Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Demande de déclaration - Poste désigné - Paragraphe 78.4 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP) - Délai - Groupe Médecine vétérinaire - l'agent négociateur et l'employeur étaient engagés dans une troisième ronde de négociations - au cours de la première ronde, les parties ont convenu de la désignation des postes VM et cette entente a été confirmée par une décision de la Commission - au cours de la ronde de négociations suivante, les parties n'ont pas réussi à s'entendre sur la question des désignations et une audience a été fixée devant la Commission - avant la tenue de l'audience, les parties ont opté pour l'arbitrage exécutoire et une convention collective a été signée - pendant la ronde de négociations courante, l'agent négociateur a précisé qu'un renvoi à la conciliation devait maintenant s'appliquer dans le cadre de règlement de différends mettant en cause l'unité de négociation VM - l'agent négociateur a demandé à la Commission de rendre une décision finale sur la question des désignations en alléguant que l'employeur n'avait pas respecté les délais prévus au paragraphe 78(1) de la LRTFP - les deux parties ont convenu que les désignations énoncées dans une décision antérieure de la Commission continuaient de s'appliquer - les parties s'opposaient relativement au droit de l'employeur de modifier les désignations énoncées par la Commission dans la décision susmentionnée au motif qu'il n'avait pas respecté les délais prévus dans la Loi - la Commission a étudié la question de l'interaction entre les paragraphes 78.1 et 78.4 de la LRTFP - elle a statué que les examens prévus dans chacune des dispositions constituaient des processus distincts - la Commission a conclu que le paragraphe 78.1 portait sur l'examen initial des désignations et prévoyait expressément des délais rattachés à la « date de l'avis » - les examens continus, cependant, relèvent de l'alinéa 78.4(2) et cette disposition n'impose aucun délai au processus d'examen - alors que l'article 78 comporte plusieurs renvois aux délais, aucun renvoi n'apparaît dans le paragraphe 78.4 - par conséquent, la demande d'un examen continu peut se faire en tout temps avant la présentation d'une demande de conciliation. Demande rejetée. Décisions citées :Institut professionnel de la fonction publique du Canada c. Agence canadienne d'inspection des aliments, dossier de la CRTFP 181-32-436.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2004-06-16
  • Dossier:  181-32-481
  • Référence:  2004 CRTFP 68

Devant la Commission des relations
de travail dans la fonction publique



ENTRE

INSTITUT PROFESSIONNEL DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA

requérant

et

AGENCE CANADIENNE D'INSPECTION DES ALIMENTS

intimée

AFFAIRE :  Désignations concernant le groupe VM


Devant :   Yvon Tarte, président

Pour le requérant :   Michel Gingras

Pour l'intimée :   Stephen Black


Audience tenue sur examen des observations écrites.


[1]   Dans une lettre datée du 17 octobre 2003, l'Institut professionnel de la fonction publique du Canada (l'agent négociateur) demande à la Commission de déclarer que l'employeur ne peut, parce que les délais sont prescrits, demander l'examen de postes désignés en vertu des articles 78 et suivants de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (la Loi). L'avant-dernier paragraphe de cette lettre est libellé dans les termes suivants :

Depuis la signification de l'avis de négocier, l'employeur n'a pas réagi de (sic) manière que ce soit en matière de « désignations ». L'Institut est d'avis que le droit de l'employeur est donc forclos en matière de désignations; ainsi l'Institut demande à la Commission de rendre une décision finale en matière de « désignations », en conformité avec les dispositions de l'article 78.2 de la Loi.

[2]    L'agent négociateur et l'Agence canadienne d'inspection des aliments (l'Agence ou l'employeur) en sont, à l'heure actuelle, à leur troisième ronde de négociations collectives depuis la création de l'Agence.

[3]    Pour bien comprendre le différend en l'espèce, il importe de comprendre également l'historique des négociations collectives entre les deux parties.

[4]    L'Agence a été créée à titre d'employeur distinct en 1997 et, au cours de leur première ronde de négociations collectives, les parties au présent litige ont réussi à s'entendre sur la désignation des postes occupés par des fonctionnaires du groupe VM avant la tenue d'une audience qui devait se tenir devant un comité d'examen des désignations. L'entente entre les parties a été reprise dans la décision de la Commission 181-32-436. Au cours de la ronde de négociations suivante, cependant, les parties n'ont pu s'entendre, de sorte qu'un comité d'examen des désignations a dû être établi et que ce dernier a déposé un rapport unanime relativement au groupe VM à l'automne 2001.

[5]    Le 30 octobre 2001, soit après que le comité d'examen eut formulé ses recommandations, l'agent négociateur a écrit à la Commission des relations de travail dans la fonction publique (la Commission) pour indiquer qu'il était peu probable que les parties en arrivent à un accord. L'agent négociateur a affirmé également que, puisque les délais fixés au paragraphe 78(1) n'avaient pas été respectés, toutes les conclusions du comité étaient sans effet, et le droit de l'employeur de proposer des désignations était éteint. L'Agence a répliqué aux conclusions du comité d'examen des désignations le 1er novembre 2001, indiquant à la Commission que, conformément au paragraphe 78.2(1), elle souhaitait renvoyer l'affaire des postes contestés à la Commission et que, dans ce contexte, elle demandait une prorogation des délais en vertu du paragraphe 78.1(3).

[6]    Une audience a été fixée au début de l'année 2002 de manière que la Commission puisse trancher la question, et les parties ont été informées que la Commission se pencherait sur la question des délais dès l'ouverture de l'audience. Or, l'audience n'a jamais été tenue, les parties ayant ensuite opté, comme mode de règlement des différends, pour l'arbitrage obligatoire, prévu à l'article 61 de la Loi. Une convention collective a été signée pour la période du 1er octobre 2000 au 30 septembre 2003.

[7]    Le 14 juillet 2003, l'Institut a demandé à la Commission d'enregistrer une modification du mode de règlement des différends applicable à l'unité de négociation du groupe VM. L'agent négociateur a précisé qu'un renvoi à la conciliation devait maintenant s'appliquer. Le 21 juillet 2003, la Commission a rendu sa décision dans l'affaire Institut professionnel de la fonction publique du Canada c. Agence canadienne d'inspection des aliments, 2003 CRTFP 61, et, en application de l'article 39 de la Loi, a enregistré le renvoi à la conciliation comme mode de règlement des différends choisi par l'agent négociateur. En même temps qu'il a présenté sa demande à la Commission, l'agent négociateur a remis à l'employeur un avis de négocier. Ainsi qu'il a été indiqué précédemment, dans une lettre adressée à la Commission le 17 octobre 2003, l'agent négociateur a demandé à la Commission de rendre une décision finale sur la question des désignations, en conformité avec l'article 78.2 de la Loi.

Observations des parties

[8]    D'après la lettre de l'agent négociateur datée du 17 octobre 2003, l'employeur n'a rien fait, en ce qui concerne la question des désignations, depuis que l'avis de négocier a été déposé, et l'agent négociateur est d'avis que les droits de l'employeur dans ce domaine sont prescrits. Il a donc demandé à la Commission de rendre une décision finale en vertu de l'article 78.2 de la Loi.

[9]    Le paragraphe 78.2 (1) de la Loi est libellé dans les termes suivants :

78.2(1) Dans les cas où, après étude des recommandations du comité d'examen, le désaccord persiste sur le lien des fonctions de certains postes avec la sécurité, l'employeur est tenu, au plus tard à la date de l'avis, de renvoyer l'affaire à la Commission.

[10]    En application du paragraphe 78.1(2), la date de l'avis, pour l'application des articles 78.1 et 78.2, est le premier jour des trois derniers mois d'application de la convention collective.

[11]    Dans sa réponse datée du 7 novembre 2003, l'employeur fait valoir qu'il n'avait pas perdu son droit en ce qui concerne les désignations. L'employeur soutient que les désignations qui étaient en vigueur au cours de la ronde de négociations du mois d'août 1998 demeurent en vigueur jusqu'à ce que la Commission prenne une décision contraire. Il soutient également que la décision que la Commission a prise dans le dossier 181-32-436 demeure obligatoire en droit. L'employeur affirme que « les deux parties ont intérêt à régler la question des désignations » et doivent le faire en conformité avec la Loi.

[12]    La Commission a pris note de la correspondance que les deux parties lui ont adressée et, le 10 février 2004, elle a demandé des observations écrites. Elle a demandé aux parties de lui présenter des observations sur l'incidence du paragraphe 78.4(1) de la Loi sur la question des désignations au cours de cette ronde de négociations collectives, en gardant à l'esprit la décision de la Commission dans le dossier 181-32-436.

[13]    Les observations de l'Institut étaient datées du 4 mars 2004. On y soutient que l'employeur a renoncé à son droit de proposer des désignations parce qu'il n'a fait aucun effort pour communiquer avec l'agent négociateur sur la question des désignations dans les délais fixés à l'article 78.1 de la Loi.

[14]    L'agent négociateur soutient que, en vertu de l'article 78.1 de la Loi, les parties sont tenues, au plus tard trois mois avant la date de l'avis, de se rencontrer et d'examiner les postes occupés par les fonctionnaires de l'unité de négociation pour déterminer si leurs fonctions sont liées à la sécurité. Il fait valoir que l'employeur était tenu par la Loi d'examiner les désignations avec l'agent négociateur dans un certain délai et qu'il ne l'a pas fait. Pour cette raison, et puisque l'employeur n'a en aucun moment tenté d'aviser l'agent négociateur ou la Commission concernant une liste de postes dont il souhaitait l'examen, toute proposition est tardive et l'employeur doit être considéré comme ayant renoncé à son droit d'effectuer des désignations.

[15]    L'agent négociateur soutient également que la décision que la Commission a rendue en 1998 sur les désignations est sans effet [traduction] « du seul fait de la création de l'ACIA, dont la structure et la mission sont différentes ». Il fait valoir qu'[traduction] « il ne faut pas tenir compte » de ces désignations parce qu'elles [traduction] « expriment davantage l'historique d'Agriculture Canada, à un moment où les parties [...] venaient à peine d'être créées et où elles avaient peu d'expérience en matière de relations industrielles ».

[16]    L'agent négociateur soutient également qu'il n'est plus lié par aucune décision ou entente antérieure se rapportant aux désignations étant donné que le « terrain » et les « règles du jeu » ont été modifiés unilatéralement par l'employeur lorsque, en 2000, ce dernier a demandé et obtenu un décret ayant pour effet de suspendre l'arbitrage pour la ronde de négociations collectives en question.

[17]    Le 10 mars 2004, l'employeur a répliqué que l'article 78.1 traite de l'examen initial des désignations de postes au sein d'une organisation. Il a fait valoir que ces désignations, approuvées par la Commission en août 1998, ont formé le fondement du « profil des désignations » des postes du groupe VM pour l'Agence et que le pouvoir d'examiner ces désignations est prévu au paragraphe 78.4(2), reproduit ci-après :

78.4(2) L'employeur ou l'agent négociateur, selon le cas, notifie à l'autre partie qu'elle estime que les fonctions d'un poste sont ou non liées à la sécurité; les parties sont alors tenues de se rencontrer et d'examiner le poste en question.

[18]    L'employeur soutient que rien dans ce paragraphe n'impose de date limite à quelque partie que ce soit quant au moment où un tel examen doit avoir lieu. Dans sa réplique, l'employeur a déclaré également qu'il avait l'intention d'[traduction] « examiner le profil des désignations existant pour le groupe VM conformément au paragraphe 78.4(2) ».

[19]    Dans sa réplique, datée du 16 mars 2004, l'agent négociateur reconnaît que les désignations de 1998 sont celles qui sont en vigueur jusqu'à ce que la Commission rende une décision contraire.

[20]    Ainsi que l'agent négociateur le souligne dans les observations qu'il a présentées à la Commission, il avait soulevé cette même question en 2001, au cours de la ronde de négociations collectives précédente, mais cela n'avait rien donné étant donné les événements qui sont survenus par la suite entre les parties.

Motifs de décision

[21]    Bien que cela n'ait pas été clair au départ, les observations déposées par l'agent négociateur le 16 mars 2004 indiquent clairement que l'agent négociateur considère maintenant que les désignations énoncées dans la décision 181-32-436 continuent de s'appliquer. Sur cette question, les deux parties s'entendent.

[22]    Là où elles ne s'entendent pas, c'est sur l'affirmation de l'agent négociateur que l'employeur ne peut effectuer quelque changement que ce soit aux désignations énoncées dans la décision susmentionnée de la Commission au motif qu'il n'a pas respecté les délais fixés dans la Loi.

[23]    L'agent négociateur a demandé à la Commission de rendre une décision finale en conformité avec l'article 78.2 de la Loi, dont voici le libellé :

78.2(1). Dans les cas où, après étude des recommandations du comité d'examen, le désaccord persiste sur le lien des fonctions de certains postes avec la sécurité, l'employeur est tenu, au plus tard à la date de l'avis, de renvoyer l'affaire à la Commission.

(2) La Commission, après avoir donné à chaque partie l'occasion de présenter des observations, détermine si les fonctions des postes en litige sont liées à la sécurité.

(3) Le président adresse aux parties la déclaration de la Commission portant qu'aucun des postes de l'unité de négociation n'a de fonctions liées à la sécurité, ou que certains seulement en ont, selon le cas.

(4) La Commission désigne les postes de l'unité de négociation dont, selon elle, les fonctions sont liées à la sécurité; le président notifie aux parties la désignation.

(5) La décision prise par la Commission est, pour l'application de la présente loi et sous réserve de l'article 78.4, définitive et sans appel.

[24]    L'article 78.2 vise la situation où la Commission rend une décision sur la question de savoir si un poste devrait être désigné. Cette décision ne peut être rendue que dans les cas où le désaccord persiste entre les parties sur la situation des postes, après étude des recommandations d'un comité d'examen des désignations. Ce n'est pas le cas dans la présente affaire.

[25]    Je crois que cet article ne s'applique pas dans les présentes circonstances, étant donné que le litige actuel provient d'une nouvelle ronde de négociations collectives et non pas des recommandations formulées par un comité de règlement des différends établi au cours de cette ronde de négociations collectives. Cependant, cela ne signifie pas pour autant que l'agent négociateur n'a aucun recours dans ce cas-ci. L'agent négociateur demande en fait à la Commission d'interpréter les articles 78.1 et 78.4 à la lumière de la situation actuelle. Le paragraphe 78(3) de la Loi non seulement confère expressément à la Commission le pouvoir de rendre la décision demandée, mais il lui en donne l'obligation. L'employeur ne s'est pas opposé à la compétence de la Commission de rendre cette décision.

[26]    Ayant décidé que la Commission est compétente pour se pencher sur la demande de l'agent négociateur, je dois maintenant m'attarder au fond de la prétention de l'agent négociateur que tout examen des désignations est maintenant forclos. Cette question met en cause l'interaction entre les articles 78.1 et 78.4.

[27]    L'article 78.1 renvoie expressément à la question des délais. Plus particulièrement, le paragraphe 78.1(2) prévoit ceci :

78.1(2) La mention, dans le présent article et à l'article 78.2, de la date de l'avis vaut mention du premier jour des trois derniers mois d'application de la convention collective ou de la décision arbitrale en vigueur. À défaut de convention collective ou de décision arbitrale, ces articles s'appliquent sans égard aux délais qui y sont fixés.

[28]    Donc, les délais dont il est question à l'article 78.1 sont liés au concept de la « date de l'avis ». Le paragraphe 78.1(4) est libellé dans les termes suivants :

78.1(4) Les parties sont tenues, au plus tard trois mois avant la date de l'avis, de se rencontrer et d'examiner les postes occupés par les fonctionnaires de l'unité de négociation pour déterminer si leurs fonctions sont liées à la sécurité.

[29]    L'agent négociateur soutient que, puisque l'employeur n'a pas pris la moindre mesure concernant la question des désignations depuis qu'un avis de négocier a été déposé, il ne peut aujourd'hui demander quelque changement que ce soit ni, pour reprendre la terminologie de la Loi, demander un « examen » des désignations telles qu'elles existent à l'heure actuelle.

[30]    L'employeur fait valoir que l'article 78.1 traite uniquement de l'examen initial des désignations au sein d'une organisation et que le pouvoir continu d'examiner ces désignations est prévu au paragraphe 78.4(2). L'article 78.4 énonce non seulement que les désignations continuent d'avoir effet jusqu'à ce qu'elles soient modifiées en application de cette disposition, mais il prévoit également, au paragraphe 78.4(2), la possibilité d'un « examen » de postes qui ont déjà été désignés. D'après l'employeur, la Loi prévoit qu'un tel examen peut se produire si une partie notifie à l'autre partie, par écrit, qu'elle estime que les fonctions d'un poste sont ou non liées à la sécurité. D'après cette disposition, les parties sont alors tenues « de se rencontrer et d'examiner le poste en question ». L'employeur fait valoir que le paragraphe 78.4(2) n'impose aucune limite de temps relativement à ce processus d'examen, ainsi qu'il ressort clairement du paragraphe 78.4(4). Donc, ainsi que je l'ai déjà indiqué, l'interaction entre les articles 78.1 et 78.4 est le noeud de l'affaire dont je suis saisi.

[31]    Pour que l'employeur ait raison, les articles 78.1 et 78.4 doivent être des dispositions distinctes et les « examens » dont il est fait mention dans chaque disposition doivent être des processus distincts. L'agent négociateur, quant à lui, soutient qu'ils sont une seule et même chose. Sur cette question, je suis d'accord avec l'employeur.

[32]    À ce moment-ci, je propose d'examiner le régime législatif de l'article 78. Le texte des articles 78 et suivants tel qu'il existe aujourd'hui est le fruit de modifications qui ont été apportées à la Loi par la Loi sur la réforme de la fonction publique, 1992, L.C. ch. 54. L'article 65 de cette Loi a eu pour effet d'abroger l'ancien article 78 de la Loi et de le remplacer par le libellé actuel des articles 78 à 78.5 de la Loi. Bien que le libellé de cet article ne soit pas un modèle de clarté, j'expose dans les paragraphes qui suivent la manière dont j'interprète le régime qui est entré en vigueur le 1er juin 1993 (par décret SI/1993-058).

[33]    Si je lis les paragraphes 78(1) et (2) en conjonction avec le processus qui est énoncé aux articles 78.1 et 78.2, j'en arrive à la conclusion que l'intention du législateur était d'appliquer ce régime uniquement à la première demande de conciliation faite après l'entrée en vigueur de l'article, c.-à-d. après le 1er juin 1993. Il souhaitait imposer aux parties l'obligation initiale d'examiner tous les postes des fonctionnaires faisant partie de l'unité de négociation et de les désigner ou de déterminer que leurs fonctions ne sont pas nécessaires pour la sécurité du public. Il précisait également qu'il ne pouvait y avoir conciliation tant que la question de savoir si les postes occupés par les fonctionnaires sont des postes désignés ou non n'était pas « tranchée ». Cet article devait permettre aux parties de faire table rase et leur donner une position de base, suivant immédiatement l'entrée en vigueur de la Loi sur la réforme de la fonction publique, à partir de laquelle elles pouvaient ensuite aller de l'avant. D'après le paragraphe 78(1), le processus d'examen de tous les postes de l'unité de négociation est énoncé articles 78.1 ou 78.2 :

78(1) Le président ne peut donner la suite prévue aux paragraphes 77(1) ou (2) à la demande de conciliation en ce qui concerne une unité de négociation tant que tous les postes occupés par les fonctionnaires qui en font partie n'ont pas été, en conformité avec les articles 78.1 ou 78.2, désignés comme postes dont tout ou partie des fonctions sont ou non, à un moment particulier, ou seront ou non, après un délai déterminé, nécessaires pour la sécurité du public.

[C'est moi qui souligne.]

[34]    Donc, l'examen « initial » ou « de base » de chaque poste occupé par les fonctionnaires faisant partie de l'unité de négociation devait se dérouler en conformité avec le processus énoncé aux articles 78.1 ou 78.2. Les articles 78.1 et 78.2 établissent un processus dans le cadre duquel les parties se rencontrent et tentent de s'entendre sur les postes qui doivent être désignés et, si les parties n'arrivent pas à s'entendre, ils énoncent le processus dans le cadre duquel, dans un premier temps, un comité d'examen des désignations et, dans un deuxième temps, si les parties n'arrivent toujours pas à s'entendre, la Commission, formulent des recommandations ou règlent l'affaire. Une fois que l'examen « de base » est achevé, et en conformité avec le paragraphe 78.4(1), les désignations qui découlent du processus énoncé aux articles 78.1 et 78.2 demeurent en vigueur jusqu'à ce qu'elles soient modifiées en application de l'article 78.4. Ainsi que je l'ai mentionné précédemment, les deux parties conviennent que les dispositions du paragraphe 78.4(1) s'appliquent en l'espèce, l'examen « de base » ayant été achevé il y a longtemps.

[35]    Une fois la phase initiale achevée, ainsi qu'on l'a fait dans la présente affaire, les parties sont ensuite assujetties au paragraphe 78(3) et aux articles 78.3 et 78.4. Le paragraphe 78(3) renvoie à la situation où soit les parties se sont déjà entendues sur les désignations, soit celles-ci ont été établies par la Commission, et où les désignations en question font « l'objet de l'examen prévu à l'article 78.4 ». C'est ce que j'appellerai l'examen « continu ». Le paragraphe 78(3) reprend le point de vue philosophique qui est énoncé au paragraphe 78(1) et indique que le président ne peut donner la suite prévue aux paragraphes 77(1) ou (2), c'est-à-dire établir un bureau de conciliation, que lorsque la question des désignations est tranchée. Bien que cet article utilise le terme « examen » et bien qu'il renvoie à l'article 78.4, qui utilise aussi le terme « examen », il est clair à mon avis que le type d'examen en question diffère, de par sa nature, de l'examen qui est effectué sous le régime du paragraphe 78(1). En fait, le paragraphe 78(1) lui-même n'utilise pas le terme « examen ». Il prescrit cependant que le processus prévu aux articles 78.1 et 78.2 s'applique, et ces deux articles utilisent le terme « examen ». Le problème, dans l'interprétation de l'article 78 dans son ensemble, réside dans l'utilisation sans distinction du terme « examen ». L'article renvoie à ce que j'ai qualifié d'examen « initial » ou « de base », puis il renvoie à l'examen « continu » qui doit être effectué de temps à autre dans le cadre de relations patronales-syndicales, en application de la Loi; enfin, il y a l'« examen » que la Commission entreprend en vertu de l'article 78.2 dans les cas où les parties ne souscrivent pas aux recommandations du comité d'examen des désignations. Bien que les rédacteurs législatifs aient choisi d'utiliser le terme « examen » à plusieurs endroits à l'article 78, je suis d'avis qu'ils renvoient à des processus distincts qui se produisent à des moments différents.

[36]    Les articles 78.1 et 78.2 suivent le paragraphe 78(3) et énoncent, ainsi que je l'ai indiqué précédemment, le processus dans le cadre duquel un examen initial doit être effectué. L'article 78.3 clarifie simplement la situation d'un poste qui est créé au sein de l'unité de négociation une fois l'examen initial mené à terme.

[37]    L'article 78.4 est le processus par lequel les parties sont autorisées à effectuer des examens périodiques continus des postes des fonctionnaires qui font partie de l'unité de négociation et peuvent ainsi réagir à des circonstances qui changent avec le temps. Bien que l'examen initial des postes qu'occupent les fonctionnaires faisant partie de l'unité de négociation, prévu au paragraphe 78(1), soit assujetti aux délais qui sont fixés au paragraphe 78.1(2), l'article 78.4 n'impose aucun délai. Après avoir examiné les diverses dispositions dans leur ensemble, il m'apparaît clairement que les rédacteurs législatifs étaient parfaitement conscients de la question des délais, ayant fixé un délai pour l'examen initial des postes prévu au paragraphe 78.1(2) et ayant prévu la prorogation de ce délai de prescription au paragraphe 78.1(3). De plus, les articles 78.1 et 78.2 font plusieurs autres renvois au moment où les parties doivent agir en ce qui concerne la désignation des postes. Le paragraphe 78.4(2), quant à lui, ne renvoie à aucun délai et, en réalité, le paragraphe 78.4(4) prévoit expressément que les paragraphes 78.1(5) à (10) et l'article 78.2 (les dispositions qui définissent le processus d'examen des postes) s'appliquent sans égard aux délais qui y sont fixés.

[38]    Les parties sont donc libres de notifier en tout temps par écrit à l'autre partie qu'elles souhaitent examiner des postes pour déterminer si leurs fonctions sont liées ou non à la sécurité, mais avant la présentation d'une demande de conciliation en vertu des paragraphes 77(1) ou (2) (voir le paragraphe 78(3)). De toute évidence, l'employeur l'a fait en l'espèce, et aucune demande de conciliation n'a encore été présentée à la Commission par l'une ou l'autre partie.

[39]    Le paragraphe 78.4(1), ainsi qu'il est décrit précédemment dans la présente décision, énonce l'effet du processus de désignation initial, confirmant ainsi que les résultats de ce processus s'appliquent jusqu'à ce que la désignation du poste en question soit modifiée en application de l'article 78.4.

[40]    Le paragraphe 78.4(2) est une disposition générale qui renvoie en termes généraux à l'examen de postes qui ont déjà été désignés dans le cadre du processus d'examen initial. Un tel examen peut survenir à tout moment. Le seul renvoi aux délais se trouve au paragraphe 78.4(3), qui impose une période minimale d'un an entre les examens continus. Au contraire du paragraphe 78.1(2), cette disposition ne renvoie à aucun délai ou date de l'avis. D'après le paragraphe 78.4(2), la demande d'un examen continu peut être présentée à tout moment. Ainsi, comme le prévoit l'article 78.3, un poste peut être créé au sein de l'unité de négociation deux mois après la fin des négociations, et l'employeur peut être d'avis que ce poste devrait être désigné. Dans un tel cas, l'employeur peut informer l'agent négociateur de son opinion de sorte que, conformément au paragraphe 78.4(2), les parties sont tenues de se rencontrer et d'examiner le poste en question. Le renvoi prévu au paragraphe 78.4(2) pourrait s'appliquer également à l'examen de postes effectué dans le contexte de négociations. Dans le cas où la création d'un poste ne s'inscrit pas dans le contexte des négociations, la question des délais ne revêt aucune importance, puisqu'il n'y a aucune urgence. Toutefois, dans le contexte des négociations collectives, comme c'est le cas en l'espèce, le choix du moment est important. Si l'on accepte, comme je l'ai fait, que les examens continus relèvent de l'article 78.4 uniquement et que cette disposition est autonome, l'on doit nécessairement accepter qu'une demande d'examen puisse être présentée à tout moment par l'une ou l'autre partie.

[41]    Ainsi que je l'ai mentionné précédemment, le paragraphe 78.4(4) démontre lui aussi que l'article 78.4 n'est assujetti à aucun délai, puisqu'il écarte expressément les délais qui sont fixés aux paragraphes 78.1(5) à (10) et à l'article 78.2.

[42]    Bien que cette situation puisse être considérée comme étant problématique sur le plan des négociations, je me dois d'interpréter les articles de la Loi en fonction de leur libellé uniquement. On est en droit d'espérer qu'un employeur responsable s'abstiendra d'utiliser ces dispositions uniquement pour ralentir le processus de négociations ou pour bloquer par ailleurs l'accès au processus de règlement des différends en cas d'impasse. De telles tactiques auraient pour effet de miner les objectifs et l'esprit de la Loi, et la Commission n'hésiterait pas à sanctionner ce comportement si elle était saisie du dossier du fait de l'application d'autres dispositions de la Loi.

[43]    En ce qui concerne l'argument de l'agent négociateur qu'il « ne faut pas tenir compte » des désignations de 1998 étant donné que, d'après l'agent négociateur, elles expriment davantage l'historique de l'Agence en tant que ministère de l'Agriculture du Canada et elles ont été établies à un moment où les parties venaient à peine d'être créées, en toute déférence, je ne puis être d'accord. La question des désignations a été réglée à un moment où les deux parties existaient, et le droit suppose que chaque partie possède suffisamment d'expérience dans le domaine des relations de travail pour bien défendre ses intérêts. Bien que l'agent négociateur soutienne que la décision rendue par la Commission en 1998 devrait être jugée « inapplicable » et devrait être examinée dans le contexte de 2004, la Loi n'envisage pas ni ne permet une telle conclusion. En conformité avec les dispositions de la Loi, si l'une ou l'autre partie souhaite que les désignations soient considérées dans un nouveau contexte qui tient compte davantage des réalités d'aujourd'hui, c'est pour cette raison même que le processus d'examen existe. De plus, l'agent négociateur a fait valoir cet argument dans ses observations du 4 mars 2004, alors que, dans son plaidoyer final à la Commission, le 16 mars 2004, il a expressément reconnu que les désignations de 1998 sont celles qui s'appliquent.

[44]    Enfin, en ce qui concerne l'observation de l'agent négociateur qu'il n'est plus lié par quelque décision ou entente que ce soit sur les désignations, étant donné qu'au cours de la ronde de négociations de 2000, l'employeur a obtenu un décret ayant pour effet de suspendre l'accès à l'arbitrage, je ne peux tout simplement pas être d'accord. Au cours de la présente ronde de négociations, l'agent négociateur a demandé et obtenu le recours au mode de règlement des différends de son choix. De plus, et fait plus important encore, je ne vois rien dans la Loi qui appuierait la thèse endossée par l'agent négociateur.

[45]    J'en suis donc arrivé aux conclusions suivantes. Premièrement, la décision de la Commission dans le dossier 181-32-436 demeure obligatoire en droit jusqu'à ce que les désignations des postes qu'occupent les fonctionnaires qui font partie de l'unité de négociation du groupe VM soient modifiées en application de l'article 78.4. Deuxièmement, il n'est pas interdit à l'employeur de demander l'examen des désignations en conformité avec l'article 78.4. La présente demande est par conséquent rejetée et les parties peuvent poursuivre leurs discussions dans le cadre de la ronde actuelle de négociations concernant les postes désignés au sein de l'Agence.

Yvon Tarte,
président

Ottawa, le 16 juin 2004.

Traduction de la C.R.T.F.P.

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