Décisions de la CRTESPF

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Résumé :

Rémunération pour heures supplémentaires - Dépenses de voyage - Congé de service judiciaire - Sommation à un arbitrage - Groupe Services correctionnels - ces griefs portaient sur le refus de l'employeur de verser une rémunération aux fonctionnaires s'estimant lésés pour leur comparution lors de l'arbitrage dans l'affaire Dosanjh (2003 CRTFP 16) - les fonctionnaires s'estimant lésés ont expliqué qu'ils avaient été appelés à comparaître à l'audience et que l'employeur refusait de les rémunérer en conséquence, contrairement aux clauses 23.01 et 30.17c)(v) de la convention collective - l'employeur a rejeté deux des griefs au motif que pour obtenir un congé pour comparution en vertu du paragraphe 30.17, il fallait que ce soit un jour de travail prévu à l'horaire du fonctionnaire et que les fonctionnaires s'estimant lésés n'étaient pas censés travailler les jours visés par leur griefs - l'employeur a rejeté l'autre grief parce que, même s'il avait obtenu un congé pour comparution pour les jours où il avait assisté à l'audience, le fonctionnaire s'estimant lésé n'avait pas droit à une rémunération pour heures supplémentaires compte tenu qu'il n'était pas une partie à l'audience et qu'il n'avait pas été assigné par l'employeur - l'arbitre a conclu que pour être admissible aux termes de l'article 23 et être considéré comme étant en fonction, l'employé doit être tenu d'assister, sur assignation, à un procès contre un détenu ou toute autre personne dans quelconque procédure précisée à l'alinéa 30.17c) de la convention, et il est clairement indiqué à l'article 23 qu'il doit s'agir d'un « procès contre un détenu ou toute autre personne » - l'arbitre a statué que les procédures décrites à l'article 23 doivent être de la nature d'une enquête menée après le dépôt d'accusations à l'encontre d'un détenu ou d'un gardien et que, par conséquent, l'audience d'arbitrage était une simple procédure ayant eu lieu devant une personne décrite à la clause 30.17c)(v) et non un procès contre un détenu ou une personne au sens de l'article 23 - l'arbitre a estimé que la convention collective n'accordait pas à un fonctionnaire le droit à un remboursement pour ses dépenses de voyage ou ses heures supplémentaires - quant à l'argument présenté par les fonctionnaires s'estimant lésés selon lequel l'employeur avait fait preuve de discrimination, au sens de l'article 37, en traitant différemment les témoins qu'il avait lui-même appelés à comparaître, l'arbitre a refusé d'en tenir compte car il n'avait été soulevé ni dans les griefs, ni au cours de la procédure de règlement des griefs, et que l'admettre à ce moment-ci reviendrait à changer la nature des griefs. Griefs rejetés Décisions citées :Leswick (166-2-22857); Lacasse (166-2-21411); Dosanjh, 2003 CRTFP 16; Burchill c. Canada (Procureur général), [1981] 1 C.F. 109.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2004-04-30
  • Dossier:  166-2-32362
    166-2-32368
    166-2-32369
  • Référence:  2004 CRTFP 34

Devant la Commission des relations
de travail dans la fonction publique



ENTRE

BASIL DUNLOP STEVENS, RENE J. FROESE AND CLINTON R. JACKSON
fonctionnaires s'estimant lésés

et

CONSEIL DU TRÉSOR
(Solliciteur général du Canada - Service correctionnel)

employeur

 

Devant :  Guy Giguère, président suppléant

Pour les fonctionnaires s'estimant lésés :  Corinne Blanchette, avocate

Pour l'employeur :  Harvey Newman, avocat principal


Affaire entendue à Abbotsford (Colombie-Britannique),
le 5 février 2004.


[1]   MM. Stevens, Froese et Jackson ont présenté un grief au mois de janvier 2003 pour contester le refus de l'employeur de leur verser une rémunération pour la période au cours de laquelle ils ont assisté à l'audience d'arbitrage dans l'affaire Dosanjh c. Conseil du Trésor (Solliciteur général du Canada - Service correctionnel), 2003 CRTFP 16. Ils ont expliqué, dans leurs griefs, qu'ils avaient été assignés à comparaître à l'audience et que, contrairement aux dispositions de la convention collective (paragraphe 23.01 et sous-alinéa 30.17c)(v)), l'employeur avait refusé de les payer.

[2]   L'employeur a rejeté les griefs de MM. Stevens et Froese, expliquant que les fonctionnaires s'estimant lésés n'étaient pas censés travailler les jours en cause dans leurs griefs alors que pour obtenir un congé pour comparution en vertu du paragraphe 30.17, il faut que ce soit un jour de travail prévu à l'horaire de l'employé. L'employeur a expliqué aussi que le devoir de comparution prévu au paragraphe 23.01 de la convention collective ne s'applique que lorsque l'affaire en question survient « en raison des actions de l'employé-e au cours de l'exercice de ses fonctions autorisées ».

[3]   L'employeur a rejeté également le grief présenté par M. Jackson, expliquant que ce dernier avait obtenu un congé pour comparution pour les jours où il avait assisté à l'audience, puisqu'il devait travailler ces jours-là de 8 h à 16 h. L'employeur a rejeté la demande de rémunération des heures supplémentaires pour les mêmes jours, car M. Jackson n'était pas une partie à l'audience et qu'il n'avait pas été assigné par l'employeur.

Preuve

[4]   À l'ouverture de l'audience, les deux avocats ont déposé un « Exposé conjoint des faits » libellé dans les termes suivants :

[Traduction]

EXPOSÉ CONJOINT DES FAITS
DOSSIERS DE LA CRTFP 166-2-32368, 32369, 32362
Rene Froese, Clinton R. Jackson et Basil Dunlop Stevens

  1. Les fonctionnaires s'estimant lésés travaillent pour le SCC à titre d'agents correctionnels au Centre de santé régional et sont assujettis à la convention conclue entre le Conseil du Trésor et le Syndicat des agents correctionnels du Canada, dont la date d'expiration est le 31 mai 2002.

  2. Les fonctionnaires s'estimant lésés ont été assignés à comparaître à une audience d'arbitrage dans le dossier de la CRTFP 166-2-31021. Sont jointes aux présentes, à l'Annexe « A », les assignations mentionnées concernant MM. Jackson, Froese et Stevens.

  3. Les fonctionnaires s'estimant lésés ont assisté à l'audience en réponse à l'assignation aux dates suivantes :

    Froese - 7 janvier 2003

  4. Le 7 janvier 2003, MM. Froese et Stevens devaient être en congé. Sont joints à titre d'Annexe « D » les tableaux de service des 7, 8 et 9 janvier 2003.

  5. MM. Gordon Robertson, Arnie Vis et Kellie Rhyness, agents correctionnels travaillant au même endroit que les fonctionnaires s'estimant lésés, ont assisté à la même audience en raison d'assignations délivrées par l'employeur. Ils ont été rémunérés au motif qu'ils étaient en fonction et ont touché le traitement et les heures supplémentaires applicables le 24 septembre 2002 pour le temps passé à l'audience et pour le temps de déplacement. Kellie Rhyness devait être en congé le 24 septembre 2002, mais il a touché le taux des heures supplémentaires applicable pour se rendre et assister à l'audience à la demande de l'employeur. Les fonctionnaires susmentionnés ont obtenu le remboursement des frais de déplacement applicables. L'employeur se réserve le droit de s'opposer à la pertinence de ce paragraphe. Sont joints, à titre d'Annexe « B », les rapports des heures supplémentaires de Rhyness, Vis et Robertson. Sont joints, à titre d'Annexe « C », les tableaux de service du 24 septembre 2002.

  6. Le syndicat se réserve le droit d'appeler à témoigner MM. Jackson, Froese et Stevens.

[5]   Les trois fonctionnaires s'estimant lésés ont été appelés à témoigner. M. Froese a souligné que l'audience devait se dérouler, au départ, en mai 2002, mais que cette date avait été subséquemment modifiée et que l'audience avait été reportée au mois de septembre 2002. Il a été assigné tant par l'employeur que par le syndicat à comparaître aux dates d'audience fixées en mai et en septembre. Malheureusement, il a dû à deux reprises retarder des vacances, qu'il avait prévues au mois de mai 2002 et qu'il avait reportées au mois de septembre 2002. Il n'a pas été appelé à témoigner à l'audience du mois de septembre. Cependant, il a été assigné par le syndicat à comparaître à la continuation de l'audience du 7 au 9 janvier 2003. Il a assisté à l'audience du 7 janvier, qui est tombée son deuxième jour de congé. Il a informé son employeur qu'il avait reçu une assignation à comparaître parce que celle-ci se rapportait à son emploi, et il a par la suite présenté une demande de rémunération des heures supplémentaires.

[6]   M. Stevens a témoigné avoir été assigné par le syndicat à comparaître à l'audience du 7 au 9 janvier 2003. Il s'y est effectivement présenté le 7 janvier et il a comparu à titre de témoin le 8 janvier, en matinée. Le 7 janvier, M. Stevens en était à son deuxième jour de congé prévu et il devait retourner au travail le lendemain. Après avoir assisté à l'audience le 8 janvier en matinée, il a appelé l'employeur pour lui demander s'il souhaitait qu'il entre au travail pour le reste de son quart de travail. Il a demandé une rémunération des heures supplémentaires pour sa présence à l'audience le 7 janvier 2003, qui devait être son deuxième jour de congé, ce que l'employeur lui a refusé. M. Stevens a bien été payé pour son jour de travail prévu à l'horaire, à savoir le 8 janvier 2003.

[7]   M. Stevens a expliqué, en contre-interrogatoire, que le syndicat et la direction lui avaient dit de se présenter à l'audience s'il recevait une assignation à cet effet. Il se rappelle que le coordonnateur des opérations correctionnelles l'avait averti que des employés pouvaient être arrêtés s'ils ne se présentaient pas à une audience après avoir reçu une assignation à cet effet.

[8]   M. Jackson a indiqué qu'il devait travailler les 7 et 8 janvier et qu'il travaillait habituellement de 8 à 16 h. Comme il a dû assister à l'audience à Vancouver ces jours-là, il a quitté Abbotsford à 7 h et y est retourné à 17 h 30. Il a présenté une demande de rémunération pour les heures supplémentaires travaillées en sus de ses heures de travail ordinaires, ce qui incluait son temps de déplacement pour se rendre à Vancouver et revenir à Abbotsford. Il a effectivement assisté à l'audience le 9 janvier, mais il n'a réclamé aucune heure supplémentaire pour cette date.

Arguments

Pour les fonctionnaires s'estimant lésés

[9]   Me Blanchette a fait valoir que l'article 23 de la convention collective s'applique lorsque les paragraphes 30.17 et 14.06 ne s'appliquent pas. Me Blanchette a expliqué que l'article 23 vise les cas où un employé reçoit une assignation à comparaître à une audience un jour où il n'est pas censé travailler. Suivant l'article 23, il n'est pas nécessaire que l'employé soit assigné par l'employeur. Ces paragraphes de la convention collective sont libellées dans les termes suivants :

Arbitrage des griefs

14.06   Lorsque les nécessités du service le permettent, l'Employeur accorde un congé payé à l'employé-e qui est :

[…]

c) un témoin convoqué par un employé-e qui s'est constitué partie à l'arbitrage.

Congé pour comparution

30.17   L'Employeur accorde un congé payé à l'employé-e pendant la période de temps où il est tenu :

[…]

c) d'assister, sur assignation ou sur citation, comme témoin à une procédure qui a lieu :

(i) devant une cour de justice ou sur son autorisation, ou devant un jury d'accusation,

(ii) devant un tribunal, un juge, un magistrat ou un coroner,

(iii) devant le Sénat ou la Chambre des communes du Canada ou un de leurs comités, dans des circonstances autres que dans l'exercice des fonctions de son poste,

(iv) devant un conseil législatif, une assemblée législative ou une chambre d'assemblée, ou un de leurs comités, autorisés par la loi à obliger des témoins à comparaître devant eux,

ou

(v) devant un arbitre, une personne ou un groupe de personnes autorisés par la loi à faire une enquête et à obliger des témoins à se présenter devant eux.

***

ARTICLE 23

DEVOIR DE COMPARUTION

23.01 L'employé-e qui est tenu d'assister, sur assignation ou citation, comme témoin, défendeur ou plaignant à un procès contre un détenu ou toute autre personne dans quelconque procédure précisée au paragraphe 30.17, sous-alinéa « C » de la présente convention, en raison des actions de l'employé-e au cours de l'exercice de ses fonctions autorisées, doit être considéré comme étant en fonction et être rémunéré au taux de traitement applicable, et doit être remboursé de ses dépenses raisonnables de transport, de repas et de logement, déterminées habituellement par l'Employeur.

[10]   Les fonctionnaires s'estimant lésés ont satisfait aux conditions énumérées à l'article 23, comme la preuve l'a démontré, de sorte qu'ils doivent être considérés comme ayant été en fonction et être rémunérés au taux de traitement applicable.

[11]   Me Blanchette a souligné qu'au paragraphe 5 de l'exposé conjoint des faits, l'employeur a reconnu qu'il avait payé ses témoins pour l'audience en question. Me Blanchette a fait valoir que rien ne justifiait qu'il y ait deux poids deux mesures, et que la question de savoir qui appelle un témoin est sans pertinence. L'employeur devrait payer pour les témoins qui sont assignés par l'agent négociateur.

[12]   Me Blanchette a indiqué que, si les griefs ne renvoyaient pas expressément à l'article 37, le texte qui précède immédiatement la signature du fonctionnaire indique [traduction] « Et tous autres droits qui me sont conférés dans la convention collective », ce qui couvre l'article 37 de la convention collective.

Pour l'employeur

[13]   Me Newman a fait valoir que l'unique disposition pertinente relativement aux faits propres aux griefs en l'espèce est le sous-alinéa 30.17c)(v) de la convention collective. Les parties ne souhaitaient pas que, dans les cas où l'agent négociateur assigne un employé un jour de congé, les frais soient assumés par l'employeur. Cela est depuis longtemps reconnu dans la jurisprudence de la Commission, selon Me Newman. Plus particulièrement, dans l'affaire Lacasse c. Conseil du Trésor (Solliciteur général du Canada), dossier de la CRTFP 166-2-21411 (1991), le commissaire Thomas W. Brown en est arrivé à la conclusion qu'un employé n'a pas droit à un congé payé lorsqu'il n'est pas prévu à son horaire qu'il travaille et qu'il est assigné à comparaître à une audience un jour de congé. De plus, dans l'affaire Leswick c. Conseil du Trésor (Transports Canada), dossier de la CRTFP 166-2-22857 (1993) (QL), le commissaire J.B. Turner a conclu qu'un employé ne peut obtenir congé pour la période où il fait partie d'un jury, s'il n'est pas prévu qu'il travaille.

[14]   Me Newman a souligné qu'il n'y avait aucune jurisprudence portant sur le devoir de comparution tel qu'il est prévu au paragraphe 23.01. Selon Me Newman, il était dans l'intention des parties, lorsqu'elles ont rédigé ce paragraphe de la convention collective, de protéger l'employé faisant face à des accusations « en raison des actions de l'employé-e au cours de l'exercice de ses fonctions autorisées ». Me Newman a expliqué qu'il ne s'agit pas d'un paragraphe général et qu'il devrait être lu dans le contexte du paragraphe général. Il a donné plusieurs exemples de cas où un employé ayant utilisé la force avec un détenu pouvait se retrouver à une audience en raison de ses actions.

[15]   Me Newman a fait valoir que l'article 37 ne peut être invoqué à ce moment, puisqu'il n'a pas été soulevé dans la procédure de règlement du grief et que l'admettre à ce moment-ci aurait pour effet de changer la nature des griefs. Il s'est appuyé à cet égard sur l'affaire Burchill c. Canada (procureur général), [1981] 1 C.F. 109.

Motifs de la décision

[16]   L'agent négociateur a soumis que l'article 23 de la convention collective s'applique lorsque les paragraphes 30.17 et 14.06 ne s'appliquent pas. L'employeur souscrit à cet argument de l'agent négociateur selon lequel les paragraphes 30.17 et 14.06 ne seraient pas applicables, puisque les fonctionnaires s'estimant lésés n'étaient pas en fonction au cours de la période couverte par leurs griefs. Je suis d'accord avec eux, puisque le congé est défini dans la convention collective, au sous-alinéa 2.01l), dans les termes suivants :

l)   « congé » désigne l'absence autorisée du travail d'un employé-e pendant ses heures de travail normales ou régulières (leave);

[17]   Par conséquent, pour que l'employeur lui accorde congé sous le régime des paragraphes 30.17 et 14.06, l'employé doit être assigné à comparaître à une audience pour une période qui tombe pendant ses heures de travail normales. En conséquence, l'employé qui n'est pas en fonction le jour où il est assigné à comparaître à une audience n'a pas droit à un congé. Cette interprétation est compatible avec la jurisprudence de la Commission, comme les affaires Leswick c. Conseil du Trésor (Transports Canada) et Lacasse c. Conseil du Trésor (Solliciteur général du Canada), supra, qui ont été citées par Me Newman.

[18]   Me Blanchette a fait valoir que c'est l'article 23 qui doit s'appliquer en l'espèce, car il vise les employés dont l'horaire ne prévoit pas qu'ils travaillent et qui sont assignés à comparaître à une audience. Me Newman a répliqué que l'article 23 ne devait s'appliquer qu'aux audiences dans le cadre desquelles des accusations sont portées contre un employé en raison de ses actions au cours de l'exercice de ses fonctions.

[19]   Tout comme Me Newman, je n'ai pu trouver aucune jurisprudence de la Commission portant précisément sur le type d'audiences visées par l'article 23 ou des dispositions semblables des conventions collectives conclues dans le secteur public fédéral. J'ai jugé utile d'examiner les textes français et anglais de l'article 23 pour bien comprendre la distinction établie entre les instances visées à l'article 23 et celles qui sont visées à l'alinéa 30.17c). Les versions anglaise et française de l'article 23 sont libellées dans les termes suivants :

ARTICLE 23
COURT DUTY

23.01   An employee, who is required by subpoena or summons to attend as a witness, or a defendant, or a plaintiff in an action against an inmate or any other person, in any of the proceedings specified in Clause "30.17", sub-clause "C" of this Agreement, as a result of the employee's actions in the performance of his or her authorized duties, shall be considered on duty and shall be paid at the applicable rate of pay and shall be reimbursed for reasonable expenses incurred for transportation, meals and lodging as normally defined by the Employer.

ARTICLE 23
DEVOIR DE COMPARUTION

23.01   L'employé-e qui est tenu d'assister, sur assignation ou citation, comme témoin, défendeur ou plaignant à un procès contre un détenu ou toute autre personne dans quelconque procédure précisée au paragraphe 30.17, sous-alinéa « C » de la présente convention, en raison des actions de l'employé-e au cours de l'exercice de ses fonctions autorisées, doit être considéré comme étant en fonction et être rémunéré au taux de traitement applicable, et doit être remboursé de ses dépenses raisonnables de transport, de repas et de logement, déterminées habituellement par l'Employeur.

[20]   Comme on peut le constater, pour être admissible aux termes de l'article 23 et être considéré comme étant en fonction, l'employé doit être tenu d'assister, sur assignation, à un procès contre un détenu ou toute autre personne dans quelconque procédure précisée à l'alinéa 30.17c) de la convention. Se peut-il qu'une audience d'arbitrage comme celle qui a été tenue dans l'affaire Dosanjh c. Conseil du Trésor (Solliciteur général du Canada - Service correctionnel), supra, soit un procès au sens de l'article 23?

[21]   Il existe une règle à suivre en matière d'interprétation d'une convention collective, selon laquelle il faut donner un sens à chaque mot de manière à éviter toute redondance. Il s'ensuit qu'il ne peut s'agir de toutes les procédures précisées à l'alinéa 30.17c) de la convention, car il est clairement indiqué à l'article 23 qu'il doit s'agir d'un « procès contre un détenu ou toute autre personne ». Le texte français dit : « un procès contre un détenu ou toute autre personne ». En ajoutant à titre de condition qu'il doit s'agir d'un procès (« an action […] »), les parties souhaitaient clairement établir une distinction, de manière que les employés soient considérés comme étant en fonction et soient rémunérés pour le temps passé à assister à de telles procédures même s'ils n'étaient pas en fonction pour cette période.

[22]   Je suis d'accord avec Me Newman que les procédures décrites à l'article 23 doivent être de la nature d'une enquête menée après le dépôt d'accusations à l'encontre d'un détenu ou d'un gardien. Un procès contre (« an action against ») est une procédure qui se distingue de l'audience d'arbitrage où un ancien employé conteste son congédiement. Je conclus, sur le fondement de la preuve dont j'ai été saisi, que l'audience d'arbitrage dans l'affaire Dosanjh c. Conseil arbitral (Solliciteur général du Canada - Service correctionnel), supra, est une procédure qui a eu lieu devant une personne décrite au sous-alinéa 30.17c)(v), mais qu'elle n'est pas un procès (« an action ») contre un détenu ou une personne au sens de l'article 23.

[23]   Me Blanchette a fait valoir également que l'employeur applique une politique de deux poids deux mesures à l'égard des témoins de l'agent négociateur. L'employeur a considéré ses témoins comme étant en fonction et les a rémunérés pour les journées passées à l'audience. L'un de ces témoins, M. Rhyness, était censé être en congé, mais il a été rémunéré au taux des heures supplémentaires pour cette période. De plus, les frais de déplacement applicables ont été remboursés à tous les témoins, qui ont obtenu également la rémunération des heures supplémentaires applicables pour la période passée à l'audience ainsi que pour le temps de déplacement. Me Blanchette a fait valoir que l'article 37 de la convention collective interdit toute discrimination, restriction ou ingérence fondée sur divers facteurs, y compris l'adhésion à l'agent négociateur ou l'activité dans celle-ci, et que le comportement de l'employeur dans le cadre des griefs en l'instance équivaut à une telle forme de discrimination.

[24]   Me Newman, pour le compte de l'employeur, a fait valoir que l'article 37 ne pouvait être invoqué à cette étape, car il n'a été soulevé ni dans les griefs, ni au cours de la procédure de règlement du grief, et que l'admettre à ce moment-ci reviendrait à changer la nature des griefs, ainsi qu'il a été conclu dans l'affaire Burchill c. Canada (Procureur général), supra, par la Cour fédérale.

[25]   Je n'ai pas à examiner le bien-fondé de ce dernier argument, car je suis d'accord avec l'avocat de l'employeur que cela est bien établi en droit et qu'accepter cet argument à cette étape, à l'arbitrage, aurait pour effet de changer la nature même des griefs.

[26]   Je comprends que les fonctionnaires s'estimant lésés estiment que leur situation est injuste et qu'il est aussi injuste que les témoins de l'employeur aient été payés pour assister à une audience un jour de congé alors qu'eux ne l'ont pas été. De plus, leur temps et leurs frais de déplacement n'ont pas été payés. Je sympathise avec M. Froese, qui a dû à deux reprises annuler un voyage planifié. Toutefois, la convention collective conclue entre l'agent négociateur et l'employeur ne donne pas à un employé le droit au remboursement de ses frais de déplacement ou au paiement d'heures supplémentaires.

[27]   Pour toutes ces raisons, les griefs sont rejetés.

Guy Giguère,
président suppléant

OTTAWA, le 30 avril 2004

Traduction de la C.R.T.F.P.

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