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  • Dossier:  585-02-16


DANS L'AFFAIRE DE LA
LOI SUR LES RELATIONS DE TRAVAIL DANS LA FONCTION PUBLIQUE
et un différend entre
le Conseil des métiers et du travail des chantiers maritimes du gouvernement
fédéral (Esquimalt, (C. B.)),
l'agent négociateur,
et le Conseil du Trésor, l'employeur,
relativement à l'unité de négociation du groupe Réparation des navires (Ouest)

DÉCISION DU CONSEIL D'ARBITRAGE

Devant:
Ken Norman, président
James Hayes, représentant de l'agent négociateur
Frank Jamieson, représentant de l'employeur

Pour l'agent négociateur:
Ronald A. Pink, c.r., avocat
Heather L. Totton, avocate

Pour l'employeur:
Georges Hupé, Secrétariat du Conseil du Trésor
Shaun Peddie, économiste

1 Les parties ont amorcé le processus de négociation au sujet de cette question le 16 juin 2006. Des propositions ont été échangées en juillet. La convention collective est arrivée à échéance le 30 septembre 2006. La négociation a abouti à la conclusion d’une entente de principe. Cependant, celle‑ci a été solidement rejetée lors d’un vote de ratification tenu à la fin avril 2007.

2 C’est ainsi que, par lettre datée du 25 mars 2008, l’agent négociateur a sollicité un arbitrage. À cette demande, l’agent négociateur a joint une liste des conditions d’emploi qu’il souhaitait renvoyer à l’arbitrage.

3 Dans une lettre datée du 10 avril 2008, l’employeur a fait connaître sa position sur les conditions d’emploi que l’agent négociateur souhaitait renvoyer à l’arbitrage. Il s’est opposé à la proposition suivante de l’agent négociateur :

[Traduction]

À compter du 1er juillet 2007, augmentation de 15 % des taux de rémunération pour tous les groupes salariaux, y compris ceux représentés au DMFC Rocky Point et au CEEMFC (employabilité accrue).

L’employeur a allégué que cette « employabilité accrue » était une initiative combinant une réorganisation du lieu de travail avec l’attribution de nouvelles fonctions et d’une nouvelle classification. Il a ajouté que l’initiative n’avait pas été mise en œuvre et que la proposition de l’agent négociateur n’était donc pas pertinente. L’employeur a aussi produit une liste de conditions d’emploi additionnelles qu’il voulait lui-même renvoyer à l’arbitrage.

4 Dans une lettre datée du 25 avril 2008, l’agent négociateur a donné sa position sur les conditions d’emploi additionnelles que l’employeur souhaitait renvoyer à l’arbitrage.

5 Dans une lettre datée du 2 mai 2008, le président de la Commission des relations de travail dans la fonction publique (CRTFP) a demandé aux parties de soumettre des arguments écrits concernant l’objection soulevée par l’employeur.

6 Dans une lettre datée du 16 mai 2008, l’agent négociateur a déclaré que sa demande d’arbitrage au sujet de l’initiative d’employabilité accrue portait strictement sur la rémunération et n’avait aucune incidence sur l’initiative en tant que telle. Il a ajouté que sa proposition portant sur la date d’entrée en vigueur de l’augmentation de la rémunération au titre de l’employabilité accrue était fondée sur la déclaration de l’employeur selon laquelle l’initiative devait commencer le 1er juillet 2007.

7 L’employeur a répété, dans une lettre datée du 28 mai 2008, qu’un conseil d’arbitrage n’avait pas compétence à l’égard de l’initiative d’employabilité accrue au motif qu’elle concernait l’organisation du lieu de travail, l’attribution des tâches et la classification en vertu de l’article 7 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP). L’employeur a précisé que la proposition de l’agent négociateur reste théorique tant que l’initiative n’a pas été mise en œuvre, et il a déclaré avoir décidé de ne pas la mettre en œuvre.

8 Dans une lettre datée du 13 juin 2008, l’agent négociateur a répété que sa demande d’arbitrage au sujet de l’initiative d’employabilité accrue concernait strictement la rémunération. Tout en maintenant que l’initiative était bel et bien en cours de mise en œuvre, dans sa réponse à l’argument de l’employeur quant au caractère théorique de sa proposition, l’agent négociateur a offert de la modifier comme suit :

[Traduction]

À compter de la date de mise en œuvre de l’initiative « d’employabilité accrue », augmentation de 15 % des taux de rémunération de tous les groupes salariaux, y compris ceux représentés au DMFC Rocky Point et au CEEMFC.

9 Dans une lettre datée du 27 juin 2008, l’employeur a répété que l’initiative d’employabilité accrue ne serait pas mise en œuvre.

10 Le 8 août 2008, Michele A. Pineau, vice-présidente, CRTFP, s’est prononcée sur ces arguments en ajoutant au mandat du présent conseil la question du caractère théorique de la proposition d’employabilité accrue avancée par l’agent négociateur. Au paragraphe 14 de la décision rendue par la vice-présidente, la proposition initiale a été modifiée afin de correspondre au libellé de la deuxième version de l’agent négociateur (reproduite au paragraphe 8 ci-dessus) quant à la rémunération relative à la proposition d’employabilité accrue. Fort d’un mandat ainsi défini, Casper M. Bloom, c.r., Ad. E., président, CRTFP, a rapidement nommé le président de ce conseil, puis, par ordonnance distincte, a formellement mis sur pied ce conseil d’arbitrage.

11 À la suite d’un échange de correspondance avec les parties, le conseil a sollicité des arguments écrits relativement à une demande de l’agent négociateur pour que se tienne une audience, par voie de téléconférence, au sujet de sa demande d’ordonnance préliminaire de divulgation de certaines données d’emploi de l’employeur. Des exposés en date du 18 août, du 26 septembre et du 2 octobre ont été déposés. Le 20 octobre, le conseil a déterminé que l’article 147 de la LRTFP ne conférait pas à un conseil d’arbitrage le pouvoir d’ordonner la tenue d’une conférence préparatoire dont est investi la CRTFP en vertu des alinéas 40(1)b) et c). Ainsi, le présent conseil a déclaré que, lorsque se tiendrait l’audience sur le fond du présent renvoi, il se tiendrait prêt, s’il le fallait, à s’écarter du mode de l’audience s’il était persuadé qu’une audience en bonne et due forme n’a pas été accordée à l’agent négociateur en raison de l’absence des données sollicitées dans sa requête préliminaire.

12 Compte tenu du temps qui s’est écoulé depuis le début de cette ronde de négociation, le conseil a pressé les parties de fixer une série de dates pour qu’une audience se tienne au plus tôt. Trois séries de dates en novembre ont été proposées ainsi que trois jours en décembre. Au bout du compte, toutes les parties concernées se sont entendues sur la tenue d’une audience à Victoria, les 13, 14 et 15 décembre 2008.

13 Au début de l’audience, le conseil a invité les parties à se demander si elles souhaitaient son assistance dans le règlement des questions en litige. Des réponses positives ont été immédiatement reçues. Dans les heures qui ont suivi, le conseil a été impressionné par le respect mutuel dans lequel se tenaient l’agent négociateur et le capitaine de vaisseau Alex Rueben, commandant de l’installation de maintenance de la Flotte Cape Breton. La chose était d’autant plus frappante qu’on aurait raisonnablement pu s’attendre à ce que le cuisant échec essuyé à la suite du vote de ratification d’avril 2007 aurait engendré des relations de travail tendues. Cela dit, au bout du compte, le fossé qui séparait le Conseil du Trésor et l’agent négociateur sur la question pécuniaire s’est avéré un obstacle à la conclusion d’une entente. Le présent conseil s’est alors tourné vers la tenue d’une audience, le 14 décembre.

14 Les récents développements qui sont survenus ont beaucoup pesé dans notre évaluation de la principale question pécuniaire. Pour commencer avec la principale pierre d’achoppement, le présent conseil d’arbitrage a été mis au courant du communiqué que le Conseil du Trésor (CT) a émis sur les compressions budgétaires, en date du 18 novembre 2008, et dans lequel il présentait à tous les agents négociateurs ses offres finales pour les augmentations économiques, soit 2,5 % la première année, 2,3 % la deuxième et 1,5 % pour chacune des trois années subséquentes, à compter de l’exercice  2006‑2007. Le CT a également fait allusion au discours du Trône du 19 novembre 2008, ainsi qu’à la mise à jour économique du ministre des Finances, du 27 novembre 2008, qui promettaient l’adoption d’une loi imposant les augmentations économiques susmentionnées. Le 30 novembre 2008, le gouvernement a changé son fusil d’épaule. Cependant le présent conseil doit toujours tenir compte des facteurs énumérés à l’alinéa 148e) « l’état de l’économie canadienne et la situation financière du gouvernement du Canada ».

15 Pour l’agent négociateur, de récents développements déterminants se sont aussi produits. Le 9 mai 2008, une décision arbitrale visant le groupe Réparation des navires (Est) a fixé les conditions d’une convention collective applicable du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2009, à savoir un rajustement salarial de 5,6 %, une augmentation de 8,4 % des primes d’équipe autonome de travail et des augmentations économiques de 2 % pour chacune des trois années de la convention collective. Le 6 octobre 2008, Victoria Shipyards Company Limited a conclu avec ses syndicats une convention collective de cinq ans prévoyant des augmentations économiques de 4,5 % pour chacune des cinq années, en sus d’une augmentation salariale de 0,82 $ pour tous les gens de métier.

16 En ce qui concerne la question centrale de l’argent, le présent conseil d’arbitrage a étudié tous les facteurs énoncés dans l’article 148. Au bout du compte, la priorité du conseil est de trouver un équilibre entre ses obligations aux termes des alinéas 148b) et e) de la LRTFP. Eu égard au facteur de comparabilité dont il est question à l’alinéa 148b), le conseil est convaincu de la nécessité de tenir compte, conformément à ce qu’affirme le Comité directeur sur les ressources humaines en construction navale et réparation de navires nouvellement mis sur pied, dans un communiqué publié le 10 septembre 2008,  de la demande pour des gens de métier qualifiés et des constants problèmes de recrutement qu’a engendrés l’attribution de grands marchés de construction navale et de réparation de navires à des entrepreneurs de la Colombie‑Britannique. Toujours selon le communiqué de presse, « [traduction] le défi auquel fait face l’industrie de la construction navale et de la réparation de navires est d’attirer de nouveaux éléments pour remplacer un effectif compétent vieillissant ». Les propos suivants du capitaine de vaisseau Alex Rueben, commandant, IMF Cape Breton, sont repris : [traduction] « Face à la demande croissante de services de réparation et de construction de navires, il nous faut mettre au point une stratégie visant à encourager et à promouvoir le recrutement de jeunes talents. »

17 En ce qui concerne le critère de l’alinéa 148e), il a été porté à l’attention du présent conseil, au deuxième jour de son audience, soit le 14 décembre 2008, que le ministre de la Défense, Peter MacKay, dans une entrevue donnée le même jour à la presse canadienne, a annoncé qu’il tiendrait un [traduction] « sommet sur la construction maritime » au début de la nouvelle année et que des milliards de dollars seraient consacrés au maintien de ce secteur de l’économie en situation de [traduction] « plein régime ». Nous interprétons cela comme un signal que, peu importe ce qui se produit en parallèle dans l’économie canadienne, le secteur de la construction navale et de la réparation de navires sera stimulé en sorte de fonctionner à « plein régime ». Par conséquent, les préoccupations liées au recrutement soulevées par le comité directeur sur les ressources humaines en construction navale et réparation de navires ne se dissiperont pas. Dans cette entrevue, le ministre de la Défense MacKay, a fait valoir que son plan de stimulation [traduction] « reposait sur la nécessité, pour les chantiers maritimes du pays et les syndicats, de mettre de côté leurs différends et de se partager des contrats de plusieurs milliards de dollars ». On peut raisonnablement penser qu’en signant son importante entente quinquennale du 6 octobre 2008, Victoria Shipyards avait en tête ce genre de condition préalable du gouvernement à un ensemble de mesures de relance économique.

18 Pour toutes ces raisons, un rajustement initial du salaire de 5,2 % est accordé à compter du 1er octobre 2006, compte tenu de la nécessité d’offrir une rémunération comparable, ainsi que le prévoit l’alinéa 148b). La durée de la convention collective sera du 1er octobre 2006 au 30 janvier 2010, conformément aux limitations prévues à l’article 156. En ce qui concerne l’évolution de la situation financière du gouvernement du Canada, compte tenu de ce que prévoit l’alinéa 148e), les augmentations économiques — dont il s’avère qu’elles feront un peu plus que suivre le rythme de l’inflation — s’établiront comme suit : 2,5 % au 1er octobre 2006; 2,3 % au 1er octobre 2007; 1,5 % au 1er octobre 2008; 0,5 % au 1er octobre 2009 [ce qui correspond à une augmentation annualisée de 1,5 %].

19 En ce qui a trait à la question de l’employabilité accrue, compte tenu de l’affirmation de l’employeur selon laquelle il a décidé de ne pas mettre en œuvre cette initiative (voir le paragraphe 9 plus haut), cette question est sans objet devant le présent conseil d’arbitrage.

20 Pour ce qui est des autres questions sur lesquelles le conseil devait se pencher en vertu de son mandat, puisque les parties ont convenu, au deuxième jour de notre audience, de ne pas contester ces points devant le présent conseil, il ne nous reste qu’à faire valoir que toutes les dispositions de la convention collective venue à échéance sont renouvelées, hormis les modifications pécuniaires et de la durée ordonnées au paragraphe 18 ci-dessus.

21 En conclusion, des remerciements s’imposent. Je félicite les parties de la volonté dont elles ont fait preuve pour tenter une dernière fois de régler leurs différends. Elles nous ont soumis des exposés complets traitant de manière détaillée de la mine de renseignements présentés au présent conseil, ce qui a donné quatre grands classeurs à anneaux de documentation. Quant à mes collègues chevronnés du conseil, même si je suis chargé, aux termes du paragraphe 149(2) de la LRTFP, d’être le signataire exclusif de la décision (la décision me revient) je suis reconnaissant de leurs contributions à mes efforts pour saisir et comprendre les données; des observations et des analyses requises dans cette affaire. Par ailleurs, je tiens à préciser que chacun d’entre eux m’a convaincu à un moment ou un autre de ne pas prendre une mesure que j’étais tenté de prendre.

 

Daté le 20 janvier 2009                                    ___________________________

                                                                             Ken Norman, président

Traduction de la CRTFP                                                                                                                                                                

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