Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le fonctionnaire s’estimant lésé a prétendu que l’employeur n’avait pas traité sa demande d’indemnisation des accidentés du travail adéquatement, en omettant de mettre en œuvre de manière appropriée les exigences prévues dans la Loi sur l’indemnisation des agents de l’État, le Règlement sur le lieu d’emploi des employés de l’État, les directives du Conseil du Trésor sur les demandes d’indemnisation des accidentés du travail, ainsi que la politique de Travail Canada sur les demandes d’indemnisation des accidentés du travail – le fonctionnaire s’estimant lésé a également prétendu que l’employeur avait enfreint la convention collective en fournissant délibérément des renseignements superflus, non pertinents et préjudiciables concernant sa demande d’indemnisation des accidentés du travail afin de l’empêcher de recevoir des prestations de la Commission des accidents du travail de l’Alberta – l’employeur a contesté la compétence de la Commission sous prétexte que la Loi sur l’indemnisation des agents de l’État constitue une interdiction totale quant à toute demande contre l’employeur – la Commission a conclu avoir compétence pour trancher la question, puisque le seul moyen pour qu’un agent correctionnel puisse tirer avantage de l’article sur le congé d’accident du travail était d’avoir été déclaré admissible à recevoir des prestations d’indemnisation des accidentés du travail – la Loi et ses politiques obligent l’employeur à remplir la partie qui lui est réservée dans les rapports d’accident présentés au Programme du travail, qui déclenche le traitement des demandes de prestations d’indemnisation pour accidentés du travail – il doit le faire de manière raisonnable et de bonne foi, car il est tenu d’exercer l’ensemble de ses droits en matière de gestion, sachant que les mesures qu’il prend entraîneront des conséquences directes sur l’admissibilité de l’employé en vertu de la convention collective et de la Loi sur l’indemnisation des agents de l’État – l’obligation de l’employeur découle implicitement de la convention collective, car l’admissibilité à la convention dépend de l’obtention du droit statutaire – les mesures prises par l’employeur ont des conséquences directes sur le droit des l’employés à bénéficier d’un congé prévu dans la convention collective, et elles sont assujetties au processus de règlement des griefs – par conséquent, le rapport présenté au Programme du travail qui déclenche le traitement de la demande d’indemnisation d’un travailleur lance aussi une demande de l’employé en vertu de la convention collective – la Commission n’avait pas le pouvoir d’examiner la décision prise par la Commission des accidents du travail de l’Alberta d’accepter ou de rejeter la demande – toutefois, elle avait bel et bien compétence pour examiner les mesures prises par l’employeur qui ont empêché le fonctionnaire s’estimant lésé d’avoir accès aux prestations en vertu de la convention collective – la Commission peut examiner les actions de l’employeur de fournir des renseignements ou d’interagir avec une commission des accidents du travail – la Commission n’a pas conclu que l’employeur avait agi d’une manière pouvant être jugée malhonnête, arbitraire ou de mauvaise foi – le fonctionnaire s’estimant lésé n’a pas établi qu’il y avait eu hostilité ni préjugé contre lui de la part d’un membre de la direction de l’établissement pouvant permettre à la Commission de croire que l’employeur a délibérément fourni des renseignements trompeurs dans son rapport de l’employeur – il ne s’agissait pas de faux renseignements, mais plutôt d’une interprétation des renseignements que le fonctionnaire s’estimant lésé avait déjà fournis à la Commission des accidents du travail de l’Alberta – la Commission a accepté la demande du fonctionnaire s’estimant lésé visant la mise sous scellés des pièces qui contenaient ses renseignements médicaux confidentiels – elle n’a pas convenu de rendre anonyme son identité parce qu’il n’a pas fourni d’explications quant à la raison pour laquelle elle devrait dévier de sa pratique d’observation du principe de transparence judiciaire.

Grief rejeté.

Contenu de la décision



Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral et Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  20190423
  • Dossier:  566-02-8329 et 8330
  • Référence:  2019 CRTESPF 47

Devant une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral


ENTRE

KYLE REYNOLDS

fonctionnaire s'estimant lésé

et

CONSEIL DU TRÉSOR
(Service correctionnel du Canada)

employeur

Répertorié
Reynolds c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada)


Affaire concernant des griefs individuels renvoyés à l’arbitrage


Devant:
Margaret T.A. Shannon, une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral
Pour le fonctionnaire s'estimant lésé:
Jacob Axelrod, avocat
Pour l'employeur:
Nour Rashid, avocat
Affaire entendue à Calgary (Alberta),
du 10 au 12 octobre 2018.
(Traduction de la CRTESPF)

MOTIFS DE DÉCISION

I. Griefs individuels renvoyés à l’arbitrage

1         Kyle Reynolds, le fonctionnaire s’estimant lésé (le « fonctionnaire »), a soutenu que le Service correctionnel du Canada (SCC ou l’« employeur ») n’a pas géré correctement ses indemnités pour accidents du travail (IAT) en omettant d’appliquer les exigences de la Loi sur l’indemnisation des agents de l’État (L.R.C. (1985), ch. G-5; LIAE), du Règlement sur le lieu d’emploi des employés de l’État (DORS/86-791), des directives d’indemnité pour accidents du travail du Conseil du Trésor, et de la politique sur les IAT.

2         De plus, le fonctionnaire a soutenu que l’employeur a fourni des renseignements extrinsèques, non pertinents et intentionnellement nuisibles concernant son IAT, pour l’empêcher d’obtenir des prestations de la Alberta Workers’ Compensation Board (AWCB). Il a soutenu que cela a contrevenu aux clauses 1.01 et 1.02 de la convention collective entre le Conseil du Trésor et l’Union of Canadian Correctional Officers – Syndicat des agents correctionnels du Canada – Confédération des syndicats nationaux (UCCO-SACC-CSN), qui a pris fin le 31 mai 2010 (la « convention collective »).

3         Le 1er novembre 2014, la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique (L.C. 2013, ch. 40, art. 365; LCRTEFP) a été proclamée en vigueur (TR/2014-84) et a créé la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique (CRTEFP), qui remplace l’ancienne Commission des relations de travail dans la fonction publique (CRTFP) et l’ancien Tribunal de la dotation de la fonction publique. Le même jour, les modifications corrélatives et transitoires édictées par les articles 366 à 466 de la Loi no 2 sur le plan d’action économique de 2013 (L.C. 2013, ch. 40) sont aussi entrées en vigueur (TR/2014-84). En vertu de l’article 393 de la Loi no 2 sur le plan d’action économique de 2013, une instance engagée au titre de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (L.C. 2003, ch. 22, art 2; LRTFP) avant le 1er novembre 2014 se poursuit sans autres formalités en conformité avec la LRTFP, dans sa forme modifiée par les articles 365 à 470 de la Loi no 2 sur le plan d’action économique de 2013.

4         Le 19 juin 2017, la Loi modifiant la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique et d’autres lois et comportant d’autres mesures (L.C. 2017, ch. 9) a reçu la sanction royale et a modifié le nom de la CRTEFP et le titre de la LCRTEFP et de la LRTFP pour qu’ils deviennent respectivement la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (la « Commission »), la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral et la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral (la « Loi »).

II. Question de compétence

5         L’employeur a soulevé une objection quant à la compétence de la Commission au motif que l’article 12 de la LIAE est un empêchement absolu à toute demande contre l’employeur. La LIAE prévoit des redressements dans un forum subsidiaire, ce qui empêche toute procédure en lien avec une procédure d’IAT devant la présente Commission. Le fonctionnaire blâme l’employeur d’avoir refusé sa demande initiale de la Commission des accidents du travail (CAT). L’employeur a respecté ses obligations en vertu de la LIAE. La décision d’accorder l’IAT n’était pas celle de l’employeur. Rien de ce qu’il a fait conformément à ses obligations aux termes de la LIAE n’est assujetti à la compétence de la Commission.

6         Les obligations substantielles de l’employeur aux termes de la LIAE ne peuvent être interprétées selon la portée et le principal objectif de l’entente collective soulevée par le fonctionnaire. À l’origine, il s’appuyait sur l’article « Élimination de la discrimination » de cette convention collective, mais a par la suite déclaré qu’il ne s’y appuyait plus. À l’audience, il a plutôt cherché à s’appuyer sur la clause 30.16, intitulée « Pour accident du travail ». Cela n’a pas été contesté à tous les paliers de la procédure de règlement des griefs et a donc été interdit aux termes des principes soulevés dans Burchill c. Canada (Procureur général), [1981] 1 CF 109 (C.A.). Sans ce lien à la convention collective, la Commission n’a pas la compétence voulue pour statuer sur la présente affaire.

7         Pour sa part, le fonctionnaire a soutenu que le grief n’était pas lié à une blessure ou à un accident en milieu de travail. Il n’a pas réclamé de mesure de réparation pour avoir causé un accident. Il a plutôt sollicité une réparation pour l’exercice insouciant des fonctions de direction de l’employeur pour avoir communiqué avec l’AWCB et leur avoir fourni des renseignements faux et inexacts. L’exercice de ces fonctions de direction relève directement de la convention collective.

8         La décision de la Commission concernant la compétence a été suspendue jusqu’à l’issue de l’entente de la preuve.

III. Résumé de la preuve

9         Le fonctionnaire a témoigné qu’il avait commencé sa carrière comme agent correctionnel (CX) en 1989 à l’Établissement de Bowden du SCC, à Innisfail (Alberta) (l’« établissement »). À la suite de situations qu’il a connues pendant sa carrière en tant que CX, il a souffert d’un trouble diagnostiqué. Selon son témoignage, le trouble lui a d’abord été diagnostiqué en 2002, et est revenu en 2011. De ce fait, il a laissé le travail et s’est servi de tous ses congés accumulés, ce qui l’a mené jusqu’au 4 janvier 2012, au moment où il a présenté l’IAT.

10        Le fonctionnaire a présenté la déclaration de l’employé (pièce 2, onglet 4) et le rapport de son médecin (pièce 2, onglet 1). SCC a présenté le rapport de l’employeur (pièce 2, onglet 5), que l’ancien programme du travail de Ressources humaines et Développement des compétences Canada (RHDCC) avait contresigné.

11        Dans son rapport, l’employeur a fait référence à la sanction disciplinaire imposée au fonctionnaire le 23 septembre 2011 comme étant la cause de son absence du travail, ce qu’il a contesté. Selon lui, la sanction disciplinaire lui a certainement été un facteur de stress, mais n’a pas causé la rechute de sa condition médicale.

12        Selon le fonctionnaire, la sanction disciplinaire lui a été une nuisance. Elle était liée à ce qu’il avait fait d’une lettre adressée à un détenu, trouvée lors d’une fouille de cellule, et qui discutait d’actes obscènes et violents avec des enfants à l’extérieur de la prison. Il avait été frustré de la situation, parce que par souci de préserver la confidentialité du détenu, il n’avait pas pu apporter la lettre à la police. Il l’a donc signalée au service de sécurité interne de l’établissement aux fins de prise de mesures. Alors qu’il travaillait au poste de contrôle du courrier des détenus, il avait ouvert le courrier du détenu, à l’encontre des politiques de l’employeur, cherchant davantage de matériel sur le sujet. Il a fait l’objet d’une mesure disciplinaire pour l’avoir fait.

13        La mesure disciplinaire dont il a fait l’objet pour atteinte à la confidentialité du détenu n’a pas été la cause de la rechute du fonctionnaire. Il s’agit plutôt de son sentiment de désespoir et d’inutilité face à son incapacité de protéger les enfants des pédophiles et des délinquants sentenciés de crimes liés à la pornographie juvénile qui ont l’autorisation de recevoir de la visite et des lettres de délinquants en liberté dans la communauté qui ont autrefois été incarcérés.

14        La déclaration de l’employeur dans son rapport se fondait sur la présomption du sous-directeur d’alors. Selon le témoignage du fonctionnaire, le sous-directeur avait été mandaté de débarrasser l’établissement d’employés qui nécessitaient des mesures d’adaptation, y compris le fonctionnaire. La déclaration avait été une tentative du sous-directeur d’accomplir son mandat. Le fonctionnaire nie avoir fait une telle déclaration au sous-directeur et affirme que la déclaration de l’employeur concernant l’effet de la mesure disciplinaire a été fondée sur une présomption du sous-directeur et non sur ce que le fonctionnaire aurait dit.

15        L’AWCB a rejeté la demande du fonctionnaire au motif qu’il était absent du travail, non pas en raison de blessure en milieu de travail, mais plutôt en raison de stress et d’anxiété liés au processus disciplinaire (voir la lettre à la pièce 2, onglet 6). Quand la demande a été rejetée, le fonctionnaire a demandé et reçu une indemnité d’assurance invalidité de longue durée de Sun Life alors qu’il a interjeté appel de la décision de l’AWCB. Éventuellement, en mars 2015, sa demande a été approuvée (pièce 2, onglet 21).

16        Le fonctionnaire a engagé des frais importants pendant la période de procédure d’appel, qui comprenaient les frais juridiques (pièce 2, onglet 23), les coûts de médicaments, les coûts de rapports des médecins, et les kilomètres parcourus aux rendez-vous. Des reçus pour tous ces coûts ont été déposés comme pièces. Le geste de l’employeur de déposer le rapport erroné à l’AWCB a eu des conséquences négatives pour la santé du fonctionnaire puisque sa condition déjà affaiblie s’est détériorée, et il ne travaillera plus jamais.

17        Darren Posyluzny était le gestionnaire correctionnel, Opérations, à l’établissement au moment où le fonctionnaire s’est blessé. Il était le gestionnaire direct du fonctionnaire et était tenu de remplir la partie de l’employeur du rapport des blessures en milieu de travail et des situations dangereuses. Selon son témoignage, afin de le compléter, il s’est servi des renseignements que le fonctionnaire avait déposés.

18        La référence à la [traduction] « récente mesure disciplinaire a soulevé d’autres questions, tel que signalé par l’employé », précisée dans le formulaire de M. Posyluzny, renvoyait aux renseignements que le fonctionnaire avait soumis dans le formulaire pour les employés (pièce 3, onglet 1). Le fonctionnaire a décrit la mesure disciplinaire comme l’un des événements ayant mené à sa rechute; il n’a pas dit que la mesure disciplinaire avait causé sa condition médicale ou qu’elle l’avait empêché de travailler. M. Posyluzny a signalé que son rôle dans sa tâche de remplir le rapport de l’employeur sur les demandes de la CAT était d’inclure les renseignements de base et tout renseignement signalé par l’employé, ce qu’il a fait.

19        L’AWCB a fondé sa décision sur la conclusion que les symptômes du fonctionnaire liés à l’anxiété et au stress étaient le résultat de la mesure disciplinaire et des processus liés au travail, ce qui n’a pas satisfait aux critères d’une réclamation acceptable fondée sur le stress (pièce 3, onglet 4). Selon M. Posyluzny, l’AWCB, et non lui, a conclu que la mesure disciplinaire a été la cause de la rechute de sa condition médicale.

20        Nancy Shore était la directrice adjointe, Opérations, à l’établissement pendant la période (de 2011 à 2015) dans laquelle l’IAT du fonctionnaire a été traitée et portée en appel. Dans le cadre de ses fonctions, elle devait surveiller son dossier au cours du processus d’IAT. Alors que l’employeur a surveillé la progression de son appel, après avoir rempli sa partie du rapport d’incident, elle n’a joué aucun autre rôle dans le processus. Selon Mme Shore, l’AWCB n’a jamais communiqué avec elle.

21        Une fois que l’IAT du fonctionnaire a été approuvée en 2015, l’employeur avait le droit de l’interjeter, ce qu’il n’a pas fait. Il a plutôt approuvé le congé du fonctionnaire pour cause d’accident du travail. Tous les congés qu’il a utilisés pendant la période de l’IAT ont été convertis en congé pour cause d’accident du travail (pièce 7). Le type de congé est accordé une fois que l’employé a une IAT approuvée, selon l’entente collective.

22        Selon Mme Shore, signaler un accident en milieu de travail est couvert par les Lignes directrices 254-2 – Programme de retour au travail (pièce 3, onglet 22). Le paragraphe 9 exige que l’employeur remplisse un rapport d’accident de la CAT. Selon le paragraphe 12, les renseignements fournis à la CAT dans le rapport de blessure de l’employeur constitueront le fondement sur lequel l’agent d’indemnisation de la CAT déterminera le droit à l’indemnité.

23        Pendant sept ans et demi, Chantal Rioux était conseillère régionale en retour au travail pour l’employeur. Elle a fourni des conseils et de l’orientation aux gestionnaires et aux superviseurs sur le programme de retour au travail, qui comprenaient les demandes de la CAT. Elle a témoigné que l’employeur est tenu de fournir tous les faits dont il a connaissance au moment où il remplit son rapport d’accident. Cela comprend tout renseignement lié à l’accident ou tout renseignement pertinent au sujet de la situation d’emploi de l’employé ou tout autre renseignement jugé pertinent. Il pourrait s’agir de l’utilisation des congés, de questions de discipline, de griefs, d’autres questions relatives aux relations de travail, d’observation des employés au lieu de travail, ou d’autres renseignements qui peuvent s’avérer pertinents.

24        Une CAT provinciale qui examine une demande aux termes de la LIAE tiendra également compte des rapports autres que celui de l’employeur. Selon Mme Rioux, elle se fondera également sur le rapport des employés et les renseignements médicaux déposés.

IV. Résumé de l’argumentation

A. Pour le fonctionnaire s’estimant lésé

25        Les commentaires de l’employeur à l’AWCB selon lesquels l’absence du fonctionnaire du milieu de travail était attribuable à sa peur d’une mesure disciplinaire étaient irréfléchis, déraisonnables, et constituaient un manque à ses obligations aux termes de la convention collective de fournir des renseignements exacts à l’appui de la demande de l’employé de prestations de la CAT, et en même temps, au droit de l’employé au congé pour accident du travail. On peut inférer la présente obligation d’une lecture de la clause 30.16, le système d’accident du travail, et d’autres obligations de gestion prévues par la présente convention.

26        Le grief ne concerne pas un accident ou une blessure en milieu de travail. Le fonctionnaire ne demande pas à la Commission de déterminer l’indemnité pour une blessure. Le grief concerne l’utilisation des droits de direction de l’employeur pour émettre une déclaration déraisonnable et fausse à l’AWCB pour l’empêcher d’avoir droit à un congé pour accident du travail.

27        Bien que l’article 12 de la LIAE soit un empêchement prévu par la loi des poursuites civiles contre l’employeur liées aux accidents en milieu de travail, y compris les griefs, il n’est pas possible pour la législation d’exclure tout grief qui peut découler de la même situation factuelle qui a peut-être donné lieu à un accident, par exemple une cessation d’emploi alors que l’employé reçoit des prestations de la CAT.

28        Afin de déterminer si le grief concerne un accident en milieu de travail, ou une question de convention collective, il s’agit de savoir s’il remet en question le manquement à la convention collective de l’employeur en ce qui concerne un accident en milieu de travail (voir Edmonton Police Service et Edmonton Police Association, 124 C.L.A.S. 226 aux paragraphes 100 et 104).

29        Autrement dit, dans le contexte en l’espèce, le manquement de l’employeur à l’article « Responsabilités de la direction » de la convention collective (article 6), qui a causé le fonctionnaire à ne pas être admissible à une indemnité aux termes de la clause 30.16 « Pour accident du travail », était-elle une mesure liée à un accident en milieu de travail? Il est important que la Commission considère que les obligations de l’employeur dans le processus de déclaration ne font pas partie de l’accident, même si la loi l’impose. Dans Weber c. Ontario Hydro, [1995] 2 RCS 929, au paragraphe 68, la Cour suprême du Canada a posé la question à être répondue comme étant « […] de savoir si le comportement qui donne naissance au litige opposant les parties découle expressément ou implicitement de la convention collective qui les unit. »

30        En l’espèce, le manquement est survenu de la dérogation de l’employeur de ses droits de direction dans ses entretiens avec l’AWCB. L’employeur n’a pas pris de précautions raisonnables pour assurer que les déclarations qu’il a fournies à l’AWCB, et sur lesquelles l’AWCB prendrait sa décision concernant l’IAT du fonctionnaire, étaient exactes. L’employeur était tenu de fournir des renseignements exacts et équitables à l’AWCB à propos de la demande du fonctionnaire.

31        À la suite du manquement de l’employeur à ses fonctions d’agir équitablement et de fournir des renseignements exacts à l’AWCB, le fonctionnaire a cumulé trois ans de coûts et d’efforts supplémentaires alors qu’il s’est battu pour que sa demande soit reconnue. Avant que l’IAT soit approuvée, il n’avait aucun argument sur lequel établir sa demande aux termes de la clause 30.16. Pour répondre à la question posée dans Weber, le grief est indirectement issu de la convention collective et relève donc de la compétence de la Commission.

32        L’obligation d’agir raisonnablement est inférentielle à la portée de la convention collective. Par inférence, l’employeur est tenu d’agir équitablement et raisonnablement lorsqu’il traite de toutes les questions que soulève la convention collective. Les prérogatives de gestion doivent être exercées de manière équitable et raisonnable (voir Brown et Beatty, Canadian Labour Arbitration, 4e édition, au paragraphe 4:2322). L’obligation de l’employeur d’agir avec équité et d’une façon raisonnable envers ses employés doit être déduite de l’interprétation de la convention collective (voir Amyot c. Conseil du Trésor (Solliciteur général – Service correctionnel Canada), 2001 CRTFP 49, au paragraphe 14).

33        Dans le cadre de cette obligation d’agir d’une façon raisonnable, l’employeur a dû prendre des précautions raisonnables pour fournir des renseignements exacts à l’AWCB, sachant que l’AWCB s’y fierait pour déterminer les prestations auxquelles le fonctionnaire aurait droit. L’employeur doit faire preuve de diligence et d’attention dans l’exercice de ses obligations prévues par la loi quand elles chevauchent l’exercice de ses droits de direction (voir Parry Sound (District), Conseil d’administration des services sociaux c. S.E.E.F.P.O., section locale 324, [2003] 2 RCS 157, 2003 CSC 42). En l’espèce, le fonctionnaire s’est référé à la mesure disciplinaire dans son rapport d’incident de la CAT, duquel l’employeur a tiré des conclusions inexactes auxquelles l’AWCB s’est ensuite fiée. L’employeur a dépassé ses droits de direction en commentant de façon inexacte et en induisant l’AWCB en erreur, à son profit.

34        La Commission a accepté la demande de Weber (voir Amos c. Administrateur général (ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux), 2008 CRTFP 74). Selon le raisonnement dans Parry Sound et l’existence de la clause 30.16 et par la demande de Weber, la Commission a la compétence de traiter le présent grief. De plus, selon Parry Sound, les lois sur l’emploi relèvent implicitement de la convention collective. L’article 4 de la LIAE établit clairement qu’il s’agit d’une loi sur l’emploi, ce qui, selon Parry Sound, fait implicitement partie de la convention collective.

35        L’employeur doit prendre des précautions raisonnables pour fournir des renseignements exacts à la CAT. La Commission ne peut interpréter la convention collective de manière à porter atteinte aux droits conférés par la loi aux termes de la LIAE. Par conséquent, l’employeur doit prendre des précautions raisonnables pour fournir des renseignements exacts sur lesquels l’admissibilité d’un employé pour l’indemnisation des accidents du travail sera évaluée et, par extension, le congé pour accident du travail.

36        La présente proposition est appuyée par la décision dans Canada Post Corp. v. C.U.P.W., 103 C.L.A.S. 34. Dans cette affaire, l’employeur a mal informé une CAT de l’accident du fonctionnaire. Le fonctionnaire s’est appuyé sur un manquement à l’obligation de vigilance de l’employeur lors de la soumission des renseignements de la demande de prestation des accidents du travail. Le fonctionnaire s’est principalement appuyé sur le congé pour cause d’accident du travail, qui était similaire au congé en l’espèce en ce sens qu’il exigeait à un employé de recevoir des prestations de la CAT pour être admissible pour toute rémunération conformément à l’article du congé pour cause d’accident du travail de la convention collective.

37        Le syndicat en cause dans cette affaire s’est appuyé sur Weber pour appuyer la compétence de l’arbitre. L’employeur n’a pas contesté le principe énoncé dans Weber, mais a plutôt soutenu que le litige, soit l’acceptation de la demande par la CAT, ne découlait pas de la convention collective.

38        L’arbitre dans Canada Post Corp. a déterminé que l’article relatif à l’accident du travail de la convention collective pertinente n’aurait plus d’effet juridique si l’employeur refusait de fournir des renseignements ou fournissait de faux renseignements à la CAT. Cela annulerait ou contrecarrerait l’objet de l’article, et en ce qui concerne la convention collective, laisserait un écart dans les accords négociés pour atteindre des relations harmonieuses. Il a conclu que l’employeur était tenu de fournir, aux termes de la convention collective, des renseignements pertinents et exacts à la CAT au moment où il est informé du problème de santé du fonctionnaire. La tâche de l’employeur était d’agir de bonne foi et de prendre les précautions nécessaires pour s’assurer que la CAT reçoive des renseignements pertinents et exacts. Faire la lecture de cette manière a engendré le but commun tel que négocié dans l’article relatif à l’accident du travail (voir paragraphes 71 à 74).

39        En l’espèce, après trois ans et demi, l’IAT du fonctionnaire a été approuvée, et il a été admissible pour un congé pour cause d’accident du travail aux termes de la clause 30.16. Il n’y a aucun doute que la décision initiale de l’AWCB était fondée sur les renseignements qu’elle avait reçus de l’employeur. M. Posyluzny s’est appuyé sur des références à la mesure disciplinaire dans le rapport de l’employé pour conclure qu’elle a causé la rechute du problème de santé du fonctionnaire. Il a ignoré tout le reste de la lettre jointe au rapport de l’employé, qui pourrait être décrite de manière plus raisonnable comme une chronologie des événements.

40        L’interprétation de M. Posyluzny n’était pas raisonnable, compte tenu des événements contextuels qui ont causé la rechute du problème de santé du fonctionnaire.

41        Le fonctionnaire n’était pas tenu de prouver que l’employeur avait agi de mauvaise foi ou avec l’intention de lui porter atteinte. Dans Canada Post Corp., il n’y avait aucune conclusion de mauvaise foi. Il est évident par le rapport de l’employeur (pièce 3, onglet 4 à la page 2) que l’AWCB a déterminé que le fonctionnaire n’était pas admissible pour une indemnité d’accident du travail puisque la mesure disciplinaire récente avait causé la rechute de son problème médical. Puisque la mesure disciplinaire fait partie des facteurs de stress normaux associés à l’emploi, il n’a pas satisfait aux critères pour que son indemnité lui soit accordée. L’AWCB s’est appuyé sur le rapport de l’employeur comme source d’information.

42        Le fonctionnaire demande une déclaration selon laquelle il y a eu manquement à la convention collective, un remboursement de 28 170,31 $ pour le coût des frais juridiques afin de poursuivre son appel à la CAT, et 15 000 $ à titre de dommage pour détresse mentale. En reconnaissance du fait qu’il accepte qu’il ait peut-être contribué au malentendu de sa demande, il propose une réduction de 25 % du montant accordé.

B. Pour l’employeur

43        En déposant une demande d’indemnités pour accidents du travail, le fonctionnaire a renoncé à toute poursuite civile, y compris un grief contre l’employeur concernant la blessure dont il a souffert. L’article 12 de la LIAE est un obstacle légal pour toute demande, y compris un grief, donc toute demande de remboursement liée à l’accident doit être rejetée aux termes de cette disposition. De manière semblable, une telle action est irrecevable aux termes de la Loi sur la responsabilité civile de l’État et le contentieux administratif (L.R.C. (1985), ch. C-50) et à l’article 208 de la Loi.

44        La seule façon de déterminer si l’employeur était responsable du rejet de la demande est de rouvrir le dossier et l’examiner de nouveau. La Commission n’a pas la compétence d’évaluer des IAT ou d’examiner les décisions des CAT. Si la Commission n’est pas en mesure d’attribuer la faute pour le rejet de la demande, elle ne peut pas attribuer la responsabilité de la perte.

45        Si l’employeur a agi de manière déraisonnable, il existe une réparation, mais la Commission ne peut pas aller jusqu’à attribuer le rejet de l’AWCB de la demande du fonctionnaire aux agissements de l’employeur. Il n’est pas approprié que la Commission détermine le rapport de causalité du rejet de la demande. La distance qui sépare l’obligation de déclarer et le congé pour cause d’accident du travail est grande et l’obligation de déclarer ne peut être inférée dans la convention collective.

46        L’employeur s’est principalement appuyé sur les principes énoncés dans Burchill pour appuyer son objection à la compétence de la Commission. Le fonctionnaire n’a pas pu soutenir un nouveau grief devant la Commission qui était différent de celui qu’il avait soutenu dans la procédure de règlement de griefs. Le renvoi à l’arbitrage renvoie seulement à l’article 37 « Élimination de la discrimination » de la convention collective, et à rien d’autre. Il n’est fait mention nulle part de la clause 30.16 dans le dossier de grief. Le grief est théorique puisque le fonctionnaire a bénéficié d’un congé pour cause d’accident du travail lorsqu’il a été approuvé pour une indemnité d’accident du travail.

47        L’employeur n’avait aucun moyen d’établir que le fonctionnaire fonderait sa requête sur la clause 30.16 après une lecture de la présentation du grief. Un examen de la réparation se réfère seulement au fait d’être compensé par la réintégration du salaire et des prestations, ce qui n’est pas clair en termes de référence à un article d’une convention collective.

48        Le fonctionnaire ne s’est pas acquitté du fardeau de prouver le manquement à la convention collective. La convention n’inclut pas l’obligation de l’employeur de signaler les blessures. Le simple fait d’entrer les documents en preuve ne l’acquitte pas du fardeau de la preuve. Il lui appartenait de démontrer clairement selon la prépondérance des probabilités que ce qu’il a allégué a eu lieu (voir Arsenault c. Agence Parcs Canada, 2008 CRTFP 17).

49        Lorsqu’il est question du libellé d’une convention collective, l’arbitre de grief a pour rôle de déterminer l’intention réelle des parties (voir Chafe c. Conseil du Trésor (ministère des Pêches et des Océans), 2010 CRTFP 112, au paragraphe 51). La règle d’interprétation de base veut que les mots clairs de la convention collective aient leur sens ordinaire (voir Allen c. Conseil national de recherches du Canada, 2016 CRTEFP 76). La clause 30.16 relève des dispositions du droit aux congés, qui n’infère pas d’obligations en matière de déclaration de la part de l’employeur.

50        Même si le rapport d’accident est enraciné dans la clause 30.16, l’employeur n’a pas manqué à cette obligation. Il était tenu de fournir tout renseignement pertinent, y compris les renseignements concernant la mesure disciplinaire. Au nom de l’employeur, M. Posyluzny s’est conformé à toutes les obligations en matière de rapports. Il a rempli de manière fidèle et compréhensive le rapport de l’employeur selon les renseignements qu’il détenait, y compris le rapport de l’employé. Il n’a pas fourni de renseignements extrinsèques ou inexacts ou n’a pas induit l’AWCB en erreur. Il a simplement résumé les renseignements que le fonctionnaire avait déjà fournis. M. Posyluzny a affirmé que la mesure disciplinaire a soulevé des problèmes associés à la gestion du stress, et non une rechute du problème de santé du fonctionnaire. L’AWCB a établi sa conclusion selon son évaluation du rapport de l’employé, du rapport de l’employeur, et des renseignements médicaux qui ont été déposés.

51        Dans l’éventualité où la Commission détermine qu’elle a compétence pour entendre l’affaire, elle devrait conclure qu’étant donné que le fonctionnaire a reçu une indemnité d’accident du travail ainsi qu’un congé pour cause d’accident du travail rétroactifs à la date de sa demande, il a été entièrement indemnisé, et, par conséquent, aucune autre réparation n’est nécessaire pour le manquement.

52        En ce qui concerne le remboursement des frais juridiques, la Commission n’est pas habilitée à ordonner un tel paiement (voir Canada (Procureur général) c. Robitaille, 2011 CF 1218; et Canada (Procureur général) c. Tipple, 2011 CF 762). Si la Commission n’est pas en mesure d’adjuger des dépens pour ses procès, elle ne peut certainement pas adjuger de dépens pour d’autres procès, tels qu’un appel devant l’AWCB.

53        Il importe de signaler que le relevé détaillé de l’avocat du fonctionnaire (déposé comme pièce 2, onglet 23) ne fait pas de distinction entre les deux demandes que le fonctionnaire avait présentées à ce moment-là. Autrement dit, la Commission n’est pas en mesure de déterminer quels articles sont attribuables à l’appel de l’AWCB et lesquels sont attribuables à l’autre dossier du fonctionnaire, qui était en cours et parallèle à l’appel de l’AWCB.

54        Le manquement à la convention collective en l’espèce, le cas échéant, ne devrait pas attirer de dommages-intérêts étant donné qu’il ne s’agissait pas d’un manquement grave (voir Canada (Procureur général) c. Gatien,2016 CAF 3). Il faut satisfaire à un critère très élevé pour établir le droit aux dommages, et le fonctionnaire n’a pas fait preuve d’un comportement, de la part de l’employeur, qui satisfait à ce critère.

55        On peut établir une distinction avec la décision dans Canada Post Corp. sur laquelle le représentant du fonctionnaire s’est appuyé. L’employeur, en l’espèce, n’a pas agi de mauvaise foi et n’a pas été négligent comme dans Canada Post Corp.. Le SCC n’a pas commis d’erreurs dans les renseignements qu’il a fournis à l’AWCB. Il n’a pas contesté la demande du fonctionnaire ou fourni de renseignements trompeurs. Il n’a pas été négligent. Les situations factuelles mènent à de tout autres conclusions.

56        Le fonctionnaire recevait des prestations d’invalidité à long terme pendant la période de son appel en matière d’accident du travail, alors il n’était pas sans revenu. L’employeur a avoué avoir investi un nombre important d’heures, d’efforts et de dépenses pour poursuivre son appel, mais la réparation qu’il sollicite ne revient pas à ce grief.

V. Motifs

57        Je crois avoir compétence pour trancher la question, puisque le seul moyen par lequel un CX peut tirer profit de la clause 30.16 est d’avoir réussi à obtenir des prestations de la CAT. L’étendue de cette compétence serait d’examiner le rôle de l’employeur dans la prévention de l’accès à l’employé à cette clause. Étant donné que recevoir des prestations de la CAT est une condition préalable pour le congé pour cause d’accident du travail, le rôle de l’employeur dans l’obtention de ces prestations doit être fait de bonne foi, et la Commission peut l’examiner pour un manquement à cette obligation.

58        L’employeur est tenu par la loi et par ses politiques de remplir la partie des employeurs des rapports d’accident déposés avec l’ancien programme de travail de RHDCC, qui a introduit les demandes de prestations de la CAT. Il doit le faire de manière raisonnable et de bonne foi, puisqu’il doit exercer tous ses droits de direction, sachant que ses actions auront un effet direct sur les droits des employés aux termes de la convention collective ainsi qu’aux termes de la LIAE (voir Brown et Beatty, au paragraphe 4:2322). Afin d’appliquer les principes énoncés dans Weber, l’obligation de l’employeur découle indirectement de la convention collective étant donné que le droit prévu dans la convention dépend de la réception du droit statuaire.

59        Un employeur ne peut se permettre d’éviter ses obligations énoncées dans la convention collective en les cachant derrière la LIAE. C’est essentiellement ce que la décision dans Canada Post Corp. signifie, à mon avis. L’employeur ne peut agir de mauvaise foi, fournir des renseignements faux ou trompeurs, et déployer des efforts pour empêcher un employé de recevoir des prestations de la CAT, écartant ainsi l’obligation qu’il a négociée aux termes de l’article de la convention collective sur les accidents du travail, et prétendre ensuite que ses actions n’étaient pas sujettes à révision aux termes de la convention collective.

60        Puisque les actions de l’employeur ont une incidence directe sur le droit des employés au congé aux termes de la convention collective, ils sont soumis au processus de règlement de griefs. Par extension, le rapport du programme de travail de RHDCC, qui introduit la CAT, introduit aussi la demande d’un employé aux termes de la clause 30.16. Comme dans l’exercice de tous ses droits de direction, l’employeur doit remplir ces formulaires de manière honnête et faire preuve de bonne foi. Le défaut d’en faire autant constitue une dérogation de ses droits de direction et empêcherait injustement un CX d’avoir accès aux prestations aux termes de la clause 30.16 si en raison de ces représentations, la demande du CX est rejetée.

61        La Commission ne détient pas l’autorité nécessaire pour réviser la décision de l’AWCB d’accepter ou de rejeter une IAT; cela est clair. Toutefois, elle n’est pas dépourvue de compétence pour réviser les actions de l’employeur qui ont empêché le fonctionnaire d’avoir accès à une indemnité aux termes de la convention collective. La Commission peut réviser les actions de l’employeur de fournir des renseignements à la CAT ou d’interagir avec la CAT, mais elle n’a pas l’autorité de réviser la décision de la CAT. Voilà qui est tout à fait clair.

62        Logiquement, si un fonctionnaire sollicite le droit à un congé pour cause d’accident du travail, ce qui n’est pas le cas en l’espèce, un arbitre de grief ne serait pas en mesure de le lui accorder parce que la condition préalable à la clause 30.16 n’existerait pas. La réparation existerait probablement sous forme de déclaration et de dommages.

63        Toutefois, le problème auquel fait face le fonctionnaire en l’espèce, c’est que nulle part dans le processus de règlement de griefs il ne s’est appuyé sur une dérogation à la clause 30.16, et il était trop tard pour changer de position à l’audience et s’appuyer sur cet argument. Il est clair en droit qu’afin qu’un argument soit décisif, que l’employeur a dérogé à un article précis de la convention collective, l’employeur doit avoir la possibilité de traiter les arguments pendant le processus de règlement de griefs (voir Burchill). Au stage de l’audition, il est trop tard pour le soulever. Les clauses évidentes sous l’article 1, « Objet et portée de la convention », sont insuffisantes pour relier cet argument et m’accorder la compétence que j’aurais peut-être autrement pour examiner les actions de l’employeur.

64        Cela dit, je ne peux conclure que l’employeur a fait quoi que ce soit de malhonnête, d’arbitraire, ou de mauvaise foi. L’interprétation de M. Posyluzny du rapport du fonctionnaire compris dans le rapport de l’employeur était une interprétation raisonnable de ce que le fonctionnaire a dit à l’AWCB. Le fonctionnaire n’a pas établi de mauvaises intentions ou de préjudice à son égard d’aucune personne dans la direction de l’établissement qui me mènerait à croire que l’employeur a délibérément fourni de faux renseignements dans son rapport de l’employeur. En fait, les renseignements qu’il contient ne sont pas faux, mais sont plutôt une interprétation des renseignements que le fonctionnaire avait déjà fournis à l’AWCB.

65        Le fonctionnaire a demandé que les pièces qui contenaient ses renseignements médicaux soient scellées. Je suis d’accord et j’ordonne que ces pièces énoncées à l’annexe A soient scellées. Il a également demandé que son nom soit anonymisé, ce qui a été rejeté au motif qu’il n’a pas démontré la raison pour laquelle la Commission devrait déroger à sa pratique de respecter le principe de transparence judiciaire et de publier le nom du fonctionnaire.

66        Comme il est énoncé dans la Politique sur la transparence et la protection de la vie privée de la Commission, le principe de transparence judiciaire est un principe important dans notre système juridique. Conformément à ce principe protégé par la Constitution, la Commission mène ses audiences en public, à moins de circonstances exceptionnelles. La Commission pratique une politique d’ouverture qui favorise la transparence de ses procédures, la responsabilisation et l’équité dans la conduite de ses audiences. Les décisions de la Commission identifient les parties et leurs témoins par leur nom et peuvent exposer des renseignements à leur sujet qui soient pertinents et nécessaires au règlement du différend. Il s’agit d’une politique publique disponible à tous et elle est partagée avec les parties au processus d’arbitrage.

67        Dans des circonstances exceptionnelles, la Commission déroge à son principe de transparence judiciaire pour accéder à des demandes de protection de la confidentialité d’éléments spécifiques de la preuve et adapter ses décisions au besoin de protection de la vie privée d’une personne lorsque de telles demandes respectent les normes applicables reconnues dans la jurisprudence. L’anonymisation est rare dans la jurisprudence de la Commission, plus particulièrement quand ces droits peuvent être protégés par d’autres moyens tels qu’en scellant des pièces. Je suis convaincu que les droits à la vie privée du fonctionnaire peuvent être suffisamment protégés en scellant les pièces, et je n’ai pas entendu d’arguments contraires.

68        Les parties m’ont fourni de nombreux dossiers pour soutenir leurs arguments. Même si je les ai tous lus, j’ai uniquement mentionné ceux ayant une importance primaire.

69        Pour les motifs indiqués ci-dessus, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

VI. Ordonnance

70        Les pièces énumérées à l’annexe A sont scellées sur ordonnance.

71        Le grief est rejeté.

Le 23 avril 2019.

Traduction de la CRTESPF.

Margaret T.A. Shannon,

une formation de la Commission des relations de
travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

ANNEXE A

Les pièces suivantes sont scellées sur ordonnance, étant donné qu’elles contiennent des renseignements médicaux confidentiels et personnels :

  • pièce 2, onglets 1, 4, 5, 6, 8, 12, 13, 14, 15, 19, 20, 21 et 22;
  • pièce 3, onglets 1, 2, 4, 7, 9, 10 et 12.
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