Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Discipline - Suspension de quatre jours - Insultes et menaces à l'endroit de deux superviseurs - au cours de l'été, le fonctionnaire s'estimant lésé avait écopé de trois sanctions disciplinaires - la première fois, il avait été surpris à dormir pendant ses heures de travail - un mois plus tard, il avait été informé que l'employeur menait une enquête sur sa conduite à l'endroit de ses collègues du sexe féminin et il avait été convoqué à une réunion pour discuter des événements en question - deux semaines après cette réunion, l'employeur lui avait remis une lettre résumant les allégations contre lui et précisant la sanction disciplinaire qu'il lui imposait - le fonctionnaire s'estimant lésé avait alors tenu des propos agressifs envers le directeur - le lendemain, il s'était interposé dans une conversation entre le directeur et un membre du public en le traitant de menteur - plus tard ce matin là, au bureau, il lui avait dit qu'avec ses avocats, il reviendrait contre lui - le même jour, le fonctionnaire s'estimant lésé avait répété cette menace à son superviseur immédiat, en lui disant qu'il perdrait son emploi - l'employeur a suspendu le fonctionnaire s'estimant lésé pendant quatre jours - le fonctionnaire s'estimant lésé a persisté dans son attitude agressive envers ses supérieurs à l'audience d'arbitrage - néanmoins, l'employeur aurait dû tenir compte du contexte, qui avait été difficile pour eux cet été là - rien dans la preuve n'indiquait que le fonctionnaire s'estimant lésé avait déjà eu le même genre de comportement - la suspension a été ramenée à un jour. Grief accueilli en partie.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2005-02-10
  • Dossier:  166-33-33267
  • Référence:  2005 CRTFP 16

Devant la Commission des relations de travail dans la fonction publique



ENTRE

MARTIN CYR

fonctionnaire s'estimant lésé

et

AGENCE PARCS CANADA

employeur



Devant :   Jean-Pierre Tessier, commissaire

Pour le fonctionnaire s'estimant lésé :  Daniel Jouis, avocat

Pour l'employeur :  Stéphane Hould, avocat


Affaire entendue à Sept-Îles (Québec)
du 5 au 7 octobre 2004.


[1]    Martin Cyr est à l'emploi de Parcs Canada depuis 1983. Au cours de l'été 2003, il s'est vu imposer trois sanctions disciplinaires.

[2]    Le présent dossier porte sur des insultes ou menaces que M. Cyr aurait proférées à l'endroit de deux de ses superviseurs hiérarchiques, soit les 3 et 4 septembre 2003.

[3]    Le 18 septembre 2003, le fonctionnaire s'estimant lésé se voit imposer une sanction disciplinaire de quatre jours ouvrables sans rémunération, soit 40 heures. Dans les jours suivants, il dépose un grief contestant cette mesure. Ce grief est renvoyé à l'arbitrage le 27 février 2004 et l'audience se tient en octobre 2004. La preuve, lors de l'audience, porte également sur deux autres dossiers qui feront l'objet de décisions distinctes, soit une sanction pour avoir dormi sur les lieux de travail (166-33-33266) et un dossier de harcèlement (166-33-33268).

Les faits

[4]    M. Cyr travaille à Havre-Saint-Pierre où Parcs Canada exploite le site touristique des Îles Mingan. Des embarcations de Parcs Canada servent à transporter des employés sur les îles pour y faire de l'animation et agir comme guide touristique. Plusieurs bateaux servent à transporter les animateurs-guides sur les îles. La randonnée en mer prend environ 15 à 20 minutes. À bord du bateau, il y a un capitaine assis au poste de pilotage et M. Cyr agit comme préposé à l'entretien et à la sécurité. Il doit voir à l'entretien et à la propreté des quais et des salles de toilettes ainsi qu'à la sécurité à bord du bateau (démarrage et disposition du matériel transporté par les guides).

[5]    Au cours de l'été 2003, à plusieurs occasions, le directeur du parc des Îles Mingan, Stéphane Marchand, et le chef des services techniques, Pierre Kavanagh, ont rencontré M. Cyr pour discuter des gestes posés par ce dernier et lui imposer des sanctions disciplinaires.

[6]    M. Marchand admet que les relations avec M. Cyr étaient tendues puisque ce dernier avait formulé en 2002 plusieurs reproches relatifs à sa classification.

[7]    Une première rencontre a lieu le 15 juillet 2003 où ils ont discuté des événements survenus le 14 juillet 2003; alors que M. Cyr avait été surpris à dormir à bord d'un bateau. À cette occasion, M. Kavanagh est directement impliqué puisque c'est ce dernier qui a pris des photographies et a enquêté sur les incidents du 14 juillet 2003 (166-33-33266)

[8]    Il appert des documents déposés en preuve et des témoignages qu'au cours du mois d'août 2003, l'administration procède à une enquête sur la conduite de M. Cyr à l'égard du personnel féminin avec qui il doit travailler. Le 20 août 2003, M. Cyr est convoqué pour discuter des événements survenus au cours de l'été à bord du bateau « Rorqual Bleu » au moment où il devait reconduire des employées (animateurs-guides) sur les îles.

[9]    Le 3 septembre 2003, M. Cyr est rencontré à nouveau et on lui remet une lettre résumant les faits et indiquant la sanction disciplinaire qu'on lui impose. À cette occasion, M. Cyr aurait formulé des propos agressifs envers M. Marchand, en indiquant que les « filles » n'avaient pas fait de plaintes et qu'il l'attendait, qu'il allait avoir des problèmes.

[10]    Suite à la rencontre du 3 septembre 2003, M. Cyr discute avec son représentant syndical et ce dernier lui fait remarquer que dans la lettre du 3 septembre 2003, le directeur, M. Marchand n'a pas mentionné que M. Cyr avait offert de s'excuser auprès des employées qu'il aurait offensées.

[11]    Dès le lendemain, soit le 4 septembre 2003, M. Cyr voit M. Marchand discuter avec un résident de Havre-Saint-Pierre dans le stationnement du bureau. Il s'interpose dans la conversation et, faisant allusion au document du 3 septembre 2003, il traite M. Marchand de menteur. Par la suite, le revoyant à la porte du bureau, il lui dit qu'avec ses avocats, il allait revenir contre le directeur.

[12]    Cette même journée du 4 septembre 2003, M. Cyr doit se rendre au bureau du chef des services techniques, M. Kavanagh, pour signer des feuilles de temps. Moussé par les événements des derniers jours, M. Cyr lance des propos assez secs envers son chef de service. Il fait allusion notamment au fait que son avocat va prendre des mesures contre lui, qu'il va perdre son emploi.

[13]    Suite à ces incidents, le directeur dresse un état des faits et convoque M. Cyr pour une rencontre disciplinaire, le 15 septembre 2003 (pièce E-12).

[14]    Le 18 septembre 2003, M. Cyr se voit imposer une sanction disciplinaire de quatre jours ouvrables sans rémunération, soit 40 heures (pièce E-13).

[15]    Lors de son témoignage, M. Cyr explique le contexte des événements des 3 et 4 septembre 2003. Il explique qu'après la rencontre du 20 août 2003 relative aux allégations de harcèlement sexuel, il a consulté un policier. Ce dernier lui a souligné que c'était des allégations mais qu'il n'y avait pas de plainte formelle signée par les employées. M. Cyr trouve alors qu'on exagère la situation puisqu'il n'y a pas de plainte formelle.

[16]    Relativement à M. Kavanagh, M. Cyr mentionne que non seulement lui-même mais qu'aussi plusieurs résidents de Havre-Saint-Pierre ont des reproches à lui formuler. M. Cyr laisse entendre que M. Kavanagh favoriserait certains parents et amis et serait plus sévère envers d'autres employés.

[17]    Le 4 septembre 2003, il est vrai qu'il lui a mentionné qu'on le reconduirait « de l'autre côté de la track ». M. Cyr explique qu'il s'agit d'une expression locale qui veut que lorsque des gens du village en veulent à quelqu'un d'indésirable, il lui indique de s'installer à l'extérieur du village, soit de l'autre côté de la voie de chemin de fer qui est situé à l'entrée du village.

[18]    M. Cyr dit ne pas avoir parlé de menaces physiques mais que c'est son avocat qui verrait à poursuivre M. Kavanagh et le directeur.

Arguments des parties

[19]    L'employeur soutient que les faits parlent par eux-mêmes et que les propos de M. Cyr constituent une atteinte à l'autorité et perturbent le climat de travail. Les administrateurs doivent prendre des décisions relativement à la conduite des employés ; c'est dans le cadre de leurs fonctions et il est déplacé de leur faire des remarques de caractère personnel.

[20]    Le représentant du fonctionnaire s'estimant lésé soutient que les relations étaient difficiles entre la direction et M. Cyr et que ce dernier se sentait traité trop sévèrement.

Motifs de la décision

[21]    Il est vrai que les événements des 3 et 4 septembre 2003 sont l'aboutissement de divers échanges et discussions tendus qui eurent lieu au cours de l'été 2003, entre l'administration et M. Cyr.

[22]    Je me dois de rappeler à M. Cyr qu'il fut convoqué au bureau du directeur du parc, suite aux fautes qu'il avait commises sur les lieux du travail.

[23]    La convention collective prévoit des processus formels de rencontre. Si M. Cyr se sentait insatisfait d'un compte rendu ou d'une action de l'employeur, il pouvait en discuter dans le cadre d'une rencontre formelle et être accompagné d'un représentant syndical.

[24]    Lors de l'audience du grief, M. Cyr a persisté à maintenir une attitude agressive envers ses supérieurs. Il joue d'avantage le rôle de victime que de coupable.

[25]    Bien que le fonctionnaire s'estimant lésé puisse être en désaccord avec la sévérité des mesures disciplinaires qu'on lui impose, il doit comprendre que les menaces ne changent rien au rôle que se doit de jouer l'administration relativement au maintien de la discipline et du climat de travail.

[26]    Malgré ce qui précède, l'employeur aurait dû tenir compte du contexte et se rappeler que les mois de juillet et août 2003 furent fertiles en discussions, en enquêtes et en possibilités de sanctions.

[27]    La preuve ne révèle aucun incident antérieur de même nature. Lors des rencontres de juillet et août 2003, on n'allègue aucune menace qui aurait pu être proférée par M. Cyr.

[28]    Compte tenu du contexte tendu des mois de juillet et août 2003 et qu'il s'agit d'une première offense de cette nature, je fais droit en partie au grief et substitue à la peine imposée par l'employeur une sanction disciplinaire équivalant à une (1) journée de travail sans rémunération, soit 10 heures.

Jean-Pierre Tessier,
commissaire

OTTAWA, le 10 février 2005

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