Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Rémunération - Congé férié - Reporté à une autre journée où l'employé s'est absenté - Congé de maladie - le fonctionnaire s'estimant lésé travaille depuis 16 ans pour le Service correctionnel Canada (SCC) - en 2001, le congé statutaire (congé férié) du 8 octobre coïncide avec une journée de repos du fonctionnaire s'estimant lésé - ce congé férié est donc reporté au 10 octobre, à son horaire de travail - le 10 octobre 2001, le fonctionnaire s'estimant lésé s'absente pour cause de maladie et l'employeur déduit quatre heures de sa banque de congé de maladie, compte tenu qu'il doit lui payer son congé statutaire de huit heures - le fonctionnaire s'estimant lésé dépose un grief alléguant que la journée fériée doit être rémunérée selon son horaire de travail, soit 12 heures - l'arbitre de grief a souligné qu'à l'article 34 on retrouve des indications précises sur le paiement des journées fériées et payées ainsi que des indications sur le congé de maladie en indiquant que le nombre d'heures débitées correspond au nombre d'heures de travail normalement prévues à l'horaire de travail de l'employé(e) pour la journée en question (article 34.(5) sous la rubrique << congés de maladie >>) - en conséquence, l'arbitre de grief a conclu qu'il était, dans le présent cas, lié par le texte précis de la convention collective relatif au congé férié et le préambule de l'article 34 indiquant que l'horaire variable ne devrait pas entraîner des dépenses supplémentaires. Grief rejeté.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2003-09-03
  • Dossier:  166-2-31690
  • Référence:  2003 CRTFP 74

Devant la Commission des relations de travail dans la fonction publique



ENTRE

JHONNY DIOTTE
fonctionnaire s'estimant lésé

et

LE CONSEIL DU TRÉSOR
(Solliciteur général - Service correctionnel Canada)

employeur

Devant:   Jean-Pierre Tessier, commissaire

Pour le fonctionnaire
s'estimant lésé :  
Céline Lalande, UCCO-SACC-CSN

Pour l'employeur :   Stéphane Hould, avocat


Affaire entendue à Sherbrooke (Québec),
le 4 juin 2003.


[1]   M. Diotte travaille depuis 16 ans pour le Service correctionnel Canada (SCC). Antérieurement, son horaire de travail était de huit heures par jour. Cependant, au cours des quatre dernières années, il travaille selon un horaire variable équivalent à 12 heures par jour.

[2]   En 2001, le congé statutaire (congé férié) du 8 octobre coïncide avec une journée de repos de M. Diotte. Ce congé férié est donc reporté au 10 octobre, à son horaire de travail.

[3]   Le 10 octobre 2001, M. Diotte s'absente pour cause de maladie. L'employeur déduit à sa banque de congé de maladie quatre heures, compte tenu qu'il doit lui payer son congé statutaire de huit heures.

[4]   Le 6 novembre 2001, M. Diotte dépose un grief en alléguant que la journée fériée doit être rémunérée selon son horaire de travail, soit 12 heures.

[5]   Le grief est référé à l'arbitrage le 18 octobre 2002, et l'audience a lieu à Sherbrooke le 4 juin 2003.

Les faits

[6]   Le fonctionnaire s'estimant lésé dépose son horaire de travail (pièce F-2) pour la période visée par le grief. Il explique que, selon l'horaire de travail variable prévu à l'article 34 de la convention collective applicable aux fonctionnaires du groupe des Services correctionnels (pièce F-1), l'horaire régulier peut être modifié. En pratique, cependant, cela équivaut au même, soit 162 jours de 12 heures, au lieu de 243 jours de huit heures.

[7]   Le 10 octobre 2001, M. Diotte demande un congé de maladie en indiquant que cette journée coïncide avec son congé statutaire reporté. Il indique que la mention « 8h » inscrite sur la demande de congé (pièce F-3) n'est pas la sienne, mais celle de l'administration.

[8]   Pour cette absence, l'employeur impute 12 heures à sa banque de congé de maladie, moins huit heures pour le temps payé du congé statutaire, ce qui laisse en réalité en solde quatre heures à imputer à sa banque de congé de maladie.

[9]   M. Diotte prétend qu'il y a deux poids deux mesures puisque l'absence est considérée comme équivalent à 12 heures et que le congé statutaire est considéré comme valant huit heures pour la journée du 10 octobre 2001.

[10]   Il souligne qu'il existe une certaine confusion dans l'interprétation de la convention collective et dépose, à cette fin, les réponses aux divers paliers de la procédure de grief (pièces F-4, F-5 et F-6). Au premier palier, le représentant de l'employeur indique que la convention collective ne fait nullement mention de la durée du congé statutaire, mais seulement de la rémunération des heures travaillées.

[11]   L'employeur ne présente aucune preuve spécifique, réservant son argumentation lors de la plaidoirie.

Plaidoiries

[12]   Le fonctionnaire s'estimant lésé expose qu'il apparaît injuste que l'employeur débite 12 heures lorsqu'il s'agit de congé de maladie et qu'il paye huit heures lors de congé statutaire.

[13]   Il soutient de plus que la modification d'horaire ne doit pas altérer les bénéfices des employés. Il fait référence à la décision de la Commission dans King et Holzer, 2001 CRTFP 117 (166-34-30346, 166-34-30638 et 166-34-30639), dans laquelle l'arbitre stipule que les journées de congé octroyées pour des obligations familiales doivent s'interpréter dans le cas d'horaire modifié comme des journées de l'horaire applicable au fonctionnaire visé. Au paragraphe 22, l'arbitre écrit ce qui suit :

[22]   Une interprétation normale du mot « journée » comme une période de 24 heures est conforme à l'intention et à l'esprit de la convention collective. À moins d'indication contraire, comme c'est le cas pour un congé annuel ou un congé de maladie acquis, une journée ne doit signifier que cela. L'employeur lui-même a abondé dans ce sens lorsqu'il a interprété la suspension de 10 jours imposée à M. King. Dans cette affaire, l'employeur a argué que, compte tenu du travail par postes du fonctionnaire s'estimant lésé, une suspension de dix jours équivalait à 85,4 heures et non aux 75 heures normales.

[14]   Au paragraphe 24 de la même décision, l'arbitre soutient :

[24]   Comme l'arbitre l'a indiqué dans la décision Phillips (supra), à la p. 33, « [...] l'interprétation de l'employeur serait injuste à l'égard des fonctionnaires qui effectuent de longs postes [...] ». Les événements qui donnent lieu à un congé pour obligations familiales ne cadrent pas avec les limites d'un poste de sept heures et demie.

[15]   De son côté, l'avocat de l'employeur réplique que les stipulations particulières à l'article 34 n'ont pas pour effet d'entraîner de coût supplémentaire et qu'elles ne modifient la convention que dans la mesure indiquée :

ARTICLE 34

HORAIRE DE TRAVAIL VARIABLE

L'Employeur et l'Alliance de la Fonction publique du Canada conviennent que les conditions suivantes s'appliquent aux employé-e-s à l'intention desquels des horaires de travail variables sont approuvés conformément aux dispositions pertinentes de la présente convention collective. La convention est modifiée par les présentes dispositions dans la mesure indiquée.

Il est convenu que la mise en oeuvre de cet assouplissement des horaires ne doit pas entraîner de dépenses ou de coûts supplémentaires du seul fait d'un tel assouplissement.

[16]   Aussi, l'article 34 ne vient pas en contradiction avec les clauses 21.01 et 21.02 de la convention collective relative aux heures de travail.

ARTICLE 21

DURÉE DU TRAVAIL ET HEURES SUPPLÉMENTAIRES

Heures de travail

Travail de jour

21.01

   Lorsque l'horaire de travail est établi de manière régulière, il doit être tel que les employé-e-s travaillent :

  1. trente-sept heures et demie (37 1/2) et cinq (5) jours par semaine et obtiennent deux (2) jours de repos consécutifs,
  2. sept heures et demie (7 1/2) par jour.

Travail par poste

21.02

   Lorsque, en raison des nécessités du service, les heures de travail des employé-e-s sont établies suivant un horaire irrégulier ou par roulement :

  1. elles doivent être établies de façon à ce que les employé-e-s :

    1. travaillent une moyenne de trente-sept heures et demie (37 1/2) par semaine,

    2. et

    3. travaillent huit (8) heures par jour.

  2. l'Employeur prendra toutes les mesures raisonnables possibles :

    1. pour ne pas fixer le début du poste de travail dans les huit (8) heures qui suivent la fin du poste de travail précédent de l'employé-e,

    2. et

    3. pour éviter toute variation excessive de la durée du travail,

  3. sauf en situation d'urgence survenant dans les pénitenciers, l'horaire de travail doit être de telle façon que chaque poste puisse se terminer au plus tard neuf (9) heures après qu'il a commencé,

  4. l'horaire de travail doit être fixé de telle façon que l'employé-e ne soit pas normalement tenu de travailler plus de huit (8) jours civils consécutifs. Des exceptions peuvent être permises, à la demande de l'employé-e et avec l'approbation de l'Employeur, ou après consultation entre l'Employeur et l'Alliance,

  5. la moyenne des heures de travail doit être établie sur une période (en semaines) ne dépassant pas le produit de deux (2) fois le nombre de poste d'agents des services correctionnels du même niveau de classification dans une institution,

  6. l'employé-e doit bénéficier d'au moins deux (2) jours de repos consécutifs à la fois.

[17]   En définitive, la modification d'horaire en 162 jours de 12 heures au lieu de 243 jours de huit heures pour les fonctionnaires travaillant sur des quarts de travail n'ajoute pas au coût de l'employeur, alors il en serait autrement du fait d'accorder 11 congés fériés de 12 heures au lieu de 11 congés de huit heures.

Motifs de la décision

[18]   La cause (supra) citée par le fonctionnaire s'estimant lésé ne s'applique pas au présent cas. De fait, l'arbitre précise bien qu'il doit se référer à l'interprétation normale du mot « journée » , « à moins d'indication contraire, comme c'est le cas pour un congé annuel ou un congé de maladie acquis, ... »

[19]   Or, précisément à l'article 34 on retrouve des indications précises sur le paiement des journées fériées et payées :

5.   Champ d'application particulier

[...]

Jours fériés désignés payés

  1. Un jour férié désigné payé correspond au nombre d'heures journalières normales prévues dans la présente convention.

  2. Lorsque l'employé-e travaille un jour férié désigné payé, il est rémunéré, en plus de sa rémunération horaire journalière normale prévue dans la convention particulière du groupe concerné, à tarif et demi (1 1/2) jusqu'à concurrence des heures normales prévues à son horaire effectuées et à tarif double (2) pour toutes les heures effectuées en sus des heures normales prévues à son horaire.

[...]

[20]   La clause citée précédemment réfère au nombre d'heures journalières normales prévues à la convention collective, soit la clause 21.02 dans le présent cas.

[21]   L'article 34 donne aussi des indications sur le congé de maladie en indiquant que le nombre d'heures débitées correspond au nombre d'heures de travail normalement prévues à l'horaire de travail de l'employé(e) pour la journée en question (article 34.(5) sous la rubrique « congés de maladie ».

[22]   En conséquence, je suis, dans le présent cas, lié par le texte précis de la convention collective relatif au congé férié et le préambule de l'article 34 indiquant que l'horaire variable ne doit pas entraîner des dépenses supplémentaires. Pour ces motifs, je rejette le grief.

 

Jean-Pierre Tessier,
commissaire

OTTAWA, le 3 septembre 2003.
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