Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Interprétation de la convention collective - Attribution du travail - Recours à des employés à temps partiel pour remplacer des employés à temps plein quand un jour férié avait été reporté pour ces derniers - les fonctionnaires s'estimant lésés étaient des employés à temps plein travaillant par quarts - il pouvait arriver qu'un jour férié coïncide avec un jour de repos - l'employé pouvait alors bénéficier du jour férié un autre jour - la formule de dotation de l'employeur prévoyait 1,77 fois plus de personnel qu'il n'en avait besoin en réalité - la pratique établie consistait à réaffecter des employés aux postes vacants - les fonctionnaires s'estimant lésés contestaient le fait que l'employeur avait fait appel aux employés à temps partiel déjà sur place pour remplacer les fonctionnaires à temps plein qui bénéficiaient d'un jour férié reporté plutôt que de les rappeler au travail - la convention collective stipulait que, sous réserve des nécessités du service, l'employeur devait faire tout effort raisonnable pour répartir sur une base équitable le travail des postes vacants le jour férié aux employés en congé férié payé - l'arbitre a conclu qu'attribuer le travail d'un poste vacant aux employés déjà en place, y compris les employés à temps partiel, constituait une nécessité du service raisonnable. Griefs rejetés. Décision citée :Saindon, 2002 CRTFP 73.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2004-07-28
  • Dossier:  166-02-32593 à 32611
    166-02-32621 à 32631
    166-02-32662 et 32673
  • Référence:  2004 CRTFP 98

Devant la Commission des relations
de travail dans la fonction publique




ENTRE

ANGELA CIANNI, CHRISTINE CORNELL, ROB DORNAN, SHARN GILL, SONNY RAYMOND MACNEAL, E. BLAIR DAVIS, TOM DYER, MIKE GRANT, JEREMY HINDLE, SUSAN HAYRE, THELMA LLEWELLYN, KATE MCLEAN, BILL VIRK, CLINT WATRICH STEVE WILLIAMS, DAN FEIST, HARJ BINNING, ALAN RUTZ, KURDIP SINGH ALAMWALA, KIM LEO BOUTILIER, MAURICE ARCHIBALD DEMEULENAERE, MICHAEL EASTHOM, ERIC ENGER, MARTIN HURLEY, JOSEPH ROLLAND CLAUDE MAILHOT, PIERRE NUMAINVILLE, TRICIA NOORANI, ELAINE STULP, RON ZWARYCH, JOY HOPKINS, JASON FOREMAN

fonctionnaires s'estimant lésés

et

LE CONSEIL DU TRÉSOR
(Service correctionnel du Canada)


employeur



Devant:   John Steeves, commissaire

Pour les fonctionnaires s'estimant lésés :  Corinne Blanchette, UNION OF CANADIAN CORRECTIONAL OFFICERS - SYNDICAT DES AGENTS CORRECTIONNELS DU CANADA - CSN

Pour l'employeur :   Richard Fader, avocat


Affaire entendue à Abbotsford (Colombie-Britannique),
les 23 et 24 juin 2004.


[1]    La présente décision vise à déterminer si l'employeur est tenu d'attribuer le travail des postes vacants aux employés qui sont en congé férié reporté. Subsidiairement, l'employeur peut-il attribuer le travail aux employés à temps partiel qui sont déjà sur place? L'article 26 de la convention collective conclue entre les parties est en cause, et plus particulièrement le paragraphe 26.10.

[2]    Les parties ont convenu que la convention collective arrivant à expiration le 31 mai 2002 (code 601-651), Convention entre le Conseil du Trésor et l'Union of Canadian Correctional Officers - Syndicat des agents correctionnels du Canada - CSN, renferme les dispositions qui s'appliquent en l'espèce.

Questions de procédure

[3]    La présente décision s'applique directement aux quatre griefs suivants :

166-02-32593Cianni, Angela
166-02-32597MacNeal, Sonny Raymond
166-02-32621Alamwala, Kurdip Singh
166-02-32623DeMeulenaere, Maurice Archibald

[4]    Huit griefs se sont ajoutés durant l'audience vu qu'ils se rapportent à la même question. Leur instruction se poursuivra à une date ultérieure. Il s'agit des griefs suivants :

166-02-32626Hurley, Martin
166-02-32627Mailhot, Joseph Rolland Claude
166-02-32628Numainville, Pierre
166-02-32629Noorani, Tricia
166-02-32630Stulp, Elaine
166-02-32631Zwarych, Ron
166-02-32662Hopkins, Joy
166-02-32673Foreman, Jason

[5]    Les griefs suivants ont été retirés à l'audience :

166-02-32594Cornell, Christine166-02-32595Dornan, Rob
166-02-32596Gill, Sharn166-02-32598 Davis, E. Blair
166-02-32599Dyer, Tom166-02-32600 Grant, Mike
166-02-32601Hindle, Jeremy166-02-32602 Hayre, Susan
166-02-32603Llewellyn, Thelma166-02-32604 McLean, Kate
166-02-32605Virk, Bill166-02-32606 Watrich, Clint
166-02-32607Williams, Steve166-02-32608 Feist, Dan
166-02-32609Binning, Harj166-02-32610 Rutz, Alan
166-02-32611Rutz, Alan166-02-32622 Boutilier, Kim Leo
166-02-32624Easthom, Michael166-02-32625 Enger, Eric

Contexte

[6]    L'employeur exploite des établissements correctionnels au Canada. Les griefs en l'espèce ont été présentés par des employés de deux établissements de la Colombie-Britannique, soit les établissements Matsqui et Mountain. Les fonctionnaires s'estimant lésés sont des agents de correction qui assurent la sécurité active dans diverses situations.

[7]    Les agents de correction travaillent par quart de travail, alors il arrive que des jours fériés coïncident avec des journées de travail. L'article 26 (reproduit ci-dessous) stipule que lorsqu'un jour férié coïncide avec le jour de repos d'un employé, le jour férié est reporté au premier jour de travail à l'horaire qui suit le jour de repos. L'horaire de travail de l'employé est déterminé par le surveillant en tenant compte des besoins et de la disponibilité du personnel. L'assignation d'un jour férié à une date différente est communément appelée [traduction] « jour reporté » ou « report ». À titre d'exemple, en 2003, le Vendredi saint tombait le 18 avril. Dans le cas des employés pour lesquels c'était un jour de repos, le jour férié a été reporté au 24 avril.

[8]    Le paragraphe 26.10 indique que, sous réserve des nécessités du service, l'employeur fait tout effort raisonnable pour répartir, sur une base équitable, le travail sur les postes vacants du jour férié aux employés en congé férié payé qualifiés et facilement disponibles.

[9]    Il importe également de comprendre la méthode de dotation utilisée par l'employeur. Les quarts de travail peuvent être d'une durée de 8, 12 et même 24 heures. Pour des raisons de sécurité, l'employeur doit disposer d'un effectif complet. Comme il y a toujours des employés qui sont en vacances, en congé ou absents pour cause de maladie, notamment, on utilise une formule fondée sur 1,77. En théorie, on prévoit 1,77 fois plus de personnel qu'on en a besoin en réalité. Je n'ai entendu aucun témoignage selon lequel il y avait surdotation; comme nous le verrons plus loin, il arrive même qu'on doive appeler d'autres employés en renfort. Le personnel est constitué en majeure partie d'employés à temps plein mais englobe aussi des employés à temps partiel.

[10]    La situation qui est à l'origine de l'affaire qui nous occupe s'est produite en 2003, aux alentours du Vendredi saint. Les fonctionnaires s'estimant lésés étaient en congé férié reporté, conformément à l'article 26, parce que le jour férié officiel coïncidait avec leur jour de repos. Au lieu de les rappeler au travail pour un quart complet (certains ont en fait été rappelés pour un quart partiel), conformément au paragraphe 26.10, l'employeur a fait appel aux employés à temps partiel déjà sur place pour combler les postes vacants. Il a aussi rappelé d'autres employés plutôt que les fonctionnaires s'estimant lésés pour exécuter les fonctions de certains postes vacants, mais il admet que c'était une erreur.

[11]    Les fonctionnaires s'estimant lésés contestent la décision de l'employeur de ne pas les avoir rappelé au travail en invoquant le paragraphe 26.10.

Dispositions de la convention collective

[12]    L'article 26 traite des « Jours fériés désignés payés ». Les dispositions pertinentes de cet article sont reproduites ci-après :

26.01Sous réserve du paragraphe 26.02, les jours suivants sont des jours fériés désignés payés pour les employé-e-s :
[...]
(b)le Vendredi saint,
26.02[...]
26.03Lorsqu'un jour désigné comme jour férié en vertu du paragraphe 26.01 coïncide avec le jour de repos d'un employé-e, le jour férié est reporté au premier (1er) jour de travail à l'horaire de l'employé-e qui suit son jour de repos. Lorsqu'un jour qui est un jour férié désigné est reporté de cette façon à un jour où l'employé-e est en congé payé, il est compté comme un jour férié et non comme un jour de congé.
[...]
26.04Lorsqu'un jour désigné comme jour férié à l'égard d'un employé-e est reporté à un (1) autre jour en vertu des dispositions du paragraphe 26.03 :
  1. le travail accompli par l'employé-e le jour à partir duquel le jour férié a été reporté est considéré comme du travail accompli un jour de repos,

    et

  2. le travail accompli par l'employé-e le jour auquel le jour férié a été reporté est considéré comme du travail accompli un jour férié.

26.05Lorsqu'un employé-e travaille pendant un jour férié, il est rémunéré à tarif et demi (1 1/2) pour toutes les heures effectuées jusqu'à concurrence du nombre d'heures journalières normales prévues à son horaire tel qu'indiqué à l'article 21 de la présente convention collective, et à tarif double (2) par la suite, en plus de la rémunération qu'il aurait reçue s'il n'avait pas travaillé ce jour-là.
26.06[...]
26.07[...]
26.08Lorsqu'un jour désigné jour férié coïncide avec un jour de congé payé, ce jour est compté comme un jour férié et non comme un jour de congé.
26.09[...]
26.10Sous réserve des nécessités du service, l'Employeur fait tout effort raisonnable pour répartir, sur une base équitable, le travail sur les postes vacants du jour férié aux employés en congé férié payé qualifiés et facilement disponibles.

[13]    Les parties conviennent qu'il faudrait lire « work performed » à la place de « worked performed » dans le texte anglais de l'alinéa 26.04(a).

Les fonctionnaires s'estimant lésés

[14]    Les faits de l'affaire ne sont pas contestés.

[15]    Mme Angela Cianni a témoigné qu'elle occupait un poste de CX-1 à la date du dépôt de son grief. Elle était en congé férié reporté le 24 avril 2003 parce que c'était son premier jour de travail après le congé férié du 18 avril 2003 (Vendredi saint). Elle aurait travaillé de 6 h 50 à 19 h 20 si elle n'avait pas été en congé le 24 avril 2003. Mme Cianni était qualifiée et facilement disponible pour exécuter le travail de n'importe quel poste vacant à un taux majoré.

[16]    Le 24 avril 2003, il y avait trois employés à temps partiel inscrits à l'horaire pour diverses périodes entre 6 h 50 et 19 h 20. Mme Cianni soutient dans son grief qu'on a fait appel à ces employés pour accomplir le travail des postes vacants durant le quart. Elle est d'avis qu'on aurait dû la rappeler au travail, conformément au paragraphe 26.10.

[17]    M. Sonny MacNeal a témoigné qu'il occupait un poste de CX-1 et qu'il était en congé férié reporté le 23 avril 2003 parce que le 18 avril 2003 (Vendredi saint) était un jour férié. Il était qualifié et facilement disponible pour exécuter le travail de n'importe quel poste vacant. Il aurait travaillé de 19 h à 7 h s'il n'avait pas été en congé férié reporté. Il a été rappelé au travail pour une période de quatre heures le 23 avril 2004 et c'est ce qu'il a fait. Il soutient dans son grief qu'on a fait appel aux employés à temps partiel déjà sur place pour accomplir le travail des autres postes vacants. Il estime qu'on aurait dû le rappeler pour un quart complet de 12 heures, conformément au paragraphe 26.10.

[18]    Le cas de M. Kurdip Singh Alamwala a fait l'objet d'un consensus entre les parties, ce qui est consigné comme un aveu. Il était en congé férié reporté le 24 avril 2003 parce que le 18 avril 2003 (Vendredi saint) était un jour férié. Il était qualifié et facilement disponible pour effectuer le quart de travail et il a effectivement été rappelé pour une période de huit heures ce jour-là. S'il n'avait pas été en congé férié reporté, il aurait travaillé 12 heures, soit la durée de son quart habituel. Il est d'avis que l'employeur aurait dû lui accorder quatre heures de plus au lieu d'attribuer le travail des postes vacants aux employés à temps partiel sur place.

[19]    M. Maurice Archibald DeMeulenaere occupait un poste de CX-1; il était en congé férié reporté le 19 avril 2003 en raison du congé férié (Vendredi saint) de la veille. L'employeur a fait appel à des employés à temps partiel, dont un certain nombre étaient des remplaçants travaillant le 19 avril 2003, pour combler les postes vacants, une mesure que conteste M. DeMeulenaere. Il soutient qu'il était qualifié et facilement disponible et qu'il aurait dû être rappelé pour accomplir le travail des postes vacants, conformément au paragraphe 26.10.

[20]    En dernier lieu, il a été démontré que deux employés, dont un à temps partiel, ont été appelés pour quatre heures de travail au tarif des heures supplémentaires le 24 avril 2003 aux fins de combler les postes vacants. L'employeur admet que c'était une erreur.

Argumentation des parties

[21]    Les fonctionnaires s'estimant lésés soutiennent qu'il s'agit d'une affaire simple ayant trait à l'application du paragraphe 26.10. Les employés en congé férié reporté devraient avoir la possibilité d'accomplir le travail des postes vacants dans la mesure où ils sont qualifiés et facilement disponibles. Les fonctionnaires font notamment valoir que l'employeur aurait dû leur accorder la priorité sur les employés à temps partiel déjà sur place. Au soutien de leur thèse, ils invoquent la décision rendue par l'arbitre Guindon dans l'affaire Gérard Saindon et autres c. Conseil du Trésor (Solliciteur général Canada - Service correctionnel), 2002 CRTFP 73.

[22]    L'employeur affirme lui aussi qu'il s'agit d'une affaire simple qui concerne toutefois les droits de gestion. L'employeur a le droit, par exemple, d'établir les horaires de travail comme bon lui semble, pour autant que les dispositions de la convention collective soient respectées. Il invoque la décision rendue dans l'affaire Re Petro-Canada Inc. and Energy & Cheminal Workers' Union, Loc. 593 (1988), 1 L.A.C. (4th) 404 (Mitchnick) au soutien de sa thèse.

Décision et motifs

[23]    La question générale à trancher en l'espèce peut être assez bien définie comme suit : dans quelles circonstances les employés qui sont en congé férié reporté devraient-ils être rappelés à un taux majoré pour accomplir le travail des postes vacants? Comme il est indiqué précédemment, les fonctionnaires s'estimant lésés adoptent une optique plus générale de ces circonstances que l'employeur.

[24]    Comme il a déjà été mentionné, l'employeur admet avoir commis une erreur en rappelant deux employés au tarif des heures supplémentaires le 24 avril 2003. Cet aveu permet de circonscrire la question à trancher en l'espèce. Il est reconnu que, lorsqu'il y a des postes à combler, ce sont les employés qui sont en congé férié reporté qui doivent être rappelés en premier pour accomplir le travail. C'est ce que dit le paragraphe 26.10. De plus, mettre en pratique la décision Saindon, supra, signifie que ces mêmes employés bénéficient d'une priorité particulière par rapport aux employés à temps partiel qui ne sont pas déjà au travail. L'employeur accepte cette décision, bien que son application se soit soldée par un certain nombre d'erreurs.

[25]    C'est sur la question de la capacité de l'employeur de faire appel aux employés à temps partiel qui sont déjà sur place pour accomplir le travail des postes vacants qu'il y a divergence de vues entre les fonctionnaires s'estimant lésés et l'employeur. Autrement dit, l'employeur est-il obligé de rappeler les employés qui sont en congé férié reporté pour combler les postes vacants ou peut-il faire appel aux employés à temps partiel qui sont déjà sur place? Telle est la question particulière qui doit être tranchée en l'espèce.

[26]    Extiste-t-il une disposition qui oblige l'employeur à attribuer en priorité le travail des postes vacants aux employés qui sont en congé férié reporté plutôt qu'aux employés à temps partiel sur place? C'est aux fonctionnaires s'estimant lésés qu'incombe le fardeau de démontrer qu'ils sont visés par le libellé de la convention collective.

[27]    Les fonctionnaires s'estimant lésés invoquent le paragraphe 26.10. Par souci de commodité, je reproduis à nouveau cette disposition :

26.10Sous réserve des nécessités du service, l'Employeur fait tout effort raisonnable pour répartir, sur une base équitable, le travail sur les postes vacants du jour férié aux employés en congé férié payé qualifiés et facilement disponibles.

[28]    J'attire l'attention sur le fait que la convention collective renferme des dispositions particulières pour les employés à temps partiel et que leurs conditions d'emploi sont définies à l'article 35. Cela étant dit, il est clair que les parties ont convenu d'un commun accord qu'il pouvait y avoir des employés à temps partiel au travail.

[29]    Il convient aussi de préciser que le paragraphe 26.10 fixe quelques conditions importantes.

[30]    L'employeur n'est pas toujours obligé de répartir le travail des postes vacants. Il doit plutôt faire « tout effort raisonnable » en ce sens. Il s'agit d'une norme rigoureuse, à laquelle l'employeur est assujetti; il y a aussi l'obligation de répartir le travail « sur une base équitable ». En revanche, il n'est nullement stipulé que les employés en congé payé qui sont qualifiés et facilement disponibles jouissent d'un droit absolu pour ce qui touche le travail des postes vacants.

[31]    De plus, la répartition du travail des postes vacants est assujettie aux « nécessités du service ». L'employeur dispose donc d'une certaine marge de manoeuvre pour tenir compte des nécessités du service quand vient le moment de combler les postes vacants. Encore une fois, l'employeur ne peut interpréter cela comme une autorisation de faire ce qu'il veut puisqu'il est également tenu d'agir de manière raisonnable et équitable pour combler les postes vacants. En revanche, c'est une autre condition qui restreint le droit des fonctionnaires s'estimant lésés à revendiquer le travail des postes vacants lorsqu'ils sont en congé férié reporté.

[32]    Je n'ai entendu aucun témoignage selon lequel la disposition n'a pas été appliquée de la manière que je viens de décrire.

[33]    Je conclus que le libellé général de la convention collective n'appuie pas l'interprétation du paragraphe 26.10 proposée par les fonctionnaires s'estimant lésés. On y envisage le recours à des employés à temps partiel et rien n'indique qu'on devrait les traiter différemment des autres employés quand il s'agit de combler les postes vacants dans le même quart. Dans le même ordre d'idées, l'article 21, qui définit la durée du travail et les heures supplémentaires, ne fait aucune distinction entre le personnel à temps partiel et le personnel à temps plein que les fonctionnaires s'estimant lésés peuvent invoquer au soutien de leur thèse.

[34]    En ce qui concerne le paragraphe 26.10 comme tel, je considère comme une nécessité du service raisonnable le fait d'attribuer le travail d'un poste vacant aux employés déjà sur place, y compris les employés à temps partiel, avant de rappeler les employés en congé férié reporté qui sont disponibles à un taux majoré. Cette optique a clairement été intégrée dans la formule de dotation de 1,77 et il m'apparaît que c'est une pratique bien établie que de déplacer le personnel sur place pour combler les postes vacants durant le même quart. À cet égard, je n'ai entendu aucun témoignage selon lequel il y a protestation quand l'employeur fait appel au personnel à temps plein sur place pour combler les postes vacants. De plus, il serait insensé sur le plan opérationnel de ne pas faire appel aux employés à temps partiel qui sont rémunérés à tarif simple, ou d'y avoir recours dans une mesure minimale alors qu'on rappelle des employés en congé férié reporté à un taux majoré. Le coût n'est certes pas le seul critère dont je tiens compte pour déterminer les nécessités du service, mais il me permet de corroborer les autres facteurs.

[35]    Comme il est indiqué précédemment, je reconnais que les fonctionnaires s'estimant lésés étaient en « congé [...] payé » le jour du congé férié reporté, au sens où ces mots sont utilisés au paragraphe 26.10. Or, ce n'est que l'une des conditions prévues par cette disposition. À mon sens, il serait contraire au libellé du reste du paragraphe 26.10 de conclure que les employés en congé férié reporté doivent être rappelés en priorité pour exécuter le travail des postes vacants alors qu'il y a des employés qualifiés et disponibles sur place pour faire le travail. La décision Saindon, supra, appuie la proposition selon laquelle les employés en congé férié reporté doivent être rappelés avant les employés à temps partiel qui ne sont pas déjà sur place, comme il est indiqué aux paragraphes 33 et 34. Cette décision ne va pas plus loin, c'est-à-dire qu'elle ne dit pas que les employés en congé férié reporté ont priorité sur les employés à temps partiel qui sont au travail.

[36]    Pour l'ensemble des motifs exposés précédemment, je rejette les griefs de Mme Angela Cianni et MM. Sonny Raymond MacNeal, Kurdip Singh Alamwala et Maurice Archibald DeMeulenaere pour ce qui touche l'interprétation de la convention collective.

[37]    En ce qui concerne le rappel erroné de certains employés pour deux quarts de quatre heures au tarif des heures supplémentaires le 24 avril 2003, il reste à trancher la question de savoir à qui on aurait dû faire appel pour accomplir le travail. Les fonctionnaires s'estimant lésés sont d'avis que le travail devrait être attribué aux employés qui étaient en congé férié reporté et qui ont présenté des griefs. L'employeur reconnaît que ce sont les employés en congé férié reporté qui devraient être rémunérés pour ce travail. Cette question s'étant posée dans le cours de l'audience et des plaidoiries, les parties n'ont pas eu la possibilité d'en considérer tous les aspects. Je leur laisse donc le soin d'en venir à une entente concernant la rémunération pour ce travail. Je demeure toutefois saisi de l'affaire au cas où elles n'arriveraient pas à régler cette question.

John Steeves,
commissaire

BURNABY, le 28 juillet 2004.

Traduction de la C.R.T.F.P.

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