait travaillé les quatre heures, on l'aurait rémunéré à tarif et demi en sus de son salaire habituel. M. White a précisé que son remplaçant avait été rémunéré à tarif et demi pour les quatre heures. Il a lui-même été rémunéré pour le jour férié désigné payé (en d'autres termes, les huit heures ont été prises en compte dans le calcul des 450 heures requises pendant la durée du cycle de travail).

[11]      Le tableau de service pour la période de deux semaines en cause (du 16 au 29 avril) (pièce E-1) montre que M. White a travaillé 64 heures au lieu des 75 heures qu'un employé assujetti à l'horaire quotidien normal travaille habituellement. Durant la période de 12 semaines, il a accumulé les 450 heures requises. Mme Crowell a témoigné qu'on avait été obligé d'attribuer un poste de 12 heures à M. White pour qu'il obtienne les 450 heures requises.

[12]      Les employés assujettis à l'horaire quotidien normal qui sont en congé un jour férié désigné payé le sont pour toute la durée de leur poste de huit heures. (pièce E-4).

Argumentation

Pour le fonctionnaire s'estimant lésé

[13]      Le représentant du fonctionnaire s'estimant lésé, Me Mancini, a déclaré que l'article 34 « Horaire de travail variable » est entré en vigueur alors que l'article 21 « Durée du travail et heures et heures supplémentaires » existait déjà. Par conséquent, l'article 34 devait être lu en conjugaison avec cette disposition. De façon générale, l'horaire variable de travail n'a rien changé pour l'employeur sur le plan des coûts. Les pénitenciers fédéraux fonctionnent 24 heures sur 24, 12 mois sur 12. Quelle que soit la manière dont les horaires sont structurés, le coût demeure le même pour l'employeur.

[14]      En créant le régime d'horaire de travail variable, les parties ont conservé la semaine de travail de 37,5 heures, la considérant comme une « fiction nécessaire », parce qu'il doit y avoir concordance entre le régime d'horaire de travail variable et les dispositions générales de la convention collective. Quel que soit le nombre d'heures travaillées, les employés qui sont assujettis au régime d'horaire variable sont rémunérés pour 37,5 heures.

[15]      Le régime d'horaire de travail variable est un droit qui revêt beaucoup d'importance pour les employés. Les pénitenciers sont des milieux de travail dangereux et stressants. Le régime d'horaire de travail variable constitue un grand progrès pour les agents et il a une incidence positive sur leur vie familiale et sociale.

[16]      L'une des principales caractéristiques du régime c'est qu'il n'est pas censé modifier les droits fondamentaux des employés. L'article 34 n'a pas pour but de changer les règles, sauf pour ce qui est d'instaurer un régime d'horaire de travail variable. Il n'est pas censé aboutir à la division d'un jour férié désigné payé comme c'est arrivé dans le cas de M. White.

[17]      En ce qui concerne la disposition de l'article 34 selon laquelle la mise en ouvre de l'assouplissement des horaires « ne doit pas entraîner de dépenses ou de coûts supplémentaires », quelle différence cela fait-il que le fonctionnaire s'estimant lésé soit en congé huit heures ou 12 heures ? On l'aurait rémunéré à tarif et demi de la même manière que son remplaçant a été rémunéré à tarif et demi. Cela n'entraîne absolument aucun coût supplémentaire pour l'employeur, alors que le contraire est faux. Le fonctionnaire s'estimant lésé a été contraint de se trouver un remplaçant, sinon on lui aurait défalqué quatre heures de vacances ou autres.

[18]      Me Mancini, s'appuyant sur la décision rendue dans l'affaire King et Holzer, 2001 CRTFP 117 (dossiers de la Commission 166-34-30346, 30638 et 30639), termine en disant qu'un jour désigne une période de 24 heures et qu'on aurait dû accorder à M. White la totalité des 12 heures au titre du jour férié. (Peu de temps après l'audience, la décision a été confirmée par la Cour fédérale, Section de première instance : [2003] A.C.F. no 777.)

[19]      L'avocat du fonctionnaire s'estimant lésé invoque également les décisions suivantes : Canada (Procureur général) c. King [2002] A.C.F. no 673; [2000] A.C.F. no 1987; dossiers de la Commission 166-2-28332 et 28333.

Pour l'employeur

[20]      La question à trancher en l'espèce est fort simple : qu'est-ce qui se passe quand un employé prend un jour férié en congé alors qu'il est censé travailler 12 heures cette journée-là? Il a droit à ce qui a été négocié par les parties à la convention collective. La disposition portant sur l'horaire de travail variable n'a pas pour but de créer une catégorie spéciale d'employés, et les agents correctionnels assujettis à un régime d'horaire de travail variable ne devraient pas avoir droit à des avantages différents de ceux qui sont accordés aux autres employés qui obtiennent un crédit de 7,5 heures pour un jour férié désigné payé.

[21]      Il n'y a pas de disposition dans la convention collective qui indique qu'un jour désigne une période de 24 heures, comme c'était le cas dans l'affaire King et Holzer (supra). La convention collective prévoit la conversion des jours en heures (article 34.2). Si les parties avaient voulu qu'un jour désigne une période de 24 heures, comme dans l'affaire King et Holzer, elles l'auraient précisé; or, elles ont très explicitement indiqué que les jours devaient être convertis en heures. Elles ont aussi précisé que le congé de deuil faisait exception à cette règle, comme en témoigne le libellé suivant :
« le mot « jour » aura la même signification que dans les dispositions de la convention collective » (article 34, paragraphe 2). Autrement dit, un jour désigne une période de 7,5 heures, sauf dans le cas d'un congé de deuil.

[22]      Au paragraphe g), portant sur les jours fériés désignés payés, de l'article 34, il est dit qu'un jour férié désigné payé « correspond au nombre d'heures journalières normales prévues dans la présente convention. » Au paragraphe b), qui s'applique aux employés qui doivent travailler un jour férié désigné payé, il est question des « heures normales prévues à son horaire effectuées ». Si on avait voulu que les employés soient rémunérés pour une période de 12 heures lorsqu'ils ne travaillent pas un jour férié désigné payé, on aurait utilisé le même libellé pour chaque article.

[23]      L'article 21.01 définit les « heures journalières normales ». Si les parties avaient voulu que ce soient les heures normales prévues à l'horaire, elles auraient utilisé ces termes. Or, elles ont expressément choisi l'expression « heures journalières normales ».

[24]      Le régime des horaires de travail variable a été instauré pour des raisons administratives. Les employés peuvent ainsi obtenir un nombre accru de jours consécutifs de repos. Il n'est pas censé occasionner des coûts supplémentaires pour l'employeur ni créer une catégorie particulière d'employés qui sont payés plus cher que les autres les jours fériés désignés payés.

[25]      Me Fader a aussi établi une distinction avec la décision King et Holzer (supra) à certains égards, notamment en ce qui concerne le fait que le terme « jour » n'était pas défini, qu'il n'y avait aucune disposition prévoyant la conversion des jours en heures et que l'affaire portait sur la disposition relative au congé pour obligation familiale.

[26]      Dans la décision King (supra), l'arbitre a retenu la thèse de l'employeur, au paragraphe 24, lorsqu'elle a établi une distinction entre les «heures normales de travail prévues à [l']horaire » et les « heures de travail normales ».

[27]      La question à trancher est de savoir à combien d'heures un employé qui est en congé un jour férié désigné payé a droit. La convention collective prévoit la conversion à 7,5 heures. Cependant, l'employé qui ne travaille pas le jour où il a un poste de 12 heures se retrouve en déficit eu égard au nombre total d'heures qu'il doit accumuler durant la période de 12 semaines.

[28]      Les termes différents qui sont utilisés dans une convention collective devraient se voir attribuer des sens différents. Dans la disposition relative aux jours fériés, il est question des « heures journalières normales »; ces termes ne peuvent donc pas vouloir dire la même chose que les « heures de travail normales prévues à son horaire ». L'employé affecté à un poste de 12 heures travaille quatre heures de plus que les huit heures habituelles (les heures journalières normales). Le libellé de la convention collective n'a pas pour but d'accorder des avantages supplémentaires.

[29]      L'avocat de l'employeur renvoie aussi à l'ouvrage de Palmer et Palmer intitulé, Collective Agreement Arbitration in Canada, Troisième édition (1991).

Réponse

[30]      En dépit de la demande du fonctionnaire s'estimant lésé, aucune preuve n'a été produite pour expliquer comment l'application des dispositions relatives à l'horaire de travail variable pouvait entraîner des coûts supplémentaires pour l'employeur.

[31]      Le paragraphe a) de la disposition de l'article 34 ayant trait aux jours fériés désignés payés n'accorde aucun droit; il indique qu'un jour désigné payé « correspond au » nombre d'heures journalières normales. En anglais, on utilise les mots « shall account for ». C'est l'article 26 qui accorde des droits. L'article 34 n'a pas été conçu à cette fin; il établit en fait une « fiction » de 37,5 heures.

[32]      La convention collective ne permet pas à l'employeur de diviser un jour férié désigné payé en deux comme il l'a fait en l'espèce, et l'employeur n'a pas invoqué de disposition qui étayerait une telle interprétation.

Motifs de la décision

[33]      Dans la convention collective négociée par les parties, on retrouve des dispositions sur les jours fériés désignés payés et sur l'horaire de travail variable. Je dois d'abord examiner ces dispositions pour voir si elles sont déterminantes pour statuer sur le grief avant de Me pencher sur la jurisprudence invoquée.

[34]      Les dispositions relatives à l'horaire de travail variable (l'article 34) modifient les autres dispositions de la convention collective et elles comportent une disposition particulière ayant trait aux jours fériés désignés payés. L'article 34 indique qu'un jour férié désigné payé « correspond au nombre d'heures journalières normales prévues dans la présente convention collective » (c'est moi qui souligne). Les mots « heures journalières normales prévues » ne sont pas définis expressément dans la convention collective. Sous la rubrique « Conditions générales », il est question de « la semaine normale de travail » (requise pour arriver au nombre moyen d'heures hebdomadaires de travail prévues dans la convention pendant toute la durée de l'horaire), mais pas des « heures journalières normales ». En revanche, au paragraphe b) de la disposition ayant trait aux jours fériés désignés payés, on fait une distinction entre les « heures journalières normales » et les « heures normales prévues à [l']horaire », ce qui est déjà plus clair.
b) Lorsque l'employé-e travaille un jour férié désigné payé, il est rémunéré, en plus de sa rémunération horaire journalière normale prévue dans la convention particulière du groupe concerné, à tarif et demi (1 1/2) jusqu'à concurrence des heures normales prévues à son horaire effectuées et à tarif double (2) pour toutes les heures effectuées en sus des heures normales prévues à son horaire.

[35]      Les « heures normales prévues à [l']horaire » désignent les heures de chaque poste de travail attribué à l'employé. Les « heures journalières normales » doivent dès lors désigner quelque chose de différent. L'article 21.01 prévoit que l'horaire de travail des employés qui sont assujettis à un régime de travail par poste doit être établi de manière à ce que, en moyenne, ils travaillent huit heures par jour. Il doit donc s'agir des « heures journalières normales prévues dans la présente convention » étant donné qu'il n'y a pas d'autres heures journalières prévues dans la convention collective pour les employés travaillant par poste.

[36]      On peut donc conclure qu'un jour férié désigné payé s'entend d'une période de huit heures. Même si les employés qui ne sont pas assujettis à un horaire de travail variable obtiennent un jour de congé payé, l'article portant sur l'horaire de travail variable modifie cette disposition et accorde simplement huit heures de congé aux employés assujettis à un horaire variable.

[37]      La responsabilité de l'établissement de l'horaire de travail des employés assujettis à un horaire variable appartient principalement à l'employeur, qui n'a qu'une seule condition à respecter, soit attribuer des heures consécutives de travail (voir les Conditions générales de l'article 34).

[38]      Étant donné que la disposition sur les jours fériés désignés payés n'est pas comprise dans la disposition sur les congés dans la convention collective particulière en cause, je conclus que les arguments ayant trait à la conversion des jours en heures ne sont pas pertinents. Par ailleurs, dans la version anglaise de la disposition en cause, le mot « day » [jour] n'est nullement utilisé.

[39]      La décision rendue dans l'affaire King et Holzer (supra) n'est pas pertinente parce qu'elle se rapporte à l'interprétation du mot « jour » et que ce n'est pas là l'objet de l'affaire qui nous occupe. Au surplus, la disposition ayant trait au congé pour obligation familiale qui est en cause dans cette affaire n'indique pas qu'un jour « correspond au nombre d'heures journalières normales prévues dans la présente convention ».

[40]      L'autre décision King (supra) invoquée porte sur le montant payable à un employé ayant travaillé un jour férié désigné payé. L'arbitre a conclu que les expressions « heures normales prévues à l'horaire » et « heures de travail normales » n'étaient pas interchangeables et a déterminé que les « heures normales prévues à l'horaire » désignaient les heures qui sont normalement prévues à l'horaire de travail des employés assujettis à un horaire variable. Elle ne s'est pas penchée sur le sens des mots « heures normales de
travail ».

[41]      En définitive, un jour férié désigné payé s'entend, dans cette convention collective particulière, d'une période de huit heures. En conséquence, si M. White avait travaillé le jour férié désigné payé en question, il aurait été rémunéré pour huit heures à tarif simple et quatre heures à tarif et demi. Comme il n'a pas travaillé ce jour-là, il avait droit à huit heures à tarif simple seulement. L'établissement des horaires de travail est la prérogative de l'employeur en vertu de la convention collective en cause et il a donc le loisir d'attribuer un poste de 12 heures à un employé en intercalant huit heures de congé au titre d'un jour férié désigné payé.

[42]      Le grief est dès lors rejeté.

Le commissaire,
Ian Mackenzie

OTTAWA, le 5 juin 2003.

Traduction de la C.R.T.F.P.

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