Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Cotisations professionnelles - Remboursement - Permis obligatoire pour exécuter les fonctions - Groupe Médecine vétérinaire - ce grief portait sur la décision de l'Agence canadienne d'inspection des aliments (ACIA) de rejeter la demande du fonctionnaire s'estimant lésé pour le remboursement des cotisations qu'il avait versées au College of Veterinarians of Ontario (CVO) pour les années 2001 et 2002 - les parties ont convenu que l'article E2.01 de la convention collective stipule que les droits d'inscription versés par le fonctionnaire s'estimant lésé doivent être remboursés si le permis du CVO est indispensable à l'exercice continu des fonctions de son poste - les parties ont convenu que, si les fonctions du poste du fonctionnaire s'estimant lésé l'obligeaient à euthanasier des animaux par injection létale ou à se procurer des drogues réglementées et à s'en servir à cette fin, le fonctionnaire s'estimant lésé devrait être détenteur d'un permis du CVO pour être autorisé à le faire - la description de poste des vétérinaires affectés au Programme d'hygiène des viandes ne précise pas qu'ils doivent faire des euthanasies, acheter ou se procurer des drogues réglementées, ni s'en servir, mais le fonctionnaire s'estimant lésé a fait valoir que ces fonctions étaient comprises dans la description de poste sous la rubrique générale des « autres fonctions » - l'arbitre a statué que le fardeau de la preuve incombait au fonctionnaire s'estimant lésé et que celui-ci devait le convaincre que l'employeur exigeait de lui qu'il s'acquitte de fonctions pour lesquelles il avait besoin d'un permis afin d'avoir le droit de se faire rembourser ses cotisations en vertu de l'article E2.01 - les témoignages ont révélé que l'employeur avait demandé au fonctionnaire s'estimant lésé de se porter volontaire pour se rendre en Saskatchewan durant la crise de la maladie de la vache folle, en 1997, mais qu'il avait refusé - seul ce refus pouvait être considéré, puisqu'il avait refusé de s'acquitter des fonctions inhérentes à cette crise - l'arbitre a statué que l'argument avancé par le fonctionnaire s'estimant lésé selon lequel l'employeur lui avait demandé de se porter volontaire pour combattre l'épidémie de 1997 ne pouvait pas constituer une preuve que la détention d'un permis était une exigence de son poste, parce qu'il a refusé de s'acquitter des fonctions inhérentes à cette affectation - l'arbitre a également statué que l'affectation du fonctionnaire s'estimant lésé au plan d'urgence en cas de grève, en novembre 2003, impliquait qu'il aurait pu être appelé à euthanasier des animaux, mais que cette affectation n'était pas pertinente pour la détermination des fonctions qu'il avait dû accomplir dans les années 2001 et 2002, parce qu'elle était ultérieure à ses griefs - par conséquent, l'arbitre a conclu que le fonctionnaire s'estimant lésé n'avait pas prouvé que l'employeur avait expressément exigé qu'il s'acquitte de fonctions pour lesquelles le permis du CVO était indispensable. Griefs rejetés.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2004-04-15
  • Dossier:  166-32-32455, 166-32-32456
  • Référence:  2004 CRTFP 26

Devant la Commission des relations
de travail dans la fonction publique




ENTRE

JEROME KATCHIN
fonctionnaire s'estimant lésé

et

AGENCE CANADIENNE D'INSPECTION DES ALIMENTS
employeur

Devant:   Léo-Paul Guindon, commissaire

Pour le fonctionnaire
s'estimant lésé :  
Denise Balfe, Institut professionnel de la fonction publique du Canada

Pour l'employeur :   Neil McGraw, avocat


Affaire entendue à Toronto (Ontario),
du 26 au 28 janvier 2004.

[1]    Le fonctionnaire s'estimant lésé, Dr Jerome Katchin, conteste la décision de son employeur, Agence canadienne d'inspection des aliments (ACIA), de rejeter sa demande de remboursement des cotisations qu'il a versées au College of Veterinarians of Ontario (CVO) pour les années 2001 et 2002.

[2]    Les parties ont convenu d'un exposé des faits qui a été déposé en preuve (pièce G-1) et se lit comme suit :

[Traduction]

LES PARTIES CONVIENNENT DES FAITS SUIVANTS ET CONVIENNENT EN OUTRE QUE L'UNE OU L'AUTRE D'ENTRE ELLES PEUT INTRODUIRE DES ÉLÉMENTS DE PREUVE SUPPLÉMENTAIRES À L'AUDIENCE SUR CES QUESTIONS.

  1. Le Dr Katchin occupe actuellement un poste de VM-01 (Médecine vétérinaire - 01) du Programme d'hygiène des viandes, à l'Agence canadienne d'inspection des aliments (ACIA). Il fait partie de l'unité de négociation du groupe Médecine vétérinaire (VM).
  2. Le Dr Katchin a présenté deux griefs, un le 9 juillet et l'autre le 11 juillet 2002. Ces griefs sont fondés sur l'article E2.01 de la convention collective, qui prévoit que :
« L'Employeur rembourse à l'employé les cotisations ou les droits d'inscription qu'il a versés à un organisme ou à un conseil d'administration lorsqu'un tel versement est indispensable à l'exercice continu des fonctions de son emploi. »
À l'audience sur ses griefs, le Dr Katchin s'est aussi fondé sur l'article A1.02 de la convention collective, qui se lit comme suit :
« Les parties à la présente convention ont un désir commun d'améliorer la qualité de l'Agence canadienne d'inspection des aliments, d'appliquer des normes professionnelles et de favoriser le bien-être des employés et l'accroissement de leur efficacité afin que les Canadiens soient servis convenablement et efficacement. Par conséquent, elles sont décidées à établir, dans le cadre des lois existantes, des rapports de travail efficaces à tous les niveaux de l'Agence canadienne d'inspection des aliments auxquels appartiennent les fonctionnaires faisant partie de l'unité de négociation. »
  1. Le CVO est un organisme provincial qui a notamment pour mandat de délivrer aux vétérinaires des permis d'exercer en Ontario. Il existe des organisations analogues dans les autres provinces.
  2. L'Agence a répondu aux griefs en déclarant qu'être titulaire d'un permis du CVO n'est pas indispensable à l'exercice continu des fonctions du poste du Dr Katchin. L'ACIA estime qu'il est suffisant que le Dr Katchin soit admissible à ce permis.
  3. L'ACIA n'est plus un employeur relevant du Conseil du Trésor. Elle est désormais un organisme indépendant, bien qu'elle continue d'appliquer certaines politiques et procédures du Conseil du Trésor.
  4. L'ACIA figure à l'Annexe I de la Partie II de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique ainsi qu'à l'Annexe II de la Loi sur la gestion des finances publiques.

[3]    Le Dr Katchin a versé au CVO 561,75 $ (525 $ pour les frais de renouvellement et 36,75 $ pour la TPS) afin d'obtenir le renouvellement de son permis général de vétérinaire, le 30 novembre 2000, pour l'année 2001; il lui a versé la même somme le 30 novembre 2001, pour l'année 2002. Il a présenté des demandes de remboursement à son employeur le 31 mai 2001 et le 7 juillet 2002. L'employeur a rejeté ces demandes en donnant l'explication suivante de sa décision le 10 juillet 2002 (pièce G-7) :

[Traduction]

Au sujet de votre demande de remboursement des cotisations que vous avez versées au College of Veterinarians, on m'a informé que, « à compter du 1er novembre 2002, l'Employeur rembourse à l'employé(e) les cotisations qu'il (elle) a versées à un organisme de réglementation de la pratique de la médecine vétérinaire, jusqu'à concurrence de huit cents dollars (800,00 $), pour les cotisations exigibles pour l'année 2003 ».

Comme votre demande de remboursement porte sur une autre période, je dois vous informer qu'il m'est impossible d'y accéder.

[4]    Le premier paragraphe de la note de l'employeur est lié aux alinéas E2.02a) et b) qui ont été ajoutés à la convention collective signée le 27 mai 2002. Ces alinéas se lisent comme suit (pièce G-2) :

**
a)      L'Employeur rembourse à l'employé(e) les droits d'inscription qu'il (elle) a versés à un organisme de réglementation de la pratique de la médecine vétérinaire, jusqu'à concurrence de huit cents dollars (800,00 $).

**
b)      À partir du 1er novembre 2002, sur réception d'une preuve de paiement, le remboursement mentionné en a) commencera pour les droits d'inscription exigibles pour l'année 2003.

[5]    L'ACIA est structurée autour des trois programmes suivants : 1) hygiène des viandes, 2) santé des animaux et 3) recherche sur les maladies animales. Le Dr Katchin est affecté au Programme d'hygiène des viandes à Maple Lodge Farm, abattoir de volailles. Le sommaire de la description de poste d'un vétérinaire de ce programme prévoit ce qui suit (pièce E-8) :

[Traduction]

Sous la supervision générale du vétérinaire responsable d'un établissement enregistré, mettre en oeuvre et appliquer le Programme d'hygiène des viandes et les dispositions de la Loi sur l'inspection des viandes et de son règlement, de la Loi sur les maladies et la protection des animaux et de ses règlements, de la Loi sur les aliments et drogues et de son règlement, de la Loi sur l'emballage et l'étiquetage des produits de consommation et de son règlement ainsi que de la Loi sur les produits agricoles et de ses règlements dans un établissement enregistré d'abattage, de conditionnement et de classement des animaux destinés à la consommation.

         Contrôler les animaux présentés à l'abattoir et réaliser quotidiennement une inspection ante mortem.

         Diriger et contrôler les procédures de routine d'inspection postmortem des organes internes et des carcasses des animaux abattus.

         Contrôler l'inspection des pratiques générales d'exploitation de l'abattoir et de ses conditions sanitaires.

         Assurer un service consultatif sur l'hygiène des viandes, les pratiques sanitaires et opérationnelles à l'abattoir ainsi que les activités connexes.

         Assurer une supervision fonctionnelle du travail des inspecteurs des produits primaires et des vétérinaires en formation; donner des instructions aux vétérinaires subalternes et aux inspecteurs des produits primaires en formation et suivre leur perfectionnement.

         S'acquitter d'autres fonctions.

[6]    Dans son témoignage, le Dr Katchin a déclaré qu'il est chargé de mettre en oeuvre et d'appliquer la Loi sur la santé des animaux, qui a remplacé la Loi sur les maladies et la protection des animaux mentionnée dans sa description de poste. Il a plus précisément déclaré que le président de l'ACIA peut le désigner comme inspecteur en vertu de la Loi sur la santé des animaux, pour les fins de l'application de cette Loi (article 32). L'inspecteur peut exercer tous les pouvoirs et toutes les fonctions dévolus au Ministre par cette Loi (article 33) et peut aussi prendre des mesures de disposition des animaux soupçonnés d'être atteints d'une maladie ou contaminés (article 48). Les mesures de disposition comprennent l'abattage ou les autres mesures de destruction, d'enfouissement ou de fonte des carcasses.

[7]    Pour s'acquitter de ce mandat, l'inspecteur peut devoir prescrire, acheter ou injecter des substances réglementées comme le Pentobarbital, le Phénobarbital ou d'autres solutions (le T-61) pour euthanasier des animaux. S'il n'est pas détenteur d'un permis délivré par un organisme de réglementation régissant la pratique de la médecine vétérinaire, comme le CVO, il n'est pas autorisé à fournir ou à utiliser ces substances réglementées (en vertu de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances et de ses règlements).

[8]    L'énoncé de qualités des vétérinaires affectés au Programme d'hygiène des viandes précise les exigences d'accréditation professionnelle (pièce E-1) :

[Traduction]

Accréditation professionnelle :
Admissibilité à adhérer à une association vétérinaire canadienne. S'entend des membres actuels d'une association vétérinaire canadienne détenteurs d'un permis reconnu par l'Association canadienne des médecins vétérinaires (ACMV) et des vétérinaires qui ne sont pas membres d'une association canadienne de vétérinaires, mais détenteurs d'un Certificat d'agrément délivré par le Bureau national des examinateurs (BNE) de l'ACMV, ce qui signifie qu'il faut être détenteur d'un permis général illimité constituant une preuve acceptable de compétence professionnelle, permis délivré par une organisation légalement constituée en vertu d'une loi fédérale, provinciale ou territoriale comme organisme de certification ou de délivrance de permis, pour être admissible à un tel permis. Pour être admissible, le candidat doit avoir satisfait à toutes les exigences de scolarité et à toutes les exigences professionnelles, c'est-à-dire avoir des diplômes et avoir réussi les examens, par exemple, sans être obligé d'avoir obtenu ou maintenu son inscription, son accréditation ou son adhésion. L'admissibilité à un permis général illimité à titre de vétérinaire comprend aussi l'obligation d'avoir réussi les examens du Bureau national des examinateurs (BNE) (Parties A et B - et Partie C, pour les candidats formés à l'étranger). Pour prouver son admissibilité, il faut soumettre une copie de son diplôme ainsi que la preuve qu'on a réussi les examens du BNE (Parties A et B - et Partie C, pour les candidats formés à l'étranger). Si le candidat n'a pas de preuve qu'il a réussi les examens du BNE, il doit présenter une déclaration de l'organisme provincial d'accréditation attestant qu'il est admissible au permis qu'il délivre.

[9]    À la demande de l'ACIA, le Dr Katchin a fait partie d'un comité de sélection chargé de la présélection des candidats aux postes de vétérinaire. On lui avait alors enjoint d'éliminer les candidats qui n'étaient pas détenteurs d'un permis délivré par un organisme de réglementation régissant la pratique de la médecine vétérinaire. Pour qu'il agisse de cette façon, il fallait que le permis soit une condition fondamentale pour que les candidats puissent être embauchés comme vétérinaires par l'ACIA.

[10]    La politique sur les cotisations du Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada (pièce G-9), qui s'applique à l'ACIA, précise ce qui suit :

Exigences de la politique
L'administrateur général peut déléguer le pouvoir d'approuver le paiement des cotisations lorsque l'adhésion constitue une condition d'une loi fédérale. Ces cotisations peuvent être remboursées seulement lorsque l'employé exerce activement des fonctions professionnelles dont il ne pourrait s'acquitter légalement s'il n'était membre actif d'une organisation professionnelle reconnue. (Voir appendice A a).)

[...]

Appendice A - Sortes d'adhésion
Adhésions à des organisations professionnelles ou para-professionnelles

Aux fins de cette politique, il y a essentiellement trois sortes d'adhésions : les adhésions au nom d'un particulier découlant d'une condition d'une loi fédérale qu'il doit remplir pour exercer ses fonctions, les autres adhésions professionnelles connexes et les autres adhésions à une association qui est plus générale que professionnelle mais de telles adhésions doivent être faites au nom d'un particulier.

A. Adhésions légales

Les seuls cas où il est absolument nécessaire qu'un employé adhère à ces organisations sont ceux pour lesquels la condition est établie par une loi fédérale par exemple la Loi sur les aliments et drogues. Seuls les groupes professionnels Arts dentaires, Arpentage, Droit, Médecine, Pharmacie, Médecine vétérinaire sont assortis d'une telle condition, et celle-ci ne s'applique qu'aux employés qui exercent activement les fonctions de ces groupes professionnels. Conformément à cette politique, les frais sont remboursés et l'on ne fournit pas la formule T-4A supplémentaire dans ces cas-là. Les adhésions ne sont pas payées pour les membres de ces groupes professionnels qui exercent des fonctions administratives ou travaillent dans un domaine connexe, mais à l'extérieur des groupes professionnels susmentionnés.

[11]    Le Dr Katchin a témoigné qu'il savait que les vétérinaires de l'ACIA avaient participé aux interventions dans la crise de l'encéphalopathie spongiforme bovine (ESB) qui a frappé l'Alberta en 2003. Certains vétérinaires du Programme d'hygiène des viandes avaient été affectés à ce projet; ils avaient dû euthanasier les bêtes en leur injectant une dose létale de Pentobarbital (ils pouvaient aussi s'être servis d'analgésiques comme le Rompun).

[12]    Pendant un mois, en novembre 2003, le Dr Katchin a été affecté au Programme de la santé des animaux dans le contexte du plan d'urgence en cas de grève (pièce G-12); il pouvait être tenu de se rendre à l'aéroport pour abattre des animaux, mais il n'a jamais été appelé à le faire.

[13]    Le Dr Katchin a refusé de se porter volontaire lors de l'épidémie de la maladie chronique de la vache folle, en Saskatchewan, en 1997. S'il l'avait fait, il aurait dû euthanasier des animaux.

[14]    Avant 2000, le Dr Katchin signait des attestations d'expert pour l'exportation. Par la suite, l'ACIA a demandé aux vétérinaires de cesser de signer de tels documents.

[15]    Le Dr Sergey Melnichowk est inspecteur vétérinaire du Programme d'hygiène des viande à Maple Lodge Farm, où il occupe un poste de VM-01. Dans le passé, il travaillait à l'aéroport où il était tenu d'euthanasier des animaux par injection létale. On lui demandait aussi de signer des documents d'expert pour fins d'exportation, à titre de vétérinaire.

[16]    Le traitement du Dr Melnichowk a été augmenté quelque temps après son embauche, lorsqu'il a constaté qu'on le rémunérait à un taux inférieur parce que l'employeur n'avait pas tenu compte du fait qu'il était détenteur d'un permis du CVO.

[17]    Jim Crawford a témoigné pour l'employeur. Il a déclaré que les vétérinaires de Maple Lodge Farm n'ont pas à euthanasier des animaux ni à faire des inspections postmortem et ante mortem. Il n'est pas nécessaire pour les vétérinaires affectés au Programme d'hygiène des viandes d'être détenteurs d'un permis du CVO, et la perte de ce permis n'a aucune répercussion sur leur emploi à l'ACIA.

[18]    D'après M. Crawford, les vétérinaires signent des certificats d'exportation et examinent les certificats ainsi que les permis d'importation. Si l'on signale une épidémie, le Bureau de la santé des animaux doit répondre aux appels et demander à un vétérinaire de l'ACIA de vérifier le diagnostic (et le confirmer, le cas échéant). Un groupe d'opérations sur le terrain est responsable d'une « Équipe régionale d'intervention d'urgence » (ERIU) chargée de résoudre le problème en se rendant sur place pour s'assurer que les animaux infectés sont détruits. Les propriétaires des animaux malades sont responsables de leur destruction; s'ils ne font pas le nécessaire, l'ACIA saisit les bêtes et les détruit elle-même.

[19]    M. Crawford a déclaré que les vétérinaires doivent être admissibles à un permis d'exercer la médecine vétérinaire. Les candidats à ces postes doivent prouver qu'ils ont la scolarité requise, c'est-à-dire qu'ils ont obtenu leurs diplômes et réussi leurs examens, en satisfaisant aussi à l'obligation d'avoir réussi les examens du BNE. Il a précisé que l'adhésion ou l'inscription à un organisme de réglementation régissant la pratique de la médecine vétérinaire n'est pas une exigence du poste de vétérinaire à l'ACIA. Les vétérinaires ne sont pas non plus tenus de maintenir leur adhésion à une telle organisation ni d'y rester inscrits pour continuer à s'acquitter des fonctions de leur poste.

[20]    En contre-interrogatoire, M. Crawford a déclaré que l'ACIA donne à des bouchers et à des abattoirs le mandat de détruire des animaux, dans des cas comme celui de l'épidémie qui a frappé l'Alberta en 2000. En 2002, certains vétérinaires se sont portés volontaires pour aller à l'aéroport euthanasier des moutons. Le témoin a précisé que les superviseurs de la santé animale le font. Dans des circonstances semblables, M. Crawford commence par demander s'il y a des volontaires parmi les vétérinaires; s'il n'y en a pas, il décide s'il faut faire détruire les animaux. Si les vétérinaires refusent d'euthanasier les bêtes, l'ACIA a recours à des praticiens du secteur privé ou à des bouchers pour les éradiquer. D'après M. Crawford, il n'est pas nécessaire qu'un vétérinaire ait un permis pour euthanasier un animal.

[21]    Le Dr Faisal Bedwei a témoigné que l'ACIA n'exige pas de permis provincial pour embaucher un vétérinaire ou pour l'autoriser à continuer à s'acquitter de ses fonctions ainsi qu'à appliquer les lois précisées dans la description de poste. Selon le témoin, le vétérinaire devrait avoir un permis pour acheter des médicaments comme ceux dont on se sert pour euthanasier les animaux, mais pas pour les euthanasier en soi. Dans les situations d'urgence, les vétérinaires du Programme d'hygiène des viandes doivent euthanasier des bêtes.

[22]    Au printemps 2003, l'ACIA a joué un rôle actif dans l'éradication du cheptel malade; les vétérinaires ont euthanasié les animaux par injection létale.

[23]    Le Dr Bedwei a confirmé que les vétérinaires n'ont pas besoin de permis pour s'acquitter des exigences de l'énoncé de qualités, mais qu'ils doivent satisfaire aux exigences de scolarité ainsi qu'aux exigences professionnelles.

Arguments

Pour le fonctionnaire s'estimant lésé

[24]    L'article E2.01 de la convention collective stipule que l'employeur rembourse au fonctionnaire les cotisations ou les droits d'inscription qu'il a versés à un organisme ou à un conseil d'administration lorsqu'un tel versement est indispensable à l'exercice continu des fonctions de son emploi. Cet article signifie que certains fonctionnaires doivent être détenteurs d'un permis pour s'acquitter de leurs fonctions, car autrement, il n'aurait aucune raison d'être. En l'espèce, il s'agit de déterminer si les vétérinaires de l'ACIA doivent être détenteurs d'un permis pour pratiquer la médecine vétérinaire.

[25]    Dans Bertrand (dossiers de la CRTFP 166-2-16666 et 16667 (1988) (QL)), la présidente suppléante Muriel Korngold Wexler a déclaré que, dans les décisions portant sur l'interprétation de la convention collective des infirmières et des infirmiers et sur le remboursement des cotisations professionnelles, il fallait tenir compte des faits dans chaque cas. Dans cette affaire-ci, l'arbitre doit décider s'il est nécessaire de détenir un permis pour s'acquitter des fonctions d'un vétérinaire à l'ACIA.

[26]    Dans Harper c. Agence canadienne d'inspection des aliments, 2002 CRTFP 87, la présidente suppléante Evelyne Henry a tenu compte des fonctions particulières que la Dre Harper était chargée d'accomplir pour déterminer s'il lui fallait un permis. La même approche devrait s'appliquer en l'espèce.

[27]    La Loi réglementant certaines drogues et autres substances dispose que l'obtention, la possession ou l'administration de substances réglementées comme le Pentobarbital et le Phénobarbital est interdite à quiconque sauf un praticien (ce qui s'entend d'une personne enregistrée en vertu des lois de la province pour y pratiquer la profession de médecin, de dentiste ou de médecin vétérinaire). La Loi des aliments et drogues interdit à quiconque de vendre ou de distribuer les drogues décrites à l'Annexe F de la Loi, comme le Rompun (sédatif analgésique). Le Règlement sur les aliments et drogues stipule que les drogues réglementées comme le Pentobarbital et le Phénobarbital peuvent être fournies à des praticiens et être administrées par des praticiens inscrits ayant le droit d'exercer dans la province.

[28]    Le Dr Katchin a expliqué dans son témoignage qu'il doit mettre en oeuvre et appliquer la Loi sur la santé des animaux (qui a remplacé la Loi sur les maladies et la protection des animaux). Pour ce faire, il peut être appelé à prendre des mesures de disposition d'animaux, voire à en euthanasier au besoin. La preuve montre que les vétérinaires sont appelés dans différentes situations à euthanasier des animaux par injection létale. C'est le cas au Bureau de santé des animaux de Brampton, quand ils travaillent à l'aéroport ou lors d'une épidémie d'ESB comme celle qui a éclaté en Alberta en 2003, et ils ont dû le faire aussi lorsqu'il a fallu éradiquer un troupeau de moutons à l'aéroport en 2002.

[29]    Les vétérinaires peuvent être appelés à euthanasier des animaux en cas d'épidémie comme celle de la maladie chronique de la vache folle qui a sévi en Saskatchewan en 1997, quand le Dr Katchin s'est fait demander de se porter volontaire. Dans le plan d'urgence en cas de grève de novembre 2003, le Dr Katchin a été affecté à ce genre de tâche; il aurait pu alors devoir euthanasier des animaux par injection létale.

[30]    Dans son témoignage, M. Crawford a déclaré que les euthanasies étaient effectuées par les vétérinaires qui se portaient volontaires. Dans Harper, supra, l'arbitre n'a pas accepté cet argument, en disant que la Dre Harper ne s'était pas portée volontaire pour se prévaloir de son permis du CVO, mais qu'elle faisait son travail conformément aux normes professionnelles de la médecine vétérinaire.

[31]    Le Dr Melnichowk a déclaré qu'il avait été tenu dans le passé d'acheter et d'administrer du Phénobarbital pour euthanasier des moutons dans une exploitation agricole située au nord de Brampton, ainsi que pour euthanasier des pigeons à l'aéroport. Il n'avait jamais précisé qu'il se portait volontaire; il appliquait la Loi.

[32]    Le Dr Bedwei a précisé que les vétérinaires doivent se servir de drogues en cas d'urgence, par exemple dans les épidémies, pour éradiquer les animaux infectés. Les vétérinaires peuvent tous être appelés à agir de la sorte en cas d'urgence, comme le Dr Katchin l'a été dans le contexte de la maladie chronique de la vache folle, en Saskatchewan, en 1997. S'il avait été affecté à une mission d'urgence, il aurait dû euthanasier des animaux.

[33]    L'article A1.02 de la convention collective a été invoqué pour souligner tout ce qu'on exige de l'ACIA pour servir efficacement les Canadiens. Afin d'assurer la protection du public et des animaux, il faut que les vétérinaires soient détenteurs d'un permis pour être en mesure d'intervenir en cas d'épidémie et d'euthanasier des animaux dans les situations d'urgence.

[34]    La seule différence entre détenir un permis et être admissible à s'en faire délivrer un est le versement de la cotisation de 561,75 $. L'ACIA exige toutes les qualifications de ses vétérinaires, mais ne veut pas payer les frais d'obtention d'un permis. Le Dr Katchin s'est fait enjoindre d'éliminer les candidats qui n'avaient pas de permis quand il a été membre d'un comité de sélection.

[35]    Dans Chorney (dossiers de la CRTFP 166-2-14644 et 166-2-14656 (1985) (QL)), l'arbitre a ajouté l'observation suivante, dont il peut être tenu compte en l'espèce :

Il me semble que l'exigence statutaire selon laquelle les infirmier(ère)s doivent être membres de leurs associations professionnelles respectives est une pratique saine qui est dans l'intérêt public. Ces associations sont les gardiennes du flambeau de la profession parce qu'elles sont, entre autres, autorisées par la loi à pénaliser leurs membres ou à empêcher une personne incompétente de pratiquer. L'existence d'associations ayant un tel pouvoir ne peut que garantir doublement au public que les membres en règle ont la compétence professionnelle requise pour fournir des soins infirmiers acceptables et qu'elles sont dignes de confiance. Je ne voudrais pas voir un membre du public traité par une personne qui ne pourrait pas être pénalisée en vertu de la loi si elle n'avait pas une compétence minimale. À mon sens, donc, l'exigence légale selon laquelle une personne doit être membre en règle d'une association professionnelle d'infirmier(ère)s pour pouvoir être engagée à ce titre est essentielle à la protection de tous les membres de notre société et à l'intérêt public.

[36]    Dans Harper, supra, la présidente suppléante Evelyne Henry a conclu comme il suit :

L'employeur exige que Dre Harper satisfasse aux conditions requises pour être autorisée à exercer la profession de vétérinaire et il l'emploie pour ses connaissances spécialisées, mais il refuse de lui rembourser ses droits d'inscription annuels au CMVO. Compte tenu des éléments de preuve dont je dispose, cela va à l'encontre des principes énoncés à l'article A1.02 qui précède.

En sa qualité de vétérinaire professionnelle Dre Harper doit prendre des décisions concernant la santé et la vie des animaux. Cela fait partie des tâches qui lui ont été confiées. Lorsqu'elle décide de pratiquer l'euthanasie sur un animal ou d'utiliser un médicament particulier pour calmer un animal afin d'effectuer certains prélèvements, elle ne se porte pas volontaire pour utiliser le permis d'exercer délivré par le CMVO; elle accomplit son travail en conformité avec les normes régissant sa profession.

[37]    Le Dr Katchin a témoigné qu'il est chargé d'appliquer des lois fédérales et qu'il peut être tenu de se servir de drogues réglementées par la Loi réglementant certaines drogues et autres substances et par la Loi sur les aliments et les drogues et son règlement. Ces lois l'obligent à être détenteur d'un permis d'exercer la médecine vétérinaire pour utiliser du Pentobarbital, du Phénobarbital et des solutions T-61 pour pratiquer l'euthanasie et pour se servir du Rompun dans l'exercice de ses fonctions. Par conséquent, l'ACIA a violé l'article E2.01 de la convention collective en ne lui remboursant pas ses droits d'inscription.

[38]    La représentante du fonctionnaire s'estimant lésé a déclaré que la décision rendue dans Gajadharsing et autres (dossiers de la CRTFP 166-2-16812 à 16815 et 166-2-17674 (1989) (QL)) peut être appliquée en l'espèce, même si les fonctionnaires s'estimant lésées dans cette affaire-là étaient des infirmières.

Pour l'employeur

[39]    Le fonctionnaire s'estimant lésé doit s'acquitter du fardeau de la preuve en ce qui concerne l'article E2.01 de la convention collective, stipulant que l'employeur doit rembourser au fonctionnaire les droits versés pour obtenir un permis quand détenir ce permis est une condition de l'exercice continu des fonctions de son poste. Le Dr Katchin est un vétérinaire affecté au Programme d'hygiène des viandes à Maple Lodge Farm.

[40]    Le libellé que les parties ont choisi pour l'article E2.01 est clair : l'employeur a l'obligation de rembourser au fonctionnaire les droits versés pour obtenir un permis seulement si ce permis est indispensable à l'exercice continu des fonctions de son poste. La décision rendue par la présidente suppléante Evelyne Henry dans Harper, supra, confirme cette interprétation. Le nouvel article E2.02, qui a été ajouté dans la convention collective signée le 27 mai 2002, reconnaît que les vétérinaires n'ont pas tous besoin d'un permis pour s'acquitter de leurs fonctions. Si ce n'est pas le cas, pourquoi les parties avaient-elles besoin de cet article E2.02?

[41]    Les situations d'urgence sont fondamentalement imprévisibles, et, dans une situation très critique, ce ne sont pas tous les vétérinaires qui doivent faire des euthanasies. L'employeur admet qu'il faut être détenteur d'un permis d'exercice de la médecine vétérinaire pour euthanasier des animaux ou pour se servir de drogues réglementées. C'est lui qui détermine les exigences des postes, et la Commission ne peut pas s'immiscer dans cette démarche pour déterminer quelles devraient être les exigences du poste du Dr Katchin. D'ailleurs, l'article suivant de la Loi sur l'Agence canadienne d'inspection des aliments donne expressément au président de l'ACIA les pouvoirs de nommer les employés et de leur assigner leurs fonctions :

13.(1) Le président nomme les employés de l'Agence.

      (2) Le président fixe les conditions d'emploi des employés de l'Agence et leur assigne leurs fonctions.

      (3) Le président peut, aux fins qu'il précise, désigner, individuellement ou par catégorie, les inspecteurs — vétérinaires ou non —, analystes, classificateurs ou autres agents d'exécution pour l'application ou le contrôle d'application des lois ou dispositions dont l'Agence est chargée aux termes de l'article 11.

[42]    Le poste que le Dr Katchin occupe au Programme d'hygiène des viandes à Maple Lodge Farm ne l'oblige pas à être détenteur d'un permis. Ses principales fonctions consistent à faire des évaluations ante mortem et postmortem. Dans l'exercice de ses fonctions, il n'a pas besoin de se servir de drogues ni d'euthanasier des animaux.

[43]    Dans la Reine du chef du Canada c. M. Lefebvre et autres et l'Institut professionnel de la fonction publique du Canada et la Commission des relations de travail dans la fonction publique, [1980] 2 C.F. 199, la Cour d'appel fédérale a déclaré que les lois adoptées par une législature provinciale ne peuvent pas limiter les pouvoirs du gouvernement fédéral de choisir ses fonctionnaires. L'honorable juge Pratte a exprimé l'opinion de la Cour en ces termes :

Les intimés n'ont pas contesté lorsque cet appel a été entendu qu'ils étaient bien des préposés de la Couronne fédérale, nommés à leurs postes en conformité des lois fédérales pour exécuter des tâches ressortissant de la compétence fédérale. Cela étant, la requérante soutient que les intimés pouvaient exécuter leurs fonctions sans être membres de l'Ordre des Chimistes du Québec parce que les lois adoptées par une législature provinciale ne peuvent limiter le pouvoir qu'a l'autorité fédérale de choisir comme elle l'entend les préposés par qui elle fera exécuter les tâches administratives qui relèvent de sa compétence.

Cette prétention m'apparaît bien fondée. L'exécution par la Couronne fédérale des tâches administratives qui sont les siennes exige qu'il y ait une Fonction publique fédérale. Le pouvoir de réglementer l'engagement de ses fonctionnaires, comme celui de réglementer leurs conditions de travail3, m'apparaît appartenir exclusivement au Parlement fédéral. C'est pourquoi, à mon avis, des lois comme le Code des professions et la Loi des chimistes professionnels ne peuvent s'appliquer aux préposés de la Couronne en raison des actes qu'ils accomplissent dans l'exécution de leurs fonctions. S'il en était autrement, cela reviendrait à dire que chacune des dix provinces pourrait établir à sa guise les critères de compétence auxquels devrait se soumettre le gouvernement fédéral dans l'engagement de son personnel. Je ne peux accepter pareille conclusion.

[44]    Cette opinion peut s'appliquer en l'espèce. Les lois provinciales ontariennes auxquelles les vétérinaires sont assujettis ne peuvent pas être appliquées aux fonctionnaires de l'ACIA en raison des actes qu'ils accomplissent dans l'exécution de leurs fonctions. Le Dr Katchin a reconnu dans son témoignage avoir été nommé en conformité des lois fédérales pour s'acquitter de fonctions relevant de la compétence du gouvernement fédéral.

[45]    La volonté des parties d'améliorer la qualité des services de l'ACIA qui est précisée à l'article A1.02 de la convention collective est extrêmement importante, mais cet article ne change pas le libellé de l'article 2.01 et n'a pas fait de l'obtention d'un permis une exigence du poste du Dr Katchin.

[46]    Les fonctions énumérées dans la description de poste des vétérinaires du Programme d'hygiène des viandes n'obligent pas le Dr Katchin à être détenteur d'un permis. La politique sur les cotisations stipule que les cotisations sont remboursables lorsque le fonctionnaire s'acquitte activement de fonctions professionnelles qui ne peuvent être exécutées légalement sans permis. En l'espèce, l'employeur reconnaît qu'il faut avoir un permis d'exercer pour euthanasier des animaux et pour administrer des drogues réglementées, mais le Dr Katchin n'a pas à le faire dans l'exercice de ses fonctions.

[47]    Dans Rosendaal et autres, Lovallo et Sanderson (dossiers de la CRTFP 166-2-22291, 166-2-23143 et 23144 (1993) (QL)), l'arbitre a déclaré ce qui suit :

Pour avoir gain de cause, les fonctionnaires devaient démontrer que le maintien de leur affiliation professionnelle était une condition de l'exercice continu de leurs fonctions.

[48]    Le même principe a été appliqué dans Muller et Williams c. Agence des douanes et du revenu du Canada, 2002 CRTFP 19, par le vice-président J.W. Potter. Il devrait aussi être appliqué en l'espèce, et l'arbitre devrait rejeter le grief puisque le fonctionnaire s'estimant lésé n'a pas démontré que détenir un permis est une condition de l'exercice continu des fonctions de son poste.

[49]    Le poste du Dr Katchin ne l'obligeait pas à être détenteur d'un permis. Dans la décision Harper, supra, la présidente suppléante Henry a précisé que les vétérinaires ne sont pas tous tenus d'avoir un permis pour s'acquitter de leurs fonctions, mais conclut que la Dre Harper devait en avoir un parce qu'elle était appelée à euthanasier des animaux et à se servir de drogues réglementées. Ce n'est pas le cas ici.

[50]    L'ACIA a demandé au Dr Katchin s'il se portait volontaire pour aller en Saskatchewan lors de l'épidémie de maladie chronique de la vache folle, en 1997. Cette demande de l'employeur ne changeait pas les exigences de son poste au Programme d'hygiène des viandes à Maple Lodge Farm, même si le Dr Katchin avait eu droit au remboursement de ses frais de cotisation s'il avait accepté de se rendre là-bas. Il pouvait refuser d'y aller, parce que ce n'était pas une exigence de son poste.

[51]    En réplique, la représente du fonctionnaire s'estimant lésé a fait valoir que la description de poste actuelle incluait « d'autres fonctions », ce qui implique qu'on pourrait y ajouter n'importe quelles autres fonctions et que le Dr Katchin pourrait être appelé à joindre ses efforts à ceux de l'ERIU s'il devait éclater une crise causée par une maladie. Conclure que le Dr Katchin peut être appelé à participer aux mesures en vue d'enrayer une crise causée par une maladie chronique signifie que c'est une exigence de son poste, même s'il ne s'agit que d'une situation potentielle.

Motifs de la décision

[52]    La question soulevée dans le grief consiste à décider si le Dr Katchin a le droit de se faire rembourser ses droits d'inscription au CVO pour les années 2001 et 2002. Son grief était basé sur l'article E2.01 de la convention collective.

[53]    Les parties conviennent que l'article E2.01 stipule que les droits d'inscription versés par le Dr Katchin doivent être remboursés si être détenteur d'un permis du CVO est indispensable à l'exercice continu des fonctions de son poste. En somme, les parties conviennent que, si les fonctions du Dr Katchin l'obligeaient à euthanasier des animaux par injection létale ou à se procurer des drogues réglementées et à s'en servir à cette fin, il devrait être détenteur d'un permis du CVO pour être autorisé à le faire conformément aux lois fédérales, la Loi réglementant certaines drogues et substances et la Loi sur la santé des animaux (qui a remplacé la Loi sur les maladies et la protection des animaux), ainsi qu'aux règlements connexes. Je conclus par conséquent que l'arrêt Lefebvre, supra, qui portait sur l'applicabilité des lois provinciales, ne peut pas s'appliquer en l'espèce.

[54]    La description de poste des vétérinaires affectés au Programme d'hygiène des viandes ne précise pas qu'ils doivent faire des euthanasies, acheter ou se procurer des drogues réglementées, ni s'en servir. Le Dr Katchin a fait valoir que la description de poste impliquait ces fonctions sous la rubrique générale des « autres fonctions ». Le fardeau de la preuve lui incombe : il doit me convaincre que l'employeur exigeait de lui qu'il s'acquitte de fonctions pour lesquelles il avait besoin d'un permis afin d'avoir le droit de se faire rembourser ses cotisations en vertu de l'article E2.01.

[55]    Les témoignages ont révélé que le Dr Katchin s'était fait demander de se porter volontaire pour aller en Saskatchewan durant la crise de la maladie chronique de la vache folle, en 1997. Il a refusé d'y aller, pour une raison ou une autre, mais il a été démontré que, s'il avait accepté de se porter volontaire, il aurait dû euthanasier des animaux par injection létale. Certains vétérinaires du Programme d'hygiène des viandes ont contribué à juguler la crise de l'ESB qui a ravagé l'Alberta en 2003. Ils avaient été tenus d'euthanasier des animaux par injection létale de drogues réglementées dans ce contexte, et, si j'en crois le témoignage du Dr Katchin, il en aurait été de même dans le contexte de la maladie chronique de la vache folle en 1997.

[56]    L'employeur avait le droit de demander au Dr Katchin de contribuer aux mesures prises pour combattre la maladie chronique de la vache folle en Saskatchewan, en 1997. Il peut demander aux fonctionnaires d'y participer, dans ce contexte, soit volontairement, soit parce qu'ils y sont tenus de par leurs fonctions. S'il invite les fonctionnaires à se porter volontaires, ils peuvent refuser d'y participer, alors qu'ils ne le pourraient pas s'ils y étaient obligés de par leurs fonctions. Dans cette affaire, le Dr Katchin a refusé de se porter volontaire à cette occasion, et ce refus ne peut qu'être considéré comme un refus de s'acquitter des fonctions inhérentes à cette crise. Par contre, s'il avait accepté de se porter volontaire, j'aurais conclu qu'il était tenu d'euthanasier des animaux et de se servir de drogues réglementées, de par ses fonctions, de sorte que l'employeur aurait eu l'obligation de payer ses droits d'inscription.

[57]    Dans ses griefs, le Dr Katchin a demandé le remboursement des droits d'inscription qu'il a versés pour les années 2001 et 2002; il devait prouver que certaines des fonctions de sa description de poste l'obligeaient à détenir un permis du CVO ou d'un autre organisme de réglementation régissant la pratique de la médecine vétérinaire. L'argument qu'il a avancé en disant que l'employeur lui avait demandé de se porter volontaire pour combattre l'épidémie de 1997 ne saurait être tenu pour une preuve que détenir un permis était une exigence de son poste, parce qu'il a refusé de s'acquitter des fonctions inhérentes à cette affectation.

[58]    Son affectation au plan d'urgence en cas de grève, en novembre 2003, impliquait qu'il aurait pu être appelé à euthanasier des animaux. Toutefois, cette affectation n'est pas pertinente pour la détermination des fonctions qu'il a dû accomplir dans les années 2001 et 2002, parce qu'elle est ultérieure à ses griefs.

[59]    Par conséquent, le Dr Katchin n'a pas réussi à prouver que l'employeur avait expressément exigé qu'il s'acquitte de fonctions exigeant un permis du CVO, et ses griefs sont rejetés.

Léo-Paul Guindon,
commissaire

OTTAWA, le 15 avril 2004.

Traduction de la C.R.T.F.P.

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