Décisions de la CRTESPF

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Résumé :

Désignation de postes comportant des fonctions liées à la sécurité - paragraphe 78.1(6) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique - Groupe Services généraux (surveillants et non-surveillants) - Prorogation du délai prescrit pour informer les titulaires - les parties s'étaient mises d'accord sur les postes faisant partie de l'unité de négociation qui ont des fonctions liées à la sécurité, mais l'employeur n'avait pas transmis l'entente à la Commission dans le délai prévu au paragraphe 78.1(6) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP) - par conséquent, l'employeur a présenté une demande de prorogation du délai pour le faire en vertu du paragraphe 78.1(3) de la LRTFP - l'employeur a fait valoir qu'il était plus important pour les parties de respecter les délais prescrits par la Loi au début du processus menant à une entente qu'il ne l'était après que l'entente avait été conclue - de plus, l'employeur a soutenu qu'il s'était installé une pratique d'autoriser le dépôt tardif des accords de désignation conclus entre les parties - comme l'agent négociateur ne s'était jamais plaint auparavant, il était empêché, par l'action du principe de préclusion, de le faire maintenant - l'agent négociateur a soutenu que, même si la Loi a été modifiée afin de permettre à la Commission de prolonger le délai prescrit parce que les circonstances le justifient, on ne devrait néanmoins le faire que lorsque le requérant peut établir que le retard n'est pas de sa faute, ce qui n'est pas le cas ici - la Commission a conclu qu'il ne s'agissait pas d'une affaire qui se prêtait à l'application du principe de préclusion, voire même à la renonciation d'un droit - cependant, la Commission a convenu qu'il était plus important de respecter les délais prescrits par la Loi avant la conclusion de l'entente qu'après la conclusion de celle-ci - de plus, compte tenu de la pratique du dépôt tardif qui s'était développée entre les parties, la Commission a décidé d'exercer son pouvoir discrétionnaire de prolonger le délai accordé à l'employeur pour aviser la Commission des postes faisant partie des unités de négociation qui, de l'avis des parties, comportent des fonctions liées à la sécurité. Demande agréée.

Contenu de la décision

Dossiers : 181-02-388 181-02-438

Loi sur les relations de travail Devant la Commission des relations dans la fonction publique de travail dans la fonction publique ENTRE LE CONSEIL DU TRÉSOR requérant et L’ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA défenderesse AFFAIRE : Désignation de postes - Groupe Services généraux (GS) (surveillants et non-surveillants)

Devant : Yvon Tarte, président Pour le requérant : Pierre Hamel Pour la défenderesse : David Yazbeck Affaire entendue à Ottawa, le 28 avril 1998.

Décision CISION Page 1 Il s’agit ici d’une demande présentée par le Conseil du Trésor en vue de faire prolonger le délai prévu au paragraphe 78.1(6) pour aviser la Commission des relations de travail dans la fonction publique (CRTFP) que les parties se sont entendues sur la désignation de 1 079 postes dans l’unité de négociation GS.

Le requérant a cité six témoins, la défenderesse n’a présenté aucun élément de preuve. Enfin, j’ai demandé à M. Gilles Brisson, secrétaire adjoint de la CRTFP, de témoigner brièvement afin d’éclaircir un point particulier.

Le contexte Le premier témoin a été M. Raymond Dionne, qui travaille au Conseil du Trésor en tant qu’agent de représentation de l’employeur. À ce titre, M. Dionne s’occupe des désignations et des exclusions, ainsi que des griefs. Au chapitre des désignations, le témoin est notamment responsable du groupe GS.

Dans une lettre datée du 4 février 1997 (pièce E-1), le requérant demande à la défenderesse que les parties se rencontrent conformément au paragraphe 78.1(4) afin d’examiner les postes du groupe GS. Cette lettre indique que M. Dionne sera le représentant de l’employeur mandaté pour discuter des propositions de désignation pour le groupe GS.

Le 4 mars 1997, le requérant a déposé à la Commission une déclaration au sujet des postes du groupe GS qui, selon les parties, avaient ou n’avaient pas de fonctions liées à la sécurité (pièce E-2). Cette déclaration précisait en outre les postes du groupe GS sur lesquels les parties n’avaient pas réussi à s’entendre. Conformément aux dispositions du paragraphe 78.1(7), l’employeur a renvoyé à un comité d’examen les postes en litige.

Un comité d’examen a été constitué au début d’avril 1997. Le comité devait rencontrer les parties le 6 mai 1997 (pièce E-3). Avant la date prévue de cette réunion, la Commission a été avisée qu’un règlement était intervenu entre les parties quant à la désignation des postes du groupe GS. Les parties en ont été officiellement informées et la réunion prévue du comité d’examen a été annulée (pièce E-4).

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Décision Page 2 M. Dionne a témoigné que pour le groupe GS chaque ministère avait négocié une entente avec l’élément approprié de l’Alliance de la Fonction publique du Canada (l’Alliance) et que, à la fin d’avril 1997, il avait discuté avec M me Amy Campbell de l’Alliance du fait que tous les ministères et tous les éléments avaient conclu une entente. Dans le cas de Service correctionnel Canada, l’entente était sous forme d’une formule qui devait être appliquée localement afin de déterminer la liste exacte des postes à désigner. C’est sur la base de ces ententes que la Commission a été avisée que les parties avaient conclu une entente et que, par conséquent, le comité d’examen n’avait pas à se réunir.

À la mi-mai, le requérant s’est rendu compte que 17 postes GS à Patrimoine Canada, qui avaient au départ été considérés comme en litige, avaient été oubliés et mis de côté dans l’accord qu’il venait de conclure avec l’Alliance.

À la suite de discussions avec la défenderesse, le requérant a demandé à la Commission de prolonger le délai afin de pouvoir renvoyer les 17 postes GS litigieux au comité d’examen. Le 10 juillet 1997 (pièce E-11), la Commission a avisé les parties qu’elle n’acquiesçait pas à la demande du requérant pour que soit prolongé le délai prévu pour renvoyer au comité d’examen les 17 postes GS de Patrimoine Canada. L’employeur n’a pas contesté la décision de la Commission sur cette question accessoire.

M. Dionne a ensuite attendu la finalisation de l’entente conclue entre Service correctionnel Canada et le Syndicat des employés du Solliciteur général, l’élément de l’Alliance en cause. La détermination finale des postes GS à Service correctionnel Canada a été faite le 4 février 1998 et l’entente a été signée par M me Lynne Brown, du Ministère, et M. Michel Charbonneau, de l’élément (pièce E-12). Le 11 février 1998, le témoin a signé une entente finale pour la désignation de postes dans le groupe GS. Le document, qui mentionne les 1 079 postes que les parties s’étaient entendues à désigner, n’a jamais été signé par l’Alliance (pièce E-13).

M. Dionne a été avisé avant le 11 février 1998 que l’Alliance s’opposait au dépôt de l’entente concernant les postes GS.

Le témoin suivant a été M me Angèle Régimbald, qui occupe un poste d’agent des relations de travail à Service correctionnel Canada. Elle a pris part aux discussions Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 3 avec l’élément de l’Alliance sur les désignations des postes GS. À la suite de pourparlers qu’ils ont eus au début de février 1997, M me Régimbald et M. Charbonneau ont conclu un accord verbal provisoire le 27 février 1997. Ils se sont mis d’accord sur une formule à appliquer à chaque établissement dans les diverses régions. Le témoin et M. Charbonneau ont eu des discussions en décembre 1997 et janvier 1998 et, finalement, ils ont signé l’entente mentionnée plus tôt (pièce E-12).

Entre mars et décembre 1997, M me Régimbald a parlé à M. Charbonneau à plusieurs occasions au sujet d’autres questions. Au cours de ces entretiens, M. Charbonneau n’a pas soulevé la préparation de la liste GS dans les régions, pas plus qu’il n’a abordé la question des délais.

M me Régimbald a expliqué que les personnes dont le poste est classifié GS au Service correctionnel du Canada peuvent être affectées à diverses fonctions : préparation des aliments, formation, achats, lessive, nettoyage, magasins et conduite de véhicules.

La témoin a expliqué que s’il avait fallu du temps pour finaliser la liste des postes GS au Service correctionnel, c’était à cause de plusieurs facteurs, dont le travail que comportait la liaison avec les régions, le nombre de postes GS vacants et sa propre charge de travail.

M me Micheline Maisonneuve, qui travaille à la Division des relations de travail du Conseil du Trésor en tant qu’agente d’administration, a ensuite témoigné. C’est elle qui a préparé les tableaux figurant dans la pièce E-23. Pour y arriver, elle a examiné les dossiers pertinents du Conseil du Trésor et, dans certains cas, elle a parlé aux divers fonctionnaires s’occupant de la désignation pour des groupes particuliers.

M me Maisonneuve a expliqué qu’elle avait coutume de déposer un protocole d’entente auprès de la Commission une fois les désignations terminées, et qu’elle l’avait fait au-delà du délai prévu par la Loi aux nombreuses occasions mentionnées dans la pièce E-23, sans compter sur une ordonnance de la Commission prolongeant les délais.

Enfin, M me Maisonneuve a signalé que vers le 3 février 1998 elle s’était entretenue avec M me Stephanie Copeland, de l’Alliance, qui à ce moment-là était Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 4 chargée du dossier des désignations du groupe GS pour l’agent négociateur. Au cours de cet entretien, M me Copeland a convenu de communiquer avec l’élément de l’Alliance afin de vérifier ce qui se passait. M me Copeland et M me Maisonneuve n’ont plus eu de discussions à cet égard.

MM. Georges Hupé et Keith Willis, qui travaillent tous deux pour le requérant et qui ont pris part au processus de désignation, ont confirmé certains des renseignements figurant dans la pièce E-23 ainsi que la procédure suivie pour renvoyer à la Commission les accords finalisés sur les désignations.

M. Gray Gillespie, qui est directeur de la Représentation et des consultations pour le requérant, a été le témoin suivant. Il a déclaré que, le 3 février 1998, il avait reçu un appel téléphonique de M. Gilles Brisson, le secrétaire adjoint chargé des Opérations à la Commission. Au cours de cet entretien, M. Brisson a fait savoir que lors de la mise à jour de ses dossiers il avait remarqué que l’entente concernant le groupe GS n’avait pas été déposée afin que la Commission puisse préparer une décision ainsi que les formules 13 nécessaires.

M. Brisson a suggéré que le Conseil du Trésor demande une prorogation de délai afin de renvoyer l’entente concernant le groupe GS à la Commission. M. Brisson n’a avancé aucun motif à l’appui de cette proposition. Le lendemain, le 4 février 1998, M. Gillespie a demandé une prolongation de délai afin de fournir à la Commission l’information nécessaire pour achever le processus de désignation des postes GS (pièce E-14).

L’Alliance s’est opposée à la demande du requérant (pièces E-15 et E-16). Le 12 février 1998 (pièce E-17), M. Gillespie a expliqué la position de l’employeur, tandis que l’Alliance a soumis sa position le 16 février 1998, maintenant son opposition à la demande de prorogation du délai présentée par le requérant. Le 2 mars 1998, la Commission a avisé les parties qu’elle tiendrait une audience dans cette affaire.

À ma demande et avec le consentement des parties, M. Gilles Brisson a témoigné. M. Brisson a affirmé qu’en novembre 1997 sa section s’était vue attribuer la responsabilité administrative de tous les dossiers des Services de médiation. Cette réorganisation à la Commission a rendu nécessaire l’examen de tous les dossiers de

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Décision Page 5 médiation, y compris le dossier de désignation des postes GS pour lesquels l’employeur n’avait pas encore déposé de protocole d’entente.

Le 2 février 1998, M. Brisson a reçu un appel téléphonique de M me Copeland, qui voulait savoir en était rendue la désignation des postes du groupe GS. Durant cet entretien, il se peut que M me Copeland ait signalé qu’il n’y aurait aucune désignation pour le groupe GS, étant donné que l’employeur se trouvait à produire en retard la documentation nécessaire.

Le 4 février 1998, M. Brisson a parlé à M. Gray Gillespie et, après avoir fait allusion au transfert administratif à son service des dossiers de la médiation, a affirmé que l’employeur pourrait demander une prolongation de délai afin de présenter la documentation voulue concernant le groupe GS à la Commission.

Arguments Argumentation du requérant Les dispositions de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP) portant sur le processus de désignation prévoient des délais précis visant à faire en sorte que les parties à la négociation collective soient tenues à des étapes rigoureuses lorsqu’elles sont en désaccord sur la désignation de postes au sein d’une unité de négociation donnée.

Depuis que la LRTFP a été modifiée en 1993, la Commission a le pouvoir de prolonger les délais prescrits aux articles 78.1 et 78.2. La Loi ne prévoit rien dans les circonstances telles la présente les parties s’entendent sur la désignation de postes après le délai fixé pour renvoyer ces affaires à la Commission. La Loi est silencieuse sur les situations les parties règlent les questions relatives à la désignation sans qu’un rapport d’un comité d’examen vienne enclencher l’application des paragraphes 78.1(9) ou (10).

Autant il est important que les parties respectent les délais stricts au début du processus, autant il importe moins qu’elles en fassent autant après qu’elles ont conclu une entente.

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Décision Page 6 La pièce E-23 montre clairement qu’on avait coutume d’autoriser le dépôt tardif des accords de désignation conclus entre les parties. La jurisprudence qui précède les modifications apportées en 1993 ne s’applique donc pas en l’occurrence. La Commission a maintenant tout le pouvoir voulu pour prolonger les délais nécessaires.

En vue de trancher cette question, la Commission doit déterminer si un motif approprié a été avancé pour justifier le délai et, deuxièmement, si la prolongation des délais causerait un préjudice indu à la défenderesse.

Le retard est tout à fait expliqué par le temps qu’il a fallu au Service correctionnel du Canada pour finaliser l’entente et par la pratique acceptée du dépôt tardif. Cette dernière est implicitement reconnue dans les nombreuses décisions de la Commission qui constituent la pièce E-23. L’employeur reconnaît que le Service correctionnel du Canada aurait pu agir plus rapidement en l’occurrence, mais le fait demeure que M. Charbonneau n’a jamais soulevé la question du respect des délais entre février et décembre 1997. L’employeur s’est efforcé de déposer un protocole d’entente le plus tôt possible après que les parties, le 4 février 1998, eurent finalement conclu une entente détaillée sur les postes au Service correctionnel du Canada.

Conformément à la pratique établie, l’employeur n’a pas, avant la présente demande, cherché à faire prolonger les délais prévus pour renvoyer à la Commission les documents relatifs à la désignation des postes GS. Si l’Alliance avait voulu changer la pratique établie, elle aurait le dire en temps utile et discuter de la question avec le Conseil du Trésor. L’Alliance est maintenant empêchée par préclusion de remettre en question la pratique qui, c’est ce qu’elle a amené l’employeur à croire, était à ses yeux acceptable.

Comme la défenderesse n’a produit aucune preuve, elle ne saurait prétendre subir un préjudice du fait de la prolongation du délai. En fait, c’est le public qui subirait un préjudice advenant le refus de prolonger le délai, puisqu’il a été montré que près de la moitié des 1 079 postes sur lesquels les parties se sont entendues sont essentiels au bon fonctionnement des prisons au Canada.

À l’appui de son argument, le requérant se reporte à Driedger on the Construction of Statutes (3 e édition, Bulterworths), Canadian Labour Arbitration Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 7 (3 e édition, Brown et Beatty), Annuaire du Canada et Grewal c. le ministre de l’Emploi et de l’Immigration, [1985] 2 C.F. 263.

Argumentation de la défenderesse Même si la LRTFP a été modifiée en 1993, la jurisprudence de la Commission remontant aux années antérieures à 1993 s’applique toujours. Dans le Conseil du Trésor et l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada (dossier de la Commission 181-02-361), la Commission a clairement indiqué que dans les cas de dépôt tardif l’ancienne jurisprudence continuerait de s’appliquer.

La Cour fédérale et la Commission ont déclaré à maintes occasions que les délais prescrits dans la procédure de désignation sont stricts et ne devraient être prolongés que pour des motifs valables. Lorsqu’il tente de justifier la prolongation d’un délai, le requérant doit prouver qu’il n’a pas été fautif.

La Cour fédérale aborde carrément la question du préjudice dans l’arrêt Procureur général du Canada c. Alliance de la Fonction publique du Canada ([1989] 3 C.F. 585, à la page 592), lorsque le juge en chef Iacobucci réplique ce qui suit au procureur général à propos de son argument sur le préjudice : Cependant, si l’on devait accepter l’argument du requérant selon lequel la raison valable vise aussi la considération des fonctions importantes exercées par les fonctionnaires, cela équivaudrait à permettre que l’on ne fasse pas de cas du délai, et qu’on ne le respecte pas, état de choses susceptible de nuire d’une façon incompatible avec la Loi au droit des fonctionnaires à la négociation collective.

Dans Council of Canadians et al. v. Director of Investigations and Research, Competition Act et al. (212 N.R. 254, C.A.F.), le juge Hugessen examine l’arrêt Grewal soulevé par le requérant uniquement pour conclure qu’aucune prolongation de délai ne peut être accordé si le retard qui a donné lieu à la demande n’est pas expliqué de façon satisfaisante.

Le principe de préclusion soulevé par le requérant ne s’applique pas en l’espèce. Dans leur ouvrage, Brown et Beatty (supra, à la page 2-59) définissent les principaux éléments de ce principe :

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Décision Page 8 [Traduction] Par conséquent, les composantes essentielles du principe de préclusion sont : la conclusion qu’il y a eu une assertion, sous forme d’actes ou d’absence de paroles ou d’actes faite dans le but d’amener la partie à laquelle elle a été faite à agir en conséquence; que ladite partie s’y est conformée en agissant ou en s’abstenant d’agir d’une certaine manière; et qu’un préjudice en a résulté pour elle.

Aucun des éléments fondamentaux ne correspond aux faits de l’affaire qui nous occupe.

Le seul témoin qui a abordé les motifs du retard a été M me Angèle Régimbald. La seule excuse qu’elle a pu avancer était que le processus de désignation au Service correctionnel du Canada était compliqué et qu’elle avait une lourde charge de travail dans d’autres domaines. Il ne s’agit pas des accidents ou des événements incontrôlables mentionnés dans la jurisprudence de la Commission pour justifier la prolongation d’un délai. Pour paraphraser les propos du juge Iacobucci (supra), le retard incombait uniquement à l’employeur et cela ne suffit pas. Bien que l’Alliance ne se soit pas opposé au retard, il demeure que le retard en soi n’a pas été expliqué ni justifié comme il faut par le requérant.

Dans sa lettre à la Commission (pièce E-17), M. Gillespie attribue uniquement aux négociations courantes la cause du retard. Il ne mentionne nullement la « pratique » que le requérant invoque maintenant comme argument pour justifier la prorogation du délai qu’il demande.

Les tableaux fournis avec la pièce E-23 n’établissent pas l’existence d’une pratique reconnue par la défenderesse. Quoi qu’il en soit, cette soi-disant pratique n’a pas été créée avant le non-respect du délai prévu pour renvoyer l’accord concernant le groupe GS à la Commission. Pour tous les autres groupes dont la liste figure à la pièce E-23, les délais non respectés étaient beaucoup plus courts. On ne saurait qualifier cette situation de pratique justifiant un retard de onze mois.

Le fait que l’Alliance ne se soit pas opposée plus tôt en l’occurrence ni à l’occasion de la désignation d’autres postes n’a pas pour effet de lui retirer son droit de s’opposer maintenant. Par sa propre inaction, l’employeur a créé un retard indu dans le processus de désignation des postes du groupe GS. Le requérant aurait pu Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 9 facilement demander une prolongation de délai en temps opportun. Il ne l’a pas fait. La demande devrait être rejetée.

Réplique L’employeur était tenu de fournir une explication pour le retard et il l’a fait. La jurisprudence remontant aux années antérieures à 1993 ne devrait pas être appliquée dans une affaire telle que celle-ci. La Commission a maintenant le pouvoir discrétionnaire que lui accorde la Loi de prolonger les délais. Ce pouvoir discrétionnaire est absolu, encore qu’il faille l’exercer avec circonspection.

L’employeur reconnaît que les parties auraient pu agir avec plus de diligence, mais le fait demeure qu’elles ont suivi une pratique qui semblait répondre à leurs besoins.

Motifs de la décision J’estime que la prolongation de délai demandé par le requérant devrait être accordée. Il n’est pas question ici d’un dépôt tardif dans les étapes initiales du processus de désignation, l’on doit faire preuve de la diligence la plus stricte. La Commission a confirmé sa position à cet égard dans sa décision concernant les 17 postes GS à Patrimoine Canada. La présente affaire a trait à une situation l’on a suivi toutes les étapes préliminaires, en suivant les délais prescrits, jusqu’à la nomination d’un comité d’examen. Ces étapes ou procédures ont été suivies à la suite d’un accord conclu entre les parties.

Il s’est développé entre les parties une pratique consistant à accepter que ces accords soient soumis à la Commission en dehors des délais prescrits afin qu’une décision officielle puisse être rendue. La pratique semble avoir bien fonctionné à l’égard de la désignation de nombreux autres groupes (voir la pièce E-23). Je ne crois pas qu’il s’agit ici d’une affaire qui se prête à l’application du principe de préclusion, voire même à la renonciation d’un droit. Compte tenu des circonstances et notamment de la conduite des parties qui a permis à cette pratique de s’installer, j’estime que la Commission est fondée à exercer le pouvoir discrétionnaire que lui confère le paragraphe 78.1(6) de la Loi.

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Décision Page 10 Considérant les discussions en cours entre le Service correctionnel du Canada et l’élément de l’Alliance qu’est le Syndicat des employés du Solliciteur général, le fait que M. Charbonneau a signé le protocole d’entente concernant le groupe GS le 4 février 1998 et la pratique existante décrite dans la pièce E-23, la Commission exerce le pouvoir discrétionnaire que lui accorde le paragraphe 78.1(6) de prolonger le délai prescrit pour que l’employeur informe la Commission des postes GS qui, de l’avis des parties, comportent des fonctions liées à la sécurité. Le délai prescrit par le paragraphe 78.1(6) en ce qui concerne le groupe GS (surveillants et non-surveillants) est par les présentes prolongé jusqu’au 29 mai 1998.

Le président, Yvon Tarte

OTTAWA, le 13 mai 1998. Traduction certifiée conforme Serge Lareau

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