Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Droit à un exposé de fonctions complet et courant- Exécution des fonctions dans les deux langues officielles - les employés s'estimant lésés ont déposé des griefs alléguant la violation des dispositions de la convention collective qui prévoient le droit à un exposé de fonctions complet et courant - ils soutenaient que l'exposé de leurs fonctions n'était pas complet car il ne mentionnait pas qu'ils devaient exécuter celles-ci dans les deux langues officielles - la preuve a démontré que déjà les exposés de fonctions faisaient mention des exigences linguistiques mais que ces exigences furent enlevées quand l'employeur a introduit le système «Hay» pour décrire les postes - l'arbitre a conclu que l'usage des deux langues était si étroitement lié à l'exécution des fonctions des employés qu'il ne pouvait en être dissocié - par conséquent, les exposés étaient incomplets et il a été ordonné à l'employeur de remettre un exposé complet aux employés dans les 60 jours suivant la date de la décision. Griefs admis.

Contenu de la décision

Dossiers: 466-LP-225 à 233 466-LP-241 à 245

Loi sur les relations Devant la Commission des relations de travail au Parlement de travail dans la fonction publique ENTRE C. BRECKENRIDGE, M. CARPENTIER, D. CHARETTE, D. LEDOUX, J. MARETT, D. SÉGUIN, E.S. SLONE, L.A. THERRIEN, M.J. VAN DEN BERGH, R.D. BLONDIN, L. BRANCHAUD, P. LEMOINE, J.-P. LORRAIN ET C.M. RUSSO

employés s’estimant lésés et LA BIBLIOTHÈQUE DU PARLEMENT employeur Devant: Marguerite-Marie Galipeau, commissaire Pour les employés s’estimant lésés: Francine Cabana, Alliance de la Fonction publique du Canada

Pour l’employeur: Carole Piette, avocate Affaire entendue à Ottawa (Ontario), les 14, 15 et 16 février 1996 et les 11, 12 et 13 juin 1966.

Decision Page 1 DÉCISION Cette décision fait suite à l’audition de 14 griefs renvoyés à l’arbitrage par certains employés de la Bibliothèque du Parlement dont les noms sont énumérés en page frontispice. Ces employés réclament l’application à leur endroit de l’article 27 de la convention collective applicable au groupe des techniciens de bibliothèque et conclue par la Bibliothèque du Parlement et l’Alliance de la Fonction publique du Canada (date d’expiration: le 31 mars 1992).

Cet article se lit comme suit: ARTICLE 27 EXPOSÉ DE FONCTIONS 27.01 Sur demande écrite, l’employé reçoit un exposé complet et courant de ses fonctions et responsabilités, classification du organigramme décrivant le classement de son poste dans l’organisation.

Plus précisément, ces employés allèguent que l’exposé de leurs fonctions est incomplet car il ne contient pas la mention du fait qu’ils doivent effectuer leurs fonctions dans les deux langues officielles.

À l’origine, ces employés avaient également une réclamation sur un deuxième sujet, soit l’inclusion de leurs conditions de travail dans leur description de tâches. Toutefois, en cours d’audience, ils ont abandonné leur réclamation quant à cette partie de leur grief.

Les parties sont convenues que les témoignages de trois des techniciens valaient comme preuve, pour l’ensemble des griefs à l’étude.

Les employés ont produit les témoins suivants: Louis Branchaud, Danielle Séguin et Mary Janet Van Den Bergh.

L’employeur a produit les témoins suivants: Robert Nelson, Roland Philip Bonaventure, Roger Baggley et Mike Graham.

Le témoignage de Louis Branchaud peut être résumé comme suit.

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y compris le niveau de poste ainsi qu’un

Decision Page 2 Il occupe le poste de technicien de bibliothèque (LT-4) depuis 1991, à la section des coupures de presse. Sa description de poste (pièce A-4, page 3) indique qu’il exécute ses fonctions dans les deux langues officielles. En 1992, il reçoit une description de poste mise à jour. Elle ne mentionne plus qu’il accomplit ses tâches dans les deux langues officielles.

Pourtant, aucun changement n’est survenu dans ses fonctions, son employeur ne lui a pas retiré la responsabilité d’exécuter ses fonctions dans les deux langues officielles et il continue de travailler dans les deux langues officielles.

Il a déjà reçu une prime au bilinguisme (accordée par une décision arbitrale) mais il n’en reçoit plus, la convention collective (pièce A-1) applicable étant silencieuse à ce sujet.

Ses tâches consistent à lire les journaux (dans les deux langues officielles), à les analyser et à répondre aux demandes de renseignements des usagers (bibliothécaires, parlementaires, ambassades, etc.) dans les deux langues officielles. Le niveau de compétence linguistique exigé par son poste est CBC.

Le témoignage de Danielle Séguin peut être résumé comme suit. Elle occupe un poste de technicienne (LT-4) à la référence depuis 1989. Auparavant, il était inscrit à sa description de tâches (pièce A-5) qu’elle devait exécuter ses tâches dans les deux langues officielles. Puis, en 1992, elle reçoit une nouvelle description de tâches (pièce A-6) qui ne mentionne pas qu’elle doit exécuter ses tâches dans les deux langues officielles. On lui a dit qu’on avait enlevé l’allusion aux langues officielles dans un souci d’uniformiser les descriptions de poste et d’enlever ces mots superflus et que, de plus, les langues officielles étaient une question de dotation et non de classification.

Les fonctions de Danielle Séguin n’ont pas changé. Elle répond aux demandes de renseignements des clients (parlementaires, etc.) dans les deux langues officielles. Elle compile l’information qu’elle recueille dans ces deux langues. Elle transige avec les commis, les bibliothécaires, les techniciens, les politiciens et leurs employés, ainsi que le public, dans les deux langues officielles. Elle répond à une soixantaine d’appels par jour, dans l’une ou l’autre langue.

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Decision Page 3 Le témoignage de Mary Janet Van Den Bergh peut être résumé comme suit. Elle est à la retraite depuis 1994. De 1980 à 1994, elle travaille à la Bibliothèque du Parlement à la section de l’index. Elle occupe un poste de technicienne «indexation» (LT-4).

En 1984, elle reçoit une description de tâches (pièce A-7) qui indique qu’elle doit exécuter son travail en anglais et en français. En 1987, elle reçoit une description de tâches mise à jour (pièce E-1) qui indique aussi qu’elle doit exécuter ses tâches dans les deux langues. En 1992, elle reçoit une nouvelle description de tâches (pièce A-8) qui omet de mentionner la nature bilingue de son travail et qui ne reflète pas correctement son travail, en particulier le fait qu’elle doit produire un index des délibérations bilingue (pièces A-9 et A-10). Pourtant, de 1984 à 1992, elle accomplit ses tâches dans les deux langues officielles, dont la confection de l’index (pièce A-9) des délibérations des comités sénatoriaux. La moitié de son travail est accompli en français, l’autre moitié, en anglais. Ses tâches n’ont pas changé jusqu’au jour, en mars 1994, elle quitte ce poste pour aller travailler sur un projet spécial.

Quant aux témoins produits par l’employeur, voici, en résumé, la teneur de leur témoignage.

Robert Nelson décrit son poste ainsi: gérant responsable des langues officielles et de la formation linguistique. Il agit comme expert-conseil auprès de la Chambre des communes, la Bibliothèque du Parlement et le Sénat.

Il gère le programme des langues officielles; il prodigue des conseils à la haute gestion; il fournit des interprétations de la Loi sur les langues officielles et il donne des cours aux gestionnaires sur tous les aspects de la Loi sur les langues officielles. Les conseils qu’il donne aux gestionnaires de la Bibliothèque du Parlement ont trait à la philosophie et à la conception des systèmes liés aux exigences linguistiques, la formation linguistique et tous les autres domaines visés par la Loi sur les langues officielles.

Tout comme le Parlement et le Sénat, la Bibliothèque du Parlement est soumise à la Loi sur les langues officielles. Elle doit pouvoir desservir dans les deux langues officielles la clientèle en provenance de la Chambre des communes car la Loi sur les

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Decision Page 4 langues officielles exige des institutions fédérales qu’elles offrent leurs services dans les deux langues.

Il existe une infrastructure administrative dont la raison d’être est d’identifier la clientèle bilingue et les ressources nécessaires pour desservir cette clientèle dans les deux langues. La plupart des systèmes de l’infrastructure découlent d’une politique adoptée par le Conseil du Trésor en 1993.

Dans plusieurs organismes, il existe des systèmes dont la raison d’être est d’identifier les ressources nécessaires pour offrir des services à leur clientèle. Il y a un système d’identification des exigences linguistiques de chaque poste, un système de dotation des postes bilingues en deux catégories (impérative et non-impérative), un système d’administration des tests de langue et enfin, un système de formation linguistique.

Ainsi, afin de se doter de ressources bilingues, l’administration de la Bibliothèque du Parlement, tout comme celle de la Chambre des communes ou du Sénat, doit identifier les postes qui doivent être bilingues et le niveau de bilinguisme requis pour chaque poste, i.e., le profil linguistique. Puis, le poste est doté en fonction des exigences linguistiques du poste.

L’ensemble des systèmes est assujetti à l’article 91 de la Loi sur les langues officielles. Il en découle que, lors de la dotation, toutes les exigences linguistiques doivent être établies de façon objective et fondées sur les responsabilités du poste.

Les données recueillies par les différents organismes afin d’établir leurs exigences linguistiques sont contenues dans divers documents, notamment, les descriptions de poste, les documents relatifs à la classification du poste, les formulaires décrivant les exigences linguistiques.

Les besoins linguistiques sont déterminés en se fondant sur les exigences d’un poste. Une description de tâches peut servir à plusieurs fins, telles la dotation du poste, sa classification, l’identification des exigences linguistiques, la planification de carrière.

Le témoignage de Roland Philip Bonaventure peut être résumé comme suit. Commission des relations de travail dans la fonction publique

Decision Page 5 Il occupe le poste de directeur du personnel à la Bibliothèque du Parlement depuis 1977. Il préside le comité chargé d’examiner la classification des postes. On applique le système de classification Hay.

La description de poste et la norme de classification sont deux outils utilisés pour classifier un poste. On examine la description de poste à la lumière de la norme de classification.

Avant 1988, c’est-à-dire avant que la Bibliothèque du Parlement n’utilise le système Hay, la norme de classification utilisée contenait des éléments de dotation et de classification.

En 1988, on décida d’améliorer le système de classification et d’adopter le système Hay qui est un système de classement “universel”. Ce système suggère un certain type de rédaction des descriptions de poste (pièce E-2). Il ne contient pas beaucoup de recommandations en matière de langue.

Un des buts recherchés dans la rédaction d’une description de poste est d’éviter la confusion et de s’en tenir à l’essentiel du travail à accomplir. Entre autres, il faut éviter les longueurs et s’en tenir à la raison d’être du poste.

Les exigences linguistiques propres à un poste donné sont considérées comme une question de dotation et sont contenues dans divers documents dont le guide d’évaluation, les avis de concours, les profils linguistiques.

Lorsque les descriptions de poste furent refaites en 1988, on toléra certains écarts du style de rédaction proposé par le système Hay, tels l’emploi occasionnel de superlatifs, l’allusion à la langue utilisée.

Selon le témoin, la mention de la langue utilisée ne devrait être permise que dans les descriptions de poste des traducteurs, interprètes et réviseurs. Dans les autres cas, la langue utilisée n’est, à son avis, qu’une habileté en matière de communication («communication skill»).

C’est pourquoi, en 1992, il fut décidé d’enlever des descriptions de poste l’allusion aux langues utilisées dans l’exécution des fonctions.

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Decision Page 6 La question de la langue utilisée ne devient pertinente qu’au moment de la dotation d’un poste.

En contre-interrogatoire, le témoin reconnaît que la mention dans la description de poste des langues utilisées n’aurait pas eu pour effet d’allonger indûment la description des fonctions.

Le témoignage de Roger Baggley peut être résumé comme suit. Il est le directeur de la Division du catalogage et responsable de la section index.

Il a participé à la rédaction des descriptions de poste au moment l’on a décidé de s’inspirer du système Hay.

En 1992, il fut décidé d’enlever l’allusion aux exigences linguistiques des postes car ce n’était pas un élément susceptible («ratable factor») d’évaluation et de classement sous le système Hay. Au surcroît, on était d’avis que les exigences linguistiques d’un poste étaient un renseignement superflu et qu’il n’y avait pas lieu de l’inclure dans les descriptions de poste.

Roger Baggley confirme que les indexateurs doivent accomplir leurs fonctions en utilisant les deux langues officielles.

Le système Hay ne défend pas d’inclure l’allusion aux langues utilisées dans l’exécution des fonctions; toutefois, il n’en rend pas la mention obligatoire non plus.

Selon ce témoin, l’utilisation des langues officielles n’est pas une tâche mais plutôt une condition d’emploi.

Le témoignage de Mike Graham peut être résumé comme suit. Il est directeur de la Division des services publics de la Direction de l’information et des services techniques de la Bibliothèque du Parlement.

La division qu’il dirige a comme raison d’être de répondre aux besoins d’information des parlementaires et des autres clients autorisés (environ 3 000 clients). Elle se compose de cinq sections: la section de la référence, la section

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Decision Page 7 de l’appui aux services publics, la section des coupures de presse, la section des succursales, et le service d’information publique.

M. Graham a participé à la révision des descriptions de tâches; il a fait de la rédaction et de la révision de ces descriptions, en particulier, celles des techniciens de bibliothèque. Les techniciens à la référence, aux prêts, aux coupures de presse, à la publication (Quorum), et aux succursales, ont tous leur description de tâches.

On a décidé d’enlever de la description de tâches la mention sur les langues car on considérait que ce n’était pas un élément requis pour décrire la nature du travail. Il s’agit plutôt d’un élément pertinent au moment de la dotation et qui est consigné dans des documents, tel l’identification des postes bilingues (pièce E-5 et E-6).

En contre-preuve, Louis Branchaud, Danielle Séguin et Mary Janet Van Den Bergh ont répété que leurs tâches n’avaient pas changé depuis la nouvelle rédaction de leur description de tâches. Danielle Séguin a souligné que, lorsqu’elle procède à une compilation de données, elle trouve l’information dans une langue et elle doit traduire ces données pour pouvoir les compiler dans l’autre langue. Quand on lui donne de l’information en anglais, elle doit la traduire en français.

Plaidoiries La plaidoirie de la représentante des employés peut être résumée comme suit. L’employeur n’a pas respecté l’article 27 de la convention collective car il n’a pas fourni un exposé complet et courant des fonctions et responsabilités des postes.

La preuve révèle que les tâches des employés n’ont pas changé et qu’ils doivent toujours les exécuter dans les deux langues officielles. En aucun moment, l’employeur les a-t-il avisés qu’il leur retirait la responsabilité d’effectuer leurs fonctions dans les deux langues officielles.

La présente affaire ne porte pas sur la dotation ou la classification mais plutôt sur le contenu de la description de tâches à la lumière de l’article 27 de la convention collective et de l’obligation que cet article impose à l’employeur. Cependant, il y a lieu de considérer que la description de tâches est justement un des outils qui sert à la dotation et à la classification d’un poste. Même Roland Bonaventure n’a pas déclaré

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Decision Page 8 que la responsabilité d’exécuter leur travail dans les deux langues avait été retirée aux employés. La jurisprudence suivante est citée: Diane V. Carleton et le Conseil du Trésor - Dossier de la Commission 166-2-13847

V.A. Littlewood et le Conseil du Trésor - Dossier de la Commission 166-2-16044

La plaidoirie de l’avocate de l’employeur peut être résumée comme suit. Les descriptions de tâches constituent un exposé complet et courant des fonctions et responsabilités des employés au sens de l’article 27 de la convention collective.

La langue est une façon d’exécuter les fonctions et responsabilités du poste; c’est une manière de communiquer. Ceci dit, il existe une attente que les titulaires des postes exécutent leurs fonctions dans les deux langues officielles. Cette attente est consignée dans des documents, tels l’avis de concours (pièces E-3 et E-4) et le profil linguistique (pièce E-6).

L’outil de base en matière de classification est la description de poste. Lors de la classification d’un poste, on ne considère pas les exigences linguistiques du poste. On veut que la description de tâches soit générique. Tous les titulaires du même genre de poste ont la même description de poste bien que les exigences linguistiques puissent varier d’un poste à l’autre. La description de tâches doit se prêter à l’application du système Hay.

L’exigence linguistique rattachée à un poste est pertinente au stade de la dotation mais il n’y a aucune raison qu’elle soit consignée dans la description de tâches.

Le fait de faire des compilations en anglais puis en français constitue une seule tâche et non deux. Compiler dans une langue puis dans une autre n’est qu’un changement dans la manière d’exécuter la même tâche.

Par ailleurs, il est vrai qu’un employé ne pourrait pas refuser d’exécuter son travail dans les deux langues en invoquant le fait que telle exigence n’est pas écrite dans sa description de tâches.

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Decision Page 9 Depuis l’avènement de la Loi sur les relations de travail au Parlement, un employé a le droit de renvoyer à l’arbitrage un grief portant sur sa classification. Par conséquent, l’employeur a cru bon de mettre à jour les descriptions de tâches et a décidé de se servir du système Hay. Ce système recommande de ne pas utiliser, entre autres, des superlatifs dans la rédaction d’une description de tâches. L’allusion aux langues employées dans l’exécution du travail ne cadre pas avec ce système. La jurisprudence suivante est citée: Bonnie. L. Taylor et le Conseil du Trésor, Dossier de la Commission 166-2-20396, l’Alliance de la Fonction publique du Canada et la Bibliothèque du Parlement - Dossier de la Commission 485-L-3.

Motifs Il est fait droit aux griefs au motif que l’exposé des fonctions et responsabilités de ces employés n’est pas «complet et courant» tel qu’exigé par l’article 27 de la convention collective.

D’abord, au cours d’une même journée, ces employés travaillent tantôt en français, tantôt en anglais. De l’aveu même du procureur de l’employeur, cela fait partie des attentes de l’employeur. L’usage des deux langues est si étroitement lié à l’exécution des fonctions et responsabilités de ces employés qu’il ne peut, à mon avis, en être dissocié.

L’usage de l’anglais et du français constitue plus qu’une habileté en matière de communication («communication skill») ainsi que le prétend l’employeur. En effet, au moment cette habileté s’actualise, sa matérialisation devient une tâche en soi, c’est-à-dire, une fonction. Or cette fonction, loin d’être négligeable, sous-tend l’ensemble des autres fonctions. Par conséquent, pour être complet, l’exposé des fonctions doit refléter cette fonction.

L’usage du français et de l’anglais constitue également une responsabilité, c’est-à-dire, «une obligation de remplir un devoir, un engagement» et il m’apparaît pertinent qu’elle soit consignée dans «l’exposé des fonctions et responsabilités» des employés.

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Decision Page 10 La description de tâches ou, pour employer l’expression consacrée par la convention collective, «l’exposé des fonctions et responsabilités», constitue la pierre angulaire de la relation d’emploi entre ces employés et la Bibliothèque du Parlement. Il s’agit d’un document fondamental et polyvalent auquel on a recours en matière de classification, de dotation, de rémunération, de discipline, d’évaluation de rendement, d’identification des exigences linguistiques et de planification de carrière. C’est une erreur de réduire sa portée à son seul usage en matière de classification. Il doit être suffisamment complet pour se prêter aux nombreux autres usages que je viens d’énumérer.

L’employeur appuie sa position sur le système de classification Hay. Or, ce système de classification n’en est qu’un parmi d’autres. Ce n’est ni une loi, ni un règlement. C’est un outil de classification. L’employeur est libre d’y avoir recours. Toutefois, quelque soit le système de classification choisi, ce système ne peut avoir préséance sur l’obligation légale que l’employeur a contractée de remettre aux employés un «exposé complet et courant» de leurs «fonctions et responsabilités».

Par ailleurs, l’employeur ne m’a pas convaincue que le système Hay empêche la mention des langues dans lesquelles s’exécute le travail de ces employés. Aucun des documents déposés ne démontre que pareille mention constitue une prohibition au sens du système Hay. De plus, il appert des témoignages des témoins de l’employeur, que les experts qui ont élaboré le système Hay ne se sont pas vraiment penchés sur cette question.

Les témoins de l’employeur ont mis l’emphase sur la nécessité d’enlever les expressions superflues contenues dans les descriptions de tâches, d’enrayer les longueurs et d’éviter les expressions et les formes de rédaction qui portent à confusion.

J’estime que les mots «en anglais et en français» ou «dans les deux langues officielles» loin de créer de la confusion, apportent plutôt une précision essentielle et ne sont certainement pas des expressions superflues puisque ces mots reflètent à la fois une fonction, une connaissance et une caractéristique essentielle du travail des employés. D’ailleurs, je note que les témoins de l’employeur ont reconnu que la mention des langues utilisées ne portait pas à confusion et n’ajoutait pas de longueur

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Decision Page 11 indue. Il m’apparaît que la mention des langues utilisées par les employés ne porte aucun préjudice à l’employeur alors que l’absence de cette mention porte préjudice aux employés puisqu’elle occulte un aspect essentiel de leurs fonctions.

Selon la preuve, le système Hay est un système de classification «universel» utilisé dans les secteurs public et privé. Quels que soient les mérites de ce système, je pense que la Bibliothèque du Parlement doit l'adapter à son propre milieu en faisant les ajustements qui s’imposent de par le caractère particulier d’un milieu de travail l’emploi des deux langues officielles fait partie inhérente des fonctions et responsabilités de ces employés.

Pour ces motifs, les griefs sont accueillis et il est ordonné à l'employeur de remettre à ces employés dans les 60 jours de la date de la présente décision un exposé complet et courant de leurs fonctions et responsabilités avec mention du fait que ces employés exécutent leurs fonctions et responsabilités dans les deux langues officielles.

Marguerite-Marie Galipeau, commissaire

OTTAWA, le 12 septembre 1996.

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