Décisions de la CRTESPF

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Résumé :

L’Association des pilotes fédéraux du Canada a déposé une plainte aux termes de l’article 190 de la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral (la « Loi ») alléguant que les défendeurs s’étaient livrés à une série de pratiques déloyales de travail après qu’elle leur a signifié un avis de négocier – la plaignante a allégué que les défendeurs ont refusé de participer à des discussions complètes et rationnelles au sujet de ses propositions relatives à la convention collective et au programme de maintien de la compétence professionnelle en aviation (le « PMCA »), et qu’ils ont manqué à l’obligation de négocier de bonne foi, contrairement à l’article 106 de la Loi – les défendeurs ont soutenu qu’ils ont toujours été disposés à négocier et que les parties participent encore aux discussions – les défendeurs ont soutenu que la position du Conseil du Trésor selon laquelle il n’était pas prêt à insérer le PMCA dans la convention collective ne peut donner lieu à une conclusion de négociation de mauvaise foi – la Commission a jugé que l’agent négociateur ne s’est pas acquitté de son fardeau d’établir, selon la prépondérance des probabilités, que l’employeur n’a pas négocié de bonne foi et elle a rejeté cette allégation – la plaignante a également soutenu que les défendeurs ont contrevenu au gel prévu par la loi concernant les conditions d’emploi, contrairement à l’article 7 de la Loi (« Obligation de respecter les conditions d’emploi »), en se livrant à plusieurs actes illicites, y compris l’embauche d’au moins un employé permanent à temps partiel, et en exigeant un certificat d’aptitude au travail pour les employés qui s’étaient absentés du lieu de travail pendant plus de 20 jours – les défendeurs ont soutenu que les principes de [traduction] « cours normal des affaires » et d’[traduction] « attente raisonnable » s’appliquent en l’espèce et ils ont affirmé que la plaignante n’a pas non plus établi qu’il y a eu dérogation aux dispositions relatives au gel prévu par la loi en ce qui concerne l’exigence que les employés fournissent une note médicale avant de pouvoir retourner au travail – la Commission a rejeté toutes les allégations relatives au manquement aux dispositions concernant le gel des conditions d’emploi prévu par la loi sauf une, qui a été accueillie – en particulier puisque la Commission a jugé que les défendeurs ont embauché au moins un employé permanent à temps partiel, elle a maintenu que les défendeurs ont contrevenu au gel prévu par la loi – la Commission n’a pas jugé que les défendeurs s’étaient livrés à des pratiques déloyales de travail – en outre, la plaignante a affirmé que le comportement des défendeurs constitue un rejet du statut d’agent négociateur de la plaignante, ce qui équivaut à une ingérence dans la formation ou l’administration d’une organisation syndicale ou dans la représentation des fonctionnaires par celle-ci, contrairement à l’alinéa 186(1)b) de la Loi – cependant, la Commission a rejeté cette allégation.

Plainte accueillie en partie.

Contenu de la décision



Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral et Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  20181211
  • Dossier:  561-02-791
  • Référence:  2018 CRTESPF 91

Devant une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral


ENTRE

ASSOCIATION DES PILOTES FÉDÉRAUX DU CANADA

plaignante

et

MINISTÈRE DES TRANSPORTS, BUREAU DE LA SÉCURITÉ DES TRANSPORTS ET SECRÉTARIAT DU CONSEIL DU TRÉSOR

défendeurs

Répertorié
Association des pilotes fédéraux du Canada c. Ministère des Transports, Bureau de la sécurité des transports et Secrétariat du Conseil du Trésor


Affaire concernant une plainte déposée en vertu de l’article 190 de la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral


Devant:
David Olsen, une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral
Pour la plaignante:
Jennifer Duff, avocate
Pour les défendeurs:
Karl Chemsi, avocat
Affaire entendue à Ottawa (Ontario),
le 27 février, du 19 au 23 juin, du 25 au 27 septembre,
les 10 et 11 octobre et les 27 et 28 novembre 2017.
(Arguments écrits déposés le 18 décembre 2017,
et le 22 janvier et le 5 février 2018.)
(Traduction de la CRTESPF)

MOTIFS DE DÉCISION

I. Plainte devant la Commission

1         Le 21 avril 2016, l’Association des pilotes fédéraux du Canada (l’« APFC », la « plaignante », l’« agent négociateur » ou l’« Association ») a déposé la présente plainte alléguant que les défendeurs s’étaient livrés à une série de pratiques déloyales de travail après qu’elle leur a signifié un avis de négocier en septembre 2014.

2         Le 19 juin 2017, la Loi modifiant la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique et d’autres lois et comportant d’autres mesures (L.C. 2017, ch. 9) a reçu la sanction royale et a modifié le nom de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique et les titres de la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique et de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique pour qu’ils deviennent respectivement la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (la « Commission »), la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral et la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral (la « Loi »).

3         L’Association est d’avis que les défendeurs ont agi d’une manière qui, considérée séparément ou dans son ensemble, s’attaque au cœur même des principes professionnels de ses membres, et entrave leur capacité à exécuter leurs tâches.

4         Plus particulièrement, l’Association a allégué que les défendeurs ont refusé de participer à des discussions complètes et rationnelles au sujet de ses propositions relatives à l’article 47 de la convention collective et du programme de maintien de la compétence professionnelle en aviation (le « PMCA ») et qu’ils ont manqué à l’obligation de négocier de bonne foi, contrairement à l’article 106 de la Loi. L’Association a également soutenu que les défendeurs ont contrevenu au gel prévu par la loi concernant les conditions d’emploi, contrairement à l’article 7 de la Loi. Plus particulièrement, elle a fait valoir que les défendeurs ont effectué ce qui suit :

[Traduction]

[…]

  1. apporter des changements importants aux conditions d’emploi des membres en effectuant unilatéralement des réductions au programme de maintien de la compétence professionnelle en aviation (le « PMCA »);
  2. apporter des changements importants aux conditions d’emploi des membres en annulant unilatéralement la Lettre de politique 164 et en mettant en œuvre deux bulletins internes de procédures établissant les exigences en matière de formation des inspecteurs de la sécurité de l’aviation civile;
  3. mettre en œuvre unilatéralement une exemption législative au Règlement de l’aviation canadien en vue de se soustraire à leurs obligations en vertu du PMCA;
  4. communiquer directement avec les membres de l’Association au moyen de sondages et de réunions avec les membres;
  5. prendre une décision unilatérale d’embaucher au moins un employé permanent à temps partiel, malgré l’absence d’une disposition portant sur un tel poste dans la convention collective;
  6. prendre une décision unilatérale d’exiger que les employés qui se sont absentés du lieu de travail pendant plus de vingt (20) jours présentent un certificat d’aptitude au travail.

[…]

5         Selon les allégations, en agissant comme tel, les défendeurs ont rejeté le  statut d’agent négociateur de l’APFC. La conduite des défendeurs équivalait à une intervention dans la formation ou l’administration d’une organisation syndicale ou dans la représentation des fonctionnaires par celle-ci, contrairement à l’alinéa 186(1)b) de la Loi.

A. Réponse des défendeurs

6         En ce qui concerne l’obligation de négocier de bonne foi, les défendeurs ont soutenu qu’ils ont toujours été disposés à négocier à la table des négociations et que les parties participent encore aux discussions. Pour ce qui est des propositions de l’APFC concernant l’article 47, la position du Conseil du Trésor selon laquelle il n’était pas prêt à insérer le PMCA dans la convention collective ne peut donner lieu à une conclusion de négociation de mauvaise foi.

7         En ce qui concerne les allégations selon lesquelles les dispositions relatives au gel prévu par la loi ont fait l’objet d’un manquement, les défendeurs ont fait valoir que les principes de [traduction] « cours normal des affaires » et d’[traduction] « attente raisonnable » élaborés par la jurisprudence s’appliquent en l’espèce.

8         L’employeur avait un pouvoir discrétionnaire en ce qui concerne la formation de ses employés avant la signification de l’avis de négocier. Ce pouvoir discrétionnaire continue de s’appliquer malgré le gel prévu par la loi, surtout étant donné qu’il avait une justification valable d’ajuster la formation de ses employés en fonction de sa situation économique et de ses besoins opérationnels.

9         Les défendeurs ont également soutenu que l’APFC ne s’était pas acquittée du fardeau de la preuve qui lui incombait en ce qui concerne ses allégations au sujet de l’embauche d’un employé permanent à temps partiel.

10        L’APFC n’a pas non plus établi qu’il y a eu violation des dispositions relatives au gel prévu par la loi en ce qui concerne l’exigence de fournir une note médicale par les employés avant de pouvoir retourner au travail. Les dispositions relatives au gel prévu par la loi ne visent pas à placer l’employeur dans un type de carcan pendant les négociations, surtout lorsqu’il a une obligation continue d’assurer la sécurité de ses employés et du public en cas de congés de maladie prolongés.

B. Conclusions

11        Pour les motifs décrits plus loin dans la présente décision, je suis parvenu aux conclusions suivantes.

1. Question 1 : Manquement à l’obligation de négocier de bonne foi

12        L’agent négociateur ne s’est pas acquitté de son fardeau d’établir, selon la prépondérance des probabilités, que l’employeur n’a pas négocié de bonne foi. À l’audience, les parties n’étaient pas dans une impasse en ce qui concerne la question relative au PMCA et devaient participer à une autre négociation directe à ce sujet.

2. Question 2 : Modifier le PMCA

13        Bien que les dispositions du PMCA, qui a été conclu par Transports Canada et l’agent négociateur en 2007, sont visées par les dispositions relatives au gel prévues à l’article 107 de la Loi et qu’elles doivent demeurer en vigueur conformément à la loi, je ne suis pas convaincu que l’employeur a contrevenu aux dispositions du PMCA ni qu’il les ait modifiées. Le PMCA confère à l’employeur le pouvoir discrétionnaire de déterminer si les employés doivent être affectés au programme de vol régulier ou à un autre programme de maintien de la compétence professionnelle en aviation (« autre programme de vol ») convenu lorsqu’ils sont établis dans un lieu géographique qui ne permet pas une telle affectation, par exemple lorsqu’aucun aéronef n’est disponible ou lorsqu’une a été fermée.

3. Question 3 : Annuler la Lettre de politique 164 et publier les bulletins internes de procédures (BIP)

14        Le document intitulé « Lettre de politique 164 » est une politique de la direction qui n’était pas visée par la convention collective ou le PMCA et il n’était pas assujetti à une entente entre Transports Canada et l’agent négociateur. Il faisait l’objet d’un examen depuis 2009. Un examen officiel de la politique en 2012 a abouti à des recommandations d’y apporter des modifications. Il ne constituait pas une condition d’emploi qui était en vigueur le jour où l’avis de négocier a été donné et il n’est pas visé par l’article 107 de la Loi. Quoi qu’il en soit, le document a été mis en œuvre en 2005, lorsque les inspecteurs de l’aviation civile (CAI) effectuaient encore des opérations de vérification en aviation commerciale de façon routinière. Au cours des années, ces vérifications ont été en grande partie déléguées aux pilotes du milieu aéronautique. Les inspecteurs de Transports Canada ne sont pas tenus de suivre le même niveau ou type de formation et exercent davantage d’activités de contrôle et de surveillance. Étant donné que l’attribution des tâches aux employés a changé au cours des années, je suis d’avis que la modification apportée au BIP a fait concorder les exigences en matière de formation à l’égard des employés dont les tâches avaient déjà été modifiées, ce qui constituait une question relevant du pouvoir discrétionnaire de la direction.

4. Question 4 : Exemption de l’application du RAC

15        En ce qui concerne l’allégation selon laquelle l’employeur a mis en œuvre unilatéralement une exemption législative au Règlement de l’aviation canadien (DORS/96-433; « RAC ») en vue de se soustraire à ses obligations en vertu du PMCA, j’ai conclu que les exigences réglementaires concernant la délivrance de licences à tous les pilotes au Canada et les exigences de maintenir ces licences, édictées par le gouverneur en conseil aux termes de la Loi sur l’aéronautique (L.R.C. (1985), ch. A-2), ou les exemptions à ces exigences édictées au nom du ministre des Transports ne constituent pas des conditions d’emploi entre l’employeur et ses employés. L’employeur est tenu de fournir des occasions aux employés de maintenir les exigences relatives à leurs licences de pilotes en vertu de la convention collective et du PMCA. La détermination des exigences relatives à la licence d’un pilote au Canada ne relève pas des relations de travail.

5. Question 5 : Communiquer avec les membres de l’APFC

16        En ce qui concerne l’argument selon lequel l’employeur a communiqué directement avec les membres de l’Association au moyen de sondages et de réunions, la preuve ne permet pas de conclure que les visites de contrôle qui ont eu lieu en 2017 visaient le PMCA ou que la direction a amorcé des discussions directement avec les membres de l’APFC  sur des questions liées au PMCA, même s’il a répondu aux questions des employés au sujet de vol en ligne.

17        Les dispositions sur les pratiques déloyales de travail prévues dans la Loi prévoient une exemption en matière de liberté d’expression pour les employeurs. Ils ne se livrent pas à des pratiques déloyales de travail du seul fait qu’ils expriment leurs points de vue, pourvu qu’ils n’aient pas indûment usé de leur influence, fait des promesses ou recouru à la coercition, à l’intimidation ou à la menace. Aucun élément de preuve n’a été déposé qui satisfait à ces critères.

18        Je ne conclus pas non plus que l’approche du Bureau de la sécurité des transports (BST) à l’égard d’un expert en la matière, en ce qui concerne les qualifications des pilotes dont les postes faisaient partie de l’unité de négociation, qui étaient des membres de l’APFC, dont le président du BST n’avait aucune connaissance, a entravé la représentation des employés par l’agent négociateur.

6. Question 6 : Un employé permanent à temps partiel

19        Même si la preuve de l’agent négociateur n’était pas aussi complète que voulu, nul ne conteste qu’à la fin de 2015, Transports Canada a embauché un employé permanent à temps partiel. Cette embauche contrevenait aux dispositions de la convention collective et à la période de gel prévue à l’article 107 de la Loi.

7. Question 7 : Certificats d’aptitude au travail après une absence de 20 jours

20         La pratique de l’employeur consistant à exiger un certificat d’aptitude au travail pour les absences dépassant 20 jours existait avant l’avis de négocier; les défendeurs n’ont établi aucune nouvelle politique à ce sujet. En conséquence, il n’y a pas eu contravention de la période de gel prévue à l’article 107 de la Loi.

C. L’approche

21        Par souci de commodité, j’examinerai les éléments de preuve, je tirerai des conclusions de fait, j’effectuerai une analyse et je rendrai une décision au sujet de chacune des questions soulevées dans la plainte. Même si de nombreux faits ne sont pas contestés, les conclusions qui devraient être tirées de l’ensemble des faits sont contestées.

D. Témoins

22        L’agent négociateur a cité deux témoins. Gregory Holbrook est actuellement le directeur des opérations de l’agent négociateur ainsi qu’ancien président et membre de son équipe de négociation, un poste qu’il a occupé jusqu’en 1998. Greg McConnell est le président et principal porte-parole de l’agent négociateur et membre de son équipe de négociation.

23        L’employeur a cité les quatre témoins suivants.

24        Richard Arulpooranam, un négociateur du Conseil du Trésor pour le secteur public central. Dans ce rôle, il était responsable du groupe de la Navigation aérienne (AO), et ce, d’août 2016 à mai 2017.

25        François Collins est le directeur des opérations nationales de l’aviation civile à Transports Canada. Il est chargé de la surveillance de l’accréditation de sept grands transporteurs, à savoir, Air Canada, Rouge, WestJet, Encore, Jazz, Sunwing et Air Transat. Il est également chargé de la formation de tous les pilotes qui travaillent auprès de ces exploitants et de la surveillance d’un programme de simulation. Il est le président désigné du comité directeur du programme de maintien de la compétence professionnelle en aviation (le « comité directeur ») et il est le représentant patronal aux fins des négociations collectives pour le groupe AO.

26        Denis Guindon, le directeur général, Surveillance et transformation à Transports Canada, est chargé de toutes les questions opérationnelles, ainsi que des budgets. Sa tâche globale comporte deux volets : diriger toutes les activités de surveillance de l’aviation civile et élaborer un plan de transformation en vue d’améliorer son exécution dans le cadre du processus réglementaire. Tous les directeurs chargés de questions opérationnelles relèvent de lui, tout comme les directeurs régionaux.

27        Jean Laporte est l’administrateur en chef des opérations du BST. Toutes les personnes qui occupent des postes opérationnels relèvent du directeur de l’aéronautique, qui relève à son tour de M. Laporte.

E. Contexte de l’APFC

28        Transports Canada et le BST emploient 425 pilotes, dont 375 travaillent à Transports Canada en tant que CAI, pilotes d’essai technique (PET), pilotes d’hélicoptères et superviseurs. Le BST emploie 19 pilotes en tant qu’enquêteurs des accidents d’aéronefs. Les autres membres de l’Association sont des pilotes du secteur privé employés à NAV Canada.

29        Les CAI comptent une vaste gamme de tâches, tel qu’il est indiqué dans la classification des tâches. Ils effectuent des vols de vérification avec les pilotes de vols commerciaux et les pilotes vérificateurs de vols commerciaux. Pendant les vols de vérification, les pilotes sont assujettis à certains exercices et ils sont évalués afin de déterminer s’ils répondent à la norme de délivrance ou de renouvellement de leur licence de pilote.

30        Du point de vue des opérations de vol, ils inspectent les aéroports, les opérations aériennes, les entreprises de transport aérien et les écoles de formation au pilotage. Ils approuvent les organisations de formation et ils inspectent NAV Canada en tant que fournisseur de services de navigation aérienne.

31        Ils surveillent et approuvent la sélection des membres du personnel de l’aéronautique et ils effectuent des enquêtes de conformité réglementaire. Ils examinent et rédigent des règles et d’autres normes fournies par le milieu aéronautique.

32        Les pilotes employés aux fins des enquêtes sur les accidents auprès du BST examinent, analysent et certifient l’équipement destiné aux aéronefs afin qu’il respecte toutes les normes réglementaires. Certains pilotes d’hélicoptères sont des CAI. Transports Canada fournit des pilotes afin d’opérer les hélicoptères de la Garde côtière. Ils exercent une gamme de tâches et ils exécutent leurs fonctions à partir de l’arrière des navires de la Garde côtière. Les CAI et les PET font partie de la classification AO.

F. Maintien des compétences

33        Il est bien établi qu’il est essentiel que les CAI et les PET soient des pilotes chevronnés, qu’ils maintiennent leurs compétences et qu’ils se tiennent à jour au sujet de la nouvelle technologie tant en ce qui concerne l’équipement de bord que les systèmes embarqués.

34        M. Holbrook a expliqué qu’il existe différents niveaux de maintien des compétences, selon ce que l’employé est tenu de faire. La personne doit tout au moins maintenir une licence de pilote et une qualification de vol aux instruments. Si elle doit exercer d’autres activités, comme un contrôle de la compétence du pilote (« CCP ») ou un vol de surveillance en tant que pilote inspecteur délégué du milieu aéronautique, les niveaux de maintien des compétences sont plus élevés.

35        Le ministre des Transports a établi un programme visant à déléguer aux pilotes du milieu aéronautique des pouvoirs les autorisant à effectuer en son nom des tâches qui étaient exécutées auparavant par les CAI. Dans le cadre de ce programme, le ministre exige qu’une vérification initiale et une autorisation du pilote du milieu aéronautique soient effectuées par des CAI de Transports Canada. Un tableau de fréquence a été établi aux fins de l’examen de l’autorisation accordée à un pilote du milieu aéronautique.

36        Un CAI serait chargé d’effectuer un « vol » de contrôle en vue d’examiner le pouvoir et l’approbation d’un pilote du milieu aéronautique. Le vol de contrôle aurait lieu à bord pour un aéronef plus petit ou dans un simulateur pour un aéronef plus grand. Afin d’effectuer le vol de contrôle, plusieurs documents prévoient que l’inspecteur devrait être qualifié et ses compétences devraient être maintenues au moins selon la même norme minimale que le pilote visé par le contrôle doit respecter. Cette mesure vise les opérations de vols commerciaux et non les activités liées aux vols privés, ce qui est une question qui a été soulevée en l’espèce.

37        Selon le type d’activités aériennes et d’aéronef, le RAC énonce les qualifications requises à un niveau particulier. La complexité augmente d’un petit aéronef et des petits transporteurs aux principaux transporteurs. Les aéronefs biturbines légers d’un poids inférieur à une certaine limite sont au niveau le moins élevés. Il existe une qualification individuelle pour chaque type d’hélicoptère et selon le type particulier de gros aéronef. Le maintien des compétences dépend du type particulier d’aéronef. Il existe des exigences génériques de maintien des compétences qui s’appliquent à tous les pilotes brevetés. Toutefois, des exigences supplémentaires de maintien des compétences surviennent lorsqu’il s’agit des caractéristiques de certains aéronefs commerciaux. Des exigences génériques de maintien des compétences sont en place pour les aéronefs privés et récréatifs. Des qualifications supplémentaires s’appliquent si un avion transporte des passagers contre un prix de louage.

II. Question 1 : Manquement à l’obligation de négocier de bonne foi

38        Il est allégué que l’employeur a refusé de participer à des discussions complètes et rationnelles en ce qui concerne les propositions de l’agent négociateur au sujet de l’article 47 et le PMCA. En conséquence, il a manqué à l’obligation de négocier de bonne foi, contrairement à l’article 106 de la Loi. Son comportement constitue un rejet du statut d’agent négociateur de l’Association, ce qui équivaut à une ingérence dans la formation ou l’administration d’une organisation syndicale ou dans la représentation des fonctionnaires par celle-ci, contrairement à l’alinéa 186(1)b).

A. Pour l’APFC

1. M. Holbrook

a. Article 47 de la convention collective échue

39        M. Holbrook a renvoyé à l’article 47 de la convention collective expirée, intitulé « Maintien de la compétence professionnelle en aviation », qui est libellé comme suit :

47.01 Les parties conviennent que le maintien de la compétence professionnelle en aviation est nécessaire pour permettre non seulement à l’Employeur de remplir son mandat, mais aussi aux employés d’exercer leurs fonctions.

47.02 L’Employeur fournit à chaque CAIjugé médicalement apte l’occasion de maintenir sa compétence professionnelle en aviation en participant au programme de maintien de la compétence professionnelle du Ministère ou à un programme parallèle approuvé par celui-ci.

47.03 Les exigences minimales à satisfaire pour maintenir la compétence professionnelle en aviation sont la possession d’une licence de pilote de ligne et d’une qualification de vol aux instruments du groupe 1 ou du groupe 4/contrôle de la compétence du pilote, ou d’une licence de pilote d’hélicoptère commercial et d’une qualification de vol aux instruments du groupe 4/contrôle de la compétence du pilote.

47.04 L’Employeur affecte chaque employé, conformément aux critères et procédures établis par l’Employeur et le Syndicat, à un programme de maintien de la compétence professionnelle en aviation.

47.05   À l’exception du paragraphe 47.04 qui précède, la politique de Transports Canada sur le maintien de la compétence professionnelle des inspecteurs de l’aviation civile et la politique du BST sur l’actualisation des compétences professionnelles en aviation des CAIne peuvent être modifiées que par consentement mutuel des parties.

2. Le PMCA

40        L’article 47 renvoie au PMCA. Il s’agit d’une politique de Transports Canada en vertu de laquelle le ministère s’engage à affecter les employés à un PMCA conformément à la politique, laquelle ne fait pas partie de la convention collective.

41        Au cours de la ronde de négociations de 1998, l’agent négociateur a exprimé le souhait de discuter du maintien des compétences. Les parties ont exprimé un intérêt commun à traiter du maintien des compétences. Il a fallu deux ans pour amorcer le processus.

42        L’employeur éprouvait des difficultés à maintenir la qualification des employés. Des réductions budgétaires étaient prévues. Le versement de l’indemnité de fonctions supplémentaires énoncée à l’article 46 de la convention collective était lié à un programme qui exigeait que les pilotes effectuent un certain nombre d’heures dans un aéronef du Ministère. Si un employé effectuait 100 heures, il ou elle recevait l’indemnité intégralement. Ce nombre d’heures était compté au cours de l’année et divisé en deux composantes. Selon la composante principale, l’argent était lié au nombre d’heures effectué dans un aéronef du Ministère. Un certain nombre de griefs avaient été déposés puisque le programme ne fonctionnait ni pour l’une ni pour l’autre des parties.

43        Des discussions ont été entamées en 2001 avec la direction de Transports Canada. L’article 47 était un nouvel article ajouté à la convention collective signée en 2003. Dans le cadre des discussions à l’époque, il a été décidé de renvoyer simplement à un titre, c.-à-d. « programme de maintien de la compétence professionnelle en aviation », dans la convention parce que le contenu du programme n’avait pas été conclu.L’agent négociateur et Transports Canada ont poursuivi leurs discussions pendant un certain nombre d’années. Ils se sont enfin entendus en ce qui concerne le programme et ils l’ont inséré dans un document qui a été assujetti à un scrutin de ratification par les membres de l’APFC; il est entré en vigueur le 1er avril 2007.

44        L’avant-propos du PMCA reprend le pouvoir prévu à l’article 47 et est ainsi rédigé :

Les inspecteurs de l’Aviation civile et les pilotes d’essai technique doivent avoir la possibilité de maintenir leur compétence professionnelle en aviation, conformément à la convention collective entre le Conseil du Trésor et l’Association des pilotes fédéraux du Canada, et c’est à l’employeur de leur offrir cette possibilité. Transports Canada doit affecter l’employé à un programme de maintien de la compétence professionnelle en aviation aux termes de cette politique. Le programme auquel chaque pilote est affecté peut être un programme régulier comptant au minimum 48 heures de vol par an ou un autre programme de maintien de la compétence professionnelle en aviation (ci-après appelé « autre programme de vol ») décrit à l’annexe A.

45        L’annexe A du PMCA de 2007, qui traite d’autres programmes de vol, a été mise à jour. La date d’entrée en vigueur de la liste actuelle des autres programmes de vol est le 1er avril 2010. Chaque programme a été examiné après cette date.

46        La politique est administrée par le comité directeur, qui est composé du directeur général de l’Aviation civile ou d’un délégué à Transports Canada; le directeur, opérations de vols, Services des aéronefs, Transports Canada; un directeur de l’administration centrale, Direction générale de l’Aviation civile, Transports Canada; le président de l’APFC; un directeur régional, Aviation civile; trois membres de l’APFC.

47        Une des tâches du comité directeur consiste à examiner et à approuver toutes les nouvelles propositions concernant un autre programme de vol. Un vote majoritaire de ses membres est requis pour approuver tout nouveau programme qui fera partie de la liste approuvée des autres programmes de vol. Le PMCA (qui est entré en vigueur le 1er avril 2007) est divisé en deux sections, une pour les employés jugés médicalement apte et une pour les employés qui sont jugés temporairement médicalement inapte. La première section énonce en partie ce qui suit :

[…]

3.1 La présente politique énonce les exigences et les moyens qui permettent à un CAI ou à un ETP de TC jugé médicalement apte de maintenir sa compétence professionnelle en aviation ainsi que ses connaissances professionnelles et de toucher l’indemnité de fonctions supplémentaires.

3.1.1 Tous les CAI et les ETP de TC jugés médicalement seront affectés par la direction de TC à un programme de maintien de la compétence professionnelle en aviation. Ce programme peut être un programme régulier comportant au minimum 48 heures de vol par exercice financier, conformément au manuel d’utilisation de la DGSA sur des aéronefs du Ministère ou un autre programme de maintien de la compétence professionnelle en aviation approuvé par le Comité directeur du maintien de la compétence professionnelle en aviation.

3.1.2 L’employeur peut modifier de temps à autre le programme de maintien de la compétence professionnelle en aviation auquel un CAI ou un ETP jugé médicalement apte est affecté.

3.1.3 Cela peut résulter du changement des exigences professionnelles ou de la disponibilité d’un programme de vol régulier de la DGSA. Outre les critères énumérés à la section 5.2.2, une liste de statut prioritaire pour l’affectation à un programme de vol régulier de la DGSA peut être envisagée.

[…]

48        M. Holbrook a expliqué qu’un système de points avait été créé pour veiller à ce que les employés aient accès à un programme de vol régulier de manière juste et impartiale puisque l’employeur avait indiqué qu’il prévoyait des réductions à cet égard.

49        L’article 5 du PMCA énonce la politique et le processus pour affecter les CAI ou les PET à un PMCA; il se lit comme suit :

[…]

5.1.1 L’employeur doit affecter tous les CAI ou ETP jugés médicalement aptes à un programme de maintien de la compétence professionnelle en aviation.

5.1.2 Tous les CAI sont admissibles à une affectation à un programme de vol régulier. L’employeur doit déterminer si un CAI jugé médicalement apte doit être affecté à un programme de vol régulier qui consiste à piloter un aéronef du Ministère pendant au minimum 48 heures par an, ou à un autre programme de maintien de la compétence professionnelle en aviation qui respecte les critères du paragraphe 5.2.1 de la présente politique. Tous les ETP doivent être affectés à un programme de vol approprié à leurs tâches.

5.1.3 Nonobstant la section 5.1.2 ci-dessus, une affectation à un programme de vol régulier sur un aéronef de la DGSA ne sera pas envisagée pour les CAI :

  1. dont les tâches reliées au poste qu’ils occupent au sein de la DGSA les amènent déjà à participer pleinement à des tâches de pilotage;
  2. dont les tâches reliées directement ou indirectement à leur poste exigent qu’ils maintiennent leur compétence sur un aéronef lourd à turboréacteurs (plus de 44 000 lb) et qu’ils soient exposés, de façon continue et d’un point de vue opérationnel, à l’exploitation de grands transporteurs aériens;
  3. qui sont employés par la Division du transport aérien de la Direction générale des opérations nationales; ou
  4. qui sont établis dans un lieu géographique qui ne permet pas l’affectation à un programme de vol régulier.

5.1.4 Si un CAI ou un ETP jugé médicalement apte change de poste d’une durée indéterminée au sein du Ministère, l’employeur doit réévaluer la situation pour savoir si, dans ses nouvelles fonctions, le CAI ou l’ETP doit être affecté à un programme de vol régulier consistant à piloter un aéronef du Ministère pendant au minimum 48 heures par an ou à un autre programme de maintien de la compétence professionnelle en aviation qui respecte les critères du paragraphe 5.2.1 de la présente politique.

50        M. Holbrook a déclaré que l’ancienneté détermine l’état d’un employé aux fins du programme de vol régulier. Au début de chaque exercice, l’employeur fournit les renseignements quant au nombre de places disponibles dans ce programme. Une liste de tous les CAI admissibles est dressée conformément aux critères de cotation. Les deux sont publiées.

51        Le gestionnaire applique les critères énoncés au paragraphe 5.1.2. Un document d’affectation écrit est fourni à chaque employé pour l’exercice. Les gestionnaires individuels n’ont pas le pouvoir de créer leurs propres programmes. Ils doivent faire un choix à partir de la liste approuvée par le comité directeur. Si un changement est requis dans une année subséquente, l’employé reçoit un nouveau formulaire d’affectation. Si aucun changement n’est requis, l’employé reçoit le même formulaire d’affectation. Il y a un programme semblable au BST. Ce document demeurait en vigueur sans changement, à l’exception de l’ajout de programmes supplémentaires aux autres programmes de vol jusqu’à ce que l’avis de négocier a été donné en septembre 2014.

B. Pour l’employeur : négociation raisonnée

1. M. Guindon

52        M. Guindon a affirmé qu’entre le 11 mars et le 22 juin 2014, l’APFC et Transports Canada ont participé à une médiation raisonnée visant à mettre à jour et à réviser le PMCA.

53        Le comité directeur était composé d’un nombre égal de représentants patronaux et de l’agent négociateur. Selon le travail des participants, les parties sont parvenues à une entente quant à une ébauche finale d’un PMCA révisé proposé. M. Guindon l’a appelé une approche conjointe prospective. Les parties ont convenu qu’en ce qui concerne l’APFC, les changements seraient assujettis à l’examen et à l’approbation de ses membres et qu’en ce qui concerne Transports Canada, les changements devraient être examinés et acceptés par sa haute direction. Toutes les personnes à la table représentant la direction de Transports Canada et l’agent négociateur ont accepté les propositions. Toutefois, le président de l’APFC n’a pas réussi à convaincre la haute direction de l’agent négociateur de les approuver.

C. Pour l’APFC : avis de négocier

1. M. Holbrook

54        M. Holbrook a témoigné en disant que le Conseil du Trésor avait donné un avis de négocier le 25 septembre 2014. Lors d’une réunion ultérieure, l’agent négociateur a présenté des propositions détaillées le 25 octobre 2015, insérant sa proposition de maintien des compétences professionnelles et l’article 47. Il a demandé d’insérer les documents concernant le PMCA et l’article 47 dans la convention collective.

55        Toute la question concernant le maintien de la compétence professionnelle en aviation était plus critique à Transports Canada. Il y avait eu une série de réductions sur un certain nombre d’années et l’équipe de négociation de l’APFC était chargée d’insérer dans la convention collective les éléments importants des conditions d’emploi de Transports Canada et du PMCA.

56        De plus, l’équipe de négociation était chargée de modifier les dispositions de l’article 47 en vue de protéger les qualifications des membres et de s’assurer qu’ils étaient toujours qualifiés sur le plan juridique pour exercer leurs tâches au nom de l’employeur. M. Holbrook a renvoyé aux propositions de négociation de l’agent négociateur présentées le 27 octobre 2015 concernant les articles 46 et 47.

2. Propositions visant les clauses 47.01 et 47.02 de la convention collective

57        La proposition de l’agent négociateur concernant les clauses 47.01 et 47.02 se lit comme suit :

[Traduction]

47.01 Tous les fonctionnaires de l’employeur qui sont affectés à une fonction de vérification, d’accréditation ou de surveillance, à l’égard de laquelle des connaissances spécialisées des opérations aériennes de l’aéronef sont requises, se verront offrir une formation en vertu de laquelle ils seront qualifiés en tant que membres d’équipage de conduite, conformément aux règlements applicables, pour les aéronefs types qui sont assujettis à cette fonction.

47.02 Lorsqu’un fonctionnaire doit exercer des tâches de vérification ou de surveillance dans un aéronef, il sera entièrement qualifié en tant que membre d’équipage de conduite de cet aéronef type, conformément à toutes les exigences réglementaires, avant d’être affecté à de telles tâches.

58        Depuis juin 2015, les parties se sont rencontrées six fois et, à la date de l’audience, la dernière réunion avait eu lieu du 8 au 10 février 2017. M. Holbrook était d’avis que l’approche de l’employeur en matière de maintien de la compétence professionnelle en aviation consiste à ne pas en discuter. L’employeur n’a pas encore répondu et n’a même pas refusé la proposition. Pendant la dernière réunion, soit la première depuis plusieurs mois en raison de l’absence du mandat du Conseil du Trésor, l’APFC a répété son souhait de discuter de la question.

59        Au cours d’un échange concernant le PMCA, l’employeur a indiqué qu’il estimait que les changements qui lui avaient été apportés avaient fait l’objet d’un commun accord en 2013. Il a fallu clarifier auprès de l’équipe de l’employeur que les événements mentionnés avaient eu lieu lors d’une réunion du comité directeur. Les discussions ont été tenues avant que l’avis de négocier ne soit donné en 2013 et elles se sont terminées au milieu de 2014. L’entente conclue lors de la réunion du comité directeur était assujettie à l’approbation de la haute direction de l’agent négociateur, qui l’a rejetée. Elle n’a jamais franchi l’étape de la ratification.

60        Au cours de la séance de négociation de février 2017, l’employeur a convenu qu’il s’agissait bien de la chronologie des événements. L’équipe de négociation de l’APFC a informé l’employeur que s’il estimait que certaines dispositions figurant dans le groupe de recommandations découlant de la réunion du comité directeur de 2014 devaient faire l’objet d’un nouvel examen, il était invité à les déposer et que l’agent négociateur se ferait un plaisir d’en discuter, ainsi que de ses propres propositions. L’employeur n’en a pas indiqué et aucune autre discussion n’a eu lieu sur la question.

61        Certaines discussions secondaires étaient axées sur les difficultés qu’éprouvait l’employeur de discuter de la question. La discussion n’a pas été plus loin. L’employeur a dit qu’il ne discuterait pas en détail des dispositions. L’agent négociateur a indiqué que cela ne suffisait pas. À la conclusion des négociations en février 2017, l’agent négociateur a indiqué que, puisque des changements avaient été apportés au lieu de travail depuis le début des négociations, il devrait modifier ses propositions d’octobre 2015 et en fournir de nouvelles.

62        M. Holbrook a commencé à témoigner au sujet de ce qui s’est produit à l’égard de cette question dans le cadre de la négociation au cours du mois de mai 2017. L’employeur s’est opposé à ce témoignage. La plainte initiale avait été modifiée en vue d’englober les événements jusqu’au 6 mars 2017. Le témoignage du témoin portait sur des événements survenus en mai 2017. Après avoir entendu les arguments, j’ai conclu que le témoin devrait parler des événements allégués dans la demande modifiée jusqu’au mois de mars 2017.

63        En février 2017, l’employeur a répondu au souhait de l’agent négociateur de discuter de l’article 47. Il a suggéré qu’il valait peut-être mieux que la question soit discutée avec un médiateur. L’agent négociateur a répondu qu’il devait amorcer une discussion à la table des négociations. Même s’il n’était pas opposé à la médiation, selon sa perception, l’employeur tentait d’éviter de discuter de la question et de reporter la discussion. Pendant la séance de février, aucune entente n’a été conclue pour procéder à la médiation.

64        L’employeur a également soutenu que les discussions qui ont eu lieu entre septembre 2016 et février 2017 étaient axées sur l’article 47. M. Holbrook était d’avis que les séances du 6 septembre 2016 et du 23 janvier 2017 ne constituaient pas des séances de négociations. Le Conseil du Trésor a nommé un nouveau négociateur à la fin de l’été 2016. Les réunions de septembre 2016 et de janvier 2017 étaient des réunions introductives. Ni l’une ni l’autre des équipes de négociations n’y ont assisté.

D. Pour l’employeur

1. M. Arulpooranam

65        M. Arulpooranam occupe son poste de négociateur depuis octobre 2013. Les négociateurs sont affectés à un certain nombre d’unités de négociation, dont ils sont responsables, et ils collaborent étroitement avec les ministères, qui demandent un mandat du Conseil du Trésor pour parvenir à des ententes concernant les articles qui peuvent être inclus dans une convention collective.

66        M. Arulpooranam était chargé de négocier avec un certain nombre d’unités de négociation, y compris le groupe AO représenté par l’APFC. Il a assumé la responsabilité en tant que négociateur du Conseil du Trésor pour ce groupe en août 2016.

67        Étant donné la nature technique des questions présentées par le groupe AO, il a demandé de consulter l’agent négociateur aussitôt que possible afin de se présenter en tant que le nouveau négociateur. En août 2016, il a communiqué avec M. McConnell et a demandé de fixer une réunion avec lui, M. Holbrook et l’analyste.

68        Ils se sont rencontrés le 6 septembre 2016. Son objectif était de se présenter et d’informer l’agent négociateur du changement de gouvernement et de ce que ça signifiait aux fins de négociation collective. Lui et l’analyste ont communiqué l’état actuel en ce qui concerne les congés de maladie et le régime d’assurance-invalidité de courte durée.

69        À la date de la réunion, il avait une certaine compréhension des questions propres au groupe AO. Il était parfaitement au courant que la préoccupation principale de l’agent négociateur concernait l’article 47 portant sur le maintien de la compétence en aviation. Il s’agissait de sa première occasion de discuter de la question avec l’agent négociateur. Il ne s’agissait pas d’une séance de négociation officielle, mais plutôt d’une séance d’accueil et d’une occasion de lui poser des questions et de mieux comprendre les défis. Cela lui a permis de mettre en contexte la raison pour laquelle l’agent négociateur estimait qu’il était essentiel d’aborder l’article 47 au cours de cette ronde de négociation et d’ouvrir la voie à ce qu’il retourne à l’équipe patronale à Transports Canada et au BSF.

70        Il a confirmé qu’en général, cette ronde de négociation durait depuis un certain temps. Sous le nouveau gouvernement, une nouvelle orientation avait été adoptée en ce qui concerne les congés de maladie et le régime d’assurance-invalidité de courte durée. À l’automne 2016, l’employeur a adopté une nouvelle approche et a demandé de conclure un protocole d’entente avec les agents négociateurs en vue de travailler à la modernisation des congés de maladie. Cette approche a ouvert la voie à la conclusion des conventions collectives.

71        À la suite de la réunion avec M. McConnell et M. Holbrook, il a rencontré l’équipe patronale à Transports Canada au moyen d’une téléconférence. La plus grande partie de la réunion était axée sur l’article 47 en préparation d’autres séances de négociations.

72        Le 12 novembre 2016, il a envoyé un courriel à M. McConnell, l’informant que sa réunion avec l’équipe patronale de Transports Canada s’était bien déroulée, mais qu’ils avaient un défi à relever concernant la demande de l’APFC relativement à l’article 47. Il a indiqué qu’il participerait à une négociation avec d’autres groupes pendant cinq semaines consécutives.

73        Les deux parties avaient pleinement l’intention de fixer des dates de reprise des négociations à l’automne 2016. Elles ont échangé des dates provisoires. Toutefois, étant donné le calendrier de M. Arulpooranam, elles n’ont pas été en mesure de s’entendre quant à ces dates. Elles ont examiné des dates en février 2017. L’employeur estimait que le recours à un médiateur ou à un facilitateur pour traiter des questions concernant l’article 47 permettrait de faire progresser la discussion. L’équipe patronale s’est montrée ouverte quant à l’idée de procéder avec un médiateur parallèlement aux discussions.

74        Le 28 novembre 2016, M. Arulpooranam a envoyé un courriel à M. McConnell concernant les prochaines séances de négociation. Il a indiqué que l’attente jusqu’en février 2017 ne serait peut-être pas nécessairement le choix privilégié de l’agent négociateur, mais il a déclaré que [traduction] « […] cela nous donnera le temps d’avoir des discussions plus importantes et, espérons-le, de régler la question, et nous donnera le temps d’étudier davantage l’idée de participer à des discussions assistées par un médiateur ou facilitateur au sujet de l’article 47 ».

75        Le 28 novembre 2016, M. McConnell a répondu au sujet de la prochaine séance de négociations et a déclaré : [traduction] « Peut-être que nous pouvons demander à un médiateur et fournir une liste sur laquelle nous pourrions convenir conjointement. » Le mardi 13 décembre 2016, M. Arulpooranam a confirmé les séances de négociation en février et a suggéré le nom d’un médiateur. Le mardi 13 décembre 2016, M. McConnell a accepté la recommandation de M. Arulpooranam.

76        L’employeur a consulté les Services de règlement des différends de la Commission au sujet de la nomination d’un médiateur mutuellement convenu. L’employeur a reconnu que tant que les discussions les plus importantes n’étaient pas réglées et tant qu’ils n’avaient pas traité des questions liées aux congés de maladie et aux congés pour obligations familiales, ils ne parviendraient pas à une entente à l’égard du groupe AO. L’employeur estimait que l’article 47 pourrait donner lieu à une impasse ou constituer une entrave à la réalisation d’une entente. Si les parties arrivaient à conclure une entente concernant l’article 47, un règlement global serait imminent.

77        Les parties se sont rencontrées le 23 janvier 2017. M. McConnell et M. Holbrook ont assisté au nom de l’agent négociateur et M. Arulpooranam et un analyste au nom de l’employeur.

78        M. Arulpooranam a donné une mise à jour quant à l’état de la négociation en général. Le Conseil du Trésor était parvenu à une entente provisoire avec le groupe Services des programmes et de l’administration et avec la plupart des groupes de l’IPFPC. Il a donné à l’agent négociateur des renseignements sur la tendance et la manière dont seraient réglés les éléments généraux du Règlement.

79        La discussion a été de nouveau axée sur l’article 47. La plus grande partie de la discussion concernait ce qui avait été discuté en septembre 2016. M. McConnell et M. Holbrook ont discuté de l’importance des questions pour leurs membres, de ce que la proposition signifiait sur le plan juridique et de son incidence sur l’industrie et la sécurité des Canadiens. M. Arulpooranam l’a décrit comme un échange sain des points de vue qui permettaient d’étudier de manière plus approfondie l’article 47.

80        M. Arulpooranam a eu une occasion de rencontrer l’équipe patronale et comprenait mieux le PMCA et certaines des difficultés découlant des réductions budgétaires concernant la formation, ce qui lui a permis d’avoir une conversation plus approfondie. De plus, la partie patronale a eu l’occasion de présenter des idées quant à la meilleure façon de traiter la question.

81        En janvier 2017, un des principaux messages communiqués concernant la demande de l’agent négociateur que le PMCA soit inséré dans la convention collective était que le fait d’adopter à l’aveuglette la politique de Transports Canada et de l’insérer dans la convention collective créait un défi. Il a affirmé que si la politique était insérée dans la convention collective, la politique serait dorénavant admissible à l’arbitrage. L’employeur avait déjà à l’esprit qu’il devait trouver une façon de répondre à la préoccupation de l’agent négociateur en ayant recours à un médiateur.

82        On estimait que la meilleure façon de répondre aux préoccupations pourrait être au moyen d’un processus de gouvernance ministériel qui renforcerait le PMCA au moyen de l’étude d’un protocole d’entente.

83        L’employeur a déclaré qu’il était disposé à discuter des façons d’aller au fond du problème autre qu’en insérant le PMCA dans la convention collective.

84        Le 7 février 2017, M. Arulpooranam a envoyé un courriel à M. Holbrook en vue de l’informer qu’à la suite de leur discussion antérieure, la partie patronale proposerait de manière officielle aux parties de traiter de l’article 47 avec l’aide d’un médiateur au cours d’une séance consacrée à ce sujet dont la date serait prévue au mois de mars 2017. L’employeur a proposé des dates de disponibilité au mois de mars et a demandé qu’ils discutent de la question le lendemain, à savoir le 8 février, lorsque les parties reprendraient officiellement les négociations.

85        Les parties avaient prévu une séance de trois jours du 8 au 10 février 2017. Il s’agissait de la première fois que les deux équipes complètes de négociation se réunissaient depuis plus d’un an. Le premier jour, les deux parties ont présenté des mises à jour. La partie patronale a donné une mise à jour de l’état de la négociation collective à ce stade, des dispositions législatives et des mesures intérimaires liées aux projets de loi C-4 et C-59 et des congés de maladie. L’employeur a abandonné sa position concernant les congés de maladie et le régime d’assurance-invalidité de courte durée et a présenté des options qui avaient été présentées à l’AFPC et à l’IPFPC, en vue d’indiquer ce à quoi ressemblaient ces règlements.

86        Le deuxième jour, les parties ont discuté de certaines des possibilités les plus facilement accessibles en ce qui concerne certaines propositions administratives. Quelques-unes ont été discutées et approuvées. Les deux premiers jours étaient axés sur l’enclenchement du processus et l’établissement d’une relation avec l’équipe de l’agent négociateur. M. McConnell et M. Arulpooranam ont accepté de laisser les questions concernant l’article 47 au troisième jour.

87        M. McConnell a indiqué qu’il y avait eu certaines activités et plaintes récentes et qu’il envisageait de présenter une proposition remaniée au sujet de l’article 47, permettant à l’agent négociateur d’ouvrir de nouveau la voie à davantage de discussions. La partie patronale était très heureuse de la façon dont les discussions ont été menées et estimait qu’elles avaient été constructives.

88        M. Arulpooranam était d’avis que les deux parties avaient reconnu que le PMCA n’était pas aussi efficace qu’il pourrait l’être et qu’il était nécessaire de s’y pencher attentivement. La partie patronale estimait qu’elle était sur la même longueur d’onde que l’agent négociateur concernant la reprise de certains des travaux que le ministère et l’agent négociateur avaient exécutés en 2014. M. Arulpooranam a affirmé qu’aucune discussion importante n’avait eu lieu au sujet du changement. Toutefois, l’employeur était d’avis que la voie avait été ouverte à d’autres discussions.

89        Selon M. Arulpooranam, au début du dernier jour, il y avait une volonté de procéder à l’aide d’un médiateur. Toutefois, on estimait qu’il serait possible d’accomplir davantage de choses en procédant d’abord sans médiateur. À la suite de la réunion, un plan a été élaboré en vue de procéder à une autre séance de négociation en vue de traiter de l’article 47 sans l’aide d’un médiateur.

90        Les deux parties ont cherché des dates disponibles en avril et en mai 2017. M. Arulpooranam a pris un congé parental au milieu du mois de mai et a transféré le dossier de négociation à un autre négociateur du Conseil du Trésor qui devait s’occuper de la séance au mois de mai au nom de l’employeur. L’accent devait être mis sur l’article 47.

E. Arguments de l’APFC

1. Négociation collective

91        Le 25 septembre 2014, l’employeur a signifié son avis de négocier. Depuis, les parties se sont rencontrées à la table des négociations à maintes reprises, mais elles ne sont pas parvenues à une entente.

92        Les parties ont échangé des propositions de négociation au cours des mois suivant la présentation de l’avis de négocier. Le témoin des défendeurs, M. Arulpooranam, a témoigné en disant que l’employeur mettait l’accent sur le régime d’assurance-invalidité de courte durée.

93        Pour sa part, en octobre 2015, l’Association a déposé une proposition détaillée et exhaustive sur l’article 47 et le PMCA. Au nom de l’APFC, M. Holbrook a dit que l’équipe de négociation de l’APFC était chargée d’insérer les éléments importants des PMCA de Transports Canada et du BST dans la convention collective, de protéger les qualifications des membres et de veiller à ce qu’ils soient toujours qualifiés sur le plan juridique pour exercer leurs tâches au nom de l’employeur.

94        Selon le témoignage de M. Holbrook, en ce qui concerne les membres de l’Association, il n’y a pas de plus grands enjeux dans le cadre de cette ronde de négociation que le maintien de la compétence professionnelle en aviation, étant donné qu’il est au cœur même des normes professionnelles des pilotes.

95        Les parties se sont rencontrées à plusieurs reprises. M. Holbrook a dit qu’à la date de dépôt de la plainte, aucune discussion significative au sujet du PMCA n’avait été tenue. Il a affirmé que dans le cadre de plusieurs rondes de négociation, l’APFC a demandé de discuter de l’article 47 et du PMCA. Il a déclaré qu’à ce jour, l’employeur a refusé de discuter de la proposition de l’agent négociateur à la table des négociations et que l’Association avait été informée que la question concernant le PMCA devrait attendre jusqu’à la conclusion d’une nouvelle convention collective.

96        M. Arulpooranam a corroboré ce témoignage. Selon le témoignage du témoin des défendeurs, il était parfaitement au courant du fait que l’enjeu principal de l’agent négociateur concernait l’article 47 et le maintien de la compétence professionnelle en aviation.

97        Il a également affirmé dans son témoignage qu’au cours de la séance de négociations de février 2017, aucune discussion importante n’a été tenue sur l’article 47 et que l’employeur avait choisi de manière stratégique de ne pas répondre à la proposition de l’APFC. M. Arulpooranam a souligné qu’il avait dit à son équipe d’être prête à écouter, mais qu’il n’avait pas communiqué cette directive à l’Association.

a. Article 106 de la Loi

98        L’Association a soutenu que le comportement de Transports Canada constituait un manquement à l’obligation de négocier de bonne foi. L’employeur a contourné le processus de négociation en instaurant unilatéralement des changements aux conditions d’emploi alors que ces questions étaient visées par d’importantes propositions à la table des négociations et que, en conséquence, elles pouvaient être incluses dans la prochaine convention collective.

99        L’obligation de négocier de bonne foi signifie qu’il faut démontrer la volonté de communiquer avec l’autre partie et d’écouter sa position. Malgré l’énoncé clair de l’Association concernant ses demandes de formation, non seulement les défendeurs n’ont pas répondu à la table de négociation, mais Transports Canada a également apporté des changements importants aux conditions d’emploi sans consulter l’Association. L’obligation de négocier de bonne foi exige de « […] faire tout effort raisonnable pour conclure une convention collective », tel qu’il est énoncé à l’article 106 de la Loi, ce que les défendeurs ont refusé lorsqu’ils ont refusé d’amorcer des discussions et en imposant un nouveau BIP.

F. Arguments de l’employeur

100        L’article 106 de la Loi contient un libellé précis qui décrit la négociation de bonne foi, laquelle comprend deux composantes : entamer les négociations et faire tout effort raisonnable pour conclure une convention collective.

101        Les principes généraux ayant trait à l’obligation de négocier de bonne foi sont énoncés dans un des premiers arrêts clés portant sur ce sujet en 1977 et concernant l’AFPC et le Conseil du Trésor, Alliance de la Fonction publique du Canada c. Conseil du Trésor, dossier de la CRTFP 148-2-16 (19770630), [1977] C.R.T.F.P.C no 16 (QL). L’AFPC avait allégué que l’employeur avait refusé de discuter de la possibilité d’une exemption aux termes des [traduction] « indicateurs anti-inflation ».

102        L’employeur avait fait valoir qu’il était prêt à discuter d’une exemption, mais que l’ASFC n’avait fourni aucune preuve pour étayer sa position selon laquelle une exemption pourrait être justifiée. L’ancienne Commission des relations de travail dans la fonction publique (« CRTFP ») avait déclaré que puisque le libellé portant sur la négociation de bonne foi de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (L.R.C. (1985), ch. P-35; LRTFP) était presque identique à celui de la Loi sur les relations de travail de l’Ontario, elle consulterait les décisions de la Commission des relations de travail de l’Ontario (« CRTO ») à titre de lignes directrices.

103        La CRTFP a mis l’accent sur le fait que l’obligation avait pour objet de reconnaître une discussion rationnelle et informée, minimisant ainsi la possibilité de conflit inutile. Elle a ajouté que l’obligation dépendait de la façon dont les négociations étaient menées et non du contenu des propositions. Elle a conclu que le critère consistait en une discussion ouverte et rationnelle, que les parties doivent être prêtes à justifier leur position et qu’il incombait à l’ASFC d’établir ses allégations.

104        La CRTFP a examiné les négociations dans leur ensemble à la lumière de la jurisprudence et de la situation particulière de la fonction publique et elle a conclu qu’il n’y avait eu aucun manquement à l’obligation de négocier de bonne foi.

105        Les principes généraux de la négociation de bonne foi sont également énoncés dans la décision de la Cour suprême du Canada dans Royal Oak Mines Inc. c. Canada (Conseil des relations du travail), [1996] A.C.S. no 14, au paragraphe 42. La Cour suprême a indiqué que l’obligation de négocier de bonne foi comporte une composante subjective et une composante objective. Le fait d’entamer des négociations est évalué selon une norme subjective, alors que le fait de faire tout effort raisonnable pour conclure une convention collective est évalué selon une norme objective.

106        En outre, dans Institut professionnel de la fonction publique du Canada c. Conseil du Trésor, 2009 CRTFP 102, l’ancienne Commission des relations de travail dans la fonction publique (CRTFP) a réitéré le principe selon lequel l’obligation de négocier de bonne foi n’impose pas une obligation de parvenir à une entente. En renvoyant à une décision de la Cour suprême (Syndicat canadien de la Fonction publique (SCFP) c. Conseil des relations du travail (N.-É.) et autres, [1983] 2 R.C.S. 311, la CRTFP a expliqué la différence entre la « négociation serrée » et la « négociation de façade » comme suit (au paragraphe 85) :

[…]

[…] Conclure à la pratique d’une « négociation de façade » donnera habituellement lieu à une conclusion selon laquelle il y a eu de la mauvaise foi. Conclure à la pratique d’une « négociation serrée » donnera lieu à une conclusion différente en matière de mauvaise foi. La négociation serrée est « […] l’adoption d’une ligne dure dans l’espoir de pouvoir forcer l’autre partie à accepter les conditions qui lui sont offertes » (SCFP). Une partie pratique la négociation de façade quand « […] elle feint de vouloir conclure une convention alors qu’en réalité elle n’a pas l’intention de signer une convention collective et elle souhaite détruire les rapports de négociation collective » (SCFP).

[…]

107        En l’espèce, M. Arulpooranam, le négociateur pour le BST, a témoigné en disant que l’employeur n’avait, en aucun temps, refusé de discuter de l’article 47. Il était clair depuis le début que l’intention de l’APFC était de tenter d’inclure le PMCA dans la convention collective. L’employeur a communiqué que le PMCA devrait faire l’objet d’un examen par les ministères respectifs dans le cadre de la structure de gouvernance que les parties avaient déjà convenues.

108        M. Arulpooranam a confirmé qu’il avait dit à son équipe d’être à l’écoute afin de s’assurer que l’employeur comprenne parfaitement les propositions de l’agent négociateur et aux fins d’une discussion appropriée au sujet de  l’article 47. La simple insertion de l’intégralité du PMCA dans la convention collective ne constituait pas la seule option disponible.

109        Au cours de la séance de négociation de février 2017, M. Arulpooranam a posé un certain nombre de questions et a indiqué clairement qu’il souhaitait comprendre la position de l’agent négociateur, compte tenu de la question très technique et complexe du PMCA.

110        Le refus de l’employeur d’inclure le PMCA dans la convention collective ne peut être interprété comme une négociation de mauvaise foi. Il a adopté la position ferme selon laquelle le PMCA ne pouvait être inclus dans son ensemble, mais il a gardé un esprit ouvert en tentant de trouver une solution dans le cadre de l’examen de l’article 47.

111        M. Arulpooranam a témoigné en disant qu’il avait même envisagé la possibilité d’insérer un protocole d’entente consacré au PMCA en vue de traiter la question de l’article 47 sans inclure nécessairement le PMCA dans la convention collective.

112        Comme il est établi dans la jurisprudence mentionnée antérieurement, l’obligation de négocier de bonne foi dépend de la façon dont les négociations sont menées et non du contenu des propositions de l’agent négociateur. Le facteur important est la qualité de la discussion. L’adoption d’une position ferme à l’égard d’un aspect de la proposition n’équivaut pas en soi à une négociation de mauvaise foi.

113        Il incombait à l’APFC d’établir que l’employeur n’avait pas consacré tout effort raisonnable pour conclure une convention collective. Il ressort de la preuve que la seule position ferme que l’employeur a adoptée était celle voulant que le PMCA ne puisse pas être inséré dans la convention collective en soi. Autrement, il était toujours ouvert à tenir une discussion significative au sujet de l’article 47. Il a soutenu, avec respect, que les faits en l’espèce n’étayent pas les allégations de négociations de mauvaise foi soulevées par l’APFC en vertu de l’article 106 de la Loi.

G. Réponse de l’APFC

114        Aux paragraphes 2 et 3 de leurs arguments, les défendeurs ont invoqué la décision de longue date rendue dans Alliance de la Fonction publique du Canada c. Conseil du Trésor.

115        Toutefois, contrairement à ces arguments, l’examen de la CRTFP de la jurisprudence de la CRTO étaye entièrement la position de l’agent négociateur selon laquelle lorsqu’ils ont omis ou refusé de discuter de sa proposition concernant l’article 47 et du PMCA, les défendeurs ont contrevenu à l’article 106 de la Loi.

116        Au paragraphe 13, la CRTFP a abordé la pertinence de la décision de la CRTO dans United Steelworkers of America, Local 13704 c. Canadian Industries Limited, 76 CLLC no 16, 104, dans laquelle la CRTO a conclu que le refus de l’employeur de discuter des questions monétaires excédant les indicateurs anti-inflation constituait un manquement à l’obligation de négocier de bonne foi.

117        La CRTO a conclu « […] qu’on peut juger de la bonne foi des parties à la façon dont les négociations sont menées et non d’après le contenu des propositions présentées à la table ». Au contraire, le facteur qui importe dans les négociations collectives est la qualité des discussions, à savoir que « [l]es parties ont le devoir de communiquer entre elles. » La CRTO a continué comme suit :

[…]

[…] Un examen minutieux des négociations révèle que la partie défenderesse a refusé soit de fournir toutes les explications nécessaires à la position qu’elle a adoptée à l’égard des clauses monétaires, soit de discuter de son opposition aux propositions de la requérante sur ces mêmes points. Nous sommes d’avis que l’explication qu’a fournie la partie défenderesse uniquement au sujet des indicateurs arithmétiques ne justifie pas entièrement son attitude à l’égard des clauses monétaires. […] Elle a adopté sa propre interprétation des règlements anti-inflation et indiqué qu’elle refusait de discuter de tout autre point de vue, elle n’a pas négocié de la façon prescrite par la loi. Une partie ne peut se dissimuler derrière sa propre interprétation des indicateurs pour se soustraire à l’obligation de négocier de bonne foi.

[…]

118        L’omission d’une partie d’étudier une position de négociation particulière avec l’autre partie a été jugée constituer de la mauvaise foi. Dans United Electrical, Radio and Machine workers of America (UE) v. DeVilbiss (Canada) Ltd., [1976] 2 Can. L.R.B.R. 101, au paragraphe 14, par exemple, la CRTO a conclu ce qui suit au sujet de l’obligation de négocier de bonne foi (voir également Pine Ridge District Health Unit, [1977] OLRB Rep. February 65; et PSAC v. Forintek Canada Corp., [1986] OLRB Rep. April 453) :

[…]

[…]deux parties qui sont tenues de se rencontrer à intervalles réguliers et de discuter de leurs problèmes mutuels de manière rationnelle pour satisfaire aux exigences de l’expression « faire tous les efforts raisonnables » ont de bonnes chances d’en venir à mieux comprendre leurs préoccupations respectives et de s’employer à trouver des moyens de régler leurs différends sans recourir à des mesures d’ordre économique – dont les parties en litige ne sont pas les seules à faire les frais. À tout le moins, des discussions rationnelles devraient permettre aux parties de limiter le nombre de problèmes pour lesquels il est nécessaire de recourir à des mesures d’ordre économique et de faire les ultimes efforts nécessaires pour régler les « véritables différends ».

[…]

119        Dans DeVilbiss, au paragraphe 16, la CRTO a conclu qu’une discussion rationnelle et documentée ne peut pas avoir lieu tant que les deux parties ne comprennent pas parfaitement le différend entre eux. Elle a expliqué qu’il [traduction] « […] est tout à fait insensé de tenir le syndicat dans l’ignorance quant au caractère équitable de l’offre présentée par l’employeur parce qu’il ne dispose pas des renseignements nécessaires pour établir avec précision ce que l’employeur apporte aux membres de l’unité de négociation ».

120        En l’espèce, il ressort clairement de la preuve que l’employeur a refusé de discuter de la proposition de l’agent négociateur au sujet de l’article 47 et du PMCA. L’Association a été informée expressément que la question du PMCA devrait attendre jusqu’à ce qu’une nouvelle convention collective soit conclue. Le témoin des défendeurs, M. Arulpooranam, a reconnu que l’employeur avait choisi de manière stratégique de ne pas répondre à la proposition de l’APFC et que cette stratégie n’avait pas été communiquée à celle-ci.

121        Il ressort clairement de la preuve que les défendeurs ont refusé de participer à des discussions complètes et rationnelles en ce qui concerne les propositions de l’agent négociateur au sujet de l’article 47 et du PMCA.

H. Analyse

122        La plainte a été déposée en vertu de l’article 190 de la Loi, qui énonce que la Commission instruit toute plainte dont elle est saisie et selon laquelle le défendeur a contrevenu, entre autres, aux articles 106, 107 et 186. L’article 106 prévoit ce qui suit :

106 Une fois l’avis de négociation collective donné, l’agent négociateur et l’employeur doivent sans retard et, en tout état de cause, dans les vingt jours qui suivent ou dans le délai éventuellement convenu par les parties :

  1. se rencontrer et entamer des négociations collectives de bonne foi ou charger leurs représentants autorisés de le faire en leur nom;
  2. faire tout effort raisonnable pour conclure une convention collective.

123        Les lois du travail fédérales et provinciales contiennent des dispositions semblables exigeant que les parties se rencontrent et participent à des négociations collectives de bonne foi. L’article 106 tient compte des exigences de décrire la négociation de bonne foi. La Loi sur les relations de travail et le Code canadien du travail (L.R.C. (1985), ch. L-2) contiennent tous les deux un libellé semblable.

124        Dans Alliance de la Fonction publique du Canada et Canada (Conseil du Trésor), [1977] C.R.T.F.P.C. no 16 (QL), la CRTFP, en adoptant les lignes directrices de la CRTO en matière d’interprétation de l’obligation de négocier de bonne foi et de faire tout effort raisonnable pour élaborer une convention collective, établit les principes de cette obligation. La Commission (au paragraphe 11) a adopté les motifs dans Devilbiss comme suit :

[…]

[…] l’obligation décrite à l’article 14 comporte deux fonctions principales. Premièrement, l’article raffermit l’obligation de l’employeur de reconnaître l’agent négociateur et, deuxièmement au-delà de cette fonction fondamentale et essentielle, l’employeur à l’obligation de favoriser des discussions rationnelles et documentées, réduisant ainsi la possibilité d’un conflit de travail inutile.

[…]

125        La CRTFP a résumé les lignes directrices suivantes à partir de la jurisprudence de la CRTO :

  • l’obligation raffermit l’obligation de l’employeur de reconnaître l’agent négociateur;
  • l’obligation vise à reconnaître la discussion rationnelle et documentée, réduisant ainsi au minimum la possibilité d’un conflit inutile;
  • les parties doivent avoir toutes deux l’intention de conclure une convention collective;
  • le processus de la négociation doit être considéré comme un tout;
  • l’obligation dépend de la façon dont les négociations sont menées et non d’après le contenu des propositions présentées à la table des négociations;
  • le facteur important est la qualité de la discussion;
  • les parties ont le devoir de communiquer entre elles;
  • une attitude rigide bien qu’intransigeante dans les négociations ne constitue pas de la mauvaise foi;
  • le critère est une discussion ouverte et rationnelle;
  • les parties doivent être disposées à expliquer les justifications de leur position;
  • il incombe au requérant de prouver ses allégations.

126        La Cour suprême du Canada a décrit l’obligation de négocier de bonne foi dans Royal Oak Mines.

127        Dans cette affaire, le Conseil canadien des relations du travail (« CCRT ») a conclu que l’employeur avait omis de négocier de bonne foi à la suite d’une grève de 18 mois qui s’était avérée violente et acrimonieuse. La conclusion du CCRT était fondée sur le refus de l’employeur de négocier tant qu’il n’aurait pas été statué sur la demande d’accréditation de l’association d’employés concurrente, l’exigence de l’employeur d’une clause relative à une période probatoire pour les employés qui reprenaient le travail et son refus de discuter de toute disposition prévoyant l’arbitrage ou quelque autre mécanisme de règlement des litiges découlant du congédiement de plusieurs employés. La Cour devait décider si le CCRT avait compétence pour rendre une ordonnance enjoignant à l’employeur de soumettre sa dernière offre avec les autres questions en litige assujetties à une négociation limitée et en fin de compte, à une médiation exécutoire.

128        En concluant qu’il y avait un appui considérable à l’égard de la détermination du CCRT que l’employeur avait manqué à son obligation de négocier de bonne foi en imposant une condition déraisonnable comme préalable à la négociation collective, M. le juge Cory, au nom de la Cour, a adopté en partie le raisonnement suivant aux paragraphes 41 à 46 :

41[…] Pour que la négociation collective soit un processus équitable et efficace, il est essentiel que l’employeur et le syndicat négocient dans le cadre des règles établies par le Code du travail applicable. Dans le contexte du devoir de négocier de bonne foi, chaque partie doit s’engager à chercher honnêtement à trouver un compromis. Les deux parties doivent se présenter à la table des négociations avec de bonnes intentions.

42 L’alinéa 50a) du Code canadien du travail prévoit une double obligation. Non seulement les parties doivent négocier de bonne foi, mais encore elles doivent faire tout effort raisonnable pour conclure une convention collective. Les deux éléments sont d’égale importance et une partie déroge à cette disposition si elle ne remplit pas les deux obligations. Il peut fort bien y avoir des exceptions, mais, en règle générale, l’obligation d’entamer des négociations de bonne foi doit être appréciée selon une norme subjective alors que celle de faire tout effort raisonnable pour conclure une convention doit être évaluée selon une norme objective, le Conseil prenant en considération les normes et pratiques comparables dans le secteur d’activités. C’est la deuxième partie de l’obligation qui empêche une partie de se dérober en prétendant qu’elle tente sincèrement de conclure une entente alors qu’objectivement ses propositions sont tellement éloignées des normes acceptées dans le secteur d’activités qu’elles doivent être tenues pour déraisonnables.

43 Aux termes du sous-al. 50a)(ii), les parties doivent « faire tout effort raisonnable pour conclure une convention collective ». Par conséquent, présenter une proposition ou adopter une position inflexible alors que l’on devrait savoir que l’autre partie ne pourra jamais l’accepter constitue nécessairement un manquement à cette obligation. Comme la notion d’« effort raisonnable » doit être appréciée objectivement, le Conseil doit déterminer, en fonction des normes du secteur d’activités, si d’autres employeurs ont refusé d’insérer une clause type d’arbitrage des griefs dans une convention collective. S’il est de notoriété publique que l’absence d’une telle clause serait inacceptable pour tout syndicat, alors il n’est pas possible d’affirmer qu’une partie comme l’appelante en l’espèce a négocié de bonne foi. […]

[…]

44 Parfois, la conduite d’une partie peut être tellement flagrante qu’il est raisonnablement possible d’en inférer qu’elle n’est pas disposée à faire un effort réel pour conclure une convention. En pareil cas, bien qu’elle exprime la volonté de conclure une convention collective, ses actions peuvent laisser transparaître le souhait ou l’intention de ne pas en conclure. […]

45 […] Si une partie propose l’insertion d’une clause dans la convention collective ou, inversement, refuse même de discuter une condition fondamentale ou normale, qui est acceptable et incluse dans les autres conventions collectives dans ce secteur d’activités dans toutes les régions du pays, le conseil des relations du travail peut conclure à bon droit que la partie ne fait pas un "effort raisonnable pour conclure une convention collective". Si des parties raisonnables se sont entendues pour insérer une clause d’arbitrage des griefs dans leur convention, alors le refus de négocier cette clause ne saurait être raisonnable. Les motifs pour lesquels un employeur peut congédier un employé présentent une importance fondamentale pour toute association d’employés. Si un employeur refuse à un employé l’accès à une procédure d’arbitrage des griefs ou à une autre procédure équitable qui lui permette de contester la légitimité de son congédiement, il le prive de l’exercice d’un droit fondamental. En pareil cas, il serait raisonnable que le conseil en déduise qu’aucun syndicat raisonnable n’accepterait une convention collective sans clause d’arbitrage des griefs et que le refus par l’employeur de négocier la clause indique qu’il ne négocie pas de bonne foi.

46 Pour reprendre la conclusion du Conseil canadien des relations du travail dans Iberia, Lignes aériennes d’Espagne (1990), 80 di 165, à la p. 203, la position de négociation de l’appelante dans la présente espèce était « inflexible et intransigeante au point de mettre en péril l’existence même de la négociation collective ». […]

129        Dans cette affaire, le CCRT a conclu que l’employeur avait contrevenu à l’alinéa 50a) du Code canadien du travail sans aucun motif commercial valide de refuser d’accorder aux employés de l’unité de négociation les mêmes augmentations de salaire qu’il avait accordé aux employés non syndiqués et de refuser de poursuivre les négociations collectives si le syndicat ne retirait pas une plainte en instance devant le Conseil.

130        Dans Canadian Union of Public Employees (Airline Division), Local 4027 v. Iberia Airlines of Spain (1990), 80 di 165, au paragraphe 203, le CCRT a déclaré en outre ce qui suit :

[Traduction]

L’employeur ne participait pas à une négociation serrée dans le but de protéger ses intérêts légitimes dans le cadre d’une relation de travail collective et négociée. L’employeur a négocié en surface. Au plan formel, il a adopté une attitude qui est à première vue irréprochable, dans la mesure où les gestes habituels y sont. À l’examen, cette attitude s’avère illégitime, injustifiable et contraire à ce qui est admissible en matière de négociation de bonne foi. […]

131        Aux paragraphes 46 et 47, Monsieur le juge Cory a déclaré qu’à son avis [traduction] « […] cette conclusion est correcte et applicable à l’affaire qui nous occupe. Le caractère déraisonnable de la position de l’appelante dans la présente espèce peut être mesuré objectivement par rapport à d’autres affaires portant sur des faits semblables. »

1. Application aux faits de l’espèce

132        Selon le témoignage de M. Holbrook, il était d’avis que l’approche adoptée par l’employeur relativement aux propositions de l’agent négociateur concernant le PMCA consistait à ne pas en discuter, à ne pas y répondre et à ne même pas dire « non » à leur sujet. Il est d’avis que l’employeur souhaite reporter toute discussion des propositions jusqu’à la fin de la négociation, moment auquel le ministère et l’agent négociateur les aborderaient.

133        Il a reconnu qu’en février 2017, l’employeur avait suggéré qu’il valait peut-être mieux que les propositions de l’agent négociateur soient traitées en discutant des questions sous-jacentes avec un médiateur. Il a déclaré que même si l’agent négociateur ne s’opposait pas à la médiation, selon sa perception, l’employeur tentait d’éviter de discuter des questions.

134        M. Arulpooranam a témoigné en disant que l’employeur avait estimé que le recours à un médiateur ou à un facilitateur pour traiter des questions concernant l’article 47 permettrait de faire progresser la discussion. En novembre 2016, il a envoyé un courriel à M. McConnell en vue d’étudier l’idée d’embaucher un médiateur. M. McConnell a répondu en demandant une liste de médiateurs convenus conjointement par les parties. En fin de compte, après avoir consulté les Services de règlement des différends de la Commission, ils ont convenu d’un médiateur.

135        M. Arulpooranam a déclaré que l’employeur estimait que l’adoption à l’aveuglette de la politique de Transports Canada et son insertion dans la convention collective constituait un défi puisque la politique serait dorénavant admissible à l’arbitrage. Néanmoins, l’employeur comprenait qu’il devait tenter de trouver une façon de répondre aux préoccupations de l’agent négociateur, soit en recourant aux services d’un médiateur, soit au moyen d’un processus de gouvernance ministériel qui renforcerait le PMCA. Cela pourrait être réalisé au moyen d’un protocole d’entente conclu entre les parties.

136        Le 7 février 2017, M. Arulpooranam a envoyé un courriel à M. Holbrook en vue de l’informer que la partie patronale proposerait de manière officielle que les parties traitent de l’article 47 avec l’aide d’un médiateur au cours d’une séance consacrée à ce sujet dont la date serait prévue au mois de mars 2017. Il a proposé des dates possibles.

137        Les parties ont convenu que, des trois dates prévues aux fins des négociations en février 2017, la discussion sur l’article 47 sera tenue le dernier jour. M. McConnell a indiqué qu’en raison de certaines activités et plaintes récentes, qu’il envisageait de présenter une proposition remaniée relativement à l’article 47, qui permettrait à l’agent négociateur d’ouvrir la voie aux fins d’autres discussions.

138        M. Arulpooranam a affirmé qu’au début du dernier jour de négociations en février, selon lui, il existait une volonté de procéder à l’aide d’un médiateur. Toutefois, il existait un sentiment que les deux parties pourraient peut-être réaliser plus en procédant sans un médiateur pendant un autre jour. À la suite de la réunion, un plan a été élaboré en vue de procéder à une autre séance de négociations en vue de traiter de l’article 47 sans un médiateur au mois de mars 2017.

139        Lorsque la plainte a été déposée au début du mois de mars 2017, M. Arulpooranam a témoigné en disant qu’il avait été pris par surprise puisqu’aucune personne de la partie patronale n’avait indiqué une impasse ou n'avait conclu que les discussions devaient se terminer au sujet de l’article 47 et qu’une impasse devrait être déclarée.

140        Même si l’employeur a adopté la position ferme qu’il ne souhaitait pas insérer le PMCA dans la convention collective, je ne suis pas convaincu d’après la preuve qu’il avait un esprit ouvert concernant le traitement des préoccupations sous-jacentes de l’agent négociateur et qu’il était disposé à envisager de renforcer la gouvernance du PMCA. Il a indiqué une volonté d’envisager la médiation et pris l’initiative à cet égard. Il était également disposé à envisager un protocole d’entente en vue de renforcer la gouvernance du PMCA. Selon la façon dont la question a est restée le dernier jour de négociations en février 2017, les parties devaient se rencontrer directement à une date prévue au mois de mars 2017 avant de recourir aux services d’un médiateur. De plus, l’agent négociateur avait indiqué qu’il modifierait ses propositions relativement à un article 47 révisé.

141        Je ne suis pas convaincu que les parties sont arrivées à une impasse relativement à cette question ou que l’agent négociateur s’est acquitté de son fardeau d’établir que, selon la prépondérance des probabilités, il est plus probable que l’employeur a négocié de mauvaise foi.

142        Rien dans la preuve n’indique que l’employeur a refusé de reconnaître l’agent négociateur ou qu’il souhaite mettre en péril les droits de négociation collective. L’agent négociateur n’a pas non plus axé ses éléments de preuve de manière à établir que l’employeur avait omis d’entamer des négociations de bonne foi. Pendant le nombre limité d’occasions qu’elles se sont rencontrées aux fins de négociations, les parties se sont entendues relativement à un certain nombre de clauses.

143        Dans Royal Oak Mines, entre autres, le CCRT a conclu qu’un refus d’insérer dans la convention collective une clause d’arbitrage des griefs aux fins de l’arbitrage des griefs déposés par les employés qui avaient été congédiés constituait une preuve de négociation de mauvaise foi puisque, objectivement, aucun syndicat raisonnable n’accepterait la position de l’employeur.

144        En l’espèce, aucun élément de preuve objectif n’a été déposé de clauses comparables traitant de questions opérationnelles d’un ministère dans le secteur public fédéral qui ont été insérées dans les conventions collectives qui permettraient d’inférer que l’employeur n’avait pas fait des efforts raisonnables pour conclure une convention collective. À mon avis, il est également significatif qu’au moins depuis 2007, les parties traitent du maintien de la compétence professionnelle en aviation au moyen d’une politique ministérielle élaborée conjointement en marge de la convention collective. Je suis convaincu que, selon la preuve dont je dispose, les parties communiquent entre elles et qu’à l’heure actuelle, elles ont participé à des discussions rationnelles. En conséquence et compte tenu des onze points énoncés au paragraphe 125 ci-dessus, je conclus qu’il n’y a eu aucune contravention de l’art. 106 de la Loi d’après les faits exposés en l’espèce.

III. Question 2 : Modifier le PMCA

145        L’Association a soutenu que les défendeurs ont contrevenu au gel prévu par la loi relativement aux conditions d’emploi, contrairement à l’art. 107 de la Loi, lorsqu’il a changé de manière importante les conditions d’emploi de ses membres en effectuant unilatéralement des réductions au programme du PMCA.

A. Pour l’APFC

1. M. McConnell

146        M. McConnell a été renvoyé à un certain nombre de courriels, surtout à un courriel en date du 3 février 2016, qu’il avait envoyé à Laureen Kinney au Conseil du Trésor. Il a déclaré que les programmes de vol étaient restreints en Ontario et au Québec. Il se préoccupait du fait que Transports Canada n’était pas au courant des dispositions de la Loi portant sur le gel prévu par la loi qui sont entrées en vigueur après que l’avis de négocier avait été donné.

147        Mme Kinney a répondu le 15 février en déclarant qu’elle avait demandé au directeur général de Surveillance et transformation à Transports Canada d’en faire immédiatement le suivi.

148        Le 22 février 2016, M. Guindon a répondu par courriel à M. McConnell comme suit :

[Traduction]

[…]

Nous avons reçu une communication selon laquelle les régions de l’Ontario et du Québec ont continué et continuent de s’assurer que tous les aspects du PMCA sont respectés. Toutefois, veuillez noter qu’il existe des cas où les exploitants aériens décident, par choix, de ne pas terminer leurs 48 heures et/ou des cas où il existe des difficultés logistiques pour prévoir des exploitants aériens dans des formations initiales ou récurrentes, surtout en ce qui concerne la DGSA en raison du nombre de cours initiaux.

Je suggère que nous discutions de cette question à la prochaine réunion du Comité sur les relations.

[…]

149        M. McConnell a répondu à M. Guindon en indiquant qu’il s’agissait d’une question importante qui ne pouvait pas attendre la réunion du Comité sur les relations (c.-à-d. le comité directeur mentionné antérieurement dans la présente décision). Il a également demandé les documents qui étayaient le fait que des exploitants aériens choisissaient de ne pas terminer leurs programmes.

150        M. Guindon a répondu par courriel le 25 février 2016, l’informant de ce qui suit :

[Traduction]

[…]

comment ils gèrent le programme. À l’heure actuelle, je peux confirmer qu’aucune restriction n’est imposée au programme de vol et de formation afin de garantir que les dispositions de la clause 47.03 de la convention collective sont respectées à l’égard de tous les exploitants aériens. Le programme n’a jamais cessé, mais il se peut qu’il ait été exécuté pendant une courte période à un rythme plus lent. De plus, je peux également vous assurer qu’aucun changement n’a été apporté au PMCA et qu’il ne devrait exister aucune préoccupation à l’égard de l’article 47.05.

[…]

151        M. Guindon a également fourni à M. McConnell des renseignements à l’égard de certains exploitants aériens qui n’étaient pas en mesure de satisfaire à l’exigence de 48 heures pour des raisons liées à chacun des exploitants aériens découlant de circonstances indépendantes de la volonté de l’employeur.

152        Le dernier paragraphe du courriel se lit comme suit :

[Traduction]

J’espère que nous serons en mesure de collaborer en vue de veiller à ce que le programme de formation et de vol à l’intention des exploitants aériens soit établi de manière à respecter la politique et les obligations contractuelles, conformément à nos attentes. J’espère que la présente répond à vos préoccupations et que la question est considérée comme close jusqu’à ce que nous nous rencontrions au mois de mai pour examiner les données.

153        Après avoir reçu le courriel, M. McConnell a envoyé par courrier électronique la chaîne de courriels à la haute direction de l’agent négociateur et aux représentants en vue de discuter d’une mesure future. Je ne suis pas satisfait de la réponse puisqu’il était clair qu’il n’y aurait aucune possibilité de collaboration aux fins d’une solution.

154        Le 30 mars 2016, l’Association et Transports Canada ont tenu une réunion du Comité sur les relations à laquelle il a été informé des changements à venir au programme de vol. Il a été informé qu’il recevrait un courriel plus tard pendant la journée. À la fin de la journée, il a reçu un courriel dans lequel les changements au programme de vol étaient décrits et il n’était pas heureux à leur égard. Il avait des préoccupations qui découlaient de la façon dont les changements avaient été expliqués lors de la réunion.

155         Il a déclaré que l’agent négociateur n’avait pas été consulté. Lorsqu’on lui a demandé s’il s’agissait de la première fois qu’il prenait connaissance de ces changements, il a affirmé qu’il s’agissait de la première fois qu’il les avait vus sous forme d’ébauche.

156        La trousse d’outils de communication qui avait été préparée aux fins d’utilisation par les gestionnaires lorsqu’ils informaient les membres de leur personnel avait été fournie à M. McConnell.

157        Le 31 mars 2016, conjointement avec les séances d’information à l’intention des membres tenues à cette date, l’employeur a fourni un document à l’APFC dans lequel les changements au programme de vol à compter du 1er avril 2016 étaient décrits. Il se lit comme suit :

[Traduction]

Changements au programme de vol

Résumé

  • En raison des pressions de réduire les ressources actuelles
  • TCAC examine les économies réalisées aux fins du programme de vol
  • À compter du 1er avril 2016 :
  • S’assurer qu’il y a des ressources financières équitables pour le programme de vol dans l’ensemble du Canada
  • L’autre programme de vol sera augmenté dans la RCN à l’aide d’autres moyens établis (Sims)
  • L’usage du B407 Heli et du Sim nouvellement acquis
  • Deux B206 (sous-utilisés YQM/YOW) seront retirés du service
  • Mener à terme un examen des besoins opérationnels sera effectué en vue de déterminer où des économies peuvent être réalisées à l’échelle nationale
  • La LP164 sera remplacée par une nouvelle politique (à compter du 15 avril 2016)

Notes générales :

  • Les pressions de réduire les ressources actuelles ont exigé des changements
  • Aucune incidence sur les obligations contractuelles de l’APFC (PMCA)
  • Aucune réduction de l’effectif n’est prévue
  • Aucune incidence négative sur le travail des CAI
  • L’expertise des CAI est essentielle au Programme de surveillance de la sécurité de TCAC
  • TCAC s’est engagé à veiller à ce qu’une orientation et une supervision appropriées soient fournies à ceux touchés par ces changements
  • Les CAI touchés et l’APFC seront tenus au courant au fur et à mesure que les changements sont apportés.

Mise en œuvre

  • À compter du 1er avril 2016
    • Le programme de vol régulier est limité aux CAI qui se situent à proximité des bases de la DGSA
    • Accroître l’utilisation de l’AFP dans la RCN
    • Deux B206 sous-utilisés seront retirés du service
    • Mener à terme l’examen des besoins opérationnels (type de formation)
  • À compter du 15 avril 2016
    • La LP 164 sera remplacée par une nouvelle politique

Le programme de vol régulier sera offert aux employés pilotes situés aux lieux suivants :

  • Prince George
  • Victoria
  • Vancouver
  • Richmond
  • Abbotsford
  • Kelowna
  • Calgary
  • Edmonton
  • Saskatoon
  • Winnipeg
  • Thunder Bay
  • Sudbury
  • Hamilton
  • Toronto
  • Montréal
  • Québec
  • Moncton
  • Halifax
  • St. John’s

[Le passage en évidence et les effets de police le sont dans l’original]

158        Après avoir collaboré avec la haute direction de l’agent négociateur, M. McConnell a envoyé un courriel à M. Guindon le 31 mars 2016 indiquant en partie ce qui suit :

[Traduction]

[…]

L’APFC estime que les mesures prises par Transports Canada sont illégales et nous avons demandé à notre avocat de procéder au dépôt d’une plainte auprès de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique.

[…]

159        L’employeur n’a ni réagi ni répondu à la lettre de M. McConnell.

160        Le 19 décembre 2016, M. Collins a envoyé un courriel à M. McConnel en vue de l’informer à l’avance que la Direction générale des Services des aéronefs prévoyait d’échanger des aéronefs entre Hamilton, en Ontario, et Winnipeg, au Manitoba, à la fin de l’exercice 2016-2017. La stratégie actuelle à l’époque en matière de base comprenait un aéronef C90A King Air et un aéronef C550 Citation à chaque lieu. Puisqu’il n’y avait qu’un seul aéronef de chaque type à chaque lieu, il n’y avait aucun aéronef de remplacement lorsqu’un aéronef était retiré du service à des fins d’entretien ou pour d’autres raisons. Afin de régler ce problème, une décision a été prise de transférer le C550 de Hamilton à Winnipeg et le C90A de Winnipeg à Hamilton.

161        En ce qui concerne les répercussions de l’échange dans la région des Prairies et du Nord de l’employeur, le courriel indiquait en partie ce qui suit :

[Traduction]

[…]

Il y aura une légère réduction dans le nombre de destinations […] y compris le gravier, toutefois, il n’y a actuellement aucun pilote qualifié pour atterrir sur le gravier dans la RPN puisqu’il n’y a eu aucun besoin apparent récent de se rendre à ces lieux. Les opérations dans la RPN se limiteront également aux pistes d’une longueur minimale de 5 000 pieds.

[…]

162        D’une perspective positive, dans la région de l’Ontario de l’employeur, les deux aéronefs King Air coûtent moins cher pour exploiter puisque le King Air est un aéronef moins complexe.

163        M. McConnell a déclaré qu’en raison de l’échange, il y aurait moins de membres qui effectueraient des vols dans la région des Prairies et du Nord de l’employeur et il y aura probablement plus de vols dans sa région de l’Ontario.

164        Il a affirmé qu’il a modifié les conditions d’emploi de certains des membres de l’agent négociateur. Il se peut que les inspecteurs de l’aviation sans expérience ne puissent jamais se qualifier en tant que pilote d’un aéronef à réaction, comme le C550. Les inspecteurs en Ontario ne pourraient pas maintenir leurs qualifications relatives aux vols de haute altitude supérieure à 2 500 pieds. Des prolongations des délais de formation étaient demandées pour les pilotes afin qu’ils terminent leur dernière formation de l’exercice.

a. Contre-interrogatoire

165        M. McConnell a convenu que l’employeur déterminait la formation des employés, conformément aux procédures établies dans le PMCA. Il a confirmé qu’en 2007, l’employeur et l’agent négociateur ont établi le PMCA et son contenu et y ont convenu mutuellement. Il a reconnu que l’affectation des employés à un programme de vol régulier ou à un autre programme de vol relève de la prérogative de l’employeur.

166        On lui a demandé si la détermination de qui est affecté à chaque programme relevait de la prérogative de l’employeur. Il a répondu qu’une section ne peut être lue de manière indépendante des autres et que de 2007 à 2012, tous les employés avaient l’option d’être affectés à un programme de vol régulier.

167        Lorsqu’on lui a demandé où il était prévu que l’agent négociateur avait son mot à dire dans l’affectation des employés à un programme, il a répondu qu’à la suite d’une vente d’un aéronef en 2012, des réductions draconiennes ont été apportées au programme de vol régulier et l’affectation des employés au PMCA a augmenté. Il a répondu que le processus d’affectation prévu au paragraphe 5.2.1 du PMCA est effectué en consultation avec l’employé en ce qui concerne sa préférence.

168        On a demandé à M. McConnell s’il était logique que l’employeur forme un employé pour effectuer les tâches affectées. Il a répondu qu’il s’agissait d’une question très large. On lui a donné un exemple de l’échange de l’aéronef C90A King Air en faveur de l’aéronef à réaction à Winnipeg. Il a été interrogé au sujet de la question de l’agent négociateur concernant un inspecteur sans expérience à Winnipeg qui ne pouvait pas se qualifier en tant que pilote d’un aéronef à réaction. Lorsqu’on lui a demandé si, lorsque des tâches liées à l’aéronef à réaction n’étaient pas attribuées à cet inspecteur, il lui était nécessaire de se qualifier en tant que pilote de cet aéronef à réaction, il a reconnu que la décision relèverait de la préférence de l’employé, mais que cela ne serait pas nécessaire.

169        On lui a demandé si la politique a été modifiée après que l’avis de négocier avait été donné. Il a répondu par le négatif, mais que son interprétation avait été modifiée en raison des actes de l’employeur. Il a convenu que l’industrie avait changé de manière importante et très rapidement. Un des principaux changements concernait les tests en vol commercial, ce qui a fait en sorte que l’industrie en effectuait la grande partie de ces tests.

170        On a demandé à M. McConnell si beaucoup d’employés n’atteignaient pas les 48 heures exigées. Il a répondu que certains ne l’atteignent pas. Lorsqu’on lui a demandé si ceux qui ne l’atteignent pas subissent un préjudice en raison du fait qu’ils ne touchent pas l’indemnité de fonctions supplémentaires, il a répondu qu’il ne comprenait pas la question et que les 48 heures n’étaient pas liées à cette indemnité.

171        Il lui a été suggéré que certains membres participant au programme de vol régulier n’atteignent pas les 48 heures. Il a répondu que cela était sans aucune faute de leur part. On lui a également suggéré que certains n’atteignaient pas les 48 heures en raison de leur situation personnelle. Il a été renvoyé au courriel qu’il a reçu de M. Guindon, en date du 25 février 2016, décrivant plusieurs raisons à l’égard des employés qui n’étaient pas en mesure d’atteindre les 48 heures minimales. Il a répondu que si une personne était enceinte ou partait pour un autre emploi, il se pouvait qu’elle n’atteigne pas les 48 heures.

172        Il a affirmé dans son témoignage qu’un bon nombre d’employés n’étaient pas en règle et qu’il existait beaucoup de raisons pour ce fait. Si elles n’ont pas effectué cinq décollages et atterrissages, ils ne peuvent pas voler avec des passagers à bord. Tous les inspecteurs doivent effectuer trois décollages et atterrissages dans les 60 jours suivant un vol. Si un inspecteur n’a pas agi à titre de pilote commandant de bord d’un aéronef qui exige deux pilotes au cours des cinq dernières années, il ou elle ne peut pas exercer l’avantage de la licence.

2. M. Holbrook

173        M. Holbrook a renvoyé au document du 31 mars 2016 provenant de l’employeur intitulé [traduction] « Changements au programme de vol ».

174        Il a déclaré que l’agent négociateur ne voyait pas que les faits étayent l’engagement à veiller à ce que les ressources financières aux fins du programme de vol soient équitables dans l’ensemble du Canada parce qu’il était au courant de l’existence d’iniquités importantes partout au pays.

175        Le recours accru à l’autre programme de vol dans la région de la capitale nationale (RCN) en recourant davantage aux simulateurs signifie qu’il y aura une réduction au programme de vol régulier.

176        Selon l’agent négociateur, un examen des besoins opérationnels en vue de déterminer les économies nationales concerne la réalisation d’autres réductions. Le document indique qu’il n’y a aucune incidence sur les obligations contractuelles de l’APFC. L’agent négociateur a exprimé vigoureusement son désaccord.

177        Il existe une liste de villes où les inspecteurs de pilote n’auront pas accès au programme de vol régulier. En ce qui concerne quelques lieux, l’agent négociateur a convenu qu’en 2007 il n’était pas possible d’exécuter un programme de vol régulier à ces lieux. Ces lieux représentaient une application de longue date du libellé du PMCA de Transports Canada et plus particulièrement de l’alinéa 5.1.3d). Seuls deux lieux ont été radiés, St John’s, à Terre-Neuve et Thunder Bay, en Ontario.

178        Les employés effectuaient des vols à Prince George, à Victoria et à Kelowna, en Colombie-Britannique; à Québec, au Québec; et à Halifax, en Nouvelle-Écosse, jusqu’au 1er avril 2016. La vente de l’aéronef en 2012 a entraîné la fermeture d’installations à Calgary et à Edmonton, en Alberta; et à Sudbury, en Ontario.

179        M. Holbrook a déclaré que ces changements signifiaient que l’employeur avait modifié l’application du programme établi dans le PMCA, qui devait être suivi en raison de l’article 47. Le PMCA exige que tout le monde ait un accès égal au programme de vol régulier.

180        Le changement en 2016 a touché le programme de vol parce que le programme de vol régulier auquel les membres à Victoria ou à Québec qui avait eu accès au 31 mars 2016 a été annulé et ils ont été inscrits à un autre programme de vol sans aucune possibilité de participer de nouveau à un programme de vol régulier. Le comité directeur n’a pas approuvé ces changements.

181        Le 31 mars 2016, le directeur régional de Québec a envoyé un courriel aux employés dans la région de Québec. Il les a informés que la direction mettait au point une liste de vol de 2016-2017 et que la direction normalisait l’utilisation de l’aéronef à l’échelle nationale. Il a indiqué qu’on avait demandé à la direction de limiter les vols à ceux qui étaient au sein de 125 km de la base à Dorval, au Québec. Il a présenté ses excuses du fait qu’il devait limiter l’accès cette année des pilotes à Québec et à Alma. Il a affirmé que l’agent négociateur et la direction pourraient répondre aux questions et aux préoccupations.

182        Du point de vue de l’agent négociateur, il estimait qu’il était ennuyeux que le directeur dise que l’agent négociateur pourrait répondre aux questions portant sur un programme puisque cela suggérait qu’il y avait participé d’une façon quelconque.

183        M. Holbrook a déclaré que la limite de 125 km n’était pas appliquée à l’extérieur du Québec et qu’il était d’avis que le concept de la normalisation nationale n’existait pas.

184        Victoria se situe uniquement à 68 km de Vancouver, où les aéronefs sont situés. En C.-B, une règle différente était appliquée par rapport à celle appliquée au Québec. Il n’existe aucune norme nationale.

a. Contre-interrogatoire

185        M. Holbrook a reconnu que la plainte a trait aux changements apportés au programme de vol. Il a convenu que le libellé des clauses n’avait pas été modifié.

186        Toutefois, l’agent négociateur est d’avis que l’employeur a modifié la façon dont il exerce sa prérogative en matière d’affectation des employés aux autres programmes.

187        Il revient à l’employeur de décider d’affecter un employé à un programme de vol régulier ou à un autre programme de vol. Pourvu que l’affectation soit effectuée conformément aux critères, il n’est pas nécessaire de consulter l’agent négociateur.

188        On lui a demandé si l’employeur avait modifié la façon dont il affectait les employés à certains programmes en raison des réductions budgétaires. M. Holbrook a déclaré que la raison pour laquelle l’employeur a changé la façon dont il les affectait importait peu; il l’a fait unilatéralement pendant une période de gel prévu par la loi sans le consentement de l’agent négociateur.

189        Il a affirmé qu’à son avis, même si le libellé du programme n’avait pas changé, l’employeur avait modifié la façon dont il affectait les employés et ne suivait plus l’intention du PMCA en ce qui concerne plusieurs domaines.

190        On lui a demandé de donner un exemple. Il a renvoyé au paragraphe 5.12 du PMCA, qui énonce en partie que « [t]ous les CAI sont admissibles à une affectation à un programme de vol régulier ». Même si le paragraphe 5.1.3 énumère des exemptions, au moment où le gel prévu par la loi est entré en vigueur, les membres à Victoria et à Québec étaient admissibles à un programme de vol régulier.

191        Il a affirmé que selon la position de l’agent négociateur, il doit donner son agrément quant à savoir si un emplacement géographique empêche la possibilité d’une affectation à un programme de vol régulier. En 2011, lorsqu’une certaine région n’avait plus d’avions et que les membres n’avaient plus accès à un programme de vol régulier, l’agent négociateur avait déposé une plainte auprès de la CRTFP.

192        M. Holbrook a reconnu qu’aucun employé n’avait perdu l’indemnité de fonctions supplémentaires en raison des changements apportés au PMCA en avril 2016.

193        On lui a demandé s’il convenait que les employés qui avaient été affectés au programme de vol régulier ne satisfaisaient pas tous à l’exigence de 48 heures en raison de leur situation particulière. Il a répondu qu’il ne le savait pas.

194        Il a convenu que tous les autres programmes de vol sont approuvés par l’intermédiaire du comité directeur et que l’agent négociateur les avait acceptés. Ils sont énumérés à l’annexe A de la politique. Il a répondu qu’ils étaient acceptables, à condition qu’ils soient affectés conformément aux critères énumérés au paragraphe 5.2.1 du PMCA.

B. Pour l’employeur

1. M. Guindon

195        M. Guindon a renvoyé à son échange de courriels avec M. McConnell le 25 février 2016 au sujet de la présumée annulation du programme de vol en Ontario et au Québec. En raison de réductions budgétaires, certains de ses collègues dans les régions n’étaient pas certains qu’ils avaient des fonds suffisants pour payer les dépenses liées au programme de vol. Il a affirmé que l’Aviation civile avait perdu un montant assez important de son financement.

196        Dans la région du Québec, et même si l’Aviation civile avait perdu plusieurs millions de dollars de son budget, elle était en mesure de continuer d’exécuter le programme de vol, à l’exception de quelques semaines.

197        Le programme de vol a continué d’être exécuté en Ontario en fonction du niveau de financement habituel. Puisque certains inspecteurs participant au programme de vol ne pilotaient pas un aéronef pendant toutes les 48 heures, cela signifiait que l’argent restait dans l’enveloppe de vol pour répondre aux besoins en formation d’autres inspecteurs.

198        Il a été en mesure de confirmer à M. McConnell que l’argent avait été réservé en vue de continuer d’exécuter le programme de vol. Tel que cela a été déclaré dans son courriel, le programme n’avait pas cessé, mais qu’il était exécuté selon un rythme plus lent pendant une certaine période. Selon M. Guindon, du point de vue du PMCA, aucun changement n’avait été apporté.

199        M. Guindon a expliqué que le document appelé une [traduction] « trousse d’outils de communication » et intitulé [traduction] « Principaux messages et questions et réponses » dont le sous-titre est [traduction] « Changements au programme de vol » et daté d’avril 2016 avait pour but d’appuyer les gestionnaires et les chefs lorsqu’ils donnaient des renseignements aux membres du personnel. Il tient compte d’un changement dans l’application du programme de vol en raison des pressions de réduire les ressources. Il était nécessaire de veiller à ce que les dépenses de l’Aviation civile respectent le budget qui lui avait été attribué et d’assurer le respect des conditions d’emploi et de la convention collective.

200        Il s’agissait d’une prérogative de la direction. Dans le cadre du maintien du PMCA, la décision a été prise que la direction rationaliserait les opérations, dans la mesure du possible, tout en respectant les conditions d’emploi.

201        L’Aviation civile a dû réduire ses dépenses dans certains domaines. Le nombre d’heures régulières de vol a été réduit dans certains lieux, ce qu’il avait fait dans le passé. La direction avait le droit de changer le programme. Les vols ont cessé à Victoria et à Québec.

202        Certains inspecteurs qui participaient à de nombreux programmes étaient affectés au programme de vol régulier et étaient à bord plusieurs types d’aéronefs. Il était nécessaire de le rationaliser en un seul programme.

203        La prérogative de la direction d’affecter les inspecteurs à un PMCA est établie au paragraphe 3.1.1 qui prévoit que tous les employés « […] seront affectés par la direction de TC à un programme de maintien de la compétence professionnelle en aviation ». Il a expliqué qu’il existait une différence entre l’affectation d’un inspecteur à un programme de maintien des compétences en aviation et une affectation de travail.

204        L’Aviation civile souhaitait veiller à ce qu’il y ait des ressources financières équitables pour le programme de vol dans l’ensemble du pays. Par exemple, l’hélicoptère à Moncton, au Nouveau-Brunswick, était utilisé pour former un seul inspecteur et il était tellement sous-utilisé. Le coût direct de son entretien à ce lieu équivalait à 800 $ par heure. Il était utilisé pendant 48 heures par année et il était immobilisé pendant le reste du temps.

205        Les économies réalisées du retrait du service de l’hélicoptère à Moncton ont été utilisées pour investir dans la nouvelle technologie, à savoir un hélicoptère Bell 407. L’inspecteur à Moncton a été touché parce qu’il a été affecté à un autre programme de vol établi par l’intermédiaire du comité directeur. La direction décide d’affecter les employés à un PMCA.

206        Le comité directeur examine et approuve les propositions visant les autres programmes de vol. Les membres de ce comité se rencontrent deux à quatre fois par année.

207        En avril 2016, un examen complet des ressources a été effectué non seulement à l’égard du programme de vol, mais également à l’égard de toutes les activités.

208        Les autres programmes de vol ont été augmentés dans la RCN à l’aide de simulateurs, ainsi qu’à l’aide de l’hélicoptère Bell 407 nouvellement acquis. Un examen complet de tous les besoins opérationnels a été effectué.

209        Même s’il existait des contraintes en ressource, aucune réduction de l’effectif n’était prévue. L’Aviation civile devait maintenir l’expertise et les conditions d’emploi.

210        On lui a demandé, puisqu’il savait que les négociations collectives étaient en cours, comment il estimait que ces changements seraient mis en œuvre sans avoir à les négocier. Il a répondu qu’il ne s’agissait pas de changements aux conditions d’emploi. Tous les changements concernaient la question de savoir si les employés étaient affectés au programme de vol régulier ou à l’autre programme de vol. Les employés pouvaient obtenir leur indemnité de fonctions supplémentaires et maintenir leurs compétences.

211        Certains employés éprouvaient des difficultés à maintenir leurs compétences en raison d’un échec d’un test en vol ou d’un simulateur. Aucun élément de preuve n’a été déposé indiquant qu’une personne n’a pas été en mesure de maintenir ses compétences en raison des changements apportés au programme de vol.

212        M. Guindon a été renvoyé à son courriel en date du 31 mars 2016 décrivant les changements au programme de vol à l’intention de tous les membres du personnel de l’Aviation civile.

213        Il était nécessaire de mettre en œuvre les changements à compter du 1er avril de l’exercice parce qu’il s’agissait de la date à laquelle les employés étaient affectés à un programme de maintien des compétences pour l’année suivante. La situation budgétaire à Transports Canada et à l’Aviation civile était en état de crise.

214        M. Guindon a renvoyé à la liste des lieux où le programme de vol régulier était disponible pour les inspecteurs à compter du 1er avril 2016. Il a déclaré qu’elle indique les fermetures qui ont eu lieu en 2012 et en 2013, lesquelles comprenaient Sudbury, Thunder Bay et Calgary. En 2012 et en 2013, la décision a été prise au niveau des SMA et des SM de la Direction générale des services des aéronefs de rationaliser les opérations. Des bases ont été fermées et l’équipement et les aéronefs ont été vendus. De plus, l’Aviation civile a perdu l’accès à l’aéroport d’Edmonton puisqu’il a été fermé. Les aéronefs ont été vendus à Edmonton, même si M. Guindon ne pouvait pas se souvenir du type.

215        La fermeture des bases d’Edmonton et de Calgary avait été planifiée en 2012. Le budget de 2011-2012 du gouvernement a réduit le financement et ne permettait aucune augmentation de salaire. Les ministères devaient financer leurs services internes.

216        Les deux nouveaux lieux où le programme de vol régulier ne serait plus disponible à compter du 1er avril 2016 étaient Victoria et Québec. Cela découlait de la discussion budgétaire globale parmi les cadres de l’Aviation civile qui ont tout examiné, y compris le programme de vol et qui connaissait l’ensemble de l’effectif et la possibilité d’un programme de vol régulier.

217        Les inspecteurs à Victoria et à Québec, où aucun aéronef n’était situé, devaient se rendre à Vancouver ou à Montréal pour accéder au programme de vol régulier et ensuite revenir chez-eux. Les inspecteurs à Québec avaient besoin de trois jours pour se rendre à Montréal et pour en revenir aux fins de deux heures de vol. Cela a engendré des frais de déplacement, de chambre d’hôtel et de repas. La décision a été prise de retirer les villes du programme de vol régulier.

218        Le PMCA permet à la direction de décider qui est affecté à un programme de vol régulier ou à un autre programme de vol. Les inspecteurs dans ces villes ont été affectés à l’autre programme de vol.

219        M. Guindon a renvoyé à un courriel adressé à la haute direction de Transports Canada, en date du 22 décembre 2015, envoyé par le directeur général du Ministère, concernant la mise à jour de 2015-2016 de la délégation du budget de fonctionnement révisée. Le courriel se lit en partie comme suit :

[Traduction]

Vous vous souviendrez que le 10 novembre 2015, j’ai approuvé une délégation budgétaire révisée pour 2015-2016, à la suite d’un exercice d’examen budgétaire qui a été amorcé en juillet dernier. Même si des progrès continuent d’être réalisés en matière de réduction des prévisions de fonctionnement, le Ministère connaît quand même une insuffisance de 11,8 millions de dollars relativement à ses autorisations.

Tel que je l’ai mentionné antérieurement, tous les fonds d’exploitation excédentaires, y compris les crédits salariaux, seront utilisés pour compenser le reste du risque ministériel. Aucune activité nouvelle ou accrue ne peut être entreprise à l’aide des fonds excédentaires avant qu’une évaluation de la situation financière générale du Ministère ne soit effectuée et sans avoir obtenu mon approbation, ou en ce qui concerne les crédits salariaux, l’approbation du Conseil de gestion de la dotation.

[…]

220        M. Guindon a déclaré que le Ministère avait des gestionnaires dans certaines régions, comme l’Ontario, qui demandaient l’approbation de vols qui n’étaient pas visés par l’enveloppe budgétaire, et au Québec, les gestionnaires se souciaient qu’il y avait des fonds insuffisants dans l’enveloppe. Il a décrit cette période comme la période budgétaire la plus difficile en affirmant qu’elle était plus grave que les questions budgétaires de 2010 à 2012.

221        Le 26 février 2016, le SM et les SMA ont envoyé un courriel à tous les employés en vue de leur donner des renseignements sur le milieu dans lequel ils travaillaient. Ils y ont joint des notes prises lors d’une séance de réflexion du Comité de la haute direction de Transports Canada qui a été tenue le mois précédent. Le courriel indiquait en partie ce qui suit :

[Traduction]

[…]

Même si nous avons un financement approuvé par le gouvernement pour les priorités, les projets et la dotation à mesure que nous passons au prochain exercice, nous savons que nous aurons à relever des défis à l’avenir afin de continuer de fonctionner de manière efficace tout en respectant le budget disponible. Une planification intégrée visant à harmoniser nos activités et nos ressources humaines avec nos budgets sera essentielle et nous devons examiner la façon dont nous pouvons faire les choses différemment, réorganiser, gérer les risques et faire progresser notre programme stratégique. Nous nous efforcerons également d'éliminer les cloisons afin d’adopter une approche plus intégrée et complète relativement à tout ce que nous faisons à l’échelle du Ministère.

[…]

222        M. Guindon a indiqué qu’il commençait à constater un changement important dans l’approche visant à s’assurer que le Ministère dépense ses fonds de manière efficace.

223        La prochaine communication à l’intention de ses employés était le 3 mai 2016 et elle provenait du nouveau SM. Elle portait sur la résolution des pressions au chapitre des dépenses puisqu’au cours de l’année précédente, le Ministère avait un sureffectif lorsqu’il a doté les postes vacants et s’est trouvé avec plus d’employés faisant partie de l’effectif par rapport aux fonds disponibles pour les rémunérer. La communication indiquait en partie ce qui suit :

[Traduction]

[…]

Nous abordons nos pressions financières à l’aide d’un roulement régulier du personnel plutôt qu’à l’aide de perte d’emploi. Nous reconnaissons que ces restrictions en matière d’embauche créent des pressions sur certains secteurs du Ministère et que l’équipe de gestion fera de son mieux pour résoudre ces pressions à l’avenir. C’est la raison pour laquelle notre principale priorité consiste à renforcer des mesures souples accrues quant à la façon dont nous affectons les personnes au travail dans le Ministère […].

[…]

224        Le communiqué indiquait que Transports Canada et d’autres ministères participeraient à un examen complet avec le Conseil du Trésor en vue de déterminer des changements qui pourraient aider à utiliser les ressources existantes pour obtenir de meilleurs résultats.

225        Afin d’illustrer l’insuffisance, il a expliqué qu’en 2005-2006, le dénombrement des effectifs de l’Aviation civile s’élevait à 1 435 personnes par année avec un budget de 138,2 millions de dollars. En 2014-2015, il s’élevait à 1 264 personnes par année, à savoir une réduction de 170, avec un budget de 142,7 millions de dollars. En 2015-2016, il s’élevait à 1 344, avec un budget de 138,2 millions de dollars. Toutefois, en 2016-2017 le dénombrement des effectifs s’élevait à 1 320 personnes par année et le budget s’élevait à 118,2 millions de dollars. Le budget salarial a été réduit, passant de 117,7 millions de dollars à 106,8 millions de dollars et le budget de fonctionnaire avait été réduit, passant de 20,5 millions de dollars à 11,4 millions de dollars.

226        M. Guindon a déclaré que l’enfer s’est déchaîné. Environ 100 000 $ a été affecté à un dénombrement des effectifs. En 2014 et en 2015, l’Aviation civile a perdu 3 % de son budget. En 2015 et en 2016, elle a perdu 14 % de son budget et en 2016 et en 2017, elle a perdu 17 % de son budget. Du budget total, 85 % correspondent au salaire. Les responsables du budget envisageaient d'avoir à réduire l’effectif par environ 200 personnes par année.

227        L’équipe de gestion a présenté un certain nombre de recommandations à la haute direction nationale. Il était nécessaire de protéger les voyageurs publics, il n’y avait d’autre choix que de payer les frais fixes, il était nécessaire de maintenir la formation des agents et il était nécessaire de s’acquitter des obligations en vertu de la convention collective.

228        Le taux de départs découlant de la retraite des enfants de l’après-guerre engendrait de 8 % à 9 % au titre d’économies budgétaires. Toutefois, il existait quand même une insuffisance d’environ 3,78 millions de dollars en crédits salariaux.

229        M. Guindon s’est présenté devant le Conseil de gestion de la dotation et a expliqué qu’il devait mettre à pied environ 75 employés, à moins que le Conseil ne lui permette de continuer avec un déficit. L’Aviation civile a été en mesure de garder tous les postes. Toutefois, elle savait que plus de difficultés surviendraient relativement aux opérations s’il n’y avait pas des départs entièrement à l’échelle de l’organisation puisque certains secteurs subiraient plus de préjudices étant donné qu’ils ne seraient pas en mesure de remplacer les employés qui partaient.

230        L’engagement a été pris de garder toutes les personnes qui souhaitaient rester. Cela exigeait un remaniement de l’organisation en sachant que les personnes ne seraient pas heureuses. Les dispositions nécessaires ont été prises pour doter 15 postes externes critiques pendant six mois lorsqu’il était prévu que l’organisation ne serait pas en mesure d’offrir le service.

231        Il a produit le budget de 2016-2017 de l’Aviation civile. Il avait été préparé par le personnel et les services de gestion aux fins de discussion avec le Conseil de gestion de la dotation et de son approbation. Le document comporte une liste des activités de l’Aviation civile faisant partie de l’enveloppe salariale, ainsi que ses frais de fonctionnement. Les activités sont classées d’élevé à faible en ce qui concerne la priorité de l’importance. Certaines activités sont indiquées comme n’étant pas financées.

232        Il a renvoyé au point intitulé [traduction] « Coûts des vols spécialisés ». Il comportait des colonnes représentants les différentes régions du pays et il indique un total de 2 millions de dollars. Il a déclaré que les dépenses habituelles au cours des dernières années liées au programme de vol, y compris les fonds affectés aux services aériens, variaient de 3,5 millions de dollars, à 3,8 millions de dollars et à 4,1 millions de dollars. Elles s’élevaient et baissaient en fonction du financement disponible. Au cours des bonnes années, l’Aviation civile pouvait affecter plus de fonds au programme de vol. Une autre enveloppe était disponible afin de permettre aux inspecteurs de maintenir leurs qualifications dans le cadre d’un programme de vol spécialisé afin qu’ils puissent maintenir leurs connaissances d’aéronefs particuliers, de veiller à ce qu’ils puissent exercer les activités d’accréditation ou de surveillance. Ce financement s’élevait à environ 2,7 millions de dollars. Le financement disponible pour le programme de vol en général s’élevait à environ 6,8 millions de dollars.

233        Il a expliqué son problème à l’égard du Conseil de gestion de la dotation était qu’il devait continuer d’exercer des activités de surveillance, de ne mettre personne à pied et de réduire le budget, passant de 6,8 millions de dollars à 5,5 millions de dollars. Cela a été réalisé en demandant au Service des aéronefs de réduire ses coûts de 300 000 $ à 500 000 $ et de réduire ses coûts liés aux vols spécialisés, passant de 2,7 millions de dollars à 2 millions de dollars. Cela donnerait lieu à une réduction de 19 % des coûts liés aux vols spécialisés par rapport à une réduction de 45 % des opérations. L’Aviation civile n’a pas été en mesure de réduire ses coûts liés au programme de vol à 5,5 millions de dollars. Elle avait un manque d’environ 300 000 $ à la fin de l’exercice.

234        L’Aviation civile a été en mesure de réaliser des économies en réduisant les coûts des services d’aéroport et plus particulièrement les décisions de ne plus offrir le programme de vol régulier à Moncton, à Victoria et à Québec. La direction de l’Aviation civile estimait qu’elle continuait de respecter la convention collective.

a. Contre-interrogatoire

235        On a laissé entendre à M. Guindon que le 1er avril 2016, l’employeur avait mis en œuvre des changements au programme de vol. Il n’était pas certain ce à quoi renvoyait l’avocat. Il lui a été suggéré que l’employeur avait changé l’application du programme, c.-à-d. il décidait qui était affecté à un programme de vol régulier et qui était affecté à un autre programme. Il a déclaré [traduction] : « Conformément aux droits de la direction en vertu du PMCA ».

236        Il a été renvoyé à son courriel du 31 mars 2016 portant sur l’examen des économies du programme de vol. On lui a suggéré que le Ministère avait changé qui était affecté à un programme de vol régulier ou à l’autre programme de vol. Il a répondu que le PMCA assure le droit de la direction de décider qui est affecté à quel programme. En 2012, les bases à Edmonton et à Calgary ont été fermées et la direction a décidé qui serait affecté à quel programme. Ce n’est pas ce qu’indique ce courriel.

237        On lui a demandé si l’admissibilité à un programme de vol régulier dans certains lieux avait été éliminée. Il a répondu que dans certains lieux, les pilotes n’étaient plus admissibles à participer à un programme de vol régulier.

238        On lui a demandé si, à la date de l’avis de négocier en septembre 2014, les employés à Halifax, à Prince George, à Kelowna et à Victoria avaient accès à un programme de vol régulier.

239        Il a déclaré que Victoria, Québec et Moncton, où un hélicoptère avait été vendu, avaient vécu des changements. Calgary et Edmonton ont fermé en 2012. Il ne pouvait pas se rappeler si les employés à Halifax suivaient une formation à Moncton. Aucun avion n’était basé à Halifax. Il a déclaré que le Ministère n’avait pas éliminé une base d’opérations pour des aéronefs depuis 2012, autre que Moncton, aux fins de l’hélicoptère qui était piloté pendant 40 à 50 heures par année.

240        Les employés à Victoria, à Québec et à Moncton n’étaient plus admissibles au programme de vol conformément au PMCA puisque la direction pouvait exercer sa prérogative pour les affecter à un autre programme.

241        Avant le 1er avril 2016, certains de ces employés étaient admissibles au programme de vol régulier. Après cette date, le Ministère a maintenu le même nombre d’heures pour un programme de vol régulier, dont certaines étaient encore redistribuées aux centres plus importants. Le ministère a équilibré de nouveau les heures afin de veiller à ce qu’elles soient distribuées équitablement dans l’ensemble du pays.

242        Le budget alloué aux fins du programme de vol dans la région des Prairies qui avait été affecté à Calgary et à Edmonton a été attribué à Winnipeg. Le nombre total d’heures disponibles aux fins du programme de vol n’a pas changé.

243        De même, plus d’employés pouvaient accéder au programme de vol à Montréal ou à Vancouver. Des économies ont été réalisées. Il lui a été suggéré que le Ministère a réalisé des économies en éliminant l’admissibilité de certains employés au programme de vol régulier. Il a déclaré que s’il prenait les dispositions nécessaires pour qu’une personne se rende de Québec à Montréal en vue d’accéder à un programme de vol, le Ministère engagerait des coûts supplémentaires en plus du programme de vol. Il a demandé de protéger l’enveloppe de vol.

244        Il lui a été suggéré que seul un employé à Québec pourrait accéder à l’autre programme. Il s’est dit d’accord et a affirmé qu’il en était de même à Calgary et à Edmonton.

245        M. Guindon a été renvoyé à l’énoncé figurant dans son courriel du 31 mars 2016 qui indiquait ce qui suit : [traduction] « Les autres programmes de vol seront augmentés dans la région de la capitale nationale (RCN) à l’aide d’autres moyens établis, comme les simulateurs. Cela va de pair avec la mise en œuvre de l’hélicoptère Bell 407 et le nouveau simulateur d’hélicoptère à Ottawa […] ». Il indiquait également que [traduction] « [d]eux hélicoptères Bell 206 sous-utilisés – un à Moncton et un à Ottawa – seront retirés du service ». On lui a demandé si cela signifiait une réduction du programme de vol régulier.

246        Il a déclaré que cette mesure avait pour objet de remplacer les hélicoptères Bell 206 par un équipement de nouvelle génération et d’accroître l’autre programme aux fins des hélicoptères.

2. M. Collins

247        M. Collins a été renvoyé au document intitulé [traduction] Changements au programme de vol à compter du 1er avril 2016. Il a déclaré que la direction était d’avis que ceux-ci ne constituaient pas des changements au programme de vol. L’employeur a commencé à gérer une autre section de l’environnement protégé dont il avait été convenu avec l’APFC. Elle a choisi de gérer le programme dans le cadre de la portée du PMCA de manière différente par rapport aux années antérieures.

248        L’orientation est claire que la direction a respecté les conditions d’emploi du groupe AO et qu’elle a respecté la convention collective. Rien n’a été fait pour toucher ce fait.

249        Des changements ont été apportés relativement à l’affectation des employés au programme de vol, tel que cela est indiqué dans le résumé. Des contraintes budgétaires étaient imposées à Transports Canada. À l’aide des ressources disponibles, la direction devait trouver une façon de gérer le programme de vol en respectant la portée en ce qui concerne ce que le PMCA permettait et permet.

250        Les décisions concernant la formation étaient fondées sur les pressions de réduire les ressources. La direction a examiné les économies du programme. À compter du 1er avril 2016, l’Aviation civile a exécuté un programme de vol en vue de respecter la convention collective et le PMCA. L’autre programme de vol a été augmenté dans la RCN.

251        Un hélicoptère Bell 407 nouvellement acquis était disponible aux fins de formation. Deux hélicoptères Bell 206 sous-utilisés ont été retirés du service. Moncton avait un hélicoptère qui était disponible pour un seul inspecteur, ce qui constituait un arrangement inefficace. La direction a effectué un examen des besoins opérationnels en vue de déterminer les économies nationales.

252        Avant avril 2016, quelques lieux qui avaient été à la disposition des CAI ou des PET participant au programme de vol régulier avaient déjà été fermés, y compris Edmonton, Saskatoon et Thunder Bay. À compter du 1er avril 2016, St. John’s, Halifax, Québec, Sudbury, Calgary, Prince George, Kelowna et Victoria ne seraient plus disponibles aux fins du programme de vol régulier.

253        M. Collins a déclaré que la direction a continué de gérer comme elle l’avait fait au cours des années antérieures. Ce n’était pas efficace d’offrir le programme de vol régulier à un lieu où il n’y avait aucun aéronef.

254        Les employés qui avaient accédé dans le passé au programme de vol régulier ont été affectés à l’autre programme de vol qui leur permettrait de maintenir leurs compétences en accédant à un autre programme convenu par les parties au PMCA.

a. Contre-interrogatoire

255        M. Collins a convenu que des changements au PMCA devaient être apportés par consentement mutuel aux réunions du comité directeur et non dans le cadre de la négociation collective.

256        Il a affirmé que le PMCA et son annexe constituent l’environnement protégé dans lequel l’employeur doit travailler. On lui a demandé si, dans le cas où il souhaitait instaurer un changement, il devait le faire par l’intermédiaire du comité directeur.

257        Il a répondu qu’il était nécessaire de définir le terme « changement ». S’il souhaitait changer les critères d’affectation à un programme de maintien des compétences, il s’agirait d’un nouvel élément dans l’environnement protégé qui exigerait l’acquiescement du comité directeur.

258        Il a convenu que dans le cadre de la détermination de la question de savoir si un CAI jugé médicalement apte devrait être affecté à un programme de vol régulier ou à un autre programme de vol, le Ministère tient compte du lieu où le CAI travaille, des besoins du Ministère et des ressources disponibles. Le lieu où le CAI travaille comprend l’installation, la division et son emplacement géographique. Les tâches du CAI doivent exiger le pilotage. Un emplacement géographique qui exclut cette possibilité empêche une affectation à un programme de vol régulier, tel que cela est énoncé à l’alinéa 5.1.3d) du PMCA.

259        Le paragraphe 5.2.1 du PMCA traite du processus et énonce les critères que l’employeur doit appliquer pour affecter un CAI à un autre programme de vol après que la décision a été prise d’affecter un employé à un autre programme de vol.

260        Il décrit le processus de détermination de qui a droit à un programme de vol régulier et les exclusions sont énumérées au paragraphe 5.1.3. Si une personne est admissible à un programme de vol, le paragraphe 5.3.1 énonce les critères et le processus de détermination d’une liste de statut prioritaire. Celles qui n’ont pas accès à un programme de vol régulier sont affectées à l’autre programme, conformément aux critères prévus au paragraphe 5.2.1.

261        L’employeur ne gèle pas le processus pendant la négociation collective. Il travaille au sein de l’environnement protégé du PMCA. Il s’agit d’un processus dynamique. L’employeur tient compte des ressources disponibles pour gérer le programme; il est dans l’environnement protégé.

262        M. Collins a été renvoyé aux changements apportés au programme de vol à compter du 1er avril 2016. Lorsqu’on lui a demandé si, en raison des pressions sur les ressources, l’employeur a géré le PMCA de manière différente, il a répondu par l’affirmative, dans les limites de l’environnement protégé.

263        On lui a demandé où se trouvait dans l’environnement protégé le pouvoir de l’employeur d’apporter des changements en raison de réduction des ressources. Il a répondu qu’aucun changement n’a été apporté aux critères énoncés dans le PMCA. L’obligation de l’employeur consiste à affecter un CAI à un programme. Il a reconnu qu’aucun des critères prévus dans le PMCA ne mentionnait les coûts.

264        Il a convenu que les employés dans des villes sans aéronefs n’étaient pas admissibles au programme de vol régulier, conformément à l’alinéa 5.1.3d) de la politique. Il a convenu que la direction avait décidé qu’à compter du 1er avril 2016, si le lieu ne comptait aucun aéronef, le CAI ne pouvait pas avoir accès à un programme de vol régulier. Il a ajouté qu’aux lieux où un aéronef était disponible, davantage de personnes se voyaient accorder un accès à compter de cette date. Si aucun aéronef n’était disponible, il n’était pas efficace d’affecter un CAI à un programme de vol régulier.

265        Cela s’est également produit l’année précédente. D’autres emplacements géographiques inscrits à la liste ont été fermés avant cette date. Ce n’était pas la première fois que cela se produisait. Au cours des années antérieures, des hélicoptères avaient été vendus et des aéroports avaient été fermés. On lui a demandé si cela a eu lieu pendant le gel prévu par la loi. Il a déclaré qu’en 2015, des aéronefs avaient été vendus, il estimait à Edmonton.

266        On lui a demandé si, à la date à laquelle l’avis de négocier a été donné, les employés à Québec étaient admissibles au programme de vol régulier. S’ils n’y avaient pas accès, alors les employés à Montréal avaient un accès accru.

267        Le PMCA est évalué tous les ans, conformément aux critères énoncés à son article 5. Ce qui est possible une année peut changer la prochaine année, puisque les critères sont évalués de nouveau. On ne peut pas supposer qu’après avoir été affectée à un programme, une personne y sera affectée l’année suivante, puisque les besoins du Ministère sont évalués de nouveau tous les ans. Si 10 personnes prenaient leur retraite, cette situation déclencherait une nouvelle évaluation.

268        On lui a suggéré que le budget avait été modifié. Il a répondu qu’en fait, il n’y avait aucun avion à ce lieu et que ce qui avait changé était la possibilité d’avoir accès à un programme de vol régulier dépendait de la question de savoir si un aéronef se situait à un lieu donné.

269        À Moncton en 2015, les employés avaient accès au programme de vol régulier puisqu’un hélicoptère était disponible. En 2016, il a été vendu et les employés n’avaient pas accès au programme de vol régulier. M. Collins a déclaré que puisqu’un seul employé était situé à Moncton, il n’était plus possible d’y maintenir un hélicoptère pour une seule personne puisque cela empêchait d’autres employés à accéder au programme de vol régulier. Il ne pouvait pas se rappeler s’il s’agissait de sa décision de vendre l’hélicoptère.

b. Programme de vol régulier et respect de l’exigence de 48 heures

270        M. Collins a clarifié que les critères énoncés au paragraphe 5.2.1 du PMCA ne sont déclenchés qu’après que l’employé a été affecté à un autre programme de vol. On lui a demandé quand la question de ressource entre en jeu. Chaque octobre, la direction examine les ressources, y compris le budget. Elle demande si des aéronefs et de l’équipement sont disponibles. Selon le nombre d’employés à former, elle évalue la possibilité de les former au moyen d’une affectation à un programme de vol régulier ou à un autre programme de vol.

271        Il a été interrogé au sujet des types de changements au PMCA qui doivent être effectués par consentement mutuel. Il a répondu que si le libellé était changé, le texte était modifié ou les paramètres de l’environnement protégé étaient changés, ces changements exigeraient un consentement mutuel. Il a déclaré que l’affectation des employés à un PMCA n’exige pas un consentement mutuel.

C. Arguments de l’APFC

272        Tous les membres de l’Association, qui sont des employés de Transports Canada et du BST, sont des pilotes chevronnés qui doivent maintenir leurs compétences afin de s’acquitter de leurs obligations d’emploi. Le pilotage d’aéronef est essentiel à l’exécution de leurs tâches pour le compte du public. Ces exigences sont énoncées dans la « Norme sur les qualifications » du Conseil du Trésor et dans la définition du groupe AO.

273        Les parties ont reconnu ces exigences en s’engageant à maintenir les compétences de pilotage. Cet engagement est reconnu à l’article 47 de la convention collective, ainsi que dans les PMCA de Transports Canada et du BST, qui peut être modifié uniquement par consentement mutuel des parties.

274        À la fin de 2015, l’Association a pris connaissance de renseignements anecdotiques fournis par les membres ayant trait à une annulation partielle ou totale du PMCA, supposément en raison de contraintes budgétaires.

275        Au moyen d’un courriel en date du 3 février 2016, à l’intention de Mme Kinney, la SMA, l’Association a exprimé ses préoccupations quant à l’inobservation apparente des exigences obligatoires du PMCA, apparemment pour des raisons budgétaires. M. McConnell, le président national de l’Association, a rappelé à l’employeur que les parties participaient à une négociation collective et qu’il était assujetti aux dispositions de la Loi portant sur le gel prévu par la loi.

276        Lorsqu’il a été confronté à l’aide de ces renseignements, le 25 février 2016, M. Guindon a adopté la position selon laquelle les programmes de formation et de vol ne comportaient aucune restriction. Il a indiqué qu’aucun changement n’avait été apporté au PMCA et que l’employeur s’efforçait de s’assurer que les dispositions de l’article 47 de la convention collective étaient respectées à l’égard de tous les membres du groupe AO. Il a indiqué qu’il considérait l’affaire close jusqu’à ce que les parties se rencontrent en mai 2016.

277        Toutefois, le 30 mars 2016, Transports Canada a informé l’APFC qu’il réduirait unilatéralement les programmes du PMCA. À compter du 1er avril 2016, l’employeur effectuerait ce qui suit :

  1. limiter les programmes de vol réguliers aux employés à Vancouver, à Richmond, à Abbotsford, à Winnipeg, à Hamilton, à Toronto, à Montréal et à Moncton;
  2. éliminer les programmes de vol réguliers à l’égard des pilotes employés à Halifax, à Québec, à Prince George, à Kelowna et à Victoria;
  3. augmenter les autres programmes de vol dans la RCN à l’aide de simulateurs;
  4. éliminer deux hélicoptères Bell 206 du service.

278        Les réductions apportées au PMCA que les défendeurs ont imposées unilatéralement sont importantes. Les employés qui s’attendaient raisonnablement à être affectés à un programme de vol régulier au moment où l’avis de négocier a été donné n’étaient plus admissibles à piloter des aéronefs à compter du 1er avril 2016.

279        La nouvelle politique constituait un changement réel et fondamental aux conditions d’emploi.

280        Ce changement a eu lieu moins d’un mois après que M. Guindon a assuré l’Association qu’il n’y avait aucune restriction imposée sur le programme de vol et pendant que les parties participaient à des négociations, au cours desquelles le PMCA constituait, pour les membres de l’Association, la principale question à négocier.

a. Article 107 de la Loi

281        Les actes des défendeurs contrevenaient à la disposition sur le gel prévu à l’art. 107 qui énonce qu’une condition d’emploi qui peut figurer dans une convention collective et qui est en vigueur au moment où l’avis de négocier a été donné jusqu’à la conclusion d’une convention collective ou jusqu’à ce qu’une grève puisse être déclarée sans contravention. Le PMCA pourrait constituer une condition d’emploi de la prochaine convention collective et représente la principale proposition de l’agent négociateur visée à la table des négociations.

282        L’article 107 de la Loi vise à geler toutes les conditions d’emploi pendant les négociations d’une convention collective. Il vise à veiller à ce que le statu quo demeure inchangé pendant les périodes pertinentes. Il faut qu’il y ait un cadre de référence constant et stable servant de point de départ pour la négociation. L’objectif de la disposition sur le gel a été énoncé dans Canada (Conseil du Trésor) c. Association canadienne du contrôle du trafic aérien, [1982] 2 C.F. 80 (C.A.), au paragraphe 24, dans laquelle la Cour d’appel fédérale a conclu comme suit (veuillez noter que l’article 51 de l’ancienne LRTFP était la disposition sur le gel prédécesseur à l’article 107 de la Loi) :

24 L’article 51 de la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique vise à maintenir le statu quo pour ce qui est des conditions d’emploi pendant que les parties entreprennent la négociation d’une convention. Il s’agit là d’une version particulière d’une disposition qu’on trouve généralement dans la législation ouvrière, destinée à promouvoir une négociation collective ordonnée et équitable. Il faut qu’il y ait un cadre de référence constant et stable servant de point de départ pour la négociation. Il ne faut donc pas donner de cette disposition une interprétation rigide qui lui ferait échec.

283        En conséquence, l’objectif d’un gel prévu par la loi est de s’assurer que tout le monde est sur un pied d’égalité tout au long des négociations en empêchant que l’imposition unilatérale de la position de l’employeur sur les conditions à négocier.

284        Dans Canadian Air Line Pilots Association v. Air Canada (1977), 24 di 203 (tel qu’elle est citée dans Alliance de la fonction publique du canada c Conseil du trésor (Agence des services frontaliers du Canada), 2016 CRTEFP 19, au paragraphe 74, le CCRT a indiqué ce qui suit :

[Traduction]

[…]Parlement est conscient que c’est ce dernier qui, dans le cours normal des choses, est en mesure d’influencer le déroulement des événements à la table de négociation en prenant des décisions touchant ses opérations sans au préalable consulter le syndicat. En prenant de telles décisions et en agissant de façon unilatérale, l’employeur peut miner le pouvoir de l’agent négociateur représentant les employés, empoisonner l’atmosphère dans laquelle se déroulent les négociations collectives et, par la même occasion, déclencher un conflit de travail légal ou illégal qu’on aurait pu autrement éviter. Ces initiatives unilatérales sont contraires à l’esprit de collaboration auquel la Partie V du Code canadien du travail fait allusion et que le législateur a cherché à promouvoir.

La portée des restrictions visées par l’alinéa 148b) est délibérément élargie par rapport aux conventions collectives antérieures. Désormais, les négociations entre un syndicat et un employeur ne se limiteront plus aux sujets abordés dans les conventions collectives précédentes. […] Le syndicat peut chercher à négocier toute question relative aux conditions de travail, que celle-ci figure dans des contrats de travail individuels ou dans une convention collective précédente ainsi que toute autre question caractérisée par le Parlement comme étant tout « droit ou privilège des employés de l’unité de négociations ». Il peut aussi chercher à négocier tout ce qui concerne un « droit ou privilège de l’agent négociateur » que ceux-ci aient été acquis par le biais d’une convention collective antérieure ou autrement par le syndicat. […]

Notre interprétation de l’objet de l’alinéa 148b), notamment de protéger les droits exclusifs de l’agent négociateur susceptibles d’être compromis par une initiative unilatérale de l’employeur, de susciter un esprit de collaboration lors des négociations collectives et du règlement positif des différends, correspond à l’exigence mentionnée à l’alinéa 148b) voulant que l’employeur ne peut apporter des modifications qu’avec le consentement de l’agent négociateur. Ce consentement exige de l’employeur qu’il reconnaisse les prérogatives et le rôle de l’agent négociateur et nécessite des communications entre l’employeur et l’agent négociateur, favorisant ainsi une solution mutuellement acceptable protégeant les intérêts de chaque partie.

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

285        L’article 107 vise à préserver les conditions de travail telles qu’elles sont au moment où les négociations sont entamées afin de permettre une négociation collective appropriée. En modifiant les conditions de travail après le début des négociations, les défendeurs ont imposé une autre réalité sur le point de départ de l’agent négociateur.

286        Cet article vise non seulement les conditions qui sont déjà prévues dans la convention collective, mais également celles qui « peuvent » y être incluses. La décision dans Association canadienne du contrôle du trafic aérien (C.A.) demeure la décision de principe portant sur cette question. Dans cette affaire, la Cour d’appel fédérale a décidé qu’une condition d’emploi peut prendre la forme d’une entente ou d’un exercice unilatéral du pouvoir de gestion, après consultation. La Cour a accepté que la politique sur les heures supplémentaires en litige dans cette affaire, selon laquelle les employés pouvaient travailler des heures supplémentaires uniquement sur une base volontaire qu’il soit le résultat d’un accord ou de l’exercice du pouvoir de direction, constituait une condition d’emploi parce que « […] cette politique était une mesure des droits et des obligations. Elle pourrait entraîner des conséquences juridiques. »

287        Il est incontestable que le PMCA a été établi par consentement mutuel et que tout changement qui y est apporté doit également être effectué de cette façon. Les défendeurs avaient adopté la position selon laquelle même si Transports Canada avait décidé unilatéralement d’éliminer l’admissibilité à un programme de vol régulier à plusieurs lieux, il n’y a eu aucune contravention du gel prévu par la loi parce que tous les CAI continuaient de suivre un type de programme quelconque.

288        En toute déférence, la position des défendeurs à cet égard ne peut être maintenue. Il faut trancher la question suivante : lorsque l’avis de négocier a été donné, l’admissibilité à un programme de vol régulier constituait-elle une condition d’emploi des employés touchés?

D. Arguments de l’employeur

289        Dans Association canadienne du contrôle du trafic aérien (C.A.), au paragraphe 18, la Cour d’appel fédérale a énoncé l’objectif du prédécesseur de l’article comme suit : « […] de maintenir, après avis de l’intention de négocier, les rapports employeur-employé, pour ce qui est des conditions d’emploi qui ont cours à la veille de cet avis ».

290        George Adams, dans son ouvrage Canadian Labour Law, deuxième édition, page 10-91, décrit comme suit les différentes approches :

[Traduction]

[…] les gels en vertu de la loi visent au moins deux objectifs possibles. L’un de ces objectifs est représenté par l’analyse s’appuyant sur le principe de la poursuite des activités normales, où l’on met l’accent sur le maintien des principales conditions d’emploi jusqu’à la fin de négociations […]. Cette approche ne cherche toutefois pas à maintenir le statu quo en tant que tel, mais plutôt à prévenir les changements qui se démarquent de ce qui s’est fait par le passé. Ce point de vue fait valoir que les affaires et la vie au travail doivent se poursuivre […]. L’autre point de vue, au contraire, est caractérisé par le maintien du statu quo, littéralement. […] La difficulté de cette approche repose sur son incapacité à permettre la mise en œuvre de changements nécessaires et inévitables, ou encore le prix artificiellement élevé qui peut être demandé pour certains changements dans ces circonstances.

291        La décision de principe portant sur l’approche de la poursuite des activités normales est la décision de la CRTO dans S.P.A.T.E.A. v. Spar Aerospace Products Ltd., [1978] CarswellOnt 1117, au paragraphe 19, dans laquelle il a énoncé que l’intention du législateur en ce qui concerne le gel prévu par la loi était de maintenir la tendance antérieure de la relation d’emploi dans son ensemble.

292        Le critère « poursuite des activités normales » découle du libellé de l’article 107 de la Loi.

293        Selon la position des défendeurs, les décisions prises relativement à la gestion du PMCA constituaient le simple exercice d’un pouvoir discrétionnaire qui permet à l’employeur de gérer ses activités et qu’elles n’étaient pas visées par les dispositions portant sur le gel prévu par la loi aux termes de l’article 107 de la Loi.

294        L’APFC a soutenu que l’employeur avait réduit ou annulé unilatéralement le PMCA pendant la période de gel, ce qui constituait un changement important aux conditions d’emploi de ses membres, contrairement à l’article 107 de la Loi.

295        Les défendeurs ont fait valoir que l’argument de l’APFC est trompeur puisqu’il porte à croire que le PMCA a été modifié sans qu’il n’ait été négocié avec l’APFC, ce qui n’est pas le cas. Le PMCA n’a jamais été modifié et les actes de Transports Canada ne constituaient rien de plus que la mise en œuvre des dispositions du PMCA qui étaient toujours disponibles en tant qu’options dans le cadre du programme de vol. Il se peut qu’ils aient été promulgués en tant que changements, mais ils constituaient en fait simplement la gestion et l’application du PMCA, tel qu’il a été négocié à l’origine avec l’APFC.

296        Tel que cela est indiqué dans l’avant-propos du PMCA, les CAI et les PET ont la possibilité de maintenir leur compétence professionnelle en aviation, conformément à la convention collective, et c’est l’employeur qui leur offre cette possibilité. Transports Canada affecte un employé à un PMCA conformément à cette politique. Le programme auquel un pilote individuel est affecté peut être à un programme de vol régulier comptant au minimum 48 heures de vol par an ou à un autre programme de vol.

297        Le PMCA est entré en vigueur en 2007, et l’employeur et l’APFC l’ont élaboré conjointement. Il ne fait pas partie de la convention collective. Il est administré par le comité directeur. Les articles les plus pertinents du PMCA en l’espèce sont les suivants :

[…]

3.1.1 Tous les CAI et les ETP de TC jugés médicalement seront affectés par la direction de TC à un programme de maintien de la compétence professionnelle en aviation. Ce programme peut être un programme régulier comportant au minimum 48 heures de vol par exercice financier, conformément au manuel d’utilisation de la DGSA sur des aéronefs du Ministère ou un autre programme de maintien de la compétence professionnelle en aviation approuvé par le Comité directeur du maintien de la compétence professionnelle en aviation.

[…]

5.1.1 L’employeur doit affecter tous les CAI ou ETP jugés médicalement aptes à un programme de maintien de la compétence professionnelle en aviation.

5.1.2 Tous les CAI sont admissibles à une affectation à un programme de vol régulier. L’employeur doit déterminer si un CAI jugé médicalement apte doit être affecté à un programme de vol régulier qui consiste à piloter un aéronef du Ministère pendant au minimum 48 heures par an, ou à un autre programme de maintien de la compétence professionnelle en aviation qui respecte les critères du paragraphe 5.2.1 de la présente politique. Tous les ETP doivent être affectés à un programme de vol approprié à leurs tâches.

5.1.3 Nonobstant la section 5.1.2 ci-dessus, une affectation à un programme de vol régulier sur un aéronef de la DGSA ne sera pas envisagée pour les CAI:

  1. dont les tâches reliées au poste qu’ils occupent au sein de la DGSA les amènent déjà à participer pleinement à des tâches de pilotage;
  2. dont les tâches reliées directement ou indirectement à leur poste exigent qu’ils maintiennent leur compétence sur un aéronef lourd à turboréacteurs (plus de 44 000 lb) et qu’ils soient exposés, de façon continue et d’un point de vue opérationnel, à l’exploitation de grands transporteurs aériens;
  3. qui sont employés par la Division du transport aérien de la Direction générale des opérations nationales; ou
  4. qui sont établis dans un lieu géographique qui ne permet pas l’affectation à un programme de vol régulier.

298        Il convient de noter que l’autre programme de vol a été approuvé par l’APFC et Transports Canada. Le programme offre, dans certains cas, une formation à l’aide de simulateur de vol. Toutefois, la décision d’affecter des employés à un programme de vol régulier ou à un autre programme de vol revient à l’employeur, ce à quoi l’APFC a convenu (paragraphe 3.1.1) et elle n’est pas en litige.

299        Le 31 mars 2016, Transports Canada a décidé d’examiner l’efficacité du PMCA. La nécessité de cet examen découlait des pressions pour réduire les ressources et comprenait des mesures consistant, entre autres, à effectuer ce qui suit :

  • limiter le programme de vol régulier à certains lieux;
  • accroître le programme de vol régulier dans la RCN;
  • éliminer deux hélicoptères du service;
  • remplacer la Lettre de politique 64 par une nouvelle politique.

300        M. Guindon a témoigné longuement au sujet des réductions budgétaires et de la nécessité que l’employeur rationalise et soit plus efficace en ce qui concerne la formation des employés pilotes. L’APFC n’a pas contesté le fait que les contraintes budgétaires devaient être prises en considération dans le cadre des affectations au programme de vol régulier ou à l’autre programme de vol.

301        Il convient de noter qu’il ne s’agit pas de la première fois que Transports Canada a dû prendre des mesures semblables. En 2010, il avait décidé de réduire la taille de la flotte d’aéronefs, ce qui a touché les pilotes dans la RCN. Les pilotes participant à un programme de vol régulier devaient faire la transition vers un autre programme. La décision découlait du dépôt par l’APFC d’un grief de principe et d’une plainte, dont l’arbitre de grief Kydd de la CRTFP a tranché dans Association des pilotes fédéraux du Canada c. Conseil du Trésor (ministre des Transports), 2014 CRTFP 64 (« APFC 2014 »).

302        L’arbitre de grief Kydd a rejeté le grief de politique et la plainte selon laquelle l’employeur s’était livré à des négociations de mauvaise foi. Il a insisté sur le fait que l’APFC accorde un pouvoir discrétionnaire à l’employeur pour déterminer les affectations aux programmes de formation et que les pilotes n’ont pas droit au programme de vol régulier. Il a conclu que le fait de réduire le nombre d’aéronefs se trouvant à Ottawa ne violait pas la convention collective. Le droit contractuel constituait le droit de maintenir sa compétence professionnelle et non le droit de piloter un aéronef.

303        De même, en l’espèce, M. Collins et M. Guindon ont tous les deux témoigné en disant qu’il n’était plus possible pour les pilotes de se rendre à une base principale aux fins d’une formation ou d’une mission sans que Transports Canada engage des coûts déraisonnables. Le PMCA tient déjà compte de ces situations. Le paragraphe 5.1.3 énonce particulièrement : « Nonobstant la section 5.1.2 ci-dessus, une affectation à un programme de vol régulier sur un aéronef de la DGSA ne sera pas envisagée pour les CAI : […] d) qui sont basés dans un lieu géographique qui ne permet pas l’affectation à un programme de vol régulier. […] ».

304        En conséquence, en appliquant les conditions du PMCA, Transports Canada a déterminé que lorsque des avions ou des hélicoptères étaient situés trop loin et lorsqu’il engageait des coûts et des heures déraisonnables, certains pilotes étaient exclus aux fins d’une affectation à un programme de vol régulier.

305        En l’espèce, Transports Canada avait le pouvoir discrétionnaire absolu d’affecter de nouveau les pilotes du programme de vol régulier à un autre programme de vol avant que l’avis de négocier n’eût été donné.Par conséquent, une fois qu’il a été donné, Transports Canada a maintenu la possibilité d’exercer cette discrétion et aucun changement ni aucune modification à une condition d’emploi n’a été apporté, plus particulièrement étant donné que les employés n’ont pas, en soi, un droit de piloter.

306        Une situation semblable a été étudiée dans L’Alliance de la Fonction publique du Canada c. Sa Matjesté la Reine du chef du Canada représentée par le Conseil du Trésor, no de dossier de la CRTFP 148-2-75 (19820406), [1982] C.R.T.F.P.C. no 68 (QL), au paragraphe 16 (« AFPC c. Sa Majesté »), en 1982, dans laquelle la CRTFP a déclaré ce qui suit :

[…]nous concluons que l’employeur n’a pas contrevenu à l’article 51 de la Loi lorsqu’il a établi un nouvel horaire de postes à l’aéroport de Thunder Bay le 10 novembre 1981. La clause 22.05b) prévoit la modification possible des horaires de postes. En d’autres termes, la possibilité d’apporter une telle modification est inhérente à la condition d’emploi dont il est question à la clause 22.05b). Cette possibilité existait avant que l’avis de négocier fût donné et elle a continué d’exister durant la période de « gel » imposée par l’article 51.

307        En outre, il convient de souligner que, dans le passé, Transports Canada a pris des mesures pour limiter le programme de vol régulier, pour fermer des bases dans certaines régions et pour vendre des aéronefs. La décision dans APFC 2014 et les témoignages de M. Collins et de M. Guindon démontrent que l’on peut raisonnablement s’attendre à ce que l’employeur puisse ajuster et exercer son pouvoir discrétionnaire pour réaffecter les pilotes à un autre programme de formation si des questions financières ou budgétaires surviennent.

308        Dans une décision de 1995 concernant la Commission de la capitale nationale (CCN), (Alliance de la Fonction publique du Canada c. Commission de la capitale nationale), dossiers de la CRTFP 148-29-218 et 161-29-761 (19951016), [1995] C.R.T.F.P.C. no 101 (QL), aux pages 29 à 31), la CRTFP devait examiner l’allégation selon laquelle les dispositions portant sur le gel ont fait l’objet d’un manquement lorsque l’employeur a décidé de privatiser et de sous-traiter ses services sur une vaste échelle. La décision a établi que le critère « la poursuite normale des affaires » élaboré par le CCRT s’applique également à l’administration publique fédérale. Elle se lit en partie comme suit aux pages 29 à 31 :

La Commission a décidé que, dans le contexte particulier de la présente affaire, l’interprétation qu’il convient de donner à l’article 52 est celle qui a été adoptée par la Commission des relations de travail de l’Ontario en 1978 dans les décisions Spar Aerospace (précitée) et Simpson (précitée) où elle s’est prononcée sur une disposition semblable.[…].

En ce qui concerne les deux plaintes dont la Commission est saisie ici, la preuve a démontré que la CCN était aux prises avec de graves difficultés financières depuis dix ans. Au cours de cette période, elle a adopté un certain nombre de mesures en vue de réduire ses dépenses en commençant par son budget d’investissement, puis son budget de fonctionnement. Elle a aussi diminué ses frais d’administration en fusionnant des services et en ramenant de onze à cinq le nombre de vice-présidents. La fusion des services a entraîné l’abolition de 229 postes au cours des cinq dernières années.

[…]

À notre avis, il n’est pas interdit à la CCN d’exercer les droits explicites dévolus à la direction, droits qui sont maintenus par le gel imposé par la Loi. La CCN a déjà sous-traité ses services […]

[…]

Pour conclure, la Commission des relations de travail de l’Ontario a reconnu le droit de mise en disponibilité de la direction durant le gel sous réserve de « la poursuite normale des affaires ». Toutefois, en l’occurrence, nous sommes face à une situation où le gouvernement du jour a sabré dans les fonds alloués à la CCN, et celle-ci a dû composer avec un budget considérablement réduit.

Étant donné qu’il y a une raison valable de réduire le personnel et compte tenu de l’ensemble des circonstances entourant la décision de la CCN de mettre en disponibilité la moitié des employés faisant partie de l’unité de négociation, la Commission estime qu’il n’y a pas eu violation du gel imposé par la loi.

309        En ce qui concerne les principes d’attentes raisonnables, de justifications valables et de justifications économiques, voir Alliance de la Fonction publique du Canada c. Conseil du Trésor, 2016 CRTEFP 107; Royalguard Vinyl Co. v. United Steelworks of America, [1994] OLRB Rep. January 59; B.F.C.S.D. v. Simpsons Ltd., 1985 CarswellOnt 1207; Association canadienne du contrôle du trafic aérien c. Conseil du Trésor, dossier de la CRTFP 148-02-186 (19910724), [1991] C.R.T.F.P.C. no 185 (QL).

310        Les défendeurs ont soutenu que l’employeur avait le droit de gérer ses activités, ce qui n’est pas écarté par les dispositions portant sur le gel. En l’espèce, Transports Canada n’a rien fait de plus que de gérer ses activités conformément aux paramètres du PMCA, qui a été établi conjointement avec l’APFC.

E. Réponse de l’APFC

311        L’APFC a indiqué qu’aux paragraphes 25 à 31 de son argumentation écrite, les défendeurs se sont fortement appuyés sur APFC 2014.

312        L’APFC fait respectueusement valoir que les questions examinées par l’arbitre de grief Kydd étaient dans le contexte d’un grief de principe, dans lequel une violation d’une convention collective était alléguée, ce qui n’est pas la question dont la Commission est saisie en l’espèce. Selon l’arbitre de grief Kydd, pour que soit accueilli le grief de principe, l’Association devait démontrer qu’il y avait eu violation de la convention collective. Selon les faits dont il était saisi, il a conclu que le fait de réduire le nombre d’aéronefs se trouvant à Ottawa ne la violait pas.

313        L’espèce s’apparente davantage à la décision récente de la Commission dans Union of Canadian Correctional Officers – Syndicat des agents correctionnels du Canada – CSN c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada), 2017 CRTESPF 6. Dans cette décision, l’agent négociateur a soutenu qu’un changement de politique relativement à la façon dont ses membres avaient droit à un congé payé pour accident de travail avait été effectué pendant la période du gel législatif. Selon la position de l’employeur, aucun changement n’avait été apporté à sa politique, mais certains éclaircissements y avaient été apportés pendant la période pertinente.

314        La commissaire Perrault a conclu que l’employeur avait violé l’article 107 de la Loi en ce qu’il existait une pratique claire reconnue par les deux parties, que le changement de politique avait une incidence importante sur les employés et que, indépendamment du fait que l’on applique le critère des pratiques courantes en affaires ou le critère des attentes raisonnables, un changement a été apporté à une condition qui pourrait faire partie d’une convention collective.

315        Le PMCA constitue une condition d’emploi. Il pourrait faire partie de la convention collective. Les parties l’ont certainement négocié.

316        À compter du moment où l’avis de négocier a été signifié en septembre 2014 jusqu’au 31 mars 2016, l’employeur et l’APFC avaient une entente selon laquelle les pilotes situés à Halifax, à Québec, à Prince George, à Kelowna et à Victoria étaient admissibles à l’affectation à un programme de vol régulier. Ils n’étaient plus admissibles à piloter un aéronef à compter du 1er avril 2016.

317        Ni l’agent négociateur ni les employés ne s’attendaient à ce que l’interprétation du PMCA à laquelle l’employeur et l’agent négociateur s’étaient engagés par écrit soit carrément réfutée par une annonce unilatérale de Transports Canada le 31 mars 2016 selon laquelle des changements seraient apportés au programme de vol à partir du lendemain.

F. Analyse

318        L’article 107 de la Loi se lit comme suit :

107Une fois l’avis de négocier collectivement donné, sauf entente à l’effet contraire entre les parties aux négociations et sous réserve de l’article 132, les parties, y compris les fonctionnaires de l’unité de négociation, sont tenues de respecter chaque condition d’emploi qui peut figurer dans une convention collective et qui est encore en vigueur au moment où l’avis de négocier a été donné, et ce, jusqu’à la conclusion d’une convention collective comportant cette condition ou :

  1. dans le cas où le mode de règlement des différends est l’arbitrage, jusqu’à ce que la décision arbitrale soit rendue;
  2. dans le cas où le mode de règlement des différends est le renvoi à la conciliation, jusqu’à ce qu’une grève puisse être déclarée ou autorisée, le cas échéant, sans qu’il y ait contravention au paragraphe 194(1).

319        La Cour d’appel fédérale, dans Association canadienne du contrôle du trafic aérien (C.A.), a établi l’objectif de l’article prédécesseur de l’ancienne LRTFP comme suit au paragraphe 18 :

[…]

[…] après avis de l’intention de négocier, les rapports employeur-employé, pour ce qui est des conditions d’emploi qui ont cours à la veille de cet avis. L’un des éléments de ces rapports, quoique non inclus dans la convention collective, était la convention entre les parties selon laquelle le droit de l’employeur d’imposer les heures supplémentaires dans les limites fixées par la convention collective avait été modifié de façon à permettre aux employés de les refuser. Bien qu’il ne s’agisse peut-être pas d’un droit ou d’un privilège susceptible d’exécution forcée au titre de la convention collective, ce droit ou ce privilège était certainement « en vigueur » au déclenchement du gel imposé par l’article 51.

[…]

320        Les dispositions de l’article 107 de la Loi, à toutes fins utiles, sont identiques à celles de l’article 51 de la LRTFP.

321        Les commissions des relations de travail s’efforçaient de déterminer l’approche appropriée pour interpréter le but des dispositions portant sur le gel dans les lois sur les relations de travail. L’honorable George Adams, dans son ouvrage Canadian Labour Law, page 10-91, décrit comme suit les différentes approches :

[Traduction]

[…]les gels en vertu de la loi visent au moins deux objectifs possibles. L’un de ces objectifs est représenté par l’analyse s’appuyant sur le principe de la poursuite des activités normales, où l’on met l’accent sur le maintien des principales conditions d’emploi jusqu’à la fin des négociations […]. Cette approche ne cherche toutefois pas à maintenir le statu quo en tant que tel, mais plutôt à prévenir les changements qui se démarquent de ce qui s’est fait par le passé. Ce point de vue fait valoir que les affaires et la vie au travail doivent se poursuivre […]. L’autre point de vue, au contraire, est caractérisé par le maintien du statu quo, littéralement. Selon ce point de vue, le gel est perçu comme un prélude important à la négociation et attribue une plus grande valeur au processus de négociation collective. En subordonnant les changements à l’accord des deux parties, cette approche permet le maintien d’un "partenariat d’égal à égal", du moins au début des relations fondées sur la négociation collective et pendant les premières étapes de la négociation après la formation des relations. La difficulté de cette approche repose sur son incapacité à permettre la mise en œuvre de changements nécessaires et inévitables, ou encore le prix artificiellement élevé qui peut être demandé pour certains changements dans ces circonstances […]

322        La décision de principe portant sur l’approche de la poursuite des activités normales est Spar Aerospace Products Ltd., dans laquelle la CRTO a énoncé que l’intention du législateur en ce qui concerne le gel prévu par la loi était de maintenir la tendance antérieure de la relation d’emploi dans son ensemble. Elle a déclaré en partie ce qui suit au paragraphe 23 :

L’approche de la poursuite des activités normales ne signifie pas qu’un employeur ne peut continuer de gérer ses activités. Elle signifie simplement qu’un employeur doit continuer de gérer ses activités en poursuivant les habitudes établies avant les circonstances ayant mené au gel, ce qui donne un point de départ clair pour la négociation et élimine l’effet de "douche froide" qu’un retrait d’avantages attendus aurait sur la représentation des employés par un syndicat. […]

323         La CRTFP a également adopté l’approche « poursuite des activités normales ».

324        Il convient de noter que le vice-président Chodos de la CRTFP a énoncé l’approche dans Association canadienne du contrôle du trafic aérien c. Conseil du Trésor, [1991] C.R.T.F.P.C. no 185 (QL). Il a renvoyé au jugement de M. le juge Urie dans L’Association canadienne du contrôle du trafic aérien (C.A.), à la page 89, selon lequel « […]l’objectif manifeste de l’article 51 [est] de maintenir, après avis de l’intention de négocier, les rapports employeur-employé, pour ce qui est des conditions d’emploi qui ont cours à la veille de cet avis ».Comme M. Chodos l’a déclaré à la page 10 : « Le juge Urie faisait allusion à l’ensemble des rapports employeur-employé, et non seulement à certains aspects de ceux-ci. Je suis d’avis qu’il s’agit là d’un exemple d’application du critère de la poursuite des activités normales. »

325        À mon avis, il s’agit d’un exemple de l’application du critère « poursuite des activités normales ».

326        Comme M. Adams l’a fait remarquer dans son ouvrage à la page 10-81, dans Canadian Union of United Brewery, Flour, Cereal, Soft Drink and Distillery Workers c. Simpsons Limited (1985), 85 CLLC 16,035, la CRTO a conclu que le critère de la poursuite des activités normales était efficace dans l’évaluation des privilèges des employés qui ont été gelés en vertu de l’art. 79 (maintenant l’art. 86) de la Loi sur les relations de travail de l’Ontario, mais qu’il était moins efficace pour aborder les événements qui surviennent pour la première fois. Afin de répondre à ces situations, la CRTO a énoncé expressément l’approche [traduction] « attente raisonnable ». Elle a décidé que lorsqu’il s’agit d’événements qui surviennent pour la première fois, plutôt que de mettre l’accent sur la [traduction] « poursuite des activités normales », il faut mettre l’accent sur [traduction] « l’attente raisonnable des employés ».

327        Dans les circonstances particulières de Alliance de la Fonction publique du Canada c. Commission de la capitale nationale, nos de dossiers de la CRTFP, [1995] C.R.T.F.P.C. no 101 (QL), la CRTFP a décidé que l’interprétation qu’il convient de suivre de l’article 52 de la LRTFP était celle adoptée par la CRTO dansles décisions Spar Aerospace Products Ltd. et Simpsons Limited.

328        Dans cette affaire, la plaignante a allégué que les actes de la CCN suivant sa décision de privatiser et de sous-traiter ses services sur une vaste échelle constituaient une modification fondamentale des conditions d’emploi des fonctionnaires qui faisaient partie de l’unité de négociation, contrairement à l’article 52 de la LRTFP.

329        L’agent négociateur a soutenu que la CRTFP devrait faire sienne la notion de gel et qu’une fois le gel imposé, il se crée un partenariat entre l’employeur, l’agent négociateur et les employés de sorte qu’il ne peut y avoir de révision des conditions d’emploi sans l’intervention des partenaires.

330        La CRTFP a conclu que la plaignante n’a pas réussi à se décharger du fardeau de la preuve. La CRTFP n’était pas convaincue, d’après les preuves présentées, que les agissements et les décisions des défendeurs sont contraires aux pratiques commerciales courantes de la CCN. La CRTFP a déclaré ce qui suit à la page 29 :

[…]

La Commission a décidé que, dans le contexte particulier de la présente affaire, l’interprétation qu’il convient de donner à l’article 52 est celle qui a été adoptée par la Commission des relations de travail de l’Ontario en 1978 dans les décisions Spar Aerospace (précitée) et Simpson (précitée) où elle s’est prononcée sur une disposition semblable. […]

[…]

331        La décision a fait l’objet d’un contrôle judiciaire devant la Cour d’appel fédérale, qui a rejeté la demande; voir Alliance de la Fonction publique du Canada c. Commission de la Capitale nationale, [1996] A.C.F. no 57 (C.A.) (QL).

332        Après avoir examiné la jurisprudence, la première question à trancher est celle de savoir si le PMCA constitue une condition d’emploi qui peut être incluse dans une convention collective et qui était en vigueur à la date à laquelle l’avis de négocier a été donné. Contrairement au secteur privé, dans le secteur public fédéral, selon les lois, ces questions outrepassent la portée de la négociation collective et qui peut être incluse dans une convention collective. Afin d’être suivie par le gel, la disposition doit constituer une condition d’emploi qui peut être insérée dans une convention collective et qui est en vigueur le jour où l’avis de négocier est donné.

333        Le PMCA qui est indiqué dans l’entente que Transports Canada et l’agent négociateur ont conclue en 2007 et elle était en vigueur à la date à laquelle l’avis de négocier a été donné. Même si cette entente ne fait pas partie de la convention collective, on n’a pas soutenu que ses dispositions ne pouvaient pas être incluses dans une convention collective si l’employeur en droit, à savoir le Conseil du Trésor, et l’agent négociateur y conviennent dans le cadre de la négociation collective.

334        Je conclus que les dispositions du programme constituaient des conditions d’emploi à compter de la date à laquelle l’avis de négocier a été donné. En application de l’article 107 de la Loi, elles continuent d’être en vigueur et doivent être respectées par les deux parties et les employés faisant partie de l’unité de négociation jusqu’à ce qu’une nouvelle convention collective soit conclue, une décision arbitrale soit rendue ou jusqu’à ce qu’une grève pourrait être déclarée ou autorisée.

335        L’avocat a renvoyé parfois à la jurisprudence tranchée en vertu des dispositions analogues sur le gel des négociations du Code canadien du travail. Même si souvent cette analyse comparative est utile, il faut faire preuve de prudence afin de s’assurer que lorsqu’on renvoie à ces dispositions de la loi, les obligations sont identiques.

336        La disposition sur le gel prévu par la loi du Code canadien du travail, même si elle contient un libellé semblable à celle de la Loi, impose d’autres obligations aux employeurs du secteur privé fédéral qui ne sont pas prévues par la Loi.

337        L’alinéa 50b) du Code canadien du travail dispose ce qui suit lorsqu’un avis de négociation collective a été donné :

50 b) tant que les conditions des alinéas 89(1)a) à d) n’ont pas été remplies, l’employeur ne peut modifier ni les taux des salaires ni les autres conditions d’emploi, ni les droits ou avantages des employés de l’unité de négociation ou de l’agent négociateur, sans le consentement de ce dernier.

[Je souligne]

338        L’article 107 de la Loi continue l’application des conditions d’emploi qui s’appliquent aux employés faisant partie de l’unité de négociation et non leurs droits ou privilèges ni ceux de l’agent négociateur pendant la période du gel. La vaste gamme de questions qui doivent continuer d’être en vigueur en vertu du Code canadien du travail ne continue pas d’être en vigueur pendant le gel de négociation en vertu de l’article 107. Par exemple, voir Association des pilotes d’Air Canada c. Air Canada, 2012 CCRI 644.

339        En l’espèce, la Cour doit décider si l’employeur a continué de respecter les conditions d’emploi prévues dans la convention collective ou le PMCA après que l’avis de négocier a été donné le 25 septembre 2014.

340        Le 31 mars 2016, l’employeur a envoyé un courriel à tout le personnel de l’Aviation civile dans lequel il décrit des changements au programme de vol à compter du 1er avril 2016, en raison de pressions pour réduire les ressources. Le programme de vol régulier a été limité aux employés situés à Vancouver, à Richmond, à Abbotsford, à Winnipeg, à Hamilton, à Toronto, à Montréal et à Moncton. Deux lieux où le programme de vol régulier ne serait plus disponible à compter du 1er avril 2016 étaient Victoria et Québec.

341        Les fermetures d’aéroports avaient déjà été effectuées en 2012-2013, lesquelles comprenaient Sudbury, Thunder Bay et Calgary. De plus, l’aéroport d’Edmonton avait été fermé. Certains éléments de preuve démontrent que l’aéroport de St. John avait été fermé en 2007.

342        L’article 47 de la convention collective se lit comme suit :

47.01 Les parties conviennent que le maintien de la compétence professionnelle en aviation est nécessaire pour permettre non seulement à l’Employeur de remplir son mandat, mais aussi aux employés d’exercer leurs fonctions.

47.02 L’Employeur fournit à chaque CAI jugé médicalement apte l’occasion de maintenir sa compétence professionnelle en aviation en participant au programme de maintien de la compétence professionnelle du Ministère ou à un programme parallèle approuvé par celui-ci.

47.03 Les exigences minimales à satisfaire pour maintenir la compétence professionnelle en aviation sont la possession d’une licence de pilote de ligne et d’une qualification de vol aux instruments du groupe 1 ou du groupe 4/contrôle de la compétence du pilote, ou d’une licence de pilote d’hélicoptère commercial et d’une qualification de vol aux instruments du groupe 4/contrôle de la compétence du pilote.

47.04 L’Employeur affecte chaque employé, conformément aux critères et procédures établis par l’Employeur et le Syndicat, à un programme de maintien de la compétence professionnelle en aviation.

47.05 À l’exception du paragraphe 47.04 qui précède, la politique de Transports Canada sur le maintien de la compétence professionnelle des inspecteurs de l’aviation civile et la politique du BST sur l’actualisation des compétences professionnelles en aviation des CAI ne peuvent être modifiées que par consentement mutuel des parties.

343        Les éléments de preuve selon lesquels en 2007, Transports Canada et l’agent négociateur ont élaboré conjointement le PMCA, ne sont pas contestés. Il est administré par le comité directeur, qui est composé d’un nombre égal de représentants des deux parties. Les dispositions pertinentes aux fins de cette analyse sont les paragraphes 3.1.1, 5.1.1, 5.1.2 et 5.1.3 du PMCA, qui se lisent comme suit :

3.1.1 Tous les CAI et les ETP de TC jugés médicalement seront affectés par la direction de TC à un programme de maintien de la compétence professionnelle en aviation. Ce programme peut être un programme régulier comportant au minimum 48 heures de vol par exercice financier, conformément au manuel d’utilisation de la DGSA sur des aéronefs du Ministère ou un autre programme de maintien de la compétence professionnelle en aviation approuvé par le Comité directeur du maintien de la compétence professionnelle en aviation.

[…]

5.1.1 L’employeur doit affecter tous les CAI ou ETP jugés médicalement aptes à un programme de maintien de la compétence professionnelle en aviation.

5.1.2 Tous les CAI sont admissibles à une affectation à un programme de vol régulier. L’employeur doit déterminer si un CAI jugé médicalement apte doit être affecté à un programme de vol régulier qui consiste à piloter un aéronef du Ministère pendant au minimum 48 heures par an, ou à un autre programme de maintien de la compétence professionnelle en aviation qui respecte les critères du paragraphe 5.2.1 de la présente politique. Tous les ETP doivent être affectés à un programme de vol approprié à leurs tâches.

5.1.3 Nonobstant la section 5.1.2 ci-dessus, une affectation à un programme de vol régulier sur un aéronef de la DGSA ne sera pas envisagée pour les CAI:

[…]

d) qui sont basés dans un lieu géographique qui ne permet pas l’affectation à un programme de vol régulier.

344        Comme cela a été indiqué dans le témoignage, l’autre programme de vol exige que les programmes soient approuvés par Transports Canada et l’agent négociateur. Ils sont énumérés à l’annexe A du PCMA et certains comprennent une formation sur des simulateurs.

345        L’agent négociateur a soutenu que l’employeur avait apporté d’importants changements aux conditions d’emploi de ses membres lorsqu’il a fait des réductions unilatérales aux programmes et que les employés qui s’attendaient raisonnablement à être affectés à un programme de vol régulier au moment où l’avis de négocier a été donné n’étaient plus admissibles à piloter un aéronef à compter du 1er avril 2016.

346        L’employeur a répondu en affirmant que l’argument de l’APFC est trompeur puisqu’il porte à croire que des modifications ont été apportées au PMCA qui n’ont pas été négociées avec l’AFPC, ce qu’il soutient ne pas être le cas. Il fait valoir que le PMCA n’a jamais été modifié et que ses actes ne constituaient rien de plus que la mise en œuvre des dispositions du PMCA qui avaient toujours été disponibles en tant qu’options dans le cadre du programme de vol. Il se peut qu’ils aient été promulgués en tant que changements, mais en fait, ils constituaient simplement la gestion et l’application du PMCA, tel qu’il a été négocié à l’origine avec l’APFC.

347        Tout comme l’employeur a soutenu, il ne s’agissait pas de la première fois que Transports Canada avait pris de telles mesures; en 2010, une décision a été prise de réduire la taille de la flotte d’aéronef dans la RCN, ce qui exigeait que les pilotes qui participaient à un programme de vol régulier devaient être réaffectés à un autre programme. À ce moment-là, l’agent négociateur a déposé un grief de principe national, une plainte de négociation de mauvaise foi et une plainte de pratiques déloyales de travail qui étaient visés par une décision rendue par la CRTFP.

348        Dans APFC 2014, la CRTFP a rejeté le grief de principe et la plainte. Les faits liés à la plainte de négociation de mauvaise foi ne sont pas utiles à régler la plainte en l’espèce.

349        Dans le grief de politique, l’agent négociateur a soutenu que l’employeur avait violé ses droits et les droits des employés en exigeant que les pilotes travaillent à l’administration centrale de l’employeur en vue de participer au PMCA exclusivement au moyen d’une formation par simulateur, à l’exclusion de l’expérience réelle à piloter un aéronef, ce qui contrevenait à la clause 47.041 de la convention collective. Plus particulièrement, l’agent négociateur a affirmé que le « PMCA exige “que les pilotes soient exposés au milieu de vol dans un aéronef” et que la vente des aéronefs de Transports Canada empêchera les employés d’être exposés à un tel milieu, ce qui est contraire au PMCA et à la clause 47.04 de la convention collective […] ». Au moyen d’une mesure correctrice, l’agent négociateur a demandé qu’il soit ordonné à l’employeur d’abandonner sa vente prévue des aéronefs de Transports Canada. Lorsqu’elle a rejeté le grief de principe, la CRTFP a adopté le raisonnement suivant aux paragraphes 83 à 93 :

[83] Dans le grief de principe, l’agent négociateur a affirmé que l’employeur avait violé la clause 47.04 de la convention collective, car il avait exigé que les pilotes travaillant à l’administration centrale participent au PMCA en s’entraînant exclusivement au moyen d’un simulateur de vol, c’est-à-dire sans piloter de véritables aéronefs.

[84] Aucune disposition du PMCA n’indique que l’employeur doit faire participer les CAI et les ETP à un programme de vol régulier. Le PMCA indique plutôt, à la clause 3.1.1, que l’employeur doit les affecter à un programme de maintien de la compétence professionnelle en aviation, qui "peut" être un programme de vol régulier « […] ou un autre programme de maintien de la compétence professionnelle en aviation approuvé par le Comité directeur du maintien de la compétence professionnelle en aviation ».

[85]La clause 5.1.2 du PMCA indique que « [t]ous les CAI sont admissibles à une affectation à un programme de vol régulier », mais elle confère ensuite à l’employeur le droit d’établir si l’employé doit être affecté à un programme de vol régulier ou à un autre programme de maintien de la compétence professionnelle en aviation. Cette section se termine ainsi : « Tous les ETP doivent être affectés à un programme de vol approprié à leurs taches ».

[…]

[90] La clause 5.1.3 du PMCA prévoit que « [n]onobstant la section 5.1.2 ci-dessus, une affectation à un programme de vol régulier […] ne sera pas envisagée pour les CA :

[…]

d) qui sont basés dans un lieu géographique qui ne permet pas l’affectation à un programme de vol régulier.

[91] La clause 3.1.2 du PMCA est pour sa part libellée de la façon suivante :

3.1.2 L’employeur peut modifier de temps à autre le programme de maintien de la compétence professionnelle en aviation auquel un CAI ou un ETP jugé médicalement apte est affecté.

[…] Cela peut résulter du changement des exigences professionnelles ou de la disponibilité d’un programme de vol régulier de la DGSA […]

[92] Dans son ensemble, le libellé de la politique traduit l’intention de conférer à l’employeur le plein pouvoir discrétionnaire de décider qu’une affectation au programme de vol régulier ne pourra pas être faite en raison d’exigences opérationnelles, y compris la non-disponibilité d’un aéronef dans un lieu donné.

[93] Par conséquent, je conclus que le fait de réduire le nombre d’aéronefs se trouvant à Ottawa ne constitue pas une violation de la convention collective. Le droit contractuel constituait le droit de maintenir sa compétence professionnelle, et non le droit de piloter un aéronef.

[Je souligne]

350        Dans sa réponse, l’agent négociateur a fait valoir que les questions examinées par la CRTFP dans cette décision étaient dans le contexte d’un grief de principe dans lequel une violation de la convention collective était alléguée, ce qui n’est pas la question dont la Commission est saisie en l’espèce. La CRTFP a conclu d’après les faits que le fait de réduire le nombre d’aéronefs se trouvant à Ottawa ne constituait pas une violation de la convention collective.

351        En l’espèce, l’agent négociateur a allégué que l’employeur avait contrevenu aux conditions d’emploi qui étaient en vigueur à la date à laquelle l’avis de négocier avait été donné et qui figuraient à la fois dans la convention collective et le PMCA. Sur le plan technique, dans l’affaire de 2014, la CRTFP a décidé que la vente d’aéronefs proposée à Ottawa ne violerait pas la convention collective. Toutefois, à mon avis, une interprétation raisonnable de la décision indique que l’affaire a été débattue et fondée sur l’interprétation du PMCA puisqu’il faisait partie intégrante de l’interprétation de l’article 47.

352        Ce raisonnement me paraît convaincant et je suis d’accord pour dire que le libellé utilisé par les parties est clair et confère à l’employeur un pouvoir discrétionnaire absolu pour déterminer qu’une affectation à un programme de vol régulier ne sera pas effectuée en raison du fait qu’un aéronef n’est pas disponible dans un lieu particulier. Aucun changement n’a été apporté au libellé du PMCA et l’employeur a exercé ses prérogatives, telles qu’elles ont été convenues par les parties.

353        Afin de parvenir à cette conclusion, j’ai tenu compte de la réponse de l’agent négociateur selon laquelle l’espèce s’apparente davantage à la décision de la Commission dans Union of Canadian Correctional Officers – Syndicat des agents correctionnels du Canada – CSN c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada), 2017 CRTESPF 6. Dans cette affaire, les parties avaient conclu une entente globale qui n’était pas visée par la convention collective en vigueur au moment où l’avis de négocier a été signifié que la Commission a conclu constituait une condition d’emploi visée par l’article 107 de la Loi.

354        Il n’était pas contesté que dans cette affaire, l’employeur a changé la politique sur les accidents de travail après qu’un avis de négocier avait été signifié. Il a invoqué le principe des pratiques courantes en affaires, ainsi que son droit de gestion de continuer d’administrer le lieu de travail pendant les négociations. La Commission a conclu que le changement ne pourrait pas être considéré comme une pratique courante en affaire puisqu’il s’agissait d’un écart important de la pratique établie.

355        Contrairement à cette affaire, en l’espèce, il est clair que des mesures visant à limiter le programme de vol régulier consistant à fermer des bases ou à vendre des aéronefs ont été prises dans le passé, comme en témoignent les éléments de preuve et la décision de la CRTFP dans Association des pilotes fédéraux du Canada. À mon avis, la pratique relève de la doctrine de la poursuite des activités normales. Il n’est pas nécessaire d’examiner la doctrine des attentes raisonnables puisqu’il existe une preuve suffisante pour appliquer la doctrine de la poursuite des activités normales, vu la preuve de la pratique antérieure. En conséquence, j’ai décidé que l’agent négociateur n’a pas établi son allégation selon laquelle l’employeur a contrevenu à l’art. 107 de la Loi en faisant unilatéralement des réductions du PMCA.

IV. Question 3 : Annuler la Lettre de Politique et publier les BIP

356        L’Association a allégué que les défendeurs avaient contrevenu au gel prévu par la loi visant les conditions d’emploi, contrairement à l’article 107 de la Loi, lorsqu’ils ont modifié de manière importante les conditions de travail des membres en annulant unilatéralement la Lettre de politique 164 et en mettant en œuvre deux bulletins internes de procédures (BIP) établissant les exigences en formation pour les inspecteurs de la sécurité de l’aviation civile.

A. Pour l’APFC

1. M. McConnell

357        La Lettre de politique 164 avait pour objet de donner une orientation à la direction et aux CAI qui travaillent dans le secteur de l’aviation commerciale et d’affaires concernant les exigences de formation nécessaires pour exécuter leurs tâches et leurs obligations.

358        M. McConnell a appris pour la première fois que Transports Canada annulait la Lettre de politique 164 lors d’une réunion patronale-syndicale sur les relations. L’agent négociateur savait que des travaux étaient exécutés à l’égard d’un BIP, que Transports Canada le rédigeait depuis un certain temps et qu’il avait été mis en suspens. L’agent négociateur a reçu des appels de ses membres l’informant que le bulletin faisait l’objet d’une révision.

359        Le 26 novembre 2015, il a envoyé une lettre à Aaron McCrorie, directeur général de l’Aviation civile, et à M. Guindon, indiquant que l’agent négociateur avait été au courant de ce [traduction] « BIP mal conçu proposé » et de son existence depuis un certain temps. Il a déclaré ce qui suit : [traduction] « Veuillez me dire que cette initiative ne découle pas du fait que l’APFC a déposé l’article 47 lors de la dernière ronde de négociations avec l’employeur. Comme vous le savez, nous sommes en période de gel prévu par la loi. »

360        M. Guindon a répondu en affirmant qu’ils discuteraient de la question le lendemain et qu’il et M. McCrorie n’ont jamais demandé que cela soit indiqué dans le plan de travail. Il avait été demandé il y avait plusieurs années et venait tout juste de figurer au plan de travail. Ils ont demandé qu’il mette fin aux travaux.

361        M. McConnell estimait qu’il serait bien et logique de mettre fin à la révision.

362        Le 15 avril 2016, M. Guindon a envoyé un courriel à M. McConnell. Il y a joint un BIP proposé (qui est devenu le « BIP 2016-05 v.1 ») en vue de remplacer la Lettre de politique 164. Il a déclaré qu’il avait l’intention de publier le BIP la semaine suivante et qu’il serait reconnaissant de recevoir les commentaires de l’agent négociateur au plus tard le mardi 19 avril.

363        Le lundi 18 avril 2016, il a envoyé une lettre à M. Guindon en affirmant ce qui suit :

[Traduction]

[…]

Je vous ai demandé au cours de la réunion sur les relations récentes de vous abstenir de publier ce BIP mal conçu.

Étant donné que l’avis de négocier a été donné par le Conseil du Trésor en septembre 2014 et que nous sommes en période de gel prévu par la loi, chaque condition de travail doit être respectée par l’employeur. Selon la position de l’APFC, ce BIP est illégal et, par conséquent, la Lettre de politique 164 demeure en vigueur.

L’APFC n’appuie pas cette initiative et elle n’y consent pas non plus; il s’agit d’une tentative unilatérale de l’employeur de changer les conditions d’emploi de nos membres.

364        M. Guindon n’a pas répondu.

365        M. McConnell a examiné le BIP et l’a comparé à la Lettre de politique 164. Il a déclaré qu’il aurait pu avoir constitué un document convenable si l’employeur avait collaboré avec l’agent négociateur. Le document était convenable en ce qui concerne l’expérience récente. Toutefois, il était silencieux quant à la formation des inspecteurs d’hélicoptères.

366        Une deuxième version (« BIP 2016-05 v.2 ») a été publiée le 6 juillet 2016 et M. McConnell estimait qu’il s’agissait d’une tentative d’améliorer le BIP 2016-05 v.1. La première version éliminait certaines des définitions et certains programmes. Selon un des changements immédiats énumérés dans la deuxième version, les inspecteurs de Transports Canada qui exercent des activités de vérification, de contrôle et de surveillance en vol ne pouvaient pas agir en tant que membre d’équipage de conduite. M. McConnell a indiqué que l’employeur demandait aux inspecteurs, pendant qu’ils étaient à bord d’un hélicoptère ou d’un aéronef et qu’une défaillance importante survient, de ne pas agir en tant que membre d’équipage de conduite. Il a affirmé que les personnes à bord d’un aéronef ou d’un hélicoptère sont classées comme des membres d’équipage de conduite, des membres d’équipage et des passagers. Un membre d’équipage est affecté à une tâche dans un aéronef, comme un membre de l’équipage de cabine. Il était d’avis que les inspecteurs étaient des membres d’équipage de conduite. Il a déclaré que le BIP 2016-05 v.2 a créé une tempête de protestation et des personnes se sont trouvées dans une situation difficile. Il était d’avis que c’était plus critique pour les hélicoptères.

367        Un autre BIP a été publié le 17 août 2016, portant sur la planification de la surveillance, ce qui signifiait essentiellement qu’il n’y aurait plus de surveillance des opérations aériennes commerciales concernant un aéronef qui transporte au plus neuf passagers. M. McConnell était d’avis qu’il s’agissait d’un changement des conditions d’emploi parce que les membres de l’unité de négociation effectuaient cette surveillance.

a. Contre-interrogatoire

368        M. McConnell a été contre-interrogé au sujet de la Lettre de politique 164.Lorsqu’on lui a demandé s’il était au courant des études entreprises en 2012, il a répondu par l’affirmative. Il était également au courant du fait que le Ministère avait choisi de ne pas procéder à la mise en œuvre du rapport découlant des études.

369        Il a témoigné en disant qu’il était d’avis que la Lettre de politique 164 continue d’être valide puisqu’elle a été annulée pendant la période de gel prévu par la loi.

370        Il a renvoyé au BIP de l’Aviation civile en date du 17 août 2016, à l’intention des membres du personnel de l’Aviation civile participant à la planification de la surveillance, ce qui exemptait certains titulaires de document de l’Aviation civile de la fréquence ou de l’activité de surveillance en fonction d’un niveau de risque moins élevé associé à l’activité. Il a déclaré que ses membres exerçaient ce type de surveillance.

371        Il a convenu qu’il était juste de dire que lorsque l’employeur affecte des tâches à un employé, la détermination de la formation nécessaire relativement à ces tâches relève également de la prérogative de l’employeur. Il a nuancé sa réponse en affirmant que l’employeur ne peut pas affecter des tâches à un employé s’il ou elle n’est pas dûment qualifié pour les exécuter.

2. M. Holbrook

372        La Lettre de politique 164 énonce les exigences de formation pour les CAI qui vérifient et surveillent les pilotes et les exploitants aériens du milieu aéronautique. Les CAI effectuent des CCP à l’égard des pilotes commerciaux. Il existe également un programme qui autorise les pilotes du milieu aéronautique à exercer un pouvoir délégué au nom du ministre des Transports. Ces pilotes effectuent des vérifications à l’égard de 90 % des pilotes commerciaux. Les CAI doivent effectuer des vérifications annuelles à l’égard de ces pilotes.

373        M. Holbrook a renvoyé au BIP 2016-05 v.1, qui annulait la Lettre de politique 164 et établissait les exigences en qualification particulièrement à l’égard des niveaux des types d’aéronefs, des CCP et de l’expérience récente des inspecteurs de la sécurité de l’aviation civile lorsqu’ils sont affectés à l’exécution d’activités dont des connaissances des aéronefs et une expérience relative à ceux-ci étaient essentielles.

374        Il a témoigné en disant que ce BIP indique le point de vue de l’employeur quant à l’exigence aux fins des qualifications et de la formation des inspecteurs de vol lorsqu’ils effectuent des vérifications. Il a déclaré que le BIP a trait à la Lettre de politique 164 figurant aux clauses 47.01 et 47.02 proposées par l’agent négociateur.

375        L’agent négociateur s’oppose aux changements des conditions d’emploi sans sa participation. Si l’employeur l’avait approché au sujet du contenu du document, il aurait probablement accepté bon nombre des éléments. Par exemple, une définition de « expérience récente » est prévue. Cette définition ne figure pas dans la Lettre de politique 164. Toutefois, beaucoup des détails qui figuraient dans cette lettre avaient été éliminés. Sous l’en-tête [traduction] « Exigences pour vérification de compétence en vol », la lettre énonce que la formation ne sera jamais inférieure à ce qui est requis par le programme de formation approuvé de l’organisation auprès de laquelle le CAI suit la formation. Ce détail n’est plus précisé dans le BIP.

376        De même, en ce qui concerne les inspecteurs de giravions, la Lettre de politique 164 exigeait au minimum 48 heures de vol dans un hélicoptère monomoteur ou multimoteur de la Direction générale des Services des aéronefs afin de maintenir les compétences. Ce détail n’est plus précisé dans le BIP.

377        L’agent négociateur estime qu’ils constituent des changements aux conditions d’emploi. Des membres ont communiqué avec l’Association. Ils se préoccupaient des changements apportés au programme de formation. Dans un certain nombre de cas, les membres avaient été informés qu’ils avaient été affectés à un autre programme.

378        La principale préoccupation de l’agent négociateur à propos du BIP 2016-05 v.2 concernait un des changements immédiats, qui prévoit que les inspecteurs de Transports Canada Aviation Civile (TCAC) qui exercent des activités de vérification, de contrôle et de surveillance en vol n’agiront pas en tant que membres d’équipage de conduite.

379        M. Holbrook a déclaré qu’il était d’avis que cette disposition équivalait à exiger que les membres de l’unité de négociation violent le RAC, ce qui est problématique pour eux.

380        M. Holbrook a donné en guise d’exemple, un inspecteur à bord d’un hélicoptère monomoteur aux fins de la qualification d’un seul pilote. Le BIP indique que l’inspecteur n’agira pas en tant que membre d’équipage de conduite. Toutefois, selon le RAC, il ou elle est tenue d’agir à ce titre. Dans un poste de pilotage de deux personnes, le candidat visé par la vérification occupera le siège du capitaine et l’inspecteur occupera l’autre siège. L’inspecteur sera tenu d’activer les contrôles en vue de créer une urgence afin que le candidat puisse démontrer ses compétences. Dans ce cas, l’inspecteur agira en tant que membre d’équipage de conduite, conformément aux exigences du RAC. Certains gestionnaires ont conseillé aux inspecteurs de s’asseoir en arrière dans l’hélicoptère et d’effectuer la vérification de cet endroit. Toutefois, le RAC interdit que des passagers soient à bord pendant les inspections.

381        Les changements apportés au BIP ont autorisé aux gestionnaires de mettre fin aux programmes de maintien des compétences, puisqu’ils ne sont plus requis. Les membres ont déposé de nombreux griefs visant l’élimination de programmes.

382        Le 8 septembre 2016, un CAI situé dans la région des Prairies et du Nord de l’employeur a envoyé un courriel à un inspecteur de la sécurité de la Formation des équipages de conduite, évaluation et examens et il a demandé si un CAI était considéré comme un membre d’équipage de conduite pendant qu’il effectue un CCP à partir du siège gauche dans un hélicoptère monomoteur à un seul pilote. Il a posé des questions au sujet du rôle du CAI à bord, en tenant compte du fait qu’il manipulera les accélérateurs, appuiera sur les pédales, déplacera les interrupteurs, entre autres.

383        L’inspecteur de la sécurité a exprimé une opinion et a renvoyé à un autre CAI à l’administration centrale de Transports Canada, qui a exprimé l’opinion selon laquelle, conformément à l’interprétation du RAC, les CAI qui assument la fonction du pilote de sécurité pendant un vol sont des membres d’équipage de conduite pendant ce vol.

384        L’employeur s’est opposé à la production de ces éléments de preuve au motif qu’il s’agissait à la fois de ouï-dire et d’une opinion sans que le témoin ne témoigne et l’employeur n’a pas eu l’occasion de contre-interroger le témoin. J’ai décidé d’admettre la preuve. Toutefois, puisqu’il s’agissait de ouï-dire, dans l’éventualité où je devais statuer sur la signification de l’expression « membre d’équipage de conduite », je ne pourrais pas fonder mon interprétation uniquement sur la preuve par ouï-dire.

a. Contre-interrogatoire

385        M. Holbrook a été interrogé au sujet de la préoccupation de l’agent négociateur selon laquelle les inspecteurs qui exercent des activités de vérification, de contrôle et de surveillance en vol ne pourraient plus agir en tant que membres d’équipage de conduite.Lorsqu’on lui a demandé si la préoccupation concernait presque exclusivement les hélicoptères, il a répondu par la négative et a déclaré que le problème était plus grave à l’égard des hélicoptères, ce qui n’était qu’un exemple. Le problème peut également survenir relativement à un aéronef à voilure fixe.

386        Il a été renvoyé à un échange de courriels entre deux CAI qui soulevait la question de savoir si un inspecteur était considéré comme un membre de l’équipage pendant qu’il effectuait une vérification à partir du siège gauche dans un hélicoptère monomoteur à un seul pilote.

387        À son avis, un des CAI a dit que le RAC exige que l’inspecteur agisse en tant que membre d’équipage de conduite, mais le Ministère indique le contraire. M. Holbrook a renvoyé à l’« article 723 de la Norme de service aérien commercial », qui contient des renseignements précis sur ce qui doit être fait au cours d’un CCP.

388        On lui a suggéré que le CAI concerné n’était pas bien placé pour trancher des questions stratégiques.

389        M. Holbrook a répété que pendant une vérification en vol à bord d’un hélicoptère, l’inspecteur manipule les commandes de vol. On demande à un inspecteur de violer un règlement s’il n’est pas un membre d’équipage de conduite, mais simplement un membre d’équipage ou un passager.

390        M. Holbrook a été renvoyé au paragraphe 4.3(1) de la Loi sur l’aéronautique, intitulé « Autorisation ministérielle » et à certaines définitions tirées du RAC, qui se lisent comme suit :

4.3 (1)Le ministre peut autoriser toute personne, individuellement ou au titre de son appartenance à telle catégorie de personnes, à exercer, sous réserve des restrictions et conditions qu’il précise, les pouvoirs et fonctions que la présente partie lui confère, sauf le pouvoir de prendre des règlements, arrêtés, mesures de sûreté ou directives d’urgence.

[…]

membre d’équipagePersonne qui est chargée de fonctions à bord d’un aéronef pendant le temps de vol.[…]

[…]

membre d’équipage de conduiteMembre d’équipage chargé d’agir à titre de pilote ou de mécanicien navigant à bord d’un aéronef pendant le temps de vol.[…]

[…]

passagerPersonne, autre qu’un membre d’équipage, transportée à bord d’un aéronef. […]

[…]

pilote de sécuritéPilote qui agit comme vigie pour un autre pilote qui utilise un aéronef en vol aux instruments simulé.[…].

[Les passages en évidence le sont dans l’original]

391        Il a également été renvoyé à l’article 703.26 du RAC, qui énonce « Il est interdit de simuler des situations d’urgence qui pourraient modifier les caractéristiques de vol de l’aéronef lorsqu’il y a des passagers à bord. »

392        On lui a demandé si lorsqu’un vol était effectué, un inspecteur ne peut être un passager, mais un membre d’équipage. Il a répondu qu’à son avis, un membre d’équipage ne piloterait pas un aéronef.

B. Pour l’employeur

1. M. Collins

393        La Lettre de politique 164 a été remplacée par un BIP. Des changements étaient requis, dont la nécessité avait été établie avant 2016. Les changements découlaient d’un examen effectué sur plusieurs années.

394        La Lettre de politique 164 traitait de l’aviation commerciale et d’affaires. Elle avait pour objet de donner aux inspecteurs et aux cadres des directives à l’intention des inspecteurs de transporteurs aériens en aviation commerciale et d’affaires afin de s’assurer qu’ils aient les connaissances requises pour exécuter leurs tâches. Lorsqu’elle a été publiée en 2005, elle a guidé M. Collins, qui était alors un inspecteur, et elle permettait à son gestionnaire de faire son travail. Elle était utile à cette époque.

395        L’objet de la politique n’est pas lié au respect des conditions de la convention collective.

396        Au cours de 12 ans, le système a évolué. La décision avait été prise de ne pas effectuer autant de CCP par des CAI employés par Transports Canada. Les vérifications ont été déléguées au milieu aéronautique. Les inspecteurs de Transports Canada n’ont pas besoin de la même quantité ni le même type de formation qu’il devait suivre dans le passé.

397        Des discussions au sujet de changements à la politique ont été tenues en 2008 et en 2009. Une étude a été menée à Transports Canada qui a donné lieu à un examen de programmes en 2012. Le document est intitulé [traduction] « Carnet de travail de la réunion du groupe de travail sur l’examen du PVA » et est daté du 17 au 20 janvier 2012. L’examen portait sur la situation actuelle à l’époque et a donné lieu à une recommandation d’élaborer un document de politique révisé. L’examen se lit en partie comme suit :

[Traduction]

SITUATION ACTUELLE VISÉE PAR L’EXAMEN

[…]

La Lettre de politique (LP) 64 constitue actuellement le document de référence utilisé pour établir les exigences de formation et en qualification des inspecteurs de la sécurité de l’Aviation civile – Opérations de vol […] qui exercent des tâches dont des connaissances spécialisées des aéronefs sont essentielles. La LP164 a été publiée en 2005 en tant que modification au […]Manuel de l’inspecteur des transporteurs aériens.

Cette lettre de politique porte sur une époque où les inspecteurs de la sécurité de l’aviation civile – Opérations de vol (anciennement appelé les inspecteurs de transporteurs aériens) continuaient d’effectuer régulièrement des vérifications en vol. Sept ans plus tard, le présent document semble être désuet pour les motifs suivants :

  • il ne tient pas compte du fait que les inspecteurs de la sécurité de l’aviation civile – Opérations de vol (ISAC – Ops. de vol) effectuent maintenant principalement les tâches de contrôle;
  • il n’offre aucune orientation quant à la formation et les qualifications des inspecteurs relativement à diverses tâches (autre que la vérification en vol) dont des connaissances spécialisées des aéronefs sont essentielles;
  • il applique des limites au poids des aéronefs afin de distinguer entre les différents niveaux de complexité des aéronefs, un argument qui ne pourrait plus être valable;
  • sa portée est trop vague et difficile à définir, affirmant qu’il s’applique à la tenue de contrôle de la compétence du pilote (CCP) ou à toute autre fonction de vérification dont des connaissances spécialisées des aéronefs sont essentielles.

[…]

Recommandation

[…]

1. En conséquence, il est recommandé que TCAC élabore un document de politique révisé qui offrira à la direction de TCAC une orientation complète en ce qui concerne la formation et les qualifications des ISAC en vue de la réalisation compétente de non seulement les CCP et d’autres vérifications en vol, mais également aux fins d’une gamme de tâches qui existe divers niveaux de connaissances spécialisées des aéronefs.Autre que la vérification en vol, ces tâches peuvent être regroupées sous les rubriques suivants :

  • Contrôle
  • Surveillance
  • Examen et approbation des documents de la société
  • Accréditation
  • Surveillance de l’état des simulateurs
  • Délivrance de licences
  • Représentation de l’expert en la matière (EM)
  • Évaluation opérationnelle (EO)

[…]

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

398        M. Collins a confirmé qu’en 2012, une décision a été prise selon laquelle la Lettre de politique 164 ne permettait pas de satisfaire aux exigences de la direction en ce qui concerne la formation et qu’elle devait être modifiée.

399        En raison de l’examen, un BIP de l’Aviation civile intitulé [traduction] « Exigences des inspecteurs aux fins des activités de vérification de l’équipage de conduite » a été publié en juillet 2016. Il a remplacé la Lettre de politique 164. Il avait pour objet d’[traduction] « […] établir les exigences en qualification, particulièrement à l’égard des niveaux des types d’aéronefs, des contrôles de la compétence du pilote (CCP) et de l’expérience récente des inspecteurs de sécurité de l’aviation civile […] lorsqu’ils sont affectés à l’exécution d’activités dont des connaissances des aéronefs et une expérience relative à ceux-ci sont essentiels ».

400        Il décrit et éclaircit les lignes directrices pour la direction afin qu’elle puisse être en mesure de former les inspecteurs, selon les tâches qui leur sont attribuées. Par exemple, si un inspecteur doit surveiller un pilote vérificateur, le gestionnaire doit suivre les lignes directrices décrites dans le document.

401        On a demandé à M. Collins s’il existait un lien dans la politique révisée aux contraintes financières. Il a répondu par la négative.

402        Il a déclaré que la Lettre de politique 164 devait être modifiée parce que, selon lui, ce n’était pas sécuritaire, ainsi qu’il était nécessaire d’examiner l’efficacité et les exigences du programme.

403        Selon un des changements immédiats, les inspecteurs de TCAC qui exercent des activités de vérification, de contrôle et de surveillance en vol ne pouvaient pas agir en tant que membre d’équipage de conduite.

404        Sans une formation appropriée, les inspecteurs ne pourraient pas agir en tant que membres d’équipage de conduite. Il y avait eu des cas où, en vertu de la Lettre de politique 164, cela n’avait pas été clair. Il s’agissait à la fois d’une question de sécurité et de responsabilité.

405        La section du contexte du BIP indique que [traduction] « les inspecteurs de TCAC ne devraient agir en tant qu’équipage de conduite qu’à bord d’un aéronef à l’égard duquel ils sont qualifiés, comme les aéronefs de la DGSA ou dans le cadre d’un autre programme approuvé accepté par la direction de TCAC ». Cela n’était pas clair dans la Lettre de politique 164.

406        M. Collins a été interrogé au sujet des circonstances dans lesquelles un inspecteur peut agir en tant que membre d’équipage de conduite. Il a répondu qu’elles surviennent lorsque l’inspecteur est qualifié et est tenu d’exécuter les tâches d’un membre d’équipage de conduite tout en effectuant une vérification en vol ou un CCP.

407        Dans un hélicoptère comptant uniquement deux sièges, l’inspecteur doit être qualifié pour s’asseoir en avant. Si l’inspecteur est dans un simulateur, il n’est pas nécessaire qu’il ou elle s’assoie aux contrôles de l’aéronef; il n’est pas non plus nécessaire que l’inspecteur ait maintenu ses compétences ou qu’il soit qualifié.

408        Si l’aéronef compte plus que deux sièges, l’inspecteur peut être en mesure d’exercer ses tâches à partir d’un siège de décollage. Il n’est pas nécessaire que l’inspecteur soit assis aux contrôles. Dans cette situation, il n’est pas nécessaire que l’inspecteur ait maintenu ses compétences et qu’il soit qualifié.

409        Si l’aéronef compte deux sièges, il y aura deux pilotes, celui qui est visé par la vérification et un copilote et l’inspecteur occupera le siège de décollage.

410        M. Collins a été renvoyé à la chaîne de courriels commencée par un CAI le 8 septembre 2016, dans laquelle il a demandé si un CAI était considéré comme un membre d’équipage de conduite pendant qu’il effectuait un CCP depuis le siège gauche dans un hélicoptère monomoteur à un seul pilote, en tenant compte du fait qu’il manipulerait les accélérateurs, appuierait sur les pédales, déplacerait les interrupteurs, entre autres.

411        M. Collins a affirmé que dans cette situation, l’inspecteur serait un membre d’équipage de conduite. Il faudrait qu’il ou elle suive une formation sur ce type d’hélicoptère. Sinon, la tâche consistant à effectuer un CCP ne lui serait pas affectée. Il a déclaré qu’il estimait qu’un malentendu était survenu avec les employés et que la tâche avait été attribuée à ceux-ci sans qu’ils soient qualifiés. Toutefois, une fois que la situation a été clarifiée, les tâches consistant à exécuter un CCP n’étaient plus affectées aux employés non qualifiés.

412        Le 3 février 2017, afin de répondre aux préoccupations à l’égard des CAI qui offre des surveillances de pilotes vérificateurs agréés (PVA) en vol à bord de certains types d’hélicoptère associés à l’exploitation d’un taxi aérien, le directeur des normes de l’Aviation civile a accordé une prorogation intérimaire de la validité de la surveillance des PVA associée aux opérations d’hélicoptère jusqu’au 1er février 2018, peu importe la date d’expiration réelle. Le document de prorogation intérimaire a indiqué qu’un examen était en cours en vue de déterminer une solution efficace à long terme.

413        M. Collins a été renvoyé à l’alinéa 39d) de la plainte, qui comportait une allégation selon laquelle le directeur des Opérations avait amorcé une étude en matière d’évaluation des risques en vue d’annuler les droits de surveillance des PVA.

414        Il a déclaré que Transports Canada et Aviation civile ont cerné une préoccupation selon laquelle les processus de nomination et de délégation existants et les activités de surveillance existantes à l’égard des PVA et des évaluateurs du programme avancé de qualification (PAQ) ne permettaient pas une utilisation souple et efficace des ressources disponibles de Transports Canada relativement à la surveillance de ces programmes d’évaluateur. Il semblait que beaucoup de ressources étaient consacrées à ces activités qui, peut-on soutenir, traitaient de situations à faible risque.

415        Puisque les inspecteurs de Transports Canada effectuent des contrôles des compétences ou vérifient des pilotes auprès de sept principaux transporteurs aériens, M. Collins a commencé à se rendre compte dans le cadre de l’examen des données que des 1000 dernières surveillances effectuées, il y avait eu deux échecs. Afin de veiller à ce que l’utilisation des ressources de Transports Canada soit efficace, il a effectué une évaluation des risques en collaboration avec des représentants des exploitants aériens afin d’évaluer la façon dont ils exercent leurs activités, y compris un examen du risque et de la question de savoir s’ils pourraient réaffecter des ressources où le risque était faible.

416        L’évaluation a démontré que les pilotes vérificateurs dans le cadre de la portée des opérations nationales avaient un très bon rendement et qu’il n’était pas nécessaire de les surveiller selon les mêmes intervalles prévus par règlement tous les deux ans.

417        Comme les autres évaluations des risques, rien n’est prescrit qui oblige la direction à consulter l’APFC.

418        L’évaluation n’indique pas que Transports Canada mettra fin à la surveillance des sept principaux transporteurs aériens, mais qu’il les surveillera d’une manière différente.

419        On a demandé à M. Collins si le fait que Transports Canada négociait avec l’APFC avait une incidence sur la décision quant à savoir si une évaluation des risques devait être effectuée. Il a déclaré que tous les ans, Transports Canada examinait ses programmes afin de veiller à ce que les ressources fussent affectées de domaines à faible risque à des domaines à risque élevé.

420        L’évaluation des risques a été menée à terme et Transports Canada cherche à mettre en œuvre une option, selon laquelle elle sera effectuée selon des intervalles qui ne sont pas fixes, mais plutôt fondés sur le risque. Par exemple, si un pilote vérificateur a eu un bon rendement, l’intervalle entre les vols de contrôle des compétences pourrait être plus long; autrement, ils feraient l’objet d’un contrôle des compétences plus souvent.

421        Transports Canada cherche à partager la responsabilité avec les exploitants aériens, c.-à-d. en ayant une base de données commune afin qu’ils puissent mieux contrôler les compétences et encadrer les pilotes vérificateurs qui travaillent pour eux. Cela reprend le PAQ existant.

422        M. Collins a été interrogé au sujet de l’incidence sur l’APFC. Il a répondu qu’il s’aigrissait simplement d’une différente façon de contrôler les compétences à l’aide d’une surveillance et d’un contrôle des données fondés sur le risque.

a. Contre-interrogatoire

423        La Lettre de politique 164 était désuète, ce qui a été confirmé par l’étude de 2012. Lorsqu’on lui a demandé si elle avait été annulée avant le gel prévu par la loi, il a répondu par la négative. Elle n’était pas considérée comme une condition d’emploi et elle a été remplacée par un BIP en date d’avril 2016.

424        M. Collins a été renvoyé à l’énoncé figurant dans le bulletin sous la rubrique [traduction] « Contexte » qui se lit comme suit : [traduction] « Les inspecteurs de TCAC ne devraient agir en tant qu’équipage de conduite qu’à bord d’un aéronef à l’égard duquel ils sont qualifiés, comme les aéronefs de la DGSA ou dans le cadre d’un autre programme approuvé accepté par la direction de TCAC. »

425        Il a été renvoyé à l’énoncé figurant dans le bulletin sous la rubrique [traduction] « Changements immédiats » qui se lit comme suit : [traduction] « les inspecteurs de TCAC qui exercent des activités de vérification, de contrôle et de surveillance en vol n’agiront pas en tant que membre d’équipage de conduite ».

426        On lui a demandé comment les deux énoncés pourraient être rapprochés. Il a convenu que le bulletin pourrait être mieux rédigé. Il a déclaré que la Lettre de politique 164 n’était pas claire et qu’elle ne permettait pas de s’assurer que les inspecteurs suivent la formation appropriée en vue d’exercer leurs tâches de manière sécuritaire.

427        Si un inspecteur effectuait le contrôle des compétences d’un pilote du milieu aéronautique dans un simulateur, il n’est pas nécessaire que l’inspecteur maintienne ses compétences pour piloter un aéronef. L’inspecteur doit être formé ou qualifié de type d’aéronef à bord de l’aéronef. Le manuel s’applique à tous les pilotes vérificateurs dans le milieu aéronautique. Un inspecteur qui est formé et qualifié de type d’aéronef, mais qui n’a pas maintenu ses compétences peut effectuer un contrôle des compétences d’un pilote vérificateur dans un simulateur.

428        Un inspecteur qui exerce des activités de vérification ou de contrôle en vol qui est qualifié à bord de l’aéronef, mais qui n’a pas maintenu ses compétences n’est pas un membre d’équipage de conduite puisque l’inspecteur n’est pas assis aux contrôles de l’aéronef. Cela n’est pas clair dans la Lettre de politique 164.

429        Il a confirmé qu’un inspecteur qui effectue un CCP agit en tant que membre d’équipage de conduite. À son avis, cela ne contredisait pas les énoncés figurant dans le bulletin, même s’il a reconnu qu’il pourrait être mieux rédigé, puisque selon son intention, les inspecteurs ne devaient pas agir en tant que membre d’équipage de conduite, à moins qu’il ne soit entièrement qualifié. Il a déclaré qu’un malentendu était survenu.

430        M. Collins était au courant que des plaintes avaient été déposées en vertu de la partie II du Code canadien du travail concernant la santé et sécurité au travail, mais il n’avait pas accès aux plaintes et elles ne le concernaient pas.

b. Réinterrogatoire

431        Il estimait que le changement devait avoir lieu à ce moment-là parce que la lettre de politique 164 de 2005 était désuète; les simulateurs ont évolué considérablement et les inspecteurs participaient moins à l’activité de vérification. Lorsque l’Aviation civile souhaite qualifier une personne relativement à un équipement, ce n’est plus effectué à bord d’un aéronef, mais dans un simulateur.

432        Il a déclaré que le remplacement de la Lettre de politique 164 par le BIP ne concernait aucunement l’article 47 de la convention collective. Il a affirmé que l’Aviation civile n’a pas changé les conditions d’emploi.

433        Un segment de l’industrie devait s’adapter aux simulateurs.

434        Lorsqu’on lui a demandé comment cela a touché la formation, il a répondu qu’il n’y a eu aucune incidence puisque toutes les personnes qui participaient à un programme ont suivi la formation nécessaire pour respecter leurs qualifications et que tous les employés ont touché une indemnité de fonctions supplémentaires.

435        On lui a demandé pourquoi il n’avait pas consulté l’agent négociateur. Il a répondu que les lettres de politique relevaient de la direction. Les Économats des Forces canadiennes (CANEX) nationaux ont été consultés relativement au remplacement du BIP. Il n’estimait pas que des changements avaient été apportés aux conditions d’emploi qui exigeaient une consultation.

436        Il a informé l’agent négociateur qu’un nouveau BIP était imminent, que les changements réduiraient le programme de vol spécialisé et qu’un BIP clarifierait le rôle des pilotes vérificateurs délégués. La stratégie consistait à transférer aux simulateurs la formation relative aux hélicoptères et aux aéronefs à voilure fixe.

C. Arguments de l’APFC

437        Le 31 mars 2016, Transports Canada a également annoncé qu’il annulait la Lettre de politique 164, qui décrivait les exigences de formation des inspecteurs des transporteurs aériens et qu’il la remplaçait par une nouvelle politique, à compter du 29 avril 2016.

438        Le vendredi 15 avril 2016, M. Guindon a fourni à l’Association une ébauche du BIP de la nouvelle politique qui établit les nouvelles [traduction] « Exigences des inspecteurs aux fins des activités de vérification de l’équipage de conduite ». M. Guindon a indiqué que l’employeur publierait la nouvelle politique la semaine suivante.

439        Au moyen d’un courriel en date du lundi 18 avril 2016, M. McConnell a informé M. Guindon que l’Association n’appuyait pas l’initiative de Transports Canada ni y consentait et qu’il s’agissait d’une tentative unilatérale de changer les conditions d’emploi des membres de l’Association. Selon le témoignage de M. McConnell, l’Association n’a reçu aucune réponse à son courriel. Au contraire, Transports Canada a annulé la Lettre de politique 164 et a publié le Bulletin interne de procédures, BIP 2016-05, no 01 (BIP 2016-05 v.1), qui est entré en vigueur le 29 avril 2016.

440        Au moyen d’un courriel en date du 15 juillet 2016, l’Association a été informée par un de ses membres que Transports Canada avait remplacé le BIP 2016-05 v.1 par le BIP 2016-05 v.2, qui avait été préparé et publié sans avis à l’Association ni sans commentaires de celle-ci et qui entrait en vigueur le 6 juillet 2016.

441        Les nouvelles politiques, plus particulièrement le BIP 2016-05 v.2, diffèrent fondamentalement de la Lettre de politique 164. M. Holbrook a témoigné au sujet d’un certain nombre de différences importantes qui pouvaient être constatées du libellé des politiques.

442        M. Holbrook a indiqué particulièrement la page 2 de l’ancienne Lettre de politique 164 qui décrivait la formation minimale au pilotage, le maintien de compétences et les exigences du CCP à l’égard des inspecteurs qui effectuent des CCP et d’autres tâches de vérifications. Selon le point 3, la Lettre de politique 164 établit clairement ce qui suit : [traduction] « La formation ne sera jamais inférieure à ce qui est requis par le programme de formation approuvé de l’organisation auprès de laquelle [l’inspecteur] suit la formation. » Cette exigence minimale d’une formation au moins équivalente est absente du nouveau BIP.

443        M. Holbrook a également indiqué la page 3 de l’ancienne Lettre de politique 164 qui établit les exigences uniques pour les inspecteurs de giravions (c.-à-d. hélicoptère). Selon la lettre, les inspecteurs de giravions devaient être offerts au minimum 48 heures de vol, en plus d’une formation supplémentaire sur les procédures liées aux instruments des hélicoptères. Ces exigences minimales de formation ne figurent pas dans le nouveau BIP. Il a témoigné en disant que l’annulation de la Lettre politique 164 a créé des problèmes pour tous les membres de l’Association, dont les pilotes d’hélicoptères ont été les plus touchés.

444        Enfin, M. Holbrook a indiqué dans son témoignage que le changement le plus important et le plus préoccupant pour les membres de l’Association figurait à la page 4 du BIP 2016-05 v.2, qui déclare que les inspecteurs de Transports Canada [traduction] « […] exercent des activités de vérification, de contrôle ou de surveillance en vol n’agiront pas en tant que membres d’équipage de conduite ». Il a expliqué en outre que cela signifiait que les membres de l’Association devaient violer le RAC, qui énonce clairement que dans certains cas, un CAI qui effectue un CCP doit manipuler les contrôles de l’aéronef et est définitivement un membre d’équipage de conduite. M. Holbrook a témoigné en disant qu’en raison de ce changement, les membres de l’Association se trouvaient en situation d’impasse, en ce qu’ils seraient tenus d’effectuer leurs tâches d’une manière qui contrevient au RAC, ou de refuser le travail qui leur est affecté. Dans son témoignage, il a également indiqué qu’en fait, certains membres de l’Association ont refusé d’effectuer des vols à l’égard desquels ils n’étaient pas qualifiés ou avait par ailleurs déposé des plaintes en matière de santé et sécurité au travail.

445        La nouvelle politique constitue un changement réel et fondamental aux conditions d’emploi. Les témoins de l’APFC ont témoigné longuement au sujet de ces changements. Les témoins des défendeurs ont reconnu que la nouvelle politique représentait un changement.

446        M. Guindon a témoigné en disant que la nouvelle politique avait été adoptée parce qu’une mise à jour était nécessaire en raison du fait que la Lettre de politique 164 était désuète. Dans son témoignage, il a affirmé qu’il n’a pas songé à consulter l’agent négociateur parce qu’il était d’avis que cela relevait de la compétence de la direction.

447        M. Guindon a également affirmé dans son témoignage que l’employeur avait entrepris un examen en 2012 dont les résultats ont indiqué que la Lettre de politique 164 devrait être modifiée. Pourtant, à la fin de novembre 2015, M. Guindon avait assuré M. McConnell qu’elle continuerait d’être en vigueur. Au moyen d’un courriel en date du 26 novembre 2015, M. Guindon a déclaré [traduction] « Il convient de noter qu’Aaron [McCrorie] et moi n’avons jamais demandé à ce que cela soit inséré dans le plan de travail, elle avait été demandée il y a plusieurs années et elle vient tout juste d’apparaître sur le plan de travail. Aaron et moi avons demandé qu’il soit mis fin à ces travaux. »

448        M. Holbrook a également témoigné au sujet des négociations en cours entre les parties. Il a souligné l’importance des exigences de formation à titre de préoccupation importante des membres de l’Association, ce qui est indiqué dans les demandes présentées à la table des négociations. M. Holbrook et M. McConnell ont tous les deux témoigné longuement au sujet des problèmes que l’Association éprouve en matière de formation en vue de s’assurer que ses membres sont qualifiés de manière appropriée.

449        La Lettre de politique 164, même si elle ne faisait pas partie de la convention collective, régissait les exigences de formation des  CAI, ce qui constitue une partie essentielle de la réalité du lieu de travail des membres de l’Association. Le respect des exigences de formation permet aux inspecteurs d’accomplir leur travail. Le fait que ces exigences sont incluses dans les principales priorités de l’agent négociateur dans le cadre de cette ronde de négociation est révélateur. Lorsqu’il a modifié la politique, Transports Canada a pris une mesure relativement à un élément qui pourrait être englobé dans une convention collective future.

450        La Lettre de politique 164 ne fait pas seulement partie des conditions d’emploi, mais également, le témoignage des témoins de l’Association, ainsi que le texte de l’ancienne et de la nouvelle politique indiquent des changements importants apportés à la façon dont la formation est offerte en vertu des nouveaux BIP. La modification de la lettre a eu une incidence importante sur les employés puisqu’ils ont été exposés à au moins trois changements importants, à savoir :

  1. selon la Lettre de politique 164, la formation minimale ne devait jamais être inférieure à ce qui est requis par les programmes de formation approuvés des organisations auprès desquelles les inspecteurs ont suivi la formation;
  2. les exigences uniques ayant trait à la formation des inspecteurs de giravions;
  3. l’exigence figurant au BIP 2016-05 v.2 selon laquelle les inspecteurs qui [traduction] « […] exercent des activités de vérification, de contrôle ou de surveillance en vol n’agiront pas en tant que membres d’équipage de conduite ».

451        L’approche de l’ancienne Commission à l’interprétation de la disposition relative au gel prévu par la loi consistait à estimer que les changements fondamentaux aux conditions de travail ne constituaient pas la poursuite des activités normales et, par conséquent, ils ne peuvent pas être considérés comme faisant partie de la prérogative de l’employeur d’organiser le lieu de travail comme il le juge indiquer. Un gel prévu par la loi suspend les droits des défendeurs dans le contexte de la négociation collective en vue d’assurer un processus plus équitable. Voir Alliance de la Fonction publique du Canada c. Conseil du Trésor (Agence des services frontaliers du Canada), 2013 CRTFP 46; et Association canadienne des employés professionnels c. Bibliothèque du Parlement, 2013 CRTFP 18.

452        Il est incontestable qu’un changement politique important a été apporté relativement à une question qui faisait l’objet d’une proposition de l’agent négociateur à la table des négociations, ce qui est précisément ce que l’art. 107 de la Loi vise à empêcher.

453        Les nouveaux BIP constituent un changement réel et fondamental des conditions d’emploi puisqu’il modifie fondamentalement la politique qui régissait antérieurement les exigences de formation. On ne peut pas dire qu’il s’agit de la poursuite des activités normales. Pendant la période de gel prévu par la loi, les employés auraient des attentes raisonnables que leurs exigences de formation soient préservées pendant la période de négociation. En fait, l’Association en avait été assurée à cet égard par M. Guindon qui l’a informé qu’il avait demandé que soit mis fin aux travaux relatifs à la modification de la Lettre de politique 164.

454        L’agent négociateur a reconnu l’importance de l’incidence des contraintes budgétaires sur Transports Canada; toutefois, selon les dispositions relatives au gel prévu par la Loi, la mise en œuvre de ses initiatives doit être suspendue jusqu’à l’expiration de la période de gel ou, entre-temps, jusqu’à ce que le consentement de l’agent négociateur soit obtenu; voir Alliance de la Fonction publique du Canada c. Conseil du Trésor (Agence des services frontaliers du Canada), 2013 CRTFP 46, au paragraphe 203.

D. Arguments de l’employeur

455        La plainte renvoie au remplacement de la Lettre de politique 164 par un BIP. L’agent négociateur a allégué que la mise en œuvre du BIP constituait un changement important aux conditions d’emploi de ses membres.

456        L’employeur a soutenu que la Lettre de politique 164 ne faisait pas partie des conditions d’emploi et que la convention collective n’y renvoie d’aucune façon. Elle a été modifiée et publiée de nouveau dans le nouveau cadre de documentation établi par Transports Canada en vue de tenir compte de son nouveau besoin de remplir son mandat lié aux activités de surveillance et d’accréditation. Ces modifications ont été apportées en raison de la nécessité de clarification qui a été soulignée en 2012 et avant que l’avis de négocier n’a été signifié en septembre 2014.

457        De même, le nouveau BIP ne fait pas partie des conditions d’emploi et la convention collective n’y renvoie d’aucune façon. M. Collins et M. Guindon ont témoigné en disant que le BIP comprenait la restriction en vue de s’assurer qu’un pilote qui exerce des activités de vérification, de contrôle ou de surveillance en vol ne le ferait pas en tant que membre d’équipage de conduite actif, à moins que le pilote n’ait été formé en conséquence et qu’il ne participe à un programme approuvé. De plus, selon l’objectif, un pilote ne serait pas tenu responsable dans l’éventualité où un incident ou un accident surviendrait sans que le pilote n’ait suivi une formation intégrale et approuvée pour être un membre d’équipage de conduite actif.

458        Ce BIP a pour but essentiellement d’établir les exigences en qualification, plus particulièrement à l’égard des niveaux des types d’aéronefs, des CCP et de l’expérience récente des inspecteurs de la sécurité de l’aviation civile des Opérations de vol (inspecteurs), lorsqu’ils sont affectés à l’exécution d’activités dont des connaissances des aéronefs et une expérience relative à ceux-ci sont essentielles.

459        M. Guindon a témoigné en disant que les tâches des employés avaient changé au cours des dix dernières années, à mesure que Transports Canada est devenu de plus en plus une organisation de « surveillance ». Il est logique que la formation offerte doive tenir compte de ce changement. L’affectation de ses employés à la formation appropriée relève de la prérogative de la direction. Tel que cela a été indiqué, l’employeur avait un pouvoir discrétionnaire absolu relativement à la formation de ses employés avant que l’avis de négocier n’ait été donné. Ce pouvoir discrétionnaire continue de s’appliquer après la signification de l’avis et son exercice ne peut pas être considéré comme une violation des dispositions relatives au gel (voir AFPC c. Sa Majesté, et APFC 2014).

E. Réponse de l’APFC

460        La Lettre de politique 164 et le nouveau BIP constituent des conditions d’emploi. Les qualifications professionnelles qui y sont établies constituent des conditions d’emploi qui peuvent être incluses dans une convention collective et, en conséquence, l’article 7 de la Loi énonce qu’elles continuent d’être en vigueur et doivent être respectées après que l’avis de négocier est donné.

461        Les nouveaux BIP constituent un changement réel et fondamental aux conditions d’emploi. Ils modifient fondamentalement la politique qui régissait antérieurement les exigences de formation. Pendant la période de gel prévu par la loi, les employés se seraient raisonnablement attendus à ce que leurs exigences de formation soient préservées pendant la période de négociation. En fait, l’Association avait été assurée à cet égard par M. Guindon, qui l’a informée qu’il avait demandé qu’on mette fin aux travaux relatifs à la modification de la Lettre de politique 164.

462        Comme la CRTO l’a conclu dans DeVilbiss, au paragraphe 17, lorsqu’un employeur met en œuvre unilatéralement des changements qui n’ont pas été discutés au préalable avec le syndicat, il est logique d’inférer qu’il s’agit d’une tactique visant à saper le syndicat en laissant entendre aux employés qu’ils n’ont pas besoin d’un syndicat pour obtenir de meilleures conditions.

F. Analyse

463        Selon les éléments de preuve, le fond de la Lettre de politique 164 traitait de l’aviation commerciale et d’affaires. Elle avait pour objet de donner aux inspecteurs et aux cadres des directives à l’intention des inspecteurs de transporteurs aériens en aviation commerciale et d’affaires afin de s’assurer qu’ils possédaient les connaissances pour exécuter leurs tâches. La politique établit les exigences en qualification pour eux, plus particulièrement à l’égard des niveaux des types d’aéronefs, des CCP et de l’expérience récente requise, lorsqu’ils étaient affectés à l’exécution d’activités dont des connaissances des aéronefs et une expérience relative à ceux-ci étaient essentielles.

464        On n’a pas fait valoir que le fond de la Lettre de politique 164 était visé par la convention collective ou que, contrairement au PMCA, qu’elle faisait l’objet d’une entente conclue en marge de la convention collective. Il s’agissait d’un document stratégique de la direction. Même si l’on peut conclure qu’un tel document constitue une condition d’emploi assujettie au gel prévu par la loi, la politique n’était pas assujettie à une entente conclue entre les parties, la lettre faisait l’objet d’un examen depuis au moins 2009 et elle a fait l’objet d’un examen officiel en 2012, ce qui a donné lieu à la recommandation des changements. En conséquence, je conclus qu’elle ne constituait pas une condition d’emploi qui était en vigueur à la date à laquelle l’avis de négocier a été donné et elle n’était pas assujettie au gel prévu par la loi.

465         Néanmoins, j’examinerai si elle est visée par les exceptions relatives au gel prévu par la loi. La politique a été mise en œuvre en 2005, lorsque les CAI faisaient encore de façon routinière des opérations de vérification en vol dans l’aviation commerciale et d’affaires. Il ressort clairement de la preuve que la grande partie des vérifications effectuées au cours des années ont été déléguées aux pilotes du milieu aéronautique, que les inspecteurs de Transports Canada ne sont pas tenus de suivre le même niveau ou le même type de formation, et qu’ils exercent surtout des activités de contrôle et de surveillance.

466        Des discussions entre les gestionnaires au sujet de changements à la politique ont eu lieu en 2008 et en 2009 déjà. Un examen de programmes en 2012 a donné lieu à une recommandation en vue d’élaborer une politique révisée. Elle a été inscrite à un plan de travail et a été présentée en tant que plan d’action à la fin de 2015. Même si M. Guindon a informé l’agent négociateur que la direction mettait fin à la mise en œuvre, il a été décidé qu’un examen approfondi était nécessaire. Le Ministère a conclu que la politique devait être mise à jour et que la situation était devenue urgente en raison de préoccupations en matière de sécurité.

467        Transports Canada a annulé la Lettre de politique 164 et a publié le BIP 2016-05, entré en vigueur le 29 avril 2016, qui a été remplacé par un deuxième BIP, entré en vigueur le 6 juillet 2016.

468        L’agent négociateur a indiqué les dispositions des nouveaux BIP qui sont fondamentalement différentes de celles de la Lettre de politique 164, auxquelles il s’oppose. La lettre établit que la formation des inspecteurs ne doit jamais être inférieure à ce qui est requis par le programme de formation approuvé de l’organisation, c.-à-d. Air Canada, Air Transat, entre autres, auprès de laquelle l’inspecteur suit la formation. Cela est absent du nouveau BIP, ainsi que les exigences uniques ayant trait à la formation des inspecteurs de giravions et il déclare que les inspecteurs de Transports Canada qui exercent des activités de vérification, de contrôle et de surveillance en vol ne pouvaient pas agir en tant que membre d’équipage de conduite.

469        Il est clair que les tâches des inspecteurs ont changé considérablement au cours des 12 dernières années et, plus particulièrement, ils n’effectuent plus de manière routinière des vérifications de compétence pilote à l’égard des pilotes du milieu aéronautique et leur mandat consiste maintenant principalement à exercer des activités de contrôle, de surveillance et d’accréditation.

470        On n’a pas fait valoir que la direction n’avait ni le pouvoir ni la prérogative d’affecter ou de changer les tâches de ses employés. Étant donné que l’un des buts de la Lettre de politique 164 consistait à établir les qualifications des inspecteurs en vue d’effectuer des inspections dans l’aviation commerciale et d’affaires, des tâches que, apparemment, ils n’exécutent plus de manière routinière, j’ai du mal à retenir l’argument selon lequel, pendant la période de gel, il est interdit à la direction de changer les exigences de formation d’employés dont les tâches ont déjà été changées.

471        À mon avis, la direction a continué d’exercer son pouvoir discrétionnaire pour établir la formation professionnelle de ses employés afin qu’ils accomplissent les tâches qui leur sont attribuées dans le cadre de la doctrine de la poursuite des activités normales. Je ne peux conclure que l’harmonisation de la formation avec un changement de tâche constitue une dérogation importante de la pratique établie.

472        En ce qui concerne la préoccupation selon laquelle les inspecteurs qui exercent des activités de vérification, de contrôle ou de surveillance en vol ne pourraient pas agir en tant que membres de l’équipage de conduite, je retiens l’explication de l’employeur selon laquelle le BIP aurait pu être rédigé de manière plus claire et que son but était de veiller à ce que les inspecteurs n’agissent pas en tant que membre de l’équipage de conduite à moins qu’ils en soient qualifiés.

V. Question 4 : Exemption de l’application du RAC

473        L’Association a soutenu que les défendeurs ont contrevenu au gel prévu par la loi en ce qui concerne les conditions d’emploi, contrairement à l’article 107 de la Loi, lorsqu’il a mis en œuvre unilatéralement une exemption législative au RAC afin de se soustraire à ses obligations en vertu du PMCA.

A. Pour l’APFC

1. M. Holbrook

474        M. Holbrook a expliqué que le problème qu’éprouvaient les membres de l’agent négociateur était qu’ils sont des pilotes brevetés à titre de titulaires d’un document d’aviation canadien et qu’en vertu de la Loi sur l’aéronautique, ils doivent respecter le RAC. Il a renvoyé aux articles 401.03 et 401.05 du RAC, qui se lisent comme suit :

401.03 (1) Sous réserve du paragraphe (2), il est interdit à toute personne d’agir en qualité de membre d’équipage de conduite ou d’exercer les avantages d’un permis, d’une licence ou d’une qualification de membre d’équipage de conduite à moins que les conditions suivantes ne soient respectées :

  1. la personne est titulaire du permis, de la licence ou de la qualification pertinents;
  2. le permis, la licence ou la qualification est valide […].

[…]

401.05 (1) Malgré toute disposition contraire de la présente sous-partie, il est interdit au titulaire d’un permis, d’une licence ou d’une qualification de membre d’équipage de conduite, autre qu’un titulaire de licence de mécanicien navigant, d’exercer les avantages du permis, de la licence ou de la qualification à moins qu’il ne satisfasse à l’une ou l’autre des conditions suivantes :

  1. il a agi en qualité de commandant de bord ou de copilote d’un aéronef dans les cinq années qui précèdent le vol; […].

475        M. Holbrook a déclaré que les qualifications minimales du Conseil du Trésor exigent que tous les employés du groupe AO maintiennent une licence de pilote de ligne et de pilote professionnel valide. Le Conseil du Trésor précise que ces qualifications sont obligatoires pour exercer les tâches décrites dans le groupe AO, qui concernent des activités de vérification et de surveillance. À son avis, l’article 401.05 du RAC interdit à un employé d’exercer ces tâches sans en être qualifié. Le paragraphe 7.3(3) de la Loi sur l’aéronautique exige expressément le respect du RAC. Pour ces motifs, l’agent négociateur estimait qu’il était approprié d’établir des exigences dans la convention collective qui étaient conformes aux obligations juridiques de ses membres.

476        Selon M. Holbrook, la seule façon dont un titulaire de licence peut maintenir ses compétences est en pilotant un aéronef. Il est d’avis qu’un simulateur n’est pas un aéronef et que l’utilisation continue de simulateurs par les employés ne permettra plus qu’ils se qualifient pour effectuer des vols de vérification. Il a soulevé cette question à la table des négociations.

477        L’employeur a indiqué qu’il délibérerait sur la question et qu’il exerçait ses activités en vertu d’une exemption à l’article 401.05 du RAC.

478        Le 23 août, le directeur général, Cadre réglementaire de la sécurité aérienne, au nom du ministre des Transports, exerçant un pouvoir en vertu du paragraphe 5.9(2) de la Loi sur l’aéronautique, a adopté l’exemption RCN-053-2016 dans l’intérêt public, qui exemptait les titulaires d’un permis canadien de pilote ou d’une licence canadienne de pilote qui n’avaient pas agi en qualité de commandant de bord ou de copilote d’un aéronef dans les cinq (5) années précédant le vol des exigences de l’alinéa 401.05(1)a) du RAC et qui leur offrait un autre moyen de satisfaire aux exigences en leur offrant l’option de suivre un programme de formation pour pilote sur un simulateur de vol complet.

479        Du point de vue de l’agent négociateur, il a présenté une proposition à la table des négociations selon laquelle les membres piloteraient un aéronef une fois dans les cinq (5) années dans le cadre du programme de maintien des compétences. L’employeur a exercé son pouvoir en tant qu’employeur et en tant qu’organisme de réglementation pour changer les règles pour tous les pilotes du pays afin de se dégager de l’exigence de traiter les propositions de l’agent négociateur visant l’article 47 de la convention collective.

480        M. Holbrook a renvoyé à un certain nombre de documents que Transports Canada a fournis en ce qui concerne la rédaction de l’exemption en raison d’une demande présentée en vertu de la Loi sur l’accès à l’information (L.R.C. (1985), ch. A-1). Il a renvoyé à un courriel provenant de M. Collins portant sur le par. 401.05(3) du RAC qui était daté du 28 avril 2016 et adressé à M. McCrorie, qui se lit en partie comme suit :

[Traduction]

[…]

Plus tôt cette semaine, l’APFC a présenté de nouveau la question concernant le paragraphe 401.05(3) du RAC. Essentiellement, la question concernant le délai de cinq (5) ans ne disparaîtra pas et l’APFC ne cessera pas de présenter cette question à la table jusqu’à ce que l’une des deux situations suivantes survienne :

  1. TC s’assure que tous les exploitants aériens pilotent un avion ou un hélicoptère au moins une fois tous les cinq (5)ans;
  2. une exemption est rédigée conformément à ce qui suit, afin de s’assurer que les simulateurs de catégories C et D sont reconnus comme un équivalent.

J’espère que nous comprenons tous que, dans l’ensemble de la discussion avec l’APFC, cette question concernant le paragraphe 401.05(3) du RAC constitue une principale question et que nous sommes paralysés jusqu’à ce qu’elle soit réglée.

[…]

481        Le 28 avril 2016, M. McCrorie a répondu comme suit :

[Traduction]

Je pense que nous souhaitons toujours adopter une exemption globale. La question est-elle de savoir quelles sont les priorités concurrentes? Il faudrait peut-être que Bob réponde à cette question puisque ce sont les Normes de l’aviation commerciale qui rédige le document de discussion.

Je crois que nous devons également mieux comprendre l’incidence opérationnelle de ne pas avoir l’exemption – comment la question concernant le délai de cinq (5) ans touche-t-elle la capacité d’un inspecteur d’accomplir son travail (p. ex. effectuer une surveillance)?

Selon ce dont je me souviens de notre dernière discussion, le Règlement exige un vol tous les cinq ans pour exercer l’avantage d’une licence de pilote (c.-à-d. piloter un aéronef), il ne concerne pas la validité de la licence. Je crains que l’APFC ne confonde son besoin d’avoir une licence de pilote de ligne avec la capacité d’exercer les avantages de cette licence.

482        M. Holbrook ne souscrivait pas à l’opinion de M. McCrorie selon laquelle le RAC exigeait un vol tous les cinq (5) ans pour piloter un aéronef et n’a pas traité de la validité de la licence. À son avis, l’article 401.03 du RAC envisage que l’avantage de la licence comprend plus le simple pilotage d’un aéronef.

483        Le 28 avril 2016, M. Collins a répondu comme suit :

[Traduction]

Je comprends Aaron… Je suppose que cela n’est présenté que dans le contexte de la mise à jour des connaissances et de la capacité d’exercer les avantages… et non la capacité d’accomplir leur travail (au moins pour le moment)… dans le contexte du maintien des compétences, l’APFC souhaite s’assurer que ses membres pilotent un aéronef au moins tous les cinq ans afin qu’ils soient en mesure d’exercer leurs avantages si l’une des situations suivantes survient :

  1. il ou elle choisit de quitter la fonction publique et avoir la même mise à jour des connaissances que lorsqu’il ou elle est arrivé (certains inspecteurs sont partis récemment en raison de cette préoccupation);
  2. faire l’objet d’un RE et être à la recherche d’un emploi;
  3. réintégrer le programme de vol régulier après avoir participé à un autre programme de vol pendant plus de cinq ans;
  4. participer à un programme de vol en ligne proposé après avoir participé à un autre programme de vol pendant plus de cinq ans;

Tout cela afin qu’ils ne soient pas tenus d’être assujettis à la requalification, conformément à l’al. 401.05(1)b) qui entraîne un coût financier et je croirais que nous souhaiterions envisager également le maintien en poste dans cette situation.

484        M. Holbrook était d’avis que M. Collins formulait des hypothèses quant aux motifs de l’agent négociateur, ce qui n’a pas fait progresser l’exemption. À son avis, ces motifs n’étaient pas justifiés. Selon l’agent négociateur, il n’était pas raisonnable que l’employeur conclue que les employés étaient motivés à maintenir leurs connaissances à jour pour trouver un meilleur emploi s’ils quittaient la fonction publique. En outre, le point 4 renvoie à un programme de vol en ligne. À ce stade, il n’y avait eu aucune discussion d’un tel programme et ni l’une ni l’autre des parties n’avaient présenté une proposition à la table des négociations.

485        M. Holbrook a déclaré que des 106 pages du rapport sur l’accès à l’information (AIPRP), seulement quatre de ces pages ont trait aux motifs de l’exemption. Cela indiquait à l’agent négociateur que Transports Canada n’avait pas suivi la directive de l’Aviation civile concernant les exemptions. Il n’existait aucune évaluation consignée de l’intérêt public. L’employeur s’est opposé à cette opinion hypothétique puisqu’elle n’avait aucune valeur probante.

486        M. Holbrook a affirmé que même si l’exemption a maintenant été mise en œuvre, ses membres ne satisfont toujours pas aux exigences en matière de mise à jour des connaissances. Ils n’ont été offerts que la formation dans un simulateur. À son avis, l’employeur ne leur offre pas la formation requise en vertu du Règlement ou ni l’exemption. Ils doivent être affectés à un programme de formation d’un transporteur aérien particulier ou à un programme approuvé par Transports Canada.

487        M. Holbrook a renvoyé à une directive de TCAC publiée le 1er octobre 2009 concernant les critères à appliquer pour accorder les exemptions des exigences du Règlement. Selon la définition prévue dans la directive, une « exemption » autorise une personne ou une entité à agir autrement que selon les exigences réglementaires normales. Il existe deux façons dont le respect d’un règlement régissant l’aviation ne sera pas requis. La première façon est prévue dans le Règlement même et la deuxième est une exemption adoptée au moyen d’une décision exécutive prise en vertu du paragraphe 5.9(2) de la Loi sur l’aéronautique, qui autorise le ministre à offrir une exemption des dispositions d’une loi ou d’un règlement aux conditions qu’il juge à propos.

488        Des exemptions ne peuvent être accordées que dans des circonstances imprévues qui ne sont pas susceptibles de se reproduire ou lorsque le Règlement est modifié en vue de régler certaines situations. Le directeur général ou les directeurs régionaux de l’Aviation civile détiennent le pouvoir délégué du ministère pour adopter des exemptions. Elles peuvent être accordées si le ministre est d’avis qu’elles sont dans l’intérêt public et que la sécurité ou la sûreté aérienne ne risque pas d’être compromise.

489        Le document indiquait également que dans la plupart des cas, les exemptions sont adoptées uniquement dans des circonstances exceptionnelles et qu’elles peuvent être accordées uniquement à la suite d’une analyse approfondie des répercussions de leur octroi sur l’aviation.

490        Selon M. Holbrook, le processus d’exemption comporte la présentation d’une demande d’exemption convaincante par un client. Une telle demande exigerait que Transports Canada évalue la question de savoir si l’argument à l’appui démontre que si elle est accordée, l’exemption sera dans l’intérêt public et ne touchera pas la sécurité ou la sûreté aérienne. Il était également d’avis que ce processus comportait un examen juridique des documents d’exemption.

491        Lorsqu’il a examiné les documents qui ont été fournis en raison de la demande d’AIPRP de l’agent négociateur, M. Holbrook n’a trouvé aucune preuve qu’un client a demandé une exemption. Les seuls renseignements dans les documents ayant trait à une demande portaient sur le fait que la direction souhaitait répondre aux questions que l’APFC soulevait dans le cadre des négociations.

492        À son avis, rien dans les documents ne permettait de conclure que l’exemption était dans l’intérêt public; Transports Canada n’a pas non plus effectué une analyse de la sécurité ou une évaluation des risques. Puisque le processus exige que Transports Canada détermine si un client a débattu avec succès sa demande d’exemption, le processus est destiné aux clients externes de Transports Canada et non à son usage.

493        Selon les documents obtenus à l’aide de la demande d’AIPRP, aucune demande n’a été présentée par les pilotes canadiens ou du milieu aéronautique. La seule demande a été présentée par le personnel du ministre à l’égard des employés qui travaillent pour le ministre.

494        L’APFC se préoccupait du fait que l’exemption globale déclencherait d’autres discussions sur la réalisation d’autres économies à partir du programme de vol de Transports Canada. Selon l’agent négociateur, l’exemption a pour but de cibler le PMCA.

a. Contre-interrogatoire

495         On a demandé à M. Holbrook si une exemption diffère d’une modification, et M. Holbrook a répondu par l’affirmative. Il a déclaré que l’APFC n’a aucun problème relatif à l’article 401.25 du RAC, mais qu’elle avait un problème en ce qui concerne le fait que les membres ne reçoivent aucune formation. On lui a demandé si le problème serait réglé en insérant le RAC dans la convention collective. Il a répondu en affirmant que la proposition de l’agent négociateur avait pour but que la convention collective soit en conformité avec le RAC. On lui a posé la question suivante : S’il n’y a aucune conformité avec le Règlement, comment son insertion dans la convention collective sera-t-elle utile? Il a répondu en déclarant qu’en l’insérant, l’employeur ne pourrait plus contrevenir au Règlement. Le titulaire individuel d’une licence est la personne tenue responsable de la violation du RAC.

496        L’agent négociateur avait épuisé tous ses moyens consultatifs pour régler le problème et avait présenté la proposition de négociation dans sa clause 47.09 en octobre 2015.

497        On lui a demandé si le non-respect de l’article 401.05 du RAC avait fait l’objet d’une discussion avant octobre 2015. Il a répondu que, lorsque Transports Canada a vendu les aéronefs, il en a été question dans le contexte d’une séance de discussion ouverte. Il pensait qu’il en avait également été question lors d’une réunion du comité directeur à laquelle il n’avait pas assisté.

2. M. McConnell

498        M. McConnell a renvoyé au RAC et aux exigences de mise à jour des connaissances énoncées à l’article 401.05 et en ce qui concerne les instruments à l’alinéa 401.05(3)b).

499        Il a été renvoyé à la clause 47.03 de la convention collective et on lui a demandé de confirmer que tous ses membres avaient maintenu leurs compétences. Il a répondu qu’ils devaient satisfaire aux exigences de l’article 401.05 du RAC et que la seule façon qu’ils pouvaient se conformer avec le Règlement était en pilotant un aéronef.

500        On lui a demandé s’il savait que l’article 401.05 du RAC avait fait l’objet d’une discussion depuis au moins 2013. Il a reconnu cette discussion.

B. Pour l’employeur

1. M. Guindon

501        M. Guindon était au courant de l’exemption et avait participé à une discussion sur une exemption possible tenue avec la haute direction du ministère des Transports.

502        En 1996, lorsque le RAC a été adopté, les simulateurs étaient peu utilisés. Si un titulaire d’une licence d’équipage de conduite souhaitait exercer l’avantage de la licence, il devait avoir agi en qualité de commandant de bord ou de copilote d’un aéronef dans les cinq (5) années auparavant. Depuis 1996, il y a eu des progrès technologiques considérables en ce qui concerne les simulateurs de vol. Les pilotes vérificateurs du milieu aéronautique, ainsi que les inspecteurs de Transports Canada ont maintenu leurs compétences sur un équipement de simulation de pointe fourni par les principaux transporteurs aériens. Toutefois, le RAC exigeait que ces titulaires de licence louent un petit aéronef avec un instructeur d’une école de pilotage locale pour satisfaire à leurs exigences en matière de maintien de compétences.

503        La proposition a fait l’objet de discussions avec l’APFC avant le début des négociations. Il s’agissait d’une exemption de l’application du Règlement, qui n’avait pas été modifié, mais il existait un plan réglementaire. Les travaux ont débuté en 2018 pour changer le Règlement.

504        On a demandé à M. Guindon pourquoi il était nécessaire de créer une exemption de l’application du Règlement entre-temps. Il a répondu qu’une exemption réglementaire est utilisée lorsque le processus réglementaire sera long. Il s’agit d’une exemption globale réputée être dans l’intérêt public.

505        Son objectif était de permettre aux titulaires de licence de satisfaire à leurs exigences de mise à jour des connaissances dans un simulateur de vol complet de niveau C ou D, à savoir les niveaux les plus élevés, en tenant compte des progrès technologiques réalisés depuis 1996.

506        Du point de vue de la sécurité, les risques attribuables à l’utilisation de simulateurs de vol complets de niveau C ou D ont été atténués en limitant leur utilisation aux pilotes qui avaient suivi avec succès un programme de formation de pilotes approuvé.

2. M. Collins

507        M. Collins a déclaré qu’une exemption était toujours adoptée dans l’intérêt du public, à condition que la sécurité ne soit pas compromise.

508        On lui a demandé ce qui avait déclenché la nécessité de créer une exemption. Il a déclaré que les simulateurs étaient reconnus comme étant équivalents à un aéronef dans deux dispositions du RAC. Pour un capitaine d’Air Canada, s’il ou elle n’a pas piloté un aéronef pendant une période de 90 jours, il ou elle doit utiliser un simulateur.

509        Le deuxième exemple survient lorsqu’il s’agit de la première fois qu’un étudiant pilote un aéronef avec des passagers. Jusqu’en 2000 environ, Air Canada devait louer un aéronef pour valider une vérification de compétence du pilote.

510        Le Règlement a été modifié afin de prévoir qu’un simulateur de niveau D puisse remplacer un aéronef. Cette modification avait pour objet de reconnaître que la technologie avait évolué. La règle était en vigueur depuis 21 ans.

511        En 2005, ou vers cette année-là, Air Canada a commencé à embaucher des pilotes à la retraite pour effectuer les vérifications de compétence des pilotes. Ils ne pilotaient pas un aéronef et 12 ans plus tard, ils ne pilotent toujours pas un aéronef. Ils maintiennent leurs compétences à l’aide d’un simulateur. Transports Canada a jugé médicalement inaptes des pilotes qui travaillent en tant qu’instructeurs pendant plus de cinq ans et qui maintiennent leurs qualifications à l’aide de simulateurs. Les instructeurs de carrières à la société CAE (une organisation de formation en carrière) forment les personnes dans des simulateurs. Ils n’ont pas la possibilité de piloter un aéronef.

512        L’exemption s’applique à toutes les licences de pilote canadiennes civiles, les licences de pilote professionnel et de pilote de loisir. Elle sert les intérêts de beaucoup de personnes.

513        La « Directive de l’Aviation civile – Exemptions à l’application des exigences réglementaires », en vigueur depuis le 1er novembre 2009, définit les paramètres et les critères pour accorder des exemptions à l’application des exigences réglementaires. Le premier type d’exemption est prévu dans le Règlement même. Le deuxième type est accordé au moyen d’une décision exécutive en vertu du paragraphe 5.9(2) de la Loi sur l’aéronautique.

514        M. Collins a déclaré que le directeur général de l’Aviation civile détient le pouvoir délégué du ministre en ce qui concerne les questions liées aux exemptions, qui doit être dans l’intérêt public et ne doit pas compromettre la sécurité. Une exemption peut être propre à un exploitant aérien ou elle peut être globale. Il a déclaré que tous les pilotes brevetés peuvent bénéficier de l’utilisation de la technologie d’un simulateur au lieu d’utiliser un aéronef.

515        La politique indique que les exemptions ne seront accordées que dans des circonstances imprévues qui ne sont pas susceptibles de se reproduire ou lorsque le règlement est modifié en vue de régler certaines situations. M. Collins a affirmé que la deuxième situation s’applique en l’espèce.

516        La politique établit les étapes fondamentales à suivre dans le cadre du processus d’exemption dans des circonstances où un client demande une exemption.

517        M. Collins a déclaré que cette disposition ne s’appliquait pas aux circonstances puisqu’il s’agissait d’une exemption globale qui n’a pas été demandée par un client individuel. La politique ne comporte aucune disposition qui porte sur une exemption globale. L’article 5.9 de la Loi sur l’aéronautique a été invoqué parce qu’on a jugé que l’exemption était dans l’intérêt public.

518        M. Collins a renvoyé au document d’évaluation et à la recommandation préparés à l’appui de l’exemption par les inspecteurs de Transports Canada. Il est signé par l’inspecteur des Normes de l’aviation commerciale qui a préparé l’évaluation. L’évaluation renvoie à l’intérêt public et à la sécurité aérienne comme suit :

[Traduction]

[…]

Il est dans l’intérêt public de permettre aux titulaires d’un permis canadien de pilote ou d’une licence canadienne de pilote de satisfaire aux exigences en matière de mise à jour des connaissances dans un simulateur de vol complet de niveau C ou D plutôt que d’avoir à piloter un véritable aéronef dans les cinq (5) années précédant le vol. Cette exemption permettra aux pilotes qui occupent des postes de gestion ou qui sont employés par Transports Canada Aviation Civile (TCAC) de satisfaire aux exigences en matière de mise à jour des connaissances au moyen des programmes de formation des pilotes récurrents au sein de leur société ou organisation.

En tenant compte des progrès technologiques de la simulation de vol depuis la promulgation du Règlement de l’aviation canadien en 1996, le réalisme, la fidélité et la résolution de la flotte actuelle de simulateurs de vol complets offrent une norme qui est équivalente à la location d’un petit aéronef avec un instructeur d’une Unité de formation au pilotage locale (école de pilotage) ou meilleure que celle-ci, qui a été envisagée pendant l’élaboration du RAC.

[…]

519        L’évaluation renvoie à la sécurité aérienne comme suit :

[Traduction]

[…]

Les risques attribuables à l’instauration de l’option d’utiliser des simulateurs de vol complet de niveau C ou D approuvés sont atténués en limitant leur utilisation aux pilotes qui ont suivi avec succès un programme de formation des pilotes approuvé, conformément à la sous-partie VII du Règlement de l’aviation canadien.

[…]

520        L’évaluation a été examinée et approuvée par le chef des Normes commerciales; le directeur des Normes, qui est chargé de veiller à ce que le processus soit suivi; les Affaires réglementaires; et les directeurs généraux.

521        On a demandé à M. Collins si Transports Canada avait tenu compte du fait que l’APFC avait déposé une proposition dans le cadre des négociations collectives relativement à l’article 47 de la convention collective. Il a répondu par la négative et que la seule obligation de Transports Canada consistait à suivre le processus établi dans le RAC. À son avis, il n’existe aucune obligation d’examiner les propositions relatives à la convention collective.

a. Contre-interrogatoire

522        L’exemption n’a pas été adoptée en tenant compte des propositions de négociations de l’APFC. Les transporteurs aériens commerciaux, comme Air Canada, emploient des pilotes pour effectuer des évaluations et ces pilotes sont à la retraite du pilotage. L’exemption permet à ces pilotes à la retraite de satisfaire aux exigences en matière de mise à jour des connaissances au moyen d’un simulateur approuvé plutôt que d’être tenu de piloter un véritable aéronef dans les cinq (5) années précédentes.

523        Lorsqu’on lui a demandé si l’exemption avait été rédigée en partie pour traiter de la situation à l’égard des pilotes de Transports Canada afin qu’ils puissent satisfaire aux exigences en matière de mise à jour des compétences, M. Collins a déclaré qu’il n’avait pas rédigé l’exemption.

524        Il a été renvoyé au courriel qui indique que l’agent négociateur ne cessera pas de présenter la question. On lui a demandé s’il conviendrait que l’exemption a été rédigée en tenant compte de l’APFC. Il a répondu que cela avait été discuté avec l’APFC lors de la réunion du comité directeur. Ils n’ont pas réussi à s’entendre.

525        Il a affirmé qu’ils souhaitaient régler la question. On lui a demandé si l’exemption répondait à la préoccupation. Il a répondu par l’affirmative, mais uniquement en partie. Une exemption ne constitue pas une obligation. Une personne n’est pas tenue de suivre l’exemption. Une personne peut quand même piloter par elle-même.

526        Il a confirmé qu’il s’agissait d’une exemption globale dans l’intérêt public et qu’elle s’appliquait à toute personne titulaire d’une licence de pilote. L’exemption décrit la pratique au cours des 15 à 20 dernières années. La formation pour piloter un aéronef dans un simulateur est réputée être suffisante. Transports Canada ne pilote pas un aéronef; il effectue des surveillances et des contrôles de compétences. S’il pilotait un aéronef, la réalité serait différente.

C. Arguments de l’APFC

527        Les pilotes doivent maintenir leurs compétences afin de s’acquitter de leurs obligations d’emploi. Les normes de qualification minimales de l’employeur exigent le maintien de licences valides et de qualifications. Afin qu’une licence soit considérée comme valide, un pilote doit satisfaire aux exigences réglementaires en matière de mise à jour des connaissances et de maintien des compétences, en plus d’être détenteur d’un certificat médical valable. L’idée d’exiger la mise à jour des connaissances et le maintien des compétences est de s’assurer que l’ensemble de compétences d’un pilote correspond, à tout le moins, à ses compétences au moment où il a obtenu son certificat ou ses qualifications et qu’il les démontre régulièrement dans un environnement réel.

528        Les exigences en matière de mise à jour des compétences figurent à l’article 401.05 du RAC et à la norme correspondante à l’article 421.05 du RAC. Le paragraphe 401.05(1) du RAC énonce qu’il est interdit aux pilotes d’exercer les avantages de leur permis, de leur licence ou de leur qualification à moins qu’ils n’aient agi en qualité de commandant de bord ou de copilote d’un aéronef dans les cinq (5) années qui précèdent le vol ou qu’ils n’aient terminé une révision en vol dispensée un instructeur de vol et qu’ils n’aient réussi l’examen applicable précisé dans les normes de délivrance des licences du personnel dans les 12 mois qui précèdent le vol.

529        M. Holbrook a témoigné en disant que lorsque l’avis de négocier a été signifié en septembre 2014, l’agent négociateur se préoccupait du fait qu’un nombre important de ses membres, y compris les inspecteurs des principaux transporteurs aériens, ne se voyaient offrir aucun programme de mise à jour des connaissances qui permettaient de satisfaire aux exigences réglementaires de l’article 401.05 du RAC.

530        En conséquence, la proposition de l’agent négociateur concernant l’article 47 de la convention collective et le maintien de la compétence professionnelle en aviation comprenait l’exigence suivante : [traduction] « Afin de satisfaire à l’exigence minimale du Règlement de l’aviation canadien, chaque employé doit être affecté à un programme qui comprend le pilotage d’un aéronef au moins une fois pendant une période de soixante (60) mois. »

531        Le 10 mars 2016, l’Association a appris que Transports Canada avait l’intention de mettre en œuvre une modification législative concernant l’article 401.05 du RAC. À partir de ce moment-là, un pilote ne serait plus tenu d’agir en qualité de commandant de bord ou de copilote d’un aéronef, mais il pourrait satisfaire à l’exigence en matière de mise à jour des connaissances toutes les cinq années uniquement à l’aide d’un simulateur.

532        Cette exemption douteuse de l’application du RAC permettrait de maintenir les compétences de pilote uniquement à l’aide de simulateurs.

533        L’agent négociateur n’a été consulté à aucun moment au sujet de ces changements. Il a été entièrement exclu du processus. En raison des renseignements obtenus à l’aide d’une demande d’AIPRP, l’Association a appris que le principal ou l’unique objectif de la mise en œuvre de l’exemption par Transports Canada était d’éliminer l’exigence selon laquelle les membres de l’Association devaient piloter un aéronef au moins tous les cinq ans – une question qui était précisément soumise à la table des négociations.

534        Au moyen d’un courriel daté du 20 avril 2016, M. Collins a envoyé ce qui suit à certains membres de la haute direction de Transports Canada :

[Traduction]

[…]

Savez-vous où nous en sommes en ce qui concerne la priorité? Comme cela a été mentionné lors de notre dernière réunion, l’exemption globale déclenchera la capacité d’amorcer des discussions permettant de réaliser plus d’économies dans le cadre du programme de vol de TC dont toutes les parties pourraient bénéficier et qui pourraient être dans l’intérêt de celles-ci.

535        Vers le 28 avril 2016, M. Collins a fait un suivi à l’aide du deuxième courriel suivant en rappelant à ses collègues qu’une exemption était nécessaire pour répondre aux questions soulevées à maintes reprises par l’agent négociateur :

[Traduction]

[…]

Plus tôt cette semaine, l’APFC a présenté de nouveau la question concernant le paragraphe 401.05(3) du RAC. Essentiellement, la question concernant le délai de cinq (5) ans ne disparaîtra pas et l’APFC ne cessera pas de présenter cette question à la table jusqu’à ce qu’une des deux situations suivantes survienne :

  1. que TC s’assure que tous les exploitants aériens pilote un avion ou un hélicoptère au moins une fois tous les cinq (5) ans;
  2. une exemption est rédigée conformément à ce qui suit, afin de s’assurer que les simulateurs de catégories C et D sont reconnus comme un équivalent.

J’espère que nous comprenons tous que dans l’ensemble de la discussion avec l’APFC, cette question concernant le paragraphe 401.05(3) du RAC constitue une principale question et que nous sommes à un arrêt jusqu’à ce qu’elle soit réglée.

[…]

D. Arguments de l’employeur

536        L’exemption de l’application du Règlement prévoit qu’un titulaire d’un permis canadien de pilote ou d’une licence canadienne de pilote a l’option de suivre avec succès un programme de formation des pilotes dans un simulateur de vol complet de niveau C ou D approuvé.

537        L’APFC a soutenu que le principal ou l’unique objectif de la mise en œuvre de l’exemption de l’application du Règlement était que ses membres ne seraient plus tenus de piloter un aéronef au moins tous les cinq ans.

538         L’allégation de l’APFC n’est pas fondée puisqu’elle ne tient pas compte du fait que la décision de modifier un règlement s’applique à l’ensemble du milieu aéronautique au Canada et non seulement aux membres de l’APFC. Transports Canada devait s’adapter à un milieu nouveau, plus moderne et responsable sur le plan financier en tenant compte des progrès technologiques de la simulation de vol depuis l’entrée en vigueur du RAC en 1996.

539        Comme cela est indiqué dans le document d’évaluation préparé en vue de donner la justification de l’exemption, le réalisme, la fidélité et la résolution de la flotte actuelle de simulateurs de vol complets offrent une norme qui est équivalente à la location d’un petit aéronef avec un instructeur d’une école de pilotage, ou meilleure que celle-ci, qui a été envisagée pendant l’élaboration du RAC. Ces simulateurs avancés n’existaient pas lorsque le Règlement a été élaboré en 1996.

540        Il convient de souligner le fait que l’utilisation de simulateurs, conformément au témoignage de M. Guindon et de M. Collins, était déjà offerte dans le cadre des PMCA approuvés, qui avaient déjà été acceptés par l’APFC. En outre, les simulateurs de niveau C et D sont disponibles à l’échelle mondiale et sont utilisés par les principaux transporteurs partout au monde pour former leurs pilotes.

541        La question relative au simulateur avait déjà été examinée dans APFC 2014. L’arbitre de grief a confirmé ce qui suit à l’égard des membres de l’APFC : « Le droit contractuel constituait le droit de maintenir sa compétence professionnelle, et non le droit de piloter un aéronef. »

542        L’exemption de l’application du Règlement, qui permet aux pilotes canadiens de satisfaire aux exigences en matière de mise à jour des connaissances dans un simulateur de vol complet de niveau C ou D plutôt que d’avoir à piloter un véritable aéronef, a été établie dans l’intérêt public.

543        Les courriels provenant de M. Collins, auxquels l’AFPC a renvoyé dans ses arguments aux paragraphes 535 et 536, ne constituent pas une preuve que l’exemption avait été élaborée uniquement pour empêcher les membres de l’APFC de piloter un aéronef au moins tous les cinq ans.

544        Conformément au témoignage de M. Collins, la question relative aux simulateurs constitue une question en suspens depuis un certain nombre d’années pour le comité directeur. Dans ses courriels, il a traité de l’incidence particulière d’une exemption sur les pilotes de Transports Canada. Il n’a pas le pouvoir de créer une exemption de l’application du RAC et n’a pas participé à ce processus.

E. Analyse

545        J’estime qu’il est utile à l’examen de ce résultat de répéter les dispositions législatives pertinentes de la Loi sur l’aéronautique et du RAC. La Loi autorise le gouverneur en conseil à prendre des règlements concernant la délivrance de licences de membre d’équipage de conduite, comme suit :

4.9 Le gouverneur en conseil peut prendre des règlements sur l’aéronautique et notamment en ce qui concerne :

  1. l’agrément des personnes suivantes :
    1. les membres d’équipage de conduite des aéronefs, les contrôleurs de la circulation aérienne, les préposés à l’équipement destiné à fournir des services liés à l’aéronautique et quiconque assure de tels services, […].

546        Le RAC prévoit ce qui suit aux articles 401.03 et 401.05 :

401.03 (1) Sous réserve du paragraphe (2), il est interdit à toute personne d’agir en qualité de membre d’équipage de conduite ou d’exercer les avantages d’un permis, d’une licence ou d’une qualification de membre d’équipage de conduite à moins que les conditions suivantes ne soient respectées :

  1. la personne est titulaire du permis, de la licence ou de la qualification pertinents;
  2. le permis, la licence ou la qualification est valide;
  3. la personne est titulaire du certificat médical pertinent;
  4. la personne est en mesure de produire le permis, la licence ou la qualification et le certificat lorsqu’elle en exerce les avantages.

[…]

401.05 (1) Malgré toute disposition contraire de la présente sous-partie, il est interdit au titulaire d’un permis, d’une licence ou d’une qualification de membre d’équipage de conduite, autre qu’un titulaire de licence de mécanicien navigant, d’exercer les avantages du permis, de la licence ou de la qualification à moins qu’il ne satisfasse à l’une ou l’autre des conditions suivantes :

  1. il a agi en qualité de commandant de bord ou de copilote d’un aéronef dans les cinq années qui précèdent le vol;
  2. dans les 12 mois qui précèdent le vol :
    1. il a terminé une révision en vol, conformément aux normes de délivrance des licences du personnel, dispensée par le titulaire d’une qualification d’instructeur de vol pour la même catégorie d’aéronef,
    2. l’instructeur de vol qui a dispensé la révision en vol a attesté dans le carnet personnel du titulaire que ce dernier a les habiletés exigées pour que lui soit délivré un permis ou une licence précisé dans les normes de délivrance des licences du personnel,
    3. le titulaire a réussi l’examen applicable précisé dans les normes de délivrance des licences du personnel.

(2) Malgré toute disposition contraire de la présente sous-partie, il est interdit au titulaire d’un permis ou d’une licence de membre d’équipage de conduite, autre qu’un titulaire de licence de mécanicien navigant, d’exercer les avantages du permis ou de la licence à bord d’un aéronef, à moins qu’il ne satisfasse aux conditions suivantes :

  1. il a terminé avec succès un programme de formation périodique conformément aux normes de délivrance des licences du personnel dans les 24 mois qui précèdent le vol;
  2. lorsqu’un passager autre qu’un examinateur de test en vol désigné par le ministre se trouve à bord de l’aéronef, le titulaire a effectué, dans les six mois qui précèdent le vol :
    1. dans le cas d’un aéronef autre qu’un planeur ou un ballon, à bord d’un aéronef de la même catégorie et classe que l’aéronef ou à bord d’un simulateur de niveau B, C ou D de la même catégorie et classe que l’aéronef :
      1. au moins cinq décollages et cinq atterrissages de jour ou de nuit, si le vol est effectué en totalité de jour,
      2. au moins cinq décollages et cinq atterrissages de nuit, si le vol est effectué en totalité ou en partie de nuit, […].

[…]

547        La Loi sur l’aéronautique prévoit des exemptions de l’application du Règlement comme suit, qui peuvent être édictées par le gouverneur en conseil et le ministre des Transports :

[…]

5.9 (1) Le gouverneur en conseil peut, par règlement et aux conditions prévues, soustraire, individuellement ou par catégorie, toute personne, tout produit aéronautique, aérodrome ou service, ou toute installation à l’application des règlements ou arrêtés pris sous le régime de la présente partie.

(2) Le ministre ou le fonctionnaire du ministère des Transports qu’il autorise pour l’application du présent paragraphe peut, aux conditions qu’il juge à propos, soustraire, individuellement ou par catégorie, toute personne, tout produit aéronautique, aérodrome ou service, ou toute installation à l’application des règlements, arrêtés ou mesures de sûreté pris sous le régime de la présente partie s’il estime qu’il est dans l’intérêt public de le faire et que la sécurité ou la sûreté aérienne ne risque pas d’être compromise.

[…]

548        Le 23 août 2016, conformément au paragraphe 5.9(2) de la Loi sur l’aéronautique, le directeur général, Cadre réglementaire de la sécurité aérienne, au nom du ministre des Transports, a exempté les titulaires d’une licence canadienne de pilote privé, de pilote professionnel, de pilote de ligne, de pilote en équipage multiple ou d’un permis canadien de pilote de loisir – aéronef, de l’obligation de satisfaire aux exigences de mise à jour des connaissances énoncées à l’alinéa 401.05(1)a) du RAC. L’exemption se lit comme suit :

[Traduction]

[…]

  1. En plus des exigences de mise à jour des connaissances énoncées aux paragraphes 401.05(2) et 401.05(3) du RAC, le titulaire d’un permis canadien de pilote ou d’une licence canadienne de pilote n’exercera pas les avantages de la licence ou du permis, à moins que le titulaire ne réponde à l’un des deux critères suivants dans les cinq (5) années qui précèdent le vol :
    1. il a agi en qualité de commandant de bord ou de copilote d’un aéronef;
    2. il a suivi avec succès un programme de formation des pilotes approuvé, conformément aux dispositions applicables de la sous-partie VII du RAC, dans un simulateur de vol complet de niveau C ou D approuvé aux termes de l’article 606.03 du RAC.

[…]

549        L’exemption demeure en vigueur jusqu’au 1er septembre 2021, à la date à laquelle il y a manquement à une des conditions de l’exemption, à la date à laquelle une modification apportée à la disposition appropriée du RAC entre en vigueur, ou à la date à laquelle l’exemption est annulée par le ministre, selon la première de ces dates.

550        L’agent négociateur a affirmé qu’en exemptant tous les pilotes canadiens de l’obligation de satisfaire aux exigences de mise à jour des connaissances énoncées à l’article 401.05 du RAC s’ils suivent avec succès un programme de formation des pilotes dans un simulateur de vol complet de niveau C ou D plutôt qu’en agissant en qualité de commandant de bord ou de copilote d’un aéronef dans les cinq (5) années précédant le vol, le ministre des Transports a contrevenu à l’article 107 de la Loi en modifiant les conditions d’emploi après que l’avis de négocier avait été donné.

551        La première question à trancher consiste à savoir si l’article 401 du RAC constitue une condition d’emploi entre l’employeur et les employés de l’unité de négociation. Selon la Loi sur l’aéronautique, le mandat du gouverneur en conseil consiste à prendre des règlements concernant l’agrément ou la délivrance de licences de membre d’équipage de conduite. C’est ce que le gouverneur en conseil a fait à l’article 401.

552        La règle s’applique aux exigences en matière de délivrance de licences à tous les pilotes dans l’ensemble de l’industrie aéronautique au Canada. De même, l’exemption de la règle s’applique aux exigences en matière de délivrance de licences, c.-à-d. de maintenir les licences de tous les pilotes au Canada.

553        La convention collective reconnaît que le maintien de la compétence professionnelle en aviation est nécessaire afin que l’employeur exécute son mandat et que les employés exécutent leurs tâches et elle oblige l’employeur à fournir aux inspecteurs jugés médicalement aptes des occasions à maintenir leurs compétences à l’aide d’un aéronef du Ministère ou d’un PMCA approuvé. L’exigence de maintien des compétences est réputée avoir été satisfaite en possédant et en maintenant une licence de pilote de ligne, ce qui est également indiqué dans le PMCA.

554        La condition d’emploi prévue dans la convention collective et dans le PMCA est une obligation imposée à l’employeur de fournir des occasions aux employés de maintenir la validité de leurs licences.

555        À mon avis, les exigences réglementaires relatives à la délivrance des licences à tous les pilotes au Canada, ainsi que les exigences de maintien de ces licences édictées par le gouverneur en conseil, conformément à la Loi sur l’aéronautique, ou les exemptions à ces exigences édictées au nom du ministre des Transports en vertu du pouvoir conféré par cette Loi ne constituent pas des conditions d’emploi entre l’employeur et les employés.

556        L’employeur est tenu de fournir des occasions aux employés de maintenir les exigences relatives à leurs licences de pilotes en vertu de la convention collective et du PMCA. Il s’agit d’une condition d’emploi visée par l’article 107 de la Loi. Le pouvoir du gouverneur en conseil ou du ministre des Transports d’établir des exigences réglementaires concernant la délivrance de licences à tous les pilotes au Canada ou d’établir des exemptions à ces exigences ne constitue pas des conditions d’emploi assujetties à l’article 107 de la Loi.

557        Il convient également de noter que, dans APFC 2014, la CRTFP a conclu que la convention collective et le PMCA dans ce contexte constituaient un droit de maintenir la compétence professionnelle et non le droit de piloter un aéronef.

VI. Question 5 : Communiquer avec les membres de l’APFC

558        L’Association a soutenu qu’en communiquant avec ses membres au moyen de sondages et de réunions, les défendeurs ont sapé les propositions liées au PMCA et, en conséquence, ils sont intervenus dans la formation ou l’administration d’une organisation syndicale ou dans la représentation des fonctionnaires par celle-ci, contrairement au paragraphe 186(1) de la Loi.

A. Pour l’APFC

1. M. Holbrook

559        La plainte de pratiques déloyales déposée par l’agent négociateur a trait aux réunions qui ont été tenues et aux tentatives qui ont été faites en vue de contourner les négociations. Les réunions ont été fixées au sujet du PMCA, plus récemment concernant une option de vol en ligne y afférente. Lors de plusieurs réunions, le directeur général à Ottawa a informé les membres de l’agent négociateur à l’aide d’une série de diapositives de présentation intitulée [traduction] « Visites de surveillance de 2017 ». Une diapositive, sous la rubrique [traduction] « Amorcer la transformation », énonce que [traduction] « [p]lusieurs projets ont été fermés et des changements ont été apportés : – Établissement d’un bureau de gestion de projet – Changements apportés au programme de vol de l’Aviation civile de Transports Canada ». Les séries de diapositives de présentation ont été utilisées aux fins de séances d’information à l’intention de deux associations de l’industrie en 2016.

560        M. Holbrook a participé en répondant aux questions posées par les membres de l’agent négociateur après les réunions. Ils ont interrogé l’agent négociateur au sujet de la possibilité d’un programme de vol en ligne et de sa participation à un tel programme. Ils souhaitaient connaître les progrès réalisés relativement au PMCA et au vol en ligne. Ils ont été amenés à croire que l’agent négociateur y participait d’une manière quelconque. Ils s’intéressaient aux options discutées par la direction. Ils étaient déçus d’apprendre que la direction et l’agent négociateur n’en avaient pas discuté et que l’agent négociateur n’y participait pas.

561        L’agent négociateur est d’avis que le vol en ligne pourrait constituer une option incluse à l’annexe A du PMCA s’il était approuvé par le comité directeur. Toutefois, il n’a pas été soulevé en tant qu’option ni approuvé par ce comité.

562        M. Holbrook était d’avis que le fait que l’employeur a soulevé le vol en ligne auprès des membres de l’agent négociateur a été placé en position défensive relativement à la proposition qu’il avait déposée dans le cadre des négociations collectives en octobre 2015 parce que les membres étaient au courant de la proposition.

563        L’agent négociateur a participé avec l’employeur à un programme de vol en ligne en marge de la négociation collective. En août 2016, M. Holbrook a assisté à un forum en matière de sécurité de l’Association des pilotes de ligne à Washington, D.C. Il a été approché par M. Guindon qui lui a indiqué que l’employeur souhaitait obtenir le consentement de l’agent négociateur d’un programme de vol en ligne qu’il élaborait.

564        M. Holbrook a informé M. Guindon qu’ils s’intéressaient à discuter du concept, mais puisque les parties participaient aux négociations collectives, toute discussion et tout consentement devait avoir lieu à la table des négociations. Il a rappelé à M. Guindon les dispositions relatives au gel prévu par la loi et l’a mis en garde contre la prise de toute mesure unilatérale. La question relative à la tenue de séances d’information directement avec les membres a été soulevée. M. Holbrook a demandé que l’employeur cesse de tenir des discussions sur un programme de vol en ligne possible directement avec les membres et il a déclaré que s’il souhaitait discuter de la possibilité, il devrait le faire à la table des négociations.

2. M. McConnell – Le programme de vol en ligne

565        À la fête de Noël de l’agent négociateur en 2016, M. Guindon a approché M. McConnell parce qu’il souhaitait discuter de quelques questions, dont une était le programme de vol en ligne. La discussion était axée sur la façon dont l’agent négociateur devait accepter le programme de vol en ligne en cours d’élaboration. M. McConnell a dit à M. Guindon que toutes les discussions relatives au vol en ligne doivent être tenues à la table des négociations. L’agent négociateur avait déposé une proposition le 27 octobre de cette année concernant l’article 47.

566        M. McConnell a déclaré que l’agent négociateur accueillerait favorablement des discussions sur un programme de vol en ligne à la table des négociations parce qu’il s’intéresse vraiment à un tel programme.

567        Selon M. McConnell, les propositions de l’agent négociateur concernant l’article 47 auraient pu permettre de répondre à la question du vol en ligne. Il ne s’agissait pas d’un nouveau concept. L’agent négociateur l’avait proposé deux fois à la direction. Les deux fois, il l’a refusé au cours de rondes de négociations antérieures.

B. Pour l’employeur

1. M. Guindon

568        En ce qui concerne le programme de vol spécialisé, l’Aviation civile a effectué un examen global de la formation spécialisée nécessaire dans l’ensemble du pays. Un nouvel outil a été créé, le NATR, qui démontrait les qualifications de tous les employés et qui maintenait quelle qualification. Il permettait à la direction d’examiner les services qu’elle devait offrir à l’industrie. Par exemple, si l’Aviation civile comptait huit inspecteurs qualifiés à l’égard d’Airbus 320, des questions pouvaient être posées à la lumière de ces renseignements. L’organisation a-t-elle besoin de huit inspecteurs, moins de huit ou plus de huit? Cela était effectué afin de veiller à ce qu’Aviation civile établisse correctement les priorités.

569         M. Guindon a renvoyé au document [traduction] « Visites de surveillance de 2017 », qui avait été préparé à l’appui d’une visite des directions générales de l’Aviation civile et du personnel régional relativement à l’état de l’Aviation civile. D’autres documents ont été transmis aux intervenants externes. Ils étaient intitulés [traduction] « Conférence de l’Association du transport aérien du Canada », en date du 16 novembre 2016 et [traduction] « Congrès de la Helicopter Association of Canada », en date du 12 novembre 2016.

570        À titre de directeur général chargé de diriger le programme de surveillance et de transformation, M. Guindon devait visiter le personnel en vue de discuter du rendement du Ministère et de partager la vision de l’Aviation civile. En ce qui concerne les intervenants externes, l’objectif de la visite était le même; toutefois, il s’attendait à d’autres questions concernant l’élaboration de règlements et les activités d’exécution.

571        Il a tenté de faire ces visites trois fois par année, en vue de mobiliser le personnel. Toutefois, lorsque l’Aviation civile a éprouvé des difficultés financières, il ne quittait plus le bureau parce qu’il n’y avait aucun financement pour les visites.

572        Lorsqu’il a accepté le poste de directeur général en avril 2015, M. Guindon assurait un horaire de visites de 90 jours. Toutefois, en 2016-2017, il n’a effectué qu’une seule visite. En 2017, il a mené à terme une deuxième visite dans la région de Québec. L’objectif était de mobiliser le personnel, d’aborder des questions et de les informer de l’état de l’Aviation civile en ce qui concerne la transformation. Il voulait entendre leurs points de vue. Personne n’était mieux placé que le personnel de première ligne pour l’informer de la santé organisationnelle et pour l’aider à améliorer ses plans de travail à cet égard.

573        Il a été renvoyé au document intitulé [traduction] « Conférence de l’Association du transport aérien du Canada du 16 novembre 2016 » et à la diapositive intitulée [traduction] « Amorcer la transformation ». La diapositive portait sur les changements apportés à l’Aviation civile. La dernière puce énonce : [traduction] « Changements au programme de vol de l’Aviation civile de Transports Canada ». Le public était l’Association du transport aérien du Canada, qui est un groupe de pression. Seuls les employés au niveau de la direction y ont assisté.

574        M. Guindon a déclaré qu’il parle rarement des puces figurant aux diapositives. Il a affirmé qu’il n’avait pas discuté de la puce et qu’aucune question ne lui avait été posée à son sujet.

575        La Helicopter Association of Canada est un groupe de pression d’exploitants d’hélicoptère. Un congrès a été tenu à Edmonton. Seuls les cadres supérieurs représentant la région des Prairies et du Nord du Ministère y ont assisté.

576        Les visites de surveillance de 2017 ont été utilisées en vue de discuter de l’état des programmes du Ministère à l’échelle du pays à l’intention d’un public composé d’employés. Plusieurs centaines d’employés ont assisté aux visites. La série de diapositives de présentation ne comportait aucun renseignement sur le programme de vol.

577        Pendant les visites, il a été question du programme de vol. Les employés dans la région de l’Atlantique lui ont posé des questions à ce sujet.

578        Les employés souhaitaient savoir s’il allait y avoir d’autres réductions. Il a déclaré que le programme de vol continuait d’évoluer.

a. Contre-interrogatoire

579        On a renvoyé M. Guindon à un courriel daté du 31 mars 2016, informant d’une conférence vidéo qui devait avoir lieu le même jour pour les employés de la région des Prairies et du Nord de l’employeur, portant sur une mise à jour du programme de vol de l’Aviation civile.

580        M. Guindon n’était au courant ni du courriel ni de la demande. Il s’attendait à ce que les directeurs généraux tiennent des réunions de cette nature aussi souvent que possible. On lui a laissé entendre que la réunion concernait les changements qui seraient apportés à la façon dont l’employeur gérait le programme. M. Guindon a convenu en déclarant qu’elle concernait l’application du programme. Il a supposé qu’il s’agissait du sujet de la réunion. Lorsqu’on lui a demandé s’il avait conseillé que les directeurs généraux tiennent des réunions avec les employés, il a répondu qu’ils devaient absolument le faire; cela constitue une saine gestion. On lui a demandé si ces types de réunions étaient tenus dans d’autres régions. Il a affirmé qu’il ne le savait pas.

581        Lorsqu’on lui a demandé s’il se souvenait d’avoir reçu une lettre provenant de M. McConnell datée du 31 mars 2016 et intitulée [traduction] « Changements au programme de maintien de la compétence professionnelle en aviation à Transports Canada », il a répondu qu’il s’en souvenait vaguement. On lui a demandé s’il était juste de dire que l’agent négociateur ne souscrivait pas aux mesures prises par l’employeur. Il a déclaré qu’il le supposait et a demandé à lire la lettre. Lorsqu’on lui a demandé si l’agent négociateur lui avait demandé de cesser de communiquer avec ses membres de cette manière, il a convenu en affirmant que c’est ce qu’il avait lu.

582        On lui a demandé de confirmer que la clause 47.02 de la convention collective prévoit qu’un autre programme doit être approuvé par le comité directeur. Il a reconnu que le vol en ligne n’était pas approuvé.

583        Il a déclaré que certaines autorités de l’aviation civile à l’échelle mondiale permettent aux inspecteurs de piloter des segments en tant que pilote professionnel normal.

584        Il a été renvoyé aux visites de surveillance de 2017. Il a reconnu qu’il s’agissait d’une présentation qui a été faite aux employés. On lui a demandé s’il avait discuté des changements apportés au programme de vol. Il a répondu qu’on lui a posé des questions à certains endroits. Il a affirmé que dans certains endroits, il a discuté d’un programme de vol en ligne. Lorsqu’on lui a demandé s’il avait dit à certains d’eux que le Ministère avait discuté de la possibilité d’un programme de vol en ligne avec les grands exploitants, il a répondu par la négative.

C. Communication directement avec les employés par le BST

1. Pour l’APFC

a. M. McConnell

585        M. McConnell a renvoyé à un document comportant l’en-tête « NewLeaf Performance » et intitulé [traduction] « Guide d’entrevue – Avec l’examen de Transports Canada du programme de formation de compétence des pilotes (maintien) du BST ».

586        L’agent négociateur a pris connaissance, par l’intermédiaire de ses membres, du fait que le BST mènerait un sondage et qu’un contrat de service avait été conclu en vue d’examiner les coûts liés à la formation de compétence des pilotes.

587        L’agent négociateur n’avait aucune idée qui était NewLeaf performance et se préoccupait du fait que NewLeaf communiquerait directement avec ses membres pour obtenir des réponses aux fins du sondage sans collaborer avec lui. Il ne connaissait pas l’incidence que l’étude aurait sur ses membres. Le document aurait pu contenir des renseignements qui étaient importants pour l’agent négociateur.

588        La plainte renvoie au directeur des Opérations nationales qui a lancé une étude de l’évaluation des risques en vue d’annuler entièrement les vols par les PVA et la surveillance par les CAI dans le cadre des opérations nationales.Lorsqu’on lui a demandé s’il avait demandé à l’employeur de lui fournir une copie, M. McConnell a répondu qu’il ne s’en souvenait pas; et qu’il n’avait pas non plus une copie.

2. Pour l’employeur

a. M. Laporte

589        M. Laporte est l’administrateur en chef des opérations du BST. Le BST exerce ses activités sans lien de dépendance avec les autres ministères et organismes afin de veiller à ce qu’il n’existe aucun conflit d’intérêts réel ou perçu.

590        L’objectif du BST consiste à promouvoir la sécurité du transport aérien, maritime, ferroviaire et par pipeline en procédant à des enquêtes indépendantes sur des événements de transport choisis afin d’en dégager les causes, les facteurs contributifs et les lacunes de la sécurité qui sont mis en évidence par de tels événements. Il fait des recommandations sur les moyens de réduire ou d’éliminer les lacunes, il publie des rapports et assure des suivis auprès des intervenants afin de veiller à ce que des mesures de sécurité soient prises pour réduire les risques et améliorer la sécurité.

591        M. Laporte a renvoyé aux paragraphes 50 et 50a) de la plainte dans lesquels il est allégué que le BST a participé à une communication directe avec les membres de l’APFC. Plus particulièrement, il a été allégué qu’en février 2016, l’APFC a appris que le BST avait retenu les services d’un expert-conseil en vue d’examiner son PMCA et qu’au moins un membre de l’APFC a été ordonné de remplir le sondage portant sur la formation de pilote et le maintien des compétences actuelles.

592        Il a été allégué, en outre, que, malgré de multiples demandes, l’employeur a refusé de fournir une copie du rapport jusqu’à ce que le processus de négociation collective soit mené à terme et qu’une nouvelle convention collective soit en vigueur. Le BST a indiqué que des discussions sur la mise à jour de son PMCA ne seraient tenues qu’après la conclusion d’une nouvelle convention collective.

593        M. Laporte a déclaré que depuis un certain nombre d’années, la direction et l’agent négociateur avaient discuté du programme tant du point de vue des coûts que celui de l’efficacité. Ces discussions ont donné lieu à une divergence d’opinion concernant les exigences de la délivrance de licences et l’application du RAC. La direction a décidé d’obtenir une opinion indépendante relativement à ces questions aux fins de discussions avec l’agent négociateur. Il a retenu les services d’un entrepreneur indépendant en vue de la collecte de faits d’une manière impartiale et objective et de rendre une opinion sur le PMCA actuel dans le cadre duquel les pilotes maintiennent leurs compétences.

594        Lors d’une réunion du Comité consultatif patronal-syndical national tenue le 2 décembre 2013, le président à ce moment-là de l’APFC a rappelé aux représentants du BST que, si la direction a une question, elle doit la soulever auprès de lui avant que les négociations ne soient amorcées. M. Laporte a répondu que le BST examinait les coûts liés à la satisfaction de l’exigence de maintenir les compétences de vol et la façon dont le Ministère satisfaisait à cette exigence.

595        Le directeur des Enquêtes aéronautiques a demandé à l’un de ses employés de consulter ses collègues et d’élaborer des changements provisoires au PMCA en préparation des discussions avec l’APFC.

596        Toutefois, lorsqu’il a commencé ses consultations, les négociations contractuelles avaient été amorcées, et rien ne pouvait donc être fait avec le document provisoire et il a été mis en suspens. L’ébauche est datée de septembre 2014. L’employé qui était chargé de produire le document était un représentant de l’APFC.

597        Les changements envisagés avaient trait au suivi et à la production de rapports sur le programme, à l’éclaircissement, aux discussions à l’égard des pilotes jugés médicalement inaptes et aux changements proposés à l’indemnité pour les employés jugés médicalement inaptes. Une fois que l’avis de négocier a été donné, il a été mis fin à l’examen et aucun autre progrès n’a été réalisé.

598        Le 4 février 2016, la réunion du Comité consultatif patronal-syndical national a été tenue, à laquelle M. Laporte a été informé à la fois par l’agent négociateur et la direction de l’élaboration du nouveau plan stratégique pour 2016 jusqu’en 2021.

599        Il a donné une mise à jour du profil de risque ministériel que le comité exécutif avait approuvé le 19 janvier 2016. Il comprenait les principaux risques suivants : la gestion de la charge de travail et les attentes dans un milieu en évolution; les défis liés à la crédibilité; le maintien en poste d’un effectif compétent; la gestion efficace de l’information; le bien-être des employés.

600        Selon le risque stratégique lié au maintien en poste d’un effectif compétent, il y aurait une possibilité moyenne à faible que le BST ne soit pas en mesure de maintenir en poste un tel effectif, ce qui pourrait avoir une incidence négative modérée sur sa réputation ou sa capacité d’exécuter son mandat.

601        Les facteurs pertinents à cette application ont été déterminés et ils pourraient toucher la capacité du BST de recruter, de perfectionner et de maintenir en poste un effectif compétent, y compris les iniquités perçues en approuvant des activités de formation et de perfectionnement de ses employés et les difficultés liées au maintien des compétences de ses employés dans un milieu opérationnel en constante évolution.

602        Selon l’incidence déterminée, le manque de mise à jour des connaissances et de l’expertise des employés pourrait avoir une incidence négative modérée sur la capacité du BST de mener à terme des enquêtes de qualité, ce qui, à son tour, pourrait entraîner une perte de crédibilité. Il y avait une faible possibilité qu’un employé du BST ne suive pas une formation adéquate ou ne possède pas l’expérience adéquate pour exécuter ses tâches de base et il y avait une possibilité moyenne que certains employés n’aient pas obtenu une mise à jour complète des connaissances et des compétences requises pour exécuter leurs tâches dans un milieu en constante évolution, c.-à-d. un autre aéronef.

603        Un certain nombre d’options relatives au contrôle des risques ont été déterminées, comme demander aux gestionnaires de cerner les écarts entre les habiletés et les compétences des enquêteurs actuels et les exigences de travail en évolution, d’établir les priorités de la nouvelle formation, ou d’étudier une gamme plus vaste d’options pour répondre aux besoins en formation et en perfectionnement des employés. M. Laporte a déclaré qu’une de ces options était le vol en ligne. Ces documents étaient pertinents au plan stratégique puisqu’ils indiquent les risques en vertu desquels le plan stratégique a été élaboré.

604        Le 25 janvier 2016, M. Laporte a transmis un plan stratégique de 2016 à 2021 provisoire au BST aux fins de son examen et de ses commentaires, ainsi qu’aux fins d’examen et de commentaires par tous les gestionnaires.

605        Le 5 février 2016, le président du BST a transmis une copie du nouveau plan stratégique à tous les employés. Le 6 février 2016, le gestionnaire des ressources humaines du BST en a transmis une copie à tous les agents négociateurs, en indiquant qu’il serait présenté au cours d’une réunion spéciale le 10 mai 2016.

606        On a demandé à M. Laporte d’indiquer les éléments du plan stratégique qui étaient pertinents au PMCA. Il a renvoyé au deuxième élément dans la section intitulée [traduction] « Nos objectifs stratégiques », intitulé [traduction] « Amélioration », plus particulièrement, la stratégie de [traduction] « Réviser nos politiques, nos procédures et nos outils d’enquête » et au troisième élément, intitulé [traduction] « Modernisation », plus particulièrement les stratégies visant à [traduction] « Devenir une organisation apprenante » et à [traduction] « Simplifier les politiques et les processus ministériels ».

607        Le Plan d’affaires indiquait les plans d’action sur chacun des cinq ans. Il était prévu que l’examen du PMCA serait effectué à la conclusion de la négociation collective.

608        On lui a demandé comment l’examen concorderait avec la négociation collective. Il a affirmé qu’il était inclus dans le plan quinquennal du BST. Le directeur des Enquêtes aéronautiques avait indiqué qu’il prendrait sa retraite. Il avait accepté d’assumer l’affectation consistant à mettre à jour les renseignements sur le PMCA pendant que le BSF a doté son poste. Il estimait qu’il pouvait recueillir des données qui pourraient être transmises au nouveau directeur afin que le BST puisse procéder une fois la conclusion des négociations collectives.

609        M. Laporte n’était pas au courant des propositions que l’APFC avait présentées dans le cadre des négociations.

610        On lui a demandé pourquoi le PMCA n’avait pas été discuté au cours des négociations. Il a déclaré qu’il avait été discuté et négocié à la réunion du comité directeur, de manière distincte de la négociation collective.

611        Il a affirmé que le directeur des Enquêtes aéronautiques était à la table des négociations.

612        Lorsqu’on lui a demandé comment l’intention du BST de reprendre les discussions sur le PMCA après les négociations collectives avait été communiquée à l’agent négociateur, il a déclaré qu’une discussion avait eu lieu à la réunion du Comité consultatif patronal-syndical national tenue le 4 février 2016. Il ne faisait pas partie de la discussion officielle. Il a été indiqué que le BST commencerait à recueillir des renseignements aux fins d’usage ultérieur. Le représentant de l’APFC qui a assisté à la réunion n’a pas réagi.

613        La décision a été prise de recueillir des renseignements par l’intermédiaire d’un expert-conseil n’ayant aucun intérêt direct dans le résultat; il ou elle devait uniquement recueillir les données. L’expert-conseil n’était ni un pilote ni un employé de Transports Canada.

614        La demande de contrat énonce que le BST [traduction] « […] a besoin des services d’un expert-conseil externe pour faire une évaluation indépendante et objective quant au coût-efficacité et à l’efficacité du programme de formation de compétences des pilotes actuels du BST. »

615        M. Laporte a répété qu’il avait obtenu différentes interprétations de différentes personnes et qu’il souhaitait examiner les pratiques.

616        Le contrat a été octroyé à NewLeaf Performance. Le partenaire chargé du contrat était un comptable agréé ayant une expertise en gestion des ressources humaines.

617        On a demandé à l’expert-conseil d’interroger cinq personnes, à savoir le directeur des Enquêtes aéronautiques, BST; le gestionnaire, Opérations internationales et enquêtes majeures, BSF; le gestionnaire, Opérations régionales, Québec; le directeur, Opérations de vol, Services des aéronefs, Transports Canada; et le gestionnaire de programme, Normes de l’aviation commerciale et Délivrance de licences, Transports Canada.

618        Lorsqu’on lui a demandé s’il savait si une des personnes interrogées était un membre de l’APFC, il a déclaré qu’à l’époque, il ne savait pas qu’une de ces personnes était un membre de l’APFC. Il a affirmé qu’il comprend maintenant que le gestionnaire de projets, Normes de l’aviation commerciale et Délivrance de licences, était un membre de l’APFC. Le directeur de l’Aviation civile à Transports Canada lui avait donné le nom du gestionnaire.

619        Il a renvoyé à une chaîne de courriels commençant le 25 février 2016, lorsque le directeur général, Cadre réglementaire de la sécurité aérienne, à Transports Canada, a envoyé une lettre au directeur des Enquêtes aéronautiques au BST, en vue d’informer le gestionnaire de programmes, Normes de l’aviation commerciale et Délivrance de licences, à Transports Canada, qu’il sera la personne-ressource aux fins du sondage.

620        Le gestionnaire de programmes ne s’est pas mis à la disposition de l’expert-conseil aux fins d’une entrevue, même s’il a fourni les renseignements réglementaires de base et a recommandé que l’expert-conseil communique avec l’APFC pour obtenir d’autres renseignements généraux.

621        M. Laporte n’a appris que le gestionnaire de programmes était un membre de l’APFC qu’après qu’une plainte avait été déposée. Tous les gestionnaires au BST sont exclus de la négociation collective. Il a supposé que, parce que cette personne avait le titre de gestionnaire, il était exclu.

622        Le 5 mai 2016, dans une lettre à l’intention de l’expert-conseil, M. Laporte a indiqué que le gestionnaire était un membre de l’agent négociateur. L’expert a répondu que cela expliquait la raison pour laquelle le gestionnaire avait annulé les entrevues et qu’il n’y avait jamais une occasion de discuter en détail les pratiques en vigueur à Transports Canada.

623        En préparation à répondre à la plainte, M. Laporte souhaitait confirmer que le gestionnaire de projets était en fait l’expert en la matière du RAC. Cela a été confirmé. On lui a demandé s’il avait su que le gestionnaire était un membre de l’agent négociateur si la situation avait été différente. Il a répondu qu’il s’intéressait à trouver un expert en la matière. Cela n’avait rien à voir avec l’APFC. Il n’aurait pas été interrogé en tant que membre de l’agent négociateur, mais en tant qu’expert en matière de délivrance des licences de pilotes professionnels au Canada.

624        Tel que cela a été indiqué, la tentative d’interroger le gestionnaire de projets s’est avérée infructueuse. Au meilleur de la connaissance de M. Laporte, personne d’autre n’a été interrogé.

625        M. Laporte a été renvoyé à la liste de questions figurant dans le guide d’entrevue auprès de Transports Canada dressée par l’expert-conseil. Elle a été dressée aux fins d’une entrevue avec le directeur, Opérations de vol, à Transports Canada. L’expert-conseil avait dressé deux listes de questions aux fins des entrevues des trois membres du BST et du directeur, Opérations de vol, à Transports Canada, en vue de comparer les deux organisations. On lui a demandé si les questions d’entrevue avaient été fournies au gestionnaire de programmes à Transports Canada. Au meilleur de la connaissance de M. Laporte, on n’a pas demandé au gestionnaire de répondre aux questions.

626        M. Laporte a été renvoyé à l’allégation figurant dans la plainte au paragraphe 50 selon laquelle on avait demandé au membre de remplir un sondage. Il a répondu qu’il n’y avait aucun sondage. Lorsqu’on lui a demandé s’il était au courant de tout autre document que le membre devait remplir, il a déclaré qu’il n’était au courant d’aucun document de ce genre. Son rôle consistait à fournir des renseignements sur les politiques, les normes, entre autres.

627        On a demandé à M. Laporte pourquoi il avait choisi de donner suite à cette question lorsqu’il l’a fait plutôt que d’attendre l’achèvement de la négociation collective. Cette possibilité avait été indiquée dans les priorités stratégiques. Il savait qu’une réponse à la question était nécessaire. Il y avait un faible excédent budgétaire et le BST était sur le point d’embaucher un nouveau directeur des Enquêtes aéronautiques. Il estimait qu’il s’agissait d’une bonne occasion pour exécuter la recherche préparatoire afin d’être prêt à procéder une fois qu’un nouveau directeur était nommé et que la négociation collective était achevée.

628        L’expert-conseil a achevé le travail à la fin de mars ou au début d’avril 2017, ce qui était quelques jours en retard. M. Laporte a examiné le rapport. Certains domaines n’étaient pas clairs et il avait besoin d’éclaircissements. L’expert-conseil lui a donné un rapport final qui a été gardé sous clé et n’a pas été communiqué à la direction du BST. Lorsqu’il a reçu le rapport final, le BST avait reçu la plainte. Le rapport a été mis sous clé. Le dossier n’a pas été traité et ne le sera pas avant l’achèvement de la négociation collective.

629        Le 17 février 2017, il a envoyé un courriel à un représentant de l’APFC qui avait demandé de la documentation générale relativement à la politique du PMCA du BST. Le courriel se lit en partie comme suit :

[Traduction]

[…]

Comme vous le savez, l’employeur et l’APFC participent actuellement à la convention collective et il y a un gel prévu par la loi qui s’applique aux conditions d’emploi. Je dois donc vous rappeler que j’ai suspendu l’examen de la politique du PMCA du BST. Tel que je l’ai dit à Greg McConnell le 10 mai 2016 (le jour de la réunion spéciale du CCPS) et à vous le 23 juin 2016 (lors de ma visite au bureau régional du BST), tout travail lié à l’examen et à la mise à jour de la politique du PMCA sera suspendu jusqu’à ce que les deux activités suivantes soient menées à terme :

1 – un nouveau DE soit embauché (maintenant achevé)

2 – une convention collective est conclue (en cours).

Vous vous rappellerez que nous avons tous les deux convenus qu’il est clairement nécessaire de mettre à jour notre politique pour de nombreuses raisons. Je me suis engagé à collaborer avec vous et l’APFC pour effectuer un tel examen, conformément aux protocoles et aux règles applicables. J’ai également indiqué qu’entre-temps aucun changement ne sera apporté à la façon dont nous mettons en œuvre le PMCA. C’est-à-dire, nous continuerons d’exercer nos activités de la même manière que nous l’avons faite depuis les deux dernières années (c.-à-d. depuis le début de la négociation collective).

Le directeur des Enquêtes aéronautiques et les gestionnaires ont été informés de ne participer à aucune discussion portant sur ce sujet autre que d’approuver le PMCA de 2017-2017 à l’égard des employés admissibles, conformément à la politique existante. En attendant l’examen du programme, si vous avez des questions ou des préoccupations concernant la politique du PMCA, veuillez communiquer directement avec moi.

630        On a demandé à M. Laporte s’il avait songé à la question de savoir si le contenu du rapport de l’expert-conseil pouvait être pertinent à la position de l’APFC à la table des négociations. Il a répondu qu’en ce qui le concernait, il ne voyait aucun lien avec la négociation collective.

b. Contre-interrogatoire

631        M. Laporte n’était pas un membre de l’équipe de négociation. Le représentant du BST était le directeur des Enquêtes aéronautiques.

632        Il n’était pas certain de la date exacte à laquelle l’avis de négocier avait été donné. Il estimait que c’était à la fin de 2014. Il ne savait pas si l’employeur ou l’agent négociateur avait donné l’avis. Il se rappelait que c’était à ce moment-là que le BST avait mis fin à son examen du PMCA. Le directeur des Enquêtes aéronautiques avait pris la décision d’y mettre fin. Puisqu’il était le représentant du BST membre de l’équipe de négociation, il était au courant des exigences procédurales. M. Laporte était au courant qu’un gel prévu par la loi s’appliquait une fois qu’un avis de négocier était donné.

633        M. Laporte a confirmé qu’il n’était pas au courant des propositions présentées par l’APFC dans le cadre des négociations. Il a reconnu qu’elles auraient été fournies au directeur des Enquêtes aéronautiques et il en a pris connaissance au début de 2017.

634        Il a reconnu que la convention collective renvoie au PMCA à l’article 47. On lui a demandé s’il savait que le BST avait refusé de discuter du PMCA à la table des négociations. Lorsqu’on lui a demandé si la position du BST consistait à faire en sorte que le PMCA soit négocié lors d’une réunion du comité directeur après la négociation collective, il a répondu que cela avait  toujours été fait comme cela. Il ne savait pas si les propositions concernant le PMCA avaient été présentées à la table des négociations avant la ronde actuelle.

635        Le comité directeur n’avait pas tenu de réunion depuis un certain temps; aucune réunion n’avait eu lieu depuis le début de l’exercice. Il avait ordonné à la direction de ne pas discuter des révisions au PMCA, mais d’appliquer le programme existant.

636        En 2014, le directeur des Enquêtes aéronautiques a ordonné à un employé d’élaborer des changements provisoires au PMCA en vue de se préparer à en discuter avec l’APFC. On lui a indiqué que l’employé n’était pas un représentant de l’agent négociateur. M. Laporte a répondu qu’il croyait que cette personne était un membre de l’agent négociateur et qu’à un moment donné, il avait été un représentant.

637        M. Laporte a confirmé que l’examen de 2014 avait été suspendu dès que les négociations avaient été amorcées. Il lui a été suggéré qu’en 2016, il avait amorcé un processus distinct avec un expert-conseil. Il a déclaré que l’examen de 2016 ne faisait pas partie de l’examen de 2014.

638        Il a confirmé qu’à la réunion du Comité consultatif patronal-syndical national du 4 février 2016, il avait informé les agents négociateurs du plan stratégique quinquennal. On l’a renvoyé à son témoignage dans lequel il avait indiqué que la mise à jour du PMCA était conforme aux priorités décrites dans le plan. Il a confirmé qu’aucune des mesures de suivi énoncées dans le procès-verbal ne renvoyait particulièrement au PMCA.

639        On lui a demandé s’il avait informé particulièrement les agents négociateurs que la mise à jour du PMCA était conforme aux priorités. Il a déclaré qu’à la fin de la réunion, il avait mentionné que le BST recueillerait des données, en préparation d’un examen futur. Il a parlé avec M. Holbrook. Il croyait qu’il avait mentionné qu’il embaucherait un expert-conseil. Il a un renvoi à cet effet dans son carnet. Il se souvenait d’avoir averti M. Holbrook que des données seraient recueillies en préparation de l’examen.

640        Il a confirmé que le directeur général du Cadre réglementaire de la sécurité aérienne à Transports Canada lui avait donné le nom du gestionnaire de programmes du groupe chargé de la délivrance de licences pour le personnel à Transports Canada à être interrogé aux fins de l’examen du BST. Il a confirmé qu’on lui avait également donné le nom du directeur, Opérations de vol, Services des aéronefs, Transports Canada. On lui a demandé si le directeur était un membre de l’équipe de négociation patronale. Il a répondu qu’il ne le savait pas.

641        Il a confirmé qu’il a supposé que le gestionnaire de programmes de la Délivrance de licences pour le personnel n’était pas un membre de l’agent négociateur. Les employés détenant le titre de « gestionnaire » au BST sont exclus de l’unité de négociation. Il croyait également que le directeur général, Sécurité aérienne, au BST ne donnerait pas un nom qui soulèverait des questions liées à la négociation collective en cours.

642        Il a été suggéré à M. Laporte qu’il n’était pas censé traiter avec les membres de l’agent négociateur pendant la négociation collective. Il a affirmé qu’il ne voyait aucune raison pour laquelle il ne pouvait pas recueillir des renseignements afin que les gestionnaires soient préparés pour discuter du PMCA avec l’agent négociateur.

643        Il a confirmé que le gestionnaire de la Délivrance de licences pour le personnel a recommandé que la direction communique avec l’agent négociateur.

c. Réinterrogatoire

644        Le directeur des Enquêtes aéronautiques, qui est membre de l’équipe de négociation, ne communique à M. Laporte des renseignements que s’ils sont nécessaires, comme lorsque l’équipe de négociation du BST doit recevoir des directives.

645        Le BST n’a pas demandé à l’expert-conseil de communiquer avec l’agent négociateur puisque cela ne faisait pas partie du contrat. La tâche consistait à recueillir des renseignements et non à examiner la politique actuelle. Le but même était de recueillir des renseignements de la source. Il souhaitait obtenir l’opinion de l’expert-conseil et non celle de la direction ou de l’agent négociateur.

D. Arguments de l’APFC

646        Pendant tout ce temps, Transports Canada et le BST ont communiqué avec les membres de l’Association en vue de discuter des changements au PMCA et de recueillir des renseignements sur la formation et les qualifications. En conséquence, ces mesures ont miné les propositions de l’Association liées au PMCA.

647        À compter du 31 mars 2016 ou vers cette date, les représentants patronaux ont rencontré directement les membres de l’Association en vue de discuter des changements que l’employeur avait apportés au PMCA. À la fin de 2017, la direction de Transports Canada a tenu des séances d’information à l’intention des employés de l’Aviation civile, y compris les membres de l’Association, dans le cadre de la campagne concernant les visites de surveillance de 2017. M. Guindon a reconnu que le PMCA et le vol en ligne avaient été discutés pendant ces séances d’information.

648        M. Laporte a reconnu qu’au début de 2016, le BST souhaitait recueillir des renseignements sur le PMCA afin qu’il soit prêt à procéder à son examen [traduction] « une fois que la négociation collective était achevée ».

649        Le BST a retenu les services de NewLeaf Performance en vue de recueillir des renseignements et de produire un rapport sur le coût-efficacité et l’efficacité de son programme de formation de compétence pour les pilotes. Le BST lui a demandé d’interroger trois de ses employés et deux de Transports Canada, dont un était un membre de l’unité de négociation.

650        M. Laporte a témoigné en disant qu’il avait supposé que les deux employés de Transports Canada n’étaient pas des membres de l’unité de négociation, étant donné que le BST savait très bien qu’il ne devrait avoir aucune discussion directement avec les membres de l’agent négociateur, vu le processus de négociation collective en cours.

E. Arguments de l’employeur

651        L’APFC a soutenu que Transports Canada et le BST avaient communiqué avec ses membres en vue de discuter des changements au PMCA et de recueillir des renseignements sur la formation et la qualification, ce qui minait ses propositions.

 L’APFC n’a déposé aucun élément de preuve selon lequel Transports Canada, dans le cadre des visites de surveillance de 2017 de M. Guindon, a traité de sa décision relative au PMCA ou a discuté de ces questions directement avec les membres de l’APFC. La seule mention d’un changement au PMCA figure dans les présentations, qui ont été faites à l’Association du transport aérien du Canada et à la Helicopter Association of Canada et non aux membres de l’APFC. Le rôle de M. Guindon consistait à informer ces associations et à répondre aux questions concernant la gestion de l’autre programme et du programme de vol régulier du PMCA.

652        M. Guindon a témoigné en disant que lors de ses visites de surveillance, qui étaient à l’intention des employés de Transports Canada, il leur offrait toujours une période de questions à chaque visite régionale. Ils ont posé des questions au sujet du programme de vol et il leur a donné des réponses. Il n’a pas discuté des changements à la gestion des programmes de formation du PMCA.

653        En ce qui concerne les allégations contre le BST, M. Laporte a témoigné en disant que la collecte de renseignements et le rapport requis de NewLeaf Performance faisaient partie d’un processus distinct des négociations collectives. En fait, l’article 47 exige que l’employeur donne à ses employés la possibilité de maintenir leur compétence professionnelle en aviation. Les clauses 47.04 et 47.05 énoncent en outre que des renseignements relatifs aux critères, aux procédures et à la politique aux fins de la mise en œuvre de l’actualisation des compétences professionnelles en aviation doivent être établis par consentement mutuel de l’employeur et de l’agent négociateur.

654        D’une part, la convention collective indique qu’un PMCA est obligatoire. D’autre part, il prévoit que chaque organisation gouvernementale doit discuter avec l’agent négociateur de l’application particulière du programme au sein de l’organisation et la négocier avec celui-ci.

655        Selon le témoignage de M. Laporte, l’APFC a toujours reconnu et accepté cela, jusqu’à maintenant, et elle a toujours négocié des politiques distinctes avec Transports Canada et le BST. De telles négociations se sont toujours déroulées après la ratification d’une convention collective.

656        En ce qui concerne les employés du BST et de Transports Canada qui ont été interrogés par NewLeaf Performance dans le cadre de la préparation du rapport, M. Laporte a témoigné en disant qu’on avait communiqué avec le gestionnaire de programmes, Normes de l’aviation commerciale et Délivrance de licences, à Transports Canada uniquement en sa qualité d’expert en la matière. Il a été renvoyé à M. Laporte par le directeur général, Sécurité aérienne, à Transports Canada.

657        Dans son témoignage, M. Laporte a également affirmé qu’il ne savait pas que le gestionnaire, l’expert chargé des normes de délivrance de licences pour les pilotes à Transports Canada, n’était pas un employé exclu. En fait, il était un gestionnaire et M. Laporte a témoigné en disant que tous les gestionnaires au BST sont des employés exclus. En conséquence, il n’a été considéré, en aucun temps, comme un membre de l’unité de négociation.

F. Analyse

658        Selon ce que je comprends, l’agent négociateur a soutenu que l’on avait contrevenu à l’article 185 et à l’alinéa 186(1)a) de la Loi, qui se lisaient comme suit, pendant la période visée :

Pratiques déloyales

185 Dans la présente section, pratiques déloyales s’entend de tout ce qui est interdit par les paragraphes 186(1) et (2), les articles 187 et 188 et le paragraphe 189(1).

Pratiques déloyales par l’employeur

186 (1) Il est interdit à l’employeur ainsi qu’au titulaire d’un poste de direction ou de confiance, à l’officier, au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, ou à la personne qui occupe un poste détenu par un tel officier, qu’ils agissent ou non pour le compte de l’employeur:

a) de participer à la formation ou à l’administration d’une organisation syndicale ou d’intervenir dans l’une ou l’autre ou dans la représentation des fonctionnaires par celle-ci;[…].

659        Le paragraphe 186(5) de la Loi prévoit qu’un employeur ne se livre pas à une pratique déloyale de travail du seul fait qu’il exprime son point de vue, pourvu qu’il n’ait pas indûment usé de son influence, fait des promesses ou recouru à la coercition, à l’intimidation ou à la menace.

660        Dans Conseil canadien des Teamsters c. FedEx Ground Package System, ltée, 2011 CCRI 614, au paragraphe 81, le Conseil canadien des relations industrielles (CCRI) a examiné une disposition du Code canadien du travail qui était pratiquement identique. Le Conseil, à partir de la jurisprudence, a tiré les principes non exhaustifs qui sont énoncés ci-dessous :

  • Un employeur a le droit d’exprimer son point de vue et n’est pas confiné à de simples banalités. Il y a un juste milieu, entre de simples banalités et l’ingérence et l’influence indue, qui permet à l’employeur d’exprimer librement son point de vue.
  • En évaluant le comportement de l’employeur, le Conseil devrait chercher à établir si ledit comportement a porté atteinte à la capacité des employés d’exprimer leurs véritables désirs. Autrement dit, le comportement de l’employeur a-t-il privé les employés de la capacité d’exprimer leurs véritables désirs de décider d’adhérer ou non au syndicat?
  • La définition de l’intimidation, de la coercition et de l’influence indue dans le contexte des relations de travail renferme l’élément fondamental suivant : le recours à une certaine forme de force ou à la menace, ou le fait d’exercer une pression indue ou une contrainte dans le but de contrôler ou d’influencer la liberté d’association des employés.
  • Le fait qu’un employeur ne désire pas de syndicat et qu’il exprime son opinion en ce sens ne constitue pas nécessairement une violation du Code; il faut procéder à une analyse factuelle afin de déterminer si la manière dont cette opinion est exprimée renferme un élément de coercition ou d’intimidation, des menaces ou des promesses, ou une influence indue.
  • Le Conseil devrait tenir compte du contexte dans lequel les déclarations sont faites et l’incidence probable sur un employé raisonnable des moyens utilisés. Le mode privilégié est la mise en circulation de documents écrits. Ce mode de communication est moins envahissant que les réunions à auditoire contraint ou des discussions privées avec les employés.

661        La Commission a appliqué les principes énumérés dans cette décision du CCRI dans Lala c. Les travailleurs unis de l’alimentation et du commerce, section locale 401, 2017 CRTESPF 42, dans laquelle elle a conclu qu’un représentant de l’employeur ne s’était pas livré à une pratique déloyale de travail lorsqu’il avait fait des commentaires qui pouvaient être interprétés comme appuyant un employé chargé de déposer une demande de révocation d’accréditation.

662        En l’espèce, la preuve n’étaye pas la conclusion selon laquelle lesvisites de surveillance de 2017 de M. Guindon portaient sur le PMCA ou qu’il avait amorcé des discussions directement avec les membres de l’APFC au sujet de ces questions, même s’il a répondu aux questions posées par les employés concernant un programme de vol en ligne. Il n’a pas discuté avec eux des changements apportés au PMCA. Les présentations à l’Association du transport aérien du Canada et à la Helicopter Association of Canada renvoyaient aux changements apportés au PMCA. Toutefois, les publics n’étaient pas des employés qui étaient des membres de l’agent négociateur.

663        En ce qui concerne les allégations concernant le BST, M. Laporte a témoigné en disant que la collecte de renseignements par NewLeaf Performance lorsqu’elle préparait le rapport avait pour objet d’aider le BST dans le cadre des discussions avec l’agent négociateur en vue de réviser le PMCA après les négociations, ce qui a toujours eu lieu après la ratification de la convention collective. Quoi qu’il en soit, le rapport a été suspendu.

664        Pour ce qui est de l’allégation selon laquelle le gestionnaire de programmes, Normes de l’aviation commerciale et Délivrance de licences, à Transports Canada, qui était un membre de l’agent négociateur, a été déterminé être un expert en la matière aux fins d’une entrevue par NewLeaf Performance, je retiens le témoignage de M. Laporte selon lequel il croyait que le gestionnaire était exclu de l’unité de négociation puisque tous les gestionnaires dans son organisation étaient exclus. Lorsqu’il a appris que le gestionnaire était un membre, aucune autre tentative n’a été faite pour l’interroger.

665        Les éléments de preuve ne me permettent pas de conclure que les représentants de Transports Canada ou du BST ont recouru à force ou à la menace, ou qu’ils ont exercé une pression indue ou une contrainte dans le cadre de toute expression d’une opinion mentionnée dans la preuve. Je ne peux conclure non plus que l’approche du BST à l’égard de l’expert en la matière concernant les qualifications des pilotes dont le poste relève de l’unité de négociation dans les circonstances de l’espèce est intervenue à la représentation des employés par l’agent négociateur.

VII. Question 6 : Un employé permanent à temps partiel

666        L’Association a soutenu que les défendeurs ont contrevenu au gel prévu par la loi concernant les conditions d’emploi, contrairement à l’article 107 de la Loi, lorsqu’ils ont pris une décision unilatérale d’embaucher au moins un employé permanent à temps partiel, malgré le fait que la convention collective ne prévoit aucune disposition lui permettant de le faire.

A. Pour l’APFC – Témoin et arguments

1. M. McConnell

667        M. McConnell a reçu des renseignements de la région de Québec selon lesquels l’employeur était sur le point d’embaucher un employé à temps partiel. Il a communiqué avec Cynthia Nash, une négociatrice du Conseil du Trésor, le 14 septembre 2015, en vue d’obtenir de plus amples renseignements.

668        Mme Nash a répondu le 6 octobre 2015. Elle a informé M. Holbrook qu’elle avait été en mesure de déterminer qu’il y avait un employé à temps partiel dans la région de Québec et, par conséquent, l’employeur présenterait un libellé concernant les employés à temps partiel à la prochaine séance de négociations aux fins d’examen. Le courriel indique également ce qui suit :

[Traduction]

[…]

Greg [Holbrook] estimait qu’il existait peut-être un PE qui visait cela. Je n’ai pas réussi à le trouver, mais j’ai trouvé une Directive sur la rémunération [qui est archivée, mais qui est toujours en vigueur] qui porte sur la rémunération des [employés] à temps partiel en ce qui concerne l’IFS [indemnité de fonctions supplémentaires][…]

[…]

669        M. McConnell a affirmé que si Transports Canada commence à embaucher des employés à temps partiel dans le groupe AO, des dispositions devraient être insérées dans la convention collective. Il a déclaré que la convention collective ne comporte actuellement aucun renvoi aux heures de travail à temps partiel. Il a également affirmé qu’aucun libellé concernant les employés à temps partiel n’a été déposé par l’employeur dans le cadre des négociations.

a. Contre-interrogatoire

670        On a demandé à M. McConnell s’il savait qui était l’employé à temps partiel au Québec. Il a répondu qu’il le savait à ce moment-là et qu’il pouvait se souvenir des circonstances. En août ou en septembre 2015, il a soulevé la question auprès de Mme Nash, qui lui a confirmé qu’un employé à temps partiel avait été embauché et que l’employeur présenterait un libellé connexe à la table des négociations, mais il ne l’a pas fait.

2. Arguments

671        À la fin de 2015, Transports Canada a embauché une personne pour occuper un poste permanent à temps partiel.

672        La convention collective ne prévoit aucune disposition portant sur les employés permanents embauchés à temps partiel. En fait, l’article 18, intitulé « Heures de travail », exige que la semaine de travail des employés soit de 37,5 heures et composé de cinq (5) jours consécutifs, du lundi au vendredi. L’Association fait valoir que l’emploi à temps partiel n’est ni prévu ni autorisé en vertu des modalités de la convention collective.

673        Dès qu’ils ont pris connaissance des mesures prises par Transports Canada, les négociateurs du Conseil du Trésor ont indiqué que l’employeur proposerait une modification à l’article 18 afin d’autoriser l’embauche d’employés à temps partiel. À ce jour, aucune telle proposition n’a été présentée.

B. Arguments de l’employeur

L’APFC n’a présenté aucun élément de preuve portant sur l’allégation concernant l’employé à temps partiel. Le seul document déposé était la pièce 41, qui ne comportait aucun renseignement sur la situation de cet employé et, surtout, aucun renseignement sur les circonstances particulières relatives à l’embauche de l’employé. En contre-interrogatoire, M. Holbrook n’a pas été en mesure de donner une indication quant à l’embauche de cette personne.

674        Tel que cela a été établi dans la décision de 1995, Commission de la capitale nationale, le fardeau de la preuve incombe à la partie qui allègue la contravention de la disposition relative au gel. L’APFC ne s’est pas acquittée de son fardeau de la preuve à cet égard.

C. Analyse

675        Même si la preuve de l’agent négociateur n’est pas aussi complète que celle que l’on préférerait, il semble que nul ne conteste qu’à la fin de 2015, Transports Canada a embauché un employé permanent à temps partiel. Cela a été confirmé par la négociatrice du Conseil du Trésor qui a été en mesure de déterminer qu’il y avait un employé à temps partiel dans la région de Québec.

676        La convention collective ne prévoit aucune disposition relative à l’emploi à temps partiel et la disposition portant sur les heures de travail exige uniquement une semaine de travail à temps plein.

677        Je suis convaincu que l’embauche d’un employé permanent à temps partiel a contrevenu aux dispositions de la convention collective et à la disposition relative au gel prévu par la loi énoncée à l’article 107 de la Loi.

VIII : Question 7 : Certificats d’aptitude au travail après une absence de 20 jours

A. Pour l’APFC

1. M. McConnell

678        M. McConnell a renvoyé au « régime d’assurance-invalidité de courte durée (RAICD) de la fonction publique » proposé, daté du 13 mai 2015, qui a été déposé par le Conseil du Trésor. L’agent négociateur a déposé une contre-proposition à l’article 24, qui demeure à la table. L’article 24 de la convention collective échue porte sur les congés de maladie.

679        Une inspectrice des transporteurs aériens de Transports Canada, qui était membre de l’unité de négociation, avait communiqué avec M. McConnell et lui avait acheminé des documents. Elle s’était absentée du travail pendant plus de 20 jours et l’employeur lui avait demandé de produire une note médicale indiquant qu’elle pouvait retourner au travail sans danger et qu’aucune restriction n’était imposée concernant sa réintégration aux activités de travail normales. M. McConnell a renvoyé à un courriel que M. Collins lui avait envoyé en date du 7 mars 2016 dans lequel les raisons de la demande étaient énoncées et qui indiquait ce qui suit : [traduction] « Veuillez noter que l’APFC a également été consultée relativement à de telles demandes dans le passé et elle connaît donc le processus et les raisons de la demande d’une note. »

680        M. McConnell a déclaré qu’il n’était pas au courant d’une telle politique et que la convention collective était silencieuse à cet égard. Il a renvoyé à la clause 24.03 de la convention collective.

681        Il a également renvoyé à une série de courriels provenant d’un de ses membres, un autre inspecteur des transporteurs aériens en date du 10 février 2016, à l’égard d’un chef intérimaire qui avait demandé une note du médecin indiquant qu’un médecin avait convenu qu’il était apte à retourner au travail à la suite d’une longue maladie. Son médecin était en congé. L’employé est retourné au travail sans produire un rapport médical. Il a fini par la fournir. M. Collins l’a remercié de l’avoir fournie et a déclaré ce qui suit :

[Traduction]

[…]

Je souhaite confirmer qu’en ce qui concerne ceux qui prennent un congé de maladie prolongé, on s’attend à ce qu’ils fournissent une telle note le premier jour de leur retour au travail. J’espère que vous comprenez que la raison de cette obligation est de veiller à ce que la personne est apte et n’est limitée d’aucune façon à exercer toute activité qui relève de son emploi. Cela est évidemment principalement dans l’intérêt de la sécurité de la personne.

[…]

682        M. McConnell l’a informé qu’il n’était pas tenu de produire un rapport médical et qu’une autodéclaration suffisait. M. McConnell a renvoyé à l’article 24 de la convention collective, qui se lit comme suit :

24.02 Tout employé bénéficie d’un congé de maladie payé lorsqu’il est incapable d’exécuter ses fonctions en raison d’une maladie ou d’une blessure, à la condition

  1. qu’il puisse convaincre l’employeur de son état d’une manière et à un moment que ce dernier détermine
  2. et

  3. qu’il ait les crédits de congé de maladie nécessaires.

24.03 À moins d’indication contraire de la part de l’employeur, une déclaration signée de l’employé indiquant la nature de sa maladie ou de sa blessure et portant que, par suite de cette maladie ou de cette blessure, il était incapable d’exercer ses fonctions, est réputée, une fois remise à l’employeur, satisfaire aux exigences de la clause 24.02a).

a. Contre-interrogatoire

683        On a demandé à M. McConnell de reconnaître que l’employeur pouvait demander un certificat médical. Il a répondu que cela ne se faisait pas. L’employeur souhaitait avoir un certificat médical après que l’employé était retourné au lieu de travail. À son avis, l’employeur pouvait demander un certificat médical pour justifier la maladie d’un employé, mais non d’une personne qui retourne au lieu de travail. On lui a également demandé de confirmer que la clause 24.03 permet à un employeur de demander un certificat médical. Il a répondu qu’il ne permet pas à l’employeur de demander une note médicale afin que l’employé reste au lieu de travail. Cela n’est pas visé par l’article 24. Il a déclaré que l’employé avait quitté son emploi et qu’aucun grief n’avait été déposé à l’égard de cette question.

B. Pour l’employeur

1. M. Collins

684        M. Collins a renvoyé à une chaîne de courriels concernant l’inspectrice des transporteurs aériens de Transports Canada qui avait été en congé de malade pendant presque un mois. Dès son retour, l’employeur a demandé que son médecin confirme qu’elle était apte à exercer ses fonctions. Elle avait présenté une note médicale avant de prendre son congé. Si un employé est en congé de maladie pendant plus de 20 jours, l’employeur exige que l’employé produise une note médicale indiquant qu’il ou elle est apte à retourner au travail, ce qu’il a affirmé faire depuis plusieurs années.

685        Un des employés de M. Collins qui est un inspecteur devait subir une chirurgie cardiaque. Avant que l’employé pouvait retourner à un poste de pilotage, M. Collins devait s’assurer que l’inspecteur pouvait retourner au travail sans danger et que si des restrictions étaient imposées, qu’il était en mesure de prendre les mesures d’adaptation nécessaires.

686        La question suivante a été posée à M. Collins : Si un employé s’était absenté en prenant un congé de maladie pendant un mois, pourquoi il ne pouvait pas présumer que lorsque l’employé est retourné au travail qu’il était apte à exercer ses fonctions? Il a répondu que des situations étaient survenues où les employés sont tombés malades.

a. Contre-interrogatoire

687        M. Collins a reconnu que la convention collective ne prévoit actuellement aucune disposition qui oblige un employé à fournir une note médicale au moment de son retour au travail à la suite d’une absence de plus de 20 jours ouvrables. De même, il a reconnu qu’aucune politique n’est en place. Il a déclaré que les Relations de travail l’avaient informé que le fait de demander une note du médecin dans de telles circonstances constituait la pratique exemplaire.

688        Lorsqu’un employé s’est absenté en prenant un congé de maladie pendant plus de 20 jours, le gestionnaire et l’employé reçoivent tous les deux un courriel indiquant le processus à suivre et l’obligation de prendre des mesures d’adaptation y est décrite. « LEX » est le système au moyen duquel les demandes de congé sont présentées et approuvées. Il déclenche l’envoi du courriel après que 20 jours ouvrables se sont écoulés. Les Ressources humaines recommandent de communiquer avec l’employé avant qu’il ou elle retourne au travail afin de s’assurer que le retour est sans danger et qu’il ou elle est apte à exercer ses fonctions. M. Collins n’est pas au courant des raisons pour lesquelles un employé prend un congé de maladie. Des employés sont retournés au travail lorsqu’ils étaient inaptes à travailler.

689        M. Collins a déclaré que cela constituait une pratique normale pour les transporteurs aériens. On lui a demandé si les exploitants aériens, qui étaient des pilotes, avaient une obligation de faire une autodéclaration. Il a répondu que le fait qu’ils devaient faire une autodéclaration ne signifiait pas qu’ils le feraient.

b. Réinterrogatoire

690        M. Collins a indiqué le courriel standard dont l’envoi est déclenché par le système LEX lorsqu’un employé s’absente pendant plus de 20 jours ouvrables. Dans le courriel, on demande à l’employé de communiquer avec les Opérations de rémunération afin de s’assurer que tous les processus et toutes les procédures établies en vue de verser les prestations de congé de maladie sont mis en œuvre en temps opportun.

C. Arguments de l’APFC

691        Unilatéralement et sans consulter l’APFC, l’employeur a commencé à exiger que les employés obtiennent des attestations médicales avant de les autoriser à retourner au lieu de travail ou de reprendre leurs tâches.

692        À la suite de son avis de négocier, l’employeur a présenté sa proposition relative au congé de maladie en octobre 2014. Depuis que l’avis a été signifié, M. Collins a exigé que certains membres de l’Association obtiennent une attestation médicale, à leurs frais, pour démontrer leur aptitude à retourner au travail.

693        Au moyen d’un courriel daté du 7 mars 2016, M. Collins a indiqué qu’il avait choisi d’exiger un certificat d’aptitude au travail de tout employé qui s’était absenté du lieu de travail en raison d’une blessure ou d’une maladie pendant plus de 20 jours.

694        À ce jour, aucune politique n’exige que les exploitants aériens obtiennent des certificats médicaux attestant de leur aptitude au travail, à leurs propres frais, avant de retourner au travail à la suite d’un congé de maladie. De même, la convention collective ne prévoit aucune telle disposition.

D. Arguments de l’employeur

695        L’APFC a soutenu que l’employeur a pris une décision unilatérale d’exiger ces certificats médicaux.

696        Les défendeurs souhaitent rétablir le fait que l’employeur a toujours exigé un certificat d’aptitude au travail en fonction de chaque cas, dans l’intérêt de la sécurité. M. Collins a témoigné en disant qu’il avait toujours utilisé 20 jours en tant que point de référence et qu’il ne s’agissait pas d’une nouvelle pratique. Les certificats d’aptitude au travail ont été demandés afin de s’assurer que les employés étaient aptes à reprendre toutes leurs tâches à la suite d’un congé prolongé en raison d’une maladie, surtout dans les cas de chirurgie cardiaque ou de maladie mentale.

697        L’employeur n’a pas établi une nouvelle politique sur les certificats d’aptitude au travail. Toutefois, il a une obligation inhérente d’assurer la sécurité de ses employés et, dans ce cas, la sécurité du public. Dans Grover (voir Canada (Procureur général) c. Grover, 2007 CF 28, au paragraphe 65), la Cour fédérale a examiné l’obligation de l’employeur d’assurer la sécurité dans le lieu de travail et le droit de demander une note médicale pour retourner au travail pour des raisons de sécurité comme suit (voir l’appel dans 2008 CAF 97 :)

65 […]il est également bien établi que les employeurs ont l’obligation importante de garantir un milieu de travail sécuritaire. Cela signifie que les employeurs ont le droit d’en savoir davantage sur le dossier médical d’un employé s’il y a des motifs raisonnables et probables de croire que l’employé constitue un risque pour la santé ou la sécurité en milieu de travail.

698        La Cour divisionnaire de l’Ontario a confirmé la jurisprudence arbitrale à cet égard.Dans Ontario Nurses’ Association v. St. Joseph’s Health Centre (2005), 76 O.R. (3d) 22, aux paragraphes 19 et 20, elle s’est prononcée comme suit :

[Traduction]

[19] On nous a renvoyé à plusieurs décisions arbitrales où est examinée la question de savoir quels renseignements un employeur peut exiger d’un employé qui revient au travail après un congé pour raisons médicales. Comme on pouvait s’y attendre, des lignes de démarcation ont été tracées par les arbitres compte tenu du droit à la vie privée.

[20] D’après la jurisprudence arbitrale majoritaire, les employeurs ont le droit d’obtenir des renseignements médicaux pour s’assurer qu’un employé qui revient au travail est en mesure d’y revenir d’une manière sécuritaire, sans faire courir de risque aux autres. L’obligation première de l’employé est de présenter un bref certificat de son médecin déclarant qu’il est apte à revenir au travail. Si l’employeur a des motifs raisonnables de croire que l’état de santé de l’employé constitue un danger pour lui-même ou pour autrui, l’employeur peut alors lui demander des renseignements additionnels propres à apaiser les craintes précises qu’il peut avoir, et cela après en avoir expliqué les raisons à l’employé. La demande doit se rapporter au motif de l’absence; aucune enquête de nature générale sur la santé de l’employé n’est autorisée. À mon avis, ce sont là des principes justes.

699        En l’espèce, les employés étaient des pilotes qui revenaient d’un congé de maladie prolongé. Comme en a témoigné M. Collins, il devait assurer un retour sécuritaire et s’assurer qu’un pilote avait le plein contrôle de sa capacité.Les employés travaillent avec des aéronefs et ils assument une responsabilité envers l’équipage de conduite et les passagers. Il ne s’agit pas d’une question d’avoir ou d’établir une politique particulière, mais plutôt d’une obligation, en fonction de chaque cas, de s’assurer que l’employé est en mesure de retourner au travail d’une manière sécuritaire, sans faire courir de risque aux autres.

E. Analyse

700        Selon l’allégation de l’APFC, les défendeurs ont pris une décision unilatérale d’exiger que les employés qui se sont absentés du lieu de travail pendant plus de 20 jours fournissent des certificats d’aptitude au travail, contrairement à l’article 107 de la Loi. L’APFC fait valoir que cette exigence n’a été entamée qu’après l’avis de négocier.

701        La seule question que je dois trancher est celle de savoir si la pratique des défendeurs a contrevenu à l’article 107 de la Loi.

702        Les seuls éléments de preuve dont je suis saisi en ce qui concerne cette nouvelle pratique après l’avis de négocier sont les deux affaires de 2016 concernant les inspecteurs des transporteurs aériens qui retournaient au travail après avoir été en congé de maladie en 2016 et le témoignage de M. McConnell selon lequel il n’était pas au courant de cette pratique.

703        Je retiens la possibilité que M. McConnell ne soit pas au courant de cette pratique, mais il n’est le président que depuis 2015, c.-à-d. après l’avis de négocier. En revanche, un témoignage et une preuve documentaire m’ont été présentés pour établir que cette pratique était antérieure à l’avis de négocier. M. Collins a témoigné en disant qu’il appliquait cette pratique depuis de nombreuses années. En outre, il a renvoyé au courriel du 7 mars 2016 envoyé à l’un des inspecteurs des transports aériens qui indiquait en partie ce qui suit : [traduction] « Veuillez noter que l’APFC a également été consultée relativement à de telles demandes dans le passé et elle connaît donc le processus et les raisons de la demande d’une note. » Fait important, M. Collins n’a pas été contre-interrogé au sujet de son témoignage ni du renvoi susmentionné figurant dans le courriel.

704        Comme George Adams l’a expliqué dans son ouvrage Canadian Labour Law, deuxième édition, page 10-91 : [traduction] « Cette approche [la poursuite des activités normales] […] ne cherche […] pas à maintenir le statu quo en tant que tel, mais plutôt à prévenir les changements qui se démarquent de ce qui s’est fait par le passé. »

705        Selon la preuve dont je suis saisi, je conclus que l’employeur exigeait un certificat d’aptitude au travail relativement aux absences dépassant 20 jours avant l’avis de négocier et qu’il n’a pas établi une nouvelle politique sur ce sujet. En conséquence, l’APFC n’a pas établi son allégation selon laquelle les défendeurs ont contrevenu à l’article 107 à cet égard.

IX. Conclusions

706        L’agent négociateur ne s’est pas acquitté de son fardeau d’établir, selon la prépondérance des probabilités, que l’employeur n’a pas négocié de bonne foi. À l’audience, les parties n’étaient pas dans l’impasse en ce qui concerne la question du PMCA et elles devaient participer à une autre négociation directe à son sujet.

707        Même si les dispositions du PMCA sont visées par les dispositions relatives au gel prévues à l’article 107 de la Loi et doivent demeurer en vigueur conformément à la loi, je ne suis pas convaincu que l’employeur a contrevenu aux dispositions du PMCA ni qu’il les a modifiées. Le PMCA confère à l’employeur le pouvoir discrétionnaire de déterminer si les employés doivent être affectés au programme de vol régulier ou à un autre programme de vol convenu lorsqu’ils sont établis dans un lieu géographique qui ne permet pas une telle affectation à un programme de vol régulier, par exemple lorsqu’aucun aéronef n’est disponible ou lorsque la base a été fermée.

708        La Lettre de politique 164 constituait un document de politique de la direction qui n’était pas visé par la convention collective ni par le PMCA et il n’était pas assujetti à une entente conclue entre Transports Canada et l’agent négociateur. Ce document fait l’objet d’un examen depuis 2009 et a fait l’objet d’un examen officiel en 2012, qui a donné lieu à la recommandation d’y apporter des changements. Il ne s’agissait pas d’une condition d’emploi qui était en vigueur le jour où l’avis de négocier a été donné et elle n’était pas visée par l’article 107 de la Loi.

709        Quoi qu’il en soit, elle a été mise en œuvre en 2005, à un moment où les CAI faisaient encore de façon routinière des opérations de vérification en vol dans l’aviation commerciale et d’affaires. Au cours des années, ces vérifications ont été en grande partie déléguées aux pilotes du milieu aéronautique et les inspecteurs de Transports Canada ne sont pas tenus de suivre le même niveau de formation ou le même type de formation et ils exercent des activités davantage de contrôle et de surveillance. Étant donné que l’attribution des tâches aux employés a changé au cours des années, je suis d’avis que la modification apportée au BIP fait concorder les exigences en matière de formation à l’égard des employés dont les tâches avaient déjà été modifiées, ce qui constitue une question relevant du pouvoir discrétionnaire de la direction. À mon avis, si elle faisait partie des conditions d’emploi, elle aurait été visée par la doctrine de la poursuite des activités normales.

710        En ce qui concerne l’allégation selon laquelle l’employeur a mis en œuvre unilatéralement une exemption législative au RAC en vue de se soustraire à ses obligations en vertu du PMCA, je conclus que les exigences réglementaires concernant la délivrance de licences à tous les pilotes au Canada, ainsi que les exigences de maintenir ces licences, édictées par le gouverneur en conseil aux termes de la Loi sur l’aéronautique ou les exemptions à ces exigences édictées au nom du ministre des Transports ne constituent pas des conditions d’emploi entre l’employeur et les employés. L’employeur est tenu d’offrir des occasions aux employés de maintenir les exigences relatives à leurs licences de pilotes en vertu de la convention collective et du PMCA. La détermination des exigences relatives à la licence d’un pilote au Canada ne relève pas des relations de travail.

711        En ce qui concerne l’argument selon lequel l’employeur a communiqué directement avec les membres de l’Association au moyen de sondages et de réunions, la preuve ne permet pas de conclure que les visites de surveillance en 2017 visaient le PMCA ou que la direction a amorcé des discussions directement avec les membres de l’APFC portant sur des questions qui y étaient liées, même si la direction a répondu aux questions posées par les employés au sujet des vols en ligne.

712        Les dispositions traitant des pratiques déloyales de travail prévues dans la Loi prévoient une exemption en matière de « liberté d’expression » pour les employeurs. Ils ne se livrent pas à des pratiques déloyales de travail du seul fait qu’ils expriment leur point de vue, pourvu qu’ils n’aient pas indûment usé de leur influence, fait des promesses ou recouru à la coercition, à l’intimidation ou à la menace. Aucun élément de preuve n’a été déposé par l’Association qui a traité de ces critères ou qui a satisfait à l’un de ces critères.

713        Je ne conclus pas non plus que l’approche du BST à l’égard d’un expert en la matière, en ce qui concerne les qualifications des pilotes dont le poste faisait partie de l’unité de négociation, dont l’administrateur en chef des opérations du BST n’avait aucune connaissance, dans les circonstances de l’espèce, a entravé la représentation des employés par l’agent négociateur.

714        Même si la preuve de l’agent négociateur n’est pas aussi complète que l’on pourrait le préférer, nul ne conteste qu’à la fin de 2015, Transports Canada a embauché un employé permanent à temps partiel. Cette embauche a contrevenu aux dispositions de la convention collective et à la période de gel prévu par la loi énoncée à l’article 107 de la Loi.

715        Enfin, je conclus que l’employeur exigeait un certificat d’aptitude au travail en ce qui concerne les absences dépassant 20 jours avant l’avis de négocier et qu’il n’a pas établi une nouvelle politique sur ce sujet.

716        Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

X. Ordonnance

717        L’allégation selon laquelle les défendeurs ont manqué à leur obligation de négocier de bonne foi, contrairement à l’article 106 de la Loi, est rejetée.

718        L’allégation selon laquelle le comportement des défendeurs constitue un rejet de la qualité d’agent négociateur de l’Association et équivaut à une intervention dans la formation ou l’administration d’une organisation syndicale ou dans la représentation des fonctionnaires par celle-ci, contrairement au paragraphe 186(1) de la Loi,est rejetée.

719        Les allégations suivantes qui énoncent que les défendeurs ont contrevenu au gel prévu par la loi visant les conditions d’emploi, contrairement à l’article 107 de la Loi, sont rejetées :

  1. apporter des changements importants aux conditions d’emploi des membres de l’APFC en effectuant unilatéralement des réductions au PMCA;
  2. apporter des changements importants aux conditions d’emploi des membres de l’APFC en annulant unilatéralement la Lettre de politique 164 et en mettant en œuvre deux BIP établissant les exigences en matière de formation des inspecteurs de la sécurité de l’aviation civile;
  3. mettre en œuvre unilatéralement une exemption législative au RAC en vue de se soustraire à ses obligations en vertu du PMCA;
  4. communiquer directement avec les membres de l’Association au moyen de sondages et de réunions;
  5. décider unilatéralement d’exiger que les employés qui se sont absentés du lieu de travail pendant plus de 20 jours présentent un certificat d’aptitude au travail.

720        L’allégation selon laquelle les défendeurs ont contrevenu au gel prévu par la loi concernant les conditions d’emploi, contrairement à l’article 107 de la Loi, au motif qu’ils ont pris une décision unilatérale d’embaucher au moins un employé permanent à temps partiel, est accueillie, et la Commission fait une déclaration à cet égard.

Le 11 décembre 2018.

Traduction de la CRTESPF

David Olsen,

une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

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