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Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

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  • Date:  20041203
  • Dossier:  166-2-31991, 166-2-31992
  • Référence:  2004 CRTFP 169

Devant la Commission des relations de travail dans la fonction publique


ENTRE

TERRANCE JAMES BARR et
SHERRY ELIZABETH FLANNERY

fonctionnaires s'estimant lésés

et

LE CONSEIL DU TRÉSOR
(Ministère de la Défense nationale)

employeur



Devant:
Guy Giguère, président suppléant
Pour les fonctionnaires s'estimant lésés:
Andrew Raven et Carolyn LeCheminant-Chandy, avocats
Pour l'employeur:
John Jaworski et Karl Chemsi, avocats
Affaire entendue à Ottawa (Ontario),
du 22 au 25 novembre 2004.

[1]    Les fonctionnaires s'estimant lésés allèguent que l'employeur a agi de manière discriminatoire en exigeant, comme condition d'emploi, qu'ils complètent en huit minutes le Test de conditionnement physique des pompiers. Ils indiquent dans leurs griefs que la norme de huit minutes établit une distinction discriminatoire fondée sur l'âge et le sexe.

[2]    L'audition de l'affaire, qui a commencé le 19 avril 2004, s'est étalée sur plusieurs semaines. Au cours de cette période, les fonctionnaires s'estimant lésés ont complété la présentation de leur preuve, laquelle comprenait le témoignage d'un témoin expert, M. Stephen Brown, professeur de premier cycle à l'École de kinésiologie de l'Université Simon Fraser.

[3]    À la reprise de l'audience le 22 novembre 2004, Me Raven m'a informé que les fonctionnaires s'estimant lésés s'opposaient à ce que le prochain témoin de l'employeur soit qualifié d'expert. La présente décision porte essentiellement et sommairement sur cette objection et des motifs complets de décision seront incorporés dans la décision sur le fond de ces griefs. Voici un bref résumé de la preuve et des arguments présentés à l'audience, qui s'est déroulée du 22 au 25 novembre 2004.

[4]    L'employeur a présenté Mme Suzanne P. Jaenen comme un témoin expert en soumettant son curriculum vitae (pièce 59), un certain nombre de publications et son témoignage en preuve. Mme Jaenen est actuellement employée par l'Agence de soutien du personnel des Forces canadiennes (ASPFC), un organisme de fonds non publics relevant de l'employeur. Auparavant, elle occupait le rang de capitaine dans l'armée, où elle travaillait depuis 1988. De 1981 à 1987, Mme Jaenen a étudié à l'Université d'Ottawa, où elle a obtenu un baccalauréat en éducation physique avant d'entreprendre un programme de deux ans devant conduire à l'obtention d'une maîtrise en éducation physique, qu'elle a abandonné après un an. De 1992 à 1994, elle a étudié à l'Université Queens, où elle a obtenu une maîtrise en physiologie de l'exercice.

[5]    En 1992, l'Université Queens travaillait à la conception du test de conditionnement physique des pompiers pour le compte de l'employeur. Pendant qu'elle y poursuivait ses études, Mme Jaenen agissait comme officier militaire chargé de la liaison entre l'employeur et l'université pour ce projet. Sa thèse de maîtrise portait en fait sur la conception du test de conditionnement physique des pompiers. Depuis l'obtention de son diplôme, elle participe à l'établissement des normes, tests et programmes de conditionnement physique pour les militaires ainsi qu'à la gestion de ces programmes. Elle travaille présentement au Centre d'entraînement de Dwyer Hill, une installation militaire, où elle a mis sur pied un laboratoire d'évaluation des possibilités physiques qui est accrédité par la Société canadienne de physiologie de l'exercice.

[6]    L'avocat de l'employeur fait valoir que la nécessité d'aider l'arbitre des faits était le critère fondamental qui devait être appliqué pour décider si Mme Jaenen devait être autorisée à témoigner comme témoin expert. La question de son indépendance n'est pas liée à d'admissibilité de son témoignage à ce titre, mais plutôt à la valeur probante qu'il convient d'accorder à cette preuve. Au soutien de sa thèse, il renvoie aux décisions suivantes : R. c. Mohan, [1994] 2 R.C.S. 9 (QL); Kozak c. Funk, [1995] S.J. no 569 (QL); Neudorf v. Nettwerk Productions Ltd. , [1998] B.C.J. no 2904 (QL); Riordon c. Canada (C.A.F.) , [1986], C.A.F. no 354; et Interamerican Transport Systems Inc. v. Canadian Pacific Express & Transport Ltd., [1995] O.J. no 3644.

[7]    Me Raven s'oppose à ce que Mme Jaenen soit qualifiée de témoin expert en faisait valoir que la preuve montre qu'elle n'est pas indépendante de l'employeur, qu'elle serait appelée à témoigner sur son propre travail et qu'elle défendra la thèse de l'employeur. Au soutien de son argument, il renvoie aux sources suivantes : J. Sopinka & S. N. Lederman & A. W. Bryant, The Law of Evidence in Canada, 2e éd. (Toronto : Butterworth's, 1999); R. c. Mohan, [1994] 2 R.C.S. 9; National Justice Campania Naveria SA v. Prudential Assurance Co. Ltd. (« The Ikarian Reefer »), [1993] 2 Lloyd's Rep. 68; Fellowes, McNeil v. Kansa General International Insurance Co. (1998), 40 O.R. (3d) 456 (Div. gén.); Liverpool Roman Catholic Archdioceses Trust v. Goldberg, (no 2), [2001] 4 All E.R. 950; Kirby Lowbed Services Ltd. v. Bank of Nova Scotia, [2003] B.C.J. no 917 (C.S.C.-B.); Bank of Montreal v. Citak, [2001] O.J. no 1096 (Cour supr.); R. v. Inco Ltd., [2003] O.J. no 5364, Preliminary Ruling #3; Human Rights Commission v. Air Canada, Canadian Airlines International Ltd. transcription de la preuve devant le Tribunal canadien des droits de la personne p. 621 à 630; Communications, Energy and Paperworkers Union of Canada, Local 1020 v. House of Commons Canada, NPLL/2000-050; CAMI Automotive Inc. v. Canadian Auto Workers, Local 88 (grief Goure), [1999] O.L.A.A. no 823; et Prairie Well Servicing Ltd. v. Tundra Oil and Gas Ltd., [2000] M.J. no 232 (Banc de la Reine).

[8]    J'ai entendu les arguments des parties relativement à la présente objection le 25 novembre 2004. À la demande des avocats, j'ai précisé, à l'issue de l'audience, que j'entendais me prononcer incessamment sur la question étant donné que Mme Jaenen devait être appelée à témoigner à la reprise de l'audience de l'affaire le 6 décembre 2004.

[9]    Je me suis appuyé sur les principes énoncés ci-dessous pour en venir à ma décision. L'admission de la preuve d'expert repose sur l'application des critères suivants : la pertinence, la nécessité d'aider le juge des faits, l'absence de règle d'exclusion et la qualification suffisante de l'expert. Voir l'arrêt R. c. Mohan, supra, paragr. 17 à 28.

[10]    Il est souhaitable que le témoin expert soit indépendant de la partie pour le compte de laquelle il témoigne. Ce n'est toutefois pas une règle absolue en droit administratif et en arbitrage en droit du travail. Cela est d'autant plus vrai que la Commission des relations de travail dans la fonction publique (CRTFP), et un arbitre des griefs nommé conformément à la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP), est maître de sa procédure. Les critères de la pertinence et de la nécessité d'aider le juge des faits peuvent être utiles pour déterminer si un témoin qui n'est pas indépendant peut quand même être qualifié d'expert. Si l'arbitre des griefs détermine qu'il existe une telle nécessité, la relation du témoin expert avec l'employeur sera prise en compte pour déterminer la valeur probante de son témoignage.

[11]    Ayant pris en considération l'ensemble de la preuve qui m'a été présentée ainsi que les arguments des parties relativement à l'objection soulevée par les fonctionnaires s'estimant lésés sur la question de la qualification de Mme Jaenen en tant que témoin expert, j'en viens à la conclusion que Mme Jaenen ne doit pas être qualifiée d'expert. Compte tenu de sa relation professionnelle avec l'employeur, je conclus qu'il n'est pas nécessaire de la faire témoigner comme expert. Rien ne l'empêche par ailleurs d'attester les faits, l'employeur ayant indiqué que deux autres témoins sont présentés comme des experts. Je fournirai des motifs supplémentaires relativement à cette conclusion dans ma décision sur le fond des griefs.

Guy Giguère,
président suppléant

OTTAWA, le 3 décembre 2004.

Traduction de la C.R.T.F.P.

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