Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le fonctionnaire s’estimant lésé a présenté des griefs contre sa suspension sans solde et son licenciement – avant l’audience, l’administrateur général a demandé que les griefs soient rejetés au motif de leur abandon puisque le représentant du fonctionnaire s’estimant lésé n’avait eu aucun contact avec lui depuis cinq ans et n’avait pas été en mesure de le joindre dans les trois mois avant l’audience – à la réception de la demande de rejet des griefs, le représentant du fonctionnaire s’estimant lésé a informé la Commission qu’il ne le représentait plus – la Commission a conclu que le fait que le fonctionnaire s’estimant lésé n’a pas gardé le contact avec son représentant ne démontrait pas qu’il était toujours intéressé à poursuivre ses griefs – puisque la Commission n’avait d’autre moyen de le contacter que par l’entremise de son représentant, il n’y avait pas de perspective raisonnable de déterminer s’il avait toujours l’intention de poursuivre ses griefs.

Demande accueillie.
Griefs rejetés.

Contenu de la décision



Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral et Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  20190501
  • Dossier:  566-02-8696 et 8697
  • Référence:  2019 CRTESPF 50

Devant une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral


ENTRE

KONRAD BINDAS

fonctionnaire s'estimant lésé

et

ADMINISTRATEUR GÉNÉRAL
(Agence des services frontaliers du Canada)

défenderesse

Répertorié
Bindas c. Administrateur général (Agence des services frontaliers du Canada)


Affaire concernant des griefs individuels renvoyés à l’arbitrage


Devant:
James Knopp, une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral
Pour le fonctionnaire s'estimant lésé:
Guido Miguel Delgadillo, Alliance de la Fonction publique du Canada
Pour la défenderesse :
Spencer Shaw, avocat
Décision rendue sur la base d’arguments écrits
déposés le 8 avril 2019.
(Traduction de la CRTESPF)

MOTIFS DE DÉCISION

Griefs individuels renvoyés à l’arbitrage

1         Le 19 juin 2013, Konrad Bindas, le fonctionnaire s’estimant lésé (le « fonctionnaire ») a renvoyé des griefs à l’arbitrage contestant sa suspension sans solde et son licenciement subséquent. À ce moment-là, il était représenté.

2         Le 1er novembre 2014, la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique (L.C. 2013, ch. 40, art. 365) a été proclamée en vigueur (TR/2014-84) et a créé la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique, qui remplace la Commission des relations de travail dans la fonction publique et le Tribunal de la dotation de la fonction publique. Le même jour, les modifications corrélatives et transitoires édictées par les articles 366 à 466 de la Loi no 2 sur le plan d’action économique de 2013 (L.C. 2013, ch. 40) sont aussi entrées en vigueur (TR/2014-84). En vertu de l’article 393 de la Loi no 2 sur le plan d’action économique de 2013,une instance engagée au titre de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (L.C. 2003, ch. 22, art. 2) avant le 1er novembre 2014, se poursuit sans autres formalités en conformité avec la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, dans sa forme modifiée par les articles 365 à 470 de la Loi no 2 sur le plan d’action économique de 2013.

3         Le 19 juin 2017, la Loi modifiant la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique et d’autres lois et comportant d’autres mesures (L.C. 2017, ch. 9) a reçu la sanction royale, changeant le nom de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique et les titres de la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique et de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique par, respectivement, la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (la « Commission »), la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral et la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral.

4         L’audience des griefs était prévue du 23 au 26 avril 2019, à Toronto, en Ontario.

5         Les griefs sont rejetés. Pour les motifs qui suivent, je conclus que le fonctionnaire a abandonné les griefs.

Requête visant à rejeter les griefs pour motif d’abandon

6         Le 8 avril 2019, l’administrateur général de l’Agence des services frontaliers du Canada (la « défenderesse ») a déposé une [traduction] « requête de rejet » au motif que le fonctionnaire avait abandonné ses griefs.

7         La requête de rejet contient l’exposé conjoint des faits suivant :

[Traduction]

  • 1. Le 24 juillet 2010, M. Bindas, le fonctionnaire, a été suspendu de son travail auprès de l’ASFC […].
  • 2. Le 7 juillet 2011, l’ASFC a licencié M. Bindas.
  • […]

  • 6. Le Syndicat n’a pas communiqué avec M. Bindas depuis 2014.
  • 7. [Une audience était prévue du] 23 au 26 avril 2019, à Toronto.
  • 8. En vue de l’audience, le Syndicat a tenté à maintes reprises de communiquer avec M. Bindas afin de discuter de son dossier. Les efforts du Syndicat pour communiquer avec M. Bindas tout au long des mois de février, de mars et d’avril 2019 comprennent l’envoi de lettres par courrier recommandé, l’appel aux derniers numéros connus, la communication avec des tiers pour obtenir ses coordonnées et une recherche au sujet de M. Bindas dans les médias sociaux.
  • 9. Le Syndicat a déclaré dans sa dernière lettre à l’intention de M. Bindas, que s’il ne communiquait pas avec lui au plus tard le 5 avril 2019, le Syndicat ne contesterait pas une requête de rejet de son grief.
  • 10. En date du 7 avril 2019, M. Bindas n’a pas communiqué avec le Syndicat.

8         La défenderesse soutient que le fonctionnaire, dont on n’a pas eu de nouvelles depuis des années, n’a pas tenté de communiquer avec son représentant en vue de lui fournir ses nouvelles coordonnées. La défenderesse demande à la Commission de conclure que le fonctionnaire a abandonné ses griefs.

9         Le même jour, le représentant du fonctionnaire a informé la Commission qu’il
ne le représentait plus. La requête de rejet demeure non contestée.

Motifs

10        L’omission d’un fonctionnaire de garder le contact avec son représentant ou, s’il se représente lui-même, de garder le contact avec la Commission, ne satisfait pas à l’obligation très simple et fondamentale de faire preuve d’un intérêt continu dans la poursuite d’une affaire.

11        Les paragraphes 13 et 14 de Howitt c. Agence canadienne d’inspection des aliments, 2013 CRTFP 51, sont libellés comme suit :

13 En l’espèce, l’agent négociateur a affirmé à au moins trois occasions distinctes qu’il avait été incapable de communiquer avec la fonctionnaire et que, par conséquent, il n’avait pas pu recevoir des instructions et assurer sa présence à l’audience. Pour protéger les intérêts de la fonctionnaire, l’agent négociateur a demandé à plusieurs reprises des reports au nom de la fonctionnaire au motif qu’il n’avait pas été en mesure d’établir une quelconque forme de communication avec elle. Malheureusement, il n’a pas été en mesure de m’assurer que l’on pouvait raisonnablement supposer que la situation changerait sous peu ou de me convaincre que la fonctionnaire poursuivrait ce grief à la longue. On peut supposer que ce dossier restera ouvert longtemps si la demande de l’agent négociateur est accueillie.

14 Les renseignements dont je dispose, qui ont tous été recueillis à partir des documents et des pièces conservés par la Commission dans les dossiers de la CRTFP 566-32-4808 et 4809, dressent le portrait d’une fonctionnaire qui n’était pas disposée à assumer la responsabilité de donner suite à son cas avec diligence ou d’aider son représentant à porter l’affaire devant la Commission en participant de manière active au processus d’arbitrage.

12        Les paragraphes 77 et 78 de McKinnon c. Administrateur général (ministère de la Défense nationale), 2016 CRTEFP 32, sont libellés comme suit :

77       Les fonctionnaires s’estimant lésés ont l’obligation de poursuivre leur affaire en faisant preuve de diligence et en aidant leur représentant (s’ils sont représentés), peu importe qu’ils soient des représentants de l’agent négociateur ou un conseiller juridique, au cours des étapes nécessaires pour présenter leurs arguments à l’audience. Cette obligation comprend, à tout le moins, le fait de maintenir ses représentants au courant de leur adresse actuelle, ainsi que d’assurer un moyen de communication avec eux, soit par courriel ou par téléphone (téléphone intelligent, téléphone mobile ou ligne téléphonique terrestre traditionnelle). Cela permet à leur représentant de les tenir au courant des mesures qui peuvent être prises en leur faveur, ou le contraire, ainsi que de fixer des dates d’audiences possibles pour leur cas.

78      L’omission d’un fonctionnaire de garder le contact avec son représentant fait en sorte qu’il ne s’acquitte pas de son obligation très simple et fondamentale de faire preuve de diligence raisonnable à l’égard de son dossier.

13        Ces cas sont semblables à l’affaire en l’espèce puisque le fonctionnaire a omis de garder le contact avec son représentant. Une personne raisonnable s’attendrait à ce que le fonctionnaire maintienne au moins un niveau minimal de contact avec son représentant. À la place, personne n’a eu de nouvelles du fonctionnaire depuis plus de cinq ans.

14        La Commission n’a aucune autre manière de communiquer avec le fonctionnaire, à part celles qui étaient à la disposition du représentant de ce dernier. En conséquence, il n’existe aucune possibilité raisonnable de confirmer s’il a l’intention de poursuivre ses griefs.

15        J’accueille la requête au motif que les griefs ont été abandonnés.

16        Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

Ordonnance

17        Les griefs sont rejetés.

Le 1er mai 2019.

Traduction de la CRTESPF

James Knopp,

une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

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