Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le fonctionnaire s’estimant lésé, qui est employé comme agent correctionnel, a participé à un incident dans le cadre duquel il a eu recours à la force auprès d’un détenu, a été relevé de ses fonctions, puis a été placé en congé – lors d’une réunion avec sa superviseure, le fonctionnaire s’estimant lésé a été informé qu’une enquête disciplinaire allait être effectuée, mais pas dans l’immédiat, puisqu’il n’y avait aucun enquêteur disponible – le fonctionnaire s’estimant lésé a aussi été informé qu’il était relevé des fonctions ayant des contacts avec les détenus en attendant les résultats de l’enquête – une lettre datée du même jour que la réunion a permis de confirmer que le fonctionnaire s’estimant lésé allait être réaffecté temporairement et qu’une enquête disciplinaire serait convoquée – dans une deuxième lettre, expédiée près de deux semaines plus tard, le fonctionnaire s’estimant lésé a été avisé que l’enquête disciplinaire avait été convoquée, et la note de service qui était jointe à cette lettre exposait en détail le processus d’enquête – la convention collective prévoit que, lorsque l’avis écrit d’une enquête disciplinaire est présenté, on doit également présenter une copie de l’ordre de convocation de l’enquête – le fonctionnaire s’estimant lésé a allégué que l’employeur avait contrevenu à la convention collective, parce qu’il n’avait pas fourni une copie de l’ordre de convocation – la Commission a conclu que la première lettre ne constituait pas un avis d’enquête disciplinaire, et qu’il n’était pas obligatoire de fournir l’ordre de convocation à ce moment là – la Commission a conclu que la deuxième lettre constituait un avis, et que la note de service qui y était jointe était l’ordre de convocation – en conséquence, il n’y a eu aucune violation de la convention collective.

Grief rejeté.

Contenu de la décision



Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral et Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  20190311
  • Dossier:  566-02-9117
  • Référence:  2019 CRTESPF 30

Devant une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral


ENTRE

JAMES STEWART

fonctionnaire s'estimant lésé

et

CONSEIL DU TRÉSOR
(Service correctionnel du Canada)

défendeur

Répertorié
Stewart c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada)


Affaire concernant des griefs individuels renvoyés à l’arbitrage


Devant:
John G. Jaworski, une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral
Pour le fonctionnaire s'estimant lésé:
François Ouellette, Union of Canadian Correctional Officers – Syndicat des agents correctionnels du Canada – CSN
Pour le défendeur :
Andréanne Laurin, avocate
Affaire entendue à Abbotsford (Colombie Britannique),
les 26 et 27 juin 2018.
(Traduction de la CRTESPF)

MOTIFS DE DÉCISION

I. Griefs individuels renvoyés à l’arbitrage

1         James Stewart, le fonctionnaire s’estimant lésé (le « fonctionnaire »), est employé par le Conseil du Trésor (CT ou l’« employeur ») auprès du Service correctionnel du Canada (SCC) dans sa région du Pacifique comme agent correctionnel (CX), classifié au groupe et au niveau CX-01. Pendant la période pertinente, il était classifié au groupe et au niveau CX-02 et son poste était situé à l’Établissement du Pacifique (EP) dans le complexe de Matsqui à Abbotsford, en Colombie-Britannique.

2         Le 19 juin 2013, le fonctionnaire a déposé deux griefs. Le premier, qui est devenu le dossier 566-02-9117, déclarait ce qui suit :

[Traduction]

DESCRIPTION DU GRIEF / DETAILS OF GRIEVANCE

Je présente un grief concernant l’omission répétée de Corinne Justason, la sous-directrice de l’Établissement du Pacifique, de me fournir l’ordre de convocation de l’enquête, même si j’avais été informé par écrit que je faisais l’objet d’une enquête disciplinaire et malgré l’opposition de mon représentant syndical. Ses actes sont abusifs et contraires à la convention collective.

MESURES CORRECTIVES DEMANDÉES / CORRECTIVE ACTION REQUIRED

  • je demande qu’une copie de l’ordre de convocation soit produite immédiatement;
  • je demande que le retrait de mes fonctions régulières soit annulé jusqu’à ce que l’ordre de convocation soit produit;
  • je demande que me soient versés toute la rémunération et tous les avantages manqués en raison de la réaffectation non justifiée;
  • je demande que toute mesure disciplinaire soit déclarée nulle ab initio;
  • je demande des excuses écrites de la part de la sous-directrice;
  • je demande que le présent grief soit acheminé directement au troisième palier vu les connaissances de l’employeur et le refus de prendre des mesures pour corriger ce manquement;

Et tous les autres droits qui me sont conférés en vertu de la convention collective. Ainsi que tous les dommages réels, moraux ou exemplaires, devant être appliqués rétroactivement, et les intérêts légaux, sans porter atteinte aux autres droits acquis.

[…]

3         Le deuxième grief, qui est devenu le dossier 566-02-9118, disposait ce qui suit :

[Traduction]

DESCRIPTION DU GRIEF / DETAILS OF GRIEVANCE

Je dépose un grief parce que, pendant la réaffectation de mes fonctions régulières, je n’ai pas été rémunéré selon ma rémunération habituelle, ce qui comprend des primes de quarts, des primes de fin de semaine, des heures supplémentaires, des primes pour les jours fériés et tout autre avantage. Cela est contraire à la convention collective.

MESURES CORRECTIVES DEMANDÉES / CORRECTIVE ACTION REQUIRED

  • Je demande à être pleinement et entièrement rémunéré à partir du moment où j’ai été relevé de mes fonctions régulières.

Et tous les autres droits qui me sont conférés en vertu de la convention collective. Ainsi que tous les dommages réels, moraux ou exemplaires, devant être appliqués rétroactivement ainsi que les intérêts légaux, sans porter atteinte aux autres droits acquis.

[…]

4         Les deux affaires ont poursuivi le cours de la procédure de règlement de griefs et le 16 octobre 2013, les deux ont été renvoyées à la Commission des relations de travail dans la fonction publique (CRTFP) pour arbitrage.

5                   Le 1er novembre 2014, la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique (L.C. 2013, ch. 40, art. 365; « LCRTEFP ») a été proclamée en vigueur (TR/2014-84) et a créé la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique (la « CRTEFP ») qui remplace la CRTFP et le Tribunal de la dotation de la fonction publique. Le même jour les modifications corrélatives et transitoires édictées par les articles 366 à 466 de la Loi no 2 sur le plan d’action économique de 2013 (L.C. 2013, ch. 40) sont aussi entrées en vigueur (TR/2014 84). En vertu de l’article 393 de la Loi no 2 sur le plan d’action économique de 2013, une instance engagée au titre de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (L.C. 2003, ch. 22, art. 2) avant le 1er novembre 2014 se poursuit sans autres formalités en conformité avec la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, dans sa forme modifiée par les articles 365 à 470 de la Loi no 2 sur le plan d’action économique de 2013.

6                   Le 19 juin 2017, la Loi modifiant la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique,la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique et d’autres lois et comportant d’autres mesures (L.C. 2017, ch. 9) a reçu la sanction royale et a modifié le nom de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique et le titre de la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique et de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique pour qu’ils deviennent respectivement la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (la « Commission »), la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral et la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral.

7                   Le 22 juin 2018, le représentant de l’agent négociateur du fonctionnaire a envoyé une lettre à la Commission en vue de l’informer que l’agent négociateur retirait le deuxième grief (dossier 566-02-9118).

8                   Les conditions d’emploi du fonctionnaire étaient régies en partie par une convention collective conclue entre le CT et le Union of Canadian Correctional Officers – Syndicat des agents correctionnels du Canada – CSN (UCCO-SACC-CSN; l’« agent négociateur ») pour le groupe Services correctionnels qui a été signée le 26 juin 2006 et qui est venue à échéance le 31 mai 2010 (la « convention collective »).

II. Résumé de la preuve

9         Le fonctionnaire a commencé son emploi auprès du CT au SCC en octobre 2002. Il a commencé à travailler à l’EP en 2010 ou à cette période environ.

10        Corinne Justason est actuellement la sous-directrice (SD) employée par le CT auprès du SCC dans sa région du Pacifique. Pendant la période pertinente aux événements liés au présent grief, elle était la SD de l’EP. Elle a commencé son emploi auprès du SCC à titre de CX en 1995 et, après environ quatre ans dans ce rôle, elle est devenue une agente de libération conditionnelle. Deux ans plus tard, elle a été mutée à la direction en occupant un certain nombre de rôles et il y a environ 10 ans, elle est devenue SD. Pendant son mandat de SD, elle a agi pendant 14 mois en occupant le rôle d’enquêtrice régionale. Elle a déclaré que, pendant environ un tiers de son mandat à titre de SD, elle a occupé le poste de directrice intérimaire.

11        Mme Justason a affirmé qu’à titre de SD, elle était une des deux personnes qui relevaient directement du directeur. Le SD est chargé de tout ce qui a trait à un détenu dans un établissement, y compris les programmes, l’éducation, les services d’aumônerie, les services de libération conditionnelle, et de la sécurité opérationnelle. En ce qui concerne la sécurité opérationnelle, elle a déclaré qu’elle comprend tous les CX, tous les gestionnaires correctionnels (GC) et tout l’équipement, ainsi que l’équipe d’intervention d’urgence.

12        Le 28 mai 2013, le fonctionnaire travaillait à l’EP dans l’unité de psychiatrie et aidait à superviser un détenu (« détenu A ») qui était problématique. À un moment donné, le détenu A avait pris une douche et, lorsqu’il est sorti de la douche, pendant alors qu’il était nu et menotté, il a amorcé une discussion avec le fonctionnaire, dont les détails ne m’ont pas été communiqués.

13        Les détails quant à ce qui s’est produit par la suite n’étaient pas non plus entièrement clairs. Toutefois, une sorte de confrontation a eu lieu et le fonctionnaire a pulvérisé le détenu A avec son gaz poivré et l’a ensuite frappé sur la tête ou le visage avec la main qui tenait la cannette de gaz poivré, ce qui a causé une lacération. Le fonctionnaire et quatre autres CX ont traîné le détenu A de l’aire des douches et ils l’ont laissé nu, menotté et gisant dans son sang sur le planché de l’unité de psychiatrie (l’« incident du 28 mai »).

14        Le gaz poivré est une arme utilisée comme équipement de défense au SCC, qui contient de l’oléorésine de capsicum (semblable au poivre) qui est projetée d’une cannette en vue de maîtriser une personne.

15        Mme Justason a témoigné en disant que, lorsqu’il y a un recours à la force dans un établissement, un processus d’examen doit être effectué. Le premier palier de l’examen est effectué par le gestionnaire correctionnel (GC) de service. Selon Mme Justason, l’incident du 28 mai a été signalé à un échelon supérieur de la chaîne de commande par le GC, soit au directeur adjoint, Opérations (« DAO »), qui le lui a signalé à son tour. Elle a déclaré que, selon le rapport du DAO qui lui a été acheminé, il se pouvait que le recours à la force par le fonctionnaire auprès du détenu A ait été excessif ou inadéquat.

16        Mme Justason a dit qu’elle avait examiné la vidéo de l’incident et le rapport d’incident du fonctionnaire et qu’elle n’était pas convaincue que ses actes avaient été appropriés dans les circonstances. Elle a indiqué qu’elle avait ensuite consulté le conseiller local en relations de travail (RT) et qu’elle avait fait part de ses préoccupations au sous-commissaire adjoint des établissements et au directeur général intérimaire des RT à l’administration centrale du SCC à Ottawa. Elle a dit qu’elle devait examiner les deux questions suivantes :

  1. Devait-elle effectuer une enquête disciplinaire?
  2. Comment pouvait-elle s’acquitter de son obligation d’assurer la sécurité des détenus?

17        En ce qui concerne son obligation relative à la sûreté et à la sécurité des détenus, Mme Justason a déclaré qu’elle devait examiner la question de savoir si le fonctionnaire devait retourner au travail ou s’il devait être relevé de ses fonctions de CX. Elle a dit qu’elle avait décidé de le relever temporairement de ses fonctions de CX en attendant une enquête de l’incident.

18        Selon Mme Justason, le fonctionnaire a pris une série de jours de repos à la suite de l’incident du 28 mai et il devait retourner au travail le 4 juin 2013. Elle a indiqué que le 3 juin, on a communiqué avec lui et qu’il a été informé qu’il était en congé administratif en attendant d’autres renseignements, ce qui l’a empêché de travailler le 4 juin 2013.

19        Le fonctionnaire et Mme Justason ont tous les deux témoigné en disant qu’une réunion avait eu lieu le 4 juin 2013 (la « réunion du 4 juin »). Le conseiller en RT, Lakhbir Bal, et un représentant de l’agent négociateur, Jack Palmer, y ont également assisté; ni l’un ni l’autre n’ont témoigné.

20        En interrogatoire principal, on a montré au fonctionnaire une lettre du 4 juin 2013 (la « lettre du 4 juin »), adressée à lui et provenant de Mme Justason, qui indiquait ce qui suit :

[Traduction]

Objet : Convocation à travailler dans un bâtiment extérieur, à l’Établissement Matsqui

Le 4 juin 2013, je vous ai informé qu’en raison de la convocation d’une enquête disciplinaire, vous seriez réaffecté à des fonctions n’ayant aucun contact avec les détenus. La direction à l’Établissement Matsqui m’a informé qu’elle peut vous offrir un emploi rémunéré en attendant le résultat de votre enquête disciplinaire. Je vous ordonne donc de vous rendre au travail dans un bâtiment extérieur, à l’Établissement Matsqui, à compter du 5 juin 2013 à 8 h, et ce, conformément à votre horaire actuel.

Lorsque vous arriverez dans le bâtiment, vous devrez communiquer avec Barry Fooks. Vos heures de travail seront de 8 h à 16 h, du lundi au vendredi.

De plus, on vous a donné deux choix quant à votre horaire dans le cadre de votre poste de réaffectation afin d’atténuer toute autre répercussion que vous pourriez subir. Vous pouvez soit renoncer à votre avis de deux semaines d’un changement d’horaire ou vous pouvez être rémunéré au taux des heures supplémentaires approprié, conformément à votre convention collective le premier jour de votre nouvel horaire. Veuillez communiquer avec Lucky Bal, conseiller en RT, d’ici la fin de la journée du 5 juin 2013 au [numéro de téléphone omis] pour l’informer de votre décision.

N’oubliez pas que vous avez accès au Programme d’aide aux employés en vue d’obtenir un soutien supplémentaire au cours de ce processus.

[…]

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

21        L’annexe G de la convention collective porte sur le fait de relever les CX de leurs fonctions en attendant les résultats d’enquêtes disciplinaires des incidents concernant les détenus et énonce ce qui suit :

ANNEXE « G »

RETRAIT DES FONCTIONS EN ATTENDANT LE RÉSULTAT D’ENQUÊTES DISCIPLINAIRES RELATIVES À DES INCIDENTS IMPLIQUANT DES DÉTENUS OU DÉTENUES

  1. Lorsqu’un-e employé-e est relevé de ses fonctions en attendant le résultat d’une enquête disciplinaire relativement à un incident impliquant un délinquant, l’employé-e peut être affecté à d’autres fonctions avec rémunération ou retiré de son lieu normal de travail avec rémunération en attendant le résultat de l’enquête disciplinaire, à la condition que l’employé-e collabore entièrement à l’enquête en assistant aux entrevues et aux auditions sans délais indus. Le refus d’assister aux entrevues et aux auditions sans délais indus donne lieu à l’interruption de la rémunération tant que l’enquête n’est pas terminée.
  2. Les parties conviennent que le guide des gestionnaires pour la discipline du personnel donne les directives applicables à la réaffectation de l’employé-e à d’autres fonctions ou au retrait de l’employé-e de son lieu normal de travail. Les parties s’engagent à tenir des consultations significatives advenant que l’on envisage des modifications au guide des gestionnaires pour la discipline du personnel.

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

22        L’Établissement Matsqui est un établissement à sécurité moyenne pour hommes, qui se trouve au même complexe du SCC que l’EP, l’Établissement de la vallée du Fraser pour femmes et le Centre de gestion du matériel. L’ensemble de la réserve est appelé le complexe de Matsqui.

23        La lettre du 4 juin a été montrée au fonctionnaire et on lui a demandé s’il la reconnaissait. Il a dit qu’il s’agissait de la lettre qui lui avait été donnée à la réunion du 4 juin. Il l’a affirmé deux fois. Lorsqu’il a été interrogé au sujet de sa réaction initiale, il a dit qu’il voulait recevoir un ordre de convocation. Il a ensuite dit qu’il avait demandé pourquoi il avait été muté à l’extérieur sans aucun contact avec les détenus. Lorsqu’il a été interrogé au sujet de la réponse de Mme Justason, il a déclaré qu’elle avait dit que ce n’était pas négociable; il allait y être affecté.

24        Mme Justason n’a déclaré ni dans son interrogatoire principal ni dans son contre-interrogatoire qu’elle avait donné au fonctionnaire la lettre du 4 juin lors de la réunion du 4 juin.

25        Lorsque le fonctionnaire a été interrogé au sujet des préoccupations soulevées par le représentant de son agent négociateur, il a dit que M. Palmer avait soulevé l’absence de la communication d’un ordre de convocation et que le fait qu’il avait été affecté à l’extérieur ne permettait pas au fonctionnaire d’avoir accès à un ordinateur pour lire ses courriels.

26        Mme Justason a décrit la réunion du 4 juin un peu différemment. Elle a déclaré qu’elle avait dit au fonctionnaire qu’il était relevé de ses fonctions de CX, qu’il allait être réaffecté et qu’il travaillerait au campus Matsqui. Elle a affirmé que la réaffectation allait être en vigueur jusqu’à ce que l’enquête disciplinaire soit convoquée et menée à terme. Elle a ensuite déclaré qu’elle lui avait communiqué les options concernant l’absence d’avis de changement de son quart.

27        Le renvoi à la renonciation à l’avis de deux semaines et au fait d’être rémunéré des heures supplémentaires pour son premier quart du nouvel horaire répond aux dispositions (article 21) de la convention collective et n’est pas en litige en l’espèce.

28        Lorsqu’on a demandé à Mme Justason ce qu’avait décidé le fonctionnaire lors de la réunion du 4 juin au sujet de la question concernant son quart, elle a dit qu’il n’avait pris aucune décision. Elle a dit qu’il était malheureux à la réunion et qu’à un moment donné, il est parti et n’est revenu que sur l’insistance de M. Palmer. Elle a indiqué qu’en ce qui concerne son choix relatif au changement de quart en vertu de la convention collective, il a demandé d’avoir plus de temps pour prendre sa décision.

29        De plus, le 4 juin 2013, à 16 h 44, Mme Bal a envoyé le courriel suivant à Mme Justason :

[Traduction]

[…]

J’ai appelé James Stewart à 16 h 30 aujourd’hui et il a demandé que je donne la lettre de réaffectation à Jack Palmer. J’enverrai un courriel à Jack et je laisserai la lettre ci-jointe au bureau du GC afin qu’il la ramasse. À l’heure actuelle, il n’est pas sur place.

James m’a demandé le contenu de la lettre et je la lui ai lue. Il a également confirmé qu’il renonce à l’avis de deux semaines et se rendra au travail demain et sera rémunéré au taux d’heures supplémentaires approprié pour son premier quart du nouvel horaire.

[…]

30        Lorsque Mme Justason a été interrogée au sujet du courriel de Mme Bal, elle a dit qu’à la réunion du 4 juin, ils ont discuté de l’incident du 28 mai et que la réunion avait pour but de discuter de la réaffectation. Elle a indiqué qu’à maintes reprises, le fonctionnaire avait demandé l’ordre de convocation et qu’il avait été informé que, même si une enquête était convoquée, les enquêteurs régionaux n’étaient pas disponibles et que l’ordre de convocation serait délivré et lui serait donné lorsque l’enquête serait convoquée.

31        Le 5 juin 2013, le fonctionnaire a commencé sa réaffectation.

32        Le 17 juin 2013, Mme Justason a envoyé une note de service à Cindy Lewis et à Nigel Harper, qui sont les deux des employés du SCC (la « note de service Lewis du 17 juin »), en vue de leur ordonner de lancer une enquête disciplinaire afin d’établir les faits concernant la participation du fonctionnaire à l’incident du 28 mai. La note de service indique ce qui suit :

[Traduction]

Objet  Mandat conféré par la gestionnaire délégataire à l’enquêteur en vue de mener une enquête disciplinaire

Il vous est par la présente ordonné d’amorcer une enquête disciplinaire en vue d’établir les faits relatifs à la participation de l’agent correctionnel James Stewart le 28 mai 2013 dans un incident concernant un détenu [nom omis] (no SED [omis]). Les allégations sont les suivantes :

  1. La méthode d’intervention utilisée n’était ni nécessaire ni appropriée par rapport à la situation et n’était donc pas conforme aux dispositions législatives pertinentes, à la directive du commissaire, à l’ordre permanent ou à d’autres directives qui s’y rapportent particulièrement, mais sans compter le recours à la force et la gestion des incidents de sécurité.

De plus, si, dans le cadre de l’enquête, vous découvrez une autre inconduite qui diffère considérablement de l’inconduite visée par l’enquête, vous devez communiquer avec moi pour demander un ordre de convocation modifié ayant trait à cette inconduite.

Dans le contexte de l’enquête, je m’attends à ce que vous fassiez des renvois au Code de discipline et aux Règles de conduite professionnelle et que vous suiviez le Guide du gestionnaire des enquêtes disciplinaires dans la mesure où il s’applique à cette situation, ainsi qu’à tous les renseignements recueillis à l’aide d’autres sources.

Je m’attends également à ce que vous fassiez des renvois aux autres documents pertinents, au besoin.

Vous devez soumettre votre rapport avant la fermeture des bureaux, au plus tard, le 8 juillet 2013.

Je vous remercie de votre collaboration dans cette affaire.

Corinne Justason

Pièces jointes :         Ordre de convocation.

cc.      J. Stewart

         Conseiller en CRRT et en Relations de travail – EP

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

33        Le 17 juin 2013, Mme Justason a aussi envoyé une lettre au fonctionnaire, également au moyen d’une note de service, en vue de l’informer qu’une enquête disciplinaire avait été convoquée (la « note de service Stewart du 17 juin »). La note de service indique ce qui suit :

[Traduction]

Objet  Avis qu’une enquête disciplinaire a été convoquée

Vous êtes par la présente informé qu’une enquête disciplinaire a été convoquée en vue d’établir les faits liés à votre participation à une situation de recours à la force contre un détenu [nom omis] (no SED [omis]) le 28 mai 2013. Selon les allégations suivantes :

  1. vous auriez utilisé une méthode d’intervention qui n’était ni nécessaire ni appropriée par rapport à la situation et n’était donc pas conforme aux dispositions législatives pertinentes, à la directive du commissaire, à l’ordre permanent ou à d’autres directives dans la mesure où elles s’y rapportent particulièrement, mais sans compter le recours à la force et la gestion des incidents de sécurité.

Un tel acte, s’il est fondé, constitue un manquement grave aux Règles de conduite professionnelle du SCC et/ou au Code de discipline du SCC. En conséquence, j’ai conféré à Cindy Lewiset àNigel Harper, les enquêteurs régionaux, le mandat de mener immédiatement une enquête disciplinaire interne de cette question.

Vous serez informé bientôt de la date, de l’heure et du lieu de votre première entrevue disciplinaire. Vous avez le droit d’être représenté pendant cette entrevue, ainsi que tout au long du processus d’enquête.

Si l’enquête disciplinaire permet de conclure que ces allégations sont fondées, une mesure disciplinaire peut être prise.

Vous trouverez ci-jointe, à titre d’information, une copie de l’ordre de convocation envoyé à Cindy Lewis et à Nigel Harper les autorisant à mener cette enquête.

Si, en tout temps, vous avez besoin d’un soutien personnel, veuillez communiquer avec un des agents d’orientation du Programme d’aide aux employés (PAE) dans la région. Le PAE offre une aide confidentielle ou des services de counseling à court terme à ceux qui vivent des problèmes personnels ou liés au travail.

Corinne Justason

[…]

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

34        L’article 17 de la convention collective est intitulé « mesures disciplinaires ». La clause 17.05 se lit comme suit :

17.05 Lorsqu’un avis écrit est présenté à un-e employé-e l’informant qu’il-elle fait l’objet d’une enquête disciplinaire, on doit également lui présenter une copie de l’ordre de convocation d’une enquête.

35        Aucun des témoins n’a témoigné au sujet de la signification exacte de l’expression « ordre de convocation ».

36        Dans son témoignage, Mme Justason a déclaré que ni la note de service Lewis du 17 juin ni la note de service Stewart du 17 juin ne constituait l’ordre de convocation. Elle a indiqué qu’aucun des documents qui lui ont été présentés en interrogatoire principal et en contre-interrogatoire ne constituait l’ordre de convocation. Toutefois, il avait été envoyé au fonctionnaire en pièce jointe aux deux notes de service du 17 juin. Selon Mme Justason, l’avis de l’enquête disciplinaire et l’ordre de convocation ont été donnés au fonctionnaire le 18 juin 2013 par le directeur adjoint des Services de gestion de l’EP, Scott Verwold.

37        Lors de l’interrogatoire principal, on a montré au fonctionnaire la note de service Stewart du 17 juin et il a été interrogé quant à sa réaction. Il a déclaré que c’était plaisant d’avoir été informé des allégations, même s’il n’y souscrivait pas. Le fonctionnaire n’a pas dit qu’il avait reçu la note de service Lewis du 17 juin ni la note de service Stewart du 17 juin.

38        On lui a ensuite demandé s’il avait soulevé des préoccupations pendant la période du 4 au 17 juin. Il a dit qu’il avait éprouvé des difficultés à communiquer avec la personne chargée de son dossier et que chaque fois qu’il parlait avec cette personne, elle lui disait qu’elle n’avait pas reçu un ordre de convocation. Lorsqu’on lui a demandé le nombre de fois qu’il en avait fait la demande, il a répondu qu’il l’avait demandé environ six fois. Lorsqu’il a été interrogé quant à savoir s’il avait soulevé ses préoccupations auprès de quelqu’un d’autre, il a dit qu’il les avait soulevés auprès de Derek Chin, le président de l’UCCO-SACC-CSN au EP et auprès de Louise Weller, la GC à l’EP chargée de l’établissement de l’horaire et du déploiement. Aucune de ces personnes n’a témoigné.

39        En contre-interrogatoire, on a montré au fonctionnaire la note de service Lewis du 17 juin et on lui a demandé si elle constituait l’ordre de convocation. Il a déclaré : [traduction] « C’est ce qu’elle indique. C’est possible. Tout cela a eu lieu il y a cinq ans. »

40        Lors de l’interrogatoire principal, lorsqu’on lui a demandé comment la direction avait justifié le retard, il a indiqué qu’elle ne l’avait pas fait et il a ensuite dit que, lorsqu’il en avait fait la demande, [traduction] « elle [Mme Justason] m’a dit “vous irez où vous êtes affecté”; c’était la seule explication donnée. »

41        En contre-interrogatoire, on a laissé entendre au fonctionnaire que, lors de la réunion du 4 juin, on lui avait expliqué pourquoi la réaffectation à l’extérieur du périmètre de l’EP était nécessaire et pourquoi une enquête allait être effectuée. Il a répondu que cela ne s’était pas précisément passé. Lorsque l’avocate de l’employeur a interrogé le fonctionnaire au sujet du fait qu’il avait laissé entendre que Mme Justason n’avait pas expliqué qu’un recours à la force avait eu lieu, le fonctionnaire a affirmé qu’elle avait exprimé une préoccupation concernant l’incident du 28 mai. Lorsqu’il a été poussé au sujet de cette discussion, il a admis que les préoccupations de Mme Justason avaient trait à son recours à la force pendant cet incident.

42        En contre-interrogatoire, on a demandé au fonctionnaire si sa déclaration affirmant qu’il n’avait reçu aucune explication, à la réunion du 4 juin, concernant l’absence d’un ordre de convocation était exacte. Il a dit qu’il n’avait reçu aucune explication et a déclaré que Mme Justason avait dit qu’il n’y avait aucun enquêteur. Il a ensuite dit qu’il n’était pas certain si c’était lors de la réunion, mais qu’à un moment donné, il avait été informé qu’il ne recevrait aucun ordre de convocation jusqu’à ce qu’un enquêteur soit disponible.

43        En contre-interrogatoire, lorsqu’on a dit au fonctionnaire que Mme Justason affirmerait dans son témoignage que, le 4 juin 2013, personne n’était disponible pour effectuer l’enquête, il a répondu qu’il devrait être possible de porter une accusation sans qu’un enquêteur ne soit affecté au dossier.

44        En contre-interrogatoire, on a dit au fonctionnaire que la réunion du 4 juin avait été tenue en vue de discuter de sa réaffectation. Il a répondu [traduction] « oui, j’ai été réaffecté ». Lorsqu’on lui a dit que la raison de la réaffectation avait été abordée, il a déclaré que [traduction] « aucun ordre de convocation n’a été donné ». Lorsqu’on lui a dit qu’aucune enquête disciplinaire n’avait été convoquée lors de la réunion du 4 juin, il a déclaré qu’il n’était [traduction] « pas d’accord; j’ai été relevé de mon poste ». Lorsqu’une proposition de suivi à cette question lui a été faite selon laquelle une enquête disciplinaire et son retrait de son poste ne constituaient pas la même chose, il a répondu que, selon sa perception [traduction] « c’est la même chose; j’ai été accusé de quelque chose et j’ai été relevé de mon poste ».

45        Lors de l’interrogatoire principal, le fonctionnaire a déclaré qu’il n’avait pas accès à ses courriels pendant qu’il était à l’Établissement Matsqui. En contre-interrogatoire, lorsqu’on lui a demandé s’il avait demandé à en avoir accès pendant qu’il était à l’extérieur de l’EP, il a déclaré qu’il ne savait pas que cette option était disponible puisqu’il ne travaillait pas à l’Établissement Matsqui.

46        Lorsque le représentant du fonctionnaire lui a demandé comment l’omission de recevoir un ordre de convocation l’a touché, il a dit que c’était stressant de ne pas connaître les accusations de même que le fait de ne pas les avoir par écrit. Il a dit qu’il éprouvait des difficultés à dormir et qu’il avait des pensées ruminantes. Il a ensuite déclaré que, si le processus régulier n’est pas suivi, cela ajoute au stress. Il a dit que cela a touché ses relations privées à ce moment-là. Lorsqu’on lui a demandé comment cela avait touché sa vie professionnelle, il a indiqué qu’il croyait que cela pouvait toucher son emploi; il en était inquiet. Lorsqu’on lui a demandé pendant combien de temps il s’était senti de la sorte, il a affirmé que cinq ans se sont écoulés sans reconnaissance, que trois occasions officielles avaient eu lieu et qu’il n’avait fait rien de mal. C’était bien pire pendant les quatre mois qui ont suivi l’incident.

47        Il est ressorti de la preuve que le fonctionnaire a fait l’objet d’une mesure disciplinaire pour recours à la force inapproprié relativement à l’incident du 28 mai et qu’il a reçu un avertissement écrit et qu’il devait suivre une instruction de rattrapage.

48        À la date de l’audience, John Randle était employé par le CT auprès du SCC à titre de CX-01 et était le vice-président régional de l’UCCO-SACC-CSN pour la région du Pacifique du SCC. Il a déclaré que, dans le cadre de sa participation auprès de l’UCCO-SACC-CSN, en plus de son poste actuel, il avait été délégué syndical, coordonnateur des plaintes et président, tous de la section locale. Son portefeuille actuel concerne les retours au travail. Toutefois, il a participé en une certaine qualité à environ 80 à 100 questions disciplinaires.

49        On a demandé à M. Randle s’il a traité de beaucoup de questions concernant un ordre de convocation. Il a répondu qu’il a des préoccupations à leur égard. Lorsqu’on lui a demandé d’expliquer, il a déclaré que selon lui, la question la plus importante était que les ordres de convocation sont très vagues et qu’ils ne contiennent pas suffisamment de détails.

50        Lorsqu’on lui a demandé pourquoi il est important d’obtenir une copie d’un ordre de convocation lorsqu’une personne reçoit un avis d’une telle convocation, M. Randle a déclaré que c’était parce que l’agent négociateur l’avait négocié. Il a ensuite affirmé qu’une personne visée par une enquête devrait connaître les échéances. Lorsqu’on lui a demandé pourquoi il était si important de suivre le processus, il a répondu que les enquêtes disciplinaires étaient très stressantes et que l’ordre de convocation offre à ceux concernés des renseignements et des faits relatifs à ce que le membre de l’agent négociateur aurait fait.

III. Résumé de l’argumentation

A. Pour le fonctionnaire s’estimant lésé

51        Il s’agit de décider si l’employeur a contrevenu à la convention collective lorsqu’il a donné au fonctionnaire l’ordre de convocation deux semaines après lui avoir donné un avis écrit selon lequel il faisait l’objet d’une enquête disciplinaire.

52        La clause 17.05 utilise le terme « également », dont le terme anglais « concurrent » est défini par le Concise Oxford English Dictionary, Tenth Edition, Revised, comme [traduction] « existant ou qui se produit en même temps ».

53        Le fonctionnaire a soutenu que l’employeur a enfreint la clause 17.05.

54        À la réunion du 4 juin, Mme Justason a informé le fonctionnaire qu’il serait réaffecté en attendant les résultats d’une enquête disciplinaire, qui a eu lieu le lendemain. Son représentant et lui ont tous les deux soulevé la question relative à l’absence d’un ordre de convocation à la réunion.

55        Selon Mme Justason, l’avis de l’enquête disciplinaire et l’ordre de convocation ont été donnés au fonctionnaire le 18 juin 2013 par le directeur adjoint des Services de gestion de l’EP, Scott Verwold.

56        Le fonctionnaire a déclaré qu’il a reçu l’avis écrit, conformément à la clause 17.05 le 4 juin 2013. La lettre du 4 juin utilise le terme [traduction] « informé »; il n’y a aucune ambiguïté. Elle avait pour but de l’informer qu’il faisait l’objet d’une enquête disciplinaire. Il était réaffecté en attendant une enquête disciplinaire. Une décision de mener une telle enquête avait été prise avant le 4 juin 2013. À compter de cette date, il avait été informé qu’une enquête avait été convoquée et, par conséquent, en vertu de la clause 17.05, il avait droit à une copie de l’ordre de convocation. En conséquence, l’employeur a enfreint la clause 17.05.

57        L’employeur a tenté de justifier le retard en faisant renvoi à un protocole auquel l’agent négociateur n’avait jamais convenu et il n’existe aucune version écrite de ce protocole. Il est plutôt officieux et vise à s’assurer que des mesures raisonnables sont prises afin que les enquêtes disciplinaires soient achevées en temps raisonnable. Le moment où une enquête est amorcée est lorsqu’un enquêteur est choisi. Ce protocole n’est pas par écrit et même s’il se peut que l’employeur le suive unilatéralement, elle ne peut pas remplacer la convention collective.

58        La contravention à la convention collective n’était pas sans conséquence pour le fonctionnaire. Une enquête est stressante. Les clauses 17.05 à 17.09 de la convention collective constituent des protections qui doivent être suivies. La clause 17.05 constitue une garantie des droits procéduraux fondamentaux, à savoir le droit de savoir comment le processus disciplinaire se déroulera et le droit de l’employé d’être informé de ses droits. Ce sont des droits qui sont très importants pour un employé.

59        Le non-respect par l’employeur de la clause 17.05 a aggravé la souffrance mentale du fonctionnaire. Il se sentait anxieux et stressé et éprouvait des difficultés à dormir. Son emploi était compromis. Cela a touché ses relations personnelles et sa vie personnelle et il se sentait impuissant et sans espoir.

60        Le fonctionnaire m’a renvoyé à Canadian Pacific Railway Company v. Unifor, 2014 CanLII 22982, aux fins de l’argument selon lequel des dommages peuvent être accordés pour une violation de la convention collective. Il m’a également renvoyé à Weber c. Ontario Hydro, [1995] 2 RCS 929.

61        Le fonctionnaire m’a renvoyé à Canada Post Corporation v. Canadian Union of Postal Workers, 2012 CanLII 97766, pour étayer l’argument selon lequel une violation d’une convention collective sous la forme d’omission de divulguer des renseignements peut donner lieu à l’octroi de dommages. Les avantages ont été conclus par contrat et, en conséquence, il était raisonnable que les parties prévoient que des dommages puissent en découler en cas de manquement au contrat. Le fonctionnaire a soutenu que le raisonnement dans Canada Post Corporation et la jurisprudence qu’elle établit s’appliquent en l’espèce et que des dommages pour souffrance morale sont appropriés. Il a déclaré que l’ordre de convocation lui était important. Il a demandé des dommages pour souffrance mentale pour un montant de 2 500 $ pour la violation de la convention collective.

62        L’agent négociateur a également demandé des dommages généraux, par principe. L’employeur ne peut pas violer impunément la convention collective. Le respect de la convention collective est sacré; il n’est pas facultatif. À cet égard, le fonctionnaire m’a renvoyé à Western Canada Council of Teamsters v. Canadian Freightways, 2013 CanLII 19947, dans laquelle l’arbitre a accordé au syndicat des dommages généraux pour violation de la convention collective. En ce qui concerne ce point, l’agent négociateur demande une adjudication de 2 500 $.

63        Le fonctionnaire demande des intérêts sur les montants accordés.

B. Pour l’employeur

64        Le 28 mai 2013, le fonctionnaire a participé à un incident dans le cadre duquel il a utilisé un gaz poivré vaporisé et a frappé le détenu A, qui était menotté et nu dans la douche. Mme Justason a évalué les risques liés à la situation et a décidé de réaffecter le fonctionnaire à l’extérieur de l’EP, n’ayant aucun contact avec les détenus.

65        À la réunion du 4 juin, Mme Justason a rencontré le fonctionnaire et son représentant. Elle a discuté de la réaffectation et les a informés qu’une enquête devait être convoquée. Le fonctionnaire a demandé un ordre de convocation à ce moment-là. Mme Justason a expliqué qu’aucun enquêteur n’était disponible et que, par conséquent, aucun ordre de convocation ne serait délivré tant qu’un enquêteur n’était pas trouvé.

66        À la réunion du 4 juin, la date à laquelle l’enquête disciplinaire devait être amorcée était inconnue, et il était impossible pour l’employeur d’établir l’échéancier d’une telle enquête.

67        L’employeur a rédigé l’avis écrit de l’enquête et l’ordre de convocation a été délivré le 17 juin 2013. L’enquête a été convoquée uniquement à cette date. Le 18 juin 2013, l’avis écrit et l’ordre de convocation ont été fournis au fonctionnaire. La lettre du 4 juin avait pour but de l’informer de sa réaffectation. L’avis selon lequel une enquête avait été convoquée et sa convocation a eu lieu les 17 et 18 juin 2013.

68        L’employeur a soutenu qu’il n’a pas violé la clause 17.05.

69        Il n’existe aucune jurisprudence qui traite de l’interprétation de la clause 17.05.

70        La Commission doit se fier aux principes génériques de l’interprétation de conventions collectives et son pouvoir se limite à exprimer les modalités de la convention collective. Cela est effectué en examinant ses termes afin de déterminer l’intention des parties. À cet égard, l’employeur m’a renvoyé à Chafe c. Conseil du Trésor (ministère des Pêches et des Océans), 2010 CRTFP 112; à Communications, Energy and Paperworkers Union of Canada, Local 30 v. Irving Pulp & Paper Ltd., 2002 NBCA 30; et à Telus Communications Company v. Telecommunications Workers Union, 2009 BCSC 1289.

71        L’employeur m’a renvoyé à Wamboldt c. Agence du revenu du Canada, 2013 CRTFP 55, au par. 28 qui déclare ce qui suit

[28] […] les parties à une convention collective sont généralement réputées avoir voulu en arriver à une entente qui soit aisément applicable dans le cours ordinaire des choses. […] une interprétation produisant un résultat non équivoque est généralement préférée à une interprétation qui produirait un résultat équivoque ou incertain, si ce n’est pour la simple raison qu’un résultat non équivoque est davantage de nature à produire et à maintenir des « […] rapports harmonieux et mutuellement avantageux entre l’Employeur, l’Alliance et les employé-e-s […] », […]

72        L’article 17, plus particulièrement la clause 17.05, vise à assurer un processus disciplinaire équitable. L’employeur doit disposer d’une période raisonnable pour mettre ce processus en place et il aura une certaine procédure administrative pour ce faire.

73        Si un incident survient, l’employeur doit répondre aux questions suivantes :

  1. L’employé peut-il continuer à occuper son poste?
  2. L’employé doit-il être réaffecté?
  3. Une enquête disciplinaire est-elle requise?
  4. L’employé devrait-il être suspendu, avec ou sans solde?

74        Toutes ces questions pourraient découler d’un incident, comme l’incident du 28 mai.

75        L’annexe G de la convention collective confère à l’employeur le droit de réaffecter les employés. Le 4 juin 2013, il a informé le fonctionnaire en personne qu’il serait réaffecté, en attendant une enquête disciplinaire. Le 5 juin 2013, une lettre confirmant sa réaffectation lui a été donnée. À ce moment-là, l’enquête n’avait pas encore été convoquée. Le 18 juin 2013, il a reçu un avis officiel que l’enquête disciplinaire avait été convoquée et il a reçu l’ordre de convocation.

76        Mme Justason a expliqué qu’un ordre de convocation donne aux enquêteurs le mandat de l’enquête. Il doit être adressé aux enquêteurs. Il explique ce qui doit être enquêté et les échéanciers particuliers de l’enquête. L’employeur ne connaissait pas tous ces renseignements le 4 juin 2013 et, par conséquent, il ne pouvait pas les donner au fonctionnaire ou à l’agent négociateur à ce moment-là.

77        Le fonctionnaire a reçu un avis écrit de l’enquête disciplinaire et de l’ordre de convocation même le 17 ou le 18 juin 2013. L’employeur a soutenu qu’il faisait l’objet d’une enquête uniquement lorsqu’elle a été convoquée et non avant cette date.

78        À l’origine, le fonctionnaire avait déposé deux griefs. Dans le grief qu’il a retiré, il demandait une indemnité pour perte de primes de poste, de primes de fin de semaine, et d’heures supplémentaires à titre de conséquence directe de la réaffectation.

79        Le redressement approprié concernant une violation de convention collective consiste à rétablir l’employé dans le poste qu’il aurait occupé, si la violation n’avait pas eu lieu. À cet égard, l’employeur m’a renvoyé à Horner c. Conseil du Trésor (ministère de la Défense nationale),2012 CRTFP 33. La question de savoir si le fonctionnaire a reçu l’ordre de convocation le 4 juin ou le 18 juin 2013 n’a aucune incidence sur les pertes de salaires et d’avantages qu’il a subies. Toutefois, ces allégations ont été faites contre l’employeur dans le grief qu’il a retiré et découlaient de la réaffectation et non de l’omission d’avoir reçu l’ordre de convocation. Ces pertes n’étaient pas une conséquence d’une violation de la clause 17.05.

80        En ce qui concerne les dommages demandés par le fonctionnaire, il ne suffit pas d’indiquer en petits caractères dans le grief que des dommages peuvent être demandés. Les dommages doivent être soulevés et traités au cours de la procédure de règlement des griefs. À cet égard, l’employeur a invoqué Scheuneman et Conseil du Trésor (Ressources naturelles Canada), dossier de la CRTFP 166-2-27847, [1998] C.R.T.F.P.C. no 93 (QL) (confirmée dans [2000] 2 CF 365); Burchill v. Attorney General of Canada, [1981] 1 F.C. 109 (C.A.).

81        L’employeur a fait valoir que le fonctionnaire et son agent négociateur n’ont déposé aucune preuve de dommages. Aucun expert n’a été cité. M. Randle a confirmé dans son témoignage que le processus disciplinaire est stressant. À la fin de l’enquête, les allégations étaient fondées et le fonctionnaire a reçu un avertissement écrit et il a suivi une instruction de rattrapage.

82        En ce qui concerne l’allégation de dommages soulevée par l’agent négociateur, l’employeur a soutenu que l’agent négociateur n’a déposé aucun élément de preuve des dommages réclamés et que, quoi qu’il en soit, le grief a été déposé par le fonctionnaire.

IV. Motifs

83        La seule question dont je suis saisi est celle de savoir si l’employeur a violé la clause 17.05 et, dans l’affirmative, quel redressement devrait être accordé au fonctionnaire en raison de la violation.

84        Pour les motifs qui suivent, je conclus que la convention collective n’a pas été violée. Le grief est rejeté.

85        La clause 17.05 énonce ce qui suit : « Lorsqu’un avis écrit est présenté à un-e employé-e l’informant qu’il-elle fait l’objet d’une enquête disciplinaire, on doit également lui présenter une copie de l’ordre de convocation d’une enquête. »

86        L’expression « ordre de convocation » n’est pas définie dans la convention collective; aucun des témoins n’a témoigné non plus quant à ce dont il s’agit exactement.

87        Le Canadian Oxford Dictionary, 2e éd., prévoit la définition suivante du terme anglais « convene » [convoquer] : [traduction] « organiser (une réunion, etc.); rassembler des personnes aux fins d’une réunion; rassembler ou regrouper des personnes surtout pour un but commun; assigner (une personne) à comparaître devant un tribunal. »

88        Le terme « ordre » n’est pas défini dans la convention collective. Le Canadian Oxford Dictionary, 2e éd., prévoit la définition suivante du terme anglais « order » [ordre] : […] un ordre, une directive, une instruction, entre autres, faisant autorité. (n’obéissait qu’à des ordres; a donné des ordres pour le faire; le juge a rendu une ordonnance) ».

89        Un « ordre de convocation » est une expression particulière du SCC lorsqu’il renvoie à des enquêtes des incidents ou de la conduite des employés. Elle est utilisée pour renvoyer aux directives données par une personne qui a le pouvoir d’ordonner à une ou à plusieurs personnes d’effectuer une enquête, et elle établit les paramètres de l’enquête.

90         Aucun élément de preuve exigeant qu’un ordre de convocation d’une enquête soit donné par écrit n’a été déposé. Cela dit, la clause 17.05 présuppose que l’ordre de convocation sera donné par écrit parce qu’il vise la communication d’une copie de l’ordre à ceux faisant l’objet de l’enquête.

91        Je dois décider si la lettre du 4 juin constituait un avis écrit selon lequel le fonctionnaire « fait l’objet d’une enquête disciplinaire », comme le prévoit la clause 17.05.

92        Même si la grande partie des témoignages du fonctionnaire et de Mme Justason était semblable, s’ils n’étaient pas identiques, parfois, les deux ont éprouvé de la difficulté à se souvenir de certaines choses. Ce n’est pas surprenant puisque les événements pertinents sont survenus environ cinq ans avant l’audition devant moi.

93        Le fonctionnaire a supposé que la note de service Lewis du 17 juin constituait l’ordre de convocation. D’autre part, Mme Justason a déclaré qu’il ne s’agissait pas de l’ordre de convocation. Toutefois, aucun autre document n’a été déposé en preuve concernant cet ordre. Chacune des parties en aurait une copie; le fonctionnaire a admis avoir reçu un ordre de convocation le 18 juin 2013 ou vers cette date et l’employeur a affirmé lui en avoir donné une. Je soupçonne que si l’ordre de convocation avait été disponible, les parties l’auraient produit à l’audience. Ni l’une ni l’autre des parties ne l’a produit; en conséquence, je conclus que la note de service Lewis du 17 juin constituait l’ordre de convocation.

94        La note de service Stewart du 17 juin indique clairement qu’elle constitue un avis écrit qu’une enquête a été convoquée et elle indique les mêmes renseignements qui figurent dans la note de service Lewis du 17 juin.

95        Le fonctionnaire a soutenu que la clause 17.05 a pour but de garantir les droits procéduraux fondamentaux, y compris le droit de connaître comment le processus disciplinaire se déroulera et le droit d’être informé de ses droits. Même si je souscris au sentiment de cet argument, en ce sens qu’il est important qu’une personne faisant l’objet d’une enquête soit informée des allégations formulées contre elle et que les renseignements quant à la personne qui effectuera l’enquête et si d’autres paramètres peuvent être établis pour les enquêteurs, ce n’est pas exactement ce qu’énonce la clause 17.05.

96        La convention collective n’impose aucun fardeau à l’employeur de fournir une copie d’un ordre de convocation à un CX, même si une telle copie existe et même si le CX a été informé qu’elle existe. Selon le libellé de la clause 17.05, un ordre de convocation sera donné à un CX en même temps qu’il reçoit l’avis écrit qu’il fait l’objet d’une enquête disciplinaire.

97        Un ordre de convocation n’est ni adressé à la personne faisant l’objet d’une enquête ni créé à l’intention de cette dernière. Il s’agit d’un ordre à l’intention d’un enquêteur ou d’une équipe d’enquêteurs à accomplir certaines tâches. La clause 17.05 confère aux CX qui reçoivent un avis écrit d’une enquête le droit d’obtenir en même temps une copie de l’ordre de convocation.

98        Il va sans dire qu’afin qu’un ordre de convocation soit donné, il doit exister.

99        Il est ressorti de la preuve qu’aucun ordre de convocation n’était en place le 4 juin 2013. Un tel ordre a été créé le 17 juin 2013 ou vers cette date. En conséquence, il aurait été impossible de donner au fonctionnaire une copie d’un ordre de convocation lorsqu’un tel ordre n’existait pas.

100        Selon le témoignage de Mme Justason, après avoir examiné le vidéo de l’incident du 28 mai et le rapport du fonctionnaire, elle a déterminé qu’une enquête sera effectuée et que le fonctionnaire serait relevé de ses fonctions à titre de CX et réaffecté à travailler à l’extérieur du périmètre de l’EP, sur les lieux de Matsqui. Elle a également déclaré qu’au 4 juin 2013, elle n’avait pas convoqué une enquête car aucun enquêteur n’était disponible.

101        Il est ressorti de la preuve que le 4 juin 2013 constituait le premier jour où le fonctionnaire était de retour au travail suivant l’incident du 28 mai puisqu’il avait pris des jours de repos depuis l’incident.

102        Mme Justason a affirmé que la réunion du 4 juin avait pour but d’informer le fonctionnaire de sa réaffectation en attendant l’enquête, qui devait être convoquée. En fait, elle et le fonctionnaire ont tous les deux confirmé que son affectation à des fonctions à l’extérieur avait été discutée. En contre-interrogatoire, il a admis que la réaffectation avait été discutée, ainsi que son recours à la force, dans la mesure qu’ils se rapportaient à l’incident du 28 mai.

103        Plus tard, en contre-interrogatoire, lorsqu’on a insisté, le fonctionnaire a admis que Mme Justason avait discuté de la réaffectation dans le contexte d’une enquête qui serait effectuée relativement à l’incident du 28 mai. Il a également admis qu’elle lui avait donné les raisons pour lesquelles il n’existait aucun ordre de convocation, à savoir qu’il n’y avait aucun enquêteur disponible à qui elle pouvait attribuer l’enquête. Il estimait que ces raisons n’étaient pas raisonnables.

104        Lorsque la lettre du 4 juin lui a été montrée, le fonctionnaire a dit, deux fois, qu’elle lui avait été donnée à la réunion du 4 juin, ce qui n’est pas étayé par les éléments de preuve. La première ligne de la lettre déclare : [traduction] « Le 4 juin 2013, je vous ai informé qu’en raison de la convocation d’une enquête disciplinaire, vous serez réaffecté à des fonctions n’ayant aucun contact avec les détenus. » Cela suggère que la lettre a été rédigée après la réunion en vue de confirmer les discussions qui ont été tenues.

105        Cela est étayé par le courriel de Mme Bal à Mme Justason, également en date du 4 juin 2013, dans lequel, à 16 h 44, Mme Bal a déclaré qu’elle venait de parler avec le fonctionnaire au téléphone à 16 h 30 et qu’il lui avait demandé de donner la lettre de réaffectation à M. Palmer. Mme Bal a ensuite affirmé qu’elle enverra un courriel à M. Palmer et qu’elle laisserait ensuite la lettre au bureau du GC puisque M. Palmer n’était pas sur place. Le courriel indiquait ensuite que le fonctionnaire avait demandé à Mme Bal de lui dire le contenu de la lettre; elle a déclaré qu’elle lui a lu la lettre.

106        Selon les éléments de preuve, je n’estime pas que la lettre du 4 juin a été donnée au fonctionnaire à la réunion du 4 juin. Si Mme Justason lui avait donné la lettre à la réunion, pourquoi est-ce que Mme Bal l’aurait appelé le même jour à 16 h 30 et pourquoi est-ce qu’il aurait demandé à Mme Bal d’effectuer ce qui suit :

  1. Lui lire la lettre, dont il avait déjà possession?
  2. Donner la lettre à M. Palmer, qui avait assisté à la réunion du 4 juin?

107        La dernière partie du courriel que Mme Bal a envoyé à Mme Justason le 4 juin 2013 indique que le fonctionnaire lui avait dit qu’il renoncerait à l’avis de deux semaines, qu’il se rendrait au travail le 5 juin 2013 et qu’il serait rémunéré pour les heures supplémentaires appropriées pour son premier quart du nouvel horaire.

108        Selon ce courriel, Mme Bal a dit qu’elle laisserait la lettre avec le GC, puisque M. Palmer n’était pas sur place. Rien dans la preuve n’indique qu’il a reçu la lettre le 4 juin 2013 ou à une autre date ou qu’il l’a donnée au fonctionnaire.

109        Même si j’acceptais que M. Palmer a reçu la lettre du 4 juin à un moment donné après que Mme Bal ait dit qu’elle la laisserait pour lui auprès du GC de service et même si j’acceptais qu’il a donné la lettre au fonctionnaire, je n’accepte pas qu’il s’agissait d’un avis écrit d’une enquête disciplinaire, comme le prévoit la clause 17.05.

110        La lettre du 4 juin portait sur la réaffectation du fonctionnaire. Lorsqu’elle est lue dans son ensemble, il est clair que tel était son but. Selon son témoignage en contre-interrogatoire, le fonctionnaire savait qu’une enquête serait effectuée et qu’elle visait ses actes concernant le détenu A et l’incident du 28 mai. Cela a été discuté à la réunion du 4 juin et ne constituait aucun mystère. La réunion n’avait pour but de l’informer de la convocation de l’enquête de l’incident du 28 mai, mais de traiter son retour au travail à la suite de cet incident et de conclure des conditions de travail de rechange, n’ayant aucun contact avec les détenus. Il a été réaffecté en raison de sa conduite lors de l’incident du 28 mai. Si sa conduite n’avait pas été remise en question, il est très improbable que Mme Justason l’aurait réaffecté à un travail à l’extérieur n’ayant aucun contact avec les détenus. Il est difficile de voir comment elle lui aurait communiqué son raisonnement par écrit sans faire référence à l’incident du 28 mai et l’enquête imminente, ce qui était le but de la lettre.

111        Je n’ai aucun doute qu’à la réunion du 4 juin, le fonctionnaire et son représentant ont demandé un ordre de convocation. Cela aurait été logique puisqu’il n’est pas contesté qu’une enquête devait être convoquée. Toutefois, si une enquête n’est pas convoquée et qu’il n’existe aucun ordre de convocation, un tel ordre ne peut être donné. Jusqu’à ce qu’elle soit convoquée, le fonctionnaire ne faisait pas l’objet d’une enquête. Si Mme Justason n’a pas convoqué une enquête, il s’ensuit qu’il aurait été impossible de donner au fonctionnaire un avis écrit d’une enquête qui n’existait pas.

112        Je conclus qu’au 4 juin 2013, le fonctionnaire ne faisait pas encore l’objet d’une enquête et qu’un avis écrit selon lequel il faisait l’objet d’une enquête disciplinaire ne lui avait pas été donné parce qu’elle n’existait pas. En conséquence, il n’y a eu aucune violation de la convention collective.

113        Au 17 juin 2013, le fonctionnaire faisait l’objet d’une enquête, un ordre de convocation existait et il ressort de la preuve présentée devant moi qu’il semble qu’un avis écrit selon lequel il faisait l’objet d’une enquête et l’ordre de convocation de l’enquête lui ont tous les deux été donnés le 18 juin 2013.

114        Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

V. Ordonnance

115        Le grief est rejeté.

Le 11 mars 2019.

Traduction de la CRTESPF

John G. Jaworski,

une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

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