Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

La fonctionnaire s’estimant lésée a été licenciée au motif qu’elle a abandonné son poste – elle a allégué que le licenciement n’était pas motivé et qu’il était discriminatoire – la formation de la Commission a établi qu’un employé peut être réputé avoir abandonné son poste lorsqu’il s’est absenté du travail pendant une période importante sans autorisation et sans raison valable, alors que les circonstances relevaient de son contrôle – la fonctionnaire s’estimant lésée a été licenciée moins de sept mois après avoir été déclarée en congé non autorisé – la formation de la Commission a conclu que la force probante de la preuve montre que la maladie de la fonctionnaire s’estimant lésée empêchait cette dernière de travailler dans ce lieu de travail pendant la période de sa maladie attestée – par conséquent, elle a conclu que l’absence de la fonctionnaire s’estimant lésée du lieu de travail jusqu’à la date de son licenciement et au-delà de cette date était motivée par des raisons valables qui échappaient à son contrôle – la formation a conclu que la décision de l’employeur de présumer qu’elle avait abandonné son poste était déraisonnable – la formation a également conclu que la fonctionnaire s’estimant lésée avait établi une preuve prima facie de discrimination basée sur un motif de distinction illicite, à savoir, l’invalidité – la formation a conclu en outre que l’employeur n’avait pas fourni d’explication raisonnable non discriminatoire à l’appui du licenciement et qu’il n’avait pas satisfait à l’exigence professionnelle justifiée à titre de moyen de défense statutaire contre la discrimination prima facie – la formation a conclu que la décision de l’employeur de licencier la fonctionnaire s’estimant lésée constituait un acte discriminatoire – enfin, elle a conclu que la fonctionnaire s’estimant lésée ne s’était pas acquittée de son obligation de divulguer à l’employeur en temps opportun qu’elle poursuivait des études doctorales et qu’elle travaillait en tant qu’assistante à l’enseignement pendant qu’elle se trouvait en congé maladie approuvé – à la demande des parties, la question de la réparation leur a été renvoyée aux fins de résolutions.

Grief accueilli.

Contenu de la décision



Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral et Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  20180705
  • Dossier:  566-02-8813 et 568-02-298
  • Référence:  2018 CRTESPF 57

Devant une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral


ENTRE

NYAMEKYE ASARE

fonctionnaire s'estimant lésée

et

ADMINISTRATEUR GÉNÉRAL (ministère des Affaires autochtones et du Nord)

défendeur

Répertorié
Asare c. Conseil du Trésor (ministère des Affaires autochtones et du Nord)


Affaire concernant un grief individuel renvoyé à l’arbitrage et affaire concernant une demande de prorogation de délai pour déposer un grief


Devant:
David Olsen, une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral
Pour la fonctionnaire s'estimant lésée:
Russell MacCrimmon, avocat
Pour le défendeur:
Joshua Alcock et Joel Stelpstra, avocats
Affaire entendue à Ottawa (Ontario),
du 16 au 20 janvier et les 1er et 2 juin 2017.
(Traduction de la CRTESPF)

MOTIFS DE DÉCISION

I. Grief individuel renvoyé à l’arbitrage

1        Le 16 novembre 2012, Gorazd Ruseski, directeur de la Direction des politiques, de la recherche et de la coordination du Secteur des terres et du développement économique d’Affaires autochtones et du Nord Canada (le « directeur »), a écrit à Nyamekye Asare, la fonctionnaire s’estimant lésée (la « fonctionnaire »), une économiste subalterne chargée de recherches employée à la Direction, afin de lui indiquer qu’elle était licenciée puisqu’elle avait abandonné son poste.

2        Cette lettre faisait suite à de la correspondance les 25 janvier, 26 avril, 3 août et 31 octobre 2012. On y indiquait que toutes les lettres avaient visé à lui donner une chance d’expliquer son absence du travail depuis le 12 août 2011, à obtenir son consentement à subir une évaluation d’aptitude au travail et à obtenir son consentement afin de communiquer avec son médecin. Dans cette lettre, on mentionnait qu’elle n’avait répondu à aucune des lettres envoyées précédemment; on ajoutait que dans la lettre du 31 octobre, on lui avait exigé de se présenter au bureau de son directeur le 9 novembre afin d’expliquer les motifs de son absence. On l’a informée que son défaut de se conformer à cette directive pouvait entraîner la cessation de son emploi.

3        On y indiquait que Postes Canada avait retourné la lettre du 16 novembre 2012, en mentionnant que la fonctionnaire avait refusé de l’accepter.Elle indiquait en partie ce qui suit :

[Traduction]

[…]

J’ai examiné les circonstances entourant votre absence « non autorisée » du travail et j’ai pris en considération le fait que vous n’avez pas répondu aux lettres qui vous avaient été envoyées. Étant donné que vous n’avez pas communiqué avec moi afin d’expliquer les circonstances entourant votre absence du travail, j’en conclus que vous avez volontairement et intentionnellement abandonné votre poste […]

[…]

Par conséquent, conformément à l’alinéa 12(1)e) de la Loi sur la gestion des finances publiques, je mets fin à votre emploi pour un motif valable […] à compter du 16 novembre 2012 […]

[…]

4        Le 2 avril 2013, Mme Asare a déposé un grief dans lequel elle indiquait que la décision de son employeur de la licencier, dont elle aurait eu connaissance le 7 mars 2013, n’était pas motivée en plus d’être discriminatoire, ce qui constitue une violation de l’article 16 de la convention collective du groupe Économique et services de sciences sociales et des paragraphes 3(1) et 53(2) de la Loi canadienne sur les droits de la personne (L.R.C., 1985, ch. H-6; LCDP). Elle a affirmé que M. Ruseski et son superviseur direct avaient contribué à la détérioration de son état de santé et à son absence.

5        Comme mesure corrective, elle a demandé à obtenir une déclaration selon laquelle son licenciement était nul et non avenu, à être réintégrée dans son poste d’attache en date du 16 novembre 2012, avec pleine rémunération et indemnisation pour toutes les pertes liées au salaire et aux droits à des prestations de congé, des dommages pour préjudice moral et toute autre indemnisation jugée appropriée par l’ancienne Commission des relations de travail dans la fonction publique.

6        La réponse au dernier palier du processus de règlement des griefs du défendeur, Affaires autochtones et du Nord Canada, est datée du 16 juillet 2013.Dans cette réponse, il a fait valoir que le grief était hors délai. À l’ouverture de son argumentation, il a retiré cette objection.

7        Néanmoins, le défendeur a présenté une réponse sur le bien-fondé du grief, dans laquelle il indique que l’employeur a appris que la fonctionnaire travaillait possiblement à l’Université d’Ottawa pendant qu’elle était absente de son travail chez l’employeur en raison d’une maladie en janvier 2012. La direction a tenté à plusieurs reprises de communiquer avec elle par différentes voies de communication au cours de l’année 2012 afin d’obtenir des précisions sur son état. Toutes ces tentatives ont échoué, puisque la fonctionnaire n’a ni accepté les lettres ni retourné les appels.

8        Le défendeur a indiqué qu’un employé a l’obligation de coopérer avec lui à moins d’être incapable de le faire pour des motifs convaincants. Même si la fonctionnaire avait indiqué avoir une directive médicale de ne pas communiquer avec ses gestionnaires (même si elle n’a pas fourni une copie de cette directive), elle avait tout de même une obligation d’examiner la correspondance que la direction lui avait envoyée et d’y répondre au besoin.

9        En réponse à la position de la fonctionnaire selon laquelle la direction n’aurait pas dû lui demander de fournir des renseignements supplémentaires puisque la Sun Life avait approuvé sa demande d’assurance-invalidité en juillet 2012, le défendeur a fait remarquer qu’il n’avait pas accès aux renseignements fournis à la Sun Life puisqu’ils étaient protégés en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels (L.R.C., 1985, ch. P-21).

10        Le défendeur a conclu que la fonctionnaire n’avait présenté aucun élément de preuve selon lequel des motifs convaincants l’empêchaient de communiquer avec l’employeur ou d’accepter les lettres qu’il lui avait envoyées et d’y répondre.Étant donné qu’elle n’avait pas communiqué avec son employeur, la direction a supposé qu’elle avait abandonné son poste.

11        Le 1er novembre 2014, la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique (L.C. 2013, ch. 40, art. 365) a été proclamée en vigueur(TR/2014-84) et a créé la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique, qui remplace la Commission des relations de travail dans la fonction publique et le Tribunal de la dotation de la fonction publique. Le même jour, les modifications corrélatives et transitoires édictées par les articles 366 à 466 de la Loi no 2 sur le plan d’action économique de 2013 (L.C. 2013, ch. 40) sont aussi entrées en vigueur (TR/2014-84). En vertu de l’article 393 de la Loi no 2 sur le plan d’action économique de 2013, une instance engagée au titrede la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (L.C. 2003, ch. 22, art. 2, LRTFP) avant le 1er novembre 2014 se poursuit sans autres formalités en conformité avec la LRTFP, dans sa forme modifiée par les articles 365 à 470 de la Loi no 2 sur le plan d’action économique de 2013.

12        Le 19 juin 2017, la Loi modifiant la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique et d’autres lois comportant d’autres mesures (L.C. 2017, ch. 9) a reçu la sanction royale et a modifié le nom de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique et le titre de la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique et de la LRTFP pour qu’ils deviennent respectivement la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (la « Commission »), la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral et la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral (la « Loi »). Il convient de mentionner que dans la présente décision, la « Commission » renvoie à la Commission actuelle et à tous ses prédécesseurs.

II. Contexte et questions en litige

13        Tout au long de cette décision, j’utiliserai le terme « employeur » lorsqu’il est question de l’emploi de la fonctionnaire au ministère plutôt qu’en référence au Conseil du Trésor. En janvier 2010, Mme Asare a commencé à être employée chez l’employeur de façon occasionnelle jusqu’au 16 avril 2010, au moment où elle est devenue employée nommée pour une période indéterminée.

14        À l’automne 2010, avec la permission de son superviseur et de son directeur, elle a mis en place un arrangement de travail flexible qui lui permettrait de poursuivre des études doctorales à l’Université d’Ottawa tout en travaillant 37,5 heures par semaine.

15        En avril 2011, elle a rencontré son directeur afin de l’informer d’une série d’incidents mettant en cause son superviseur, qui étaient de nature harcelante selon elle. Suivant les conseils de son directeur, elle a rencontré son superviseur afin de tenter de régler leurs problèmes.

16        Elle a rencontré son superviseur et son directeur dans le cadre de son examen de rendement de fin d’exercice, auquel elle a obtenu un résultat très satisfaisant.

17        En juillet 2011, Mme Asare a déposé une plainte officielle de harcèlement contre son superviseur auprès du sous-ministre adjoint, qui, quelque 10 jours plus tard, après avoir examiné les allégations, a rejeté la plainte au motif que les mesures qu’elle décrivait n’étaient pas considérées comme du harcèlement.

18        Le directeur de Mme Asare ignorait que la plainte avait été déposée.On l’a mis au fait uniquement après le règlement de la plainte.

19        Mme Asare était déçue et anéantie quand elle a appris que la plainte avait été réglée. Le 4 août, croyant que sa santé mentale se détériorait, elle a demandé à obtenir des soins médicaux à la clinique des Services de santé de l’Université d’Ottawa. On l’a renvoyée à un psychologue et elle a rencontré une thérapeute accréditée.

20        Au début du mois d’août, elle a présenté une demande de congé non payé pendant un an auprès d’un autre directeur. Ce jour-là, son superviseur et son directeur étaient absents.

21        À son retour, son directeur l’a informée qu’il avait examiné sa demande de congé d’études et lui a demandé de donner plus de détails sur le programme de doctorat de l’Université d’Ottawa.

22        Le 11 août 2011, le directeur a rencontré la fonctionnaire et sa sœur. Il a informé la fonctionnaire que sa demande de congé d’études serait rejetée et que l’arrangement de travail flexible qui était en place prendrait fin après une période de transition afin de lui permettre de réduire progressivement ses activités pédagogiques actuelles. Elle a répondu qu’il lui demandait de choisir entre ses études et son travail.

23        Le 12 août 2011, Mme Asare a consulté un médecin, qui a signé un certificat médical indiquant qu’elle serait absente du travail pour des raisons de maladie jusqu’au 15 septembre 2011.Elle a envoyé une copie de ce certificat par télécopieur à l’adjoint du directeur.

24        Le 13 septembre 2011, elle a accepté un emploi d’assistante à l’enseignement à l’Université d’Ottawa pour le semestre de l’automne et s’est inscrite à deux cours du programme de doctorat, le tout à l’insu de son employeur.

25        Elle a consulté un psychologue les 23 et 30 septembre 2011; celui-ci lui a recommandé de ne pas retourner au travail avant d’avoir vu un psychiatre. Le psychologue l’a informée que l’environnement de travail avait une incidence négative sur sa santé et qu’elle devrait participer à des activités qui contribueraient à son bien-être, comme le fait d’occuper un emploi d’assistante à l’enseignement. On lui a également recommandé de recevoir l’information sur sa charge de travail par l’intermédiaire d’un agent de liaison délégué plutôt que directement par son gestionnaire.

26        Au cours des quelques mois qui ont suivi, Mme Asare a envoyé plus de certificats médicaux afin de prolonger la période de son congé le 15 septembre, en indiquant qu’elle serait absente jusqu’au 15 octobre 2011; le 15 octobre, en indiquant qu’elle serait absente jusqu’au 18 novembre 2011; le 21 novembre 2011, en indiquant qu’elle serait absente jusqu’au 3 janvier 2012; le 2 janvier, en indiquant qu’elle serait absente jusqu’au 2 mars 2012.

27        Le 9 janvier 2012, l’Université d’Ottawa a communiqué avec le directeur afin de connaître le nombre d’heures de travail actuel de Mme Asare à Affaires autochtones et du Nord Canada. Le directeur a ensuite appris qu’elle s’était inscrite en tant qu’étudiante de cycle supérieur, qu’elle avait travaillé en tant qu’assistante à l’enseignement au cours du semestre de l’automne 2011 et qu’elle avait posé sa candidature pour un autre poste d’assistante à l’enseignement pour le semestre de l’hiver 2012.

28        Il a écrit une lettre datée du 25 janvier 2012, qu’il a envoyée par courriel et par service de messagerie, dans laquelle il expliquait sa conversation avec l’employé de l’Université et il demandait à Mme Asare de se présenter à une réunion d’instruction le 2 février 2012 pour expliquer la situation.La lettre envoyée par service de messagerie a été retournée à l’expéditeur. Mme Asare ne s’est pas présentée à la réunion et n’a aucunement communiqué avec son directeur.

29        Le directeur a de nouveau écrit à l’Université d’Ottawa afin d’obtenir des renseignements supplémentaires sur le statut de Mme Asare à l’université.

30        L’Université d’Ottawa a informé Mme Asare que son employeur demandait à obtenir des renseignements supplémentaires et lui a remis une copie de sa lettre. Elle a délégué son père afin qu’il demande à l’université de ne pas fournir cette information à l’employeur.

31        Le 22 février 2012, Mme Asare a envoyé par courriel à l’adjoint du directeur un certificat médical indiquant que le Dr Donald Kilby, médecin de première ligne de la clinique des Services de santé de l’Université d’Ottawa avait prolongé indéfiniment son congé. Le Dr Kilby avait vu Mme Asare à un certain nombre de reprises en novembre et en décembre 2011. Il avait examiné son dossier médical et le rapport du psychologue, ce qui lui avait permis de conclure qu’elle souffrait d’un trouble d’anxiété grave. Il l’a aidée à remplir une demande d’assurance-invalidité et a indiqué qu’elle se croyait victime de harcèlement au travail. Il lui a conseillé de suivre une psychothérapie. En date du 22 février 2012, il n’arrivait pas à conclure que la période d’invalidité se terminerait rapidement.

32        Le Dr Kilby a indiqué à Mme Asare de ne répondre à aucun courriel ou appel téléphonique de ses gestionnaires pendant son congé de maladie tant que des problèmes persistaient entre elle et l’employeur.Il lui a conseillé de ne parler qu’au personnel des Ressources humaines.

33        C’est environ à ce moment-là qu’une conversation a eu lieu entre un conseiller en relations de travail pour le défendeur et Claude Vézina, le directeur des Services professionnels de l’Association canadienne des employés professionnels (ACEP ou l’« agent négociateur »). M. Vézina a informé le conseiller en relations de travail que Mme Asare avait indiqué que ses gestionnaires ne devaient pas communiquer avec elle pendant son congé de maladie.

34        Mme Asare a présenté une demande de prestations d’assurance-invalidité le 20 mars 2012 auprès de la Sun Life.

35        Le 26 avril 2012, le directeur a écrit une lettre à Mme Asare, dans laquelle il lui demandait de subir une évaluation d’aptitude au travail à Santé Canada.Il indiquait aussi dans cette lettre qu’elle était réputée se trouver en congé non autorisé.Cette lettre a été envoyée par courriel et par service de messagerie.Elle a été retournée avec la mention [traduction] « refusé d’être accepté ».Elle n’a pas répondu à la demande.

36        Le 3 juillet 2012, la Sun Life a informé Mme Asare qu’elle était présumée se trouver en congé non autorisé selon l’employeur.

37        Le Dr Kilby a remis une déclaration à la Sun Life, le 9 juillet 2012, à l’appui de la demande d’assurance-invalidité de la fonctionnaire. Il a mentionné que ses symptômes étaient d’une gravité telle qu’ils l’empêchaient entièrement et continuellement de s’acquitter des fonctions liées à son emploi.

38        Le 17 juillet 2012, Mme Asare a informé le Dr Kilby qu’elle avait appris être réputée se trouver en congé non autorisé. Il lui a conseillé de régler la situation en communiquant avec l’agent négociateur ou en recourant aux services d’un avocat.

39        Le 31 juillet 2012, la Sun Life a informé Mme Asare qu’elle avait approuvé le versement des prestations à compter du 14 décembre 2011.Une copie de la lettre a été envoyée au secteur de la rémunération et des avantages sociaux.

40        Le 3 août 2012, le directeur a de nouveau écrit à Mme Asare afin de lui demander de consentir à ce qu’il parle au Dr Kilby.La lettre a été envoyée par courriel et par service de messagerie.La lettre envoyée par service de messagerie a été retournée puisqu’elle n’avait pas été réclamée.

41        Le 11 septembre 2012, Mme Asare a rencontré le Dr Kilby.Elle a lui a demandé de garantir qu’il ne donnerait aucun renseignement à son employeur.Il a confirmé qu’il ne le ferait pas sans son consentement.

42        Le 31 octobre 2012, on a ordonné à Mme Asare de se présenter au bureau du directeur le 9 novembre 2012 afin d’expliquer les motifs de son absence.À défaut de le faire, elle pourrait être licenciée.La lettre n’a pas été récupérée au bureau de poste.

43        Le 2 novembre 2012, Mme Asare a rencontré le Dr Kilby et lui a indiqué qu’elle commençait à se sentir mieux et qu’elle avait rendez-vous avec un psychiatre la semaine suivante.

44        Le 16 novembre 2012, on a licencié Mme Asare pour abandon de poste.

45        Elle a rencontré le psychiatre en novembre et en décembre 2012; celui-ci a confirmé le diagnostic d’anxiété et de dépression et a conclu que les stresseurs au travail constituaient un facteur contributif.

46        Le Dr Kilby a rencontré Mme Asare le 14 janvier 2013; à ce moment, il a signé un certificat médical indiquant qu’elle pourrait retourner au travail le 1er février 2013.

47        Mme Asare a appris de la Sun Life, le 4 février 2013 environ, qu’elle avait été licenciée.

48        Elle a communiqué avec les Ressources humaines afin d’obtenir les lettres non récupérées, qu’elle a reçues le 10 avril 2013.

49        Voici les trois questions interreliées que ce dossier factuel extrêmement complexe pose :

  1. La décision du défendeur de présumer que Mme Asare avait abandonné son poste était-elle raisonnable?
  2. Le défendeur a-t-il fait preuve de discrimination à l’égard de la fonctionnaire en vertu de la LCDP au motif de son invalidité en la licenciant?
  3. La fonctionnaire a-t-elle manqué à son obligation de divulguer en temps opportun au défendeur le fait qu’elle menait des études doctorales et qu’elle travaillait en tant qu’assistante à l’enseignement pendant qu’elle se trouvait en congé de maladie approuvé?

50        Pour les motifs qui suivent, j’ai conclu premièrement que la décision de présumer que Mme Asare avait abandonné son poste en se fondant sur les faits uniques entourant cette affaire n’était pas raisonnable; deuxièmement, j’ai conclu que l’employeur a fait preuve de discrimination à l’égard de la fonctionnaire au motif de son invalidité; troisièmement, j’ai conclu qu’elle ne s’est pas acquittée de son obligation de divulguer au défendeur en temps opportun qu’elle poursuivait des études doctorales et qu’elle travaillait en tant qu’assistante à l’enseignement pendant qu’elle se trouvait en congé de maladie approuvé.

51        À la demande des parties, je leur renvoie la question de la réparation, qu’elles règleront en gardant à l’esprit mes conclusions tirées en l’espèce.

III. Résumé de la preuve

52        Le défendeur a appelé deux témoins : M. Ruseski, directeur principal des Programmes des Autochtones à Pêches et Océans Canada, et directeur de la Direction des politiques, de la recherche et de la coordination du Secteur des terres et du développement économique d’Affaires autochtones et du Nord Canada à tous les moments importants du grief; Tracy McFarlane, agente d’administration à Santé Canada et adjointe administrative de M. Ruseski à Affaires autochtones et du Nord Canada à tous les moments importants du grief.

53        La fonctionnaire a appelé quatre témoins, y compris elle-même, Kweka Asare, son père; M. Vézina; le Dr Kilby.

54        On renvoie dans la présente décision à des allégations selon lesquelles la fonctionnaire a été victime de harcèlement au travail.La question visant à déterminer si la fonctionnaire a bel et bien été victime de harcèlement n’est pas abordée en l’espèce. Ces éléments de preuve ont été accueillis, non pas pour la véracité de leur contenu, mais au motif qu’ils servaient à expliquer pourquoi Mme Asare avait quitté son milieu de travail et n’avait pas répondu aux communications de l’employeur.

55        Au début de l’audience, les parties se sont entendues sur consentement sur une ordonnance de mise sous scellés à l’égard des renseignements médicaux liés à Mme Asare.L’interrogatoire et le contre-interrogatoire du Dr Kilby portaient en majeure partie sur des renseignements médicaux de nature très délicate sur la fonctionnaire. Vu la nature délicate de ces renseignements et le consentement des parties à la mise sous scellés des documents connexes, je me suis efforcé, dans le résumé de la preuve, de ne renvoyer que de façon minime aux renseignements médicaux n’ayant pas à faire partie du dossier public.

A. Pour l’employeur

1. M. Ruseski

56        La Direction des politiques, de la recherche et de la coordination du Secteur des terres et du développement économique est responsable d’élaborer des conseils stratégiques en ce qui concerne le développement économique autochtone pour le ministère et d’autres, en plus d’être responsable du portefeuille économique. Il incombe aussi à la direction d’assurer la planification ministérielle et de rendre compte pour le secteur, en plus de mener des recherches économiques.

57        Le nombre d’employés à la direction variait de 11 à 14. Elle compte trois unités : une unité des politiques; une unité de la planification et des rapports individuels; une unité de la recherche économique. La fonctionnaire était une employée dans l’unité de la recherche économique, qui comptait quatre ou cinq employés, y compris le superviseur.

58        Mme Asare a commencé son emploi en tant qu’employée occasionnelle en janvier 2010, en tant qu’économiste subalterne. Dans ce poste, elle menait des recherches économiques, collectait des statistiques et rédigeait des notes d’information. Elle participait à des projets mixtes et à des réunions du personnel au besoin. Elle a travaillé en tant qu’employée occasionnelle pendant environ quatre mois, jusqu’en avril 2010, au moment où elle a été intégrée à la fonction publique en tant qu’étudiante. Après une année de probation, elle est finalement devenue employée nommée pour une période indéterminée. Pendant ce temps, elle accomplissait des tâches semblables à celles qu’elle menait en tant qu’employée occasionnelle.

59        Pendant l’été 2010, le superviseur de Mme Asare lui a recommandé de suivre un programme d’études universitaires à temps partiel tout en conservant son horaire de travail à temps plein. M. Ruseski a accepté la proposition, sur la recommandation de son superviseur. Il semblait s’agir, selon lui, d’un arrangement officieux avec l’université qui exigerait de vérifier quelques cours.

60        À la fin du mois d’avril 2011, Mme Asare a demandé à rencontrer M. Ruseski afin de lui parler d’une série d’incidents impliquant son superviseur, qui constituaient selon elle du harcèlement.

61        Après cette réunion, il a d’abord songé à lui conseiller de parler à son superviseur. Il croyait qu’ils devaient établir un lien et trouver une solution.

62        Le superviseur et Mme Asare étaient d’accord avec le fait qu’il participe à l’examen de rendement de fin d’exercice. Pendant l’examen, ils étaient tous deux polis et positifs et semblaient régler leurs différends.

63        Dans l’examen de fin d’exercice, on répétait que Mme Asare accomplissant un travail tout à fait satisfaisant. M. Ruseski était d’avis que les problèmes avaient été réglés, que le superviseur et Mme Asare avaient trouvé une façon d’interagir plus fréquemment et que tout allait bien pour elle.

64        Le 15 juillet 2011, à l’insu de M. Ruseski, Mme Asare a déposé une plainte officielle de harcèlement auprès du sous-ministre adjoint, dans laquelle elle nommait son superviseur en tant que défendeur. La plainte renvoyait à des gestes posés depuis juin 2010.

65        Le 26 juillet 2011, le sous-ministre adjoint, après avoir examiné les allégations, a décidé de rejeter la plainte au motif que les gestes qu’elle décrivait n’étaient pas considérés comme du harcèlement, conformément à la définition indiquée dans la Politique sur la prévention et le règlement du harcèlement en milieu de travail du Conseil du Trésor.

66        La plainte a été rejetée, mais le sous-ministre adjoint a tout de même indiqué qu’il ressortait clairement des renseignements fournis que des commentaires inappropriés avaient été formulés et que des incidents étaient survenus, et qu’il fallait réparer la relation de travail entre le superviseur et Mme Asare dans le cadre d’une médiation ou d’autres processus officieux.

67        Le superviseur et Mme Asare ont été informés du règlement de plainte ce jour-là.

68        Le sous-ministre adjoint a indiqué à M. Ruseski qu’une plainte avait été déposée et l’a informé de vive voix de son règlement plus tard au cours de l’été 2011.

69        Même s’il n’était pas certain du moment exact, au début du mois d’août 2011 ou vers ce moment, Mme Asare lui avait parlé de la possibilité de prendre un congé d’études.

70        Le 8 août 2011, Mme Asare a présenté une demande de congé non payé pendant un an à compter du 31 août 2011 à un autre directeur du ministère. Le 8 août, le superviseur de Mme Asare et lui étaient tous deux en congé.

71        À son retour, M. Ruseski a appris que Mme Asare avait demandé à un autre directeur d’approuver son congé.

72        M. Ruseski a voulu rencontrer officiellement Mme Asare afin de discuter d’un certain nombre de problèmes qu’il avait remarqués dans son comportement au travail, ainsi que des préoccupations dont elle lui avait fait part dans le cadre d’une réunion qu’ils avaient eue le 2 août. Il voulait aussi préciser la voie à suivre pour sa demande de congé d’études.

73        Ils se sont rencontrés le 9 août 2011. Il lui a demandé de lui expliquer de façon plus détaillée sa demande de congé d’études. Elle lui a répondu qu’elle suivait le programme de doctorat du département d’économie à l’Université d’Ottawa dans le cadre d’un arrangement officieux.

74        Le programme devenait plus exigeant. Elle devait encore faire des travaux de cours, mener un examen approfondi et rédiger sa thèse. Elle lui a fait valoir qu’il s’agirait d’un investissement utile pour l’organisation, puisqu’elle maintiendrait son ensemble de compétences à jour.

75        Jusqu’à ce moment, un arrangement officieux à temps partiel était en place et elle avait suivi deux cours par semestre. Elle devait obtenir un congé d’étude à temps plein puisqu’elle ne parviendrait pas à terminer ses études dans le cadre d’un arrangement à temps partiel.

76        En fonction de son expérience, M. Ruseski a indiqué que le fait de suivre plusieurs cours, de subir quatre examens approfondis exigeant une étude considérable et de rédiger une thèse représentait une quantité considérable de travail. Il a indiqué qu’il lui avait fallu cinq ans pour faire son doctorat. Pendant ce temps, il ne travaillait pas à temps plein ou à temps partiel, mais il enseignait un peu.

77        Étant donné que son arrangement à temps partiel ne durait qu’un an, M. Ruseski a déterminé qu’elle ne parviendrait pas à travailler à temps plein et à mener ses études doctorales.Il ne croyait pas que c’était possible.

78        M. Ruseski et Mme Asare se sont rencontrés le 11 août 2012.La sœur de Mme Asare était aussi présente.

79        Avant la réunion, M. Ruseski avait rédigé une lettre à l’intention de Mme Asare dans laquelle il exposait sa position sur un certain nombre de problèmes liés au travail et sur sa demande de congé d’études.On lui a remis la lettre et on lui a demandé de la lire au début de la réunion.

80        M. Ruseski a mentionné que la réunion visait à raconter officiellement à Mme Asare certaines préoccupations grandissantes à l’égard de son comportement au travail et de lui donner certaines directives sur sa demande de congé d’études.

81        Il a finalement rejeté sa demande après avoir consulté un guide officieux, qui l’a aidé à prendre une décision. Les directeurs peuvent consulter ce guide quand ils évaluent des demandes de congé d’études. Il a aussi pris en considération l’arrangement officieux antérieur en ce qui concerne sa demande de congé d’études et les événements qui survenaient au travail.

82        Il ne voyait aucun avantage évident pour l’organisation. Le travail requis dans le groupe des études économiques n’exige pas de posséder les compétences que confère un doctorat en philosophie. Il avait besoin d’une personne dans l’organisation pour effectuer le travail. Selon lui, sa demande de congé d’études ressemblait à une tentative de s’échapper du milieu de travail et des pressions avec lesquelles elle éprouvait des difficultés. Il était évident à ses yeux qu’un travail à temps plein et des études de doctorat à temps plein étaient incompatibles.

83        Il a évalué sa demande de congé d’études de la même façon qu’il avait traité les demandes précédentes de deux autres employés.Il a tiré la même conclusion et a rejeté sa demande.

84        Il lui a dit qu’elle devrait mettre fin à l’arrangement officieux en place pour ses études à temps partiel. Il lui a indiqué que sa situation d’étudiante au doctorat à temps plein ne lui permettrait pas de contribuer entièrement à l’équipe et qu’il était possible que l’arrangement officieux en vertu duquel elle avait suivi deux cours par semestre ait contribué à ses difficultés au travail.

85        Selon lui, les deux cours étaient très exigeants, surtout parce qu’elle travaillait à temps plein. Cette situation aurait été très pénible et il lui aurait été difficile d’avoir un bon rendement dans ses études et au travail. Elle aurait pu l’épuiser, la distraire de son travail et rendre difficile de travailler avec ses collègues.

86        Mme Asare a répondu ce qui suit à cet égard : [traduction] « Vous m’obligez donc à choisir entre travailler ici et poursuivre mes études. »

87        M. Ruseski a répondu que l’obtention d’un congé d’études constituait un privilège et que l’équipe de direction acceptait ce genre de demande à sa discrétion. Il était d’avis qu’il appartenait à Mme Asare de choisir de redoubler d’efforts au travail ou de poursuivre ses études.

88        Mme Asare avait demandé à changer de superviseur, en dépit des efforts déployés par les deux parties pour améliorer leur relation. Elle ne s’entendait pas bien avec son superviseur et souhaitait relever de quelqu’un d’autre.

89        M. Ruseski croyait qu’il était trop tôt pour changer de superviseur et il voulait donner plus de temps afin de voir si l’arrangement en place pouvait fonctionner. D’autres outils disponibles n’avaient pas encore été utilisés, comme le programme d’aide aux employés (PAE) et la résolution informelle des conflits. En outre, il aurait été difficile de trouver un autre poste pour Mme Asare étant donné qu’elle travaillait dans une unité spécialisée en économie. Il voulait tenter de faire fonctionner les choses.

90        Mme Asare l’a informé que l’université lui avait dit récemment qu’elle ne pouvait plus soutenir sa poursuite d’études à temps partiel comme elle le faisait dans le cadre de l’arrangement officieux.

91        Le lendemain, le 12 août 2011, Mme Asare ne s’est pas présentée au travail. Elle a envoyé par télécopieur la copie d’un certificat médical à l’adjointe administrative de M. Ruseski ce jour-là. Ce certificat, signé par un médecin du Rideau-Friel Medical Centre, attestait que Mme Asare s’était rendue à la clinique et avait obtenu un congé jusqu’au 15 septembre pour des motifs d’ordre médical.

92        Quand il a eu connaissance de la situation, M. Ruseski avait l’impression qu’il s’agissait d’un moment important pour Mme Asare, puisqu’elle devait prendre des décisions et peut-être régler ses problèmes au travail. Il a supposé de bonne foi qu’il existait un problème médical légitime.

93        Le 16 août 2011, M. Ruseski a écrit à Mme Asare afin de confirmer quelques points administratifs et de réitérer un certain nombre de points dont ils avaient discuté pendant leur réunion du 11 août. Il l’a informée qu’il ne lui restait que 29,125 heures de congé de maladie payé et qu’afin d’éviter des trop-payés, il avait demandé à la Rémunération de lui donner un statut temporaire d’employé non rémunéré, en vigueur immédiatement et jusqu’à nouvel ordre. Il lui a aussi mentionné qu’elle recevrait un relevé d’emploi, ce qui lui permettrait de présenter une demande de prestations d’assurance-emploi. Il a confirmé que, pendant la réunion du 11 août, elle avait demandé à relever d’un autre superviseur, ce à quoi il avait répondu qu’il était trop tôt pour songer à le faire à ce moment.

94        En outre, il a confirmé qu’elle avait affirmé que son superviseur l’intimidait, mais qu’elle n’avait présenté aucune justification à l’appui de ces allégations. Il a fait remarquer que cette allégation avait été portée à l’attention du superviseur, qui l’avait niée. Il a aussi confirmé qu’ils avaient discuté de sa demande de congé d’études à long terme, qu’il n’était pas prêt à approuver, comme il lui avait répondu.

95        Il lui demandait d’acheminer le certificat médical original à son attention afin de couvrir son absence du travail pour maladie. Il lui a aussi indiqué que son accès au bureau avait été suspendu temporairement et qu’elle devait l’appeler si elle devait y accéder avant son retour. On lui avait dit qu’il s’agissait d’une pratique standard dans des situations de congé de maladie à long terme. Il lui a aussi indiqué qu’elle pouvait recourir à des services confidentiels de counseling par l’intermédiaire du PAE.

96        Le 15 septembre 2011, Mme Asare a envoyé un courriel à son superviseur et à Mme McFarlane en copie. Elle l’informait que son médecin lui avait ordonné de prendre congé jusqu’au 15 octobre 2011 pour des raisons médicales. La copie d’un certificat médical de la clinique des Services de santé de l’Université d’Ottawa attestant qu’elle serait absente pour des raisons médicales (maladie) du 14 septembre au 14 octobre 2011 était jointe au courriel. Elle a envoyé par télécopieur une copie du certificat médical et a indiqué qu’elle fournirait l’original à son retour au travail.

97        Le 17 octobre 2011, Mme Asare a envoyé un courriel à son superviseur et de nouveau à Mme McFarlane en copie. Elle l’informait que son médecin lui avait ordonné de prendre congé jusqu’au 18 novembre 2011 pour des raisons médicales. La copie d’un certificat médical de la clinique des Services de santé de l’Université d’Ottawa attestant qu’elle serait absente pour des raisons médicales (maladie) du 14 octobre au 18 novembre 2011 était jointe au courriel. Dans la colonne des commentaires, on indiquait que le retour au travail de Mme Asare se déroulerait graduellement.

98        Le 21 novembre 2011, Mme Asare a envoyé un courriel à son superviseur afin de l’informer qu’elle ne se sentait toujours pas bien et que son médecin avait prolongé le congé. Elle a joint la copie d’un certificat médical qui prolongeait son congé jusqu’au 3 janvier 2012.

99        On a demandé à M. Ruseski s’il avait pris des mesures en ce qui concerne l’absence de Mme Asare.Il a répondu qu’il n’avait pris aucune mesure et qu’il lui avait accordé le bénéfice du doute quant à l’existence d’un problème de santé légitime.

100        Le 2 janvier 2012, Mme Asare a envoyé un courriel à son superviseur, auquel elle joignait la copie d’un certificat médical qui prolongeait son congé jusqu’au 2 mars 2012 pour des raisons de maladie.

101        Le 9 janvier 2012, M. Ruseski a reçu un appel téléphonique de la coordonnatrice des opérations du département d’Économie de l’Université d’Ottawa. Elle l’a informé que Mme Asare était étudiante de cycle supérieur depuis l’automne 2011, qu’elle avait été assistante à l’enseignement pendant le semestre d’automne et qu’elle avait posé sa candidature pour être assistante à l’enseignement pendant le semestre d’hiver.

102        Elle lui a expliqué que le département d’Économie avait des règles quant au nombre d’heures que les candidats peuvent travailler à l’extérieur et qu’ils étaient limités s’ils voulaient être admissibles à occuper un emploi d’assistant à l’enseignement. Elle voulait que M. Ruseski lui donne de l’information sur le nombre d’heures que Mme Asare consacrait à son travail.

103        M. Ruseski, s’efforçant d’être discret, lui a répondu qu’il devrait communiquer avec Mme Asare avant de pouvoir communiquer ce genre d’information et qu’il lui reviendrait.

104        Il croyait qu’il devait communiquer officiellement avec Mme Asare puisqu’on lui avait dit qu’elle était inscrite au programme de cycle supérieur et qu’elle occupait un poste d’assistante à l’enseignement.Ce fait nouveau méritait une explication. Il a semé un doute dans son esprit quant à la légitimité de son congé de maladie.

105        Il a écrit une lettre à Mme Asare, dans laquelle il lui indiquait qu’elle était absente du travail pour cause de maladie depuis le 15 août 2011. Il lui a indiqué que l’Université d’Ottawa avait communiqué avec lui et l’avait informé qu’elle avait été employée en tant qu’assistante à l’enseignement pendant le semestre de l’automne 2011 et qu’elle avait posé sa candidature pour un autre poste d’assistante à l’enseignement pendant le semestre de l’hiver 2012. Il lui a demandé de se présenter à une réunion d’instruction le 2 février 2012 afin d’expliquer la situation et l’a informée qu’elle pouvait venir accompagnée d’une personne de son choix ou du représentant de son agent négociateur. L’original de la lettre a été envoyé par service de messagerie à son adresse domiciliaire et une version numérisée a été envoyée à l’adresse avec laquelle elle avait acheminé ses certificats médicaux.

106        Un messager a tenté de livrer la lettre à l’adresse et une carte d’avis de livraison a été laissée afin d’indiquer où la récupérer. Le destinataire ne l’a pas récupérée et elle a été renvoyée à l’expéditeur. Le courriel n’est pas revenu.M. Ruseski a conclu qu’elle avait reçu le courriel.

107        La fonctionnaire ne s’est pas présentée à la réunion et n’a pas communiqué avec M. Ruseski.

108        M. Ruseski a décidé d’effectuer un suivi auprès de l’Université d’Ottawa. Le 6 février 2012, il a écrit à la coordonnatrice des opérations qui avait communiqué avec lui le 9 janvier 2012 et l’a informée qu’il était incapable de fournir les renseignements qu’elle avait demandés sans le consentement de la fonctionnaire. Il a mentionné qu’il avait pris des mesures pour mettre Mme Asare au courant de la demande. En tant qu’employeur, il demandait à obtenir des renseignements supplémentaires sur son statut à l’université, soit les éléments qui suivent :

  • une confirmation de son inscription en tant qu’étudiante de cycle supérieur;
  • le nombre de cours de cycle supérieur qu’elle avait suivi pendant les semestres de l’automne 2011 et de l’hiver 2012;
  • une confirmation de travail sur une thèse de doctorat;
  • une confirmation de l’emploi en tant qu’assistante à l’enseignement pendant les semestres de l’automne 2011 et de l’hiver 2012;
  • le nombre d’heures de travail hebdomadaire lié à cette nomination;
  • la confirmation du nombre d’heures hebdomadaire qu’elle avait indiqué à l’université qu’elle travaillait pour l’employeur au cours des semestres de l’automne 2011 et de l’hiver 2012;
  • le nombre maximal d’heures que les étudiants de cycle supérieur peuvent se trouver à l’extérieur du campus et demeurer tout de même admissibles à des postes d’assistant à l’enseignement.

109        Le 10 février 2012, la coordonnatrice des opérations pour le département d’économie a répondu en indiquant qu’elle n’avait pas l’autorisation de la fonctionnaire pour divulguer les renseignements requis.

110        M. Ruseski a conclu que Mme Asare savait qu’il avait appris qu’elle était étudiante de cycle supérieur et assistante à l’enseignement à l’Université d’Ottawa et qu’elle n’allait pas répondre.

111        Il était d’avis qu’il avait le droit et la responsabilité, en tant que directeur, de rendre compte de ses employés et de déterminer s’il devrait approuver un congé de maladie dans une telle situation. Le ministère n’avait toujours pas reçu aucun des certificats médicaux originaux.

112        En raison de l’absence du travail de Mme Asare, il fallait établir l’ordre de priorité des dossiers et des projets parmi les autres employés vu la difficulté de la remplacer temporairement.

113        Le 22 février 2012, Mme Asare a envoyé un courriel à Mme McFarlane. Elle y joignait la copie d’un certificat médical et demandait à Mme McFarlane d’en acheminer des copies à la direction. Le certificat indiquait que Mme Asare serait absente du travail à partir du 12 août 2011, pour une période indéterminée, pour des raisons médicales. Le Dr Kilby l’avait signé.

114        Selon M. Ruseski, la situation était très différente de ce qu’il avait compris jusqu’à ce moment. Sa tentative en vue d’obtenir de l’information avait échoué et maintenant, un certificat médical portait à croire que la fonctionnaire s’absenterait pendant une période beaucoup plus longue. Il était méfiant et confus. Plus le congé de maladie durait longtemps, plus il était porté à croire qu’elle poursuivait manifestement ses études tout en travaillant en tant qu’assistante à l’enseignement.

115        Il a consulté Hugh Hards, des Relations de travail, afin de connaître la marche à suivre. Peu de temps après, M. Hards l’a appelé afin de l’informer qu’il avait eu un appel téléphonique avec M. Vézina, de l’agent négociateur. Mme Asare avait informé son représentant de l’agent négociateur que son médecin lui avait indiqué qu’elle ne devait avoir aucun contact avec son directeur.

116        À la suite du débreffage, M. Ruseski a appris que l’agent négociateur était au fait de la situation de Mme Asare; peut-être pourrait-il l’aider à communiquer avec elle?

117        C’est à ce moment qu’il a appris que Mme Asare ne voulait pas communiquer avec lui. Il ne comprenait pas pourquoi c’était avec lui qu’elle ne voulait pas communiquer.Il était le directeur responsable.C’était à lui que les formulaires de congé de maladie étaient envoyés.

118        Il a consulté M. Hards, qui à son tour a consulté un médecin à Santé Canada. Ce dernier leur a suggéré de demander à Mme Asare de subir une évaluation d’aptitude au travail.

119        Le 20 avril 2012, M. Ruseski a informé le secteur de la rémunération et des avantages sociaux que Mme Asare était présumée se trouver en congé non payé non autorisé depuis le 9 août 2011 et jusqu’à nouvel ordre. Cela a été fait en consultation avec les secteurs des relations de travail et de la rémunération et des avantages sociaux, puisqu’ils n’avaient reçu aucun certificat médical original ou aucun formulaire de demande de congé approprié de Mme Asare.

120        Le 22 avril 2012, Mme Asare a écrit au secteur de la rémunération et des avantages sociaux à propos de la production de la déclaration de l’employeur pour finaliser le traitement de sa demande d’assurance-invalidité auprès de la Sun Life.

121        Le 23 avril 2012, Michèle Caron, une conseillère en rémunération et en avantages sociaux, a appelé M. Ruseski afin de l’informer qu’elle avait eu une conversation téléphonique difficile avec la mère de Mme Asare, qui l’avait informée que Mme Asare était malade et que la Sun Life attendait que l’employeur envoie les documents requis pour traiter sa demande d’assurance-invalidité. Quand Mme Caron lui a conseillé de parler à M. Ruseski, elle a raccroché.

122        Le 26 avril 2012, M. Ruseski a écrit à Mme Asare à propos de son absence continue du travail. Cette lettre a aussi été acheminée aux adresses courriel de Mme Asare. Dans cette lettre, il exposait les événements qui s’étaient produits depuis le mois d’août 2011 et il lui demandait de subir une évaluation d’aptitude au travail menée par Santé Canada afin de déterminer si elle était apte à retourner au travail. Il a joint à cette lettre deux formulaires de consentement devant être retournés directement à Santé Canada.

123        Il lui indiquait aussi qu’elle était réputée se trouver en congé non autorisé entretemps, jusqu’à nouvel ordre, et que sa demande d’assurance-invalidité ne pourrait donc pas être traitée. Il lui a également indiqué que son défaut de signer les formulaires de consentement pourrait donner lieu à la prise de mesures administratives.

124        La lettre portait sa signature puisqu’il demeurait le directeur responsable. Il espérait que l’agent négociateur communiquerait avec Mme Asare.

125        Si elle consentait à subir une évaluation d’aptitude au travail, un professionnel en aptitude au travail communiquerait avec elle et M. Ruseski ne serait pas impliqué directement.

126        La lettre a été envoyée par service de messagerie à son adresse domiciliaire. Elle a été numérisée et envoyée à plusieurs autres de ses adresses de courriel. Certains messages ont été retournés au motif qu’ils n’avaient pu être livrés. Mme McFarlane a appelé au numéro de téléphone de Mme Asare afin de l’informer qu’une correspondance officielle lui serait livrée.

127        Le 30 avril 2012, le père de Mme Asare a téléphoné à M. Ruseski. Selon M. Ruseski, M. Asare lui a dit qu’il lui était interdit de communiquer avec la fonctionnaire et a ajouté [traduction] « Comment osez-vous? Comment osez-vous? » avant de raccrocher. M. Ruseski n’a eu aucune chance d’expliquer le contenu de la correspondance.

128        La lettre, la trousse d’information et les formulaires de consentement ont été retournés et on indiquait qu’ils avaient été [traduction] « refusés d’être acceptés ».

129        M. Ruseski a rempli la majeure partie du formulaire de demande d’assurance-invalidité de Mme Asare. Il voulait s’assurer que quiconque examinerait le dossier à la Sun Life sache qu’aucun formulaire de congé approprié n’avait été signé et que l’on avait tenté de communiquer avec la fonctionnaire. La Sun Life n’a jamais communiqué avec lui et on ne l’a pas informé du règlement de la demande.

130        Il a de nouveau tenté de communiquer avec Mme Asare. Le 3 août 2012, il lui a envoyé une lettre dont des copies ont été envoyées à plusieurs de ses adresses de courriel. Dans cette lettre, il lui écrivait entre autres qu’il voulait obtenir son consentement afin de communiquer avec le Dr Kilby, qui avait fourni un certificat médical indiquant qu’elle était absente du travail pour des raisons médicales, pour une période indéterminée.

131        Il a joint un formulaire de consentement qui serait envoyé à son médecin afin de déterminer sa date de retour au travail et d’indiquer toute limitation pour laquelle il faudrait prendre des mesures d’adaptation.Il lui demandait de signer le formulaire et de le retourner au plus tard le 31 août 2012. Il l’a aussi informée que son défaut de donner son consentement pourrait donner lieu à la prise de mesures administratives, qui pourraient inclure son licenciement motivé.

132        On lui a demandé pourquoi il n’avait pas envoyé une copie de la lettre à l’agent négociateur ou à la Sun Life.Il a répondu qu’il avait rédigé la lettre en suivant les conseils des Relations de travail. Il n’était pas à l’aise avec les inquiétudes relatives à la protection des renseignements personnels qu’aurait pu entraîner l’envoi d’une copie à l’agent négociateur ou à la Sun Life. Personne n’avait dit que l’agent négociateur représentait Mme Asare.

133        Il n’a pas reçu de réponse à sa demande de communiquer avec le Dr Kilby.La trousse de documents a été renvoyée par service de messagerie le 19 septembre 2012.Le motif du retour était [traduction] « non réclamé ». Tous les courriels envoyés aux différentes adresses sont revenus, sauf celui envoyé à l’adresse courriel de l’Université d’Ottawa de Mme Asare.

134        Le 31 octobre 2012, étant donné que Mme Asare était absente du travail depuis plus d’un an et qu’elle n’avait répondu à aucune demande de renseignements, il lui a envoyé une lettre par service de messagerie et par courriel afin de lui exposer la chronologie des événements depuis son départ du bureau, le 15 août 2011. Il lui exigeait de se présenter à son bureau le vendredi 9 novembre 2012 à 10 h afin d’expliquer les motifs de son absence. Il a fait remarquer que son défaut de se conformer à cette directive pourrait entraîner la cessation de son emploi dans la fonction publique.

135        On a tenté une livraison à domicile et une carte d’avis a été laissée afin d’indiquer où récupérer l’article.La lettre n’a pas été récupérée. Selon le dossier de Postes Canada, la livraison de l’article a été refusée. Il a été renvoyé à l’expéditeur.

136        Il n’y a eu aucune réponse au courriel.

137        M. Ruseski a déterminé qu’il avait épuisé ses démarches. L’organisation fonctionnait à court d’une ressource depuis plus d’un an. Il a conclu que Mme Asare ne souhaitait pas occuper son poste et ne souhaitait pas retourner au travail. Elle avait décidé de poursuivre ses études.

138        Le 16 novembre 2016, une lettre a été livrée par service de messagerie à l’adresse domiciliaire de Mme Asare.On y exposait les faits et on indiquait en partie ce qui suit :

[Traduction]

[…]

J’ai examiné les circonstances entourant votre absence « non autorisée » du travail et j’ai pris en considération le fait que vous n’avez pas répondu aux lettres qui vous avaient été envoyées. Étant donné que vous n’avez pas communiqué avec moi afin d’expliquer les circonstances entourant votre absence du travail, j’en conclus que vous avez volontairement et intentionnellement abandonné votre poste d’économiste subalterne chargé de recherches […]

[…]

Par conséquent, conformément à l’alinéa 12(1)e) de la Loi sur la gestion des finances publiques, je mets fin à votre emploi pour un motif valable […] à compter du 16 novembre 2012, à la fermeture des bureaux.

Vous avez le droit de déposer un grief si vous croyez que cette mesure est injustifiée.

[…]

139        Une copie de la lettre a été envoyée à l’agent négociateur.

Contre-interrogatoire

140        Avant le mois d’août 2011, Mme Asare avait une relation de travail officieuse en ce qui concernait ses études.

141        Son superviseur avait parlé à M. Ruseski d’un arrangement impliquant un programme d’études officieux et une réorganisation de son horaire à temps plein afin de répondre à ses besoins.M. Ruseski a accepté de procéder, suivant la recommandation du superviseur.

142        M. Ruseski a reconnu que le superviseur de la fonctionnaire avait approuvé son inscription à deux cours et qu’il n’avait aucune raison de contester le fait qu’elle avait un horaire de travail flexible à l’automne 2010.

143        M. Ruseski a reconnu avoir participé à son examen de rendement pour l’exercice allant du 1er avril 2010 au 31 mars 2011 le 9 juin 2011. On a indiqué qu’elle avait réussi son année et qu’elle avait livré tous ses produits livrables. Il a reconnu que son rendement ne l’inquiétait pas avant le 31 mars 2011.

144        On a demandé à M. Ruseski si des préoccupations avaient été soulevées pendant la réunion. Il a répondu qu’il s’agissait d’un moment délicat dans la relation entre la fonctionnaire et son superviseur, ce qui explique sa présence à la réunion. Mme Asare lui avait fait part de ses préoccupations à l’égard de son superviseur à la fin du mois d’avril 2011.

145        M. Ruseski a reconnu qu’il lui incombe de répondre aux préoccupations soulevées par le personnel ou la direction en ce qui concerne l’offre d’un environnement de travail sécuritaire et sain et qu’il est responsable de trouver des solutions aux problèmes.

146        On l’a renvoyé à sa lettre du 11 août 2011 sur la demande de congé d’études de Mme Asare, dans laquelle il était aussi question d’un certain nombre de problèmes liés au travail. L’un des paragraphes de cette lettre se lit comme suit :

[Traduction]

[…]

[…] le 26 avril 2011, pendant une réunion bilatérale avec moi, organisée à votre demande, vous avez décrit une série de plaintes accumulées à l’égard de votre superviseur depuis le mois d’août 2010. Vous avez indiqué que l’on vous avait conseillé d’attendre la fin de votre période de probation avant de déposer ces plaintes. Vous aviez aussi mentionné au préalable qu’un représentant de votre syndicat serait présent à la réunion, mais il ne s’est jamais présenté.

Parmi les plaintes déposées à l’égard de votre superviseur à ce moment, notons les suivantes :

  • avoir cogné votre bras une fois sans s’excuser;
  • dire que vous étiez laide devant d’autres employés;
  • sous-entendre une fois que vous n’aviez pas cité adéquatement vos sources et vos références dans un rapport sur lequel vous travailliez;
  • demander une fois à une personne de réviser votre travail à des fins de contrôle de la qualité;
  • vous faire dire que vous deviez assister à une réunion alors que d’autres employés n’étaient pas obligés d’y assister.

Lorsque vous avez par la suite porté ces plaintes à l’attention de votre superviseur, comme je vous l’ai conseillé, il a nié que ces événements s’étaient produits ou il a répondu que vous aviez mal interprété ce qui avait été dit; il a néanmoins indiqué qu’il était désolé d’avoir cogné votre bras (même s’il ne se souvenait pas de l’avoir fait).

[…]

147        Il n’arrivait pas à se souvenir si Mme Asare avait présenté ses plaintes par écrit de façon détaillée.

148        On a renvoyé M. Ruseski à une ligne dans cette lettre, où il est indiqué qu’on lui avait dit qu’elle avait porté plusieurs autres allégations ou préoccupations infondées à l’attention de son superviseur.On lui a aussi demandé ce qui lui avait permis de conclure qu’elles étaient infondées.Il a répondu que certaines d’entre elles étaient choquantes, selon lui.Elle ne lui avait donné aucun détail.Il n’arrivait pas à s’y retrouver. On lui a dit qu’elle avait déposé une plainte de harcèlement à l’encontre de son superviseur en juillet 2011.

149        D’avril à juillet 2011, quand certains de ces problèmes ont été portés à son attention, M. Ruseski a rencontré le superviseur de la fonctionnaire. Celui-ci s’était montré surpris par les incidents, était en désaccord avec la version présentée ou ne s’en souvenait pas.Certains de ces événements s’étaient produits 9 ou 10 mois plus tôt.Selon lui, il aurait été plus approprié de ne pas les laisser s’accumuler.

150        M. Ruseski a reconnu qu’il était possible que certaines des allégations soient graves. On lui a demandé si elles étaient vraies ou pas et s’il croyait qu’elles se faisaient sentir sur la santé de Mme Asare. Il a répondu qu’il l’ignorait, mais il a bien remarqué qu’elles avaient eu une incidence sur les relations de travail. Il n’était pas convaincu qu’elles étaient toutes graves; il avait encouragé Mme Asare à en discuter avec son superviseur et il l’avait empressée d’obtenir l’aide du PAE si elle était préoccupée par son bien-être.

151        La fonctionnaire a déposé sa plainte de harcèlement à l’encontre de son superviseur le 15 juillet 2011 auprès du sous-ministre adjoint.M. Ruseski n’a pas participé au processus.Il ne connaissait pas l’objet de la plainte et celui-ci ne lui a pas été divulgué.

152        M. Ruseski a reconnu que Mme Asare lui avait fait part de ses préoccupations relatives à l’intimidation au travail quand sa sœur et elle l’ont rencontré, le 11 août 2011.Il a indiqué avoir été étonné.C’était la première fois qu’il entendait les allégations. On lui a fait remarquer qu’elle avait bien soulevé les problèmes d’intimidation par son superviseur pendant la réunion du mois d’avril. Il a répondu que ces allégations étaient inattendues et incohérentes avec sa connaissance des membres de l’équipe.

153        Il lui a donné la lettre du 11 août à la réunion. Dans la lettre, en plus de rejeter la demande de congé d’études, on indiquait qu’elle s’était engagée sur une voie de comportements perturbateurs.

154        M. Ruseski n’a pas mené une autre enquête parce que l’on avait conclu qu’il n’y avait eu aucun harcèlement. Le sous-ministre adjoint l’avait mis au courant de l’issue de la plainte de harcèlement déposée par Mme Asare, mais pas sur le fond des allégations. Il a reconnu que son comportement était inquiétant et qu’il fallait le corriger. Il fallait aussi qu’elle communique plus fréquemment avec son superviseur, qui espérait que cela se produise.

155        On lui a demandé si le superviseur avait reçu une lettre. Il a répondu qu’il n’avait pas remarqué que le superviseur affichait un comportement perturbateur au travail.

156        Le comportement perturbateur de Mme Asare au travail s’est manifesté pour la première fois après le mois de mai 2011.

157        Il n’a pas fourni de copie de la lettre du 11 août à l’agent négociateur, selon les conseils des relations de travail. Dans cette lettre, on informait Mme Asare que son superviseur était la personne-ressource appropriée pour présenter des demandes de congé et faire part des problèmes qu’elle éprouvait au travail. On l’a indiqué parce qu’elle avait demandé à un autre directeur dont elle ne relevait pas d’approuver sa demande de congé d’étude à long terme alors que M. Ruseski et son superviseur n’étaient pas disponibles pendant une journée.

158        Le 12 août 2011, Mme Asare a envoyé par télécopieur un certificat médical à Mme McFarlane qui lui donnait congé jusqu’au 15 septembre pour des raisons médicales.

159        M. Ruseski a reconnu que la lettre du 16 août 2011 était un suivi à celle du 11 août.Mme Asare n’a pas reçu la lettre; elle ne l’a vue qu’à l’audience. Dans la lettre, il confirmait qu’il ne la transférerait pas à un autre superviseur étant donné qu’il était trop tôt pour songer à le faire à ce moment, que l’allégation selon laquelle elle était victime d’intimidation par son superviseur était infondée et qu’il n’était pas prêt à approuver sa demande de congé d’études à long terme. On confirmait aussi qu’elle devrait acheminer à M. Ruseski le certificat médical original qui couvrait son absence du travail pour cause de maladie depuis le 15 août 2011 ainsi qu’un formulaire de demande de congé de maladie. Enfin, on confirmait que son accès au bureau avait été suspendu temporairement et qu’elle devait l’appeler si elle devait y accéder avant son retour.

160        Le 15 septembre 2011, Mme Asare a acheminé la copie d’un autre certificat médical, qui lui accordait un congé jusqu’au 15 octobre 2011, à son superviseur et à Mme McFarlane. M. Ruseski n’a pas répondu afin de lui dire qu’elle devait procéder différemment pour cette demande de congé ou pour toutes les demandes de congé subséquentes présentées en 2011. Il a indiqué que son absence pour congé de la maladie n’avait pas été remise en question avant ce moment.

161        On a demandé à M. Ruseski s’il savait, au début du mois de décembre 2011, si Mme Asare songeait à présenter une demande de prestations d’assurance-invalidité. Il a répondu qu’à ce moment, la relation entre le ministère et elle se déroulait plus au niveau du conseiller en rémunération qu’à celui des cadres hiérarchiques.

162        On l’a interrogé sur la lettre envoyée à Mme Asare le 22 janvier 2012, où il était question de sa discussion avec l’Université d’Ottawa, le 9 janvier, et où il demandait à la rencontrer le 2 février 2012. On a fait remarquer qu’une copie de la lettre avait été envoyée au secteur des relations de travail, mais pas au secteur de la rémunération et des avantages sociaux ou à l’agent négociateur de Mme Asare.

163        En ce qui concerne la lettre datée du 6 février 2012 envoyée à l’Université d’Ottawa, on a demandé à M. Ruseski s’il avait demandé à l’université d’obtenir le consentement de Mme Asare. Il a répondu qu’il avait demandé à obtenir son consentement dans la lettre qu’il lui avait envoyée et il croyait que l’étape suivante appropriée était de communiquer avec l’université.

164        Il savait qu’elle avait fourni des certificats médicaux pour son absence.

165        Il ne se souvenait pas d’avoir approché quiconque au secteur de la rémunération et des avantages sociaux avant d’écrire à l’Université d’Ottawa.

166        M. Ruseski a été surpris quand il a reçu le certificat médical daté du 22 février 2012, qui indiquait que Mme Asare serait absente pour une période indéterminée pour des raisons médicales. On lui a demandé s’il était possible qu’elle ait été malade et qu’elle n’ait pas pu retourner au travail pour des raisons médicales. Selon les renseignements que l’Université d’Ottawa lui avait donnés, il savait qu’elle avait travaillé. Il ne savait plus qui croire. Suivant les conseils des relations de travail, il a décidé de suivre la voie de Santé Canada.

167        Le 20 avril 2012, M. Ruseski a informé Nadine Lalonde, du secteur de la rémunération et des avantages sociaux, que Mme Asare était présumée se trouver en congé non payé non autorisé depuis le 9 juin 2011 et cela jusqu’à nouvel ordre.Il ne lui a pas demandé de faire un suivi après de Mme Asare.Les formulaires de demande de congé appropriés n’avaient pas été remplis.

168        En ce qui concerne la lettre du 26 avril 2012 envoyée à Mme Asare, on lui a demandé s’il pouvait confirmer qu’elle l’avait reçue.Il a répondu qu’il ne pouvait pas le confirmer sans un reçu de confirmation.

169        On a demandé à M. Ruseski si sa déclaration selon laquelle le défaut de signer les formulaires de consentement et de les renvoyer à Santé Canada pouvait donner lieu à la prise de mesures administratives était différente de la prise de mesures disciplinaires.Il a répondu qu’il ne voyait aucune différence.Il a reconnu que l’agent négociateur n’avait pas reçu une copie de la lettre, tout comme le secteur de la rémunération et des avantages sociaux.Des discussions ont peut-être eu lieu avec le secteur des relations de travail.

170        On l’a renvoyé à un paragraphe de la lettre où il est indiqué qu’on l’avait informé que Mme Asare avait présenté une demande d’assurance-invalidité et que cette demande ne pouvait pas être traitée puisqu’elle était en congé non autorisé. Il était d’avis que les formulaires de congé appropriés et les certificats médicaux originaux devaient être présentés à l’appui de la demande. On lui a demandé s’il avait vu la lettre envoyée par Mme Asare à Mme Lalonde datée du 22 avril 2012, qui portait sur des documents que l’employeur n’avait toujours pas envoyés à la Sun Life pour traiter la demande. Il a répondu qu’il ne l’avait pas vu.

171        On l’a renvoyé aux notes qu’il a prises sur une discussion avec Mme Caron, qui l’avait informé de la conversation téléphonique difficile avec la mère de Mme Asare, qui, quand on lui a dit de parler à M. Ruseski, a répondu qu’elle ne devait pas lui parler.

172        On a demandé à M. Ruseski s’il avait demandé à Mme Lalonde ou à Mme Caron du secteur de la rémunération et des avantages sociaux de téléphoner à Mme Asare en son nom afin de connaître son statut à l’université et de l’informer qu’à défaut de clarifier la situation, elle pouvait être licenciée. Il a répondu qu’il ne l’a pas fait et qu’elles étaient toutes deux des conseillères en rémunération et en avantages sociaux.

173        D’après son souvenir, la Sun Life n’a jamais communiqué avec lui afin de lui demander de remplir la déclaration de l’employeur pour la demande d’assurance-invalidité. On lui a demandé à quel moment il avait appris que la Sun Life avait approuvé la demande d’assurance-invalidité de Mme Asare. Il a répondu [traduction] « aujourd’hui », soit le jour de l’audience.

174        Dans une lettre datée du 31 juillet 2012 envoyée par la Sun Life à Mme Asare, on l’informait que sa demande de prestations d’assurance-invalidité avait été approuvée à compter du 14 décembre 2011.M. Ruseski n’en a pas obtenu une copie.Une copie de la lettre a été envoyée au « conseiller en rémunération ». Il ne se souvenait pas d’avoir demandé à connaître l’état de sa demande ou d’en avoir été informé.

175        La lettre du 3 août 2012, dans laquelle il demande à Mme Asare de consentir à ce qu’il communique avec son médecin, a été préparée selon les conseils des Relations de travail. On lui a demandé s’il devait vraiment obtenir son consentement, parce qu’il avait écrit à l’Université d’Ottawa sans l’avoir obtenu. Il a répondu qu’il suivait les conseils qu’il avait reçus.

176        On a renvoyé M. Ruseski à un paragraphe d’un courriel que M. Hards lui avait envoyé, daté du 24 février 2012, qui indique ce qui suit : [traduction] « Si l’employé refuse de coopérer/refuse de signer les formulaires de consentement/refuse de subir une évaluation d’aptitude au travail, le Dr Given nous a conseillé […] d’écrire à son médecin afin de lui faire part de nos préoccupations et de nos questions. Le Dr G a indiqué qu’il nous orienterait dans la rédaction de la lettre. »

177        Il n’a pas écrit au Dr Kilby; il n’avait aucune preuve non plus selon laquelle Santé Canada lui avait écrit. Il n’a jamais appelé le Dr Kilby ou tout autre médecin de Mme Asare.

178        M. Ruseski a rempli la déclaration de l’employeur pour la demande d’assurance-invalidité de Mme Asare le 15 mai 2012. Après avoir décrit les principales fonctions du poste, il faut répondre à la question suivante indiquée dans la demande : [traduction] « Quand la maladie ou la blessure de l’employé a-t-elle commencé à se faire sentir sur son travail? » La réponse fournie est « 27/04/2011 ».

179        Voici la question suivante : [traduction] « Selon vos observations, la capacité de l’employé à effectuer son travail a-t-elle changé? » La case de réponse cochée est « Oui ». Sous la mention [traduction] « Dans l’affirmative, veuillez fournir une explication », il est indiqué ce qui suit : [traduction] « Depuis la fin du mois d’avril 2011, le superviseur immédiat a commencé à remarquer que l’employé avait un comportement de plus en plus irrégulier et que son rendement se détériorait. En particulier, elle n’arrivait pas à se concentrer, elle était confuse, anxieuse, renfermée et perturbatrice. »

180        Voici la question suivante : [traduction] « Des changements ont-ils été apportés au travail de l’employé en raison de la maladie ou de la blessure? » La case de réponse cochée est « Oui ». Voici ce qui était indiqué sous la mention [traduction] « Dans l’affirmative, quels sont les changements apportés et à quel moment l’ont-ils été? » :

[Traduction]

L’organisation a pris des mesures pour offrir un environnement de travail différent : on a encouragé l’employée à recourir au PAE; son plan d’apprentissage a été structuré afin de faciliter son adaptation dans un milieu de travail professionnel; elle a communiqué plus souvent avec son gestionnaire et les autres employés.

181        Voici la question suivante : [traduction] « Si l’employé pouvait retourner au travail selon un horaire réduit ou un changement à ses fonctions, un poste serait-il disponible? » La case de réponse cochée est « Non ».Sous la mention [traduction] « Veuillez expliquer », on indique ce qui suit :

[Traduction]

L’organisation est petite et souvent appelée à répondre à des demandes urgentes et spéciales ou à participer à des réunions organisées à court préavis.L’employée possède une expérience spécialisée qui ne lui permet pas de travailler dans d’autres sections de la direction générale ou du secteur.

182        On lui a demandé s’il se souvenait que Mme Asare avait été considérée comme apte au travail vers le mois de février 2013. Il a semblé se souvenir qu’elle avait communiqué avec le ministère; il n’était toutefois pas certain si cela avait eu lieu pendant cette période.

183        Dans la lettre de licenciement datée du 16 novembre 2012, on ne renvoie aucunement à la demande d’assurance-invalidité présentée à la Sun Life.L’agent négociateur a reçu une copie de la lettre, selon les directives des Relations de travail.

184        Le 29 novembre 2012, Mme Asare a écrit à M. Vézina, de l’agent négociateur. Elle a joint une plainte qu’elle déposait à l’encontre de M. Ruseski, où elle indiquait qu’elle aimerait déposer un grief à son égard pour manquement à son obligation de protéger sa santé et sa sécurité, pour avoir indiqué que son absence n’était pas autorisée dans la déclaration de l’employeur pour la Sun Life et pour sa tentative de sabotage de sa demande d’assurance-invalidité.

185        Un certain nombre des allégations soulevées dans la plainte ont été présentées à M. Ruseski.Voici ce qui avait été allégué :

[Traduction]

Le 26 juillet 2011, M. Ruseski a informé le collègue principal que j’avais déposé une plainte de harcèlement. Trois jours plus tard, il s’est rendu au bureau du collègue principal et l’a informé que la plainte de harcèlement avait été rejetée. Je les ai entendus se réjouir du rejet de ma plainte de harcèlement.

[…]

186        M. Ruseski ne se souvenait pas de s’être réjoui quand il a appris que la plainte de harcèlement avait été rejetée.

187        Il a été allégué que le 9 août 2011, Mme Asare s’est rendue à son bureau afin de présenter une demande officielle de congé personnel pour une durée d’environ un an et qu’il avait insisté pour qu’il s’agisse d’un congé d’études.Il ne se souvenait pas de cet événement. Il se souvenait toutefois d’avoir vu un formulaire de demande de congé personnel qu’elle avait demandé à un autre directeur de signer. Il se souvenait d’avoir eu une discussion avec elle, à la suite de laquelle elle avait présenté une demande de congé d’études.

Réinterrogatoire

188        Aucun grief n’a été déposé sur le refus de la demande de congé d’études présentée par Mme Asare et sur sa demande de relever d’un autre superviseur.

189        La réunion du 11 août 2011 a été organisée à la demande de M. Ruseski. Selon son souvenir, on ne lui a jamais demandé personnellement de faire enquête sur les allégations de harcèlement par le superviseur de Mme Asare.

190        Aucun grief n’a été déposé parce qu’aucune enquête n’avait été menée sur sa plainte écrite. M. Ruseski croyait qu’elle était suffisamment au fait de la raison pour laquelle sa plainte avait été rejetée après le débreffage que le sous-ministre adjoint lui avait fait.

191        On avait dit à Mme Asare qu’elle pouvait se présenter avec un représentant de l’agent négociateur à la réunion qui aurait lieu avec lui le 11 août 2011.Elle est venue accompagnée de sa sœur.

192        Avant l’appel de M. Vézina à M. Hards, M. Ruseski ignorait qu’elle souhaitait l’implication de l’agent négociateur dans son dossier.

193        M. Ruseski ne se souvenait pas d’avoir informé le superviseur de Mme Asare que celle-ci avait déposé une plainte de harcèlement à son encontre. Il ne se souvenait certainement pas de s’être réjoui quand il a appris que la plainte était rejetée et il a indiqué qu’il irait même jusqu’à le démentir.

194        M. Ruseski a reconnu avoir insisté pour que sa demande de congé soit pour un congé d’études après leur réunion du 9 août 2011.

195        Il a nié s’être vanté qu’il était du côté du superviseur.

196        M. Ruseski a affirmé qu’il connaissait la politique contre le harcèlement et les lignes directrices à l’intention des employeurs et des gestionnaires.Le gestionnaire délégué doit examiner tous les renseignements pertinents.C’est le sous-ministre adjoint qui était le gestionnaire délégué.Il comprenait qu’il s’agissait d’un processus confidentiel.

2. Mme McFarlane

197        En tout temps pertinent aux présentes, Mme McFarlane était l’adjointe administrative de M. Ruseski. Elle surveillait ses courriels, planifiait ses rendez-vous, examinait son calendrier et gérait les déplacements de 8 à 18 employés environ.

198        Le 14 novembre 2011 ou vers cette date, Mme Asare lui a demandé par courriel d’acheminer toutes les copies des certificats médicaux et de la correspondance depuis le 12 août 2011 jusqu’à ce jour à Mme Caron.

199        Mme McFarlane a décrit le processus qu’elle suivait quand elle envoyait une lettre par service de messagerie au nom de M. Ruseski. Elle communiquait avec les Relations de travail et prenait les dispositions pour que le secteur envoie la lettre par service de messagerie. Les Relations de travail lui acheminaient ensuite l’avis de suivi. À titre d’exemple, la lettre datée du 26 avril 2012 et acheminée par service de messagerie à Mme Asare a été renvoyée à l’expéditeur puisqu’elle n’avait pas été récupérée dans les 10 jours suivant la tentative de livraison et le dépôt d’une carte d’avis.

200        Mme McFarlane avait utilisé l’adresse domiciliaire, les adresses courriel et les numéros de téléphone que Mme Asare avait indiqués dans sa lettre de présentation datée du 26 novembre 2009, quand elle avait posé sa candidature pour le poste. L’adresse domiciliaire était à Gatineau (Québec), tandis que les adresses de courriel provenaient de l’Université d’Ottawa et du fournisseur Internet de courriel Yahoo. L’un des numéros de téléphone indiquait l’indicatif régional 819 tandis que l’autre indiquait le 613; ce dernier avait été désigné en tant que numéro de téléphone cellulaire.

201        Mme McFarlane a reçu des copies de certificats médicaux à l’automne 2011 en provenance d’une adresse de courriel Yahoo différente de celle indiquée dans la lettre de présentation de la fonctionnaire. Cet événement s’est reproduit le 22 février 2012; à ce moment, l’adresse Yahoo était différente de celle utilisée à l’automne 2011.

202        On a demandé à Mme McFarlane ce qui était arrivé avec la livraison effectuée par service de messagerie à Mme Asare le 26 avril 2012.

203        Le 27 avril 2012, elle a envoyé un courriel à Mme Asare afin de l’informer que l’employeur avait envoyé de la correspondance importante à l’adresse de Gatineau indiquée dans sa lettre de présentation et qu’elle devrait la recevoir le lundi 30 avril 2012. On a aussi indiqué que Mme McFarlane avait envoyé des copies de la correspondance à cinq adresses de courriel, y compris les deux indiquées dans la lettre de présentation de la fonctionnaire, ainsi qu’à celles qu’elle avait utilisées à l’automne 2011 et en 2012 pour soumettre les copies des certificats médicaux. Dans le courriel, on indiquait aussi que Mme McFarlane appellerait à trois numéros de téléphone afin d’informer la fonctionnaire au sujet de l’article de correspondance ou qu’elle laisserait un message afin de l’informer de la livraison de la correspondance. Deux des numéros de téléphone étaient indiqués dans la lettre de présentation de Mme Asare.

204        Elle a composé le numéro de téléphone comportant l’indicatif régional 819 qui avait été désigné comme numéro de téléphone à la maison et on lui a indiqué que la ligne avait été coupée. Elle a composé le numéro qui avait été désigné comme le numéro de téléphone cellulaire de Mme Asare. Au bout de neuf sonneries, quelqu’un a répondu. Elle a demandé à parler à Mme Asare; on lui a répondu qu’elle avait composé le mauvais numéro. Elle a composé l’autre numéro et au bout de six sonneries, on lui a dit que la boîte vocale était pleine.

205        Elle a envoyé des courriels aux quatre adresses Yahoo et a été informée que l’utilisateur ou les utilisateurs n’avaient pas de compte. Un courriel envoyé au compte de courriel de l’Université d’Ottawa a été livré.

206        Le 27 avril 2012 en après-midi, Mme McFarlane a répondu au téléphone de M. Ruseski.On l’a informée que c’était M. Asare qui appelait.Il voulait savoir qui avait appelé chez lui cet après-midi-là.Il lui a aussi indiqué que la mère de Mme Asare était aussi au bout du fil. Mme McFarlane leur a dit qu’elle avait envoyé une enveloppe par service de messagerie à Mme Asare et qu’elle devrait la recevoir le lundi. Mme Asare lui a demandé ce que contenait l’enveloppe, ce à quoi Mme McFarlane a répondu qu’elle l’ignorait.Mme Asare lui a indiqué qu’elle n’ouvrirait rien avant de savoir ce qui était indiqué dans la lettre et que la lettre serait renvoyée.Mme McFarlane ne leur a pas dit ce qui était indiqué dans la lettre. Elle était scellée et M. Ruseski lui avait dit qu’elle était confidentielle. Pour autant qu’elle s’en souvînt, le paquet a été refusé.

207        Le 7 août 2012, Mme McFarlane a écrit à Mme Asare aux cinq adresses de courriel indiquées au dossier afin de l’informer que le ministère avait envoyé par service de messagerie une correspondance importante à son attention à l’adresse de Gatineau et qu’elle devrait la recevoir le mercredi 8 août 2012.

208        Tous les courriels envoyés aux adresses Yahoo ont été retournés.Ce ne fut pas le cas avec le compte de courriel de l’Université d’Ottawa.

209        Postes Canada a retourné le paquet en indiquant qu’il n’avait pas été réclamé.

210        La lettre datée du 31 octobre 2012 à l’attention de Mme Asare lui a été envoyée par service de messagerie. Mme McFarlane a indiqué qu’elle supposait qu’elle avait suivi la même procédure que celle qu’elle avait suivie pour les envois précédents. Le destinataire à l’adresse de Gatineau a refusé la lettre, qui a elle aussi été renvoyée à l’expéditeur.

211        La lettre datée du 16 novembre 2012, qui était la lettre de licenciement, a été envoyée à Mme Asare par service de messagerie. La livraison a été tentée le 20 novembre 2012 à l’adresse de Gatineau et une carte d’avis a été laissée afin d’indiquer où récupérer la lettre. Elle a été renvoyée avec la mention [traduction] « non-réclamé ».

Contre-interrogatoire

212        Mme McFarlane a confirmé qu’elle ignorait le contenu de la lettre du 26 avril 2012 lorsqu’elle en a informé M. Asare.Elle ne savait pas s’il l’avait appelée de son travail.Elle a entendu un bip.Elle ne savait pas si l’appel téléphonique avait été enregistré.

213        On a demandé à Mme McFarlane s’il était possible que les parents de la fonctionnaire l’aient informée que Mme Asare était malade. Elle a répondu que c’était impossible et qu’elle l’aurait indiqué par courriel à M. Ruseski s’ils l’avaient fait.

B. Pour la fonctionnaire s’estimant lésée

1. Elle-même

214        Mme Asare a commencé à travailler à Affaires autochtones et du Nord Canada en janvier 2010, peu de temps après avoir terminé sa maîtrise. Un courriel avait été envoyé à l’Université d’Ottawa afin d’indiquer que l’employeur était à la recherche d’économistes. Elle s’était sentie très heureuse d’avoir réussi à trouver un poste dans un domaine où elle pouvait mettre à profit sa maîtrise, en plus d’avoir un bon salaire et de bons avantages sociaux.

215        Ses fonctions à ce moment comprenaient la collecte de données, la poursuite de recherches et l’offre de services économiques à la direction, à la direction générale et au secteur. Le secteur de recherche où elle était affectée comptait de 4 à 5 employés, tandis que la direction dans son ensemble en comptait de 14 à 15.

216        Elle avait terminé sa maîtrise en 2009 et avait commencé à poser sa candidature pour des emplois.Elle avait donné quelques cours particuliers.À ce moment, elle ne songeait pas à poursuivre ses études.

217        Au cours de l’été 2010, elle a eu une discussion avec son superviseur, dans le cadre de laquelle elle lui avait indiqué qu’elle rêvait de travailler tout en faisant des études en vue d’obtenir un doctorat. Il avait semblé réceptif et avait dit qu’il en parlerait au directeur, M. Ruseski.

218        Elle s’imaginait qu’elle pourrait poursuivre sa carrière et ses études en ayant un horaire de travail flexible, qui lui permettrait de maintenir ses 37,5 heures par semaine.

219        À l’automne 2010, elle avait présenté une demande d’admission au programme de doctorat du département d’économie de l’Université d’Ottawa. Elle s’est inscrite à deux cours au semestre d’automne. Chacun de ses cours exigeait trois heures en classe par semaine. Elle passait ses fins de semaine et ses soirées à étudier. Elle avait un horaire de travail flexible.

220        Son superviseur lui a indiqué qu’il était très satisfait de son rendement au travail pendant ce temps.

221        Elle s’est inscrite à deux cours du semestre d’hiver 2011. Elle a écrit à son superviseur afin de l’informer qu’elle avait des cours les mardis et les jeudis et qu’elle avait organisé un horaire de travail qui donnait 37,5 heures.

222        Son superviseur lui a indiqué qu’il acceptait l’horaire proposé.

223        Peu de temps après, elle a abandonné ses cours en raison d’une préoccupation grandissante entourant l’intimidation et le harcèlement dont elle était victime au travail.

224        Selon sa description, sa relation de travail avec son superviseur au début de son emploi était très bonne. Elle croyait qu’il était un bon gestionnaire et qu’il pouvait lui en apprendre beaucoup. Elle avait une haute estime de lui et lui faisait confiance.

225        À un certain moment, la relation s’est détériorée. Elle a commencé à remarquer des changements dans son comportement qu’elle croyait pouvoir ignorer.

226        Elle a indiqué qu’il l’avait insultée en face d’un collègue. Lors d’un repas pizza, une collègue a dit qu’elle était allée voir le film « Inception », mettant en vedette Brad Pitt, avec son fils. La fonctionnaire a répondu qu’elle irait voir le film si Brad Pitt en était la vedette. Son superviseur a dit que Brad Pitt ne voudrait jamais voir une personne aussi laide qu’elle. Selon la preuve documentaire présentée par la fonctionnaire, cet incident s’est produit le 13 août 2010.

227        Le défendeur s’est opposé à cet élément de preuve parce que cet incident avait été soulevé dans la plainte de harcèlement déposée par Mme Asare, qui avait été rejetée, et parce que le rejet de la plainte n’avait pas été contesté.

228        L’agent négociateur a indiqué qu’il ne souhaitait pas présenter cet élément de preuve pour la véracité de son contenu et qu’il ne demandait pas à la Commission de déterminer s’il y avait bel et bien eu harcèlement. L’élément de preuve servait à expliquer pourquoi Mme Asare avait quitté son milieu de travail et n’avait pas répondu aux communications de l’employeur.

229        Après avoir entendu les arguments, j’ai tranché que je n’étais pas saisi de la question de savoir si la fonctionnaire avait réellement été victime de harcèlement, mais que j’avais plutôt comme rôle de déterminer si elle avait abandonné son poste.J’ai conclu que l’élément de preuve était peut-être pertinent pour cette question.

230        Étant donné qu’elle ne pouvait plus ignorer ses préoccupations relatives à son superviseur, Mme Asare s’est rendue voir un représentant de l’agent négociateur avec ses parents. Le représentant lui a suggéré de rencontrer M. Ruseski, ce qu’elle a fait à la fin du mois d’avril 2011. Un représentant de l’agent négociateur devait être présent; toutefois, personne ne s’est présenté à la réunion.

231        Elle a dit à M. Ruseski que certains problèmes au travail avec son superviseur la dérangeaient. Elle lui a relaté des incidents survenus au cours de la dernière année, des commentaires qu’il avait formulés sur elle, le fait qu’il l’avait heurtée et l’incidence que tous ces éléments avaient sur elle. À ce moment, elle se trouvait en probation et ne voulait pas que ces problèmes s’aggravent.Elle avait indiqué qu’elle avait très peur.

232        Après avoir discuté de la situation, M. Ruseski lui a donné trois options. L’une d’elles était de porter les problèmes à l’attention du superviseur, en présence de M. Ruseski. La deuxième option était qu’il parle au superviseur. La troisième option, qu’il préférait, était qu’elle parle elle-même au superviseur. À la fin de la rencontre, elle a accepté d’aborder le superviseur.

233        Elle a rencontré le superviseur le lendemain en après-midi. Elle lui a dit qu’elle voulait avoir une relation de travail positive; toutefois, elle n’avait pas apprécié certaines choses qu’il avait dites. Elle a dit qu’il était fâché et qu’il lui avait crié après.Elle avait fini par se mettre à pleurer.Le superviseur l’a renvoyée à la maison plus tôt.

234        Le 31 mai 2011, elle a assisté à sa rencontre de gestion du rendement avec son superviseur et M. Ruseski.L’examen était positif.On l’a informée qu’elle avait atteint ses objectifs.

235        Le superviseur a nié avoir eu une conduite inappropriée ayant quelque lien que ce soit avec elle. Il croyait qu’il était possible de régler la question du harcèlement parce que l’examen général du rendement était positif et qu’ils pouvaient trouver une voie à suivre.

236        À partir de ce moment, la situation s’est aggravée, selon Mme Asare. Pendant qu’elle travaillait dans son cubicule, elle a entendu dire qu’elle harcelait son superviseur. À un moment, elle a entendu son superviseur dire que le directeur et lui étaient amis; ils étaient du même âge et avaient les mêmes opinions. Son superviseur allait d’une personne à l’autre afin de leur dire que la fonctionnaire le harcelait et qu’il voulait qu’elle soit licenciée.

237        Une collègue lui a fait sous-entendre qu’elle ne pouvait pas la supporter, qu’elle serait mise à pied sous peu et que ses dossiers étaient attribués à quelqu’un d’autre.

238        Elle a renvoyé à la lettre du 26 juillet 2011 envoyée par le sous-ministre adjoint à son attention, dans laquelle il indiquait qu’il rejetait sa plainte de harcèlement reçue le 15 juillet 2011. La plainte avait été rejetée parce que les incidents dont il était question n’étaient pas considérés comme du harcèlement. Dans la lettre, le sous-ministre adjoint indiquait toutefois qu’il était convaincu qu’elle trouve les événements décrits dans la plainte très stressants.

239        Mme Asare a indiqué qu’elle était déçue et anéantie. Elle avait tenté d’obtenir de l’aide de tous les gestionnaires et de résoudre les problèmes avec son superviseur. Elle croyait que dans ce milieu de travail, quelqu’un dirait [traduction] « Assez! »

240        Après avoir reçu la lettre, le 4 août 2011, elle a reçu des soins médicaux et a consulté un conseiller accrédité.

241        La fonctionnaire a consulté la Dre Wong, de la clinique des services de santé de l’Université d’Ottawa. Mme Asare croyait que sa santé mentale se détériorait et a indiqué qu’elle commençait à se sentir dépressive. Le médecin lui a posé des questions sur son milieu de travail. La fonctionnaire lui a répondu que son patron faisait des commérages sur elle et la traitait de noms devant ses collègues. Elle a indiqué au médecin qu’elle avait déposé une plainte de harcèlement qui était sans issue en raison de la relation étroite entre son patron et le directeur. Elle a dit au médecin qu’elle s’était absentée du travail en raison du stress et qu’elle se sentait malade.

242        Le médecin l’a référée à un psychologue, a indiqué qu’elle travaillait dans un milieu de travail toxique et a suggéré de chercher un poste dans un ministère différent ou de changer complètement d’emploi.Elle est retournée au travail, tout en indiquant qu’elle se trouvait au bout du rouleau.

243        Le 8 août 2011, elle a préparé une demande de congé non payé pour des besoins personnels pour la période allant du 31 août 2011 au 31 août 2012. Elle a présenté une demande de congé personnel puisque l’environnement de travail toxique avait une incidence grave sur sa santé. Elle avait besoin de temps pour recouvrer la santé.Elle ne voulait pas quitter l’effectif de façon permanente. Elle est allée voir un autre directeur puisque son superviseur et M. Ruseski étaient absents ce jour-là.

244        Elle a présenté la demande à M. Ruseski le lendemain. Il l’a examinée et a indiqué que la demande devrait être pour un congé d’études, en plus d’indiquer en quoi elle serait avantageuse pour l’organisation. Elle croyait que la demande devrait être pour un congé personnel.Elle n’avait pas présenté une demande de congé d’études.

245        Sa sœur et elle ont rencontré M. Ruseski le 11 août 2011. C’est lui qui avait demandé à ce qu’une rencontre ait lieu afin de discuter d’événements survenus au cours des derniers mois, y compris sa demande de congé d’études.

246        Elle se préoccupait beaucoup de la façon dont M. Ruseski gérait les problèmes entre son superviseur et elle. Peu de temps après que M. Ruseski a appris que sa plainte de harcèlement avait été rejetée, il s’était rendu à son cubicule et s’était réjoui du rejet de sa plainte avec un analyste principal qui se trouvait à proximité.

247        Elle s’inquiétait d’être victime de représailles en raison du dépôt de sa plainte de harcèlement.

248        La rencontre a duré environ une heure.Il lui a remis la lettre datée du même jour.Il lui a lu la lettre. Il indiquait qu’il s’inquiétait du fait que son comportement avait des répercussions perturbatrices sur lui, son superviseur et d’autres employés. Elle était indignée et trouvait qu’il s’agissait d’une grave trahison.

249        Il lui a dit que son superviseur était la personne appropriée pour traiter les demandes de congé à long terme.

250        Elle estimait qu’il s’agissait de représailles en réponse au dépôt de sa plainte de harcèlement. Il lui a dit que son superviseur était la personne appropriée dans son milieu de travail immédiat et que c’était avec lui qu’elle devrait discuter de toutes ses difficultés continues, ce qu’elle a considéré comme des représailles.

251        Il l’a informée que la procédure de demande de congé autre qu’un congé de maladie consistait à obtenir l’approbation au préalable, et, pour un congé de maladie, de présenter un certificat médical.

252        Elle était d’avis qu’on l’isolait et qu’il voulait jeter tout le blâme sur elle.

253        Dans la lettre, il concluait qu’il n’avait pas accepté sa demande de congé d’études et il indiquait que l’arrangement antérieur en place avec son superviseur, qui lui permettait de prendre une charge de cours complète pendant les heures normales de bureau et de rependre son temps à l’extérieur de ces heures, ne serait pas renouvelé.

254        Elle était indignée.Elle voulait travailler et poursuivre ses études en même temps.Son rêve se brisait en éclats. Elle croyait qu’elle avait la capacité de faire les deux et qu’elle en avait fait la preuve.

255        Le 12 août 2011, elle a envoyé par télécopieur à Mme McFarlane la copie d’un certificat médical du Rideau-Friel Medical Centre, qui attestait qu’elle se trouvait en congé jusqu’au 15 septembre pour des raisons médicales.Dans cette télécopie, on indiquait qu’elle fournirait l’original du certificat à son retour. Elle a indiqué qu’il s’agissait d’une preuve qu’elle se mettait en quatre pour fournir un certificat médical plutôt que d’attendre d’être de retour au travail pour le faire. Elle s’est rendue à ce centre parce qu’elle voulait qu’on le différencie de la clinique des services de santé de l’Université d’Ottawa.

256        Elle a indiqué au médecin que son environnement de travail toxique la rendait dépressive et anxieuse et lui a parlé des répercussions sur sa santé. Elle a également envoyé un courriel à son superviseur afin de l’informer que son médecin lui avait donné congé jusqu’au 15 septembre pour des raisons médicales et qu’elle lui acheminerait une copie du certificat médical avant de lui présenter l’original à son retour. Elle a envoyé le courriel à son superviseur en respectant la procédure établie par M. Ruseski dans sa lettre du 11 août.

257        Elle n’a reçu aucune réponse de lui ou de Mme McFarlane et a conclu qu’ils n’avaient aucun problème avec ce processus.

258        Elle n’a pas reçu la lettre du 16 août 2011 de M. Ruseski, dans laquelle il résumait leur rencontre du 11 août et il exposait le processus de présentation de certificats médicaux.Elle a vu la lettre pour la première fois avant l’audience puisqu’elle se trouvait dans le recueil de documents de l’employeur.

259        Le 21 octobre 2011, elle a écrit à la conseillère en rémunération du ministère et a demandé à obtenir des formulaires de demande de prestations d’assurance-invalidité par l’intermédiaire de la Sun Life. La conseillère en rémunération lui a envoyé une copie de la section des formulaires d’invalidité à remplir par l’employé et un à remplir par son médecin. Elle a aussi fourni une Demande de congé et un rapport d’absence. On a aussi informé la fonctionnaire qu’elle devait les remplir pour la période pendant laquelle elle se trouvait en congé et qu’elle devait présenter un certificat médical.

260        Elle a consulté la Dre Eva Fisher, psychologue, les 23 et 30 septembre 2011.La Dre Fisher lui a recommandé de ne pas retourner au travail avant d’avoir vu un psychiatre, ce qui a pris du temps. Par conséquent, elle a éprouvé des difficultés à remplir les formulaires. Le moment de son retour au travail était incertain puisqu’elle se trouvait sur une liste d’attente afin de consulter le psychiatre. Elle ne voulait pas les envoyer à la conseillère en rémunération puisqu’elle ignorait sa date de retour au travail.

261        Elle a travaillé en tant qu’assistante à l’enseignement à l’automne 2011.Elle a travaillé 10 heures par semaine, du 12 septembre au 23 décembre.Le taux horaire était de 38,97 $.Elle n’était pas payée, mais recevait un crédit pour frais de scolarité. Elle occupait ce poste en même temps qu’elle fournissait des certificats médicaux à son employeur qui indiquaient qu’elle était malade. Elle a indiqué qu’Affaires autochtones et du Nord Canada avait un environnement de travail toxique, où l’intimidation dont elle avait été victime avait eu une incidence sur sa santé mentale.

262        Son médecin et sa thérapeute l’ont informée que l’environnement de travail avait une incidence négative sur sa santé. Sa thérapeute lui a conseillé de participer à des activités qui contribueraient à son bien-être. Elle a parlé à sa thérapeute de l’idée de travailler en tant qu’assistante à l’enseignement. Celle-ci croyait que ce travail constituerait un apport bon et thérapeutique à son rétablissement puisque l’ambiance était différente de celle à Affaires autochtones, étant donné qu’elle ne se trouverait pas dans un environnement de travail toxique où des personnes l’insultent.

263        Dans le cadre du programme de doctorat, chaque étudiant a le droit d’occuper un poste d’assistant à l’enseignement.La fonctionnaire a estimé qu’il s’agissait d’un élément du programme de doctorat.Elle a occupé cet emploi pendant un semestre.Elle n’est pas demeurée assistante à l’enseignement en 2012; elle n’a pas travaillé ailleurs en 2012.

264        Elle a eu de 20 à 30 rencontres avec sa thérapeute.

265        Elle a renvoyé au rapport de la Dre Fisher daté du 4 octobre 2011, qui a été produit en preuve, non pas pour la véracité de son contenu, mais en guise de preuve de l’état d’esprit de Mme Asare à ce moment. À la suite de son évaluation, la Dre Fisher formulait des recommandations, dont deux se lisent ainsi :

[Traduction]

[…]

4) […] qu’un agent de liaison soit délégué afin de communiquer l’information pertinente sur la charge de travail de Mme Asare (plutôt que directement de son gestionnaire)

[…]

6) […] que Mme Asare continue de chercher un emploi dans un autre ministère.

[…]

266        Mme Asare a indiqué que la quatrième recommandation a contribué à influencer le Dr Kilby, qui lui a conseillé de n’avoir aucun contact avec son superviseur ou avec M. Ruseski.

267        L’avocat du défendeur s’est opposé à cet élément de preuve. Tous se sont entendus pour ne pas y accorder une grande importance puisque le Dr Kilby serait appelé en tant que témoin.

268        Cette recommandation a poussé Mme Asare à conclure que le milieu de travail était très toxique, qu’il ne serait donc pas avisé pour elle de communiquer avec son superviseur ou avec M. Ruseski et que toute communication entre elle et le ministère devrait être effectuée par l’intermédiaire d’un tiers.

269        On lui a demandé si elle avait continué à se chercher un emploi dans un autre ministère.Elle a répondu qu’elle ne l’a pas fait parce qu’elle ne voulait pas quitter Affaires autochtones.Elle sentait que M. Ruseski la poussait à partir. Elle a effectivement commencé à se chercher un autre emploi après avoir reçu la lettre du 11 août.

270        Après avoir reçu le rapport du Dr Fisher, elle a communiqué avec le secteur de la rémunération et des avantages sociaux afin de présenter une demande d’assurance-invalidité.

271        Le 21 novembre 2011, elle a envoyé un courriel à son superviseur, au secteur de la rémunération et des avantages sociaux et à Mme McFarlane afin de les informer qu’elle ne se sentait toujours pas bien et que son médecin, le Dr Kilby, avait prolongé le congé. Elle a joint la copie d’un certificat médical daté du 2 novembre 2011 qui indiquait le 3 janvier 2012 comme date de retour. Elle n’a reçu aucune réponse et a supposé que tout allait bien.

272        Elle avait vu le Dr Kilby le 2 novembre 2011.À un moment, il était devenu son médecin de famille.

273        Elle lui a dit qu’elle était doctorante en économie, qu’elle avait été malade et qu’elle avait consulté un psychologue. Elle lui a parlé de la plainte de harcèlement, de la recommandation de la Dre Fisher d’obtenir un congé à temps complet et de l’environnement de travail qui était toxique pour elle.

274        Le Dr Kilby lui a conseillé de se retirer de l’environnement où elle n’était pas appréciée et où ses apports à l’équipe n’étaient pas valorisés.À ce moment-là, il lui a demandé pourquoi elle ne démissionnait tout simplement pas.

275        Elle a répondu qu’elle rêvait de travailler en tant qu’économiste et d’obtenir son doctorat.Elle voulait tout simplement se sentir mieux et retourner au travail.Elle ne voulait pas abandonner son poste.Elle croyait pouvoir se remettre et gérer la situation.

276        Le 30 novembre 2011, Mme Caron, du secteur de la rémunération et des avantages sociaux, a écrit à la fonctionnaire afin de lui indiquer qu’elle avait reçu un formulaire de congé d’elle, mais pas de son gestionnaire, qui indiquait qu’elle voulait se trouver en congé personnel non payé à compter du 31 août 2011. Mme Caron a demandé à la fonctionnaire si elle voulait demander un congé de maladie non payé et ainsi pouvoir demander des prestations d’assurance-invalidité puisqu’elle avait présenté des certificats médicaux. Mme Asare a répondu en lui demandant de ne pas tenir compte de tout formulaire de congé personnel.

277        Mme Asare a expliqué qu’elle croyait au départ qu’elle ne serait en congé qu’à court terme et qu’elle avait tout simplement voulu montrer qu’elle coopérait avec le secteur de la rémunération et des avantages sociaux.

278        Le 2 janvier 2012, elle a envoyé un courriel à son superviseur et à Mme McFarlane en copie. Elle l’informait que son médecin avait prolongé le congé et elle joignait une copie du certificat médical signé par le Dr Kilby qui le prolongeait jusqu’au 2 mars 2012.

279        Le 22 février 2012, elle a envoyé un courriel à Mme McFarlane afin de lui demander d’acheminer à la direction la copie du certificat médical daté de ce jour-là et joint au courriel. Le Dr Kilby l’avait signé et il prolongeait son congé indéfiniment pour des raisons médicales à partir du 12 août 2011.

280        Il n’avait pas été envoyé à son superviseur parce que sa conseillère lui avait suggéré de ne pas communiquer avec ses deux gestionnaires.Elle n’a reçu aucune réponse au courriel et a donc conclu qu’il était accepté.

281        Elle a écrit à Mme Lalonde, du secteur de la rémunération et des avantages sociaux, le 22 avril 2012. Elle joignait une lettre de la Sun Life visant à obtenir certains documents de l’employeur, soit sa déclaration et la description de travail de la fonctionnaire. Elle a demandé à l’employeur de coopérer afin de remplir les formulaires.

282        On l’a interrogée sur son état de santé au début de l’année 2012. Elle a indiqué qu’elle se sentait un peu soulagée grâce au travail qu’elle avait fait et qu’elle s’employait à retrouver la santé, quoiqu’elle n’y était pas encore. Elle a suivi les conseils de sa thérapeute et de son médecin et a fait des travaux scolaires.

283        La rencontre avec le psychiatre, qui devait avoir lieu en octobre ou en novembre 2012, était l’étape suivante.

284        Au cours du semestre de l’hiver 2012, elle a suivi deux cours qui devaient durer chacun trois heures par semaine.

285        Elle n’a pas reçu la lettre du 25 janvier 2012 qui lui a été envoyée et où il était question du contact par l’Université d’Ottawa et où l’on demandait à la rencontrer le 2 février 2012.Elle l’a vue pour la première fois le 10 avril 2013, lorsqu’elle a reçu toutes les lettres de l’employeur.

286        L’employeur avait envoyé la lettre par courriel à sa bonne adresse; toutefois, selon les conseils de sa thérapeute et de son médecin de ne pas avoir de contacts avec ses gestionnaires, elle avait bloqué les courriels qui provenaient de son superviseur et de M. Ruseski.

287        On lui a demandé si elle avait appris à un certain moment que l’employeur lui avait envoyé une lettre.Elle a affirmé qu’il ne s’agissait pas de cette lettre. L’Université d’Ottawa lui avait dit que M. Ruseski avait communiqué avec elle afin d’obtenir de l’information. L’université lui a envoyé un courriel afin de lui demander si elle consentait à ce qu’elle lui donne de l’information pour confirmer qu’elle était étudiante de cycle supérieur et qu’elle enseignait.

288        Son père s’est rendu à l’université en son nom et a refusé de donner l’information en raison de l’environnement de travail toxique de la fonctionnaire. M. Ruseski avait tenté de la forcer à partir et elle croyait qu’il était inapproprié de donner cette information. Elle s’inquiétait de sa vie privée.

289        On lui a demandé quelles étaient les mesures qu’elle avait prises pour informer l’employeur de ces faits. Le 21 février 2012, elle a communiqué avec M. Vézina et lui a dit que M. Ruseski avait communiqué avec l’Université d’Ottawa sans son consentement. Elle lui a dit que sa psychologue lui avait recommandé de ne pas avoir de contacts directs avec M. Ruseski en raison des événements survenus au travail.

290        Le 22 février 2012, elle a écrit à M. Vézina afin de lui demander s’il avait réussi à communiquer avec les Ressources humaines afin de transmettre le message selon lequel le directeur ne devait avoir aucun contact avec elle pendant son congé médical. Il a répondu le 23 février en lui indiquant que son message avait été transmis aux Ressources humaines. Elle lui a aussi remis une copie du plus récent certificat médical qu’elle avait transmis à l’employeur.

291        Elle a présenté une demande de prestations d’assurance-invalidité le 20 mars 2012. Elle en a remis une copie à Mme Lalonde, la conseillère en rémunération. Dans la déclaration, on lui demande si elle a participé à des activités en vue de tirer un revenu ou de réaliser un profit depuis qu’elle est invalide. Elle a répondu ce qui suit : [traduction] « À ma connaissance, on m’a conseillé de participer à des activités (rémunérées ou pas) pour améliorer ma santé. »

292        Le 22 avril 2012, la fonctionnaire a écrit à Mme Lalonde afin qu’elle l’aide à obtenir la déclaration de l’employeur et sa description de travail. La fonctionnaire lui avait parlé pendant la semaine du 9 avril 2012, après lui avoir envoyé une copie de la déclaration de l’employé. Mme Lalonde avait indiqué qu’elle le ferait cette semaine-là, mais le 22 avril 2012, la fonctionnaire, qui n’avait pas eu de nouvelles, a fait un suivi.

293        Le Dr Kilby a remis une déclaration à la Sun Life, le 9 juillet 2012, à l’appui de sa demande d’assurance-invalidité.

294        Le 31 juillet 2012, la Sun Life a écrit à la fonctionnaire afin d’accuser réception de sa demande de prestations d’invalidité de longue durée (ILD) pour une absence du travail ayant débuté le 9 août 2011. Elle l’informait qu’elle avait terminé l’examen de sa demande et qu’elle avait approuvé le versement de ses prestations à compter du 14 décembre 2011. Dans la lettre, on indique qu’une copie en a été envoyée au secteur de la rémunération et des avantages sociaux d’Affaires autochtones et du Nord Canada.

295        Elle se serait attendue à ce que Mme Lalonde informe M. Ruseski qu’elle se trouvait en congé approuvé par la Sun Life.

296        Elle a renvoyé à une copie de la déclaration de l’employeur datée du 15 mai 2012 sur sa demande d’assurance-invalidité, qu’elle a reçue beaucoup plus tard. La déclaration indique en partie ce qui suit : [traduction] « Congé non payé non autorisé depuis le 9 août 2011. Aucune demande de congé n’a été présentée. »Elle était indignée quand elle a lu cela. Elle avait remis des copies de certificats médicaux qui couvraient toute la période de son absence et elle avait été en contact avec le secteur de la rémunération et des avantages sociaux, qui ne lui avait fait part d’aucune préoccupation à cet égard.

297        Le 23 juillet 2012, elle a envoyé un courriel à M. Vézina.Elle y avait joint une plainte. Elle lui a demandé de déposer un grief à l’encontre de M. Ruseski pour manquement à son obligation de protéger sa santé et sa sécurité, pour avoir indiqué que son absence n’était pas autorisée dans la déclaration de l’employeur pour la Sun Life et pour sa tentative de saboter sa demande d’assurance-invalidité. Elle ne pouvait pas déposer de grief elle-même puisque la convention collective pertinente contenait des dispositions sur l’assurance-invalidité.

298        Vers ce moment, en juillet 2012, le Dr Kilby et elle attendaient des nouvelles d’un hôpital de Gatineau sur son rendez-vous avec un psychiatre.Elle a affirmé qu’elle n’arrivait pas à dormir ou à effectuer des tâches ménagères.Elle avait peur de quitter la maison.Elle se sentait malade et souffrait d’une dépression grave et d’anxiété. Le Dr Kilby lui a prescrit des antidépresseurs afin de l’aider à avancer. Il s’agissait de la première fois où elle consommait des médicaments.Elle a cessé d’en consommer en 2014.

299        On l’a renvoyée à la lettre du 26 avril 2012, où on lui demandait entre autres de subir une évaluation d’aptitude au travail. Dans cette lettre, on indiquait aussi que sa demande d’assurance-invalidité ne pouvait pas être traitée parce qu’elle se trouvait en congé non autorisé. Elle a affirmé qu’elle n’a reçu cette lettre qu’en 2013.

300        On a montré à la fonctionnaire la liste des adresses de courriel que Mme McFarlane avait utilisées afin de tenter de lui envoyer un courriel.L’adresse de l’Université d’Ottawa était erronée. La fonctionnaire n’utilisait pas l’un des comptes de courriel Yahoo. Elle avait cessé d’en utiliser un autre en février 2012. Elle ne se souvenait pas si elle en avait utilisé un autre plus tôt. Et, elle n’utilisait pas le dernier compte Yahoo. Deux des numéros de téléphone avaient été remplacés. Le numéro restant était son numéro de téléphone à la maison.

301        On lui a demandé si elle savait que ses parents avaient eu une discussion avec M. Ruseski à propos de la lettre.Elle a répondu qu’elle était au courant de l’appel.On lui a demandé pourquoi elle n’avait pas récupéré la lettre.

302        M. Ruseski savait, par l’intermédiaire de ses parents et de l’agent négociateur, qu’il ne devait pas communiquer avec la fonctionnaire, selon les conseils de ses médecins.

303        En avril 2012, elle souffrait d’une dépression grave et d’anxiété et elle voyait le Dr Kilby assez fréquemment, tous les mois.

304        Au début de l’année 2013, elle se sentait beaucoup mieux. Le Dr Philippe Lageix, le psychiatre, et le Dr Kilby lui ont donné le feu vert pour retourner au travail. Elle a communiqué avec la Sun Life afin de l’informer qu’elle était prête à retourner au travail.

305        Elle a écrit au gestionnaire des Ressources humaines le 23 janvier 2013. Elle a joint un certificat médical du Dr Kilby indiquant qu’elle était prête à retourner au travail le 1er février 2013. La Sun Life l’a informée qu’elle avait le feu vert pour retourner au travail à cette date.Elle a parlé à l’agent négociateur et lui a dit qu’elle était autorisée à retourner au travail.

306        Elle a su de la Sun Life qu’elle avait été licenciée.Elle ignorait complètement qu’elle avait été licenciée.Elle était stupéfaite et abasourdie; elle n’arrivait pas à le croire.

307        Elle a communiqué avec les Ressources humaines le 7 février 2013 afin de leur demander d’envoyer toute la correspondance à son adresse domiciliaire.

308        Le 15 mars 2013, elle a déposé un grief dans lequel elle affirmait que la décision du défendeur de la licencier le 16 novembre 2012, dont elle a eu connaissance le 7 mars 2013, n’était pas motivée en plus d’être discriminatoire.

309        Le 10 avril 2013, le gestionnaire des ressources humaines lui a envoyé une lettre dans laquelle il résumait les tentatives déployées pour la joindre par courrier et par courriel depuis le 25 janvier 2012, en mentionnant qu’elle avait été licenciée le 16 novembre 2012 parce qu’elle n’avait pas accepté les lettres ou répondu à celles-ci.Des copies de toutes les lettres étaient incluses.

310        Elle a affirmé n’avoir jamais reçu la lettre du 16 novembre 2012 déclarant qu’elle avait abandonné son poste et aucune des autres lettres.Elles étaient toutes incluses dans la correspondance envoyée par l’employeur en avril 2013.

Contre-interrogatoire

311        Mme Asare a confirmé son adresse.Elle avait habité avec ses parents à l’adresse de Gatineau tout au long de la période visée.

312        On lui a suggéré qu’elle avait commencé le programme de doctorat à temps plein en 2011. Elle a répondu qu’elle l’avait fait à l’automne 2010, quand elle s’était inscrite à deux cours, soit un cours d’économétrie et un cours en théorie microéconomique suivi à titre d’auditrice.

313        À l’hiver 2011, elle a abandonné ses cours en raison du harcèlement dont elle était victime.Son dossier scolaire indique qu’elle a abandonné ses cours.

314        À l’été 2011, elle n’a pas fréquenté l’université.

315        Elle a reconnu que de 2010 à 2011, son superviseur lui avait donné la flexibilité d’assister à ses cours à condition de maintenir une semaine de travail de 37,5 heures et de rattraper les heures en 2011 pour les heures manquées au cours du semestre précédent.

316        Elle a reconnu qu’il s’agissait d’un emploi rêvé au départ.Elle était très heureuse de travailler et de poursuivre ses études. Elle croyait que son superviseur était un bon gestionnaire; elle lui faisait confiance et lui avait parlé de son programme de doctorat. Elle a reconnu qu’il l’avait soutenue et que c’est lui qui avait recommandé l’horaire de travail flexible à M. Ruseski.

317        On lui a suggéré que sa demande de congé présentée en août 2011 a été faite en raison d’une combinaison de pression au travail et à l’école. De son point de vue, la demande était attribuable à des problèmes au travail. Elle tentait de s’échapper de cet environnement de travail toxique.

318        À la rencontre du 9 août 2011, M. Ruseski lui a demandé de justifier son congé d’études.

319        On lui a suggéré qu’elle avait suivi un cours, assisté à un cours en tant qu’auditrice et abandonné ses cours, et qu’elle avait ensuite demandé de prendre une charge de cours complète, qui exigerait de nombreuses années d’études, des examens approfondis et la rédaction d’une thèse.

320        Elle a reconnu que M. Ruseski et elle avaient parlé des études et des pressions au travail.

321        On lui a demandé si elle avait dit à M. Ruseski qu’elle vivait un moment difficile et que le fait de prendre une année de congé lui permettrait de mieux gérer son travail et ses études. Elle a répondu « non » et a mentionné qu’il voulait qu’elle explique pourquoi il vaudrait la peine d’autoriser le congé. Selon les notes, elle croyait qu’il était important qu’elle mette à jour son ensemble de compétences.

322        On lui a suggéré que M. Ruseski lui avait dit que l’Université d’Ottawa voulait qu’elle cesse de travailler.Elle a répondu « non ». L’université permet aux étudiants de travailler à temps plein et de mener des études universitaires à temps plein.

323        Elle a fait une demande de congé personnel.M. Ruseski lui a demandé pourquoi.Elle a répondu que c’était en raison de problèmes au travail.Il a dit qu’elle devrait plutôt présenter une demande de congé d’études.Il était contrarié par elle en raison de la situation mettant en cause son superviseur. Il a ensuite dit qu’ils se rencontreraient afin de discuter du congé d’études. Elle ne voulait pas l’agacer davantage. Il a dit qu’elle devrait présenter une demande de congé d’études, mais sa demande officielle était une demande de congé personnel.

324        En août 2011, elle suivait un cours à un crédit et un cours en tant qu’auditrice pour obtenir son doctorat. Elle avait réussi à transférer deux cours complets de son programme de maîtrise. Elle a reconnu qu’il lui restait encore l’essentiel du travail à effectuer en date d’août 2011.

325        La demande de congé a été présentée à un autre directeur, qui était le directeur général intérimaire.Elle en a discuté avec M. Ruseski le lendemain. Il s’est dit contrarié par le fait qu’elle ait présenté une demande de congé à un gestionnaire différent. Elle a fait confiance à M. Ruseski jusqu’à ce moment-là. Elle croyait qu’il s’agissait d’une perte de confiance et d’une trahison.

326        En avril 2011, quand elle a fait part de ses préoccupations à l’égard de son superviseur à M. Ruseski, elle lui faisait encore confiance. Elle a perdu confiance quand il s’est réjoui du rejet de sa plainte de harcèlement.

327        La rencontre du 11 août 2011 a duré longtemps et a eu lieu tard dans la journée, à 16 h environ.Sa sœur l’accompagnait afin de la soutenir.M. Ruseski a lu la lettre.Elle a reconnu qu’il était préoccupé par elle au travail. Elle a répondu « oui », après le rejet de la plainte. Elle était très soupçonneuse.

328        Il lui a fait part de ses préoccupations.Pendant la réunion, il a rejeté sa demande de congé d’études.

329        Le 12 août, elle a envoyé le premier billet médical à Mme McFarlane.Elle a affirmé qu’elle croyait avoir appelé Mme McFarlane. Elle avait consulté un médecin ce jour-là et celui-ci lui avait donné un congé d’un mois pour des raisons médicales.

330        On lui a rappelé qu’à ce moment, elle avait une relation de longue date avec la clinique des services de santé de l’Université d’Ottawa. Les dossiers médicaux présentés à l’audience remontent à février 2011. On compte quelque 30 pages de dossiers de cette clinique avant le 12 août 2012. Elle a indiqué qu’elle n’avait pas de médecin de famille à ce moment. Elle s’est rendue à une clinique sans rendez-vous située à proximité de l’Université d’Ottawa le 12 août 2012.

331        Elle n’a pas vu la lettre de M. Ruseski datée du 16 août 2011.

332        Elle a reconnu avoir reçu le courriel de Mme Caron le 21 octobre 2011. Elle a expliqué qu’elle avait communiqué avec Mme Caron au sujet des formulaires de demande de prestations d’assurance-invalidité. Elle a reconnu qu’elle avait eu un certain nombre de points de contact avec le ministère, y compris Mme Caron et Mme Lalonde, pour ses certificats médicaux, ses formulaires de congé et sa demande d’assurance-invalidité.

333        Elle avait communiqué avec plusieurs personnes au ministère jusqu’au 25 janvier 2012. Jusqu’à ce moment, elle n’avait pas dit que M. Ruseski ne devait pas communiquer avec elle. Elle ne croyait pas qu’elle devait le dire à ce moment parce qu’elle croyait que l’employeur lui laisserait le temps de se remettre.

334        Elle a affirmé qu’elle a communiqué avec son agent négociateur en février 2012 afin de lui demander d’informer l’employeur qu’elle ne devait avoir aucun contact avec M. Ruseski. Elle l’a fait après avoir été informée par l’Université d’Ottawa que M. Ruseski avait tenté d’obtenir des renseignements auprès d’elle à son insu. À ce moment, elle ignorait qu’il avait tenté de communiquer avec elle jusqu’à ce que l’Université d’Ottawa l’en informe.

335        Pour des raisons de santé et suivant la recommandation de son médecin, elle a pris la précaution de bloquer les courriels envoyés par M. Ruseski et son superviseur. Elle a plus tard bloqué les courriels provenant de Mme McFarlane.

336        Dans la lettre du 11 août 2011, on lui a exigé d’envoyer ses demandes de congé à son superviseur.Elle a répondu qu’elle était en congé de maladie. Le professionnel de la santé lui avait dit de n’avoir aucun contact avec ses gestionnaires. Elle devait faire ce qu’il fallait pour reprendre du mieux.

337        Elle n’a pas reçu la lettre du 25 janvier 2012, qu’elle n’a vu que le 20 avril 2013.Elle ne l’a pas récupérée au bureau de poste.Elle était malade à ce moment-là.

338        Elle a toutefois vu la lettre datée du 6 février 2012 envoyée par M. Ruseski à l’Université d’Ottawa.L’université la lui avait remise. Dans cette lettre, M. Ruseski renvoyait à la discussion téléphonique du 9 janvier 2012 dans laquelle l’université avait demandé à obtenir de l’information sur les heures de travail de la fonctionnaire. La lettre se lit comme suit par la suite :

[Traduction]

[…]

Pour y donner suite et en tant que son employeur à AANC, j’aimerais obtenir des renseignements supplémentaires sur le statut de Mme Asare au département d’Économie de l’université d’Ottawa, soit :

  • une confirmation de son inscription en tant qu’étudiante de cycle supérieur;
  • le nombre de cours de cycle supérieur pris à l’automne 2011 et à l’hiver 2012 et une confirmation du travail en cours sur une thèse de cycle supérieur;
  • une confirmation de l’emploi en tant qu’assistante à l’enseignement à l’automne 2011 et à l’hiver 2012;
  • le nombre d’heures de travail hebdomadaire lié à cet emploi à l’automne 2011 et à l’hiver 2012;
  • une confirmation du nombre d’heures hebdomadaire que Mme Asare a indiqué travailler à AANC à l’automne 2011 et à l’hiver 2012, ainsi que le nombre maximal d’heures hors campus pour les étudiants de cycle supérieur afin qu’ils demeurent admissibles aux assistanats d’enseignement.

[…]

339        Les deux adresses de courriel indiquées sur sa demande d’emploi datée du 26 novembre 2009 provenaient de l’Université d’Ottawa et de Yahoo. L’adresse de courriel indiquée sur sa demande d’emploi en tant qu’assistante à l’enseignement datée du 1er août 2013 est la même adresse de l’Université d’Ottawa que celle indiquée en novembre 2009. Elle a indiqué qu’il s’agissait de la même adresse de courriel, mais qu’elle recevait les courriels du fournisseur Internet de services de courriel Hotmail. Elle utilisait l’adresse Yahoo quand elle a posé sa candidature, mais elle a cessé de l’utiliser.

340        Le 18 octobre 2011, dans un courriel envoyé à la Dre Fisher, elle a utilisé un compte Hotmail. Le 4 novembre 2011, elle a utilisé un compte de courriel de l’Université d’Ottawa. Mme Asare a affirmé qu’elle n’utilisait pas exclusivement son compte Hotmail à ce moment.

341        Le 15 septembre 2011, dans un courriel envoyé à son superviseur afin de l’informer qu’elle avait obtenu un congé jusqu’au 15 octobre 2011 pour des raisons médicales, elle a utilisé un compte Yahoo.Elle avait des comptes distincts pour le travail et l’école. Le 2 janvier 2012, elle a échangé des courriels avec Mme McFarlane et son superviseur au moyen du compte Yahoo.

342        Le 29 novembre 2012, elle a envoyé un courriel à son agent négociateur afin de déposer une plainte à l’encontre de M. Ruseski au moyen d’un compte de courriel Yahoo. Elle a indiqué qu’elle avait un compte de courriel qui servait précisément à communiquer avec son agent négociateur. Elle a créé différents comptes de courriel à des fins différentes. Elle a transféré une copie du courriel envoyé à son agent négociateur à sa propre adresse courriel au moyen du compte Hotmail. Elle a indiqué qu’elle avait décidé d’organiser son travail autour du compte Hotmail.

343        Le 22 février 2012, elle a utilisé une nouvelle adresse Yahoo pour la première fois pour correspondre avec Mme McFarlane. Jusqu’à ce moment, elle utilisait un compte de courriel Yahoo différent et le nouveau compte n’était pas le même que celui qu’elle avait utilisé le 2 janvier 2012 afin de communiquer avec Mme McFarlane.

344        Quand elle a reçu la lettre adressée à l’Université d’Ottawa et datée du 6 février 2012 de M. Ruseski, elle a compris qu’il tentait d’en savoir plus sur son statut.

345        Elle a reconnu que c’est à ce moment qu’elle a communiqué avec son agent négociateur et a demandé à M. Vézina de communiquer avec les Ressources humaines.Elle a affirmé qu’elle tentait de retrouver la santé.

346        On lui a demandé s’il s’agissait de la première fois où elle avait eu connaissance que M. Ruseski tentait de la joindre.Elle n’avait eu aucune nouvelle de lui et ignorait qu’il tentait d’obtenir des renseignements auprès de l’Université d’Ottawa.

347        Elle voulait que son agent négociateur envoie une lettre afin d’informer son gestionnaire qu’il ne devait pas communiquer avec elle pendant son congé de maladie. Elle a dit à M. Vézina qu’elle était très malade et que ses médecins avaient recommandé que ses directeurs n’aient aucun contact avec elle pendant son congé de maladie. La discussion avec M. Vézina a eu lieu le 21 février 2012. C’est à ce moment qu’elle a changé son adresse de courriel.L’employeur ignorait qu’elle avait cette adresse.

348        Elle a reconnu avoir affirmé dans son interrogatoire principal qu’elle avait été abasourdie et stupéfaite quand elle avait appris qu’elle avait été licenciée, puisqu’elle se trouvait en congé de maladie.

349        Le 6 février 2012, elle avait appris que M. Ruseski tentait d’obtenir de l’information sur son statut à l’Université d’Ottawa. En avril 2012, son père lui a dit qu’il tentait de la joindre à la maison. Elle a affirmé que l’employeur savait à ce moment qu’il ne devait pas communiquer avec elle.

350        Elle a appris que Mme McFarlane tentait d’envoyer un paquet à sa maison.

351        Elle a appris à un certain moment entre les mois de mai et de juillet 2012 que l’employeur avait fourni une déclaration au sujet de sa demande d’assurance-invalidité.Elle a reçu le formulaire en juillet 2012. On l’a renvoyée à la page 7 de la déclaration de l’employeur au sujet de la demande d’assurance-invalidité, sous le titre « Renseignements supplémentaires », où il est indiqué ce qui suit : [traduction] « Veuillez communiquer avec Gorazd Ruseski pour obtenir de plus amples renseignements. Un certain nombre de tentatives de communication avec l’employée ont échoué. Par conséquent, l’employée a été placée en congé non payé non autorisé depuis le 9 août 2011. »

352        On l’a renvoyée à sa plainte à l’encontre de M. Ruseski, qu’elle a acheminée à M. Vézina le 23 juillet 2012.Elle a indiqué qu’il s’agissait de sa chronologie des événements et que c’est elle qui l’avait tapée. Elle y formulait les commentaires suivants sur sa demande de prestations d’assurance-invalidité :

[Traduction]

[…]

J’ai communiqué avec la consultante du secteur de la rémunération et des avantages sociaux le 23 avril 2012. Elle m’a dit qu’elle avait rencontré M. Ruseski et la conseillère en rémunération et que rien n’avait été fait pour la demande d’invalidité, qui ne sera pas traitée. Elle a refusé de fournir plus de renseignements.Elle m’a suggéré de communiquer avec M. Ruseski, ce à quoi j’ai répondu qu’il m’était impossible de le faire. Elle a de nouveau parlé du formulaire de demande de congé; je lui ai demandé comment je devais m’y prendre pour remplir un formulaire de demande de congé quand le congé de maladie est indéfini. Elle a répété que je devrais communiquer avec M. Ruseski. Ce jour-là, j’ai communiqué avec la Sun Life afin de l’informer que l’employeur avait refusé d’envoyer la déclaration de l’employeur et qu’il m’avait conseillé de communiquer avec le syndicat afin de gérer ce dossier. Je suis en contact avec la Sun Life depuis.

[…]

353        Mme Asare a reconnu être l’auteure de cet extrait. Elle a aussi reconnu que M. Ruseski avait tenté de communiquer avec elle le 27 avril 2012 et elle savait qu’il avait tenté de lui envoyer un paquet.

354        Les notes qu’elle a rédigées dans la chronologie se lisent ainsi :

[Traduction]

[…]

Le 27 avril 2012, M. Ruseski a tenté de communiquer avec moi même si on lui avait dit de ne pas le faire.Un appel a été fait au numéro de téléphone de mes parents. Ignorant de qui il provenait, mes parents ont composé le numéro de téléphone et c’est son adjointe administrative qui a répondu. L’adjointe administrative les a informés que M. Ruseski avait tenté de communiquer avec moi et voulait m’envoyer un paquet par service de messagerie. Mes parents ont insisté pour qu’elle leur dise ce que le paquet contenait. Elle a dit qu’elle ignorait ce qu’il contenait, mais qu’il devait être livré le 30 avril 2012. Mes parents lui ont demandé de leur donner le numéro de téléphone de M. Ruseski et lui ont dit qu’ils l’appelleraient ce jour-là. Le 30 avril 2012, mes parents ont communiqué avec M. Ruseski afin de l’avertir de ne plus jamais tenter de communiquer avec moi puisqu’il nuit à mon rétablissement chaque fois qu’il le fait. Mes parents ont ensuite refusé d’accepter le paquet à la livraison et ont demandé à ce qu’il soit renvoyé à l’expéditeur.

[…]

355        Elle a confirmé avoir parlé à la Sun Life le 3 juillet 2012 et avoir été informée à ce moment que M. Ruseski avait écrit qu’elle se trouvait en congé non autorisé dans la partie du formulaire de demande de prestations d’assurance-invalidité à remplir par l’employeur.Elle a affirmé qu’elle était abasourdie puisqu’il avait ignoré les lettres qui confirmaient son absence du travail pour des raisons de maladie.

356        Elle a indiqué qu’il était pratiquement impossible d’avoir une communication constructive avec M. Ruseski.Il avait dit qu’il ne voulait pas la voir au bureau.Il l’avait ignorée.

357        M. Vézina lui avait dit qu’elle devrait rencontrer les Ressources humaines et son directeur afin de tout régler à son retour au travail.

358        On l’a renvoyée au paragraphe de conclusion de sa chronologie, qui se lit ainsi :

[Traduction]

[…]

Je n’ai pas été en mesure de reprendre le travail pour cause de maladie. À mon retour, je croyais que je serais de nouveau victime de harcèlement, de représailles et d’abus puisque les problèmes n’ont pas été réglés, même si je les ai signalés une première fois en avril 2011. Même si la pratique veut qu’une réunion ait lieu avec la direction afin de discuter du retour au travail et des problèmes d’absence, vu ce qui précède, je crois qu’il est pratiquement impossible d’avoir une discussion sérieuse ou productive avec M. Ruseski.

359        Mme Asare a reconnu être l’auteure de ce paragraphe.

360        On l’a renvoyée aux notes du Dr Kilby sur sa consultation du 17 juillet 2012, qui indiquent que son employeur avait dit qu’elle se trouvait en congé non autorisé, qu’elle livrait une bataille difficile puisqu’elle ne pouvait pas se défendre seule et sans son avocat. Elle devait poursuivre sa vie, puisqu’elle serait congédiée implicitement dans le meilleur des cas et renvoyée dans le pire étant donné que l’employeur avait indiqué qu’elle se trouvait en congé non autorisé.

361        Mme Asare a indiqué qu’elle avait parlé de nouveau à l’agent négociateur qui lui avait dit de se concentrer sur son rétablissement.

362        Elle a indiqué que la Sun Life avait approuvé sa demande d’assurance-invalidité deux semaines plus tard.Elle a considéré la Sun Life comme son employeur.

363        On l’a interrogée à propos de la lettre qui lui avait été envoyée le 3 août 2012, qui comprenait un formulaire de consentement afin de permettre à l’employeur de parler au Dr Kilby. Elle a répondu qu’elle ne l’avait reçue qu’en avril 2013 et qu’elle ignorait que l’employeur voulait parler au Dr Kilby.

364        On l’a renvoyée aux notes du Dr Kilby sur sa consultation du 11 septembre 2012, qui renvoient au fait qu’elle avait reçu une copie de la déclaration de l’employeur et qu’elle avait dit que M. Ruseski écrit des faussetés. La phrase suivante se lit comme suit : [traduction] « J’ai assuré à la patiente que je n’échangerai pas de renseignements avec son employeur sans son consentement écrit. » Quand on l’a interrogée à propos de cette phrase, Mme Asare a répondu que M. Ruseski avait tenté de saboter sa demande d’assurance-invalidité. Les commentaires indiqués dans la déclaration de l’employeur étaient erronés.

365        La Dre Fisher lui avait recommandé de retourner au travail graduellement. Cependant, l’employeur a indiqué dans la déclaration qu’il ne prendrait pas de mesures d’adaptation à son égard.

366        On a demandé à l’employeur, dans la déclaration, de présenter des renseignements sur la réadaptation et de répondre à la question suivante : [Traduction] « Si l’employé pouvait retourner au travail selon un horaire réduit ou un changement à ses fonctions, un poste serait-il disponible? » La case de réponse cochée est « Non » et le commentaire qui suit est indiqué :

[Traduction]

L’organisation est petite et souvent appelée à répondre à des demandes urgentes et spéciales ou à participer à des réunions organisées à court préavis.L’employée possède une expérience spécialisée qui ne lui permet pas de travailler dans d’autres sections de la direction générale ou du secteur.

367        La lettre du 31 octobre 2012 dans laquelle on exige à Mme Asare de se présenter au bureau de M. Ruseski le vendredi 9 novembre 2012 afin d’expliquer les motifs de son absence a été retournée; selon l’historique de suivi, la destinataire l’a refusée le 5 novembre 2012.On lui a demandé si elle était au courant que l’employeur lui avait envoyé de la correspondance.Elle a répondu que son père s’en était chargé pour elle. Il avait communiqué avec le Jean Coutu (probablement la franchise postale) et on lui avait dit qu’elle provenait de l’employeur. Il avait ensuite refusé de la recevoir.

368        On lui a demandé si elle avait refusé d’avoir des contacts avec le ministère. Elle a répondu par la négative en indiquant qu’elle ne devait pas avoir de contacts avec M. Ruseski seulement. Elle avait communiqué avec Mme Caron au sujet de sa demande de prestations d’assurance-invalidité.

369        Elle a témoigné que la Sun Life lui avait appris son licenciement le 4 février 2013 ou vers cette date, quand elle lui avait écrit pour confirmer qu’elle était autorisée à retourner au travail en date du 1er février 2013. Elle a affirmé dans son grief qu’elle avait eu connaissance de son licenciement le 7 mars 2013 et qu’elle n’avait pas reçu la lettre de licenciement en février.

370        Lorsqu’elle a parlé au gestionnaire de dossiers - capacités, à la Sun Life, elle avait appris que M. Hards avait tenté de communiquer avec elle.
 Le 7 février 2013, elle a écrit au gestionnaire des Ressources humaines afin de demander d’envoyer toute la correspondance à son adresse domiciliaire. Elle en a envoyé une copie à l’agent négociateur.

371        Le 1er mars 2013, le secteur de la rémunération et des avantages sociaux lui a écrit afin de lui exposer les répercussions de son licenciement du 28 novembre 2012 sur ses avantages sociaux. La ligne d’objet indiquait en partie ce qui suit : [traduction] « Licenciement pour abandon de poste ». Elle a reçu la lettre et a vu pour la première fois qu’elle avait été licenciée pour abandon de poste. Elle a communiqué avec les Ressources humaines afin d’obtenir les lettres.Elle les a reçues le 10 avril 2013.

372        Elle avait parlé à M. Vézina au début du mois de janvier 2013, quand le psychiatre et le Dr Kilby l’avaient autorisée à retourner au travail.

373        Quand le gestionnaire de dossiers – capacités de la Sun Life lui a appris qu’elle avait été licenciée, au début du mois de février 2013, elle a communiqué avec M. Vézina.Ils se sont parlé au téléphone.Elle lui a demandé de présenter un grief.

374        En novembre et en décembre 2012, la fonctionnaire avait finalement vu le psychiatre à qui elle a été référée par la Dre Sarah Giles.Ce n’est que le 24 janvier 2013 que ses rapports ont été transcrits.Le psychiatre l’avait vue pour la dernière fois le 4 décembre 2012. Il avait fait un diagnostic favorable, en mentionnant qu’elle avait un bon niveau d’énergie et qu’elle avait hâte de retourner au travail. Il lui a recommandé de changer d’emploi.Il a fait part de cette recommandation au Dr Kilby.

375        La Dre Fisher y renvoie dans son rapport. Le Dr Wong lui avait recommandé de subir une évaluation psychologique. La fonctionnaire a reconnu que le rapport fait la chronique de ses préoccupations relatives à l’intimidation et qu’il renvoie à des difficultés qu’elle a éprouvées avec des collègues dans le cadre d’un emploi précédent. La Dre Fisher a fait un certain nombre de recommandations.

376        Mme Asare a affirmé que la Dre Fisher lui avait demandé si elle avait songé à poser sa candidature pour travailler dans d’autres ministères.Elle a répondu qu’elle ne voulait pas le faire, mais elle a effectivement cherché un autre emploi.Elle songeait à poser sa candidature ailleurs.Lorsque son état s’est amélioré, elle était prête à retourner au travail.

377        Le 6 juillet 2013, la fonctionnaire a posé sa candidature au Conference Board du Canada pour un poste d’économiste. Dans la section sur les antécédents professionnels pertinents de la demande, il n’est aucunement mention de son poste d’économiste à Affaires autochtones et du Nord Canada. Elle a affirmé que le travail qu’elle effectuait à Affaires autochtones et du Nord Canada n’était pas pertinent au poste d’économiste au Conference Board du Canada. Elle a indiqué être sortie d’une mauvaise expérience et qu’elle avait été contrainte à quitter son emploi.

378        Le 15 juillet 2013, la fonctionnaire a posé sa candidature à la Société canadienne d’hypothèques et de logement en tant qu’économétricienne principale. Encore une fois, dans la section sur les antécédents professionnels pertinents de la demande, il n’est aucunement mention de son poste précédent d’économiste à Affaires autochtones et du Nord Canada. Elle a répondu que l’un de ses professeurs l’avait encouragée à poser sa candidature pour ce poste.

379        On lui a demandé si elle avait omis ce poste dans ses demandes en raison de sa mauvaise expérience et parce qu’elle ne voulait pas qu’il donne une image négative d’elle. Elle a répondu qu’elle ne l’avait pas inclus en raison de ce que les personnes à Affaires autochtones lui avaient fait subir.

380        Le 1er août 2013, la fonctionnaire a posé sa candidature pour un poste d’assistante à la recherche à l’Université d’Ottawa. Encore une fois, aucun renvoi n’a été fait à son poste précédent d’économiste. Elle a été embauchée pour occuper ce poste.

381        Elle a affirmé qu’il s’agit d’une preuve qu’elle voulait retourner travailler puisqu’Affaires autochtones et du Nord Canada avait dit qu’elle ne pouvait pas retourner graduellement au travail. Même si elle avait reçu l’autorisation de travailler à partir du 1er février 2013, elle tentait de développer son endurance et elle était toujours doctorante.

382        Dans son curriculum vitae, il est indiqué qu’elle a travaillé en tant qu’assistante à la recherche à l’Université d’Ottawa de janvier à avril 2013.Mme Asare a confirmé l’avoir fait à ce moment.On lui a demandé si elle avait informé son employeur qu’elle travaillait en tant qu’assistante à la recherche. Elle a répondu qu’elle attendait que le Dr Kilby l’autorise à retourner au travail et qu’elle avait ensuite communiqué avec la Sun Life.

383        Elle a répondu que la Sun Life lui avait dit de développer sa tolérance. Le Dr Kilby lui a donné l’autorisation de retourner au travail le 1er février 2013. L’employeur ne voulait pas la laisser retourner graduellement au travail.Elle a commencé à enseigner à la fin du mois de janvier 2013.

384        La fonctionnaire a reconnu avoir reçu la lettre que M. Ruseski avait envoyée à l’université en janvier 2012. Elle comprenait qu’il voulait obtenir des renseignements de sa part parce qu’elle avait posé sa candidature pour un poste d’assistante à l’enseignement à l’hiver 2012. Elle a répondu qu’elle se trouvait en congé de maladie et qu’elle avait mené cette activité selon les conseils de sa thérapeute. La fonctionnaire a dit à sa thérapeute qu’elle n’était pas dans son milieu de travail. Elle avait trouvé apaisant de travailler en tant qu’assistante à l’enseignement au cours de l’automne 2011. Elle considérait ce poste comme une partie du programme de doctorat. Les étudiants de cycle supérieur ont le droit d’occuper ce genre de poste. Elle a occupé d’autres postes d’assistante à l’enseignement après son licenciement. Elle a indiqué qu’elle n’était pas rémunérée pour les postes d’assistante à l’enseignement qu’elle a occupés; sa rémunération était plutôt appliquée à ses frais de scolarité. Le taux horaire s’élevait à 39,97 $.

385        On l’a renvoyée à son témoignage, où elle avait indiqué qu’elle avait la capacité de travailler à temps plein et d’assister à ses cours et qu’elle l’avait déjà fait. Elle a indiqué qu’elle travaillait à temps plein en septembre 2010 et qu’elle fréquentait l’école. Elle n’avait pas été en mesure de poursuivre en raison de l’environnement de travail toxique, mais elle aurait préféré faire les deux en même temps.

386        Sa disponibilité pour assister aux audiences est devenue limitée après son licenciement. Le fait qu’elle n’occupait plus un emploi à temps plein ne signifie pas qu’elle n’aurait pas pu travailler à temps plein et étudier.

387        On l’a renvoyée aux notes du Dr Kilby sur sa consultation du 19 mars 2013, qui indique ce qui suit :

[Traduction]

[…]

Les problèmes avec l’assurance et l’ancien employeur sont toujours présents

Elle a été payée par l’intermédiaire de la Sun Life pour son invalidité pendant la période où elle se trouvait en congé

L’ancien employeur lui a dit qu’elle avait abandonné son poste

Elle a parlé à son avocat et elle a besoin d’un billet

Elle doit avoir un dossier sans tache pour pouvoir poser sa candidature au gouvernement fédéral à l’avenir

Elle veut obtenir une lettre exigeant son rétablissement dans son poste

Elle est prête à retourner au travail depuis le 1er février

Elle fréquente maintenant l’école et ne cherche pas d’emploi

Son avocat a consulté le syndicat et elle veut obtenir un billet du médecin

388        Elle a indiqué qu’elle avait fait tout ce qu’elle pouvait pour retourner au travail. Le Dr Kilby a effectivement dit qu’il ne voulait pas qu’elle retourne à Affaires autochtones et Développement du Nord.

Réinterrogatoire

389        Le programme de doctorat est flexible en fonction des cours et du nombre d’heures, et si un étudiant trouve le programme difficile.La thèse exige un travail de rédaction.Il n’y a aucun cours à suivre.

390        La fonctionnaire a augmenté ses activités académiques parce qu’elle ne travaillait pas et qu’elle avait plus de temps libre.

391        Dans le certificat médical daté du 17 octobre 2011, la Dre Giles indique que le retour au travail de la fonctionnaire était indéterminé. Mme Asare a expliqué qu’elle avait besoin d’obtenir ce billet parce qu’elle devait être autorisée à retourner travailler par un psychiatre.

392        Elle a indiqué que le poste d’assistante à la recherche qu’elle a accepté en janvier 2013 n’était que pour 10 heures par semaine. Selon elle, elle aurait pu occuper cet emploi et retourner travailler à temps plein.

2. Le Dr Kilby

393        J’ai indiqué au début que les parties se sont entendues sur consentement sur une ordonnance de mise sous scellés à l’égard des renseignements médicaux liés à Mme Asare.L’interrogatoire et le contre-interrogatoire du Dr Kilby portaient en majeure partie sur des renseignements médicaux de nature très délicate sur la fonctionnaire. Vu la nature délicate de ces renseignements et le consentement des parties à la mise sous scellés des documents connexes, je me suis efforcé, dans le résumé du témoignage du Dr Kilby, de ne renvoyer que de façon minime aux renseignements médicaux n’ayant pas à faire partie du dossier public.

394        Le Dr Kilby, médecin de famille depuis 1979, est médecin de première ligne de la clinique des Services de santé de l’Université d’Ottawa.Il en est le directeur depuis 1987. Il a suivi la formation en milieu hospitalier requise pour obtenir une licence générale et une accréditation en médecine familiale. Même s’il n’a aucune spécialisation désignée, il a, au cours de sa pratique, fait des diagnostics de troubles psychiatriques et traité ces troubles. Son curriculum vitae dresse la liste de son expérience vaste et complète et de son implication auprès des hôpitaux d’Ottawa et de Gatineau. Au moment de livrer son témoignage dans la présente instance, il comptait environ 2 600 patients.

395        Il a reconnu ses notes et son écriture dans les dossiers médicaux électroniques de l’Université d’Ottawa. Il s’est souvenu de la première fois où il a vu Mme Asare, quand elle s’est présentée pour une consultation le 2 novembre 2011.

396        Elle avait été vue par un autre médecin de la clinique.Elle était absente du travail pour des raisons médicales.Il savait qu’elle éprouvait des troubles de l’humeur. Il a mentionné qu’elle était manifestement triste et démoralisée, et qu’elle souffrait de dépression légère. Il a diagnostiqué deux troubles mentaux à ce moment et a recouru à un système de codage pour la recherche et la facturation.

397        Le plan comprenait de remplir des formulaires d’assurance-invalidité. Il a conseillé à la fonctionnaire de se retirer de l’environnement où elle n’était pas appréciée et où ses apports à l’équipe n’étaient pas valorisés et de se trouver un emploi ailleurs.

398        Il a signé un certificat médical daté du 2 novembre 2011, où il attestait que Mme Asare serait absente du travail du 12 août 2011 au 3 janvier 2012. Il lui a recommandé de s’absenter pour des raisons médicales et de ne pas retourner au travail avant le mois de janvier; à ce moment, il faudrait l’évaluer de nouveau.

399        Il avait examiné le rapport de la Dre Fisher, qui faisait partie du dossier de Mme Asare reçu le 4 octobre 2011.Il a reconnu que le rapport faisait partie de son diagnostic.

400        Le Dr Kilby a rédigé une entrée au dossier médical le 8 novembre 2011 dans laquelle il était question du stress et de l’intimidation au travail issus d’un conflit au travail, du besoin de Mme Asare de régler les problèmes et de son retour éventuel au travail ou de son départ du ministère.

401        Il a rempli une demande d’assurance-invalidité en son nom le 2 décembre 2011. Voici la description qu’il a faite de ses symptômes : [traduction] « piètre concentration, anxiété, insomnie, appétit [flèche descendante] et isolement ». Il a indiqué que les symptômes étaient apparus pour la première fois en « août 2011 ». Il a indiqué que l’état était attribuable à une blessure ou une maladie causée par l’emploi, en mentionnant qu’elle [traduction] « [s]e croit victime de harcèlement au travail. Traumatisée par l’expérience, ébranlée et déprimée ». Il a mentionné qu’elle était [traduction] « [i]ncapable de confronter l’employeur; niveau d’anxiété++ ». Il lui a conseillé de suivre [traduction] « une psychothérapie, de recourir au PAE [et de] changer d’emploi ». Le Dr Kilby a indiqué que lorsqu’il est question des niveaux d’anxiété, la cote la plus élevée correspond à trois signes plus.

402        Il a expliqué qu’il tente d’obtenir un rapport corroborant quand il fait le diagnostic d’une invalidité; en l’espèce, il s’agissait des rapports de la psychologue et finalement du psychiatre.

403        Le 22 février 2012, il a prolongé le congé médical indéfiniment. Il a indiqué qu’il préfère établir un but à atteindre pour que le patient redevienne fonctionnel. Il a indiqué qu’il n’arrivait pas à conclure que la période d’invalidité se terminerait rapidement ce jour-là.

404        Mme Asare a consulté le Dr Kilby le 5 juillet 2012. Il a indiqué qu’ils tentaient d’accéder à un service de psychiatre et qu’il l’avait placée dans une file d’attente afin qu’elle soit évaluée. À ce moment, il a compris qu’elle ne travaillait pas.

405        Il lui avait prescrit des médicaments, qu’elle n’avait pas pris avant le 5 juillet 2012.

406        Le 5 juin 2012, la Sun Life avait écrit à Mme Asare afin de l’informer que les éléments de preuve ne suffisaient pas à expliquer en quoi ses symptômes déclarés étaient d’une gravité telle qu’ils l’empêchaient totalement et continuellement d’accomplir les tâches liées à son emploi. Le 9 juillet 2012, le Dr Kilby a écrit à la Sun Life en appui à sa demande d’assurance-invalidité.

407        Il a rencontré Mme Asare le 2 novembre 2012. Elle commençait à répondre aux médicaments et se sentait mieux. Elle lui a dit que son rendez-vous avec le psychiatre aurait lieu la semaine suivante et qu’elle ne voulait pas retourner à son lieu de travail.

408        Il l’a rencontrée de nouveau le 14 janvier 2013. Il a signé un certificat médical dans lequel il indiquait la date du 1er février 2013 en tant que date de retour au travail, selon son évaluation. Il a affirmé qu’il avait établi une relation professionnelle avec elle.

409        Si des personnes croient qu’elles travaillent dans un environnement hostile, leur perception s’en trouve donc touchée. Elles doivent déménager dans un environnement où leurs opinions sont plus valorisées.

410        On a aussi déterminé qu’elle se portait suffisamment bien pour s’acquitter de toutes les fonctions de la vie quotidienne. Il lui a recommandé de continuer de prendre les médicaments et de poursuivre sa psychothérapie.

411        Ils se sont rencontrés de nouveau le 19 mars 2013. Dans ces notes, il indique qu’ils ont discuté des questions de l’assurance et de l’employeur, qui lui avait dit qu’elle avait abandonné son poste. Elle voulait que son dossier soit sans tache afin de pouvoir poser sa candidature ailleurs au gouvernement fédéral à l’avenir. Son avocat a indiqué qu’elle devait avoir un billet.

412        Le Dr Kilby a indiqué dans son témoignage qu’il se sentait responsable. Quand Mme Asare se trouvait en congé de maladie, il lui avait dit de ne répondre à aucun courriel ou appel téléphonique en cas de problèmes entre elle et l’employeur. Le conseil général qu’il donne aux patients semblait avisé à ce moment; il se sentait toutefois en partie responsable du fait qu’elle n’avait pas communiqué avec l’employeur.

413        Le Dr Kilby a fait une différence entre la communication avec l’employeur et les Ressources humaines. Il lui a conseillé de parler uniquement aux Ressources humaines, qui, contrairement aux gestionnaires, devraient gérer les demandes de congé de maladie des employés.

414        Le 20 mars 2013, le Dr Kilby a écrit une lettre adressée « À qui de droit » à propos de Mme Asare, qui se lisait ainsi (j’ai conclu qu’aucun renseignement médical de nature délicate n’est divulgué dans l’extrait suivant tel qu’il apparaît) :

[Traduction]

[…]

Cette patiente s’est trouvée en congé d’invalidité pendant plusieurs mois en raison d’un conflit avec son superviseur; on lui a conseillé de ne pas interagir avec son directeur ou son superviseur au ministère pendant ce temps. À sa connaissance, la seule tentative de communication avec elle est venue de son ministère et à sa connaissance, et elle ne savait pas si les Ressources humaines avaient tenté de communiquer avec elle.

Elle a appris que son défaut d’interagir avec son ministère avait donné lieu à son renvoi de la fonction publique du Canada. Cet événement est malheureux puisqu’il survient en temps de perturbations émotionnelles en partie liées aux communications passées avec son superviseur.

Nous lui avons fortement recommandé de ne pas retourner à son emploi précédent; nous espérons, toutefois, que ses dossiers de RH indiquent seulement qu’elle a démissionné de son emploi à la date de son retour au travail telle qu’elle est indiquée dans son dossier d’assurance-invalidité et qu’il lui sera donc permis à l’avenir de poser sa candidature pour un autre emploi dans la fonction publique du Canada.

415        Il a rencontré Mme Asare le 12 juillet 2013. Selon ses notes, elle se sent beaucoup mieux depuis qu’elle a quitté son emploi, où ses collègues étaient abusifs sur le plan psychologique. Elle arrivait à mieux se concentrer et à mieux dormir. Elle cherchait à terminer ses études, ne recevait plus de prestations d’assurance-invalidité et croyait qu’elle était complètement remise.

Contre-interrogatoire

416        On a suggéré au Dr Kilby qu’il n’avait aucune expertise spéciale en psychiatrie. Il a répondu qu’il a fait des études médicales dans ce domaine pendant quatre années consécutives. On lui a demandé s’il avait une expertise spéciale en psychométrie. Il a répondu « non », tout en indiquant qu’un psychiatre ou un psychologue n’en possèdent pas non plus.

417        On a suggéré au Dr Kilby que Mme Asare, quand elle l’a rencontré le 2 novembre 20111, lui a fait part de renseignements subjectifs, sur lesquels il s’est fondé au moment de faire son diagnostic. Il a répondu qu’il s’est fondé sur ses observations objectives ainsi que sur les observations cliniques et les rapports de la Dre Fisher et du Dr Wong.

418        On lui a demandé s’il connaissait le livret Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, 4e édition, texte révisé (DSM) pour diagnostiquer les troubles mentaux.Il a répondu qu’il le connaissait.

419        Dans son rapport, la Dre Fisher concluait que Mme Asare souffrait d’un trouble valide.Elle a recommandé de renvoyer Mme Asare à un psychiatre.Le Dr Kilby a confirmé que ce renvoi a été effectué. La Dre Fisher a recommandé que Mme Asare demeure en congé d’invalidité de courte durée jusqu’à ce que ce renvoi ait été effectué. Le Dr Kilby a confirmé que c’est ce qui a été fait. La Dre Fisher avait recommandé de mettre en œuvre graduellement un horaire de retour au travail. Le Dr Kilby a confirmé qu’il était impossible de le faire à ce moment. La Dre Fisher avait recommandé qu’un agent de liaison soit délégué afin de communiquer l’information pertinente sur la charge de travail de Mme Asare, plutôt que cette information soit transmise directement par son gestionnaire. Le Dr Kilby a indiqué que l’agent de liaison ne devait pas échanger avec son gestionnaire.

420        On a renvoyé le Dr Kilby à sa déclaration du médecin traitant en date du 2 décembre 2011 à l’appui de la demande d’assurance-invalidité de Mme Asare. Il a reconnu que la description de ses symptômes (c.-à-d. difficulté à se concentrer, anxiété, insomnie, perte d’appétit et isolement) était subjective, tout comme sa conclusion selon laquelle sa maladie était attribuable à son emploi, parce qu’elle se croyait victime de harcèlement au travail et qu’elle avait été traumatisée par l’expérience, qui la laissait ébranlée et dépressive. La conclusion selon laquelle elle était limitée par son état du fait de son incapacité à confronter l’employeur et elle avait une anxiété de « niveau ++ » était aussi subjective.

421        Le 24 avril 2012, le Dr Kilby a pris des notes sur son rendez-vous avec Mme Asare ce jour-là, où cette dernière avait indiqué que l’employeur avait refusé de remplir sa partie de la demande d’assurance-invalidité. Il lui a conseillé de recourir aux services d’un avocat pour l’aider avec son dossier.

422        Le 5 juin 2012, la Sun Life a informé Mme Asare que les éléments de preuve ne suffisaient pas à expliquer en quoi ses symptômes déclarés étaient d’une gravité telle qu’ils l’empêchaient totalement et continuellement d’accomplir les tâches liées à son emploi.Elle ne pouvait pas approuver sa demande.

423        Le Dr Kilby a confirmé qu’il a écrit à la Sun Life et a donné d’autres détails sur son invalidité, le 9 juillet 2012.

424        Il a reconnu avoir assuré à Mme Asare, le 11 septembre 2012, qu’il ne transmettrait pas ses renseignements médicaux à son employeur sans son consentement écrit. C’était peu de temps après que l’employeur lui ait écrit, le 7 août 2012, afin d’obtenir son consentement pour communiquer avec le Dr Kilby.

425        Le Dr Kilby a indiqué qu’il jugeait inapproprié qu’un gestionnaire écrive directement à un médecin et que ce genre de demande devait être géré par l’intermédiaire de Santé Canada.Les gestionnaires le font tout le temps. Les gestionnaires ont uniquement le droit de savoir si un employé est apte au travail. Le Dr Kilby a indiqué qu’il travaille avec une équipe de spécialistes en santé et sécurité au travail. Les gestionnaires n’ont plus le droit de poser des questions sur le diagnostic d’un employé.

426        On lui a demandé s’il avait déjà écrit une lettre indiquant que la fonctionnaire ne devrait pas travailler avec son superviseur précédent.Il a répondu que si aucune lettre du genre ne se trouvait dans le dossier, il n’en avait écrit aucune.

427        On lui a demandé s’il avait déjà écrit une lettre indiquant que la communication en provenance du ministère avec la fonctionnaire devrait être effectuée seulement par l’intermédiaire des Ressources humaines, et pas son gestionnaire. Il a répondu que les discussions sur les mesures d’adaptation et les restrictions n’auraient eu lieu qu’après qu’elle ait été invitée à retourner au travail.

428        Le 19 mars 2013, il a appris qu’elle avait perdu son emploi pour abandon de poste.Mme Asare lui a demandé de rédiger une lettre. Le Dr Kilby ne savait pas si les Ressources humaines avaient tenté de la joindre. Il a indiqué qu’il aurait conseillé Mme Asare différemment si les Ressources humaines avaient tenté de communiquer avec elle, parce qu’elles auraient pu faire participer le secteur de la santé et sécurité au travail au dossier.

429        Il était au courant que l’employeur avait tenté de communiquer avec elle et que cela lui causait du stress.

430        Le Dr Kilby a reconnu avoir envoyé par télécopieur une lettre le 17 juillet 2015, qui provenait de l’Université d’Ottawa et qui indiquait que Mme Asare n’était pas inscrite à la session du printemps et de l’été 2011.Il n’arrivait pas à se souvenir si cette télécopie avait été envoyée à la demande de Mme Asare ou de son avocat.

431        On lui a demandé s’il pouvait savoir d’une façon quelconque que les certificats médicaux remis à un employeur ont été acceptés.Il a répondu qu’il n’y avait aucune façon de le savoir.

432        Le 17 juillet 2012, le Dr Kilby a indiqué que Mme Asare l’avait informé, au cours de l’une des consultations, que l’employeur avait dit qu’elle se trouvait en congé non autorisé et qu’il l’empressait d’agir.Il a indiqué qu’il ne pouvait s’occuper que de l’aspect médical du dossier. Elle devait faire participer l’agent négociateur puisqu’elle n’était pas en état de lutter seule.

433        On a demandé au Dr Kilby s’il était au courant que Mme Asare travaillait en tant qu’assistante à l’enseignement pendant qu’elle faisait ses études doctorales.Il a répondu qu’il aurait pu l’être.Il ne se souvenait pas de l’avoir conseillée à cet égard.Il a indiqué qu’il aurait peut-être été thérapeutique pour elle de travailler dans un autre environnement.

434        Il a réitéré en réinterrogaoire qu’il n’avait pas comme pratique de parler à des gestionnaires de première ligne puisqu’il s’agirait d’une atteinte à la vie privée du patient.

3. M. Vézina

435        M. Vézina est le directeur des services professionnels de l’ACEP.Au moment de l’audience, il occupait ce poste depuis trois ans.En 2012, il était agent des relations de travail à l’ACEP. L’Association comptait à ce moment huit agents des relations de travail qui avaient chacun un portefeuille de six à huit ministères. Affaires autochtones était l’un de ses portefeuilles.

436        Son premier contact avec Mme Asare a eu lieu en 2010 ou en 2011 quand elle a communiqué avec lui afin de lui parler des événements qui se produisaient au travail.Elle avait soulevé des allégations de harcèlement. Il lui a conseillé de mettre par écrit les allégations, de résumer les événements et de les présenter à une personne en situation d’autorité. L’agent négociateur lui donnerait des directives si elle avait besoin d’aide.Il se souvenait des discussions, mais pas d’avoir fait un suivi quelconque.

437        Il lui a parlé au téléphone le 21 février 2012 et a pris des notes sur la discussion. Selon ces notes, il a discuté avec elle du fait que son gestionnaire avait communiqué avec l’université. Elle voulait que l’ACEP envoie une lettre ou demande aux Ressources humaines de dire à la direction de ne pas communiquer avec elle à la maison pendant son congé de maladie.

438        Il a téléphoné à M. Hards, son équivalent chez l’employeur, et lui a indiqué que l’employeur ne devait pas communiquer avec Mme Asare pendant son congé de maladie.M. Hards a répondu qu’il parlerait au directeur.

439        Mme Asare a écrit à M. Vézina le 22 février. Elle a joint une copie de son certificat médical le plus récent et lui a demandé s’il avait réussi à communiquer avec les Ressources humaines afin de transmettre le message selon lequel le directeur ne devait avoir aucun contact avec elle pendant son congé de maladie. Il a répondu qu’il avait transmis le message.

440        Le 16 novembre 2012 ou vers cette date, il a reçu une copie de la lettre informant Mme Asare qu’elle avait été licenciée pour abandon de poste.

441        Il a placé la lettre dans son dossier et a indiqué que l’agent négociateur attend que le membre l’appelle. Il ne savait pas si Mme Asare avait reçu la lettre vu ses instructions sur les communications avec le directeur. L’agent négociateur ne lui a pas envoyé une copie de la lettre et il n’a pas reçu d’autres lettres la concernant. Il ne se rappelait pas s’il avait eu des discussions avec M. Hards au sujet de Mme Asare des mois de février à novembre 2012. Il se souvenait d’avoir reçu un courriel de Mme Asare le 8 février 2013, auquel elle avait joint la copie d’une lettre qu’elle avait envoyée aux Ressources humaines afin de leur demander d’envoyer toute la correspondance à son adresse domiciliaire.

442        À un certain moment par la suite, Mme Asare s’est rendue aux bureaux de l’ACEP et a rencontré l’un des collègues de M. Vézina, Claude Archambault.Un grief a été préparé.M. Vézina l’a signé au nom de l’agent négociateur.M. Vézina ne se rappelait pas d’avoir préparé le grief.

443        Le grief a été présenté le 15 mars 2013. On a interrogé M. Vézina à propos du moment où le grief a été déposé; il a répondu qu’il avait été présenté quand Mme Asare avait pu gérer la lettre de licenciement. Il ne croyait pas que la lettre provenait de l’agent négociateur.

Contre-interrogatoire

444        M. Vézina se rappelait que M. Hards lui avait fait part d’autres préoccupations que l’employeur avait au sujet de Mme Asare dans le cadre de leur conversation téléphonique, en février 2012. On lui a demandé si ces préoccupations avaient donné lieu à un espoir affirmé que Mme Asare subisse une évaluation d’aptitude au travail à Santé Canada. Il a répondu que cela était possible.

445        Il se rappelle avoir été membre d’un groupe d’experts avec le Dr Given, un médecin de Santé Canada, dans le cadre d’un symposium sur le mieux-être. Il se rappelait d’avoir discuté avec le Dr Given sur le fait d’écrire au médecin d’un membre. On lui a demandé si M. Hards et lui avaient discuté de le faire.Il a répondu que cela était possible, très possible.

446        On a demandé à M. Vézina s’il avait informé Mme Asare qu’un employeur a le droit de savoir qu’une absence est motivée. Il a répondu qu’en général, un employé doit informer adéquatement l’employeur de son absence.

447        Il se souvenait vaguement d’avoir reçu une copie de la plainte de Mme Asare à l’encontre de M. Ruseski datée du 29 novembre 2012. Il s’est souvenu de l’avoir lue attentivement et d’avoir discuté de harcèlement et de discrimination avec Mme Asare.

448        On l’a renvoyé à un énoncé dans la plainte qui indique que le 9 février 2012, l’Université d’Ottawa avait communiqué avec Mme Asare afin de l’informer que M. Ruseski avait tenté d’obtenir des renseignements personnels et liés à ses études sans son consentement.Il a indiqué que cette information provenait de Mme Asare.

449        M. Vézina ne se souvenait pas si elle se trouvait en congé de maladie. On lui a demandé si le fait qu’elle se trouve en congé de maladie et qu’elle fréquente l’université aurait sous-entendu qu’il y avait un problème à ses yeux. Il a répondu qu’il s’agirait d’un conseil hypothétique.

450        L’agent négociateur n’a pas déposé de plainte au nom de Mme Asare. En général, les membres présentent eux-mêmes leurs plaintes de harcèlement.

451        Lorsqu’il a reçu une copie de la lettre de licenciement, on lui a demandé s’il se souvenait d’en avoir parlé avec M. Hards.Il a répondu que cela était possible, mais qu’il ne s’en souvenait pas.

452        On a demandé à M. Vézina s’il se souvenait d’avoir parlé à M. Hards de la possibilité que Mme Asare subisse une évaluation d’aptitude au travail. Il a répondu qu’il ne l’avait pas fait, mais qu’il s’agissait habituellement du type de discussion qui se tiendrait quand l’employeur ne possède pas suffisamment de preuves médicales.

453        M. Vézina savait que la Sun Life avait approuvé la demande d’assurance-invalidité de la fonctionnaire; il n’arrivait toutefois pas à se souvenir du moment où il avait appris ce fait.

4. M. Asare

454        M. Asare est le père de la fonctionnaire. Il se souvenait d’avoir téléphoné à Mme McFarlane en avril 2011. On l’avait informé que quelqu’un tentait de communiquer avec lui.Il avait parlé à sa femme, obtenu un numéro et avait fait une conférence à trois. Il savait que Mme McFarlane était l’adjointe administrative de M. Ruseski. Mme McFarlane lui a dit que M. Ruseski voulait envoyer un paquet à la fonctionnaire. M. Asare voulait savoir ce qu’il contenait.

455        Il a dit que la fonctionnaire était malade et qu’un thérapeute ou un médecin lui avait dit de n’avoir aucun contact avec M. Ruseski. Il leur incombait (à lui et à sa femme) de veiller à ce que cela ne se produise pas. On lui a demandé s’il avait communiqué cette information à Mme McFarlane.

456        Une objection a été soulevée sur le fondement de la règle établie dans Browne v. Dunn (1893), 6 R. 67, H.L., selon laquelle même si l’avocat de Mme Asare avait posé la question liée à Mme McFarlane, il ne l’avait pas informée qu’il appellerait un témoignage contradictoire à cet effet. Après avoir entendu les parties, j’ai conclu qu’un arbitre de grief en relations de travail a la latitude pour accueillir la preuve, qu’elle soit admissible en justice ou pas, et j’ai accueilli la question.

457        M. Asare a indiqué que sa femme avait posé des questions à propos du contenu du paquet.Mme McFarlane a refusé de lui dire ce qu’il contenait. Sa femme a dit à Mme McFarlane qu’elle n’était pas censée envoyer quoi que ce soit à la fonctionnaire, que M. Ruseski n’était pas censé communiquer avec la fonctionnaire et qu’elle retournerait le paquet.

Contre-interrogatoire

458        M. Asare a reconnu qu’il avait une relation étroite avec la fonctionnaire et qu’elle habitait à la maison au moment où la discussion téléphonique a eu lieu. Il était fier qu’elle poursuive des études doctorales et qu’elle ait contribué au domaine de l’économétrie. On lui a demandé s’il était d’accord pour dire que la poursuite d’un doctorat exige beaucoup de travail. Il a répondu que c’est Mme Asare qui devrait répondre à cette question. Il a indiqué qu’il sait qu’elle travaille fort.

459        Pendant la discussion avec Mme McFarlane, il a reconnu que sa femme et lui ont dit qu’ils n’accepteraient aucune lettre à moins qu’elle ne leur indique ce qu’elle contenait. Lorsque le messager a cogné à la porte, ils ont refusé de prendre l’enveloppe, ne l’ont pas ouverte et ont refusé de signer afin d’en confirmer la livraison.

460        Il s’inquiétait parce que la fonctionnaire était malade et sa thérapeute lui avait conseillé de n’avoir aucun contact avec M. Ruseski.

461        On a demandé à M. Asare si une restriction quelconque l’empêchait de lire la lettre. Il a répondu que sa femme et lui n’avaient rien à voir dans cette affaire et qu’ils respectaient les ordres du médecin, soit de n’avoir aucune communication avec M. Ruseski.

462        On a demandé à M. Asare s’il avait offert d’autres façons à l’employeur de communiquer avec la fonctionnaire.Il a répondu qu’il se préoccupait davantage de son bien-être.

463        On lui a demandé s’il s’était efforcé de comprendre le problème avec M. Ruseski. M. Asare a répondu qu’il ne s’était pas efforcé de le faire parce que la fonctionnaire n’était pas censée avoir de contacts avec lui. Il a confirmé qu’il n’accepterait rien qui proviendrait du bureau de M. Ruseski. Il a affirmé que sa femme et lui auraient accepté la correspondance si elle provenait des Ressources humaines; ils n’ont toutefois rien reçu de celles-ci.

464        On lui a demandé ce que la fonctionnaire lui avait dit pendant qu’elle se trouvait en congé sur la raison pour laquelle l’employeur avait demandé si elle travaillait à l’université. Il a expliqué que l’université avait envoyé un courriel à la fonctionnaire, auquel elle avait joint une lettre de l’employeur qui voulait obtenir de l’information. Elle l’a autorisé à agir en son nom. Il est allé rencontrer le président du département d’Économie et lui a expliqué ce qui se passait.L’université a voulu obtenir son consentement afin de transmettre l’information. Il a refusé parce que les questions provenaient de M. Ruseski. Si elles étaient provenues d’un autre secteur, comme les Ressources humaines, il n’aurait pas refusé. Il ne devait y avoir aucun contact avec M. Ruseski.

465        On lui a demandé si la fonctionnaire lui avait déjà dit qu’elle avait reçu un courriel dans lequel on posait les mêmes questions.Il a répondu par la négative.

466        On lui a demandé si elle lui avait déjà dit qu’elle se trouvait en congé non autorisé.Il a répondu par la négative.On lui a demandé si la Sun Life lui avait déjà dit qu’elle se trouvait en congé non autorisé.Il a répondu par la négative.

IV. Résumé de l’argumentation

A. Pour le défendeur

467        Le défendeur a abandonné l’argument selon lequel le grief est hors délai.

468        C’est le défendeur qui avait le fardeau de la preuve pour la question de l’abandon.L’agent négociateur avait le fardeau de la preuve pour la question des droits de la personne. Des discussions ont eu lieu pendant cinq ans sur la façon de résoudre cette affaire. Les parties ont demandé à la Commission de se réserver sur la réparation. Les parties se sont entendues sur consentement sur une ordonnance de mise sous scellés à l’égard des renseignements médicaux liés à Mme Asare.

469        Il s’agit d’un dossier important lié à la gestion du milieu de travail et aux obligations d’un employeur à l’égard d’un employé en congé.

470        Mme Asare a refusé de s’acquitter de ses obligations en tant qu’employée ou a négligé de le faire pendant plus d’un an et a donc abandonné son poste.

1. Le critère d’abandon

471        Dans Hayter c. Conseil du Trésor (ministère de la Défense nationale), 2015 CRTEFP 15, aux paragraphes 45 à 47, la Commission établit comme suit le critère auquel un employeur doit satisfaire pour licencier un employé pour abandon de poste :

[45] L’alinéa 12(1)e) de la LGFP, à mon avis, permet à l’administrateur général d’exercer son pouvoir discrétionnaire afin de faire un licenciement pour des raisons non disciplinaires, y compris l’abandon.Le caractère raisonnable de la décision de l’administrateur général doit être examiné par un arbitre de grief (Laye et Lindsay).En d’autres termes, l’employeur doit me convaincre qu’il a agi équitablement et de bonne foi.

[46] J’accepte la conclusion selon laquelle, lorsqu’il a présenté sa preuve, l’employeur n’avait pas à établir que la fonctionnaire avait l’intention d’abandonner son poste (Lindsay).

[47] Cependant, l’employeur doit établir que la fonctionnaire : 1) s’est absentée du travail pendant une longue période; 2) sans en avoir eu l’autorisation; 3) et sans raisons valables, alors que les circonstances relevaient de son contrôle; 4) sans en avoir avisé l’employeur (Laye).

472        Il est acquis que la fonctionnaire s’est absentée pendant une longue période.Elle a quitté le travail le 12 août 2011.Son emploi a pris fin le 13 novembre 2012, après qu’un an et trois mois se soient écoulés.

473        Le congé de la fonctionnaire avait-il été autorisé? Selon le témoignage de M. Ruseski, son congé a été traité en tant que congé autorisé jusqu’au 20 avril 2012, quand il a informé le secteur de la rémunération et des avantages sociaux qu’elle était réputée se trouver en congé non autorisé non payé depuis le 9 août 2011. Elle n’avait pas présenté les certificats médicaux originaux; elle n’avait pas fourni de formulaires de congé et elle n’avait pas répondu à la lettre du 25 janvier 2012 dans laquelle on demandait à la rencontrer afin de discuter de l’information que l’Université d’Ottawa avait transmise à M. Ruseski.

474        Le fait que son congé n’était pas autorisé lui a été communiqué dans une lettre datée du 26 avril 2012. Même s’il est prouvé qu’elle n’a pas reçu la lettre et que la livraison de cette dernière a été refusée, il est prouvé que la Sun Life l’a informée, le 3 juillet 2012, que son congé n’avait pas été autorisé. Les 17 et 23 juillet 2012 respectivement, elle a informé le Dr Kilby et l’agent négociateur que son absence n’était pas autorisée.

475        La question ne consiste pas à déterminer si elle était apte à se présenter au travail; toutefois, étant donné qu’elle avait quitté le travail, elle avait l’obligation de justifier, à la satisfaction de l’employeur, que son état médical excusait son défaut de se présenter au travail.

476        Dans les cas analogues Halfacree c. Administrateur général (ministère de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire), 2012 CRTFP 130, et Halfacree c. Canada (Procureur général), 2014 CF 360, M. Halfacree, un employé qui avait de piètres antécédents de présence au travail, s’était absenté en congé de longue durée de plus de deux ans. Il avait été licencié pour insubordination, essentiellement pour son refus de répondre à la demande de l’employeur d’expliquer son absence du travail pendant ce temps. Il avait remis à son employeur des billets standard de son médecin indiquant qu’il n’était pas apte à retourner au travail.

477        M. Halfacree était agent à l’hippodrome Woodbine, à Toronto (Ontario). Pendant son absence, il travaillait à temps partiel en tant que conducteur de semi-remorques. La question dans cette affaire visait à déterminer s’il avait fait preuve d’insubordination, et pas s’il était en mesure de travailler pendant son congé. La question visait à savoir s’il avait des obligations à l’égard de l’employeur. Dans ce cas, l’employeur n’a pas soutenu qu’il aurait pu se présenter au travail; en l’espèce, l’employeur ne le fait pas non plus.

478        Dans 2012 CRTFP 130, l’arbitre de grief a indiqué ce qui suit aux paragraphes 207, 208 et 210 :

[207] En l’espèce, la réponse à la première question dépend de plusieurs autres questions. D’abord, l’employeur avait-il le droit de demander au fonctionnaire plus de renseignements médicaux que ce qui lui a été fourni au cours des deux années? Si oui, l’omission du fonctionnaire de fournir ces informations est-elle une forme d’insubordination? Et si oui, cette insubordination était-elle justifiée ou y avait-il au moins des facteurs atténuants?

[208] En ce qui concerne la première question, une partie de la relation d’emploi est caractérisée par l’obligation de l’employé de se présenter au travail. Lorsqu’un employé ne se présente pas au travail, il doit fournir à l’employeur une explication pour justifier cette absence […]

[…]

La preuve nécessaire pour satisfaire à cette obligation peut être ténue lorsque cette absence est d’une durée limitée. L’employeur peut se satisfaire d’une excuse verbale ou d’une brève note du médecin. Mais à mesure que les absences se multiplient et s’allongent, la preuve requise pour satisfaire à cette obligation – et pour satisfaire l’employeur – doit être de plus en plus étoffée.

[…]

[210] Le fonctionnaire n’a pas seulement ignoré les demandes de l’employeur pendant plus de deux ans, mais il a continué de fournir les mêmes certificats médicaux (qui, bien souvent, n’étaient même pas remplis au complet) que l’employeur avait déclarés insuffisants. À première vue, je suis d’avis que cette conduite constituait de l’insubordination, voire du mépris à l’endroit de la direction.

479        Un employé a certaines obligations. S’il choisit de ne pas les respecter, en l’espèce, en ne tenant pas au courant l’employeur des circonstances entourant l’absence du travail de la fonctionnaire, cela suffit à justifier une conclusion d’abandon.

480        On fait remarquer que l’information que l’employeur avait sur l’état de l’employé dans Halfacree diffère grandement de celle que l’employeur avait en l’espèce, mais ce fait ne porte pas atteinte au principe.

481        Dans Saskatchewan (Labour Relations and Workplace Safety) v. Saskatchewan Government and General Employees’ Union, 2015 CanLII 23030 (SK LA), aux paragraphes 55 à 57, l’arbitre Ish a résumé ainsi les principes généraux qui s’appliquaient dans cette affaire :

[Traduction]

[55] Les renseignements médicaux sont un aspect de la jurisprudence arbitrale qui a attiré une attention considérable. La base, ou les principes sous-jacents sont assez simples; toutefois, leur application doit, bien entendu, prendre en considération les circonstances et les faits propres à chaque affaire.

[56] Le besoin le plus fondamental d’un employeur est de maintenir ses opérations et ses services sans interruption; à cette fin, il est nécessaire que son effectif soit présent régulièrement. De la même façon, l’obligation la plus fondamentale d’un employé est de se présenter au travail. Cette observation dure et évidente doit être modérée par des droits négociés dans une convention collective, qui reconnaissent que les absences pour cause de maladie et d’invalidité sont justifiées, quoique pas illimités, et qu’elles peuvent donner lieu au droit à des prestations de maladie, qui sont également des droits négociés. En outre, les tribunaux ont reconnu et imposé une obligation de prendre des mesures d’adaptation pour les maladies et les invalidités des employés (encore une fois, non sans limites) et la loi reconnaît de plus en plus les droits liés à la protection des renseignements personnels. Toute cette progression a alimenté et, dans une mesure considérable, compliqué la jurisprudence arbitrale dans ce domaine. Dans une décision d’arbitrage récente de la Saskatchewan, on a fait remarquer ce qui suit :

[Traduction]

Les décisions importantes que l’on nous demande de prendre exigent d’établir avec prudence un équilibre entre les intérêts. Les arbitres ont tenté d’établir un équilibre entre les intérêts liés au droit à la protection des renseignements personnels d’un employé en ce qui concerne les renseignements médicaux et les intérêts commerciaux légitimes d’un employeur, y compris la prévention des abus de prestations de maladie. Il s’agit d’un domaine du droit arbitral qui a fait l’objet d’une attention considérable et qui a évolué considérablement au cours des dernières années, surtout en raison de la sensibilisation accrue de la société canadienne à l’égard des droits à la protection des renseignements personnels des individus. Cette sensibilisation s’est manifestée dans les affaires judiciaires, la loi et la jurisprudence arbitrale. En outre, même si les fiduciaires de renseignements de nature délicate s’engagent à en maintenir la confidentialité et dépensent des ressources considérables pour protéger l’information confidentielle, la technologie moderne a donné lieu à de nombreuses atteintes très publiques qui ont mis en péril la vie privée d’individus. Ainsi, les renseignements collectés eux-mêmes suscitent une inquiétude.

[…] les arbitres ont toujours conclu que la quantité de renseignements médicaux qu’un employeur peut demander pour un congé prolongé ou dans le cas où des problèmes de mesures d’adaptation sont soulevés est différente de celle demandée pour de courtes absences pour maladie ou blessure. Le droit à l’information d’un employeur devient généralement plus important à mesure que le congé se prolonge (voir, par exemple, la décision Sibley, précitée). C’est dans le contexte de nombreuses années d’étude de ces questions importantes par divers tribunaux, en plus des dispositions précises de la convention collective, que nous abordons la tâche qui nous est confiée dans cette affaire. (Cypress, précité, aux paragr. 83-84) [CypressHealthRegion v. Seiu-West, 2014 CanLII 49992 (SK LA)]

[57] Il incombe à un employé d’établir son droit à des prestations de maladie, « cela exige habituellement à un employé de prouver que son absence est légitime, soit qu’il est sincèrement incapable de se présenter au travail pour cause de maladie ou de blessure. L’employeur a le droit d’obtenir une “preuve” suffisante de la maladie ou de la blessure ». (Five Hills Regional Health Authority and S.E.I.U., Local. 299, 2009 CarswellSask 943 (Denysiuk), à laquelle on renvoie dans Cypress, précité). L’arbitre Denysiuk, dans Five Hills, a aussi fait remarquer ce qui suit :

[Traduction]

Il est possible qu’un employé doive fournir plus de renseignements dans certains cas afin d’évaluer la demande de congé de maladie. Cela est particulièrement le cas lorsque l’aptitude de l’employé à retourner au travail ou son besoin de mesures d’adaptation soulèvent des questions. Dans certaines situations où il faut évaluer une demande de congé de maladie ou dans le cas d’une enquête pour abus allégué de congé de maladie, un employé peut être tenu de divulguer plus d’information qu’une simple incapacité à travailler. Un employé peut même être tenu de divulguer un diagnostic. Il s’agirait toutefois d’une exception à la règle générale, qui vise à réduire au minimum l’intrusion(paragraphe 149).

482        Dans les circonstances en l’espèce, l’absence prolongée de la fonctionnaire sans justification suffisante constituait une cause valable de licenciement au motif qu’elle avait abandonné son poste.

483        En tant qu’employée, Mme Asare avait l’obligation positive, quand elle utilisait ses congés de maladie, d’informer l’employeur et ses médecins des activités qui auraient pu sembler incohérentes avec son congé pour des raisons médicales et obtenir une approbation pour mener toutes ces activités. La fonctionnaire, qui était partie en congé de maladie tout en s’inscrivant en même temps au programme doctoral de l’université et en assumant le rôle d’assistante à l’enseignement, était tenue d’obtenir l’approbation de l’employeur et de ses médecins.

484        Dans Royal Columbian Hospital v. Hospital Employees’ Union, [2001] B.C.C.A.A.A. No. 39 (QL), au paragraphe 89, la fonctionnaire a été licenciée de son emploi de commis à l’admission à l’hôpital parce qu’elle avait abusé de ses privilèges de congé de maladie en demandant à son employeur de lui verser des prestations de maladie alors qu’elle occupait un poste identique dans un autre hôpital.L’arbitre Gordon a indiqué ce qui suit :

[Traduction]

89      Il incombe au syndicat de prouver que l’employée était trop malade pour travailler le jour ou les jours où elle a demandé des prestations de maladie : Rosewood Manor. Il est possible que l’attestation de la maladie par un médecin ne constitue pas un motif suffisant à l’absence d’une employée. L’employé qui demande des prestations de maladie a l’obligation de divulguer au médecin toute activité contraire à une incapacité à travailler ou à se rétablir : Re : Kenrock Tools Corp. -and- United Steelworkers (1990), 17 L.A.C. (4th) 416 (Picher). Lorsque ces activités ne sont pas divulguées au médecin, le certificat médical n’excusera pas l’absence de l’employé du travail : Ford Motor Co. of Canada Ltd. –and- United Automobile Workers, Local 1520 (1975), 8 L.A.C.(2d) 149 (Palmer). Les employés « devraient raisonnablement savoir » qu’un congé de maladie vise à leur donner la possibilité de retrouver la santé et qu’ils ont une obligation connexe de diligence et de divulgation à l’égard de leur employeur. Par conséquent, le médecin de l’employé et l’employeur doivent approuver les activités envisagées qui peuvent sembler inhabituelles dans les circonstances. L’arbitre Jackson s’est penché sur ce concept dans Rosewood Manor, où les commentaires qui suivent formulés par l’arbitre Picher dans Re : Kenroc Tools Corp., précité, ont été cités en exemple :

[Traduction]

Aux fins du présent grief, il n’est pas nécessaire de déterminer si M. Laframboise a falsifié sa maladie et a fraudé délibérément son employeur. Même si l’on accepte son témoignage, selon lequel il a effectivement souffert de l’affection physique pour laquelle il a été traité, la preuve divulgue néanmoins une violation de son obligation à l’égard de la compagnie qui est fondamentale au point de constituer une renonciation à tout droit de réclamer des prestations de maladie. […] En tant que bénéficiaire de prestations d’indemnité aux frais de la compagnie, le fonctionnaire avait l’obligation minime de suivre un programme véritable de traitement et de convalescence et de faire autoriser au préalable par son médecin et son employeur toute activité envisagée pouvant être inhabituelle dans les circonstances. M. Laframboise n’a pas fait cela; ce faisant, il s’écarte de l’intention du régime de prestations de maladie et de l’obligation connexe de diligence et de divulgation qu’il a à l’égard de la compagnie.

[…]

485        Dans Alberta (Infrastructure and Transportation) v. Alberta Union of Provincial Employees, [2007] A.G.A.A. No. 73 (QL), une employée du gouvernement de l’Alberta s’était déclarée malade dans son emploi de jour alors qu’elle occupait à temps partiel un autre emploi. Elle a été licenciée au motif qu’elle avait fait une mauvaise utilisation de ses congés, ce qui avait brisé sa relation de confiance avec son employeur.

486        L’arbitre a accueilli l’argument selon lequel elle souffrait d’anxiété et de stress dans le cadre de son emploi quotidien, mais pas dans son emploi à temps partiel.Il a fait les observations suivantes aux paragraphes 50 à 52.

[Traduction]

50 […] Cette commission est convaincue que la preuve indique majoritairement que la fonctionnaire subissait un niveau de stress et d’anxiété suffisant pour obtenir des soins médicaux et se trouver en congé de maladie, au moins de temps à autre, comme l’indiquent les documents et le témoignage à l’appui, même si elle n’a pas été aussi honnête et ouverte qu’elle aurait dû l’être dans ses interactions avec l’employeur auprès duquel elle demandait des prestations de maladie […] Elle aurait dû mettre au courant ses supérieurs de son approche plus tôt, c’est-à-dire qu’elle pouvait tout de même occuper son autre « emploi plus facile » certains soirs des jours de maladie. L’employeur aurait dû être informé dès le début, ce qui lui aurait permis de songer à mener sa propre évaluation médicale externe dans les circonstances […] la fonctionnaire avait une obligation naturelle liée à son travail, selon laquelle elle aurait dû communiquer depuis longtemps la situation à son employeur, ce qu’elle n’a visiblement pas fait. Ainsi, il allait éventuellement supposer le pire une fois la situation mise au jour. Il faut se rappeler l’opinion de l’arbitre Michel Picher dans Kenroc Tools, selon laquelle certaines situations exigent tout simplement à un employé de faire autoriser certaines activités par son médecin et l’employeur au préalable, ce qui, comme l’on s’y attend, comprendrait au moins une discussion éclairée sur la poursuite de son deuxième emploi pendant ses congés de maladie payés. Cette obligation ne tient pas compte du fait que sa situation à temps partiel ne lui causait pas de stress et d’anxiété […]

51      Selon toutes les circonstances présentées, on peut assurément différencier cette situation de celle où un employé en santé choisit de prendre congé auprès de l’un de ses employeurs tout en travaillant plus tôt ou plus tard le même jour pour un autre employeur, pour ses propres fins et sans lien concret ou suffisant avec un problème de santé connexe.En l’espèce, nous nous retrouvons avec une fonctionnaire qui n’a pas été adéquatement ouverte dans un délai opportun afin de divulguer sa présence continue à un travail extérieur, ce qui a donné lieu à des soupçons puisqu’elle avait pu obtenir un soutien médical pour l’année précédente. La fonctionnaire s’est exposée à une réponse disciplinaire, qui ne parvient toutefois pas à justifier son licenciement […]

52      Nous estimons que la pénalité de licenciement doit être annulée. Dans les circonstances présentées, nous avons conclu que la conduite de la fonctionnaire, en ce qui concerne son défaut de divulguer en temps opportun ce qui aurait dû faire l’objet d’une discussion, n’aurait pas pu justifier plus qu’une suspension de trois mois, tout compte fait. Ainsi, nous réintégrons la fonctionnaire à son poste sans perte d’ancienneté et avec indication de ladite suspension dans son dossier […]

487        Le cas Health Employers Assn. of British Columbia v. British Columbia Nurses’ Union, [2014] B.C.C.A.A.A. No. 175 (QL) en est un où une infirmière accréditée a déposé un grief à l’encontre d’une suspension de 15 jours pour avoir soi-disant abusé de congés de maladie et pour malhonnêteté. L’employeur a présenté des éléments de preuve indiquant que pendant quatre journées de maladie, la fonctionnaire se trouvait en réalité à Las Vegas. Le grief a été rejeté puisque l’employeur s’était acquitté de son fardeau de la preuve.L’arbitre a formulé les commentaires qui suivent au paragraphe 36 :

[Traduction]

36      Ainsi, les autorités établissent que, dans les cas où, comme en l’espèce, un employeur impose une mesure disciplinaire pour abus allégué de congés de maladie, il peut s’acquitter du fardeau de la preuve en arbitrage en présentant des éléments de preuve circonstanciels et, plus particulièrement, des gestes posés par l’employé avant, pendant et après son congé de maladie. Afin de s’acquitter de son fardeau dans un cas comme celui en l’espèce, l’employeur n’a pas à prouver que l’employé a commis une fraude délibérée à son égard. La preuve n’a qu’à indiquer qu’il y a eu manquement à l’obligation de l’employé d’obtenir l’autorisation préalable de son médecin et de son employeur pour prendre des vacances à l’extérieur de la maison ou partir en voyage pendant un congé de maladie. Pourquoi? Parce que les arbitres ont déterminé que le fait de faire un tel voyage sans autorisation préalable pendant un congé de maladie est une conduite contradictoire au but escompté des dispositions contractuelles sur le congé de maladie et constitue en soi un motif valable à une mesure disciplinaire quelconque. Si le syndicat souhaite prouver que l’employée avait une permission médicale pour faire un voyage ou prendre des vacances à l’extérieur pendant son congé de maladie, c’est à lui qu’il incombe d’établir ce fait.

488        Selon les circonstances en l’espèce, Mme Asare devait manifestement faire une divulgation. Les notes de M. Vézina indiquent que l’employeur l’a interrogée sur son travail et ses études. Il a indiqué dans son témoignage que le fait qu’elle fréquente l’université alors qu’elle se trouvait en congé de maladie aurait sous-entendu qu’il y avait un problème.

489        Du point de vue de l’employeur, il avait le droit d’obtenir une attestation médicale supplémentaire. Les billets médicaux soumis n’établissent pas le droit de la fonctionnaire à un congé de maladie. Selon la jurisprudence citée, un billet médical peut justifier une absence à court terme, mais plus l’absence est longue, plus l’obligation de la justifier est grande, surtout en présence de renseignements contradictoires sur la santé de l’employé.

490        Tout y est en l’espèce. Au départ, l’employeur a accepté les billets médicaux à leur valeur extrinsèque. Différents médecins ont été impliqués. L’absence s’est étendue jusqu’à quatre mois. À ce moment, les billets médicaux indiquaient que la date de retour au travail n’était pas définie. En août, M. Ruseski avait dit à la fonctionnaire que son congé d’études était refusé et que l’arrangement antérieur ne se poursuivrait pas. Elle a répondu qu’il lui demandait de choisir entre ses études et son travail. Il a dit que le choix lui appartenait. En janvier 2012, quand il a appris qu’elle s’était inscrite à l’Université d’Ottawa, il a conclu qu’elle avait fait son choix.

491        Selon la preuve, l’employeur a agi de manière raisonnable et pas par caprice. M. Ruseski a écrit à Mme Asare afin de l’informer de ce que l’Université d’Ottawa lui avait appris et de lui demander de se présenter à une réunion afin d’expliquer la situation. Il ne disposait d’aucune information selon laquelle elle n’accepterait aucune communication de sa part.

492        M. Hards avait fait part à M. Vézina d’autres préoccupations de l’employeur entourant l’absence du travail de Mme Asare, ce qui a possiblement donné lieu à la possibilité qu’elle subisse une évaluation d’aptitude au travail à Santé Canada. Quand M. Ruseski a appris qu’elle ne communiquerait pas avec lui, il a répondu de la faire rencontrer un représentant de Santé Canada plutôt que lui.

493        Aucun élément de preuve n’a été présenté afin de montrer que Mme Asare n’était pas en mesure d’ouvrir une enveloppe et de lire une lettre envoyée par M. Ruseski. De toute évidence, le message de M. Vézina n’a pas été présenté clairement ou par écrit.

494        Mme Asare a rejeté son emploi. Elle n’a pas fait accepter au préalable ses études et son emploi d’assistante à l’enseignement. Aucune preuve n’a été présentée selon laquelle elle avait discuté du fait qu’elle poursuivait ses études et qu’elle travaillait en tant qu’assistante à l’enseignement avec l’un des médecins de la clinique des services de santé de l’Université d’Ottawa qui ont signé ses billets de congé de maladie avant qu’elle rencontre le Dr Kilby.

495        Selon la preuve, le Dr Kilby était quelque peu au courant du fait qu’elle menait des études doctorales. Il a indiqué dans son témoignage qu’il ne pouvait pas se prononcer sur sa capacité de se présenter au travail tout en menant des études doctorales. Il ne se rappelait pas s’il savait qu’elle était assistante à l’enseignement.

496        Après janvier 2012, elle n’a pas rencontré l’employeur afin d’expliquer la situation. Elle a refusé la correspondance qu’il lui envoyait; elle a en fait pris des mesures concrètes pour l’empêcher d’obtenir de l’information. Elle a délégué à son père la responsabilité d’informer l’Université d’Ottawa de ne divulguer à l’employeur aucun renseignement sur son programme d’études ou sur le fait qu’elle était employée en tant qu’assistante à l’enseignement. Il ne s’agissait pas de renseignements médicaux; l’employeur aurait dû obtenir cette information.

497        Elle a demandé à son agent négociateur et à ses parents de ne pas communiquer avec l’employeur. Elle n’a pas recouru aux services d’un intermédiaire afin de régler la situation, malgré les conseils de ses médecins.

498        À la suite de sa discussion avec M. Ruseski, le 11 août 2011, elle aurait dû réaliser que l’employeur aurait des préoccupations s’il découvrait qu’elle était inscrite au programme de doctorat et qu’elle travaillait en tant qu’assistante à l’enseignement.

499        Elle savait qu’elle se trouvait en congé non autorisé. L’agent négociateur et le Dr Kilby lui ont tous deux conseillé de régler la situation.

500        Les éléments qui suivent appuient la conclusion d’abandon :

  • le 11 août 2011, la discussion au cours de laquelle Mme Asare a indiqué que l’employeur la contraignait à choisir entre sa carrière et son doctorat;
  • le 11 août 2011, la discussion au cours de laquelle l’employeur a mis fin à l’arrangement officieux;
  • le 12 août 2011, le lendemain de la conversation, elle présente un billet de congé de maladie pour un mois; pendant ce mois, elle s’est inscrite à des cours du programme de doctorat et a accepté l’offre de poste d’assistante à l’enseignement le 13 septembre, même si elle n’avait pas obtenu de billet médical pour la période postérieure au 12 octobre;
  • à ce moment, aucun renseignement objectif selon lequel elle serait absente du travail pour une période de plus de 30 jours n’était disponible; des billets subséquents ont été préparés, chacun pour un mois environ; il n’y avait toutefois aucune certitude quant à une absence de longue durée pour elle;
  • quand le premier semestre s’est terminé, elle s’est de nouveau inscrite à deux cours pour le semestre d’hiver, même si elle présentait des billets de congé de maladie tous les mois, et elle a posé sa candidature pour un poste d’assistante à l’enseignement, ce qui a donné lieu à un appel à l’employeur;
  • deux cours par semaine, qui se donnent fréquemment pendant les heures de bureau, et un emploi à temps partiel de 10 heures par semaine en tant qu’assistante à l’enseignement;
  • le programme de doctorat exige un engagement de six ans;
  • Mme Asare était dans l’impossibilité d’assister aux audiences prévues pour le présent arbitrage en raison de ses obligations scolaires;
  • elle a refusé la correspondance de l’employeur;
  • quand elle a appris qu’elle se trouvait en congé non autorisé, elle n’a rien fait.

501        Dans Lindsay c. Agence des services frontaliers du Canada, 2009 CRTFP 62, la fonctionnaire s’estimant lésée a été congédiée pour des motifs autres que disciplinaires au motif qu’elle s’était absentée du travail sans autorisation pendant une période de plusieurs mois et qu’elle n’avait pas signifié son intention de revenir au travail.L’arbitre de grief a affirmé ce qui suit aux paragraphes 92 et 93 :

[92] La fonctionnaire n’a pas présenté de preuve démontrant qu’elle ne pouvait pas retourner au travail.Sa seule explication était qu’elle n’avait pas reçu la lettre du 7 novembre 2001 de M. Sheridan avant le 12 décembre 2001. Je ne suis pas convaincu que cela soit vrai, mais même s’il s’agit de la vérité, l’employeur était tout de même en droit de la licencier comme il l’a fait. La fonctionnaire avait déjà été prévenue à la fin août et en septembre 2001 qu’elle pourrait être licenciée. Il est raisonnable de penser que la fonctionnaire aurait dû vérifier son courrier en novembre et en décembre 2001, sachant qu’elle était en congé non autorisé. Par ailleurs, elle n’a pas tenté de communiquer avec l’employeur, les 12 ou 13 décembre 2001, après avoir reçu, selon ses prétentions, la lettre de l’employeur datée du 7 novembre 2001.

[93] Un employeur a pleinement le droit de s’attendre à ce qu’un employé se présente au travail.Il s’agit d’un élément intrinsèque de la relation d’emploi et d’un contrat d’emploi.L’employé doit avoir une autorisation préalable pour s’absenter du travail.Cette autorisation est donnée en conformité avec les règles établies dans la convention collective.Les seules exceptions à cette logique fondamentale seraient les situations où l’employé ne peut pas, pour des motifs impérieux, communiquer avec l’employeur pour obtenir une autorisation.Tel n’est pas le cas en l’espèce.Par conséquent, l’employeur avait le droit de licencier la fonctionnaire pour des motifs administratifs, à savoir que la fonctionnaire n’était pas disponible pour travailler.

502        Les circonstances déchargeaient-elles ou excusaient-elles Mme Asare de l’obligation de communiquer avec l’employeur pour obtenir une autorisation de congé dans la situation en l’espèce? La défense principale était que le Dr Kilby lui avait dit de ne pas communiquer avec la direction.

503        Il a été compris, selon la preuve présentée par la fonctionnaire, qu’il s’agissait du conseil du médecin. Le témoignage du Dr Kilby contredit cette preuve, puisqu’il a indiqué que la façon appropriée de gérer la situation était de parler aux Ressources humaines et pas aux cadres. Le conseil du Dr Kilby n’était pas propre à ce lieu de travail. Mme Asare n’a pas communiqué avec les Ressources humaines, comme il lui avait conseillé de faire. Chacun de ses certificats médicaux a été envoyé à la direction, à son superviseur ou à l’adjointe de M. Ruseski, Mme McFarlane. Étant donné qu’elle envoyait ses billets médicaux par courriel à la direction, il était logique pour cette dernière d’y répondre quand elle a voulu obtenir des précisions sur sa situation. S’il fallait fonctionner différemment, elle aurait dû le mentionner.

504        Le Dr Kilby ne pensait pas qu’elle refuserait de recevoir toute information. Quand on l’a interrogé sur la lettre du 3 août 2012 qui lui a été envoyée afin d’obtenir son consentement à lui parler, il a indiqué qu’il croyait qu’elle était inappropriée. Toutefois, quand on l’a interrogé sur la demande de Santé Canada, il croyait que cette demande était adéquate et qu’il ne fallait pas l’ignorer.

505        Le 17 juillet 2011, la fonctionnaire lui a dit qu’on l’avait informée qu’elle était réputée se trouver en congé non autorisé. Il lui a répondu que cette situation était grave et l’a empressée de prendre des mesures, par l’intermédiaire de l’agent négociateur ou d’un avocat afin de régler cette affaire.

506        Mme Asare n’a pas suivi ce conseil. Par la suite, l’employeur lui a envoyé deux autres lettres qu’elle a ignorées. Comme dans Halfacree, au paragraphe 216, si la situation au travail empêchait le contact, elle aurait pu recourir à l’agent négociateur en tant qu’intermédiaire. Dans les circonstances, on ne peut conclure à l’existence de raisons convaincantes pour ignorer la demande d’information.

507        L’avocat de la fonctionnaire fera valoir que la demande d’assurance-invalidité présentée à la Sun Life a été acceptée. La Sun Life n’est pas déléguée pour prendre des décisions sur l’autorisation de congés. Aucune autorité arbitrale ne reconnaîtrait le rôle de la Sun Life. Dans la mesure où Mme Asare croyait que l’approbation de sa demande d’assurance-invalidité par la Sun Life régulariserait son statut, l’employeur lui a envoyé deux autres lettres. Elle n’a jamais demandé à savoir si la question en suspens avait été réglée.

508        Après deux ans d’assurance-invalidité, un employé doit être en mesure d’occuper n’importe quel poste. Cela soulève à tout le moins la question de déterminer si l’on aurait pu l’affecter à un travail dans un poste adapté à ses besoins. L’employeur n’a jamais reçu de renseignements médicaux complets ou de demande de mesures d’adaptation.

509        Il est possible que l’attestation de la maladie par un médecin ne constitue pas un motif suffisant à l’absence d’un employé. L’employé qui demande des prestations de maladie a l’obligation de divulguer au médecin toute activité contraire à une incapacité à travailler ou à se rétablir. Si ces activités ne sont pas divulguées, le certificat médical n’excusera pas l’absence de l’employé du travail. Aucune preuve n’a été présentée selon laquelle Mme Asare a mentionné au Dr Kilby de façon plus détaillée qu’elle était inscrite au programme de doctorat et qu’elle travaillait en tant qu’assistante à l’enseignement. Sa preuve ne suffit pas à justifier le congé de Mme Asare du 11 au 16 août 2012.

B. Pour la fonctionnaire s’estimant lésée

510        Le présent cas concerne l’abandon.Il ne s’agit pas d’un cas de mesures disciplinaires.Il faut faire une distinction dans les critères à appliquer.

511        Comme il a été indiqué dans Laye c. Administrateur général (ministère de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire), 2013 CRTFP 27, l’abandon ressemble à une détermination faite par l’employeur selon laquelle un employé a démissionné.Il ne s’agit pas d’une situation où un employé a été suspendu.

512        Dans Laye, la Commission a indiqué que la détermination d’un employeur selon laquelle un employé a abandonné son poste est évaluée selon le critère du caractère raisonnable et que l’employeur a l’obligation d’agir équitablement et de bonne foi lorsqu’il licencie un employé pour des motifs non disciplinaires.Voir Laye, au paragraphe 153.L’employeur n’a pas agi équitablement ou de bonne foi.

513        Aucun cas n’a été présenté où un employé avait été réputé avoir abandonné son poste pendant qu’il se trouvait en congé de maladie approuvé.

514        L’employeur a suggéré que la Sun Life est une société privée n’ayant aucun lien de dépendance avec lui. L’invalidité de longue durée est une modalité d’emploi. L’employeur savait que Mme Asare avait présenté une demande d’assurance-invalidité. M. Ruseski a pris part à ce processus et a reçu une copie de toute la correspondance. La mesure prise par la suite par le défendeur, soit de présumer que Mme Asare avait abandonné son poste, prouve qu’il a agi de mauvaise foi.

515        Le défendeur a une opinion draconienne du congé de maladie.Il suppose qu’un employé qui se trouve en congé de maladie est à la maison ou à l’hôpital. Cette opinion mine la gravité de la maladie mentale dont la fonctionnaire souffrait.

516        La force probante de la preuve montre que la maladie de la fonctionnaire l’empêchait de travailler dans ce lieu de travail et dans cet environnement.Les tests médicaux soutenaient essentiellement son absence prolongée du travail.Il s’agit de motifs valables.

517        L’employeur a autorisé son absence en congé de maladie jusqu’au 26 avril 2012. Il est extrêmement raisonnable pour une personne qui présente une demande d’assurance-invalidité à la Sun Life et qui voit cette demande être approuvée de conclure qu’elle n’aurait pas à fournir d’autres renseignements et qu’elle n’aurait pas besoin de communiquer avec l’employeur.

518        Dans Canada (Procureur général) c. Grover, 2007 CF 28, aux paragraphes 64 à 68, la Cour fédérale a exposé le principe d’équilibre entre les intérêts liés aux droits des employés en matière de vie privée et les droits de l’employeur de gérer un milieu de travail :

[64]    L’analyse de l’arbitre et la définition qu’elle a donnée du principe juridique applicable découlent directement de la jurisprudence pertinente en matière de droit du travail.Le principe de base est que les employés jouissent d’un droit élevé en matière de vie privée, pour ce qui concerne leur intégrité corporelle et le recours à un médecin; il y a donc intrusion si un employé est examiné contre sa volonté.Par conséquent, l’employeur ne saurait ordonner à un employé de se faire examiner par un médecin choisi par l’employeur sauf s’il existe une obligation contractuelle ou une disposition législative explicite en ce sens. (Thompson and Oakville (Town) (1963), 41 D.L.R. (2d) 294 (H.C. Ont.), page 302.)

[65]    Nonobstant ce qui précède, il est également bien établi que les employeurs ont l’obligation importante de garantir un milieu de travail sécuritaire.Cela signifie que les employeurs ont le droit d’en savoir davantage sur le dossier médical d’un employé s’il y a des motifs raisonnables et probables de croire que l’employé constitue un risque pour la santé ou la sécurité en milieu de travail.

[66]    Il ne s’ensuit pas qu’un employeur peut automatiquement exiger d’un employé qu’il subisse un examen médical.Pour tenir compte du droit de l’employé à sa vie privée et à son intégrité corporelle, l’employeur doit explorer d’autres solutions s’il veut obtenir les renseignements nécessaires.Si l’employeur n’est pas satisfait de ces autres solutions, par exemple s’il juge insuffisant le certificat médical produit par l’employé, alors il doit lui expliquer clairement les raisons pour lesquelles le document produit ne suffit pas.Encore une fois, cette solution respecte le droit de l’employé à sa vie privée, outre qu’elle lui permet d’évaluer les objections de l’employeur et de produire d’autres renseignements au besoin.Ce n’est qu’après que toutes ces étapes ont été franchies qu’un employeur pourra dans certains cas insister pour qu’un employé se présente devant un médecin choisi par l’employeur.(Air Canada c. Canadian Airline Employees Association (1982), 8 L.A.C. (3d) 82 (Simmons), pages 13-14; Riverdale Hospital c. Canadian Union of Public Employees, Local 79 (1985), 19 L.A.C. (3d) 396 (Burkett), pages 406-407; Nelsons Laundries Ltd. and Retail Wholesale Union, Local 580 (1997), 64 L.A.C. (4th) (Somjen), pages 125-127.)

[67]    La Cour divisionnaire de l’Ontario a récemment confirmé la jurisprudence arbitrale en la matière. Dans le jugement Ontario Nurses’ Association v. St. Joseph’s Health Centre (2005), 76 O.R.(3d) 22 (C. div. Ont.), la juridiction ontarienne écrivait ce qui suit :

[Traduction]

[19] On nous a renvoyé à plusieurs décisions arbitrales où est examinée la question de savoir quels renseignements un employeur peut exiger d’un employé qui revient au travail après un congé pour raisons médicales.Comme l’on pouvait s’y attendre, des lignes de démarcation ont été tracées par les arbitres compte tenu du droit à la vie privée.

[20] D’après la jurisprudence arbitrale majoritaire, les employeurs sont fondés à obtenir des renseignements médicaux pour s’assurer qu’un employé qui revient au travail est en mesure d’y revenir d’une manière sécuritaire, sans faire courir de risque aux autres.L’obligation première de l’employé est de présenter un bref certificat de son médecin déclarant qu’il est apte à revenir au travail.Si l’employeur a des motifs raisonnables de croire que l’état de santé de l’employé constitue un danger pour lui-même ou pour autrui, l’employeur peut alors lui demander des renseignements additionnels propres à apaiser les craintes précises qu’il peut avoir, et cela après en avoir expliqué les raisons à l’employé. La demande doit se rapporter au motif de l’absence; aucune enquête de nature générale sur la santé de l’employé n’est autorisée. À mon avis, ce sont là des principes justes.

[68]    Il importe aussi de souligner encore une fois que l’intérêt de l’employeur doit être la sécurité.Les doutes qu’il peut avoir sur la validité du congé de maladie d’un employé ne sauraient l’autoriser à exiger qu’il subisse un examen médical.Il y a en effet une « différence fondamentale » entre le fait d’exiger un examen médical pour mesurer l’aptitude au travail et le fait de vérifier la véracité d’une maladie(décision Riverdale Hospital, précitée, pages 405-406.)

519        Dans Machacynski c. Conseil du Trésor (Agence des services frontaliers du Canada), 2012 CRTFP 40, la Commission a renvoyé aux extraits qui suivent de Canadian Labour Arbitration de Brown et Beatty cités dans le résumé de l’argumentation du fonctionnaire s’estimant lésé (au paragraphe 33) :

[Traduction]

[…] En règle générale, les arbitres ont déclaré qu’un employeur ne peut exiger une évaluation médicale d’une maladie ou incapacité que d’une manière et à un moment qui soient conformes aux modalités de l’entente et lorsqu’il existe un fondement raisonnable pour une telle exigence […][paragraphe 8:3320]

[…] Conformément aux règles de procédure et de preuve normales, le fardeau de la preuve incombe à l’employeur lorsqu’il s’agit d’établir que les preuves fournies par l’employé sont insatisfaisantes.

Même dans les cas où un employeur a un motif légitime pour insister sur le fait qu’un employé fournisse un certificat médical satisfaisant en vue d’attester ses absences et/ou son aptitude à retourner au travail, son droit n’est pas absolu ou inconditionnel. Tant les circonstances dans lesquelles ce droit est exercé que la manière dont il est exercé doivent être conformes aux modalités de la convention collective et au caractère raisonnable […] Quelle que soit la lacune, il y a consensus qu’il est interdit à un employeur de refuser un certificat médical sans expliquer à l’employé les fondements de ses doutes ni indiquer exactement les renseignements qui y manquent. [paragraphe 7:6142]

[…] Il y a également consensus quant au fait que, même si un employeur a un motif légitime d’exiger un certificat médical du médecin traitant de l’employé lorsqu’une demande de prestation de maladie est effectuée, il ne peut insister pour que l’employé se soumette à un examen effectué par son propre médecin ou par un médecin qu’il n’a pas choisi lui-même […] [paragraphe 8:3320]

[…]

520        Dans ce cas, l’arbitre de grief a accueilli le grief et a conclu que l’employeur avait réagi au diagnostic médical du fonctionnaire s’estimant lésé de manière hâtive et déraisonnable.

521        Dans Major c. Administrateur général (ministère des Pêches et des Océans), 2017 CRTEFP 27, la Commission a conclu que la décision d’abandon de poste n’était pas permise quand une décision sous-jacente à cette déclaration n’est pas légitime. Dans ce cas, l’employeur avait cru à tort qu’il pouvait réaffecter une employée à un poste différent dans un lieu géographique différent sans obtenir son consentement.

522        En l’espèce, les lettres que M. Ruseski a envoyées à Mme Asare affichent une certaine iniquité et une motivation personnelle. Le défendeur n’a appelé aucun témoin des secteurs des ressources humaines ou de la rémunération et des avantages sociaux. L’absence de ces secteurs dans les communications avec la fonctionnaire est un fait important. C’est M. Ruseski qui a écrit toutes les lettres, même s’il aurait pu faire participer d’autres secteurs à divers degrés. Il n’a pas impliqué M. Hards ou l’agent négociateur. Il n’a pas pris la peine d’envoyer une copie des lettres à l’agent négociateur, hormis celle dans laquelle il présumait que Mme Asare avait abandonné son poste.

523        Mme Asare a témoigné sur ses antécédents professionnels. Selon son évaluation de rendement datée du 31 mai 2011, elle avait atteint ses objectifs et elle était une bonne employée.

524        On ne saurait distinguer le cas de la cause sous-jacente de son absence, attribuable à la plainte de harcèlement rejetée 10 jours après son dépôt. La réponse de l’employeur a donné lieu à son départ en congé de maladie après la réunion du 11 août 2011.

525        Une personne raisonnable qui examinerait la lettre de M. Ruseski du 11 août 2011 conclurait qu’elle était de nature disciplinaire. Ce sont la lettre et la réponse à la plainte de harcèlement qui ont suscité la réaction médicale.

526        Elle est partie en congé en raison d’une invalidité. Une employée a lancé un appel à l’aide. Elle a demandé un congé personnel, qui lui a été refusé.Elle a demandé à relever d’un superviseur différent; on l’a rejetée.Elle a demandé un congé d’études; il a été refusé.En fin de compte, elle a pris un congé de maladie.

527        Le défendeur a sous-entendu qu’elle avait organisé le congé de maladie pour faire son doctorat.Cela est absurde. Dans la lettre du 11 août 2011, on reconnaît que l’on s’inquiète pour sa santé. M. Ruseski a reconnu qu’elle souffrait peut-être d’une invalidité et lui a conseillé d’obtenir de l’aide. La lettre du 16 août 2011 témoigne du fait qu’elle a demandé à relever d’un autre superviseur. M. Ruseski a répondu qu’il serait prématuré de le faire. C’est une combinaison de lettres qui l’a poussée en congé de maladie.

528        Les certificats médicaux n’ont pas été contestés quand ils ont été présentés.Ils ont été acceptés. Les formulaires de congé ont donné lieu à une confusion; une interaction raisonnable a cependant eu lieu jusqu’à la fin de l’année 2011. Elle s’est efforcée de trouver un médecin de famille, ce qu’elle a réussi à faire en novembre 2011.

529        Pendant la rencontre avec le Dr Kilby, le 2 novembre 2011, elle lui a dit qu’elle était étudiante à temps plein au doctorat en économie en plus d’être employée à temps plein à Affaires autochtones et du Nord et qu’elle ne travaillait pas depuis le 12 août 2011. Il lui a conseillé de quitter cet environnement de travail et lui a indiqué qu’elle n’était pas dans une condition à retourner au travail avant d’avoir subi une évaluation psychiatrique.

530        Mme Asare avait informé la Dre Fisher qu’elle avait travaillé en tant qu’assistante à la recherche et qu’elle n’avait eu aucune difficulté dans ce contexte.

531        Sa thérapeute lui a conseillé de poursuivre ses études.

532        En ce qui concerne l’obligation d’un employé de communiquer les activités contradictoires à un congé de maladie, la preuve n’établit pas que les activités de la fonctionnaire étaient contradictoires à ce point. Le fait d’être assistante à l’enseignement est entièrement différent de celui de travailler dans un environnement de travail toxique. Son poste était thérapeutique, selon elle. Il faisait partie de son programme de doctorat et elle n’était pas rémunérée pour le travail; elle recevait plutôt un crédit pour ses frais de scolarité. Elle l’avait fait avant et après son congé de maladie. Elle avait entièrement l’intention de travailler à temps plein tout en poursuivant ses études.

533        À mesure que le temps a passé, elle a entrepris de faire une demande d’assurance-invalidité.Elle a rempli le formulaire connexe le 20 mars 2012.

534        Le 22 avril 2012, elle a écrit au secteur de la rémunération et des avantages sociaux afin de demander à l’employeur de remplir sa déclaration pour les formulaires d’assurance-invalidité. Il s’agissait là d’un exemple de communication d’une employée avec son employeur, où elle divulguait qu’elle présentait une demande d’assurance-invalidité; il ne s’agissait pas d’un cas où une employée songeait à démissionner.

535        Il est possible que la manière dont Mme Asare aurait dû gérer la lettre envoyée en janvier 2012 relative à l’appel que l’employeur avait reçu de l’Université d’Ottawa soulève des questions.

536        Mme Asare et le Dr Kilby ont tous deux indiqué dans leur témoignage qu’on lui avait conseillé de ne pas communiquer avec son superviseur. Selon la preuve qu’elle a présentée, elle comprenait que le conseil du Dr Kilby signifiait qu’elle ne devrait pas communiquer avec M. Ruseski. Elle a toutefois communiqué avec les Ressources humaines, le 22 avril 2012, et avec l’agent négociateur. Elle a communiqué avec M. Vézina afin de l’informer qu’elle ne voulait pas que la direction communique avec elle pendant qu’elle se trouvait en congé de maladie et qu’elle voulait que cette information soit transmise à l’employeur. Il ne s’agit pas de gestes qu’une personne qui abandonne son emploi pose. Elle souffrait de dépression, ce qui l’empêchait de se présenter au travail; il s’agissait d’un motif valable à son absence de communication avec son employeur, selon toute norme objective.

537        En plus de communiquer avec M. Vézina, en février 2012, elle a fait un suivi auprès de lui. Elle a pris cette mesure concrète pour s’assurer que la direction avait reçu le message transmis par l’agent négociateur.

538        Dans le courriel qu’elle a envoyé à M. Vézina, le 29 novembre 2012, auquel elle joignait l’ébauche de sa plainte, elle lui a demandé de déposer un grief à l’encontre de M. Ruseski pour avoir affirmé qu’elle se trouvait en congé non autorisé.Ce n’est pas le geste que pose une employée qui abandonne son poste. Dans l’ébauche de plainte, elle affirmait qu’elle avait été incapable de retourner au travail en raison d’une maladie.

539        Le 31 juillet 2012, on l’a informée au moyen d’une lettre que la Sun Life avait approuvé sa demande de prestations selon l’avis médical présenté.La lettre a été transmise à l’employeur. L’approbation de sa demande de prestations aurait porté une personne raisonnable à croire qu’elle n’avait plus besoin de communiquer avec l’employeur jusqu’à ce qu’elle soit prête à retourner au travail, même si elle avait pu comprendre que l’employeur avait révoqué son congé.

540        Le 8 février 2013, elle a écrit à M. Vézina afin de lui mentionner que la correspondance pouvait être envoyée à son adresse domiciliaire.

541        Le 10 avril 2013, à la suite du licenciement, l’employeur a reconnu que la lettre du 23 janvier 2013 envoyée par la fonctionnaire comprenait un certificat médical daté du 14 janvier 2013 signé par le Dr Kilby, qui indiquait qu’elle serait en mesure de retourner au travail le 1er février 2013.

542        L’employeur savait assurément que Mme Asare avait présenté une demande de prestations d’assurance-invalidité.

1. Allégation de discrimination

543        Dans la déclaration de l’employeur de la demande d’assurance-invalidité, on demande si l’employée peut retourner au travail selon des heures réduites.La case de réponse cochée était « non ». L’employeur a indiqué sur le formulaire que l’organisation est petite et souvent appelée à répondre à des demandes urgentes et spéciales ou à participer à des réunions organisées à court préavis. La fonctionnaire possédait une expérience spécialisée qui ne lui permettait pas de travailler dans d’autres sections de la direction générale ou du secteur.

544        Elle n’a pas reçu ou examiné les lettres précises qui lui ont été envoyées jusqu’au 23 mars 2013, après son licenciement.

545        Elle a consulté un médecin.On lui a conseillé de ne pas communiquer avec ses superviseurs.

546        La réponse de l’employeur à l’information que l’Université d’Ottawa lui avait donnée était injuste et disproportionnée dans le contexte du cas. Quand M. Ruseski a eu connaissance de l’information, il s’est lancé dans une campagne de rédaction de lettre et n’a pas demandé l’aide des secteurs des relations de travail ou des ressources humaines. Il a écrit des phrases telles que [traduction] « Présentez-vous à mon bureau » et [traduction] « Je veux parler à votre médecin ». Les lettres comportent un élément d’intimidation ou de harcèlement continu. Il a écrit à l’Université d’Ottawa sans obtenir le consentement de Mme Asare.

547        Il est possible que l’employeur ait eu des questions sur les activités académiques de Mme Asare.Il était aussi au fait des certificats médicaux. Qu’est-ce qui l’aurait empêché de reculer et de régler ces questions à son retour de son congé?

548        Cette enquête est allée bien au-delà de ce qui est raisonnable en écrivant directement à l’Université d’Ottawa.C’était injuste. Même en étant conscient qu’un employeur a le droit d’obtenir de l’information, le ton qui se dégage des lettres indique qu’il s’engageait sur la voie d’accuser la fonctionnaire de fraude.

549        Elle n’a jamais reçu de lettre de Santé Canada où on lui demandait de consentir à subir un examen médical.

550        Un certain nombre d’options différentes s’offraient à M. Ruseski. Plutôt que de poursuivre sa campagne de rédaction de lettre, il aurait dû faire entrer en jeu les Ressources humaines. Il aurait dû reculer après avoir appris que la demande d’assurance-invalidité avait été accueillie. Il s’est conduit de manière honteuse et irrespectueuse à l’égard d’une personne en congé de maladie.

551        Dans la lettre qu’il a envoyée à Santé Canada le 26 avril 2012 afin de demander une évaluation d’aptitude au travail pour Mme Asare, M. Ruseski a indiqué que le représentant de l’agent négociateur de celle-ci avait communiqué avec M. Hards des Relations de travail, le 21 février 2012, afin de lui dire qu’elle l’avait informé que son médecin avait indiqué qu’elle ne devait avoir aucun contact avec le directeur.

552        Mme McFarlane a téléphoné à la résidence de Mme Asare afin de l’informer qu’une correspondance lui serait envoyée et qu’elle devrait la recevoir le lundi 30 avril 2012.En réponse à une question posée par les parents de Mme Asare, Mme McFarlane a indiqué qu’elle ignorait ce que contenait l’enveloppe.M. Ruseski n’a jamais tenté de communiquer avec l’agent négociateur.

553        Mme Asare n’a pas abandonné son poste. Elle souffrait d’une invalidité que le Dr Kilby a confirmée. Les qualifications indiquées dans son curriculum vitae parlent d’elles-mêmes. Il était bien placé pour faire un diagnostic de dépression.Les autres rapports d’expert qui corroboraient la preuve n’ont pas été contestés.Selon la preuve, elle était malade et se concentrait à se rétablir.

554        L’employeur, qui était au fait de sa maladie, lui a demandé de fournir une explication valide à sa conduite, ce qui est totalement déraisonnable.Cette demande n’a pas été faite de bonne foi. L’employeur a tiré une conclusion déraisonnable et a eu une réaction dure et injuste à un appel téléphonique de l’Université d’Ottawa. Il a cru à tort que la fonctionnaire menait une activité frauduleuse.

555        Le grief à l’encontre de son licenciement pour abandon devrait être accueilli.Il s’agit d’un cas prima facie de discrimination.L’employeur a ignoré la preuve médicale en sa possession. Il a refusé de répondre à ses besoins en août 2011, quand elle a demandé à ce que divers types de mesures d’adaptation soient prises. Lorsqu’elle a été prête à retourner au travail, on l’avait licenciée. La fonctionnaire a demandé à la Commission de conclure que le licenciement était injustifié et discriminatoire.

556        Un certain nombre des autorités citées par l’employeur portaient sur des mesures disciplinaires.Les faits dans Halfacree étaient très différents. Les mêmes billets d’inaptitude au travail étaient présentés encore et encore. L’analyse ne s’applique pas aux abandons.

557        Dans Alberta (Infrastructure and Transportation), un fonctionnaire s’estimant lésé n’avait pas été adéquatement ouvert dans un délai opportun afin de divulguer un travail continu à l’extérieur, ce qui a suscité des soupçons en plus de l’exposer à une réponse disciplinaire.Le licenciement était toutefois trop sévère.

558        L’affaire Kenroc Tools portait sur une suspension de cinq semaines, et pas sur un licenciement.

C. L’argument en réplique du défendeur

559        En ce qui concerne la deuxième question soulevée en l’espèce, soit l’obligation de prendre des mesures d’adaptation, l’agent négociateur a fait valoir que l’employeur avait manqué à son obligation de prendre des mesures d’adaptation à l’égard de la fonctionnaire en août 2011, quand elle a demandé à changer de superviseur.

560        À ce moment, il n’y avait aucune référence quelconque au fait que Mme Asare était malade. Le grief porte sur l’abandon de son poste, et pas sur un incident mettant en cause son superviseur un an et demi auparavant.

561        Un manquement à l’obligation de prendre des mesures d’adaptation à l’égard de la fonctionnaire a aussi été allégué, en s’appuyant sur la déclaration de l’employeur relative à sa demande de prestations d’assurance-invalidité. Dans le formulaire, on indiquait que l’option de travailler selon un nombre d’heures réduit n’était pas disponible. En outre, aucune preuve n’a été présentée sur la disponibilité d’un horaire selon un nombre d’heures réduit. Mme Asare n’a jamais demandé à retourner au travail pendant cette période.

562        Dans un processus d’accommodement, un employé est tenu de coopérer.Dans Central Okanagan School District No. 23 c. Renaud, [1992] 2 R.C.S. 970, à la page 994, la Cour suprême du Canada a déclaré que la recherche d’un compromis fait intervenir plusieurs parties.Outre l’employeur et le syndicat, le plaignant a également l’obligation d’aider à en arriver à un compromis convenable.

563        Dans Nash c. Administrateur général (Service correctionnel du Canada), 2017 CRTEFP 4, au paragraphe 99, la Commission a déclaré ce qui suit :

99      La Cour suprême du Canada a indiqué, dans Central Okanagan School District No. 23, que les employés qui demandent une mesure d’adaptation sont tenus de collaborer avec leur employeur en lui fournissant des renseignements quant à la nature et à l’étendue de leurs besoins en matière d’adaptation, ce qui lui permettra de déterminer les mesures d’adaptation nécessaires. L’employeur a demandé au fonctionnaire de préciser ses besoins et il n’en a fourni aucun, en dehors du fait qu’il avait besoin du congé pour des raisons familiales générales, ce qui ne peut guère être considéré comme une collaboration avec l’employeur dans sa recherche d’une mesure d’adaptation convenable. Le fonctionnaire n’a fourni aucune précision sur ses besoins lorsqu’on lui en a demandé et il est incompréhensible que l’employeur soit considéré comme ayant agi de façon déraisonnable parce que, comme l’a soulevé le représentant du fonctionnaire [traduction] « il n’a pas posé les bonnes questions ». Si le fonctionnaire ne souhaitait pas préciser ses besoins de façon ouverte et franche, l’employeur ne peut en être tenu responsable.

564        Aucune demande de mesure d’adaptation n’a été présentée et l’employeur ne saurait être tenu responsable d’avoir agi de manière discriminatoire.

565        Même si un certain nombre des cas cités portaient sur des réponses disciplinaires, les principes sont tirés de la jurisprudence générale en droit du travail, où les employés étaient en congé.

566        La prise de mesures disciplinaires ne constituait pas une réponse réaliste en l’espèce.Mme Asare ne se trouvait pas au travail.Il fallait adopter une approche différente.

567        Le défendeur n’avait aucun renseignement sur l’état de Mme Asare. Ce serait pure spéculation, à ce point-ci, que de suggérer les mesures qu’il aurait pu prendre s’il avait eu de tels renseignements.

568        L’employeur avait reçu cinq copies de certificats médicaux avant d’apprendre que la fonctionnaire était inscrite à l’université et qu’elle était employée en tant qu’assistante à l’enseignement.Jusqu’à ce moment, il n’y avait aucune raison de contester les billets.Ces renseignements ont toutefois suscité des préoccupations légitimes. L’employeur a adopté une approche raisonnable afin d’obtenir plus de renseignements, vu l’information contradictoire qu’il possédait soudainement. Il voulait tout simplement que Mme Asare se présente au bureau afin d’expliquer ce qui se passait.

569        Il a été soutenu que Mme Asare n’avait pas besoin de fournir d’autres renseignements parce que la Sun Life avait approuvé sa demande. Si l’employeur avait cette information en main et aucune autre, les choses auraient pu être différentes; l’employeur possédait cependant les autres renseignements fournis par l’Université d’Ottawa et il avait traité l’absence de la fonctionnaire comme un congé non autorisé.

570        Sa décision n’était pas capricieuse. L’employeur a tenté deux fois de plus de communiquer avec Mme Asare. Le ton des lettres était très standard.Elles avaient été rédigées avec l’aide des Relations de travail.

571        Le pouvoir de communiquer avec les employés est délégué aux cadres hiérarchiques. Il n’appartient pas à Mme Asare ou au Dr Kilby de dicter la façon dont la gestion devrait organiser ses affaires.

572        En ce qui concerne la position selon laquelle Mme Asare n’a pas répondu en raison de sa maladie mentale, le rapport de la Dre Fisher a été cité en tant que preuve.La Dre Fisher n’a toutefois pas témoigné; il faudrait donc n’accorder que très peu de poids à son rapport.De même, dans son témoignage, Mme Asare a parlé de ce que sa thérapeute lui avait conseillé de faire. Sa thérapeute n’a pas témoigné, ce qui signifie que la Commission ne peut pas accorder un poids considérable à cette preuve.

573        On a sous-entendu que M. Ruseski avait agi de manière inappropriée en écrivant à l’Université d’Ottawa. L’université a suscité des préoccupations légitimes sur son état médical. M. Ruseski a déterminé que Mme Asare avait abandonné son poste uniquement après avoir tenté sans succès d’obtenir des précisions.

574        On a sous-entendu que le défendeur aurait dû attendre que Mme Asare retourne au travail avant de chercher à obtenir des précisions sur son état. L’information transmise par l’Université d’Ottawa a soulevé des préoccupations légitimes sur son congé de maladie. L’employeur avait le droit d’en savoir plus.Il n’y avait aucune preuve de son retour au travail.

575        En ce qui concerne la discussion entre M. Vézina et M. Hards, le 21 février 2012, pendant laquelle M. Vézina a informé M. Hards que Mme Asare lui avait dit que son médecin lui avait indiqué qu’elle ne devait avoir aucun contact avec le directeur, on ne renvoie aucunement à cette limitation dans les certificats médicaux.

D. La réponse de la fonctionnaire s’estimant lésée

576        La décision de licencier la fonctionnaire était discriminatoire.L’obligation de prendre des mesures d’adaptation n’a jamais été déclenchée.

V. Analyse

1. La décision du défendeur de présumer que Mme Asare avait abandonné son poste était-elle raisonnable? 

577        Dans Laye, j’ai conclu que même si le pouvoir explicite de l’administrateur général de licencier un employé pour motif d’abandon a été annulé par la Loi sur la réforme de la fonction publique (L.C. 1992, ch. 54), les dispositions de la même loi habilitent expressément l’administrateur général à licencier un employé pour des raisons qui ne sont pas de nature disciplinaire incluent dans ce pouvoir général le pouvoir de licencier un employé pour abandon de poste.

578        L’alinéa 12(1)e) de la Loi sur la gestion des finances publiques (L.R.C., 1985, ch. F-11) habilite l’administrateur général, pour des raisons autres qu’un manquement à la discipline ou une inconduite, à licencier ou à rétrograder un employé à un poste situé dans une échelle de traitement comportant un plafond inférieur d’une personne employée dans la fonction publique.

579        Selon la jurisprudence, j’ai conclu, dans Laye, que même en l’absence d’une définition expresse de l’abandon de poste dans les dispositions législatives, les lignes directrices de l’employeur ou la convention collective, un employé peut quand même être réputé avoir abandonné son poste dans des circonstances où il s’est absenté du travail pendant une longue période sans en avoir obtenu l’autorisation et sans raisons valables, alors que les circonstances relevaient de son contrôle, et sans en avoir avisé l’employeur, à moins que l’employé montre qu’il était incapable d’aviser l’employeur en raison de circonstances exceptionnelles.

580        J’ai aussi conclu, après examen de la jurisprudence, que la détermination d’un employeur selon laquelle un employé a abandonné son poste est évaluée selon le critère du caractère raisonnable. La décision de l’employeur est raisonnable si, considérant la situation de fait en cause, il décide que le comportement de l’employée, observé objectivement, permet de conclure qu’il y a eu abandon de poste.

581        J’ai aussi conclu, selon la jurisprudence arbitrale, que l’employeur a l’obligation d’agir équitablement et de bonne foi lorsqu’il licencie un employé pour des motifs non disciplinaires et que les principes de notification, de renonciation et de tolérance s’appliquent, le cas échéant.

A. Absence pendant une période prolongée

582        En appliquant ces principes aux faits en l’espèce, la fonctionnaire s’est-elle absentée du travail pendant une période prolongée?Elle a quitté le travail le 12 août 2011.Son emploi a pris fin le 13 novembre 2012, après une période d’un an et trois mois.

583        Dans Hayter, au paragraphe 65, l’arbitre de grief Filliter a indiqué qu’aucune limite précise ne peut être tracée entre les périodes qui appuieront une déclaration d’abandon et que chaque cas doit être évalué selon son propre bien-fondé et son propre contexte. En soi, en tant que facteur à prendre en considération à l’appui d’une déclaration d’abandon, une période d’absence du travail d’un an et trois semble à mes yeux être une période d’absence considérable.

B. Sans autorisation

584        Toutefois, seule la période pendant laquelle la fonctionnaire se trouvait en congé non autorisé est importante pour mon analyse de cette question. Le congé de la fonctionnaire a été traité en tant que congé autorisé du 12 août 2011 jusqu’au 20 avril 2012, quand M. Ruseski a informé le secteur de la rémunération et des avantages sociaux qu’elle était réputée se trouver en congé non autorisé non payé. Le 26 avril 2012, M. Ruseski a écrit une lettre à Mme Asare afin de l’informer qu’elle était présumée se trouver en congé non autorisé. La lettre lui a été envoyée par courriel et par service de messagerie.Elle a été retournée avec la mention [traduction] « refusé d’être accepté ».Mme Asare n’a donné aucune suite à la demande. Qui plus est, M. Ruseski a demandé au secteur de la rémunération et des avantages sociaux de rendre ce congé non payé non autorisé rétroactif au 9 août 2011. Il a invoqué pour justifier cette considération le fait qu’elle n’avait pas présenté les certificats médicaux originaux, qu’elle n’avait pas fourni de formulaires de congé et qu’elle n’avait pas répondu à sa lettre du 25 janvier 2012 dans laquelle on demandait à la rencontrer afin de discuter de l’information que l’Université d’Ottawa lui avait transmise.

585        Je ne peux accepter la thèse du défendeur selon laquelle la fonctionnaire se trouvait en congé non autorisé depuis le mois d’août 2011. Le défendeur n’a pas contesté la manière dont la fonctionnaire lui fournissait des certificats médicaux avant le mois d’avril 2012 et, avant cette date, il n’a pas demandé non plus à obtenir les certificats médicaux originaux ou les formulaires de congé.

586        Le 3 juillet 2012, la Sun Life a informé la fonctionnaire qu’elle était présumée se trouver en congé non autorisé selon l’employeur. De plus, dans les notes du Dr Kilby sur le rendez-vous avec la fonctionnaire le 17 juillet 2012, il est indiqué que l’employeur a dit qu’elle se trouvait en congé non autorisé.

587        L’agent négociateur a fait valoir qu’il est extrêmement raisonnable pour un employé dont la demande d’assurance-invalidité présentée à la Sun Life est approuvée de conclure qu’il n’aurait pas à fournir d’autres renseignements et qu’il n’aurait pas besoin de communiquer avec l’employeur.Je ne partage pas cet avis. Il existe une obligation contractuelle entre un employeur et un employé, qui crée des obligations pour l’employé quand il apprend qu’il se trouve en congé non autorisé.

588        Vu ce qui précède, il ne me reste qu’à déterminer la période pendant laquelle la fonctionnaire se trouvait en congé non autorisé. Il ne reste que le fait que M. Ruseski a placé Mme Asare en congé non autorisé en date du 26 avril 2012 et que la fonctionnaire le savait au plus tard au 3 juillet 2012.

589        La fonctionnaire a été licenciée le 16 novembre 2016, ce qui, dans le meilleur des cas pour le défendeur, correspond à moins de sept mois après avoir été déclarée en congé non autorisé. Je suis donc saisi d’une période beaucoup plus courte; toutefois, cette période peut tout de même suffire à justifier un licenciement pour abandon de poste. Cependant, vu mes conclusions sur l’aspect suivant du critère d’abandon, je n’ai pas à faire cette détermination. Je mentionne que même si j’avais été convaincu que la fonctionnaire se trouvait en congé non autorisé depuis le mois d’août 2011, selon mes conclusions ci-dessous, elle était absente depuis ce temps pour des raisons médicales valables.

C. Sans raisons valables

590        L’agent négociateur a soutenu que la force probante de la preuve montrait que la maladie de la fonctionnaire l’empêchait de travailler dans ce lieu de travail et dans cet environnement.Les tests médicaux soutenaient essentiellement son absence prolongée du travail. Il s’agit de raisons valables à son absence, qui échappaient à son contrôle.

591        Il ressort d’un examen de la preuve que M. Ruseski a reconnu, dans sa lettre du 11 août 2011 à Mme Asare, que son comportement l’inquiétait et il lui a conseillé de songer à obtenir de l’aide. En date du 16 août 2011, Mme Asare n’avait que 29,125 heures de congé de maladie payé restantes. Dans la déclaration de l’employeur relative à la demande d’assurance-invalidité, M. Ruseski a fait l’observation qui suit :

[Traduction]

Depuis la fin du mois d’avril 2011, le superviseur immédiat a commencé à remarquer que l’employée avait un comportement de plus en plus irrégulier et que son rendement se détériorait. En particulier, elle n’arrivait pas à se concentrer, elle était confuse, anxieuse, renfermée et perturbatrice.

592        Le rapport de la Dre Fisher, la psychologue, daté du 4 octobre 2011, a été produit en preuve, non pas pour la véracité de son contenu lié aux allégations de harcèlement, mais en guise de preuve de l’état d’esprit de Mme Asare à ce moment. Dans son rapport, la Dre Fisher concluait que Mme Asare souffrait d’un trouble valable.

593        La Dre Fisher a recommandé à la fonctionnaire d’être renvoyée à un psychiatre, de rester en congé d’invalidité de courte durée jusqu’à ce qu’elle ait consulté ce spécialiste, de mettre en œuvre graduellement un horaire de retour au travail et de déléguer un agent de liaison afin de communiquer l’information sur la charge de travail de Mme Asare plutôt que celle-ci lui soit transmise directement par son gestionnaire.

594        La fonctionnaire a consulté le Dr Kilby en décembre 2011. Il est finalement devenu son médecin régulier. Le Dr Kilby a témoigné qu’elle souffrait d’une invalidité. Les autres rapports d’expert de la psychologue et, finalement, du psychiatre, le Dr Legeix, ont corroboré cette opinion.

595        En décembre 2011, le Dr Kilby a décrit les symptômes de la fonctionnaire ainsi : piètre concentration, anxiété, insomnie, perte d’appétit et isolement. Il a indiqué que cet état était attribuable à une maladie causée par son emploi, en indiquant qu’elle se croyait victime de harcèlement au travail et qu’elle avait été traumatisée par l’expérience, qui la laissait ébranlée et dépressive. Il a établi un diagnostic de dépression grave, d’anxiété et de stress lié au travail. En février 2012, il a prolongé le congé médical pour une durée indéfinie.

596        Le Dr Kilby a confirmé qu’un certain nombre des recommandations de la Dre Fisher ont été suivies.Un renvoi à un psychiatre a été effectué. La fonctionnaire est demeurée en congé d’invalidité de courte durée jusqu’à ce qu’elle ait consulté ce spécialiste. La recommandation de mettre en œuvre un calendrier de retour au travail graduellement ne pouvait pas être suivie à ce moment. En ce qui concerne la délégation d’un agent de liaison afin de communiquer l’information pertinente à Mme Asare, il a recommandé que cet agent ne soit pas son gestionnaire.

597        Le 5 juillet 2012, il a prescrit des médicaments à Mme Asare pour gérer son état.

598        Le 9 juillet 2012, le Dr Kilby a rédigé son rapport à la Sun Life à l’appui de la demande d’assurance-invalidité de la fonctionnaire. Le 31 juillet 2012, la Sun Life a approuvé la demande d’ILD de Mme Asare à compter du 14 décembre 2011.

599        Le 2 novembre 2012, le Dr Kilby a mentionné que Mme Asare commençait à répondre aux médicaments et qu’elle se sentait mieux.

600        En novembre et en décembre 2012, la fonctionnaire a consulté un psychiatre, le Dr Legeix.

601        Le 14 janvier 2013, après avoir rencontré Mme Asare, le Dr Kilby a signé un certificat médical pour elle indiquant qu’elle pourrait retourner au travail le 1er février 2013 selon son évaluation.

602        Le 8 février 2013, le Dr Kilby a reçu le rapport du psychiatre. Le Dr Legeix a confirmé le diagnostic d’anxiété et de dépression et a conclu que les stresseurs au travail constituaient un facteur contributif à son invalidité. En novembre et en décembre 2012, le Dr Legeix avait déterminé qu’elle se sentait suffisamment bien pour s’acquitter de toutes les tâches quotidiennes, mais il lui avait recommandé de continuer à prendre ses médicaments et de poursuivre sa psychothérapie.

603        Le défendeur a fait valoir que la question ne consistait pas à déterminer si la fonctionnaire était apte à se présenter au travail; toutefois, étant donné qu’elle avait quitté le travail, elle avait l’obligation de justifier, à la satisfaction de l’employeur, que son état médical excusait son défaut de se présenter au travail. Je suis d’accord avec le fait qu’il s’agisse d’une question en l’espèce; toutefois, à mon humble avis, cette question est distincte de celle qui consiste à savoir si son absence était motivée par des raisons valables qui échappaient à son contrôle.

604        Le défendeur a aussi soutenu que la maladie n’avait pas été prouvée et que l’attestation de maladie fournie par un médecin ne constitue peut-être pas une raison suffisante à l’absence d’un employé du travail puisqu’un employé qui demande à recevoir des prestations de maladie est tenu de divulguer au médecin toute activité allant à l’encontre d’une incapacité à travail ou d’un rétablissement. Si ces activités ne sont pas divulguées, le certificat médical n’excusera pas l’absence de l’employé du travail. Il a été soutenu qu’aucune preuve n’a été présentée selon laquelle la fonctionnaire a mentionné au Dr Kilby de façon plus détaillée qu’elle était inscrite au programme de doctorat et qu’elle travaillait en tant qu’assistante à l’enseignement.

605        Lors de consultation avec elle le 2 novembre 2011, le Dr Kilby a indiqué que Mme Asare était étudiante à temps plein au doctorat en économie en plus d’être employée à temps plein à Affaires autochtones et du Nord en congé de maladie. Quand on lui a demandé s’il savait qu’elle menait des études doctorales quand elle avait été embauchée par l’université en tant qu’assistante à l’enseignement, il a répondu qu’il était possible qu’il l’ait su. Il ne se rappelait pas lui avoir formulé des conseils à cet égard, mais il a affirmé que si elle travaillait réellement en tant qu’assistante à l’enseignement, le fait de travailler dans cet environnement pouvait avoir des vertus thérapeutiques pour elle. Selon le dossier, elle travaillait en tant qu’assistante à l’enseignement à l’université au cours de l’automne 2011 et qu’elle n’y a pas travaillé sous aucune forme en 2012.

606        Mme Asare a témoigné que sa thérapeute lui avait conseillé de participer à des activités qui contribuaient à son bien-être.Elle a parlé à sa thérapeute de l’idée de travailler en tant qu’assistante à l’enseignement. Sa thérapeute croyait que ce travail constituerait un apport thérapeutique à son rétablissement puisque l’ambiance était différente de celle à son travail habituel.

607        J’ai conclu que la force probante de la preuve montre que la maladie de la fonctionnaire l’empêchait de travailler dans le lieu de travail du défendeur et dans cet environnement pendant la période de sa maladie attestée.Les trois opinions médicales appuient cette conclusion. Selon moi et selon la prépondérance des probabilités, vu la nature de son invalidité et son lien avec le lieu de travail du défendeur, je ne suis pas convaincu que cela allait à l’encontre de son incapacité de travailler à cet endroit, de poursuivre ses études et de travailler en tant qu’assistante à l’enseignement à l’automne 2011.

608        Par conséquent, je conclus que son absence du lieu de travail du défendeur du 12 août 2011 jusqu’à la date de son licenciement, le 16 novembre 2012, était motivée par des raisons valables qui échappaient à son contrôle.

609        Je conclus donc que la décision du défendeur de présumer que Mme Asare avait abandonné son poste était déraisonnable.

2. Le défendeur a-t-il fait preuve de discrimination à l’égard de la fonctionnaire en au motif de son invalidité en la licenciant?

610        La fonctionnaire a allégué que son licenciement était discriminatoire, en contravention à la LCDP et à l’article 16 de la convention collective.

611        Selon l’alinéa 226(2)a) de la Loi, la Commission peut, pour toute affaire renvoyée à l’arbitrage de grief, interpréter et appliquer la LCDP, sauf les dispositions de cette loi sur le droit à la parité salariale pour l’exécution de fonctions équivalentes, relative à l’emploi, même si la LCDP entre en conflit avec une convention collective.

612        L’article 7 de la LCDP précise que constitue un acte discriminatoire un refus d’employer n’importe quelle personne sur un motif de distinction illicite.

613        Pour établir qu’un employeur a eu une pratique discriminatoire, un fonctionnaire s’estimant lésé doit d’abord établir une preuve prima facie de discrimination, soit celle qui porte sur les allégations qui ont été faites et qui, si on leur ajoute foi, est complète et suffisante pour justifier une conclusion en faveur du fonctionnaire s’estimant lésé, en l’absence de réplique du défendeur (voir Commission ontarienne des droits de la personne c. Simpsons-Sears, [1985] 2 R.C.S. 536, au paragraphe 28 (O’Malley)). La Commission ne peut pas examiner la réponse de l’employeur avant de déterminer si une preuve prima facie de discrimination a été démontrée (voir Lincoln c. Bay Ferries Ltd., 2004 CAF 204, au paragraphe 22).

614        Il n’est pas nécessaire que les considérations en matière de discrimination constituent l’unique raison des actions en litige pour prouver l’allégation de discrimination. Le fonctionnaire s’estimant lésé n’a qu’à démontrer que la discrimination constitue un des facteurs de la décision de l’employeur (voir Holden v. Canadian National Railway Company (1990), 14 C.H.R.R. D/12 (F.C.A.), au paragraphe 7). Le fardeau de la preuve dans les cas concernant la discrimination est le fardeau civil de la prépondérance des probabilités (voir Alliance de la fonction publique du Canada c. Canada (ministère de la Défense nationale), [1996] 3 CF 789).

615        La question de savoir si l’employeur a fait preuve de discrimination à l’encontre de Mme Asare au motif de son invalidité en la licenciant, comme il est allégué dans le grief, est inextricablement liée à la question précédente que j’ai analysée.

616        L’employeur a licencié Mme Asare pour des motifs non disciplinaires.

617        Je n’éprouve aucune difficulté à conclure que la preuve dont je suis saisi qu’une preuve prima facie de discrimination a été établie.Pour démontrer une preuve prima facie de discrimination, Mme Asare devait montrer : qu’elle a une caractéristique protégée contre la discrimination en vertu de la LCDP, qu’elle a éprouvé une incidence négative à l’égard de son emploi, et que la caractéristique protégée était un facteur dans cette incidence négative (voir Moore c. Colombie-Britannique (Éducation), 2012 CSC 61, au paragraphe 33).

618        Dans un premier temps, Mme Asare avait une caractéristique protégée contre la discrimination en vertu de la LCDP.La déficience est l’un des motifs de distinction illicite indiqués à l’article 3 de la LCDP.En vertu de l’article 25, le terme déficience est défini comme « [d]éficience physique ou mentale, qu’elle soit présente ou passée […] ». La preuve médicale qui m’a été présentée prouvait complètement que Mme Asare souffrait d’une déficience. Deuxièmement, elle a éprouvé une incidence négative à l’égard de son emploi – elle a été licenciée.

619        La preuve a également établi que son invalidité était un facteur dans son licenciement. À cet égard, il suffira de renvoyer à plusieurs faits clés à l’appui de cette conclusion, mais je pourrais en souligner davantage. Premièrement, le Dr Kilby a informé le défendeur le 22 février 2012 que le congé médical de la fonctionnaire avait été prolongé pendant une période indéfinie. Deuxièmement, Mme Asare a présenté une demande d’ILD à la Sun Life le 20 mars 2012. À un certain moment par la suite, M. Ruseski, avec réticence et selon ses qualifications, a rempli la partie de l’employeur du formulaire de demande d’ILD. Le 31 juillet 2012, la Sun Life a informé Mme Asare que sa demande de prestations d’ILD avait été approuvée à compter du 14 décembre 2011; cette lettre a été envoyée au personnel du secteur de la rémunération et des avantages sociaux du défendeur. Ainsi, à la date de son licenciement, le défendeur savait ou était réputé avoir su que Mme Asare se trouvait en ILD et savait qu’elle se trouvait en congé médical attesté. Enfin, je renvoie à deux lettres que M. Ruseski a envoyées à Mme Asare. Dans la lettre du 3 août 2012, M. Ruseski écrit à la fonctionnaire afin d’obtenir son consentement pour communiquer avec le Dr Kilby. Dans la lettre de licenciement datée du 16 novembre 2012, M. Ruseski renvoie entre autres à la lettre du 3 août et indique : [traduction] « Les lettres visaient à vous donner la chance d’expliquer votre absence du travail; à obtenir votre consentement à subir une évaluation d’aptitude au travail (EAT) avec Santé Canada et à obtenir votre consentement à ce que je puisse communiquer avec votre médecin. » M. Ruseski établit un lien entre son licenciement pour abandon et son défaut de donner suite à ses demandes de renseignements médicaux supplémentaires. Je conclus sans hésitation que l’invalidité de Mme Asare était un facteur dans la décision de M. Ruseski de la licencier.

620        Un employeur faisant face à une preuve prima facie de discrimination peut éviter une conclusion défavorable en déposant des éléments de preuve permettant de fournir une explication raisonnable qui démontre que ses actions n’étaient pas, en fait, discriminatoires, ou en établissant un moyen de défense prévu par la loi qui justifie la discrimination (voir A.B. c. Eazy Express Inc., 2014 TCDP 35, au paragraphe 13). Si une explication raisonnable est fournie, il appartient au fonctionnaire s’estimant lésé de démontrer que l’explication constitue un simple prétexte pour exercer de la discrimination.

621        Le défendeur ne s’est pas acquitté du fardeau de fournir une explication raisonnable qui démontre que sa décision de licencier Mme Asare n’était pas discriminatoire.Vu ma conclusion sur la question précédente que le licenciement pour abandon était déraisonnable, cela est sans surprise.

622        Il ne reste plus que le moyen de défense statutaire de l’exigence professionnelle justifiée (EPJ) à l’encontre de cette apparence de discrimination.Le paragraphe 15(2) de la LCDP établit une défense prévue par la loi qui serait par ailleurs une pratique discriminatoire. Les parties applicables de l’article 15 de la LCDP sont ainsi rédigées :

Exceptions

15. (1) Ne constituent pas des actes discriminatoires :

a) les refus, exclusions, expulsions, suspensions, restrictions, conditions ou préférences de l’employeur qui démontre qu’ils découlent d’exigences professionnelles justifiées; […]

Besoins des individus

15. (2) Les faits prévus à l’alinéa (1)a) sont des exigences professionnelles justifiées ou un motif justifiable […] s’il est démontré que les mesures destinées à répondre aux besoins d’une personne ou d’une catégorie de personnes visées constituent, pour la personne qui doit les prendre, une contrainte excessive en matière de coûts, de santé et de sécurité.

623        Le défendeur a fait valoir que les employés sont tenus de participer au processus de mesures d’adaptation. Il a cité Renaud, où la Cour suprême du Canada a indiqué que la recherche d’un compromis fait intervenir plusieurs parties et que le plaignant, avec l’employeur et l’agent négociateur, a également l’obligation d’aider à en arriver à un compromis convenable. Invoquant Nash, le défendeur a soutenu qu’aucune demande de mesure d’adaptation n’avait été présentée; ainsi, il ne saurait être tenu responsable d’avoir agi de manière discriminatoire.

624        Le 22 février 2012, le Dr Kilby a rédigé un certificat médical remis à l’employeur, dans lequel il attestait que Mme Asare serait absente pour des raisons médicales à compter du 12 août 2011, pour une période indéfinie.Il a indiqué qu’à ce moment, il n’arrivait pas à conclure que la période d’invalidité se terminerait rapidement.

625        Le 9 juillet 2012, il a écrit à la Sun Life en mentionnant que la fonctionnaire souffrait d’une grave dépression à ce moment. Il croyait à ce moment que son invalidité se poursuivrait pendant au moins six mois.

626        Pendant sa consultation du 2 novembre 2012, il a remarqué qu’elle commençait à répondre aux médicaments et qu’elle se sentait mieux.

627        Il l’a rencontrée le 14 janvier 2013; à ce moment, il a signé un certificat médical indiquant qu’elle pourrait retourner au travail le 1er février 2013.

628        Vu la preuve qui m’a été présentée, je conclus à la lumière des faits en l’espèce, que les circonstances ne donnaient pas lieu à une obligation de prendre des mesures d’adaptation avant le licenciement de Mme Asare, le 16 novembre 2012 puisqu’elle n’a été autorisée à retourner au travail que le 1er février 2013. Si elle était retournée au travail le 1er février 2013 ou vers cette date, selon les recommandations de son médecin, il aurait peut-être été nécessaire de prendre des mesures d’adaptation. Le cas échéant, une obligation entre plusieurs parties aurait été créée, y compris une obligation pour la fonctionnaire de participer au processus d’adaptation. Je mentionne que, même si l’on renvoie à divers endroits dans la preuve documentaire et de vive voix à la prise de mesures d’adaptation, pour la période importante que j’examine, soit la période allant du 12 août 2011 au 16 novembre 2012, la fonctionnaire ne se trouvait manifestement pas dans une situation de retour au travail. Quoi qu’il en soit, le défendeur n’a pas démontré qu’il était impossible de prendre des mesures d’adaptation à l’égard de la fonctionnaire pendant la période importante jusqu’au point de préjudice injustifié. La fonctionnaire se trouvait en congé de maladie non payé jusqu’à ce que M. Ruseski la place en congé non autorisé, le 26 avril 2012. Aucune mesure d’adaptation n’a été offerte à la fonctionnaire pendant cette période.Par conséquent, le défendeur n’a pas établi un moyen de défense statutaire fondé sur une EPJ pour justifier la discrimination.

629        Par conséquent, je conclus que la décision du défendeur de licencier la fonctionnaire le 16 novembre 2012 constituait une pratique discriminatoire allant à l’encontre de l’article 7 de la LCDP.

3. La fonctionnaire a-t-elle manqué à son obligation de divulguer en temps opportun au défendeur le fait qu’elle menait des études doctorales et qu’elle travaillait en tant qu’assistante à l’enseignement pendant qu’elle se trouvait en congé de maladie approuvé?

630        Selon la jurisprudence, il est évident qu’une partie de la relation d’emploi est caractérisée par l’obligation de l’employé de se présenter au travail. Lorsqu’un employé ne le fait pas, il doit fournir à l’employeur une explication pour justifier cette absence. Qui plus est, à mesure que les absences se multiplient et s’allongent, la preuve requise pour satisfaire à cette obligation devient de plus en plus étoffée (voir Halfacree).

631        Comme il est indiqué dans Saskatchewan (Labour Relations and Workplace Safety), aux paragraphes 56 et 57 :

[Traduction]

[56] Le besoin le plus fondamental d’un employeur est de maintenir ses opérations et ses services sans interruption; à cette fin, il est nécessaire que son effectif soit présent régulièrement. De la même façon, l’obligation la plus fondamentale d’un employé est de se présenter au travail.

Les décisions importantes que l’on nous demande de prendre exigent d’établir avec prudence un équilibre entre les intérêts. Les arbitres ont tenté d’établir un équilibre entre les intérêts liés au droit à la protection des renseignements personnels d’un employé en ce qui concerne les renseignements médicaux et les intérêts commerciaux légitimes d’un employeur, y compris la prévention des abus de prestations de maladie […]

[…] Le droit à l’information d’un employeur devient généralement plus important à mesure que le congé se prolonge […]

[57] Il incombe à un employé d’établir son droit à des prestations de maladie, « cela exige habituellement à un employé de prouver que son absence est légitime, soit qu’il est sincèrement incapable de se présenter au travail pour cause de maladie ou de blessure […] » […]

Il est possible qu’un employé doive fournir plus de renseignements dans certains cas afin d’évaluer la demande de congé de maladie. Cela est particulièrement le cas lorsque l’aptitude de l’employé à retourner au travail ou son besoin de mesures d’adaptation soulèvent des questions. Dans certaines situations où il faut évaluer une demande de congé de maladie ou dans le cas d’une enquête pour abus allégué de congé de maladie, un employé peut être tenu de divulguer plus d’information qu’une simple incapacité à travailler. Un employé peut même être tenu de divulguer un diagnostic. Il s’agirait toutefois d’une exception à la règle générale, qui vise à réduire au minimum l’intrusion. […]

632        Le défendeur a fait valoir que Mme Asare avait l’obligation positive, quand elle utilisait ses congés de maladie, d’informer de ses activités qui pouvaient sembler incohérentes avec son congé pour des raisons médicales.

633        Compte tenu des faits, le défendeur a soutenu qu’il a accepté au départ les billets médicaux à leur valeur extrinsèque. L’absence s’est prolongée pendant quatre mois avant que les billets médicaux ne commencent à indiquer une période indéfinie avant le retour au travail. En janvier 2012, l’employeur a appris de l’Université d’Ottawa que la fonctionnaire était inscrite en tant qu’étudiante de cycle supérieur et qu’elle avait été embauchée en tant qu’assistante à l’enseignement. Il a écrit à Mme Asare afin de lui demander de se présenter à une rencontre pour expliquer la situation. Elle n’a pas rencontré l’employeur afin d’expliquer la situation. Elle a refusé toute la correspondance envoyée par la suite par l’employeur et a demandé à son père d’informer l’Université d’Ottawa de ne divulguer à l’employeur aucun renseignement. La correspondance subséquente, dans laquelle on lui demandait d’accepter de subir une évaluation d’aptitude au travail à Santé Canada et de consentir à ce que l’employeur communique avec le Dr Kilby, n’a pas été récupérée et elle n’y a pas donné suite.

634        L’agent négociateur a fait valoir que Mme Asare et le Dr Kilby ont tous deux indiqué dans leur témoignage qu’on lui avait conseillé de ne pas communiquer avec son superviseur, ce qui, selon ce qu’elle comprenait, incluait M. Ruseski.Compte tenu des faits dont j’ai été saisi, je conclus que cette observation est un peu sournoise. Mme Asare n’avait jamais communiqué avec M. Vézina ou tout autre représentant de l’agent négociateur afin de lui faire part de sa situation avant que l’Université d’Ottawa lui dise que son employeur demandait à obtenir de l’information sur ses activités à l’université. Jusqu’à ce moment, elle n’avait pas informé son employeur que ses superviseurs ne devaient pas communiquer avec elle. Ce n’est qu’après que l’Université d’Ottawa l’a informée que son employeur cherchait à obtenir ces renseignements qu’elle a changé drastiquement de voies de communication.

635        L’agent négociateur a soutenu qu’elle avait communiqué avec les Ressources humaines et son agent négociateur afin qu’ils informent la direction qu’elle ne souhaitait pas que l’on communique avec elle pendant qu’elle se trouvait en congé de maladie. Le 31 juillet 2012, on l’a informée que la Sun Life avait approuvé sa demande de prestations d’ILD selon l’avis médical présenté. La lettre a été transmise à l’employeur. Étant donné que la lettre a été envoyée à l’employeur, elle croyait qu’il n’était pas nécessaire de communiquer davantage avec lui jusqu’à ce qu’elle soit prête à retourner au travail.

636        Dans Alberta (Infrastructure and Transportation), au paragraphe 51, l’arbitre Jolliffe a indiqué ce qui suit en ce qui concerne les faits dans cette affaire :

[Traduction]

51      Selon toutes les circonstances présentées, on peut assurément différencier cette situation de celle où un employé en santé choisit de prendre congé auprès de l’un de ses employeurs tout en travaillant plus tôt ou plus tard le même jour pour un autre employeur, pour ses propres fins et sans lien concret ou suffisant avec un problème de santé connexe.En l’espèce, nous nous retrouvons avec une fonctionnaire qui n’a pas été adéquatement ouverte dans un délai opportun afin de divulguer sa présence continue à un travail extérieur, ce qui a donné lieu à des soupçons puisqu’elle avait pu obtenir un soutien médical pour l’année précédente. La fonctionnaire s’est exposée à une réponse disciplinaire, qui ne parvient toutefois pas à justifier son licenciement.

637        À mon avis, la fonctionnaire ne s’est pas acquittée de son obligation d’expliquer entièrement son absence selon les faits en l’espèce. Elle aurait dû informer l’employeur en temps opportun qu’elle poursuivait ses études à l’Université d’Ottawa et qu’elle avait été embauchée en tant qu’assistante à l’enseignement. Je précise qu’elle avait entièrement l’intention de continuer à occuper le poste d’assistante à l’enseignement pendant le semestre suivant de l’hiver 2012 avant qu’elle ne sache que l’employeur avait su qu’elle menait des activités à l’Université d’Ottawa. Même si je comprends qu’elle était réticente à l’idée de parler à ses supérieurs, selon les conseils de la Dre Fisher et du Dr Kilby, elle n’a pas suivi leur conseil de mettre en place un agent de liaison avec l’employeur, qu’il s’agisse des secteurs des ressources humaines ou de la rémunération et des avantages sociaux ou de son agent négociateur. Même son avocat, dans le cadre de sa plaidoirie devant moi, a reconnu qu’il était possible que la manière dont Mme Asare aurait dû gérer la lettre envoyée en janvier 2012 relative à l’appel que M. Ruseski avait reçu de l’Université d’Ottawa soulève des questions.

638        Même s’il n’y a aucune excuse au fait de ne pas avoir divulgué ces faits à son employeur en septembre 2011, elle a appris en janvier 2012 que l’employeur était devenu au courant de ces faits par pur hasard. Elle a demandé à l’Université d’Ottawa de ne fournir aucun autre renseignement à l’employeur plutôt que de s’acquitter de son obligation d’expliquer entièrement les faits. Elle n’a rien fait pour désigner un agent de liaison ou pour prendre des dispositions, par l’intermédiaire de son agent négociateur, pour présenter les explications requises à l’employeur. En juillet 2012, la Sun Life lui a mentionné qu’elle avait été placée en congé non autorisé. Elle en a parlé au Dr Kilby, qui lui a conseillé de régler la situation en recourant aux services d’un avocat ou à l’aide de son agent négociateur. Elle n’a rien fait pour le faire et ainsi s’acquitter de son obligation à l’égard de l’employeur. Je ne peux que conclure que, dans les circonstances en l’espèce, elle a contribué considérablement à ses difficultés d’emploi.

639        En conclusion, j’ai conclu que son absence pendant la période allant du 12 août 2011 au 13 novembre 2012 était motivée par des raisons valables qui échappaient à son contrôle et que, dans les circonstances en l’espèce, la décision du défendeur de supposer que Mme Asare avait abandonné son poste n’était pas raisonnable.J’ai aussi conclu que l’employeur a commis un acte discriminatoire à son égard au motif d’une invalidité. Enfin, j’ai conclu que la fonctionnaire ne s’est pas acquittée de son obligation d’expliquer entièrement son absence à l’employeur selon les faits en l’espèce.

640        Les parties m’ont demandé de ne pas me pencher sur les questions liées à la réparation que soulève cette affaire et je leur renvoie ces questions afin qu’elles tentent de les résoudre.Je demeurerai saisi de ce dossier pour une période de 60 jours après cette décision.Si les parties sont incapables de régler les questions liées à la réparation, elles peuvent me renvoyer l’affaire selon les délais prescrits.

641        Je mentionne pour terminer qu’en vertu du paragraphe 228(2) de la Loi, je dois rendre l’ordonnance ou les ordonnances que je juge appropriées dans les circonstances. Si les questions liées à la réparation me sont renvoyées, ma conclusion relative au défaut de la fonctionnaire de s’acquitter de son obligation d’expliquer entièrement son absence aura une incidence directe sur toute réparation que j’accorderai vu mes conclusions sur le licenciement déraisonnable et l’acte discriminatoire.

VI. Décision

642        Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

VII. Ordonnance

643        Le grief est accueilli.Je demeure saisi pour une période de 60 jours, si les parties ne parviennent pas à s’entendre sur les questions liées à la réparation.

Le 5 juillet 2018.

Traduction de la CRTESPF

David Olsen,

une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

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