Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

L’employeur a décidé de relocaliser son bureau de Vegreville, en Alberta, à Edmonton – le personnel et le syndicat ont été informés que tous les employés seraient en mesure de conserver leur emploi dans le nouveau bureau d’Edmonton – environ 50 employés ont décidé qu’ils ne suivraient pas leur emploi à Edmonton – ils ont demandé qu’on leur permette d’accéder à des options et à des prestations en vertu de l’appendice sur le réaménagement des effectifs de la convention collective – malgré le fait qu’il savait que ces employés ne suivraient pas leur emploi, l’employeur a décidé de leur offrir une garantie d’offre d’emploi raisonnable dans le nouveau bureau d’Edmonton, ce qui leur niait, aux termes d’une règle de la convention collective, certains des avantages liés au réaménagement des effectifs auxquels ils auraient autrement pu avoir accès – le syndicat a allégué que les actes de l’employeur étaient déraisonnables et qu’ils avaient enfreint les dispositions de l’appendice sur le réaménagement des effectifs – la Commission a conclu que l’offre d’emploi de l’employeur n’enfreignait pas cet appendice – l’employeur a établi un motif justifiable pour expliquer son choix d’offrir une garantie d’offre d’emploi raisonnable – les éléments de preuve ont démontré que l’employeur n’a trouvé aucun autre poste convenable du gouvernement fédéral à Vegreville ou dans son voisinage immédiat – il y avait un besoin critique d’accroître le personnel au bureau et l’employeur a cherché à éviter de perdre de bons employés en raison de la réinstallation – il était aussi motivé à réduire l’impact du déménagement et le maintien en poste du plus grand nombre possible d’employés aurait facilité la transition – toutefois, la notification par l’employeur aux employés que leurs services pourraient ne plus être requis a déclenché l’obligation pour lui d’établir un programme de départ volontaire – il a enfreint les dispositions de l’appendice sur le réaménagement des effectifs en ne le faisant pas – la Commission est demeurée saisie de l’affaire pendant 60 jours à compter de la date de la décision si les parties n’arrivaient pas à s’entendre quant à la mesure corrective appropriée.

Grief accueilli en partie.

Contenu de la décision



Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral et Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  20180829
  • Dossier:  569-02-229
  • Référence:  2018 CRTESPF 74

Devant une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral


ENTRE

ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA

agent négociateur

et

CONSEIL DU TRÉSOR
(ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration)

employeur

Répertorié
Alliance de la Fonction publique du Canada c. Conseil du Trésor (ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration)


Affaire concernant un grief de principe renvoyé à l’arbitrage


Devant:
Bryan R. Gray, une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral
Pour l'agent négociateur:
Andrew Astritis, avocat
Pour l'employeur:
Joel Stelpstra, avocat
Affaire entendue à Edmonton (Alberta),
du 12 au 15 juin 2018.
(Traduction de la CRTESPF)

MOTIFS DE DÉCISION

I. Résumé

1        L’Alliance de la Fonction publique du Canada (AFPC ou le « syndicat ») et un de ses éléments, le Syndicat de l’emploi et de l’immigration, représentent environ 180 employés du centre de traitement des demandes (CTD) d’immigration de Vegreville, en Alberta. Le CTD a constaté une augmentation de sa charge de travail de traitement des visas et des cartes de résident permanent ces derniers temps en raison de l’augmentation de l’immigration au Canada. Le ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration (le « ministère ») a également éprouvé de la difficulté dans le recrutement d’employés disposés à travailler à Vegreville. Lorsque le contrat de location du bureau est arrivé à échéance, il a été décidé de relocaliser le CTD à Edmonton, en Alberta, et ce, pour plusieurs raisons, y compris les meilleures perspectives de recrutement de nouveaux employés bilingues et instruits dans un grand centre urbain.

2        Le ministère a informé les employés et leur syndicat que tous les employés du bureau de Vegreville seraient en mesure de conserver leur emploi dans le nouveau bureau d’Edmonton, s’ils le souhaitaient. Vegreville est une collectivité d’environ 6 000 personnes située à environ 100 km à l’est d’Edmonton. Il n’y aurait pas de pertes d’emploi dans le cadre de la réinstallation.

3        En fait, le ministère a expliqué que le déménagement à Edmonton lui permettrait d’ajouter de nouveaux postes et éventuellement un deuxième quart de travail pour le traitement des dossiers d’immigration. Environ 50 employés ont décidé, pour diverses raisons, qu’ils ne suivraient pas leur emploi à Edmonton, et en ont donc avisé le ministère. Ils ont demandé qu’on leur permette d’accéder à des options et des prestations en vertu de l’annexe sur le réaménagement des effectifs de la convention collective. L’entente pertinente en l’espèce est la convention entre le Conseil du Trésor et l’AFPC pour le groupe des Services des programmes et de l’administration, qui a pris fin le 20 juin 2018 (la « convention collective »).

4        Toutefois, malgré le fait qu’il savait que ces employés ne suivraient pas leur emploi, le ministère a décidé de leur offrir une garantie d’offre d’emploi raisonnable (GOER) dans le nouveau bureau d’Edmonton, ce qui leur niait, aux termes d’une règle de la convention collective, certains des avantages liés au réaménagement des effectifs auxquels ils auraient autrement pu avoir accès.

5        Par suite de cette décision, les employés ont été déclarés excédentaires et sont maintenant susceptibles d’être mis à pied. Bien qu’ils soient admissibles aux prestations de mise à pied, ils ne sont pas en mesure d’avoir accès à d’autres options et avantages liés au réaménagement des effectifs, comme une allocation de recyclage.

6        Le syndicat a déposé un grief à l’égard de cette décision. Il a allégué qu’elle était déraisonnable et que d’autres dispositions de l’appendice sur le réaménagement des effectifs avaient aussi été violées. Le ministère a soutenu que, en tout temps, il a agi dans les limites de la convention collective et qu’il a travaillé avec tous les employés touchés par la réinstallation dans le but de trouver d’autres possibilités de poursuivre leur carrière dans la fonction publique. Toutefois, il a déclaré que de telles options sont très limitées ou inexistantes pour les employés non disposés à déménager d’une petite collectivité comme Vegreville qui n’a pas d’autres bureaux du gouvernement fédéral.

7        Après avoir entendu les témoignages et les arguments des deux parties, et après avoir examiné attentivement les dispositions en matière de réaménagement des effectifs de la convention collective, j’en arrive à la conclusion que l’employeur a contrevenu à la disposition sur les programmes volontaires (la clause 6.2) de l’appendice sur le réaménagement des effectifs. Par conséquent, j’accueille le grief pour ce motif.

8        Je rejette les allégations du syndicat selon lesquelles l’employeur a enfreint les dispositions sur la réinstallation (partie III) et la prime de maintien en fonction (clause 6.5.7).

II. Contexte

9        La preuve non contestée présentée à l’audience a établi que l’employeur avait envoyé un avis écrit à chaque employé au CTD de Vegreville qui comprenait le texte suivant :

[Traduction]

[…]

Comme il l’a déclaré le 27 octobre 2016, le ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration […] déménagera son bureau de Vegreville afin de s’assurer qu’il a la capacité de prendre de l’expansion et de moderniser ses opérations, ainsi que de répondre aux besoins opérationnels continus. La présente lettre a pour but de vous fournir de l’information sur l’impact de cette décision sur votre emploi au ministère et d’offrir un aperçu des ressources qui seront mises à votre disposition à l’appui de cette transition.

À ce titre, je désire vous informer que votre poste sera réinstallé au 9700, avenue Jasper, Edmonton (Alberta), à compter du 4 septembre 2018. Conformément à l’ENTENTE/DIRECTIVE (ci-jointe), je vous avise de ce déménagement et vous offre l’occasion de décider si vous souhaitez continuer à occuper votre poste dans les nouveaux bureaux, ou être traité comme si vous étiez assujetti à une situation de réaménagement des effectifs.

Vous avez six mois à compter de la date du présent avis pour prendre votre décision et aviser votre directeur de votre décision en retournant une copie signée du formulaire de décision concernant le déménagement du milieu de travail. Toute omission de le faire sera interprétée comme un choix de ne pas suivre votre poste vers le nouveau lieu de travail.

[…]

[Je souligne]

10        Avant d’envoyer l’avis à tous les employés, l’employeur a donné au syndicat un préavis écrit le 21 octobre 2016, comme suit :

[…]

Je vous écris pour vous informer à titre confidentiel d’une nouvelle situation imminente de réaménagement des effectifs chez Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (le ministère) résultant de la réinstallation d’une unité de travail.

[…]

Les employés seront informés verbalement au sujet de la situation de réaménagement des effectifs, le 27 octobre 2016. Les employés touchés se verront ensuite remettre une lettre les informant de la réinstallation et leur offrant la possibilité de déménager avec le poste qu’ils occupent ou d’être traités comme s’ils étaient assujettis à une situation de réaménagement des effectifs.

[…]

[Je souligne]

11        Les dispositions relatives au réaménagement des effectifs se trouvent à l’annexe D de la convention collective. Les objectifs du réaménagement des effectifs sont les suivants :

[…]

L’Employeur a pour politique d’optimiser les possibilités d’emploi pour les employé-e-s nommés pour une période indéterminée en situation de réaménagement des effectifs, en s’assurant que, dans toute la mesure du possible, on offre à ces employé-e-s d’autres possibilités d’emploi. On ne doit toutefois pas considérer que le présent appendice assure le maintien dans un poste en particulier, mais plutôt le maintien d’emploi.

À cette fin, les employé-e-s nommés pour une période indéterminée et dont les services ne seront plus requis en raison d’un réaménagement des effectifs et pour lesquels l’administrateur général sait ou peut prévoir la disponibilité d’emploi se verront garantir qu’une offre d’emploi raisonnable dans l’administration publique centrale leur sera faite. Les employé-e-s pour lesquels l’administrateur général ne peut fournir de garantie pourront bénéficier des arrangements d’emploi, ou formules de transition (parties VI et VII).

[…]

12        Aux termes de la convention collective, le réaménagement des effectifs est défini comme une « […] situation qui se produit lorsqu’un administrateur général décide que les services d’un ou de plusieurs employé-e-s nommés pour une période indéterminée ne seront plus requis […] » et comprend « […] la réinstallation d’une unité de travail à un endroit où l’employé-e ne veut pas être réinstallé […] ». La partie III de l’appendice sur le réaménagement des effectifs traite de la réinstallation d’une unité de travail. La première étape après la notification, qui est décrite à la clause 3.1.1, précise le choix que doivent faire tous les employés dont les postes seront relocalisés de déménager avec leur poste ou d’être traités comme s’ils étaient assujettis à une situation de réaménagement des effectifs.

13        Les employés doivent répondre dans un délai de six mois quant à leur choix en vertu de la clause 3.1.1. Si un employé décide de ne pas déménager, alors, en vertu de la clause 3.1.2, l’administrateur général peut lui faire une GOER ou lui offrir l’accès aux options énoncées à la clause 6.4.

14        La clause 3.1.4 affirme que, même si les ministères doivent s’efforcer de respecter les préférences des employés en matière d’emplacement, rien n’empêche un ministère d’offrir un poste réinstallé à un employé à qui l’administrateur général a fait une GOER, après avoir pris tout le temps que le permettaient les opérations à la recherche d’une offre d’emploi raisonnable à l’endroit préféré par cet employé.

15        Comme nous l’avons mentionné plus tôt, même si environ 50 employés ont décidé de ne pas suivre leur emploi à Edmonton, le ministère a quand même décidé de leur faire des GOER dans le nouveau bureau d’Edmonton. À cet égard, la clause 6.4.1 de l’appendice sur le réaménagement des effectifs indique que « [s]eul l’employé-e optant qui ne reçoit pas une garantie d’offre d’emploi raisonnable de son administrateur général aura le choix entre les options suivantes […] ». Ces options comprennent une période de priorité d’excédentaire (option A), des mesures de soutien à la transition (option B) ou une indemnité d’études (options C (i) et (ii)).

16        Enfin, la clause 6.2 indique ce qui suit :

6.2 Programmes de départ volontaire

Les ministères et les organisations mettent en place un programme de départ volontaire lors de chaque réaménagement des effectifs qui vise cinq employé-e-s touchés ou plus du même groupe et niveau et de la même unité de travail. Ces programmes :

  1. sont le fruit d’une consultation sérieuse auprès des comités mixtes sur le réaménagement des effectifs;
  2. Les programmes de départ volontaire ne doivent pas servir à dépasser les cibles de réduction. Dans la mesure du possible, les ministères et les organisations précisent le nombre de postes qu’ils prévoient éliminer avant la mise en œuvre des programmes de départ volontaire;
  3. entrent en vigueur après que les avis d’employé touché sont transmis au personnel visé;
  4. entrent en vigueur avant que le ministère ou l’organisation entame le processus de sélection des fonctionnaires aux fins de maintien en poste ou de mise en disponibilité;
  5. accordent aux employé-e-s une période de réflexion d’au moins 30 jours civils pour décider s’ils participeront ou non au programme;
  6. permettent aux employé-e-s de choisir parmi les options B, Ci et Cii;
  7. sélectionnent les participants selon leur ancienneté lorsque le nombre de volontaires excède le nombre de postes à éliminer […]

[Je souligne]

III. Questions

17        Le syndicat prétend que l’employeur a enfreint l’appendice sur le réaménagement des effectifs en omettant d’établir un programme volontaire en vertu de la clause 6.2. Il allègue de plus que la décision de l’employeur d’offrir une GOER aux employés pour les inciter à suivre leur emploi à Edmonton, lorsque ces employés avaient déjà informé l’employeur qu’ils ne déménageraient pas, était déraisonnable et, par conséquent, ne constituait pas une GOER. Enfin, le syndicat prétend que l’employeur a enfreint la clause 6.5.7 de l’appendice sur le réaménagement des effectifs en ce qui concerne les primes de maintien en fonction.

A. Question préliminaire

18        M. David Orfald, directeur de la négociation du syndicat, a témoigné à l’audience. M. Orfald a offert son témoignage le premier jour de l’audience. À la pause du midi au cours de son témoignage, j’ai vérifié mon courriel de la Commission. J’y ai noté que trois nouveaux membres avaient été nommés à la Commission à compter de septembre 2018, y compris M. Orfald.

19        Compte tenu du moment étrangement opportun de cette annonce, j’ai réuni de nouveau les deux avocats immédiatement après la pause pour partager ces nouvelles. J’ai informé les avocats que je ne connaissais pas M. Orfald et que, en fait, je n’avais jamais entendu parler de lui avant qu’il témoigne ce jour-là.

20        J’ai invité les deux avocats à considérer cette nouvelle et je leur ai offert du temps supplémentaire pour leurs délibérations s’ils le souhaitaient. J’ai dit que j’accepterais les observations des parties sur cette situation si l’une ou l’autre souhaitait en présenter.

21        Après une brève discussion et, encore une fois, après la pause de l’après-midi et avant le début du contre-interrogatoire de M. Orfald, j’ai confirmé qu’il n’y avait pas de mémoires ou d’objections à la situation. Comme je n’ai rien reçu, l’audience s’est poursuivie avec le contre-interrogatoire de M. Orfald.

B. L’employeur a-t-il enfreint l’appendice sur le réaménagement des effectifs en omettant d’établir un « programme de départ volontaire »? 

22        Le syndicat soutient que le texte de la clause 6.2 concernant les « programmes de départ volontaire » est clair. Et il affirme en outre qu’il s’applique à toutes les situations de réaménagement des effectifs de cinq employés ou plus au même groupe et niveau, comme c’était la situation au CTD de Vegreville.

23        L’employeur a répondu en faisant valoir que plusieurs clauses de l’appendice sur le réaménagement des effectifs indiquent clairement que l’employeur pouvait offrir une GOER ou l’accès aux options de réaménagement des effectifs, mais que les deux n’étaient pas disponibles. Il a ajouté que, par déduction, il était illogique d’interpréter la clause 6.2 comme permettant aux employés d’avoir accès aux options, car cela dénuerait certaines autres dispositions de sens et modifierait nécessairement la convention collective, ce qu’interdit expressément la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral (la Loi).

24        La clause 6.2 a été négociée et ajoutée à l’appendice sur le réaménagement des effectifs au cours de la plus récente ronde de négociation. J’ai entendu des témoignages selon lesquels la convention collective a été signée le 17 juin 2017, mais pas sur son entrée en vigueur, et je ne vais pas en parler davantage.

25        Je note que la clause 6.2 s’applique à « […] chaque réaménagement des effectifs qui vise cinq employé-e-s touchés ou plus […] ». Comme il est indiqué ci-dessus, la définition de réaménagement des effectifs comprend une réinstallation à un endroit où l’employé-e ne veut pas être réinstallé. De plus, aux termes du réaménagement des effectifs, un « employé touché » est défini comme étant un « [e]mployé-e nommé pour une période indéterminée qui a été avisé par écrit que ses services pourraient ne plus être requis en raison d’une situation de réaménagement des effectifs ».

26        Après avoir examiné la définition de « employé touché » dans le cadre du réaménagement des effectifs dans le contexte du réaménagement des effectifs dans son ensemble, j’en arrive à la conclusion que la définition d’employé touché comprend clairement les employés du CTD de Vegreville en question. Les éléments de preuve dont je suis saisi indiquent que chaque employé du CTD a, en fait, reçu un avis écrit qu’il se trouvait dans une situation susceptible de faire en sorte que ses services ne soient plus requis en raison d’une situation de réaménagement des effectifs. Ainsi, ils correspondent à la définition de « employé touché ».

27        La preuve non contestée établissait aussi clairement que la réinstallation à Vegreville était une situation de réaménagement des effectifs mettant en cause plus de cinq employés de mêmes groupe et niveau.

28        Le syndicat a fait valoir que, compte tenu du langage clair indiquant que la clause 6.2 s’applique à toutes les situations de réaménagement des effectifs mettant en cause cinq employés ou plus du même groupe et niveau, je devrais interpréter cette clause comme permettant aux employés de se retirer du processus après avoir reçu la lettre d’avis de réinstallation de l’employeur, comme l’exige la clause 3.1.1.

29        L’avocat du syndicat a fait valoir que, si un employé opte de façon si précoce, l’alinéa 6.2(F) a pour effet de donner à cet employé accès aux options des alinéas 6.4.1(b) (une mesure de soutien à la transition sous forme de paiement forfaitaire) et c)(i) et (ii) (une indemnité d’études). Cet employé ne serait alors pas assujetti, plus tard, à la décision de l’employeur de faire une GOER ou d’offrir les autres options de réaménagement des effectifs, selon le syndicat.

30        L’employeur a fait valoir que la clause 6.2 ne parle que des situations de réduction du personnel. Cela veut dire qu’un « programme de départ volontaire » doit être établi. Son avocat a fait remarquer des mentions particulières d’objectifs de réduction (à l’alinéa 6.2(B)) et à SMPMD (sélection des fonctionnaires aux fins de maintien en poste ou de mise en disponibilité, à l’alinéa 6.2(D)), qui existent tous deux exclusivement dans le domaine d’un exercice de réaménagement des effectifs.

31        L’avocat de l’employeur a laissé entendre que, si j’accepte l’argument du fonctionnaire s’estimant lésé relativement à la clause 6.2, cela dénuerait nécessairement de sens d’autres sections du réaménagement des effectifs, qui indiquent clairement que l’employeur doit choisir d’offrir à un employé une GOER ou lui accorder accès aux options de réaménagement des effectifs.

32        Les employés ont initialement été informés par écrit qu’ils seraient en mesure de poursuivre leur travail dans le nouvel emplacement s’ils le souhaitaient et, plus tard, que ceux qui avaient refusé l’offre au début s’étaient vu offrir une GOER. À ce titre, j’en arrive à la conclusion que l’employeur a avisé les employés en question que leurs services pourraient ne plus être requis, ce qui les porte dans la définition de « employé touché » et déclenche l’obligation pour l’employeur d’établir un programme de départ volontaire en vertu de la clause 6.2.

33        Je conclus que le libellé de la clause 6.2 est clair et non équivoque. Il s’agit d’une disposition obligatoire (« mettent ») et s’applique à « chaque » situation de réaménagement des effectifs, comme c’était le cas au CTD de Vegreville.

34        Bien que j’accepte les arguments bien articulés de l’avocat de l’employeur selon lesquels mon interprétation de la clause 6.2 pourrait avoir une incidence sur d’autres parties du réaménagement des effectifs, qui traitent du choix de l’employeur d’offrir des GOER ou les autres options, je conclus que cela porte davantage sur la difficulté de négocier de façon homogène et d’insérer un nouvel article dans une entente de longue date, plutôt que de faire du tort à d’autres articles connexes du réaménagement des effectifs.

35        Compte tenu de ma conclusion concernant le libellé clair et sans équivoque de la clause 6.2, je ne peux pas accepter l’observation de l’employeur, qui s’appuie sur une conclusion et une déduction logique pour en arriver à une conclusion différente de la mienne. De plus, le fait d’accepter l’observation de l’employeur relativement à cette disposition entraînerait sa réécriture pour dire qu’elle ne s’applique pas à toutes les situations de réaménagement des effectifs, ce qu’il m’est expressément interdit de faire en vertu de l’article 229 de la Loi.

B. L’employeur a-t-il enfreint la convention collective lorsqu’il a émis une garantie d’offre d’emploi raisonnable aux employés pour les inciter à suivre leurs emplois à Edmonton lorsque ces employés avaient déjà informé l’employeur qu’ils avaient choisi de ne pas suivre leurs emplois? 

36        Le syndicat a établi le fondement de cette allégation en soulignant que la clause 1.1.1 de l’appendice sur le réaménagement des effectifs se lit comme suit :

1.1.1 Étant donné que les employé-e-s nommés pour une période indéterminée qui sont touchés par un réaménagement des effectifs ne sont pas eux-mêmes responsables de cette situation, il incombe aux ministères ou aux organisations de veiller à ce qu’ils ou elles soient traités équitablement et à ce qu’on leur offre toutes les possibilités raisonnables de poursuivre leur carrière dans la fonction publique, dans la mesure du possible.

37        À l’appui de cette allégation, l’avocat du syndicat a appelé cinq témoins qui étaient des employés du CTD au moment pertinent et étaient tous mécontents à différents degrés par la réinstallation. Ils faisaient partie d’un groupe composé, selon le témoignage de M. Orfald, de 27 employés qui ne voulaient pas déménager avec leurs emplois et qui, par conséquent, faisaient face à des mises à pied à la fin du mois d’août 2018.

38        Chaque témoin avait commencé sa carrière avec le ministère au moment de l’ouverture du CTD, en février 1994. Chacune d’entre elles a donné un témoignage sincère quant aux défis qu’elle et sa famille ont dû relever dans le cadre du déménagement à Edmonton. Chacune a parlé du stress qu’elle et sa famille ont vécu alors qu’ils envisageaient la question de savoir si elle devrait déménager pour poursuivre sa carrière. Chacune a parlé du fond du cœur au sujet de sa situation financière et de ses engagements familiaux. Chaque récit était unique et convaincant.

39        J’ai entendu le témoignage de racines profondes dans les fermes familiales qui ont été transférées d’une génération à l’autre, la responsabilité pour les soins aux personnes âgées, un chien avec un trouble anxieux qui n’aimerait pas être laissé seul pendant de longues journées, le stress financier pour les familles qui ne pensaient pas pouvoir déménager, et le chagrin de parents qui avaient des enfants dans une phase très sensible d’adolescence qui ne voulaient pas être déracinés et qui étaient tombés malades par le stress d’envisager le déménagement. Une témoin a mentionné le fait que sa famille comprenait un enfant gravement malade à qui elle apportait des soins et dont elle ne voulait pas s’éloigner.

40        Une autre témoin a dû répondre à ce que je considère comme des questions très malheureusement détaillées dans son interrogatoire principal au sujet de sa situation difficile à la maison en tant que femme monoparentale prenant soin de ses enfants et faisant face à ses propres défis à réussir malgré les défis de la maladie mentale et de la tendance pour l’automédication.

41        L’avocat de l’employeur a aussi abordé la question de l’orientation de haut niveau de l’appendice sur le réaménagement des effectifs et a porté la clause 1.1.7 à mon attention, qui se lit comme suit :

1.1.7 Normalement, l’administrateur général garantira une offre d’emploi raisonnable aux employé-e-s assujettis au réaménagement des effectifs pour lequel il sait ou peut prévoir une disponibilité d’emploi dans l’administration publique centrale.

[Je souligne]

42        L’avocat de l’employeur a fait valoir que cette clause donne une très bonne compréhension de l’intention des parties de concentrer le réaménagement des effectifs sur le maintien en poste des employés, tout en vivant les transitions associées au réaménagement des effectifs. Plus précisément, la partie III, qui, comme il est indiqué ci-dessus est au sujet de « la réinstallation d’une unité de travail », fournit une orientation détaillée pour les décisions en cause dans une situation comme celle qui s’est produite à Vegreville.

43        Au cours du contre-interrogatoire, lorsqu’il a été interrogé au sujet des clauses 3.1.2 et 3.1.4, et de la capacité de l’employeur à offrir une GOER, y compris une GOER qui se situe à l’extérieur des lieux préférés de l’employé, ou de permettre l’accès aux options énoncées à la clause 6.4, M. Orfald a déclaré qu’en fait, cela donne un choix à l’employeur, mais que l’employeur a fait le mauvais choix en offrant des GOER, car l’offre de déménager à Edmonton n’était pas raisonnable dans les circonstances.

44        Cependant, les éléments de preuve montrent que l’employeur n’a trouvé aucun autre poste convenable du gouvernement fédéral à Vegreville ou dans son voisinage immédiat. Après avoir cherché une offre d’emploi raisonnable dans la zone de préférence de l’employé, la clause 3.1.4 indique que « […] rien n’empêche un ministère ou une organisation d’offrir le poste réinstallé avec l’unité de travail à un employé-e […] ». Compte tenu de la preuve et du libellé clair et non ambigu de la clause 3.1.4, je conclus que l’offre d’emploi de l’employeur n’a pas violé l’appendice sur le réaménagement des effectifs.

45        L’avocat du syndicat a présenté des éléments de preuve sur l’historique des négociations du réaménagement des effectifs et sur d’autres situations de réaménagement des effectifs où les employés touchés ont eu accès aux mêmes options de réaménagement des effectifs qu’on cherchait à obtenir dans le présent cas. Dans un cas, une GOER a été annulée à la demande des employés touchés qui refusaient de déménager pour suivre leurs postes déplacés. Le syndicat a appelé deux de ses employés à témoigner au sujet de l’histoire et des nombreuses années d’évolution du texte de l’appendice sur le réaménagement des effectifs (y compris M. Orfald) et sur la façon dont les autres situations de réaménagement des effectifs ont été traitées dans le passé (un M. West).

46        L’avocat de l’employeur a contesté ma compétence pour recevoir des témoignages sur l’historique des négociations ou une pratique antérieure. Il a fait valoir que les règles de l’interprétation de la convention collective indiquent clairement que les arbitres de griefs ne devraient pas chercher pour des preuves étrangères au sujet lorsqu’il est conclu que le texte de la clause en question est clair et sans ambiguïté. Il a cité mon analyse de cette même question dans Fehr c. Agence du revenu du Canada, 2017 CRTESPF 17, aux paragraphes 52 et 56 à 59, comme suit :

52      Pour appuyer son objection à ce sujet, la fonctionnaire cite plusieurs passages de Brown et Beatty qui précisent que la parole ou la preuve extrinsèque est celle qui se situe à l’extérieur du contrat écrit qui est interprété. Même si les auteurs notent plusieurs exceptions, ils précisent que la règle générale de la common law est que la preuve extrinsèque ne peut pas être admise pour contredire ou modifier les termes de la convention collective. Si le terme est ambigu, une telle preuve est alors admissible pour aider à l’interprétation et pour expliquer l’ambiguïté. Ils suggèrent que les formes les plus communes de ce type de preuve sont l’historique et les pratiques de négociation des parties. Ils ajoutent que pour que cette preuve soit invoquée, les deux parties doivent y consentir; elle ne doit pas simplement représenter le souhait de l’une des parties (voir le paragraphe 3:4400).

[…]

56      Les deux parties invoquent la décision arbitrale dans Schlegel Villages v. Service Employees International Union, Local 1 Canada, [2016] O.L.A.A. No. 104 (QL) (« Schlegel Villages »), qui s’appuient grandement sur l’arrêt de la Cour suprême du Canada Sattva Capital Corp. c. Creston Molly Corp., 2014 CSC 53 (CanLII) (« Sattva Capital »).

57      Schlegel Villages est l’arrêt faisant autorité relativement à la proposition selon laquelle la preuve contextuelle des circonstances peut être invoquée, mais qu’elle ne peut pas contredire les mots des parties.

58      Sattva Capital ajoute que la preuve contextuelle devrait être composée uniquement d’une preuve objective du contexte factuel au moment de la mise en œuvre du contrat, et qu’elle comprend tout ce qui aurait eu une incidence sur la manière dont une personne raisonnable aurait compris les termes du document. Sattva Capital se conclut avec un avertissement voulant que les circonstances ne peuvent être utilisées pour rédiger de nouveau les négociations des parties.

59      La fonctionnaire invoque Taticek c. Agence des services frontaliers du Canada, 2014 CF 281, qui renvoie à Eli Lilly and Co c. Novopharm Ltd., 1998 CanLII 791 (CSC), [1998] 2 R.C.S. 129, au paragraphe 54, comme l’arrêt faisant autorité relativement au fait que l’intention des parties contractantes doit être déterminée en fonction des mots qu’elles ont employés en rédigeant le document et, si nécessaire, à la lumière des circonstances qui prévalaient à ce moment. Toutefois, la preuve de l’intention subjective d’une partie n’occupe aucune place dans cette décision. Cette affaire souligne également qu’il faut donner aux mots utilisés dans le contrat leur sens clair et ordinaire à moins qu’il n’en résulte une absurdité (aux paragraphes 58 et 59).

47        Comme l’a soutenu l’avocat de l’employeur, et conformément à mes conclusions dans Fehr, je ne trouve pas du tout pertinent le témoignage du syndicat sur l’historique des négociations ou les exemples de pratique établie. J’ai examiné l’appendice sur le réaménagement des effectifs et les arguments bien préparés des deux parties. J’ai trouvé le texte suffisamment clair et sans équivoque, de sorte qu’il serait injuste pour moi de tenir compte des éléments de preuve étrangers qui pourraient être contraires au sens clair et ordinaire du texte dont ont convenu les parties. Compte tenu de cette conclusion, je n’accorde aucune valeur probante à la preuve sur l’historique des négociations et les pratiques passées.

48        L’avocat de l’employeur a appelé Robert Orr, qui était, lors des périodes pertinentes à cette affaire, le sous-ministre adjoint pour les opérations. Il a témoigné au sujet de l’augmentation de la charge de travail du CTD et a expliqué que des changements dans la façon dont les demandes sont traitées exigent que les employés aient une plus grande capacité d’analyse.

49        M. Orr a également déclaré que le bureau doit être en mesure d’embaucher plus de travailleurs bilingues. Il a témoigné que ces deux exigences et l’emplacement de Vegreville rendaient très difficile l’embauche de nouveaux employés. Il a expliqué que, lorsque le contrat de location du bureau de Vegreville est arrivé à échéance, il a été décidé de déménager le bureau, et le plan clair était de conserver tous les membres du personnel qui déménageraient, d’embaucher beaucoup plus de personnes, et peut-être d’instituer un deuxième quart de travail dans le nouveau bureau. Il a expliqué les nombreux préparatifs en cours en vue de recruter de nouveaux employés et de réduire au minimum l’impact sur le travail compte tenu de la lourde charge de travail du CTD.

50        L’argument invoqué par l’avocat du syndicat pour un traitement plus équitable a été appuyé par la récente décision de la Commission dans Cianciarelli c. Conseil du Trésor (ministère de l’Environnement), 2017 CRTEFP 32, qui portait sur une situation de réaménagement des effectifs où le fonctionnaire s’estimant lésé dans ce cas a été jugé excédentaire et où un différend est survenu concernant une demande de fournir les fonds de la mesure de soutien à la transition de façon à réduire la dette fiscale du fonctionnaire s’estimant lésé. L’employeur a exercé son pouvoir discrétionnaire en vertu de la convention collective pertinente pour refuser la demande, fournissant ainsi les fonds en un seul paiement et augmentant au maximum la dette fiscale. La Commission a décidé comme suit que l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire sur le paiement n’a pas été fait de façon équitable :

[…]

[34] […] il m’apparaît qu’un principe d’équité n’a pas été pris en compte. L’employeur a accepté, dans la convention collective et dans l’ERE, de traiter les employés équitablement.

[…]

[40] […] l’employeur ne m’a fourni aucune explication raisonnable justifiant le défaut d’accorder l’option des deux versements, particulièrement lorsqu’il ressort clairement que cette option est en place depuis un certain temps […]

[…]

51        Après avoir lu Cianciarelli, je note qu’au paragraphe 40, la Commission a conclu que l’employeur n’avait aucune explication raisonnable pour tout obstacle à la demande du fonctionnaire s’estimant lésé. La présente affaire se distingue par ces faits.

52        Les éléments de preuve dont je suis saisi et le témoignage non contesté de M. Orr ont clairement établi un motif justifiable pour l’employeur de choisir d’offrir une GOER à tous les employés. Il y avait un besoin critique d’accroître le personnel au bureau et l’employeur cherchait à éviter de perdre de bons employés en raison de la réinstallation. Il était aussi motivé à réduire l’impact du déménagement et le maintien en poste du plus grand nombre possible d’employés faciliterait la transition.

53        L’avocat de l’employeur a invoqué la décision de la Commission dans Chafe c. Conseil du Trésor (ministère des Pêches et des Océans), 2010 CRTFP 112, au paragraphe 50, pour les grandes conclusions utiles selon lesquelles « [l]e fait qu’une disposition particulière peut sembler injuste n’est pas une raison pour que j’en fasse abstraction, si la disposition est clairement formulée […] ».

54        L’employeur s’est également appuyé sur la décision de M. le juge Rothstein, de la Cour fédérale, Section de première instance à l’époque, dans l’affaire Procureur général du Canada c. Edwards (1999), dossier de la Cour fédérale no T -105-98, qui a entendu la demande de contrôle judiciaire d’une contestation sur ce qui était « raisonnable » dans une GOER dans laquelle une employée avait refusé une demande de prendre un nouveau poste au même grade, mais dans un bureau réorganisé dans la même collectivité que son ancien poste.

55        L’avocat du syndicat a fait valoir qu’en l’espèce, la situation de fait et la convention collective sont différentes. Je conclus cependant que le fondement de cette action est utile. La Cour a examiné la question de savoir si la situation personnelle de la fonctionnaire s’estimant lésée et son opposition à l’offre la rendaient déraisonnable. Compte tenu du libellé de la convention alors en place, la Cour a conclu ce qui suit, à la page 6 :

[Traduction]

[…]

Dans le cas présent, l’offre comprenait un poste de durée indéterminée au sein de la fonction publique à un niveau équivalent. Le poste offert se trouvait au sein de l’administration centrale de l’employée. Le fait que l’intimée [fonctionnaire s’estimant lésée] ne voulait pas le poste, qu’un autre employé avait trouvé l’emploi instable […] sont des considérations non pertinentes. Il n’y a rien dans la définition qui implique qu’une offre d’emploi est déraisonnable parce que l’employée ne la veut pas. Rien dans la définition n’implique que l’employeur est tenu d’établir une relation de travail « entièrement acceptable pour les deux parties […] ».

[…]

56        Cet aspect de la décision a été confirmé en appel; voir Edwards c. Procureur général du Canada, [2000] A.C.F. no 645 (C.A.) (QL).

57        Même si Edwards a été décidé en fonction d’une autre convention collective et d’une situation de fait dans laquelle une fonctionnaire s’estimant lésée était mutée à un nouveau poste au sein de la même zone d’administration centrale, je partage le sentiment de la Cour quant à ses motifs.

58        Je conclus que l’argument de l’avocat du syndicat selon lequel l’employeur devait essentiellement à ses employés un traitement meilleur et plus équitable (selon la clause 1.1.1) mène nécessairement à la création d’une norme ersatz équivalente de diligence. Si la Commission reconnaissait une telle chose, cela offrirait à un fonctionnaire s’estimant lésé le moyen de chercher à surmonter le libellé clair d’une convention collective lorsqu’il estime que ses propres circonstances personnelles subjectives sont défavorablement touchées par les actions autrement valides de l’employeur autorisées par la convention collective. Je ne puis retenir cette observation.

59        Tous les témoignages des témoins du fonctionnaire s’estimant lésé étaient très sincères et difficiles pour chacune d’elles à partager. Cependant, aucune des circonstances difficiles auxquelles elles ont dû faire face n’est la responsabilité de l’employeur en vertu de la convention collective.

C. L’employeur a-t-il enfreint le réaménagement des effectifs en refusant de verser les primes de maintien en fonction de la clause 6.5.7 aux employés qui travaillent au CTD de Vegreville jusqu’à la dernière journée de l’opération à la fin du mois d’août 2018?

60        La clause 6.5.7 est ainsi rédigée :

6.5.7 Sous réserve de l’alinéa 6.5.6, l’administrateur général verse à chaque employé-e auquel il demande de rester en fonction jusqu’à la réinstallation de l’unité de travail, et qui offre de démissionner de l’administration publique centrale à la date de cette réinstallation, une somme équivalant à six (6) mois de traitement, cette somme étant payable le jour où l’unité de travail du ministère ou de l’organisation est réinstallée, pourvu que l’employé-e ne soit pas parti avant cette date.

61        Lorsque l’avocat du fonctionnaire s’estimant lésé a fait son argument sur cette question, je lui ai demandé si j’avais des preuves sur l’exigence énoncée dans la clause 6.5.7 selon laquelle on doit demander à chaque employé de rester en fonction jusqu’à ce que le déménagement ait eu lieu. Il a répondu que l’établissement de la date de cette réinstallation, puis la mise à pied des employés qui ont choisi de ne pas déménager ont servi de demande pour les employés de demeurer au travail.

62        Je ne suis pas d’accord. L’établissement de la date de cette réinstallation et la date de mise à pied ne constituaient pas une demande pour le personnel de continuer à travailler. Je n’accepte pas le fait que l’argumentation déductive du fonctionnaire s’estimant lésé répond à l’exigence claire et précise de la clause 6.5.7 de demander aux employés de demeurer au travail.

63        J’ai lu cette clause plutôt comme un encouragement pour inciter les employés, qui pourraient autrement quitter leur emploi de façon précoce, à rester au travail et à en assurer la continuité jusqu’à ce que la réinstallation du bureau soit terminée.

64        Je n’avais pas la moindre preuve que l’un ou l’autre des employés qui sont restés à leur emploi l’ont fait pour une raison autre que leur désir de maintenir leur rémunération potentielle au maximum avant que leur travail cesse, conformément à leur décision de ne pas déménager.

65        Compte tenu de l’absence de tout élément de preuve indiquant qu’on avait demandé aux employés « de rester », comme l’exige la clause 6.5.7, je conclus, selon la prépondérance des probabilités, que le syndicat n’a pas satisfait à son fardeau de la preuve pour établir une violation de la convention collective en vertu de la présente clause.

IV. Conclusion

66        Pour les raisons que j’ai expliquées, le grief est accueilli en partie. Je conclus que l’employeur a enfreint la clause 6.2 de l’appendice sur le réaménagement des effectifs.

67        Les parties m’ont demandé de leur donner la possibilité de demander une réparation appropriée si j’en arrivais à une telle conclusion. Par conséquent, je demeure saisi de cette question pendant 60 jours à compter de la date de la présente décision si les parties ont besoin de faire des observations sur la mesure corrective.

68        Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

V. Ordonnance

69        Le grief est accueilli en partie.

70        Je déclare que l’employeur a enfreint la clause 6.2 de l’appendice sur le réaménagement des effectifs.

71        Je demeure saisi de cette question pendant 60 jours à compter de la date de la présente décision si les parties n’arrivent pas à s’entendre quant à la mesure corrective appropriée.

Le 29 août 2018.

Traduction de la CRTESPF

Bryan R. Gray,

une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le public fédéral

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