Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Compétence de la Commission - Interprétation de la convention collective - Interprétation de l'entente sur la parité salariale - Recalcul du traitement - Incompétence de l'agent négociateur pour traiter de l'application d'une convention collective relevant d'un autre agent négociateur - Absence de consentement de l'autre agent négociateur - le fonctionnaire s'estimant lésé était maintenant devenu un AU, mais entre 1993 et 1997, il avait occupé des postes de CR et PM - en 1999, le Conseil du Trésor a signé un protocole d'accord avec l'Alliance de la Fonction publique du Canada afin de régler entièrement la plainte en matière de parité salariale - dans son grief, le fonctionnaire s'estimant lésé a demandé le recalcul de son salaire de PM à un niveau dépassant son salaire de CR-4, après rajustement de parité salariale, ainsi que le recalcul de son salaire provisoire à titre de PM et son salaire permanent à titre de PM à compter du 1er avril 1994, à l'aide de son salaire rajusté de CR-4 - le fonctionnaire s'estimant lésé estimait qu'il était injuste que son salaire provisoire de PM-01 soit inférieur à son salaire de CR-04 et a fait valoir que les autres employés dans des situations semblables avaient eu droit à un rajustement de leur salaire - le fonctionnaire s'estimant lésé a invoqué le paragraphe 9.5 du protocole d'accord prévoyant le recalcul du salaire en fonction de chaque situation, ainsi que la convention collective et << la Politique sur les conditions d'emploi >> de l'employeur réglementant les taux de rémunération lors d'une promotion - l'employeur a fait valoir que la Commission n'était pas compétente du fait qu'il s'agissait clairement d'une affaire de parité salariale et non d'interprétation de la convention collective - l'arbitre a statué que le grief faisait appel à une interprétation de l'entente sur la parité salariale relativement aux promotions pendant la période de rétroactivité précisée au paragraphe 9.5 du protocole d'accord, et a donc conclu que la Commission n'était pas compétente pour interpréter ou appliquer les dispositions de l'ordonnance sur consentement ou corriger toute ambiguïté contenue dans celle-ci - l'arbitre a statué que le fardeau de la preuve incombait au fonctionnaire s'estimant lésé qui ne s'en était pas acquitté relativement à son observation sur la << Politique sur les conditions d'emploi >> portant sur la modification des taux de rémunération par l'entente sur la parité salariale - en ce qui concerne la plainte du fonctionnaire s'estimant lésé selon laquelle son salaire de PM était inférieur à son salaire de CR, l'arbitre a conclu qu'il n'y avait pas de violation - l'arbitre a aussi conclu que le fait que l'Institut professionnel de la fonction publique du Canada (IPFPC) défendait l'affaire en l'espèce, en sa qualité d'agent négociateur du fonctionnaire s'estimant lésé, posait un problème - le grief demandait l'application des conventions collectives PM et CR, des ententes qui relevaient de l'Alliance de la Fonction publique du Canada (AFPC), et l'AFPC n'avait pas signifié qu'elle consentait au renvoi à l'arbitrage, ni qu'elle autorisait l'IPFPC à plaider la cause - en l'absence d'une telle approbation, le renvoi à l'arbitrage n'était pas valide. Grief rejeté. Décisions citées :Alliance de la Fonction publique du Canada et Conseil du Trésor (2001 CRTFP 81), 2002 CAF 447; Nadeau (2003 CRTFP 17); Burchill c. Procureur général du Canada, [1981] 1 C.F. 109.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2003-11-28
  • Dossier:  166-34-31903
  • Référence:  2003 CRTFP 105

Devant la Commission des relation de travail dans la fonction publique



ENTRE

RIYAZ KARIMJEE
fonctionnaire s'estimant lésé

et

AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU DU CANADA
employeur

Devant :   Léo-Paul Guindon, commissaire

Pour le fonctionnaire s'estimant lésé :   Paul Reniers, Institut professionnel de la fonction publique du Canada

Pour l'employeur :   Richard Fader, avocat


Affaire entendue à Vancouver (C.-B.),
le 22 juillet 2003.


[1]   Le 21 février 2002, Riyaz Karimjee a déposé un grief contre son employeur, l'Agence des douanes et du revenu du Canada (ADRC), pour contester le rajustement de parité salariale qui lui avait été versé en application de l'entente sur la parité salariale conclue entre le Secrétariat du Conseil du Trésor (SCT) et l'Alliance de la Fonction publique du Canada (AFPC).

[2]   À la présentation de son grief, M. Karimjee était membre de l'Institut professionnel de la fonction publique du Canada (IPFPC), qui a accepté de présenter le grief à l'arbitrage et de le représenter.

[3]   Le grief se lit comme suit :

[Traduction]

Je proteste contre l'interprétation que l'employeur fait de l'entente sur la parité salariale conclue entre le Secrétariat du Conseil du Trésor (SCT) et l'Alliance de la Fonction publique du Canada (AFPC). Mon grief porte sur les points suivants.

Le traitement que j'ai touché comme PM-1 par intérim (titularisation CR-4) pour la période du 12 octobre 1993 au 31 mars 1994 est inférieur à celui que les CR-4 ont touché après le rajustement de parité salariale.

Mon traitement de PM-1 par intérim (titularisation CR-4) à compter du 1er avril 1994, puis après ma nomination comme PM-1, n'a pas été calculé de nouveau conformément à l'entente sur la parité salariale.

Redressement réclamé

Que mon traitement comme PM-1 par intérim du 12 octobre 1993 au 31 mars 1994 soit calculé de nouveau pour être porté à un niveau plus élevé que celui des CR-4 après le rajustement de parité salariale.

Que mon traitement de PM-1 par intérim, puis de PM-1 dûment nommé soit calculé de nouveau à compter du 1er avril 1994 conformément à l'entente sur la parité salariale en partant de mon traitement de CR-4, avec le rajustement de parité salariale, immédiatement avant le début de l'intérim.

[4]   Le 18 décembre 2002, l'employeur a rejeté le grief au dernier palier :

[Traduction]

Je réponds au grief dans lequel vous réclamez un nouveau calcul de vos taux de rémunération comme PM par intérim et titularisé compte tenu du Protocole d'accord sur le calcul de l'indemnité (entente sur la parité salariale) entre l'Alliance de la Fonction publique du canada et le Secrétariat du Conseil du Trésor. J'ai examiné tous les renseignements disponibles en tenant compte des arguments avancés par votre représentant de l'Institut professionnel de la fonction publique du Canada (IPFPC).

Le Protocole d'accord sur le calcul de l'indemnité prévoit le versement rétroactif d'une somme forfaitaire de 5 p. 100 du rajustement de parité salariale tenant lieu de nouveau calcul des rajustements basés sur le traitement pour la période du 8 mars 1985 au 31 mars 1994, dans le cas des fonctionnaires occupant des postes dans les groupes concernés (CR, ST, DA, HS, LS et EU).

Les nouveaux calculs dans les situations d'intérim, de promotion et de temps supplémentaire ultérieures au 31 mars 1994 sont effectués en fonction de chaque situation. Le Secrétariat du Conseil du Trésor a confirmé que rien dans l'Entente ne prévoit de nouveaux calculs de votre taux de rémunération.

En outre, comme l'Agence des douanes et du revenu du Canada n'était pas signataire de ce Protocole d'accord, elle n'a pas compétence pour en modifier l'application.

Compte tenu de ce qui précède, je ne peux pas vous accorder le redressement demandé et je dois rejeter votre grief.

[5]   Les parties se sont entendues sur l'exposé des faits suivants (pièce G-1) :

[Traduction]

  1. M. Karimjee a travaillé pour Revenu Canada (devenu l'Agence des douanes et du revenu du Canada) durant les périodes suivantes :

    • Nomination pour une période déterminée comme PM-01 (agent de contact pour le recouvrement) du 23 novembre 1992 au 31 mars 1993.
    • Nomination pour une période déterminée comme CR-04 (commis au contact pour le recouvrement) du 7 septembre 1993 au 6 octobre 1993.
    • Cette nomination pour une période déterminée comme CR-04 a été prolongée du 6 octobre 1993 au 28 janvier 1994.
    • La même nomination pour une période déterminée comme CR-04 a été prolongée du 28 janvier 1994 au 31 mars 1994.
    • Nomination pour une période déterminée comme PM-01 (agent de contact pour le recouvrement) par intérim du 12 octobre 1993 au 31 mars 1994.
    • La nomination pour une période déterminée au poste d'attache (CR-04) de M. Karimjee a de nouveau été prolongée du 31 mars 1994 au 15 avril 1994.
    • Sa nomination pour une période déterminée comme PM-01 par intérim a été prolongée du 31 mars 1994 au 15 avril 1994.
    • Nomination pour une période déterminée comme PM-01 du 18 mars 1994 au 31 mars 1995.
    • Nomination pour une période indéterminée comme PM-01 titularisé (agent de contact pour le recouvrement) le 6 février 1995.
    • Nomination pour une période indéterminée comme AU-01 titularisé (vérificateur de l'impôt) le 8 septembre 1997.
  2. Pendant ces périodes de nomination comme CR et PM, M. Karimjee était assujetti à la convention-cadre entre le Conseil du Trésor et l'Alliance de la Fonction publique du Canada.

  3. Le 29 octobre 1999, l'Alliance de la Fonction publique du Canada et le Conseil du Trésor ont signé un Protocole d'accord qui a été incorporé dans l'ordonnance sur consentement de la décision du Tribunal canadien des droits de la personne. Cette ordonnance sur consentement est jointe et produite en preuve avec l'accord des parties.

  4. Les parties ont aussi convenu de déposer les documents suivants en preuve :

    • Politique sur les conditions d'emploi du Conseil du Trésor du Canada;
    • Questions et réponses sur l'équité salariale de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada.
  5. Le paragraphe 9.5 du Protocole d'accord précise que : « Les parties conviennent qu'en ce qui concerne les heures supplémentaires, les nominations et les affectations intérimaires ainsi que les promotions, une somme forfaitaire correspondant à 5 p. 100 du rajustement de parité salariale globale couvrira la période rétroactive allant du 8 mars 1985 au 31 mars 1994. En ce qui a trait à la période allant du 1er avril 1994 au 29 juillet 1998, les sommes en question seront calculées en fonction de chaque situation. »

  6. Le 7 avril 2000, M. Karimjee a touché un chèque de parité salariale de 310,20 $ pour la période du 7 septembre au 11 octobre 1993, ainsi qu'une somme forfaitaire correspondant à 5 p. 100 du rajustement de parité salariale globale, soit 15,51 $.

  7. Le 24 novembre 2000, M. Karimjee a reçu un chèque d'intérêts de 91,58 $ sur le rajustement de parité salariale.

  8. Les parties conviennent que le grief est recevable.

[6]   Dans son témoignage, M. Karimjee a déclaré que d'autres fonctionnaires classés PM-01 dans des situations analogues à la sienne (MM. Wong et Sidhu) avaient reçu un rajustement de parité salariale résultant d'un nouveau calcul du traitement auquel ils avaient droit. Il a fait valoir aux Ressources humaines qu'il avait le droit de faire recalculer son traitement comme les autres PM-01 et il a demandé des corrections. Selon lui, il est injuste qu'il ait été moins bien payé comme PM-01 par intérim qu'il ne l'aurait été dans son ancien poste de CR-04.

[7]   Le 20 décembre 2001, Kerri Dewar, des Ressources humaines, a répondu à M. Karimjee qu'on recalculerait son traitement (pièce G-24). Par la suite, Ardy Hendriks, conseiller en rémunération à l'Unité de la parité salariale, est arrivé à la conclusion que M. Karimjee n'avait pas droit à un nouveau calcul de son traitement. L'avis qu'il a donné à cet égard (pièce G-25), envoyé le 24 janvier 2002, se lit comme suit :

[Traduction]

Quand j'ai examiné votre compte en vue du nouveau calcul de votre traitement comme PM-01, j'ai eu besoin d'explications sur l'interprétation des règles et du règlement applicables à cette démarche. La documentation dont je dispose ne contenait pas de définition claire de ces règles pour leur application à votre compte.

J'ai envoyé ma demande d'explications à l'agent de la politique de rémunération d'Ottawa, qui a fait confirmer les renseignements demandés par le Conseil du Trésor avant de répondre à mes questions.

Vous étiez titularisé comme CR-04 le 1er avril 1994 pendant que vous occupiez un poste de PM-01 par intérim (depuis le 12 octobre 1993). Vous avez continué d'occuper ce poste par intérim sans interruption jusqu'à votre nomination comme PM-01 le 18 avril 1994.

Conformément aux règles et au règlement confirmés par le Conseil du Trésor,

[traduction] « il ne devrait pas y avoir de nouveau calcul de votre taux de rémunération à la date de votre promotion, le 18 avril 1994, puisque cela serait considéré comme une confirmation de votre rémunération d'intérim et qu'il n'y a eu aucune interruption de l'intérim de son début (en octobre 1993) jusqu'à la date de votre promotion. »

Votre compte n'est donc pas admissible à un nouveau calcul de votre traitement comme PM-01. Si vous avez besoin d'explications sur ce qui précède, n'hésitez pas à communiquer avec moi ou avec ma superviseure, Erica Jacquard.

[8]   Dans son témoignage, M. Karimjee a souligné qu'il était en avril 1994 dans une situation analogue à celle de MM. Wong et Sidhu. Il a dit que, si sa mémoire était bonne, M. Sidhu avait longtemps été CR-04 nommé pour une période déterminée et qu'il s'était qualifié au concours de PM-01 en janvier ou février 1994. On lui avait offert un poste de PM-01 par intérim le 18 avril 1994, mais il était encore titularisé CR-04 à ce moment-là. C'est vers juillet 1996 qu'il a été nommé PM-01 pour une période indéterminée.

[9]   John Wong a témoigné sur sa carrière à Revenu Canada (Impôt); son témoignage se résume comme suit.

[10]   M. Wong a été nommé CR-04 pour une période déterminée du 27 septembre 1993 au 31 janvier 1994 (pièce G-3); cette nomination pour une période déterminée a été prolongée jusqu'au 31 mars 1994 (pièce G-4), puis jusqu'au 15 avril 1994 (pièce G-5).

[11]   Il a ensuite été nommé PM-01 pour une période déterminée du 18 avril 1994 au 31 mars 1995 (pièce G-7); le 6 février 1995, il a été nommé PM-01 pour une période indéterminée (pièce G-8). Par la suite, il a été nommé PM-03 pour une période indéterminée.

[12]   M. Wong a témoigné avoir touché un rajustement de parité salariale en sa qualité de CR-04 et déclaré que son traitement avait été calculé de nouveau comme PM-01. Il a obtenu deux augmentations d'échelon, en avril 1999 et en février 2000. En contre-interrogatoire, il a admis que sa situation (nomination pour une période déterminée comme PM-01) était différente de celle de M. Karimjee (qui occupait un poste de PM-01 par intérim).

[13]   Les extraits suivants des ordonnances figurant dans Alliance de la Fonction publique du Canada c. Canada (Conseil du Trésor), [1998] T.C.D.P. no 6 (onglet 2 du recueil des pièces de l'employeur) sont particulièrement pertinents en l'espèce :

XI. ORDONNANCES

À la lumière des constatations susmentionnées quant à la violation de l'article 11 de la Loi, LE TRIBUNAL ORDONNE CE QUI SUIT :

[...]

  1. Que la date du début de la période aux fins du calcul du rajustement salarial rétroactif soit le 8 mars 1985.

[...]

  1. Que les rajustements salariaux paritaires pour les périodes postérieures à la présente décision soient consolidés et fassent partie intégrante des salaires.

[...]

  1. Que la question de savoir si les rajustements rétroactifs aux salaires directs doivent être réputés des salaires à toutes les fins, ou des salaires aux fins du calcul de la pension de retraite mais non à d'autres fins, soit réglée dans le cadre de la phase III de cette procédure.

[...]

[14]   L'extrait suivant du « Protocole d'accord » que l'AFPC (la plaignante) et le Conseil du Trésor (l'intimé) ont signé le 29 octobre 1999 (onglet 3 du recueil des pièces de l'employeur) est pertinent lui aussi :

1.  Calculs des sommes à verser

[...]

1.8 Tous les rajustements de parité salariale font partie intégrante des salaires à compter du 28 juillet 1998.

[...]

Heures supplémentaires, nominations et affectations intérimaires et promotions

9.5 Les parties conviennent qu'en ce qui concerne les heures supplémentaires, les nominations et les affectations intérimaires ainsi que les promotions, une somme forfaitaire correspondant à 5 p. 100 du rajustement de parité salariale globale couvrira la période rétroactive allant du 8 mars 1985 au 31 mars 1994. En ce qui a trait à la période allant du 1er avril 1994 au 29 juillet 1998, les sommes en question seront calculées en fonction de chaque situation.

[15]   La Politique et le Règlement sur les conditions d'emploi (onglet 12) ont aussi leur importance dans cette affaire.

Arguments

Pour le fonctionnaire s'estimant lésé

[16]   La question de savoir comment le paragraphe 9.5 du Protocole d'accord s'applique relève de la convention collective. L'entente sur la parité salariale ne précisait pas son application, mais la convention collective stipule le mode de calcul du traitement en cas de promotion.

[17]   Le paragraphe 9.5 prévoit qu'une somme forfaitaire correspondant à 5 p. 100 du rajustement de parité salariale doit être versée pour la période antérieure au 1er avril 1994 et qu'un nouveau calcul du traitement devrait être fait pour la période suivante.

[18]   Les décisions rendues dans Alliance de la Fonction publique du Canada c. Conseil du Trésor par la Commission (2001 CRTFP 81) et par la Cour d'appel fédérale (2002 ACF 447) ont établi qu'il n'est pas clair que le Protocole d'accord et l'ordonnance sur consentement entraînent une obligation conformément à la convention collective.

[19]   Dans Nadeau, 2003 CRTFP 17, le vice-président Joseph W. Potter est arrivé à la conclusion que, pour la période à l'égard de laquelle M. Nadeau réclamait un nouveau calcul de son traitement, le paragraphe 9.5 de l'ordonnance sur consentement prévoyait le versement d'une somme forfaitaire correspondant à 5 p. 100 du rajustement de parité salariale globale et que cela ne modifiait pas la convention collective à laquelle il était assujetti. Cette décision tenait compte de la période antérieure au 1er avril 1994.

[20]   Pour la période ultérieure au 1er avril 1994, les parties doivent décider s'il faut faire un nouveau calcul du traitement. Le fonctionnaire s'estimant lésé, M. Karimjee, veut faire appliquer les règles de la convention collective pour faire augmenter son traitement; il allègue que la « Politique sur les conditions d'emploi » et le Règlement (onglet 21) devraient s'appliquer. Il estime plus précisément que les paragraphes suivants du Règlement devraient être applicables :

Taux de rémunération à la promotion

24.(1)   La nomination d'un employé désigné à l'article 23 constitue une promotion lorsque le taux de rémunération maximal applicable au poste auquel cette personne est nommée dépasse le taux de rémunération maximal applicable au niveau de titularisation de l'employé avant cette nomination :

(a)   d'un montant au moins égal à la plus faible augmentation prévue pour le poste auquel elle est nommée, lorsque le poste comporte plus d'un taux de rémunération; ou

(b)   d'un montant au moins égal à quatre pour cent du taux maximal pour le poste qu'elle occupait immédiatement avant cette nomination, lorsque le poste auquel elle est nommée ne comporte qu'un seul taux de rémunération.

24.(2)   Sous réserve des articles 27 et 28, à la promotion, le taux de rémunération sera le taux le plus proche du taux de rémunération auquel l'employé avait droit à son niveau de titularisation immédiatement avant la nomination qui lui vaut une augmentation tel que le stipule le paragraphe 1) du présent article; ou d'un montant au moins égal à quatre pour cent du taux maximal pour le poste auquel il est nommé, lorsque la rémunération du poste auquel se fait la nomination est fondée sur le rendement.

[21]   Dans Buchmann, 2002 CRTFP 14, un PM avait été promu AU; l'arbitre du grief avait conclu qu'il avait droit à un nouveau calcul de son traitement. C'est ce qui s'est produit dans le cas de M. Wong, un CR-04 qui a été promu PM-01 le 2 février 1995. Son traitement à la promotion a été calculé de nouveau, et il a reçu un rajustement de parité salariale. Le nouveau calcul de son traitement a été effectué en fonction de la convention collective et des dispositions de la « Politique sur les conditions d'emploi ». Les règles applicables au nouveau calcul avaient été établies par les parties indépendamment de la procédure du Tribunal des droits de la personne, de sorte qu'il n'en avait pas été question dans l'ordonnance sur consentement.

[22]   M. Karimjee a été nommé PM-01 pour une période déterminée le 18 avril 1994. Avant cette date, il était CR-04, nonobstant sa nomination par intérim dans un poste de PM-01 à partir du 12 octobre 1993. Sa titularisation comme CR-04 n'avait pas été changée par sa nomination intérimaire; jusqu'au 18 avril 1994, il était donc membre du groupe CR, identifié comme groupe visé par l'entente sur la parité salariale. Sa situation n'était pas différente de celle de M. Wong.

[23]   Dans Menlar c. Comité d'appel de la Commission de la fonction publique, [1979] 1 C.F. 411, la Cour fédérale du Canada a précisé qu'une affectation intérimaire ne constitue pas une nomination au sens de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique. Le commissaire a donc conclu que le fonctionnaire avait conservé sa titularisation comme CR-4 jusqu'à ce que l'employeur ait décidé de le nommer pour une période indéterminée à un poste de PM-1. Dans Galarneau (dossier de la Commission 166-2-2639) l'arbitre Lachapelle a écrit ce qui suit :

Il appert donc que juridiquement seul l'employé qui est nommé à un poste occupe ce poste et que l'employé qui est nommé à titre intérimaire à un poste au sens de l'article 27 du Règlement sur l'emploi dans la fonction publique ou qui remplit provisoirement les fonctions d'un poste plus élevé que le sien et qui touche une rémunération provisoire conformément à l'article 83 du Règlement sur les conditions d'emploi dans la fonction publique n'occupe pas le poste dont il exécute les fonctions; dans ce dernier cas, l'employé occupe toujours le poste auquel il a été nommé même s'il exécute les fonctions d'un autre poste.

[24]   Conformément à ces décisions, M. Karimjee doit donc être considéré comme un CR-04 jusqu'au 18 avril 1994. Le rajustement de parité salariale avait modifié les taux de rémunération des membres du groupe CR. Les autres personnes promues d'un poste de CR à un poste de PM après le 1er avril 1994 avaient bénéficié d'un nouveau calcul de leur traitement, en application de la « Politique sur les conditions d'emploi » et des décisions de la Commission.

[25]   M. Karimjee a donc droit à une augmentation de son traitement comme CR-04. Dans son grief, il invoque l'entente sur la parité salariale, mais les faits montrent que l'affaire est liée à l'application de la « Politique sur les conditions d'emploi ». La Commission a compétence en la matière, et le fonctionnaire s'estimant lésé devra bénéficier d'un nouveau calcul de son traitement comme CR ainsi que d'un rajustement de sa rémunération comme PM.

Pour l'employeur

[26]   Il s'agit clairement d'une affaire de parité salariale; le grief le précise expressément. Dans Burchill c. Procureur général du Canada, [1981] 1 C.F. 109, la Cour d'appel fédérale a déclaré que le grief ne peut pas être modifié devant l'arbitre et qu'on ne peut pas avancer de nouveaux arguments devant lui. Dans sa réponse à la Commission, le 28 mai 2003, l'IPFPC a déclaré que l'ordonnance sur consentement prévoit un nouveau calcul du rajustement en fonction de chaque situation. L'agent négociateur a déclaré que cette affaire est liée à l'application d'une convention collective, mais il n'a pas déposé la convention collective en preuve. Il n'a pas non plus invoqué de disposition particulière d'une convention collective dans ses arguments.

[27]   Toutes les affaires invoquées par l'agent négociateur sont basées sur l'interprétation qu'il faut donner au paragraphe 9.5 du Protocole d'accord, tel que confirmé par l'ordonnance sur consentement. La Cour fédérale elle-même ne peut faire exécuter son ordonnance qu'en vertu de ses règles de pratique, et la Commission n'a pas compétence à cet égard.

[28]   Le rajustement de parité salariale n'équivaut pas à un traitement, et les ordonnances suivantes du Tribunal canadien des droits de la personne dans Alliance de la Fonction publique du Canada c. Canada (Conseil du Trésor), supra (onglet 2 du Recueil des pièces de l'employeur) se lisent comme suit :

XI. ORDONNANCES

À la lumière des constatations susmentionnées quant à la violation de l'article 11 de la Loi, LE TRIBUNAL ORDONNE CE QUI SUIT :

[...]

  1. Que la date du début de la période aux fins du calcul du rajustement salarial rétroactif soit le 8 mars 1985.

[...]

  1. Que les rajustements salariaux paritaires pour les périodes postérieures à la présente décision soient consolidés et fassent partie intégrante des salaires.

[...]

  1. Que la question de savoir si les rajustements rétroactifs aux salaires directs doivent être réputés des salaires à toutes les fins, ou des salaires aux fins du calcul de la pension de retraite mais non à d'autres fins, soit réglée dans le cadre de la phase III de cette procédure.

[...]

[29]   L'Ordonnance no 7 signifie que, après la date de la décision du Tribunal des droits de la personne, les rajustements salariaux paritaires devaient être « consolidés » pour faire partie intégrante des salaires. Pour la période de 1985 à 1998, l'Ordonnance no 13 ne précise pas des salaires, mais bien des rajustements, en ajoutant que la question devait être tranchée dans le cadre de la phase III de la procédure.

[30]   L'ordonnance sur consentement déposée à la Cour fédérale du Canada (onglet 3 du recueil des pièces de l'employeur) précise que le Protocole d'accord conclu le 29 octobre 1999 entre l'AFPC et le Conseil du Trésor est accepté comme règlement de toutes les questions restantes aux phases II et III pour le groupe CR et les autres groupes visés. Le paragraphe 9.5 du Protocole d'accord, sur les situations d'affectations intérimaires et les promotions, est incorporé dans l'ordonnance sur consentement.

[31]   Les dates précisées au paragraphe 9.5 mènent à des applications différentes pour MM. Wong et Karimjee. M. Wong avait été nommé PM-01 pour une période déterminée le 18 avril 1994; il avait été titularisé jusque-là comme CR-04. M. Karimjee a été nommé PM-01 pour une période déterminée le 18 avril 1994, après avoir été nommé PM-01 à titre intérimaire à partir du 12 octobre 1993, de sorte que l'employeur estime qu'il n'y avait eu aucune interruption entre le début de l'intérim et la date de la promotion, ce qui signifie que M. Karimjee n'est pas admissible à un nouveau calcul de son traitement comme PM-01.

[32]   La Commission n'a pas compétence pour décider si l'employeur a tort ou raison dans son application du paragraphe 9.5 du Protocole d'accord. La Cour fédérale du Canada est l'instance compétente pour trancher cette question et pour faire appliquer son ordonnance. Dans Alliance de la Fonction publique du Canada c. Conseil du Trésor, supra, le président Yvon Tarte a rejeté les arguments de l'AFPC et précisé ce qui suit :

L'Alliance soutient maintenant que tous les avantages sociaux, avantages indirects et indemnités prévus dans les diverses conventions collectives pertinentes pour les groupes plaignants et qui étaient liés aux taux de rémunération jugés discriminatoires par le Tribunal doivent maintenant être rajustés au cas par cas pour toute la période rétroactive, à moins d'entente contraire par les parties. Cela exigerait de l'employeur qu'il ressorte ses registres et dossiers de paye pour recalculer tous les versements d'avantages effectués antérieurement en fonction des taux de rémunération aujourd'hui considérés comme discriminatoires.

[33]   Il est arrivé à la conclusion suivante dans cette affaire-là :

L'imprécision de la formulation utilisée dans l'ordonnance sur consentement peut donner lieu à des vues et interprétations différentes. Je ne crois pas que la Commission devrait tenter de corriger l'ambiguïté contenue dans l'ordonnance du Tribunal. À moins que les parties ne s'entendent sur cette question, l'affaire doit être renvoyée à la Cour fédérale et, à terme, au Tribunal.

[34]   La Cour d'appel fédérale a souscrit à la position du président Tarte : la formulation de l'ordonnance sur consentement n'était pas claire.

[35]   Dans Nadeau, supra, le vice-président Potter est venu à la conclusion suivante sur la demande de nouveau calcul du traitement du fonctionnaire s'estimant lésé :

En l'espèce, pour la période à l'égard de laquelle M. Nadeau réclame un nouveau calcul de son traitement, le paragraphe 9.5 de l'ordonnance sur consentement prévoyait « [...] une somme forfaitaire correspondant à 5 p. 100 du rajustement de parité salariale globale ». Cela ne modifie pas la convention collective applicable au fonctionnaire s'estimant lésé. Je conclus donc que je n'ai pas compétence pour trancher cette affaire en vertu du paragraphe 92(1) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique.

[36]   En l'espèce, l'arbitre du grief devrait se conformer aux décisions citées qui ont été rendues par les arbitres et par la Cour d'appel fédérale sur des questions analogues, en rejetant le grief faute de compétence pour l'instruire.

[37]   En réplique, l'agent négociateur a déclaré que l'ordonnance sur consentement prévoit un nouveau calcul « en fonction de chaque situation » et que, dans le cas de M. Karimjee, elle entraîne donc « une obligation selon la convention collective », comme l'a écrit le juge Sexton, de la Cour d'appel fédérale. M. Karimjee a en effet été promu après le 1er avril 1994, de sorte que sa situation était différente de celle de M. Nadeau, qui avait été promu avant cette date. La Commission a donc bel et bien compétence.

MOTIFS DE LA DÉCISION

[38]   Le fonctionnaire s'estimant lésé doit prouver que l'interprétation ou l'application à son endroit d'une question liée à ses conditions d'emploi l'a lésé. M. Karimjee veut qu'on calcule de nouveau son traitement pour la période durant laquelle il était PM-01 par intérim, puis nommé à un poste de PM-01, à partir de nouveaux calculs de son traitement comme CR-04.

[39]   Son grief porte premièrement sur l'interprétation de l'entente d'équité salariale à ses promotions pendant la période de rétroactivité précisée au paragraphe 9.5 du Protocole d'accord. Il a présenté comme preuve le nouveau calcul que l'employeur a fait du traitement de M. Wong, qui avait été promu avec une nomination pour une période déterminée à la même date que lui. La réponse de l'employeur à son grief stipulait que M. Karimjee n'a pas droit à un nouveau calcul de son traitement parce que rien dans l'entente sur l'équité salariale ne prévoyait un nouveau calcul de son taux de rémunération. Sur ce point-là, M. Karimjee a présenté une preuve indirecte, fondée sur le témoignage de M. Wong : les taux de rémunération de base avaient été modifiés par l'entente sur la parité salariale. Toutefois, pour arriver à cette conclusion, il faut interpréter les dispositions de l'ordonnance sur consentement, ce pourquoi la Commission n'a pas compétence.

[40]   L'avocat de l'employeur a soutenu qu'un arbitre de griefs nommé par la Commission n'a pas compétence pour déterminer si l'employeur avait correctement appliqué le paragraphe 9.5 du Protocole d'accord. Je souscris à la conclusion du président Tarte dans Alliance de la Fonction publique du Canada c. Conseil du Trésor, supra, à savoir que c'est la Cour fédérale et, en bout de ligne, le Tribunal canadien des droits de la personne qui ont compétence pour corriger l'ambiguïté que renferme l'ordonnance du Tribunal. D'après M. Tarte, la Commission ne devrait pas tenter de la corriger, et la Cour d'appel fédérale (2002 A.C.F. 447) a souscrit à cette conclusion. Sur ce point-là, M. Tarte a été clair :

L'imprécision de la formulation utilisée dans l'ordonnance sur consentement peut donner lieu à des vues et interprétations différentes. Je ne crois pas que la Commission devrait tenter de corriger l'ambiguïté contenue dans l'ordonnance du Tribunal. À moins que les parties ne s'entendent sur cette question, l'affaire doit être renvoyée à la Cour fédérale et, à terme, au Tribunal.

[41]   Pour sa part, le juge Sexton, de la Cour d'appel fédérale, a conclu comme suit :

Pour avoir gain de cause, il incombait à la demanderesse, avant que naisse une obligation selon la convention collective, de convaincre le président Tarte que l'ordonnance par consentement donnait effet à un accord selon lequel les avantages et indemnités précisés devaient être payés. À notre avis, le président Tarte était parfaitement fondé à dire que l'ordonnance par consentement était imprécise sur ce point et que par conséquent l'existence de la présumée obligation n'avait pas été établie.

Nous reconnaissons qu'il est loin d'être évident que le protocole d'accord et l'ordonnance par consentement donnent lieu à une telle obligation, et cela suffisait pour autoriser le président Tarte à tirer les conclusions qu'il a tirées.

[...]

Nous sommes enclins à dire que l'effet de l'ordonnance par consentement est restreint par les termes exprès du protocole d'accord, le résultant étant que ce qui n'est pas énoncé dans le protocole d'accord est exclu de l'ordonnance par consentement.

[42]   Le vice-président Potter a conclu qu'il n'avait pas compétence pour trancher le grief de M. Nadeau, supra, réclamant un nouveau calcul de son traitement (le paragraphe 9.5 de l'ordonnance sur consentement prévoyait le versement d'une somme forfaitaire correspondant à 5 p. 100 du rajustement de parité salariale globale) parce que le versement de cette somme forfaitaire de 5 p. 100 ne modifiait pas la convention collective applicable à l'intéressé. Sur ce point-là, M. Potter a déclaré ce qui suit :

En l'espèce, pour la période à l'égard de laquelle M. Nadeau réclame un nouveau calcul de son traitement, le paragraphe 9.5 de l'ordonnance sur consentement prévoyait « [...] une somme forfaitaire correspondant à 5 p. 100 du rajustement de parité salariale globale ». Cela ne modifie pas la convention collective applicable au fonctionnaire s'estimant lésé. Je conclus donc que je n'ai pas compétence pour trancher cette affaire en vertu du paragraphe 92(1) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique.

Je souscris à cette conclusion de M. Potter.

[43]   Par conséquent, je dois conclure que je n'ai pas compétence pour déterminer si l'interprétation ou l'application par l'employeur du paragraphe 9.5 du Protocole d'accord était justifiée dans le cas de M. Karimjee.

[44]   Cela dit, je peux interpréter plus largement les termes employés par M. Karimjee dans son grief en le basant sur les dispositions de la convention collective concernant le nouveau calcul du traitement en cas de promotion. C'est la position que l'agent négociateur a avancée dans ses arguments. L'employeur a répondu en invoquant la décision Burchill, supra; il a déclaré que les arguments avancés ne correspondaient pas à ce qui était écrit dans le grief. Toutefois, la preuve a révélé que le grief n'a pas changé puisque l'employeur a fait allusion à ces arguments dans sa réponse au dernier palier. L'employeur n'a donc pas été pris au dépourvu par les arguments que l'agent négociateur a fait valoir devant moi, et le fond du problème qui sépare les parties avait été discuté dès le début. Dans ses arguments, le fonctionnaire s'estimant lésé a maintenu que l'entente sur la parité salariale précise quel type de calcul s'impose pour certaines périodes (avant ou après le 31 mars 1994), sans toutefois préciser comment le calcul devrait être fait. Les modalités d'application du calcul sont précisées selon lui dans la « Politique sur les conditions d'emploi » et le Règlement, ce qui revient à dire qu'un nouveau calcul s'impose lorsque quelqu'un est nommé pour une période indéterminée à un poste à partir de celui qu'il occupait par intérim. Cela m'oblige à appliquer la « Politique sur les conditions d'emploi » et le Règlement plutôt que l'entente sur la parité salariale; il m'est possible d'interpréter le deuxième paragraphe de la rubrique du redressement demandé du grief comme une demande du fonctionnaire s'estimant lésé de calculer de nouveau son traitement de PM-01 par intérim et son traitement de PM-01 nommé pour une période indéterminée conformément à la « Politique sur les conditions d'emploi » et au Règlement, en partant de son traitement comme CR-04 après le versement du rajustement de parité salariale. Or, le fonctionnaire s'estimant lésé se reporte aux taux de rémunération rajustés comme s'ils étaient un fait.

[45]   Ce deuxième argument du fonctionnaire s'estimant lésé fait donc appel à l'entente sur la parité salariale. Il s'agit par conséquent de savoir si cette entente modifiait ou pas les taux de rémunération de la convention collective applicable, de même que l'application de la Politique et du Règlement, en définitive. À cet égard, le fonctionnaire s'estimant lésé ne s'est pas acquitté de la charge de prouver que les taux de rémunération avaient été modifiés par l'entente sur la parité salariale à la date de sa nomination comme PM-01 (le 18 avril 1994) ou avant cette date. Le témoignage de M. Wong, qui a déclaré que l'employeur avait calculé son traitement de nouveau, ne suffit pas à prouver cette allégation et à démontrer que les taux de rémunération avaient été modifiés. L'employeur n'a pas expliqué comment il avait procédé pour calculer le traitement de M. Wong, en déclarant simplement que le fonctionnaire s'estimant lésé n'avait pas déposé la convention collective applicable en preuve et en faisant valoir qu'il n'avait pas prouvé l'existence d'une disposition précise étayant ses allégations que la convention collective précise comment le calcul du traitement devrait être fait en cas de promotion (et que la « Politique sur les conditions d'emploi » ainsi que le Règlement devraient s'appliquer).

[46]   Faute de preuve de l'existence de dispositions pertinentes d'une convention collective, il m'est impossible d'accepter l'allégation de l'agent négociateur que la « Politique sur les conditions d'emploi » devrait s'appliquer. Sans cette preuve, il m'est impossible aussi de déterminer si la Politique en question est incorporée dans la convention collective pour préciser comment le calcul devrait être fait en cas de promotion.

[47]   Le fonctionnaire s'estimant lésé se plaint que son traitement comme PM-01 était inférieur au traitement d'un CR-04 après le versement du rajustement de parité salariale. Or, le différend en matière de parité salariale était à toutes fins utiles une lutte de fonctionnaires membres de groupes où les femmes dominaient contre la pratique discriminatoire de l'employeur de les payer moins que les membres des groupes dominés par les hommes. Dans la décision qu'il a rendue le 29 juillet 1998, le Tribunal canadien des droits de la personne a conclu qu'on avait prouvé l'existence d'une infraction à l'article 11 de la Loi canadienne sur les droits de la personne (LCDP). L'ordonnance sur consentement et le Protocole d'accord sont des documents qui ont été rédigés pour que les parties en cause sachent comment appliquer la décision du Tribunal à l'égard des fonctionnaires des groupes intéressés. Le groupe CR est du nombre, mais pas le groupe PM. S'il n'y a pas de violation des dispositions sur la parité salariale de la LCDP, rien - en théorie - n'empêche l'employeur de payer à un fonctionnaire classifié CR un traitement plus élevé que celui qu'il verse à un autre fonctionnaire classé PM. Si l'employeur avait augmenter les taux de rémunération des PM par suite de la décision du Tribunal, l'écart entre les deux échelles de traitement aurait été maintenu et la violation de la LCDP se serait perpétuée.

[48]   En l'espèce, un autre facteur aussi pose problème, étant donné que M. Karimjee, qui est membre de l'IPFPC puisqu'il a été nommé AU, a demandé à se prévaloir de l'application des conventions collectives des CR et des PM, alors qu'elles sont signées par l'AFPC. Dans une situation comme celle-là, l'agent négociateur de l'unité de négociation qui représente les CR et les PM devrait déclarer qu'il approuve le renvoi du grief à l'arbitrage et qu'il est disposé à représenter le fonctionnaire s'estimant lésé ou à autoriser l'IPFPC à se baser sur une convention collective de l'AFPC dans la procédure d'arbitrage des griefs en vertu du paragraphe 92(2) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP). Sans cette approbation, le fonctionnaire n'a pas le droit de porter le grief à l'arbitrage, et sans cette autorisation de l'AFPC, le renvoi à l'arbitrage du grief de M. Karimjee, qui est basé sur les conventions collectives signées par cet agent négociateur, est irrecevable.

[49]   Enfin, je tiens à faire l'observation suivante en passant. Même en faisant abstraction du fait que la Commission n'a pas compétence pour interpréter l'ordonnance sur consentement du Tribunal canadien des droits de la personne, je doute que les allégations préliminaires du représentant du fonctionnaire s'estimant lésé que les taux de rémunération avaient été modifiés par l'entente sur la parité salariale à la date de la promotion de M. Karimjee au poste de PM-01 ou avant cette date auraient des chances d'être accueillies. La formulation de l'Ordonnance no 7 et le paragraphe 1.8 du Protocole d'accord me semblent préciser que les rajustements salariaux paritaires pour les périodes postérieures à la décision du Tribunal, le 28 juillet 1998, sont « consolidés » et font partie intégrante des salaires.

[50]   Pour tous ces motifs, je n'ai pas compétence pour entendre l'affaire, et le grief est donc rejeté.

Léo-Paul Guindon,
commissaire

OTTAWA, le 28 novembre 2003.

Traduction de la C.R.T.F.P.

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