Décisions de la CRTESPF

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Résumé :

Horaires de travail variables - Congés pour obligations personnelles et congés de bénévolat - Valeur d'un « jour » - Groupe Services techniques - les fonctionnaires s'estimant lésés sont classés comme GT et ont déposé des griefs à l'encontre de l'application des dispositions relatives au congé de bénévolat et au congé pour obligations personnelles à leur horaire de postes de travail variables - plus particulièrement, ils ont contesté le refus d'un quart de 12 heures au complet pour un congé accordé en vertu de ces dispositions - l'employeur avait d'abord accordé le congé demandé, puis avait informé les fonctionnaires s'estimant lésés, une fois que ceux eurent pris le congé, qu'il ne permettait que 7,5 heures de congé, et avait recouvré le temps en sus - les fonctionnaires s'estimant lésés ont été informés que le Conseil du Trésor avait défini la valeur d'une journée pour les fonctionnaires travaillant selon un horaire variable correspond à la valeur d'un jour désigné férié - la convention collective des GT ne donnait pas de définition pour « jour » dans les dispositions visées, mais le terme « jour » était défini dans l'article sur les définitions comme correspondant à une période de 24 heures - l'arbitre a conclu que, même si la décision antérieure dans l'affaire King et Holzer avait été accueillie par la Cour fédérale, la Commission n'était pas liée par cette décision - cependant, aux fins de maintenir un certain degré d'uniformité et de certitude dans les relations du travail, il y aurait lieu d'interpréter les dispositions semblables de manière similaire, à moins qu'il existe une excellente raison de modifier cette interprétation - même si les griefs en l'espèce reposaient sur une convention collective différente, le libellé de la convention qui se rapportait aux ententes sur des horaires de postes variables était identique - l'arbitre a statué que, à l'instar de la disposition sur le congé pour obligations familiales, les dispositions sur le congé personnel et sur le congé de bénévolat n'étaient pas des « crédits journaliers de congé » et ne relevaient pas de la portée des dispositions de la convention prévoyant la conversion des congés en heures - il a rejeté l'argument de l'employeur selon lequel il s'agissait de congés supplémentaires, ainsi que l'interprétation de l'employeur voulant que la valeur d'un « jour » », en ce qui concerne les horaires de postes variables, corresponde à un jour férié désigné payé - il a statué que l'interprétation soumise par l'agent négociateur n'allait pas à l'encontre du principe de la neutralité des coûts parce que le jour de congé n'entraînait aucun paiement additionnel aux fonctionnaires - il estimait également que le fait que l'employeur accorde un congé de seulement 7,5 heures était injuste pour les fonctionnaires travaillant selon un horaire variable compte tenu que ceux-ci devaient utiliser des crédits de congé additionnels ou des congés non payés pour avoir droit à un congé pour obligations personnelles ou de bénévolat. Griefs accueillis. Décisions citées :King et Holzer, 2001 CRTFP 117; Canada (Procureur général) c. King, 2003 CFPI 593; Phillips, 2003 CRTFP 74..

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2004-01-30
  • Dossier:  166-2-32069
  • Référence:  2004 CRTFP 4

Devant la Commission des relations
de travail dans la fonction publique



ENTRE

COLM STOCKDALE ET AUTRES
(Voir la liste jointe)

fonctionnaires s'estimant lésés

et

CONSEIL DU TRÉSOR
(Pêches et Océans Canada)

employeur

Devant :   Ian R. Mackenzie, commissaire

Pour les fonctionnaires
s'estimant lésés
:  
Barry Done, Alliance de la Fonction publique du Canada

Pour l'employeur :  Harvey Newman, avocat


Audience tenue à Halifax (Nouvelle-Écosse),
le 20 novembre 2003.


[1]    Colm Stockdale et douze autres fonctionnaires sont affectés au Programme de recherche et sauvetage maritime, au Centre interarmées de coordination des opérations de sauvetage, à Halifax (Nouvelle-Écosse). Ils font partie du groupe GT. Le 25 avril 2002, ils ont déposé un grief à l'encontre de l'application des dispositions relatives au congé de bénévolat et au congé pour obligations personnelles à leur horaire de postes de travail variables. Plus particulièrement, les fonctionnaires s'estimant lésés ont contesté le « refus d'un quart de 12 heures au complet pour un congé accordé en vertu des articles 46 et 55 ». L'employeur n'a accordé que 7,5 heures de congé.

[2]    Le grief a été rejeté au premier palier (le 13 mai 2002), au deuxième palier (le 28 mai 2002) et au dernier palier (le 20 février 2003). La réponse déposée au dernier palier par Ursula Menke, sous-commissaire de la Garde côtière, est libellée dans les termes suivants :

[Traduction]

... Le Conseil du Trésor a déterminé que, pour les fonctionnaires qui travaillent selon un horaire variable, la valeur d'une journée correspond à celle d'un jour férié désigné payé. Conformément à la convention collective conclue par les Services techniques, un jour férié désigné payé pour un fonctionnaire appartenant au groupe GT correspond à 7,5 heures. Le droit à des congés aux termes de la convention collective doit être interprété de manière que tous les fonctionnaires aient un droit équitable aux avantages qui leur sont accordés. On ne peut dire que tous auraient un droit équitable aux avantages prévus si l'on vous accordait un plus grand nombre de congés payés qu'à un employé dont les postes sont plus courts ou qui effectue une journée de travail normale de 7,5 heures.

En conséquence, je dois rejeter le grief.

[3]    Le grief a été renvoyé à l'arbitrage le 27 mars 2003.

[4]    À l'audience, les parties se sont fondées sur un exposé conjoint des faits, et la convention collective a été déposée en preuve (pièce G-1).

PREUVE

Exposé conjoint des faits

[5]    Il y a 13 fonctionnaires s'estimant lésés, qui travaillent tous au Programme de recherche et sauvetage de la Garde côtière. Les fonctionnaires s'estimant lésés sont des agents des services de soutien au Programme de recherche et sauvetage maritime, classés GT-3, et des coordinateurs classés GT-5.

[6]    La convention collective applicable est celle qui a été conclue par les Services techniques le 19 novembre 2001, dont la date d'expiration est le 21 juin 2003. Cette convention collective contient deux nouvelles dispositions sur les congés qui prévoient chacune un journée de congé : le paragraphe 46.01 (« congé de bénévolat ») et le paragraphe 55.02 (« congé personnel »).

[7]    Tous les fonctionnaires s'estimant lésés travaillent des postes de 12 heures aux termes d'une entente sur les horaires de postes variables, comme le prévoit l'article 25 de la convention collective. Ils travaillent de 7 h à 19 h.

[8]    Suivant les dispositions sur le congé de bénévolat et sur le congé personnel prévues dans la convention collective, le congé doit être utilisé au cours de l'exercice financier et il ne peut être reporté sur l'exercice suivant. Les fonctionnaires assujettis à la convention collective avaient jusqu'au 31 mars 2002 pour se prévaloir des nouvelles dispositions sur les congés.

[9]    Les fonctionnaires s'estimant lésés ont demandé congé, donnant un avis de cinq jours, comme le prévoit la convention collective. Les jours de congé ont été approuvés et ils ont été pris en fonction d'un poste complet (12 heures).

[10]    Le 8 avril 2002, le superviseur régional par intérim, Peter Stow, a fait parvenir à 19 fonctionnaires (dont les 13 fonctionnaires s'estimant lésés), par courrier électronique, un message les informant de l'interprétation qu'avait retenue le Conseil du Trésor, à savoir que le jour de congé correspondait à 7,5 heures, comme c'était le cas pour les jours fériés désignés payés. M. Stow a informé les fonctionnaires que ceux qui avaient pris un congé de 12 heures devaient payer 4,5 heures supplémentaires pour chaque jour afin de combler le reste du poste. Les montants d'argent correspondant aux 4,5 heures supplémentaires pour chaque jour de congé ont été recouvrés.

ARGUMENTS

Pour les fonctionnaires s'estimant lésés

[11]    Barry Done, représentant des fonctionnaires s'estimant lésés, a fait valoir que les faits dans l'affaire King et Holzer, 2001 CRTFP 117 (maintenue par la Cour fédérale, Section de première instance), étaient en tous points identiques aux faits et au libellé des dispositions de la convention collective en cause en l'espèce. Une décision antérieure (Phillips 2003 CRTFP 74) sur laquelle s'est fondé le président Tarte dans l'affaire King et Holzer, supra, s'appliquait également dans la présente affaire. Dans les deux décisions, les arbitres ont déterminé que, le terme « jour » n'ayant pas été défini par les parties dans l'article de la convention collective en cause, il fallait lui donner son sens normal, à savoir qu'il désigne une période de 24 heures.

[12]    Bien que les parties n'aient pas défini le terme « jour » dans les articles en cause, M. Done a signalé que, dans l'article de la convention collective qui énonce les définitions, le terme « jour » est défini comme étant une « période de vingt-quatre (24) heures qui débute à 00 h 01 ».

[13]    M. Done soutient que, dans les deux affaires précitées, King et Holzer et Phillips, les arbitres ont noté que les parties auraient pu régler la question du sens du terme « jour » dans l'article en cause au cours des négociations collectives, mais qu'elles ont choisi de s'en abstenir. Ainsi, à l'article 25 (« horaires de travail variables »), les parties ont précisé qu'un jour férié désigné payé « correspond à sept heures et demie ». Depuis la décision rendue dans l'affaire Phillips, supra, les parties ont eu amplement le temps de régler cette question à la table des négociations.

[14]    M. Done a fait valoir également que, comme on l'a dit dans l'affaire Phillips, supra, privilégier l'interprétation des dispositions relatives au congé de bénévolat et au congé personnel avancée par l'employeur « serait injuste à l'égard des fonctionnaires qui effectuent de longs postes ».

[15]    La décision du président Tarte dans l'affaire King et Holzer, supra, a été maintenue par la Cour fédérale, et M. Done a soutenu que j'étais lié par cette décision de la Cour fédérale. Il a signalé qu'aucun appel n'avait été interjeté à l'encontre de la décision du juge Gibson.

[16]    M. Done a invoqué la définition du terme « day » contenue dans le Concise Oxford Dictionary et dans le Black's Law Dictionary.

[17]    M. Done s'est fondé également sur la définition de « congé » énoncée dans la convention collective : « l'absence autorisée du travail d'un employé-e pendant ses heures de travail normales ou régulières ». En dépit de la procédure d'établissement d'une moyenne prévue dans l'entente sur les horaires variables, le poste normal ou régulier des fonctionnaires s'estimant lésés est de 12 heures; par conséquent, le congé devrait être accordé pour le total des 12 heures. L'alinéa 37.01b) indique que les congés « sont accordés en heures, le nombre d'heures débitées pour chaque jour de congé correspondant au nombre d'heures de travail normalement prévues à l'horaire de l'employé-e pour la journée en question ». D'après M. Done, cette disposition confirme que chaque fonctionnaire s'estimant lésé avait droit à un congé de 12 heures.

[18]    La condition prévue dans les articles en question, selon laquelle il faut donner un « avis de cinq jours », vient elle aussi appuyer l'interprétation du terme « jour » qu'avance l'agent négociateur, M. Done a-t-il fait valoir. Suivant l'interprétation de l'employeur, l'employé devrait donner un avis de trois jours seulement environ plutôt qu'un avis de cinq jours, comme le prévoit l'article en question. Tel que l'arbitre l'a signalé dans l'affaire Phillips, supra, le délai de l'avis et la durée du droit à un congé devraient tous deux reposer sur la même interprétation du terme « jour ».

[19]    M. Done a fait valoir que l'interprétation retenue par l'employeur n'aurait aucun sens puisque la seule option, pour les employés, serait de venir travailler quatre heures et demie, alors que l'employeur n'a pas recours aux postes partiels.

[20]    M. Done a fait valoir à titre subsidiaire qu'il y a préclusion et que celle-ci s'applique aux situations des treize fonctionnaires s'estimant lésés. Ces derniers ont demandé congé, et celui-ci a été accordé par segments de 12 heures. Les fonctionnaires s'estimant lésés s'en sont remis à cette application à leur détriment. Ils n'ont été mis au courant de la position de l'employeur sur le nombre d'heures de congé qu'après avoir pris congé.

Pour l'employeur

[21]    Me Newman a signalé que les fonctionnaires s'estimant lésés étaient tous assujettis à l'article sur les horaires de travail variables contenu dans la convention collective (article 25). Pendant la durée d'un horaire, ces fonctionnaires travaillent le même nombre d'heures que s'ils effectuaient 37,5 heures par semaine. L'horaire de travail variable n'a pour seul objet que de modifier le nombre d'heures travaillées, sans qu'il en découle une rémunération supplémentaire. Il permet également des périodes plus longues de congé entre chaque poste. Il en découle des avantages tant pour l'employeur que pour les employés. Lorsque les parties ont négocié la disposition sur les horaires variables, elles ont prévu, au paragraphe 25.11, que la mise en oeuvre de l'horaire de travail variable ne devait entraîner aucun coût supplémentaire.

[22]    Me Newman a fait valoir qu'il y a manquement au principe de la neutralité des coûts prévu dans les ententes sur les horaires de postes variables dans les cas où les arbitres permettent que des employés obtiennent un avantage monétaire supérieur à celui qu'obtiennent d'autres employés qui travaillent moins d'heures par jour. Me Newman a déclaré qu'un employé qui travaille 7,5 heures par jour serait, on le comprend bien, contrarié si un employé travaillant un poste de 12 heures touchait une rémunération pour 24 heures, alors que lui-même n'aurait droit qu'à 7,5 heures. Le contribuable aussi doit assumer cette rémunération accrue. Dans ce cas-ci, l'écart entre 12 heures et 7,5 heures est fort appréciable.

[23]    Me Newman a établi une distinction avec l'affaire Phillips, supra, puisque, dans cette affaire, l'arbitre a été influencé dans sa décision par la pratique antérieure de l'employeur.

[24]    Me Newman a fait valoir que je ne devrais pas retenir l'interprétation du terme « jour » qui a été privilégiée dans l'affaire King et Holzer, supra. Dans cette décision, l'arbitre a reconnu que l'on pouvait formuler des arguments à l'appui des deux thèses. Il a conclu également que l'interprétation selon laquelle un jour correspond à 24 heures était appropriée dans les circonstances de cette affaire. Me Newman affirme qu'il m'est donc loisible de déterminer qu'elle n'est pas appropriée dans les circonstances de la présente affaire. Si l'on arrive à la conclusion qu'un jour correspond à 7,5 heures, l'injustice dont sont victimes les employés qui effectuent un travail par postes ressort plus clairement lorsqu'il s'agit d'un congé pour obligations familiales. Il est souvent impossible de demander un tel congé à l'avance; il représente une forme de filet de protection pour des questions d'ordre familial. À l'opposé, le congé de bénévolat et le congé pour obligations personnelles peuvent être planifiés et ils sont, à toutes fins pratiques, des congés supplémentaires.

[25]    Me Newman soutient avec égards que, dans l'affaire King et Holzer, l'arbitre a « mélangé les torchons et les serviettes » lorsqu'il s'est fondé sur l'interprétation de « jour » à des fins de discipline, qui n'a rien à voir avec l'interprétation de la convention collective. Dans cette décision, l'arbitre a été influencé par la suspension.

[26]    Me Newman m'a demandé avec insistance de retenir une interprétation différente de « jour » que celle qui a été retenue dans l'affaire King et Holzer. Dans le cadre du contrôle judiciaire, le juge Gibson a conclu que la décision n'était pas manifestement déraisonnable, et il n'a pas fondé sa décision sur une norme du bien-fondé. Il s'est contenté de dire qu'il était loisible à l'arbitre d'interpréter la convention collective de la manière qu'il l'avait fait. De même, l'affaire King et Holzer met en cause un congé de nature familiale, contrairement à l'affaire dont je suis saisi. Suivant le principe de la stare decisis, l'arbitre doit faire preuve de prudence avant de s'écarter d'interprétations antérieures, ce qui ne veut pas dire cependant qu'il n'est pas libre de différer d'opinion. Les griefs dans la présente affaire ne correspondent pas exactement à ceux qui étaient en cause dans la décision rendue dans l'affaire King et Holzer, puisqu'ils ne mettent pas en cause le même article de la convention collective, ni n'ont-ils le même impact social qu'un congé pour obligations familiales. Le contrôle judiciaire de la décision d'un arbitre n'équivaut pas à une approbation de la décision de l'arbitre, mais il signifie simplement qu'il était « raisonnablement loisible » à l'arbitre d'en arriver à une telle décision. Me Newman m'a reporté à l'affaire Essex County Roman Catholic School Board v. Ontario English Catholic Teachers' Association (2002), 205 D.L.R. (4th) 700.

[27]    En conclusion, Me Newman a déclaré qu'il était important de revoir la question de l'interprétation en raison des conséquences financières énormes qui en découlent et du fait que l'interprétation va à l'encontre du principe de la neutralité des coûts. Il a signalé qu'il était important de reconnaître ce principe, car il n'était pas dans l'intention des parties d'offrir un avantage financier aux employés qui travaillent en fonction d'un horaire variable. Me Newman m'a reporté également à l'affaire Diotte, 2003 CRTFP 74.

Réponse des fonctionnaires s'estimant lésés

[28]    En réponse, M. Done a fait valoir que Me Newman me demandait d'ajouter des mots à la convention collective, ce qui excède ma compétence. Les parties se sont bel et bien penchées sur la définition du terme « jour », comme en font foi d'autres dispositions de la convention collective. L'employeur ne peut tenter de renégocier la convention collective dans le cadre de l'arbitrage.

Motifs de décision

[29]    Les présents griefs mettent en cause l'interprétation du terme « jour » aux fins de déterminer le droit à un congé de bénévolat (article 46) et à un congé personnel (article 55) pour les fonctionnaires qui travaillent selon un horaire de postes variables.

[30]    Le terme « jour » est défini, pour l'application de la convention collective, dans les termes suivants :

« jour » désigne la période de vingt-quatre (24) heures qui débute à 00 h 01.

[31]    Les deux dispositions qui prévoient les congés en cause sont libellées dans les termes suivants :

ARTICLE 46

CONGÉ DE BÉNÉVOLAT

46.01 Sous réserve des nécessités du service telles que déterminées par l'Employeur et sur préavis d'au moins cinq (5) jours ouvrables, l'employé-e se voit accorder, au cours de chaque année financière, un (1) jour de congé payé pour travailler à titre de bénévole pour une organisation ou une activité communautaire ou de bienfaisance, autre que les activités liées à la Campagne de charité en milieu de travail du gouvernement du Canada;

Ce congé est pris à une date qui convient à la fois à l'employé-e et à l'Employeur. Cependant, l'Employeur fait tout son possible pour accorder le congé à la date demandée par l'employé-e.

ARTICLE 55

CONGÉS PAYÉS OU NON PAYÉS POUR D'AUTRES MOTIFS

...

55.02 Congé personnel

Sous réserve des nécessités du service déterminées par l'Employeur et sur préavis d'au moins cinq (5) jours ouvrables, l'employé-e se voit accorder, au cours de chaque année financière, un (1) jour de congé payé pour des raisons de nature personnelle.

Ce congé est pris à une date qui convient à la fois à l'employé-e et à l'Employeur. Cependant, l'Employeur fait tout son possible pour accorder le congé à la date demandée par l'employé-e.

[32]    Les conditions pertinentes aux fins de l'administration des horaires de travail variables sont les suivantes :

ARTICLE 25

DURÉE DU TRAVAIL

...

Conditions régissant l'administration des horaires de travail variables

25.10 Les conditions régissant l'administration des horaires de travail variables mis en oeuvre conformément aux alinéas 25.04b), 25.06 et 25.09g) sont stipulées aux paragraphes 25.10 à 25.13, inclusivement. La présente convention est modifiée par les présentes dispositions dans la mesure indiquée par celles-ci.

25.11 Nonobstant toute disposition contraire dans la présente convention, la mise en oeuvre d'un horaire de travail différent ne doit pas entraîner des heures supplémentaires additionnelles ni une rémunération supplémentaire du seul fait du changement d'horaire, et ne doit pas non plus être réputée retirer à l'Employeur le droit d'établir la durée du travail stipulée dans la présente convention.

25.12

  1. Les heures de travail d'une journée quelconque peuvent être supérieures ou inférieures à sept heures et demie (7 1/2); les heures du début et de la fin, les pauses-repas et les périodes de repos sont fixées en fonction des nécessités du service déterminées par l'Employeur, et les heures journalières de travail sont consécutives.
  2. L'horaire doit prévoir une moyenne de trente-sept heures et demie (37 1/2) de travail par semaine pendant toute la durée de l'horaire.

(i) La durée maximale d'un horaire de postes est de six (6) mois.

(ii) La durée maximale des autres types d'horaire est de vingt-huit (28) jours, à moins que les heures de travail hebdomadaires et journalières normales soient modifiées par l'Employeur de façon à permettre la mise en vigueur d'un horaire d'été et d'un horaire d'hiver conformément à l'alinéa 25.04b), auquel cas la durée de l'horaire est d'un (1) an.

c) Lorsque l'employé-e modifie son horaire variable ou cesse de travailler selon un tel horaire, tous les rajustements nécessaires sont effectués.

25.13 Pour plus de certitude, les dispositions suivantes de la présente convention sont appliquées comme suit :

a) Interprétation et définitions (paragraphe 2.01)

...

d)    Jours fériés désignés payés (paragraphe 32.05)

(i) Un jour férié désigné payé correspond à sept heures et demie (7 1/2).

(ii) L'employé-e qui travaille un jour férié désigné payé est rémunéré, en plus de la rémunération versée pour les heures précisées au sous-alinéa (i), au tarif et demi (1 1/2) jusqu'à concurrence des heures normales de travail prévues à son horaire et au tarif double (2) pour toutes les heures additionnelles qu'il ou elle effectue.

...

f) Rémunération d'intérim

        La période ouvrant droit à la rémunération d'intérim indiquée à l'alinéa 64.07a) est convertie en heures.

...

[33]    L'interprétation du terme « jour » pour les horaires de travail variables a fait l'objet d'un certain nombre de griefs devant la Commission. Toutefois, c'est la première fois que la Commission est appelée à se pencher sur l'interprétation du terme « jour » aux fins du congé personnel et du congé de bénévolat.

[34]    La décision de la Commission dans l'affaire King et Holzer, supra, portait sur l'interprétation du terme « jour » au sens des dispositions relatives au congé pour obligations familiales dans le cadre d'une convention collective différente. La décision a été maintenue par la Cour fédérale (Canada c. King, supra). M. Done a fait valoir que j'étais lié par la décision rendue dans l'affaire King et Holzer. Je ne peux convenir que je suis lié par cette décision puisqu'elle met en cause des dispositions prévoyant un congé et une convention collective différentes.

[35]    Toutefois, les motifs prononcés à l'appui de cette décision sont convaincants, tout comme les remarques du juge dans le cadre du contrôle judiciaire de cette décision. Les motifs sont convaincants parce qu'ils se rapportent à une disposition relative au congé qui est semblable, le libellé de la convention étant semblable également. Aux fins de maintenir un certain degré d'uniformité et de certitude dans les relations du travail, il y a lieu d'interpréter les dispositions qui sont semblables de manière similaire, à moins qu'il existe une excellente raison de modifier cette interprétation. Il y a lieu de noter que, bien que les griefs en l'espèce reposent sur une convention collective différente, le libellé de la convention qui se rapporte aux ententes sur des horaires de postes variables est identique.

[36]    Dans l'affaire King et Holzer, l'arbitre en est arrivé à la conclusion que le sens normal donné au terme « jour » comme étant une période de 24 heures était conforme à l'intention et au régime de la convention collective, à moins d'indication contraire dans la convention. Il a signalé que les congés acquis, comme les vacances ou les congés de maladie, étaient traités différemment dans la convention. C'est le cas aussi dans la convention collective qui est en cause dans la présente affaire. Cette opinion de l'arbitre dans l'affaire King et Holzer a été renforcée du fait que l'employeur faisait valoir qu'une suspension de 10 jours imposée à M. King équivalait à 10 postes, et non à 75 heures. Cette interprétation était appuyée également par le fait que, comme dans la présente convention collective, les parties avaient prévu la conversion en heures de la période ouvrant droit à la rémunération d'intérim (alinéa 25.13f)), alors qu'il n'existait aucune disposition semblable pour la conversion des jours en heures pour les congés pour obligations familiales. Invoquant l'affaire Phillips, supra, l'arbitre a noté également que l'interprétation avancée par l'employeur « serait injuste » à l'égard des employés qui effectuent de longs postes, puisque les événements qui donnent lieu à un congé pour obligations familiales ne cadrent pas nécessairement dans les limites d'un poste de sept heures et demie. L'arbitre a conclu dans les termes suivants :

Enfin, je ne crois pas que cette interprétation des dispositions visant le congé pour obligations familiales contrevienne à la clause 25.25 de la convention collective [aucune rémunération supplémentaire du seul fait de cette modification], puisque l'article 43 [congé pour obligations familiales] prévoit l'octroi d'un tel congé en fonction d'une période de 24 heures.

[37]    La Cour fédérale a maintenu cette décision de l'arbitre (Canada c. Holzer, supra, statuant que la décision n'était pas manifestement déraisonnable et qu'il était loisible à l'arbitre d'en arriver à cette décision. S'il est vrai qu'une conclusion d'un tribunal selon laquelle une décision n'est pas manifestement déraisonnable ne signifie pas nécessairement qu'elle est la seule interprétation valide (voir Essex County School Board, supra), le jugement en soi peut guider les arbitres dans l'interprétation de dispositions semblables. Le juge a tiré la conclusion suivante :

... On ne m'a cité aucune disposition de la convention collective pertinente indiquant que le congé payé pour obligations familiales est un « crédit journalier de congé » au sens du paragraphe 33.01 de la convention collective [la disposition qui convertit un crédit de congé en jours en heures]. Si le congé payé pour obligations familiales n'est pas un « crédit journalier de congé », mais plutôt un crédit journalier de congé qui est un droit, et je suis convaincu qu'il peut être ainsi interprété, le paragraphe 33.01 ne s'applique tout simplement pas à un congé payé pour obligations familiales, malgré le fait que ce paragraphe et le paragraphe 43.01 figurent tous les deux à la partie IV - Congés de la convention collective.

Une analyse superficielle de la disposition relative aux congés payés pour obligations familiales de la convention collective révèle ce qui suit : premièrement, il s'agit d'une forme de congé pour raisons familiales ressemblant au congé pour deuil payé, qui est expressément exclu de l'application des principes généraux du paragraphe 33.01, et, deuxièmement, il s'agit d'une forme de droit à un congé plutôt que d'un crédit journalier de congé. On peut dire qu'étant donné qu'il s'agit d'un droit à un congé, plutôt que d'un crédit de congé journalier, il n'est pas visé par l'alinéa 33.01a), mais cela n'explique pas pourquoi il ne doit pas être traité, dans le contexte du paragraphe 33.01, de la même manière que le congé pour deuil payé. Je suis convaincu qu'il peut également être distingué du congé payé, qui est accordé pour une période de cinq (5) jours civils consécutifs, qui doivent inclure le jour des funérailles et, presque inévitablement, ne correspondront pas tous à des jours de travail dans la majorité des cas. Je suis convaincu que cette distinction suffit pour permettre à l'arbitre de tirer cette conclusion.

En conséquence, je suis persuadé qu'il était loisible à l'arbitre d'interpréter le mot « journée » figurant dans la disposition relative aux congés payés pour obligations familiales de la convention collective sans se reporter au paragraphe 33.01 de la convention et, ce faisant, de conclure que le mot « journée » figurant dans cette disposition s'entend d'une période de vingt-quatre (24) heures consécutives, indépendamment du nombre d'heures de travail qu'un employé déterminé, tel que les défendeurs, pourrait avoir effectué au cours de cette « journée ». En outre, il était loisible à l'arbitre de conclure qu'il était contraire à la convention collective que l'employeur déduise du salaire des fonctionnaires s'estimant lésés, les défendeurs en l'espèce, un montant correspondant aux heures qu'ils avaient prises, en sus de 37,5 heures, comme congé payé pour obligations familiales.

[38]    À l'instar de la disposition sur le congé pour obligations familiales, les dispositions sur le congé personnel et sur le congé de bénévolat ne sont pas des « crédits journaliers de congé », ni ne relèvent de la portée des dispositions de la convention qui prévoient la conversion des congés en heures (alinéa 37.01a)). Bien que l'avocat de l'employeur puisse être d'avis qu'il s'agit de « congés supplémentaires », le libellé de la convention collective ne peut appuyer une telle opinion. Le congé de bénévolat désigne le jour de congé payé « pour travailler à titre de bénévole pour une organisation ou une activité communautaire ou de bienfaisance ». Le congé personnel désigne le jour de congé payé « pour des raisons de nature personnelle ». Ces congés ne s'accumulent pas et ils doivent être utilisés au cours de chaque année financière, comme c'est le cas pour les congés pour obligations familiales.

[39]    Dans sa réponse aux griefs, l'employeur a déclaré que le terme « jour », en ce qui concerne les horaires de postes variables, correspond à un jour férié désigné payé. Une lecture de la convention collective ne permet pas d'appuyer cette interprétation. Les dispositions relatives aux postes variables prévoient expressément qu'un jour férié désigné payé « correspond à sept heures et demie » (alinéa 25.13d)). Il n'y a pas de disposition semblable pour l'une ou l'autre des autres dispositions de la convention collective prévoyant un congé.

[40]    À l'audience, l'avocat de l'employeur a insisté sur le fait qu'en interprétant le terme « jour » comme étant un poste complet, on enfreignait le principe de la « neutralité des coûts » prévu à la clause 25.11. Cette clause de la convention vise principalement à éviter les heures supplémentaires additionnelles et « une rémunération supplémentaire » par suite de la mise en oeuvre d'un horaire de travail variable. L'interprétation du terme « jour » comme étant un poste complet ne contrevient pas à cette disposition, puisqu'il n'en résulte aucune rémunération supplémentaire à l'employé qui se voit accorder un jour de congé. À la fin de l'année, l'employé touche le même salaire annuel qu'un employé qui effectue un horaire normal.

[41]    Dans sa réponse aux griefs, l'employeur a soulevé également le principe du traitement équitable de tous les employés. L'employeur estime qu'accorder congé pour un poste complet de 12 heures est injuste pour les employés qui travaillent selon un horaire normal, puisque ces derniers ne bénéficient que de 7,5 heures de congé pour le même droit à un congé. Il est tout aussi injuste pour les employés qui travaillent selon un horaire variable, voire même plus, d'accorder 7,5 heures de congé seulement. Rien dans la preuve n'indique que l'employeur pourrait permettre des postes partiels. Par conséquent, pour pouvoir prendre un congé personnel ou un congé de bénévolat, les employés qui travaillent selon un horaire variable doivent utiliser des crédits de congé additionnels (ou des congés non payés). Les employés qui travaillent selon un horaire normal ne se retrouvent pas devant le même dilemme. Cela signifie que les fonctionnaires régis par un horaire de travail variable sont pénalisés parce qu'ils se prévalent de droits à un congé qu'ils sont autorisés à prendre aux termes de leur convention collective.

[42]    En conclusion, les griefs sont accueillis. Les fonctionnaires s'estimant lésés ont droit à un congé personnel et à un congé de bénévolat pour la totalité de leur poste, soit 12 heures. Tous les fonctionnaires s'estimant lésés ont par conséquent le droit de recouvrer les quatre heures et demie qui ont été déduites de leur banque de congés pour chaque demande de congé.

Ian R. Mackenzie,
commissaire

OTTAWA, le 30 janvier 2004.

Traduction de la C.R.T.F.P.




GRIEF DE COLM STOCKDALE ET AUTRES

(dossier de la Commission 166-2-32069)

Billard, Donnie
Burguin, Scott
Evans, Wayne
Gaillard, Christine
Leclerc, Yves
Lever, Dave
Reyno, Kevin
Rudden, Paul
Sharp, J.P.
Smith, Barry
Sperry, Wendell
Vardy, Harvey

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