Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

La fonctionnaire s’estimant lésée a déposé deux griefs alléguant que l’employeur avait refusé de prendre en compte ses restrictions médicales découlant d’un accident du travail, qu’il avait agi de manière à constituer un congédiement déguisé et que son précédent grief avait été traité de mauvaise foi, ce qui avait entraîné une discrimination fondée sur la déficience – en ce qui concerne le grief relatif au refus de prendre des mesures d’adaptation et au congédiement déguisé, la Commission a accueilli l’objection soulevée par l’employeur à sa compétence et l’a rejeté – la Commission a conclu que la fonctionnaire s’estimant lésée n’avait pas établi que, selon la prépondérance des probabilités, l’action de l’employeur constituait un licenciement pour un prétendu rendement insatisfaisant ou pour d’autres raisons – en l’absence d’une telle preuve, le grief ne pouvait pas être renvoyé à la Commission, conformément au sous-alinéa 209(1)c)(i) de la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral, en vertu de l’alinéa 12(1)d) de la Loi sur la gestion des finances publiques – en tout état de cause, la Commission a déterminé qu’il n’existait aucune preuve de congédiement déguisé, car les mesures prises par l’employeur n’indiquaient aucune intention de ne plus être lié par la relation de travail ou que l’une des conditions du contrat de travail avait été violée – en outre, la Commission n’a pas conclu que des mesures avaient été prises pour empêcher le retour au travail de la fonctionnaire s’estimant lésée avec une mesure d’adaptation – rien n’indiquait non plus que l’employeur avait tenté de rendre les conditions de travail de la fonctionnaire s’estimant lésée si intolérables qu’elle se sentirait obligée de démissionner – en fin de compte, la Commission a conclu que la fonctionnaire s’estimant lésée avait manqué de crédibilité dans son témoignage et que sa preuve principale était sans grand fondement – en ce qui concerne le deuxième grief comportant l’allégation de mauvaise foi et de discrimination, la Commission a accueilli l’objection soulevée par l’employeur à sa compétence et l’a rejeté – étant donné que les conditions d’emploi de la fonctionnaire s’estimant lésée n’étaient pas régies en partie par une convention collective, la Commission n’avait pas compétence pour entendre des allégations de violation de ces conditions.

Griefs rejetés.

Contenu de la décision

Date : 20190705

Dossiers : 566-02-11224 et 11833

Référence : 2019 CRTESPF 67

Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral et Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral

Armoiries

Devant une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

eNTRE

Catharine Holmes

fonctionnaire s’estimant lésée

et

ADMINISTRATEUR GÉNÉRAL

(Bureau du directeur des poursuites pénales)

défendeur

Répertorié

Holmes c. Administrateur général (Bureau du directeur des poursuites pénales)

Affaire concernant des griefs individuels renvoyés à l’arbitrage

Devant : John G. Jaworski, une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

Pour la fonctionnaire s’estimant lésée :  Elle‑même

Pour le défendeur :  Karl Chemsi, avocat

Affaire entendue à Ottawa (Ontario),

du 24 au 28 octobre 2016 et les 11 et 12 avril 2017.

(Traduction de la CRTESPF)


MOTIFS DE DÉCISION (Traduction de la crtespf)

I. Griefs individuels renvoyés à l’arbitrage

[1]  Catharine Holmes, la fonctionnaire s’estimant lésée (la « fonctionnaire »), occupe un poste au Conseil du Trésor (CT ou l’« employeur »). À l’époque des griefs, elle occupait un poste de conseillère en ressources humaines (RH) classifié au groupe et au niveau PE-04, au sein du groupe Gestion du personnel (PE), à la Direction générale des ressources humaines (DGRH) du Service des poursuites pénales du Canada (SPPC) à Ottawa, en Ontario.

[2]  Le 10 mars 2015, la fonctionnaire a déposé un grief (dossier 566-02-11224) qui était rédigé comme suit :

[Traduction]

Énoncé de grief : […]

Je conteste le fait que le SPPC a pris diverses mesures pour contrecarrer ma demande de retour au travail avec une mesure d’adaptation et/ou la retarder, et qu’il a refusé (dans une communication écrite de Jason Fox en date du 9 mars 2015) de prendre une mesure d’adaptation à l’égard de mes contraintes médicales (certifiées par mon médecin) découlant d’un accident du travail, de sorte qu’il a) a contrevenu à l’article 2 de la Loi canadienne sur les droits de la personne (LCDP) (obligation de prendre des mesures d’adaptation) et qu’il b) tente de rendre mes conditions de travail intolérables à un point tel que je me sentirai contrainte de démissionner. À ce titre, j’allègue que les mesures et l’inaction du SPPC constituent un congédiement déguisé.

Chaque acte, omission ou autre question donnant lieu au grief a eu lieu […]

Le 9 mars 2015

Redressement demandé […]

- Que le SPPC assure mon retour au travail sans délai en prenant une mesure d’adaptation conformément à mes contraintes médicales;

- Que le SPPC traite mon congé à compter de la date à laquelle mon médecin a certifié que j’étais apte à retourner au travail avec une mesure d’adaptation (ajouter la date ici) jusqu’à celle de mon retour au travail avec une mesure d’adaptation comme un CONGÉ PAYÉ –AUTRE et

- Que je sois indemnisée intégralement.

[3]  L’employeur a rejeté le grief à tous les paliers de la procédure de règlement des griefs. La fonctionnaire a renvoyé le grief à l’arbitrage le 1er juin 2015, en vertu du sous‑alinéa 209(1)c)(i) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (L.C. 2003, ch. 22, art. 2; LRTFP).

[4]  Le 4 novembre 2015, la fonctionnaire a déposé un autre grief (dossier 566‑02‑11833) auprès de l’employeur, qui était rédigé comme suit :

[Traduction]

Énoncé de grief :

Je conteste le fait que l’agent du SPPC au 3e palier a omis de répondre adéquatement et précisément aux allégations fondamentales qui ont été soulevées devant lui dans les griefs 675-3-1143 et 675-3-1144 (défaut de rétablir mon salaire en date du 30 mars 2015 et de remédier à la mesure de la direction de me placer en « congé de maladie non payé », à compter du 30 mars 2015) dans sa réponse au grief. Non seulement la réponse faisait renvoi à des renseignements inexacts, mais le SPPC semble avoir arbitrairement décidé de ne pas tenir compte des renseignements pertinents à l’appui de mes allégations selon lesquelles je n’aurais jamais dû être placée en congé de maladie non payé, puisque le Ministère a été dûment avisé par suite des éléments de preuve établis dans les conclusions de l’évaluation de l’aptitude au travail effectuée par Santé Canada, en date du 2 juillet 2015, que j’étais réputée apte à retourner au travail à temps plein avec une mesure d’adaptation. Cela corrobore le certificat médical de mon propre médecin en date du 17 mars 2015, dans lequel il est indiqué qu’à compter du 18 mars 2015, j’étais déclarée apte à retourner au travail à temps plein avec une mesure d’adaptation (retrait du milieu empreint de harcèlement).

Je dois par conséquent conclure que le Ministère a cherché à me harceler et à me nuire à nouveau, et qu’il a appliqué une mesure disciplinaire et punitive contre moi malgré le fait qu’il n’y a pas eu inconduite de ma part. Non seulement je maintiens que mon grief a été instruit de mauvaise foi, mais je conteste le fait que le Ministère prolonge cette affaire malgré mon droit à être traitée comme les autres employés qui ont présenté des certificats médicaux, en contravention de la Loi canadienne sur les droits de la personne (discrimination fondée sur la déficience), puisque je continue à subir une perte de salaire, d’avantages sociaux et de service ouvrant droit à pension et que je suis en outre humiliée d’avoir à contraindre l’organisation de faire ce qu’il faut. La mauvaise volonté avec laquelle mon grief a été géré constitue, à mon avis, une continuité du congédiement déguisé.

Chaque acte, omission ou autre question donnant lieu au grief a eu lieu […]

Le 29 octobre 2015 – DATE DE LA RÉPONSE AU GRIEF

Redressement demandé […]

 […]

- Rétablir mon salaire pour la période du 30 mars au 12 octobre 2015.

- Rétablir mes crédits de congé qui sont exigibles au 1er avril 2015 (nouvel exercice).

- Corriger la nature de mon congé afin de tenir compte de la période du 30 mars au 12 octobre 2015 à titre de congé –autre (payé).

- Rétablir mon service ouvrant droit à pension, en qualité de fonctionnaire fédérale, entre le 30 mars et le 12 octobre 2015.

[5]  L’employeur a rejeté le deuxième grief à tous les paliers de la procédure de règlement des griefs. La fonctionnaire l’a renvoyé à l’arbitrage le 18 décembre 2015, en vertu de l’alinéa 209(1)b) de la LRTFP.

[6]  Le 19 juin 2017, la Loi modifiant la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique et d’autres lois et comportant d’autres mesures (L.C. 2017, ch. 9) a reçu la sanction royale et a modifié le nom de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique (CRTEFP) et le titre de la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique, de la LRTFP et du Règlement sur les relations de travail dans la fonction publique pour qu’ils deviennent, respectivement, la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (la « Commission »), la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral, la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral (la « Loi ») et le Règlement sur les relations de travail dans le secteur public fédéral (le « Règlement »).

II. Résumé de la preuve

A. Documents et questions liées à la procédure d’audience

[7]  Après la présentation des exposés introductifs des parties, la fonctionnaire a témoigné la première. Elle a fourni un bref historique de sa carrière et m’a présenté six gros recueils de documents à reliure à anneaux plastique Cerlox, qu’elle avait l’intention d’utiliser. Les documents ne comportaient pas de séparations marquées par des onglets, mais ils étaient numérotés. Comme l’employeur n’était pas disposé à accepter que ces recueils soient versés sur consentement, j’ai indiqué qu’ils seraient présentés comme pièces au moment où les documents qu’ils contenaient feraient l’objet de la preuve dans le cadre habituel de la procédure.

[8]  Lorsque la fonctionnaire a entamé son témoignage, au lieu de raconter son histoire de manière succincte et selon un ordre chronologique, elle a commencé à parcourir le premier recueil à reliure Cerlox, afin d’identifier les documents. J’ai pu déduire de ce processus qu’au cours de l’année 2012-2013, il semble qu’un différend soit survenu au sujet de la description de travail de la fonctionnaire, dans la mesure où celle‑ci avait le sentiment que la description n’était pas gérée de manière appropriée. Il est ressorti que l’incident semblait tirer son origine d’un examen de l’organisation et d’un processus de changement qui avaient eu lieu à la DGRH à l’époque, sous le nom de « Processus opérationnel commun des ressources humaines » (le « processus d’examen de la DGRH »).

[9]  Une partie de la preuve et des documents que la fonctionnaire a présentés a révélé les discussions qu’elle avait eues avec une collègue, Ruth Cameron, qui occupait aussi un poste classifié PE-04 à la DGRH. Cette personne a aussi éprouvée des problèmes dans le cadre du processus d’examen de la DGRH. Mme Cameron a déposé des griefs découlant du processus, que la CRTEFP a instruits dans Cameron c. Administrateur général (Bureau du directeur des poursuites pénales), 2015 CRTEFP 98.

[10]  Il est devenu clair qu’en 2012-1013, la fonctionnaire était bouleversée par la façon dont les cadres de gestion géraient, selon elle, les préoccupations qu’elle avait soulevées au sujet de sa description de travail et du processus d’examen de la DGRH. Cela a abouti au dépôt de trois plaintes de harcèlement de la part de la fonctionnaire, deux contre Denis Desharnais, et une contre Susan Kelly.

[11]  À l’époque du dépôt des plaintes, M. Desharnais était directeur général de la DGRH, et Mme Kelly était une subalterne et la gestionnaire de la conception et de la classification organisationnelles et des relations de travail.

[12]  Les deux premières plaintes ont été déposées le 9 décembre 2013. Elles faisaient état d’incidents mettant en cause M. Desharnais et Mme Kelly qui étaient survenus entre septembre 2012 et avril 2013. La troisième plainte, qui concernait uniquement M. Desharnais et de présumés incidents qui étaient survenus entre novembre 2013 et le 12 février 2014, a été déposée le 20 février 2014.

[13]  Margaret Michaels, de Human Resources Consulting, a enquêté sur les plaintes de harcèlement et a produit deux rapports finaux, qui sont tous deux datés d’octobre 2014. L’un traitait des plaintes portées contre M. Desharnais (le « rapport sur les plaintes de harcèlement contre M. Desharnais »), et l’autre de celles portées contre Mme Kelly.

[14]  Il était indiqué dans le résumé du rapport sur les plaintes de harcèlement contre M. Desharnais que la deuxième plainte formulée contre lui décrivait la nature de l’acte de harcèlement dans les mêmes termes que celle déposée le 9 décembre 2013.

[15]  Aux fins des présents griefs et de la décision, il est inutile que j’entre dans les détails de chacune des allégations que la fonctionnaire a formulées contre M. Desharnais et Mme Kelly. Le résumé du rapport sur les plaintes de harcèlement contre M. Desharnais établit comme suit la nature générale des plaintes :

[Traduction]

[…]

La plaignante affirme que pendant toutes ses années de service auprès de l’organisation, elle n’a jamais eu de description de travail précise. Même si la description de travail qui lui avait été fournie lorsqu’elle s’était jointe à l’organisation en 2009 n’était pas précise, cela ne la préoccupait pas beaucoup, étant donné que l’organisation était nouvellement créée. La plaignante a d’abord soulevé la question officiellement auprès de sa gestionnaire, en février 2012. Elle considère que les mesures coordonnées ou leur absence de la part des deux défendeurs nommés, à l’égard de sa demande visant à obtenir une description de travail précise, ont constitué du harcèlement. En substance, la plaignante allègue que M. Desharnais a usé systématiquement contre elle de tactiques qui étaient « abusives, offensantes et dégradantes. Ses actes me ciblaient expressément. Ce faisant, il cherchait à entraver, à prévenir, à contrôler, à contrecarrer et à différer mes tentatives d’obtenir une description de travail valable et exacte en temps utile. Plus particulièrement, il a fait preuve d’abus de pouvoir en se servant de son poste pour porter atteinte irrégulièrement à mon droit d’obtenir une description de travail valable et précise ».

Le défendeur nie le bien‑fondé des allégations formulées contre lui. Il est d’avis que la plaignante a déposé sa plainte pour servir son intention de décrocher un poste classifié PE‑05. La plaignante et d’autres fonctionnaires occupant des postes classifiés PE-04 et PE-05 ont présenté plusieurs griefs et/ou plaintes contre des gestionnaires de la Direction générale des RH. Le défendeur considère que ces questions ont surgi à la suite d’un examen de la classification au sein de la Direction générale des RH qui a eu lieu au cours de la période visée dans la plainte en question.

[…]

[16]  Les incidents de harcèlement présumé sont survenus entre mars 2012 et février 2014. Les plaintes déposées contre M. Desharnais font état de 13 incidents de harcèlement, dont trois ont été rejetés, huit ont mené à des conclusions selon lesquelles il n’y avait pas eu harcèlement et deux ont mené à des conclusions selon lesquelles il y avait eu harcèlement. La plainte déposée contre Mme Kelly faisait état de 21 incidents de harcèlement, dont 6 ont été rejetés, 14 ont mené à des conclusions selon lesquelles il n’y avait pas eu harcèlement et 1 a mené à une conclusion selon laquelle il y avait eu harcèlement.

[17]  L’unique conclusion de harcèlement formulée contre Mme Kelly découlait du même incident que l’une des deux conclusions de harcèlement formulées contre M. Desharnais. En substance, il était conclu que M. Desharnais et Mme Kelly avaient tenu la fonctionnaire et son gestionnaire dans l’ignorance de l’état de l’examen de sa description de travail. Bref, ils avaient fait abstraction de la fonctionnaire. La responsable de l’enquête sur le harcèlement a conclu que M. Desharnais et Mme Kelly auraient dû savoir que le fait de ne pas fournir de renseignements aurait un effet préjudiciable sur la fonctionnaire.

[18]  Selon l’autre allégation de harcèlement fondée qui visait M. Desharnais, la fonctionnaire était convaincue que le travail qu’elle avait effectué par les années passées était mis de côté, que ses dossiers avaient été bloqués et que M. Desharnais avait cessé de converser amicalement avec elle. Essentiellement, on concluait que M. Desharnais avait à nouveau omis de communiquer avec elle en temps utile et qu’il aurait raisonnablement dû savoir que le fait de s’abstenir de communiquer avec elle empirerait la situation.

[19]  La fonctionnaire a confirmé en contre-interrogatoire qu’elle n’était pas satisfaite des conclusions de l’enquête sur le harcèlement, même celles qui confirmaient le harcèlement. Cependant, elle ne les a pas soumises à un contrôle judiciaire. Elle a déclaré qu’elle avait déposé un grief. Toutefois, à la question de savoir si elle l’avait renvoyé à la Commission pour arbitrage, elle a répondu que le grief n’était pas arbitrable. Elle a aussi affirmé qu’elle n’avait pas demandé que la décision concernant ce grief fasse l’objet d’un contrôle judiciaire. Je n’ai pas reçu de copie du grief, ni d’une réponse de l’employeur à un palier quelconque de la procédure de règlement des griefs.

[20]  À mesure que la fonctionnaire a poursuivi son témoignage et passé en revue les documents, le premier jour de l’audience, il est ressorti clairement qu’une bonne partie de ce qu’elle relatait concernait les mesures en cause dans le processus d’examen de la DGRH, ses plaintes de harcèlement contre M. Desharnais et Mme Kelly, ainsi que son insatisfaction à l’égard de la situation entourant ces questions au sein de son unité de travail, de façon générale. La fonctionnaire a alloué une bonne partie du premier jour d’audience à l’identification des documents contenus dans ses recueils, dont

  • beaucoup semblaient n’avoir absolument aucune incidence sur les griefs dont j’étais saisi;
  • beaucoup avaient été obtenus dans le cadre de demandes d’accès à l’information et de protection des renseignements personnels (AIPRP);
  • certains avaient été entièrement caviardés;
  • beaucoup ne la concernaient pas, hormis le fait qu’elle les avait reçus dans le cadre de la procédure d’AIPRP.

[21]  À la fin du premier jour, la procédure d’audience et les recueils de documents de la fonctionnaire ont fait l’objet d’une discussion. Avant le début du deuxième jour, la fonctionnaire avait retiré un certain nombre de documents de sa documentation. Ce jour‑là, son témoignage a consisté à nouveau en grande partie à identifier les documents, souvent en formulant peu de commentaires sur ceux‑ci, sauf pour les identifier.

[22]  Le deuxième jour, après la pause matinale, l’employeur a indiqué qu’il ne s’opposerait pas à la production de certains documents, puisqu’ils avaient été communiqués dans le cadre de la procédure d’AIPRP, mais qu’il pourrait s’opposer à divers aspects de la preuve s’y rattachant, étant donné que la fonctionnaire n’y avait pas été partie et qu’ils mettaient en cause d’autres personnes et leurs actes à l’égard de la situation de la fonctionnaire.

[23]  Lorsque la fonctionnaire a identifié certains documents, dont elle n’était ni l’auteure ni la destinataire, elle a formulé des commentaires sur ce que les auteurs et les destinataires avaient pensé, à son avis. Cela s’est poursuivi tout au long de son identification des documents et de son interrogatoire principal. Le processus d’identification des documents contenus dans sa documentation s’est poursuivi jusqu’à 15 h, lorsque nous avons ajourné l’audience pour la journée à sa demande, afin de lui accorder plus de temps pour examiner d’autres documents et les éliminer de sa documentation.

[24]  Le troisième jour de l’audience s’est déroulé comme les deux premiers, la fonctionnaire ayant en grande partie passé en revue et identifié ses documents. Parfois, elle a livré un témoignage détaillé sur ce qui était arrivé, bien qu’à nouveau, en grande partie, elle ait simplement identifié ses documents.

[25]  Le témoignage principal de la fonctionnaire a été interrompu afin de permettre à son autre témoin, qui est identifié dans la présente décision comme étant « Mme A », une collègue qui avait également travaillé à la DGRH, de livrer le sien. La fonctionnaire a cité Mme A afin d’établir que le traitement dont elle avait fait l’objet de la part de l’employeur à l’égard d’une question médicale différait du sien.

[26]  Le témoignage de Mme A été achevé avant la fin du troisième jour. La présentation du témoignage principal de la fonctionnaire a repris comme elle s’était arrêtée, dans la mesure où celle‑ci a identifié les documents contenus dans ses recueils. Après une vingtaine de minutes de plus, la fonctionnaire a conclu son témoignage principal, et l’audience a été ajournée pour la journée.

B. Dossier 566-02-11224

[27]  La fonctionnaire a entamé sa carrière à la fonction publique fédérale comme employée occasionnelle auprès d’Industrie Canada, en 2001, puis a été nommée pour une période indéterminée en 2006. En 2008, elle a été mutée à la planification des RH, à un poste classifié PE-03. En 2006, le SPPC a été créé à même une section du ministère de la Justice. Le 21 avril 2009, la fonctionnaire s’est vu offrir un poste classifié PE-04 pour une période indéterminée au sein du SPPC, ce qu’elle a accepté le 11 mai 2009.

[28]  Au moment de l’audience et depuis février 2013, Jason Fox était directeur des stratégies de capital humain de la DGRH au SPPC. En 2015, et cela depuis juin 2014, la fonctionnaire relevait directement de lui, lui‑même relevant de M. Desharnais. Son groupe était chargé de la planification des RH, ce qui englobait la prestation de conseils sur les programmes d’apprentissage et les plans de gestion du rendement des employés (y compris les cadres et les avocats).

[29]  En date de l’audience, Kathleen Roussel était directrice intérimaire du SPPC, et à l’époque pertinente aux griefs, elle était directrice adjointe du SPPC. En juillet 2015, la DGRH a été placée dans son secteur de responsabilité, et M. Desharnais a désormais relevé d’elle.

[30]  Au début de 2015, ainsi qu’à l’époque des griefs, Amy Campbell était conseillère en RH auprès du SPPC. Même si Mme Campbell n’a pas témoigné, beaucoup de documents produits en preuve étaient des courriels dont elle était partie ou qui faisaient allusion à elle.

[31]  M. Fox a défini le poste de la fonctionnaire comme un poste comportant la responsabilité de présenter des conseils stratégiques à l’organisation, de concevoir des programmes et des politiques, de mener des recherches sur les enjeux politiques et de fournir des conseils stratégiques aux gestionnaires afin de les aider à gérer les programmes. M. Fox a affirmé que le poste exigeait de posséder une solide connaissance du cadre des RH à la fonction publique fédérale, notamment des politiques, de la conception et des principes en matière de RH. Le 23 juin 2014, la fonctionnaire a signé sa description de travail, en confirmant qu’elle avait eu la possibilité de la lire et d’en commenter le contenu, dont les parties pertinentes sont rédigées comme suit :

[Traduction]

[…]

Résultats axés sur le service à la clientèle […]

Élaboration de politiques ou de programmes destinés aux ressources humaines (RH) et prestation de services à la clientèle centralisés pour le Ministère ou un organisme relevant d’un centre d’expertise (CE) à l’égard d’une discipline liée aux RH. Prestation de conseils et de directives aux cadres du ministère ou de l’organisme ainsi qu’aux intervenants en RH.

Activités principales […]

Planifier et organiser la prestation de services et de conseils d’exploitation des RH du ministère ou de l’organisme, puis élaborer des politiques ou des programmes ainsi que des outils et des instruments connexes; offrir des services à la clientèle; enquêter sur des tendances récurrentes et des dossiers complexes afin de trouver des mesures de recours.

Effectuer des recherches et des analyses sur les tendances, les pratiques et les orientations stratégiques; interpréter et analyser les cadres, les pratiques et les enjeux législatifs et politiques; surveiller et évaluer la mise en œuvre des politiques ou des programmes; proposer des améliorations à apporter aux politiques ou aux programmes; élaborer des stratégies opérationnelles; planifier la mise en œuvre ou la prestation des initiatives et des services en matière de RH en vue d’atteindre les objectifs de la clientèle et du ministère ou de l’organisme.

Fournir des conseils stratégiques aux cadres du ministère ou de l’organisme, et conseiller ceux‑ci en matière de sélection, de mise en œuvre et de gestion des stratégies de RH; consulter les collègues relevant d’autres disciplines au sein du ministère ou de l’organisme, les intervenants en RH des organismes centraux, d’autres ministères du gouvernement ou du secteur privé (p. ex., des experts‑conseils); participer à des comités interministériels.

Diriger des équipes de projets spéciaux, des composantes d’équipes de projets et des groupes de travail chargés de la planification et de la coordination de la mise en œuvre des initiatives du ministère ou de l’organisme, ou de celles dirigées par les organismes centraux.

Élaborer en détail des analyses, des séances d’information, des documents de discussion, du matériel de communication, des plans, des rapports et des analyses de rentabilité.

Élaborer des stratégies d’apprentissage ou en surveiller l’élaboration, puis concevoir, adapter, assurer ou coordonner la mise en œuvre des séances de formation et d’information du ministère ou de l’organisme.

[…]

[32]  La fonctionnaire a déclaré que le mardi 27 janvier 2015, elle avait envoyé un courriel à M. Fox, afin de l’aviser qu’elle ne pouvait pas se présenter au travail parce qu’elle était malade. Aucune copie du courriel n’a été produite en preuve. La fonctionnaire a affirmé que le 28 janvier 2015, elle avait vu son médecin de famille, le Dr Wai-Sun Chan, qui, à cette date, a rédigé la note suivante (la « note du Dr Chan datée du 28 janvier) :

[Traduction]

À qui de droit

J’écris afin d’exprimer mes préoccupations à l’égard de ma patiente, Catharine. Elle a vécu beaucoup de stress au travail. Elle a éprouvé des problèmes liés à son milieu de travail et a subi de l’intimidation et du harcèlement. Elle me fait savoir qu’elle en a avisé la direction, mais que, lamentablement, rien n’a été fait. Ce stress a profondément affecté sa santé mentale, et je crains une détérioration supplémentaire si ma patiente reste dans son milieu de travail actuel. Je suis d’avis qu’elle n’est pas apte au travail et devrait être mise en congé lié au stress sans délai.

Il ne fait pas de doute qu’un nouveau milieu de travail sera bénéfique pour Catharine, et je recommande aussi qu’elle soit retirée de sa direction générale sans délai et soit mutée à un poste dans une autre direction générale au sein de l’organisation.

[…]

[33]  Une note [traduction] « Interruption de service/cours » datée du 30 janvier 2015, qui semblait être signée par le Dr Chan, a aussi été produite en preuve. Elle était rédigée comme suit :

[Traduction]

[…]

Les présentes certifient que la patiente nommée ci‑dessus n’était pas en mesure de se présenter au travail (assister aux cours) en raison d’une maladie ou d’une blessure.

Du :  27 janvier 2015

Au :  30 janvier 2015

Commentaires : Stress lié au travail.

[34]  La question de savoir si la fonctionnaire a vu le Dr Chan le 30 janvier 2015, après l’avoir consulté le 28 janvier 2015 n’est pas claire.

[35]  La fonctionnaire et M. Fox ont tous deux déclaré, ce qui est ressorti des documents, qu’après que la fonctionnaire eut quitté le milieu de travail, le 26 janvier 2015, toutes les communications de celle‑ci avec M. Fox ont été effectuées par courrier électronique, à sa demande.

[36]  Rien dans la preuve n’indique que la fonctionnaire soit retournée dans le milieu de travail après le 26 janvier 2015, et avant d’avoir présenté son grief le 10 mars 2015, ce qu’elle a fait par courrier électronique ce jour‑là, à 7 h 05.

[37]  Ce qui suit est l’échange de courriels entre la fonctionnaire et M. Fox du 2 au 11 février 2015, inclusivement :

[Traduction]

[La fonctionnaire à M. Fox, le 2 février 2015, à 7 h 24 :]

Bonjour Jason

Merci de votre message vocal de la semaine dernière exprimant votre préoccupation à l’égard de mon absence. J’avais l’intention de rentrer aujourd’hui (lundi) afin de vous parler directement, mais honnêtement, je crains que cela ne déclenche un stress plus important et puisse nuire davantage à ma santé.

Comme vous le savez, j’ai été absente pendant la plus grande partie de la semaine dernière et je suis allée voir mon médecin. Il me traite pour un stress causé par mon milieu et mon climat de travail; il m’a avisé qu’à son avis, je ne suis pas apte au travail en ce moment, puis a recommandé que je prenne congé, afin de me soustraire aux facteurs et éléments déclencheurs de stress de notre milieu de travail et d’entamer un traitement médical pour remédier à l’effet que cela a eu sur ma santé. Mon médecin a souligné que ce stress affecte mon état physique et mon bien‑être, et c’est pour ces motifs que je me suis finalement décidée à demander des soins médicaux et à accorder la priorité à ma santé à la suite d’une très longue période où j’ai vécu une détresse que j’ai atténuée comme je l’ai pu, afin de pouvoir m’acquitter de mes fonctions et responsabilités professionnelles sans interruption. Je ne peux plus le faire, et il est assez évident que la philosophie de gestion de la direction générale ne s’améliore pas et ne change pas, et que, par conséquent, je prends en main ma propre santé et mon bien‑être avant qu’ils ne se détériorent davantage.

Mon prochain rendez‑vous chez mon médecin est fixé au 2 mars 2015.

Mon médecin recommande aussi une mutation au travail, à un poste à l’extérieur de notre direction générale, où se trouvent mes facteurs de stress. Je demande donc une mesure d’adaptation en ce sens, et j’apprécierais que cette demande puisse être satisfaite sans délai, afin que la mesure soit en place lorsque je serai prête à retourner au sein de l’organisation. Je suis disposée à demeurer une employée active du SPPC, mais ne peux pas le demeurer pleinement dans la direction générale actuelle, compte tenu de ses problèmes irrésolus et des comportements toxiques de certains membres du personnel. Auriez‑vous l’obligeance de me faire savoir qui sera chargé de cela, afin que je sois assurée que cette demande sera traitée?

Je n’ai jamais pris de congé lié au stress, mais je crois comprendre en lisant la politique du Secrétariat du Conseil du Trésor qu’un gestionnaire reste normalement en contact avec un employé touché pendant que celui‑ci est en congé; je demande, en raison des présents facteurs de stress qui affectent ma santé, de communiquer avec vous par courrier électronique plutôt que par téléphone, de préférence.

[Le paragraphe concernant l’état des dossiers professionnels de la fonctionnaire est supprimé.]

[…]

Je vous transmettrai sous peu une copie de la note de mon médecin et je verrai à ce que vous receviez une copie du document original qui prescrit les mesures indiquées ci‑dessus. Je n’ai pas de scanneur à la maison, mais je tenterai de m’occuper de cela aujourd’hui.

Merci,

[…]

[M. Fox à la fonctionnaire, le 2 février 2015, à 10 h 34 :]

Bonjour Cathi

Merci de me tenir au courant. J’espère que vous ne tarderez pas à aller mieux.

Je me chargerai d’effectuer le suivi du contenu de la note du médecin. Une fois que je l’aurai lue, je pourrai consulter les Relations de travail, et je communiquerai de nouveau avec vous au sujet des prochaines étapes.

Compte tenu de la situation, je ne crois pas qu’il soit approprié de communiquer par courrier électronique au moyen de votre adresse au travail, puisque vous êtes en congé. Conformément à votre demande, après le présent courriel, je communiquerai avec vous à l’adresse indiquée ci‑dessous, à moins que vous n’ayez une autre adresse personnelle que vous aimeriez que j’utilise […]

Meilleures salutations,

Jason

[…]

[La fonctionnaire à M. Fox, le 2 février 2015, à 14 h 55 :]

Bonjour Jason,

Oui, vous avez raison — je n’ai pas précisé mon adresse électronique à la maison, mais elle est préférable pour moi aussi.

Je me suis débrouillée pour scanner mes lettres et je vous les enverrai en me servant de mon adresse électronique à la maison.

Merci d’avoir répondu rapidement à mon courriel précédent.

Cathi

[…]

[La fonctionnaire à M. Fox, le 2 février 2015, à 15 h 2 :]

Bonjour Jason

Vous trouverez ci‑joints mes certificats médicaux dans lesquels sont demandées une période de congé et des mesures d’adaptation, ainsi qu’une autre note d’absence couvrant la période de mardi à vendredi la semaine dernière. Je vous enverrai les originaux cette semaine.

Veuillez me faire savoir dès que possible qui sera chargé de traiter ma demande de mesure d’adaptation.

Merci,

Cathi

[…]

[M. Fox à la fonctionnaire, le 5 février 2015, à 9 h 51 :]

Bonjour Cathi,

Je reviens sur les échanges que nous avons eus plus tôt cette semaine au sujet de votre demande de mesure d’adaptation. J’ai examiné la lettre, et afin de pouvoir étudier votre demande adéquatement, je devrai obtenir des renseignements supplémentaires de votre médecin. Je ferai un suivi sous peu en adressant une lettre à votre médecin, y compris des formulaires que celui‑ci devra remplir pour fournir les renseignements dont j’ai besoin.

Comme d’habitude, si vous souhaitez discuter de quoi que ce soit avec moi de façon plus détaillée, je suis à votre disposition. J’espère que vous allez mieux.

Jason

[…]

[La fonctionnaire à M. Fox, le 5 février 2015, à 11 h 53 :]

Bonjour Jason, veuillez me transmettre les notes/documents dont vous avez besoin et je les présenterai à mon médecin. Pouvez‑vous préciser quels sont les renseignements qui manquent?

Merci,

Cathi

[…]

[M. Fox à la fonctionnaire, le 11 février 2015, à 17 h 54; le « courriel du 11 février » :]

Cathi,

Conformément à mon message précédent, le présent message et les pièces jointes précisent les renseignements dont j’ai besoin pour effectuer le suivi de votre demande et prévoient les formulaires qui doivent être communiqués à votre médecin pour présenter les renseignements. Je me ferai un plaisir d’en discuter avec vous si vous avez des questions.

La note du médecin que vous avez fournie ne me donne pas les renseignements dont j’ai besoin concernant vos éventuelles limitations fonctionnelles afin d’envisager des mesures d’adaptation possibles. À ce titre, vous trouverez ci‑jointe une lettre adressée à votre médecin expliquant le processus et les renseignements dont j’ai besoin. Ces formulaires permettront au médecin de préciser quelles sont vos limitations physiques ou non par rapport à votre emploi actuel.

Je crois comprendre que vous retournerez voir votre médecin le 2 mars 2015. À ce moment‑là, ou lorsque vous vous sentirez prête à retourner au travail, je vous prie de communiquer la lettre ci‑jointe et de demander au médecin de remplir les formulaires joints concernant les capacités fonctionnelles. Cela me permettra d’examiner les mesures d’adaptation possibles pour satisfaire à vos limitations physiques éventuelles. Je joins aussi un formulaire de consentement que vous devez lire, signer et me retourner en même temps que les autres. Comme je l’ai mentionné, ces renseignements sont nécessaires pour élaborer un plan de retour au travail, s’il y a lieu, et cerner les mesures d’adaptation possibles.

J’espère que vous allez mieux et que votre état de santé s’améliore. Comme d’habitude, je suis à votre disposition pour discuter de ces questions avec vous.

Jason

[…]

[38]  La fonctionnaire et M. Fox ont déclaré qu’une lettre de ce dernier, adressée au Dr Chan et datée du 11 février 2015, un « Formulaire de détermination des capacités fonctionnelles » (FDCF) et un « Formulaire de consentement d’évaluation médicale » (le « formulaire de consentement ») étaient joints au courriel du 11 février.

[39]  Le FDCF faisait état de renseignements de base sur la fonctionnaire et les fonctions de son poste. En ce qui a trait aux capacités de travail, le FDCF prévoit une section où le médecin peut indiquer s’il y a des limitations ou des restrictions; si tel est le cas, un espace est prévu afin que le médecin s’étende sur ce sujet. Les capacités de travail font état des activités physiques ou non qui sont liées au poste. Les activités non physiques qui doivent être évaluées sont les exigences liées aux échéanciers, les exigences sociales et émotionnelles et les exigences cognitives et mentales qui s’appliquent à 25 domaines.

[40]  Le formulaire de consentement était rédigé comme suit :

[Traduction]

[…]

Je comprends et conviens que :

- le SPPC fournira à mon médecin praticien une description détaillée des motifs justifiant la demande d’évaluation médicale, ainsi que des précisions sur les capacités requises pour occuper mon poste, et que je recevrai une copie de cette recommandation écrite avant l’évaluation;

- un examen ou une évaluation ne consiste PAS à déterminer si je suis en parfait état de santé ou non, mais plutôt à établir que je peux répondre aux exigences essentielles de mon poste et à déterminer la mesure d’adaptation appropriée, s’il y a lieu;

- en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels, le SPPC ne peut communiquer à mon médecin praticien que les renseignements qui sont directement pertinents à ma situation et nécessaires pour effectuer l’évaluation médicale, ainsi qu’il est précisé dans la recommandation écrite.

J’autorise mon médecin praticien à fournir au SPPC :

- une interprétation de l’évaluation médicale qui présentera uniquement les renseignements se rattachant à ma capacité à exercer les fonctions de mon poste et à m’acquitter de ses responsabilités, notamment des précisions sur les limitations fonctionnelles et/ou restrictions attribuables aux problèmes de santé relevés durant l’évaluation. Les renseignements n’incluent PAS un diagnostic;

- tous les renseignements nécessaires pour préciser l’interprétation de l’évaluation médicale faite par mon médecin praticien, s’il y a lieu. Je comprends que je serai mise au courant de toutes les communications avec mon médecin praticien.

[…]

J’ai eu suffisamment de temps pour lire les renseignements indiqués ci‑dessus ou me les faire expliquer par Jason Fox. Je comprends la nature de l’évaluation médicale. Je déclare avoir accordé volontairement mon consentement. Je comprends que je peux le retirer en tout temps. Si je révoque mon consentement à me soumettre à l’évaluation médicale, j’autorise mon médecin praticien à en aviser le SPPC.

[…]

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

[41]  La lettre d’accompagnement adressée au Dr Chan renfermait une erreur concernant la date de début de l’absence au travail de la fonctionnaire (incorrectement identifiée comme étant celle du 28 janvier 2015). Par ailleurs, à un endroit son nom était mal orthographié.

[42]  Le 12 février 2015, à 13 h 53, après avoir reçu le courriel du 11 février, la fonctionnaire a envoyé un courriel à M. Fox (le « courriel du 12 février »). Elle y soulignait les préoccupations que la lettre et les formulaires soulevaient pour elle et indiquait ce qui suit :

[Traduction]

[…]

J’ai plusieurs réserves et préoccupations au sujet des formulaires que vous avez fournis et je ne les présenterai pas à mon médecin sous leur forme actuelle.

Tout d’abord, il y a des erreurs factuelles dans la lettre que vous avez adressée à mon médecin. Au paragraphe 2, la date indiquée doit être le 27 janvier 2015, et non le 28 janvier 2016. À la page 2, au paragraphe 2, je demanderais que mon nom soit corrigé.

Sur le Formulaire de détermination des capacités fonctionnelles, à la section A, vous avez coché l’option « La blessure/maladie est non reliée au travail ». Cela est inexact, et vous avez été avisé par écrit que ma blessure est effectivement reliée au travail, qu’il s’agit d’un accident du travail. Je ne présenterai pas ce formulaire à mon médecin à moins qu’il ne soit corrigé pour dépeindre la situation avec exactitude.

Je me demande aussi quels sont les renseignements que vous ne connaissez pas déjà et souhaitez obtenir au moyen de ce formulaire – à savoir que ma restriction médicale est la nécessité de me retirer d’un milieu de travail préjudiciable et toxique (Direction générale des ressources humaines), afin d’éliminer les facteurs de stress qui dégradent mon état de santé et d’éviter toute autre dégradation de mon bien‑être mental. Cela vous a été signifié très clairement dans la lettre de mon médecin que je vous ai déjà remise. Alors je ne comprends pas pourquoi vous penseriez que j’ai revu mes besoins d’adaptation physique – exigences liées aux échéanciers, exigences émotionnelles ou exigences cognitives –, alors que la seule restriction précisée succinctement par mon médecin est la nécessité de me retirer du milieu de la DGRH et de m’affecter à un poste ou à une fonction à l’extérieur de la Direction générale des RH.

En ce qui concerne le Formulaire de consentement d’évaluation médicale, j’ai été troublée par le libellé de ce document qui indique que « les motifs pour lesquels j’ai été priée de me soumettre à une évaluation médicale m’ont été pleinement expliqués » – ce qui est faux –, que j’ai reçu de vous personnellement une explication de la nécessité de subir cette « évaluation médicale » et que j’accorde volontairement mon consentement », à quelque chose dont j’entends parler pour la première fois dans cette pièce jointe – de quoi s’agit‑il au juste? Je suis allée voir mon médecin à de multiples reprises et me suis soumise à son évaluation médicale, m’étant par conséquent acquittée de l’obligation de m’y soumettre, et je vous ai fourni une lettre très claire de mon médecin, qui indique expressément que j’ai subi un accident du travail causé par un milieu de travail très toxique, et que l’un des facteurs de stress qui dégrade mon état de santé, ce sont les problèmes liés au harcèlement et au milieu de travail toxique, qui persistent en l’absence de réparation, de réforme ou d’évolution du climat. La réalité, Jason, est que j’ai fait l’expérience des allégations de harcèlement fondées, de la part de deux gestionnaires de la DGRH, et que ces conclusions ont été acceptées par l’administrateur général. Cependant, le traitement que j’endure ne s’est ni amélioré ni transformé, ce qui me cause une tension énorme, du stress et de l’anxiété.

Je ne comprends toujours pas pourquoi, malgré une évaluation du milieu de travail, de multiples griefs, des plaintes, des congés de maladie et/ou liés au stress, des départs, des entrevues de fin d’emploi qui minent la crédibilité et l’intégrité des gestionnaires de la DGRH, il y a une réticence à reconnaître que le milieu de la DGRH est toxique, émotionnellement et mentalement préjudiciable à la santé d’une personne, et qu’il continue à se dégrader, alors que la direction prétend que tout va bien.

Je dois vous demander pourquoi vous me soumettez à un stress supplémentaire, alors que vous êtes au courant du fait qu’en raison de ma situation j’ai été mise en congé lié au stress. Je n’arrive pas à comprendre pourquoi vous me manquez de respect, d’abord en priant un conseiller en relations du travail de communiquer avec moi directement, afin de demander des renseignements que vous auriez pu obtenir de moi vous‑même. Ensuite, pourquoi manquez‑vous de respect envers moi et à l’égard de l’avis de mon médecin en soutenant, au moyen du Formulaire de détermination des capacités fonctionnelles, que je ne suis pas atteinte d’une maladie liée au travail. Ensuite, le formulaire d’évaluation médicale que vous m’avez envoyé est peut‑être la mesure la plus particulièrement troublante jusqu’ici, puisque non seulement il est sans pertinence, mais il laisse penser qu’il s’agit d’une question dont nous avons discuté, alors que tel n’est pas le cas. Vous n’y faites même pas allusion dans votre courriel ci‑dessous, ni en tant que pièce jointe à la lettre que vous escomptez me voir remettre à mon médecin, alors je crois que cela témoigne d’un manque de transparence, d’éthique et d’une véritable préoccupation à l’égard de mon bien‑être et de ma situation.

Comme je l’ai affirmé d’emblée dans le courriel que je vous ai adressé le 2 février, je désire vivement reprendre des fonctions de travail avec la mesure d’adaptation que j’ai demandée et que mon médecin a ordonnée, afin de protéger ma santé contre le milieu malsain et toxique de la Direction générale des ressources humaines. Je vous prie de me dire de quels renseignements vous avez expressément besoin à ce stade‑ci pour répondre à ma demande de mesure d’adaptation et en concrétiser l’application dès que possible. Qui est le spécialiste en gestion de la déficience du ministère qui veillera à mon placement au sein d’une direction du SPPC à l’extérieur de la DGRH?

Comme je ne veux pas faire perdre du temps à mon médecin avec des formulaires inutiles et non pertinents, une fois que j’aurai reçu des documents qui préciseront quels sont les renseignements manquants, que vous n’avez pas déjà en main ou que vous ignorez et dont vous avez obligatoirement besoin pour satisfaire à ma demande de mesure d’adaptation, ce n’est qu’à ce moment‑là que je fixerai un rendez‑vous avec lui.

Merci.

Cathi

[43]  Le 19 février 2015, à 13 h 51 (le « courriel du 19 février »), M. Fox a répondu comme suit :

[Traduction]

Bonjour Cathi,

Depuis votre message, la semaine dernière, j’ai demandé des précisions sur plusieurs points que vous avez soulevés. Au cours des prochains jours j’enverrai des documents révisés tenant compte de cela. Vous trouverez aussi ci‑dessous les éclaircissements que vous avez demandés dans votre message le 12 février.

Bien que je respecte et comprenne votre demande de communiquer par écrit, j’ai le sentiment que cela peut occasionner des erreurs et des omissions ou ne pas assurer la même clarté qu’une conversation. Dans ce contexte, je vous prierais de demander au besoin des éclaircissements au sujet de mes motivations et de mes intentions de manière respectueuse, si elles ne sont éventuellement pas claires à première vue. Dans toutes mes communications avec vous, mon intention et ma motivation sont de collaborer avec vous de bonne foi, en vue de trouver des avenues possibles qui faciliteront votre retour au travail de manière saine et sécuritaire.

En premier lieu, je corrigerai les coquilles que vous avez relevées. Je modifierai aussi la coche à la section A afin d’indiquer « reliée au travail », puisque maintenant je comprends mieux le sens de cette case.

D’après vos messages précédents, j’ai cru comprendre (peut‑être à tort) que vous connaissiez les politiques et le processus en place, puisque vous aviez écrit ce qui suit : « Conformément à la politique du SCT, je sais que je suis tenue de remettre tous les autres formulaires à mon médecin, mais j’ai du retard parce que vous ne m’en avez fourni aucun. Votre attention immédiate serait appréciée afin de ne pas entraîner un retard indu. »

Dans ma réponse, j’ai tenté d’exposer brièvement le motif pour lequel j’avais besoin de ces formulaires, ainsi que les étapes à suivre, tout en respectant votre demande de communiquer par écrit. Afin de préciser mon message précédent, vous trouverez au lien suivant une explication détaillée du processus et des étapes à suivre pour obtenir des renseignements supplémentaires et connaître les responsabilités des gestionnaires et des employés à chacune des étapes : http://www.tbs-sct.gc.ca/hrh/dmi-igi/hcp-pss/hcp-pss-eng.asp

Mon message initial et les pièces jointes avaient pour objet de vous fournir les formulaires dont vous sembliez connaître l’existence et accepter la nécessité et l’applicabilité à votre demande d’« attention immédiate », tout en lançant la première étape du processus qui consiste à expliquer les étapes à suivre pour obtenir les renseignements sur les capacités fonctionnelles et les raisons pour lesquelles ces renseignements sont nécessaires.

À la lecture de la recommandation de votre médecin, je constate qu’elle fournit des renseignements insuffisants sur vos limitations éventuelles : il s’agit de renseignements dont j’ai besoin pour comprendre ce qu’il faut à l’appui de votre retour au travail. Votre médecin présente une recommandation selon laquelle un poste dans un secteur différent vous serait bénéfique, mais il s’agit d’une recommandation limitée à une seule possibilité, cela ne me dit pas quelles sont les limitations que vous pouvez avoir dans le cadre de l’affectation du travail. J’ai besoin de renseignements concernant les limitations, puisque j’examinerai toutes les solutions possibles pour assurer l’adaptation à votre situation : pas seulement la recommandation de votre médecin. À cette fin, la lettre et les formulaires de détermination des capacités fonctionnelles servent à fournir au médecin une description de votre milieu de travail ainsi que des capacités physiques et cognitives nécessaires quotidiennement pour exercer vos fonctions. Comme je ne suis pas en mesure de présumer ou d’évaluer les limitations que vous pouvez avoir, je demande à votre médecin praticien d’en donner un aperçu. Cela permettra de s’assurer que les possibilités envisagées n’exacerbent pas vos limitations éventuelles, ou qu’elles ne gênent pas ou ne retardent pas votre retour au travail. Vous constaterez dans le site Web du SCT qu’il s’agit d’un formulaire standard que le médecin connaîtra probablement. J’espère que l’explication fournie ci‑dessus éclaircit le processus et les motifs de la demande de renseignements.

Tout comme l’autre formulaire, le formulaire de consentement est aussi un formulaire standard que les employés utilisent pour exprimer leur consentement volontaire à échanger des renseignements médicaux. Même si je comprends maintenant que vous n’aviez pas le sentiment que le message initial expliquait les motifs adéquatement, j’espère que les renseignements que j’ai fournis ci-dessus et le lien au site Web du SCT éclaircissent ces motifs, tout en respectant votre demande que cela se fasse par écrit. Comme je l’ai mentionné, vos messages précédents laissaient entendre que vous connaissiez ces formulaires, alors je n’ai pas conclu que vous en ignoriez l’existence comme vous l’avez mentionné. En ce qui concerne votre allusion à une explication personnelle de ma part, cela est présenté comme solution de rechange à la disposition d’une période suffisante pour lire les renseignements indiqués dans le formulaire. Je serai heureux de vous en donner une si vous n’avez pas lu le formulaire.

Je tiens aussi à confirmer qu’en l’absence d’une confirmation par écrit de votre part à moi‑même ou à Amy, en ce qui a trait aux nouvelles allégations de « harcèlement » ou d’« intimidation », je procéderai en tenant pour acquis que les incidents auxquels il est fait renvoi sont les mêmes que ceux qui ont récemment fait l’objet d’une enquête. Bien que j’ignore les conclusions de l’enquête, j’ai été avisé qu’une mesure de suivi appropriée avait été prise ou l’était. Si vous avez l’intention de soulever des allégations fondamentalement nouvelles, veuillez communiquer avec moi ou avec Amy, afin que ces allégations puissent être prises en compte par les voies et les mécanismes appropriés.

En dernier lieu, comme je vous l’ai déjà mentionné, je serai la personne qui examinera votre demande de mesure d’adaptation et j’ai l’appui d’Amy Campbell à cette fin.

Il est à espérer que le présent message a fourni les précisions dont vous avez besoin au sujet de votre retour au travail et de votre demande de mesure d’adaptation. Je vous enverrai une lettre et des formulaires à jour. Si vous souhaitez en discuter ou demander des éclaircissements, n’hésitez pas à communiquer avec moi afin que nous puissions avoir un échange productif au sujet du processus ou de l’une ou l’autre de vos préoccupations.

Meilleures salutations,

Jason

[44]  La fonctionnaire a porté le courriel du 19 février à l’attention de M. Fox et a contre‑interrogé ce dernier à ce sujet, en laissant entendre qu’il avait tenté de la renvoyer à ce qu’elle a appelé [traduction] l’« ancien emploi ». M. Fox a déclaré que son intention avait été, s’il existait une restriction à l’égard du poste de la fonctionnaire à l’époque, que le travail ne fît pas partie d’un poste pour lequel elle bénéficiait d’une mesure d’adaptation.

[45]  Le 20 février 2015, à 13 h 27 (le « courriel du 20 février »), la fonctionnaire a répondu au courriel du 19 février. Elle disait en partie ce qui suit :

[Traduction]

[…]

En vous abstenant de commenter vos déclarations et de vous engager dans un dialogue improductif, veuillez me transmettre le Formulaire de détermination des capacités fonctionnelles révisé, et je le présenterai à mon médecin afin qu’il le remplisse.

Comme vous soulignez que la signature du formulaire de consentement de l’employé est volontaire, je ne souhaite pas accorder au ministère mon consentement à dialoguer ou à échanger des renseignements concernant mes capacités ou mes limitations fonctionnelles – je ne vois pas l’utilité de ce formulaire, puisque j’ai indiqué à maintes reprises que je consentais à apporter les formulaires obligatoires à mon médecin, afin de fournir les renseignements concernant mes restrictions et de vous les remettre dès que possible, puisque vous êtes chargé de coordonner ma demande de mesure d’adaptation .

Même si je prévois que vous ne prendrez pas de mesures d’adaptation sans avoir obtenu l’approbation finale de mon médecin, je peux vous dire à l’avance que je ne prévois pas qu’il y ait de restrictions, hormis une mesure prévoyant un lien d’autorité à l’extérieur de la Direction générale des ressources humaines, puisque mon médecin n’en fait clairement pas état et que je l’ai indiqué maintes fois. Je prévois que mon médecin confirmera que je peux recouvrer toutes les fonctions et compétences propres à mon emploi habituel, exception faite de la restriction indiquée ci‑dessus. Cela devrait vous permettre, si vous n’avez pas déjà commencé à le faire, de recenser d’autres directions générales du SPPC aux fins d’un placement approprié en vue de mon retour au travail. Puisque je n’ai pas d’objection à conserver certains de mes dossiers à l’extérieur de la direction générale (puisque certains ne sont pas nécessairement propres aux RH – Sondage auprès des fonctionnaires fédéraux (SAFF), Processus opérationnel commun des ressources humaines (POCRH), Engagement des employés, Planification ministérielle, etc.), il est peut‑être possible de me confier un ou plusieurs de ces dossiers au sein d’une autre direction générale du ministère.

Mon médecin est en vacances la semaine prochaine; donc comme vous avez mentionné que vous m’enverrez les formulaires au cours des prochains jours, malheureusement, je ne pourrai pas les lui apporter avant son retour le lundi 2 mars, ce qui coïncide avec mon prochain rendez‑vous médical. Comme je prévois qu’il me donnera le feu vert pour retourner au travail, en autant que la mesure d’adaptation demandée soit en place, je doute que vous puissiez réaliser cela pour le mardi 3 mars. Je vous demande donc de préciser quelle sera la nature de mon congé, puisque je ne serai plus en service en congé de maladie, mais qu’un congé plus approprié jusqu’à la mise en place de la mesure d’adaptation pourrait être un congé payé (autre). Veuillez confirmer.

En dernier lieu, je souhaite préciser quelque chose qui a peut‑être été mal perçu de votre part. Mes préoccupations ou problèmes concernant des affaires survenues au travail qui ont causé et exacerbé le stress psychologique que j’éprouve et l’anxiété qui m’empêche de retourner à la Direction générale des ressources humaines ne se résument pas aux deux plaintes de harcèlement fondées qui ont été déposées en octobre 2014, ils s’étendent au‑delà.

Le milieu et la culture organisationnelle de la DGRH connaissent une baisse régulière du niveau d’engagement qui remonte loin dans le temps, avant même votre arrivée au SPPC au printemps 2013. Cette baisse se reflète aussi dans les derniers résultats du SAFF du SCT concernant le groupe PE – ce que la haute direction du SPPC et de la DGRH ont remarqué, je l’espère […] Cela démontre clairement une baisse du niveau de confiance des employés qui occupent des postes classifiés PE, plus particulièrement à l’égard de la façon dont la haute direction gère le harcèlement, et cela témoigne aussi de la crainte de représailles qui est ressortie de l’évaluation du milieu de travail. Je ne peux pas dire que je sois en désaccord avec ces conclusions.

[…]

Je crois honnêtement que la détresse psychologique dont j’ai commencé à souffrir (et que d’autres personnes éprouvent, notamment celles qui ont quitté l’organisation en exprimant des préoccupations similaires) est un point culminant et une réaction face au refus persistant de la direction du SPPC de reconnaître le harcèlement et l’inconduite de la part des gestionnaires de la DGRH, et d’y voir. D’après l’évaluation du milieu de travail, les résultats du SAFF de 2014, les motifs de départ et les conversations entre collègues, les véritables catalyseurs de l’insatisfaction qui règne à la DGRH sont évidents. Il est particulièrement troublant pour moi de constater qu’il n’y ait ni appropriation ni responsabilisation à l’égard de ces transgressions, et en raison du fait qu’il n’y a aucun changement au niveau des comportements ou de la culture, j’ai tout lieu de croire que ces préoccupations ou questions demeurent irrésolues.

Par conséquent, j’espère que cela suffit pour expliquer de façon générale la justification de ma demande de mesure d’adaptation, et je vous remercie à l’avance d’accélérer le traitement de la présente demande afin que je puisse réintégrer mes fonctions au SPPC dès qu’elle sera recevable.

Merci.

Cathi

[46]  M. Fox a répondu par courrier électronique le 23 février 2015, à 16 h 37 (le « courriel du 23 février »), comme suit :

[Traduction]

Merci d’avoir exprimé vos opinions et points de vue concernant les points ci‑dessous.

Comme je l’avais promis dans mon dernier message, vous trouverez ci‑joint une lettre à jour adressée à votre médecin, un formulaire de détermination des capacités fonctionnelles à jour et une lettre de consentement que vous devez apporter à votre médecin lors de votre rendez‑vous, le 2 mars. Veuillez m’aviser si vous avez des questions en suspens.

Étant donné ce que vous prévoyez au sujet de la réévaluation qu’effectuera votre médecin afin de vous autoriser à retourner au travail, j’examine actuellement diverses possibilités en fonction des renseignements dont je dispose jusqu’à maintenant. J’espère être en mesure d’achever cela rapidement lorsque j’aurai reçu tous les renseignements nécessaires de votre médecin, le 2 mars. Mon but est de vous aider à retourner au travail le 3 mars, en présumant que votre médecin y souscrira et qu’une mesure d’adaptation appropriée sera déterminée. En ce qui concerne votre question au sujet du congé, il serait prématuré de ma part de confirmer cela avant votre réévaluation le 2 mars.

Afin de faciliter cette procédure, je vous prierais aussi de me fournir une copie récente de votre curriculum vitæ et de me le signaler si vous avez des compétences, des capacités ou une expérience particulières qui aideraient à cerner des possibilités.

J’aimerais profiter de l’occasion pour vous rappeler que le programme d’aide aux employés (PAE) est à votre disposition. Le PAE comporte un éventail de services qui pourraient vous être utiles. Vous pouvez joindre la ligne directe confidentielle du PAE au [numéro omis], tous les jours, 24 heures sur 24.

Merci.

Jason

[47]  Les documents suivants ont été produits en preuve :

  • la lettre révisée, adressée au Dr Chan, qui est datée du 23 février 2015 et dans laquelle M. Fox a apporté les modifications que la fonctionnaire avait demandées dans le courriel du 12 février;
  • un FDCF révisé, dans lequel M. Fox a modifié le renvoi à la blessure/maladie « non reliée au travail » pour « reliée au travail »;
  • le formulaire de consentement, qui était inchangé.

[48]  Les parties pertinentes de la lettre du 23 février 2015 adressée au Dr Chan sont rédigées comme suit :

[Traduction]

[…]

Comme vous le savez, vous avez présenté une note à l’appui de la récente période de congé de maladie de Catharine Holmes, qui avait débuté le 27 janvier 2015. Dans cette note, vous indiquiez que Mme Holmes éprouvait beaucoup de stress et vous souligniez que vous étiez d’avis qu’un changement de milieu de travail lui serait bénéfique. Mme Holmes m’a avisé que son rendez‑vous de suivi auprès de vous aurait lieu le 2 mars 2015, qu’elle serait évaluée de nouveau à ce moment‑là et qu’elle prévoyait que vous l’estimeriez apte à retourner au travail avec une restriction, celle de ne pas travailler à la Direction générale des ressources humaines.

Je souhaite obtenir des renseignements supplémentaires au sujet de votre recommandation et des autres restrictions éventuellement applicables à Mme Holmes. Par conséquent, je vous écris en qualité de gestionnaire de Mme Holmes, pour vous demander de remplir le Formulaire de détermination des capacités fonctionnelles ci‑joint. Ce formulaire procurera des renseignements sur les capacités physiques ou non que Mme Holmes doit posséder pour exercer efficacement les fonctions de son poste, ainsi que sur les conditions de travail et les risques ou facteurs de stress propres à l’emploi. De plus, je vous prie d’indiquer sur le formulaire à quel moment vous recommandez la réévaluation de Mme Holmes, afin que nous puissions élaborer un plan à l’appui de sa réintégration dans son poste à la Direction générale des ressources humaines le plus vite possible. Dans le but de soutenir votre évaluation, soyez avisé qu’une mesure de suivi des allégations de harcèlement et d’intimidation présentées par Mme Holmes a été prise et demeure en cours.

Nous vous demandons de remplir les zones ombragées en gris afin de fournir autant de renseignements qu’il le faut pour préciser les limitations fonctionnelles de Mme Holmes et les restrictions applicables à son cas. Ces renseignements nous permettront, en collaboration avec Mme Holmes, de prendre une mesure d’adaptation raisonnable (p. ex., des fonctions et/ou un horaire de travail modifiés ou alternatifs, un retour progressif au travail, des ajustements de l’équipement), s’il y a lieu, et d’assurer un milieu de travail sain, sécuritaire et favorable.

Abstenez‑vous de fournir des renseignements sur le diagnostic ou le traitement (y compris les médicaments). Si vous avez besoin de renseignements supplémentaires pour remplir le formulaire (p. ex., un aiguillage vers un spécialiste, des tests diagnostiques, des analyses de laboratoire, etc.), remplissez le formulaire de votre mieux et indiquez quand ces renseignements seront disponibles.

Les renseignements fournis par vos soins dans le FDCF serviront uniquement à confirmer l’aptitude de Mme Holmes à retourner au travail et à prendre une mesure d’adaptation dans le milieu de travail, au besoin […]

[Les passages en évidence le sont dans l’original]

[…]

[49]  Le lundi 23 février 2015, à 20 h 2, la fonctionnaire a envoyé à M. Fox un courriel qui était rédigé comme suit :

Jason,

Pour la deuxième et la dernière fois, je ne signerai pas le formulaire de consentement (volontaire).

De plus, je ne présenterai pas la lettre à mon médecin sous sa forme actuelle. Selon la recommandation de mon médecin, je ne dois pas retourner à la DGRH – et je n’ai pas l’intention de retourner au poste que j’y occupe à ce stade‑ci –, alors je ne comprends pas du tout pourquoi vous indiquez dans la lettre que vous avez l’intention que j’y reste. ??

Comme vous le mentionnez, il est probable que vous déterminiez rapidement une possibilité d’adaptation – quelles sont les autres directions générales que vous recensez afin de trouver des possibilités de répondre à ma demande de mesure d’adaptation? Cela pourrait m’aider à vous suggérer des compatibilités possibles avec mes compétences, mon expérience et mes intérêts.

Cathi

[…]

[50]  Le 25 février 2015, à 9 h 54, M. Fox a envoyé à la fonctionnaire un courriel qui était rédigé comme suit :

Cathi,

Merci d’avoir éclairci votre point de vue.

En fonction des renseignements dont je dispose, je ne peux pas consentir à implanter la recommandation de votre médecin selon laquelle vous devez être placée dans une unité située à l’extérieur de la DGRH.

À la suite de votre réévaluation prévue le 2 mars, veuillez me faire savoir si vous êtes apte à retourner au travail à votre poste d’attache.

Merci.

Jason

[51]  La fonctionnaire et M. Fox ont échangé les courriels suivants le mardi 3 mars 2015 :

[Traduction]

[La fonctionnaire à M. Fox, à 9 h 50 :]

Je suis allée à un rendez‑vous chez mon médecin hier, et je lui ai présenté votre lettre indiquant que vous aviez l’intention de me renvoyer à mon poste d’attache malgré ses instructions écrites et ma demande permanente de mesure d’adaptation, soit de ne pas être renvoyée à la Direction générale des ressources humaines. Il a signé la lettre afin d’en accuser réception simplement, puis a rempli le formulaire de détermination des capacités fonctionnelles, qui précise encore que la restriction relative au travail pour assurer mon retour sécuritaire au travail est que je ne peux pas retourner dans le milieu de travail de la DGRH, en raison de la persistance du stress et de l’anxiété; le formulaire indique aussi clairement que selon l’ordonnance du médecin, je pourrai réintégrer des fonctions liées à l’emploi au SPPC lorsque la mesure d’adaptation qu’il a précisée (un poste à l’extérieur de la DGRH) aura été prise.

Comme vous avez eu amplement de temps depuis le 2 février, lorsque je vous ai avisé de ma blessure au travail, et qu’à cette même date j’ai demandé, par écrit, une mesure d’adaptation pour cause de santé, je m’attends à ce que, conformément à mes droits de travailleuse à obtenir une mesure d’adaptation, vous ayez l’obligeance de remplir cette demande de mesure d’adaptation dès que possible, afin que je puisse reprendre mes fonctions d’emploi. J’ai soumis plusieurs possibilités à votre examen et vous avez aussi indiqué que vous aviez réuni des choix possibles, bien que vous n’ayez pas répondu à mon dernier courriel dans lequel je demandais où vous aviez sollicité un intérêt, afin que je puisse aider à déterminer une mesure d’adaptation appropriée. Entre‑temps, mon médecin a fourni une attestation médicale m’autorisant à demeurer en congé de maladie jusqu’à mon prochain rendez‑vous avec lui dans quelques semaines, puisque je reçois encore des soins liés au stress.

Je souligne que, pour une raison inconnue, vous n’avez pas encore approuvé dans PeopleSoft mes demandes de congé pour les périodes du 27 au 30 janvier et du 2 au 27 février, malgré le fait que le 2 février je vous ai présenté des certificats médicaux pour les deux. Veuillez les approuver dès que vous le pourrez, afin que je puisse être tenue au courant de mes soldes de congé de maladie. Comme vous n’avez pas approuvé ces dernières demandes, je ne peux pas savoir quels sont mes soldes réels, et, par conséquent, il se peut que je doive demander une avance de crédits de congé de maladie pour couvrir la période que le médecin a recommandée pour restaurer ma santé et mon bien‑être.

Je vais scanner et envoyer la lettre signée et le formulaire de Détermination des capacités fonctionnelles dès que je le pourrai – je n’ai pas de scanneur à la maison.

Cathi

[…]

[M. Fox à la fonctionnaire, à 16 h 36 :]

Cathi,

Merci pour la mise à jour. J’examinerai les renseignements dont vous faites mention ci‑dessous quand je les aurai reçus.

J’ai aussi actualisé mon approbation dans PeopleSoft ce matin, donc vos divers soldes sont à jour.

Merci.

Jason

[52]  Le 5 mars 2015, à 13 h 40, la fonctionnaire a envoyé le courriel suivant à M. Fox :

Jason, merci d’avoir patienté afin d’obtenir ces formulaires scannés.

Veuillez trouver ci‑joint :

– la lettre signée que vous avez préparée à l’intention de mon médecin;

– le FDCF signé, que mon médecin a rempli et qui prescrit encore que selon la restriction applicable à mon cas, je ne peux pas retourner à un poste au sein de la DGRH;

– un nouveau certificat médical de congé de maladie.

Veuillez m’indiquer quand je pourrai rencontrer la coordonnatrice des dossiers de déficience du SPPC pour discuter des mesures d’adaptation au travail possibles pour moi, conformément aux ordonnances de mon médecin, afin que nous puissions mettre au point les détails de mon retour au travail.

[…]

[53]  Le FDCF rempli par le Dr Chan a été renvoyé à M. Fox le 2 mars 2015 (le « FDCF caviardé en date du 2 mars »). Il précisait que des restrictions s’appliquaient à la fonctionnaire à l’égard des capacités physiques non liées au travail :

À la rubrique des exigences sociales et émotionnelles :

  • les relations et la création de réseaux;
  • l’influence sur autrui;
  • la résolution de conflits (négociation et médiation);
  • le travail en équipe;
  • la recherche de rétroaction et de critiques constructives et la réaction à celles‑ci;
  • l’exposition aux situations émotionnelles ou conflictuelles;
  • la collaboration étroite avec le public, les clients ou d’autres personnes (p. ex., les collègues et les superviseurs).

À la rubrique des exigences cognitives et mentales :

  • le souci du détail;
  • le travail au titre d’instructions précises;
  • l’obtention de limites ou de normes précises;
  • le fonctionnement multitâche;
  • la résolution de problèmes;
  • la prise de décision;
  • l’adaptabilité;
  • le jugement sain;
  • la vivacité d’esprit continue et la concentration soutenue;
  • l’autocontrôle et l’autonomie;
  • la conservation de l’information;
  • le sens de l’organisation et la gestion du temps;
  • le sens de l’initiative;
  • le raisonnement analytique;
  • la communication écrite efficace.

[54]  Le Dr Chan a aussi écrit dans la section qui était prévue pour donner plus de précisions. La copie fournie à l’employeur indiquait ce qui suit :

[Traduction]

Est soumise à une anxiété et un stress psychologique indus au travail.

[…]

Ne peut pas retourner dans le milieu de travail actuel pour cause de harcèlement. Requiert une mesure d’adaptation à l’égard du milieu de travail.

[…]

Peut retourner lorsque l’organisation sera en mesure de prendre la mesure d’adaptation applicable au retour au travail.

[55]  La fonctionnaire a présenté à M. Fox le FDCF caviardé en date du 2 mars. Elle avait supprimé une partie des précisions indiquées par le Dr Chan sans en aviser M. Fox. La section complète du FDCF caviardé en date du 2 mars qu’avait rédigée le Dr Chan était rédigée comme suit :

[Traduction]

Est soumise à une anxiété et un stress psychologique indus au travail.

Victime de harcèlement ayant conduit à la maladie mentale.

Anxiété/dépression.

[…]

Ne peut pas retourner dans le milieu de travail actuel pour cause de harcèlement. Requiert une mesure d’adaptation à l’égard du milieu de travail.

[…]

Peut retourner lorsque l’organisation sera en mesure de prendre la mesure d’adaptation applicable au retour au travail.

[…]

[56]  Le certificat de congé de maladie que la fonctionnaire a fourni à M. Fox dans son courriel du 5 mars 2015 avait été rédigé le 2 mars 2015. Il indiquait simplement que la fonctionnaire ne pouvait pas se présenter au travail du 2 au 31 mars 2015, en raison d’une maladie ou d’un accident. Celle‑ci a déclaré que le 2 mars, un nouveau médicament lui avait été prescrit. Son ordonnance a été remplie ce jour‑là, et le médicament a agi après trois semaines.

[57]  La fonctionnaire a produit en preuve une chaîne de courriels échangés entre M. Fox et Mme Campbell le 2 mars 2015. Il est à noter que la fonctionnaire n’était pas au courant de cette chaîne à ce moment‑là. Elle indique ce qui suit :

[Traduction]

[Mme Campbell à M. Fox, à 15 h 21 :]

Bonjour Jason, je serai au SPPC demain matin, au 12e étage, en face du bureau de [nom omis] […] si tu as besoin de moi. Je ne pourrai pas rester toute la journée, mais je devrais être là vers 8 h 30 et rester jusqu’à midi.

Tu as mon numéro de cellulaire […]

[…]

[M. Fox à Mme Campbell, à 15 h 23 :]

Bonjour Amy,

Je ferai peut-être un saut. Je m’attends à recevoir des nouvelles de Cathi aujourd’hui ou demain, au sujet de son évaluation qui est prévue pour aujourd’hui. Je n’ai rien reçu jusqu’à maintenant.

Jason

[58]  Le 9 mars 2015, à 14 h 55, M. Fox a envoyé à la fonctionnaire un courriel (le « courriel du 9 mars ») qui était rédigé comme suit :

[Traduction]

Cathi,

Comme vous n’avez pas envoyé le formulaire de consentement signé, j’interprète le fait que vous avez apporté ces documents à votre médecin et que vous me les avez transmis directement comme une indication de votre consentement à ce que je les lise. J’apprécierais que vous puissiez confirmer si l’absence du formulaire de consentement est un oubli ou si elle est intentionnelle, au cas où je devrais effectuer un suivi du contenu de ces documents auprès de votre médecin.

Des discussions ont eu lieu récemment avec l’ensemble des directions générales du SPPC, mais aucun poste adéquat n’a été relevé à l’extérieur de la DGRH. Il est aussi extrêmement problématique de retirer de la structure hiérarchique existante des travaux dont la DGRH est responsable et imputable. À ce titre, je ne suis pas en mesure de satisfaire à votre demande et à la recommandation de votre médecin, soit de travailler à l’extérieur de la DGRH. Je demeure pleinement disposé à mettre en place un plan qui facilitera votre réintégration à votre poste d’attache au sein de la DGRH, notamment à offrir une formation en gestion des conflits, un encadrement des compétences professionnelles ou essentielles, ou toute autre formation qui favoriserait un retour au travail sain.

J’ai examiné votre demande concernant l’avance d’un congé de maladie. Je ne suis pas disposé à approuver votre demande en ce sens à ce stade‑ci. Vos soldes de congé actuels dans PeopleSoft sont les suivants :

• Congés de maladie – 90,375 heures

• Vacances – 46 heures

• Droit unique à un congé – 37,5 heures

Vous pouvez utiliser ces soldes dont vous disposez pour couvrir votre absence actuelle du travail. Je vous recommande de communiquer avec votre conseiller en rémunération si vous avez des questions au sujet de ces soldes et de la façon d’obtenir vos prestations d’invalidité, au cas où elles s’avèreraient nécessaires. Vous pouvez aussi communiquer avec la ligne directe confidentielle du programme d’aide aux employés (1-800-268-7708, tous les jours, 24 heures sur 24) afin de voir si l’un de ses services peut vous être utile.

J’espère que vous ne tarderez pas à aller mieux. Avisez‑moi si la situation évolue ou si nous pouvons accélérer votre retour au travail à la DGRH en élaborant un plan en collaboration avec votre médecin et vous pour assurer le soutien approprié.

Jason

[59]  En contre-interrogatoire, la fonctionnaire a reconnu que le 9 mars 2015, elle n’avait pas laissé entendre qu’elle était apte au travail. Lorsqu’il a été porté à son attention qu’à cette date, elle avait affirmé que sa demande n’était pas satisfaite et que par conséquent elle avait été congédiée implicitement, elle a affirmé que M. Fox avait contrecarré son retour au travail, parce qu’il n’avait pris aucune mesure d’adaptation pour elle.

[60]  Toujours en contre‑interrogatoire, la fonctionnaire a reconnu qu’elle n’avait pas été obligée de traiter avec M. Desharnais ou Mme Kelly au sujet de ses problèmes de mesures d’adaptation.

[61]  Dans son témoignage principal, la fonctionnaire a déclaré que M. Fox n’avait pas expliqué le formulaire de consentement ni le FDCF. En contre-interrogatoire, ces documents ont été portés à son attention, et la fonctionnaire a été questionnée au sujet de ce qui ne lui avait pas été expliqué. Elle a répondu ceci : [traduction] « Le formulaire ne m’a jamais été expliqué. M. Fox a dit qu’il fallait l’apporter à mon médecin. Je ne croyais pas avoir besoin d’être soumise à une deuxième évaluation. » Lorsque l’avocat de l’employeur lui a demandé si, à son avis, la note du Dr Chan qui était datée du 28 janvier aurait dû inciter l’employeur à envisager la prise d’une mesure d’adaptation pour elle, initialement la fonctionnaire n’a pas répondu. Cependant, une fois questionnée avec insistance, elle a convenu avec l’avocat de l’employeur que la note n’aurait pas dû inciter ce dernier.

[62]  L’avocat de l’employeur a attiré l’attention de la fonctionnaire sur le formulaire de consentement et le FDCF. Celle‑ci a reconnu qu’en date du 9 mars 2015, elle n’avait pas signé le formulaire de consentement. L’avocat lui a alors rappelé qu’elle avait refusé de le signer parce qu’elle ne voulait pas se soumettre à une autre évaluation, et non parce qu’elle ne le comprenait pas. La fonctionnaire a rétorqué qu’elle n’avait pas vu la nécessité d’une autre évaluation. Lorsque l’avocat lui a laissé entendre que, par conséquent, à son avis, l’employeur aurait dû agir sur le fondement de la première note du Dr Chan, exclusivement, la fonctionnaire a alors répondu : [traduction] « Non ».

[63]  Lorsque l’avocat de l’employeur a souligné la dichotomie entre ses réponses aux questions portant sur l’évaluation et le formulaire de consentement, la fonctionnaire a affirmé qu’elle n’était pas d’accord avec l’affirmation selon laquelle elle n’avait pas vu la nécessité de l’évaluation, parce qu’elle était retournée voir son médecin. Elle a alors réitéré qu’elle avait collaboré, et qu’elle apportait tous les formulaires requis à son médecin. Mais en même temps, elle n’était pas disposée à signer le formulaire de consentement.

[64]  L’avocat de l’employeur a attiré l’attention de la fonctionnaire sur le courriel du 23 février, dans lequel elle déclarait : [traduction] « Pour la deuxième et la dernière fois, je ne signerai pas le formulaire de consentement (volontaire) », sur la partie du courriel dans laquelle elle déclarait que son médecin avait recommandé qu’elle ne retourne pas à la DGRH, puis, en dernier lieu, sur sa déclaration selon laquelle elle n’avait pas l’intention de retourner au poste qu’elle occupait à la DGRH. L’avocat lui a laissé entendre que dans le courriel du 23 février, elle avait dit à M. Fox qu’il devait tenir compte uniquement de la première note du Dr Chan. La fonctionnaire l’a reconnu. Lorsque l’avocat lui a ensuite montré la note du Dr Chan qui était datée du 28 janvier et lui a laissé entendre qu’elle se fondait sur cette note, la fonctionnaire a refusé de le reconnaître.

[65]  L’avocat de l’employeur a attiré l’attention de la fonctionnaire sur les caviardages qu’elle avait apportés aux observations du Dr Chan dans le FDCF. Il lui a demandé si elle avait avisé le Dr Chan qu’elle avait supprimé une partie de ses observations. La fonctionnaire n’a pas répondu, malgré le fait que je le lui ai ordonné directement. Au lieu de cela, elle a évoqué son interprétation du sens du FDCF.

[66]  En contre-interrogatoire, la fonctionnaire a attiré l’attention de M. Fox sur le courriel du 9 mars, et lui a à nouveau laissé entendre qu’il avait tenté de la faire retourner à son poste. M. Fox a déclaré qu’il y avait eu une ouverture en ce sens, mais qu’il ne s’agissait pas d’une intention. Il a ajouté qu’il n’avait pas de précisions au sujet des capacités de la fonctionnaire et des restrictions la concernant. Cette dernière lui a alors laissé entendre qu’il avait refusé de prendre une mesure d’adaptation pour elle, ce à quoi M. Fox a rétorqué que sur le fondement des renseignements dont il disposait, il n’avait pas été en mesure d’évaluer une mesure d’adaptation adéquate.

[67]  Le mardi 10 mars 2015, à 7 h 4, la fonctionnaire a envoyé deux griefs à M. Fox par courrier électronique, en déclarant ce qui suit :

[Traduction]

Bonjour Jason,

Voici deux griefs qui vous sont présentés ce matin.

Veuillez en accuser réception et retourner deux copies scannées de votre signature à la page 2.

Merci.

Cathi

[68]  Je suis saisi de l’un de ces griefs, qui est le dossier 566-02-11224, et l’autre est rédigé comme suit :

[Traduction]

Énoncé de grief […]

Je conteste le fait que le SPPC a contrevenu à la Politique sur l’obligation de prendre des mesures d’adaptation pour les personnes handicapées dans la fonction publique fédérale du SCT, en omettant de prendre des mesures appropriées à mon égard, conformément à l’avis de mon médecin sur mes besoins médicaux, et en omettant de se conformer aux lignes directrices du SCT qui sont énoncées dans le guide intitulé Gestion du mieux-être – Guide de gestion de l’incapacité à l’intention des gestionnaires de la fonction publique fédérale.

Date à laquelle chaque acte, omission ou autre question donnant lieu au grief a eu lieu […]

Le 9 mars 2015

Redressement demandé […]

- Que le SPPC assure mon retour au travail sans délai en prenant une mesure d’adaptation conformément à mes contraintes médicales;

- Que le SPPC gère la mesure d’adaptation à mes restrictions fonctionnelles conformément au processus établi dans le Guide (mentionné ci‑dessus);

- Que mon congé à compter de la date à laquelle mon médecin a certifié que j’étais apte à retourner au travail avec une mesure d’adaptation (le 2 mars 2015) soit traité comme un CONGÉ PAYÉ – AUTRE

- Que je sois indemnisée intégralement.

[69]  Dans son témoignage, la fonctionnaire a déclaré qu’elle n’a pas renvoyé le deuxième grief à la Commission pour arbitrage. Il est daté du 10 mars 2015.

[70]  Le 16 mars 2015, M. Fox a écrit à la fonctionnaire en déclarant ce qui suit :

[Traduction]

Je reviens sur mon message précédent, dans lequel je donnais un aperçu de vos soldes de congé disponibles et je recommandais que vous en discutiez avec votre conseiller en rémunération.

Selon mes calculs, votre solde de congés de maladie actuel couvrira votre absence jusqu’au 18 mars, date à laquelle votre solde sera épuisé. Veuillez m’aviser si vous prévoyez utiliser d’autres soldes de congé disponibles après cette date pour couvrir la période indiquée dans votre dernière note, qui va jusqu’au 31 mars.

Si je ne reçois aucune indication de vous avant le 18 mars, je présumerai que votre congé sera couvert à titre de congé de maladie non payé après cette date, et je communiquerai avec le responsable de la rémunération afin d’éviter les trop‑payés possibles.

Si vous ne l’avez pas déjà fait, je vous recommande de communiquer avec votre conseiller en rémunération pour discuter de ces questions et de la façon d’obtenir vos prestations d’invalidité, au cas où vous en auriez besoin.

Merci.

Jason

[71]  La fonctionnaire a répondu le 17 mars 2015, à 18 h 37, en déclarant ce qui suit :

[Traduction]

[…]

Veuillez excuser le retard de la réponse – j’avais un rendez‑vous chez mon médecin qui avait été fixé à l’avance pour aujourd’hui, alors je voulais m’assurer qu’il n’y avait pas de problèmes imprévus avant de vous répondre.

Vous trouverez ci-joint un certificat médical que mon médecin a produit aujourd’hui et qui me déclare apte au travail sans délai (le 18 mars 2015). Comme je l’ai mentionné à Amy la semaine dernière, avec la relâche de mars j’ai des obligations envers mes enfants cette semaine, alors je ne peux pas reprendre mes fonctions avant la semaine prochaine – je soumettrai les congés appropriés (comme je n’ai pas utilisé mon congé personnel pour 2014‑2015, je soumettrai cela, ainsi que deux jours de congé annuel pour couvrir le reste de cette semaine). Comme vous avez confirmé mes soldes de congé récemment, je m’assurerai de vous soumettre le reste des congés de maladie exigibles pour couvrir la période du 2 au 17 mars (aujourd’hui).

Par conséquent, je suis disposée à me présenter au travail à partir du lundi 23 mars, mais l’exigence médicale demeure en vigueur – soit d’être placée à un poste à l’extérieur de la Direction générale des ressources humaines –, et le certificat de mon médecin le prescrit toujours. Veuillez confirmer quelle sera la mesure d’adaptation à mon égard à partir du 23 mars. Dois‑je me présenter au bureau du commissaire à 9 h?

Advenant que le Ministère ne puisse pas me placer à l’extérieur de la DGRH à partir de lundi prochain, veuillez confirmer quelle sera la nature de mon congé – je réaffirme qu’à mon avis, il devrait s’agir d’un congé payé (autre). Je ne soumettrai pas de demande de congé de maladie, puisque je suis apte à reprendre le travail, et je n’utiliserai pas de congé annuel, car je ne devrais pas être pénalisée parce que le Ministère a manqué à son obligation de répondre à mes besoins médicaux et que je suis disposée à travailler et en mesure de le faire.

Je n’ai pas reçu de réponse de vous la semaine dernière lorsque j’ai demandé s’il était possible de fixer une réunion avec la coordonnatrice des dossiers d’invalidité; quand puis‑je escompter une réunion avec le personnel de la dotation et la coordonnatrice des dossiers d’invalidité pour discuter de ma situation et collaborer à des solutions possibles conformes à la note de mon médecin? Dois‑je communiquer moi‑même avec la coordonnatrice des dossiers d’invalidité (Caroline Cleroux) pour fixer une réunion? Veuillez m’aviser.

Merci.

Cathi

[72]  Le 17 mars 2015, la fonctionnaire a transmis par courrier électronique une note médicale du Dr Chan datée du même jour (la « note du 17 mars du Dr Chan »), qui était rédigée comme suit :

[Traduction]

[…]

J’ai le sentiment que Catharine est apte à retourner au travail à compter du 18 mars 2015, en autant qu’elle ne retourne pas dans son milieu de travail ou service précédent pour les raisons déjà mentionnées. Il est à espérer qu’une mesure d’adaptation sera prise à son égard afin d’assurer son bien‑être mental.

[…]

[73]  Le 20 mars 2015, à 16 h 22, M. Fox a envoyé à la fonctionnaire un courriel qui était rédigé comme suit :

[Traduction]

[…]

En ce qui concerne votre demande de mesure d’adaptation consistant à travailler à l’extérieur de la DGRH, mon message du 9 mars 2015 indiquait que je ne suis pas en mesure d’y répondre à l’heure actuelle. Comme je vous le dis constamment, les renseignements reçus de votre médecin à ce jour sont insuffisants et n’ont pas permis à la direction de participer pleinement à un processus de définition des restrictions et des besoins d’adaptation possibles, s’il y a lieu. À ce jour, la direction a été empêchée de participer pleinement à ce processus. Vous avez refusé d’accorder votre consentement à autoriser la direction à communiquer avec votre médecin traitant, afin d’obtenir des éclaircissements sur ses préoccupations, et en outre, la copie de la page deux du FDCF que vous avez fournie à la direction semble avoir été altérée ou modifiée.

Malgré le fait que la direction dispose de renseignements insuffisants pour vous placer en toute confiance à un poste qui serait adéquat, compte tenu des restrictions possibles vous concernant, la direction a tenté de bonne foi, mais sans succès, de trouver des solutions de rechange possibles pour vous. Cependant, je demeure d’avis qu’en raison du manque de renseignements fournis (tant sur le fond que sur la portée), je ne comprends pas bien la nature des limitations fonctionnelles qui peuvent vous empêcher de vous acquitter de vos fonctions ou, subsidiairement, d’exécuter les tâches d’un autre poste.

Comme vos renseignements médicaux actuels indiquent que vous êtes malade, je suis disposé à approuver un congé de maladie non payé à compter du lundi 23 mars 2015. Par conséquent, j’aviserai le personnel de la rémunération afin de m’assurer que vous ne vous trouvez pas dans une situation de trop‑payé. Comme je l’ai mentionné dans des messages antérieurs, je vous recommande de communiquer avec votre conseiller en rémunération pour discuter du processus d’obtention de prestations d’invalidité, au cas où vous en auriez besoin.

Je demeure pleinement disposé à mettre en œuvre un plan qui facilitera votre réintégration à votre poste d’attache au sein de la DGRH, notamment à offrir une formation en gestion des conflits, un encadrement des compétences professionnelles ou essentielles, ou toute autre formation qui favoriserait un retour au travail sain. À titre subsidiaire, si vous autorisez la direction à participer pleinement au processus d’adaptation en faisant appel à un médecin praticien de manière appropriée, votre médecin ou un autre fournisseur de services médicaux tel que Santé Canada, je serais plus que disposé à participer. Si vous souhaitez utiliser le Système de gestion informelle des conflits pour en discuter, je suis également tout à fait disposé à participer à ce genre de processus pour discuter de la situation.

En ce qui concerne votre question portant sur une réunion avec le personnel de la dotation et la coordonnatrice des dossiers d’invalidité, au SPPC, le gestionnaire d’un employé est son point de service pour toute demande de mesure d’adaptation. À ce titre, comme je l’ai déjà indiqué, toutes vos communications à ce propos doivent se faire avec moi.

[…]

[74]  Le 23 mars 2015, à 17 h 44, M. Fox a envoyé à la fonctionnaire un courriel qui était rédigé comme suit :

[Traduction]

[…]

Pour ce qui est de votre congé de maladie, il me reste encore diverses questions en suspens au sujet du Formulaire de détermination des capacités fonctionnelles [FDCF] en date du 4 mars 2015, que je n’ai pas éclaircies en raison de l’absence de consentement signé. En raison des renseignements fournis par votre médecin sur ce formulaire, je ne peux pas accepter que ces restrictions n’existent plus s’il ne donne pas de précisions. Votre médecin a indiqué deux domaines de fonction principaux, les exigences sociales et émotionnelles et les exigences cognitives et mentales, ce qui représente 21 capacités requises pour exercer vos fonctions, qui semblent avoir été affectées par un problème de santé. Comme je suis votre gestionnaire, je suis en droit de connaître et de comprendre les limitations ou restrictions vous concernant, ainsi que leur durée, afin d’avoir la certitude que vous êtes apte à retourner au travail, que ce soit à votre propre poste ou dans un autre secteur. Cela m’aiderait aussi à comprendre quels aspects de votre milieu de travail actuel ont un effet sur votre problème de santé, ce qui m’aiderait ensuite à évaluer les mesures d’adaptation nécessaires en fonction d’un nouveau milieu de travail.

À ce titre, je communiquerai avec les opérations de la rémunération pour indiquer que vous êtes en congé de maladie non payé à compter du lundi 23 mars 2015. Je vous encourage encore une fois à communiquer avec votre conseiller en rémunération pour discuter du processus d’obtention de prestations d’invalidité ou autres, au cas où vous en auriez besoin.

[…]

[75]  Le 24 mars 2015, à 12 h 05, la fonctionnaire a envoyé un courriel à la section de la rémunération du SPPC. La ligne de mention objet indiquait ceci : [traduction] « le gestionnaire a menacé d’interrompre ma paye ». Le corps du texte était rédigé comme suit :

[Traduction]

[…]

Je me suis rendu compte récemment que mon gestionnaire avait menacé, illégitimement et de manière contraire à l’éthique, de suspendre ma paye à compter du 23 mars 2015.

Pouvez‑vous me dire si vous avez été avisés de suspendre ma paye?

Existe‑t‑il un protocole en vertu duquel la Rémunération m’aviserait sur‑le‑champ dans le cas où mon gestionnaire aurait suspendu ma paye?

[…]

[76]  Le 26 mars 2015, à 15 h 28, M. Fox a reçu un courriel auquel était jointe une lettre de James MacGillivray, du cabinet d’avocats Rasmussen Starr Ruddy. M. MacGillivray a indiqué que la fonctionnaire s’était adressée à sa société afin d’obtenir de l’aide dans le cadre de sa situation au travail et de sa maladie professionnelle.

[77]  Le 30 mars 2015, la fonctionnaire a écrit une lettre au Dr Chan (la « lettre du 30 mars »), qui indiquait, entre autres choses, ce qui suit :

[Traduction]

[…]

Veuillez trouver ci‑jointes des communications que j’ai reçues récemment de mon gestionnaire, y compris les renseignements qu’il demande pour faciliter mon retour au travail. J’ai été très perturbée à la lecture de la lettre que M. Fox voulait que je vous présente, car elle renferme diverses inexactitudes et omissions, qui, selon moi, ont été présentées dans le but de vous tromper et de vous influencer de manière à ce que vous cessiez d’appuyer la recommandation de me retirer de la Direction générale des ressources humaines (DGRH), ce qui préserverait mon bien‑être mental et m’épargnerait d’être victime de harcèlement.

Comme je vous l’ai déjà indiqué, je ne suis pas la seule employée de la DGRH qui ait présenté des allégations de harcèlement contre les gestionnaires de la DGRH; au moins deux autres employés de la DGRH ont présenté des certificats médicaux de la part de leur médecin, afin d’éviter un placement à la DGRH, et le SPPC a accepté ces certificats et a placé ces employés à des postes à l’extérieur de la DGRH en conséquence. Il est à noter que ces employés ne se sont pas vu prescrire de ne pas communiquer avec les employés de la DGRH, mais seulement de relever d’une structure hiérarchique à l’extérieur de la DGRH. En raison du fait que le SPPC a une structure organisationnelle relativement modeste, il peut être nécessaire de communiquer et d’interagir à l’occasion pour obtenir l’approbation d’un projet ou de préciser les exigences d’un programme.

Veuillez noter qu’en raison des communications régulièrement irrespectueuses de la part de M. Fox, ainsi que des tactiques de harcèlement dans le cadre de mes tentatives visant à obtenir une mesure d’adaptation en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne, et plus particulièrement du fait que M. Fox ne tient pas compte de votre certificat médical selon lequel je suis apte à retourner au travail, j’ai maintenant retenu les services d’un avocat, afin qu’il interagisse en mon nom. M. Fox continue à me harceler, même s’il a reconnu et confirmé à la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail (CSPAAT) que j’ai subi une blessure psychologique liée au stress, et il a menacé de suspendre ma paye à quatre reprises depuis le 20 mars et me force à être en « congé de maladie non payé », malgré que je sois apte à retourner au travail en autant que les restrictions soient en place. J’ai dit à M. Fox qu’à mon avis, cela était harcelant et cruel, d’autant plus qu’il est parfaitement au courant de ma situation personnelle, du fait que je suis célibataire et que j’ai la garde exclusive de deux jeunes enfants, une hypothèque et des obligations financières, comme la plupart des autres familles.

J’ai préparé pour vous des observations concernant la lettre que M. Fox a rédigée, puisqu’un bon nombre des affirmations sont erronées, incomplètes et/ou sorties de leur contexte, et que je ne veux pas que ses points de vue ou ses allégations vous incitent à tort à recommander que je puisse retourner dans un milieu où les employés continuent de quitter l’organisation, en faisant allusion à la méfiance des gestionnaires de la DGRH; où les gestionnaires de la DGRH continuent de mentir aux employés, sans exprimer de remords ni d’excuses; où aucune mesure de redressement significative n’a été prise par suite de l’évaluation du milieu de travail dont M. Fox fait mention dans sa lettre à la page un de deux; où des participants à des entrevues (plus d’une vingtaine d’employés de la DGRH ont participé volontairement à cet exercice) ont signalé le harcèlement, la méfiance des gestionnaires de la DGRH, la perte de crédibilité et les faibles compétences en matière de leadership au sein de cette direction générale. Les résultats du Sondage auprès des fonctionnaires fédéraux de 2014 (SAFF) qui ont récemment été affichés publiquement sur le site Web du Secrétariat du Conseil du Trésor (SCT) confirment aussi que le harcèlement est signalé par plus d’un employé sur trois.

Dans sa lettre, M. Fox vous prie de répondre à six questions sur le Formulaire de détermination des capacités fonctionnelles que vous avez rempli le 2 mars, et que j’ai scanné et lui ai renvoyé le 5 mars. Pouvez‑vous rédiger une courte lettre précisant vos réponses, que je présenterai à mon avocat afin qu’il la retourne à M. Fox, puisque mon avocat interagit désormais avec le SPPC pour mon compte, afin de faire respecter mon droit à des mesures d’adaptation?

[…]

[78]  En contre-interrogatoire, la fonctionnaire a déclaré qu’elle n’avait jamais remis de copie de la lettre du 30 mars à M. Fox. Elle a été questionnée sur l’observation qu’elle y avait formulée au sujet des communications irrespectueuses de M. Fox jusqu’au 30 mars 2015, puis a été priée de les souligner à l’audience. Elle n’a pas été en mesure de le faire. Cependant, elle a laissé entendre que le contenu était irrespectueux. Elle a ajouté qu’à son avis, le Dr Chan estimait aussi que les observations étaient irrespectueuses.

[79]  La fonctionnaire a ensuite été renvoyée à sa déclaration suivante : [traduction] « M. Fox continue à me harceler », puis il lui a été rappelé qu’elle n’avait jamais déposé de plainte de harcèlement contre M. Fox. Elle en a convenu. Il lui a été demandé si elle avait avisé le Dr Chan des plaintes de harcèlement qu’elle avait présentées contre M. Desharnais et Mme Kelly. Elle a répondu que le Dr Chan en était au courant. À la question de savoir si elle avait avisé le Dr Chan des résultats de ces plaintes, la fonctionnaire a répondu qu’il savait qu’elle avait engagé des procédures, puis a affirmé qu’elle croyait lui avoir dit qu’à son avis, les préoccupations n’avaient pas été dissipées adéquatement. À la question de savoir si elle était certaine que le Dr Chan ne confondrait pas les plaintes déposées contre M. Desharnais et Mme Kelly avec celles formulées contre M. Fox, la fonctionnaire a répondu qu’elle pensait qu’il les distinguerait.

[80]  Le 2 avril 2015, le Dr Chan a écrit une lettre à M. Fox (la « lettre du 2 avril »), dont la partie pertinente est rédigée comme suit :

[Traduction]

Merci de votre lettre concernant ma patiente, Catharine Holmes. Merci également d’avoir pris le temps d’exposer explicitement les mesures que vous avez prises au cours de ce différend avec Catharine. D’après les renseignements que vous et Catharine m’avez expliqués, ce différend perdure depuis un certain temps et remonte beaucoup plus loin que le moment à partir duquel je suis devenu son médecin de famille. Compte tenu de tous les renseignements qui m’ont été présentés par écrit, je dois préciser que mon rôle dans cette affaire est celui de médecin de famille de Catharine. Je ne suis ni un expert en matière de ressources humaines ou de questions juridiques, ni un agent de santé au travail de votre ministère. Mon rôle en qualité de médecin de famille de Catharine est de prendre sa défense, de veiller le mieux possible à sa santé et à son bien‑être, en menant des investigations médicales et en donnant des soins s’il y a lieu, ainsi qu’à m’assurer qu’elle n’agira pas de manière à causer un préjudice à d’autres personnes ou à la société.

En qualité de médecin de famille de Catharine, je prends vraiment au sérieux le fait qu’elle présente des plaintes d’ordre médical, jusqu’à preuve du contraire. Bien qu’il ne fasse aucun doute que des facteurs principalement externes affectent la santé physique et mentale de Catharine, ma capacité à influer sur ces facteurs est très limitée. Par conséquent, mon but est de me concentrer sur les domaines où je peux avoir une influence, dans ce cas‑ci, offrir des conseils et un soutien à Catharine et recommander un traitement afin d’assurer le recouvrement optimal de sa santé. Les allégations que Catharine a présentées sont graves, et votre lettre laisse entendre que votre ministère a résolument pris en compte cette situation. Malheureusement, malgré toutes vos mesures, le stress mental et l’anxiété de Catharine n’ont pas été atténués […]

[…] J’ai le sentiment selon les plaintes de Catharine que votre ministère a omis de s’assurer qu’elle se sente « en sécurité » […] Malgré […]

[…]

[81]  Le 9 avril 2015, M. Fox a signé un document [traduction] « Demande de congé et rapport d’absence » concernant la fonctionnaire. Ce document établit qu’en date du 30 mars 2015, à 9 h, M. Fox a autorisé celle‑ci à être en congé de maladie non payé. M. Desharnais a approuvé le document. La fonctionnaire n’a pas lancé la demande de congé et a ultérieurement contesté le fait d’avoir été mise en congé de maladie non payé.

[82]  Le 10 avril 2015, à 14 h 49, M. Fox a envoyé à M. MacGillivray un courriel concernant la lettre du 2 avril, qui était rédigé comme suit :

[Traduction]

[…]

Selon mes communications antérieures avec Mme Holmes et son médecin, ce qu’il me faut pour parvenir à trouver des mesures d’adaptation possibles, c’est une idée claire de la nature, de l’étendue et de la durée des limitations actuelles de Mme Holmes. Ma lettre au Dr Wai-Sun Chan présentait des renseignements supplémentaires et six questions précises qui avaient pour objet de fournir cet éclaircissement.

Malheureusement, le Dr Wai-Sun Chan n’a pas répondu à ces questions, ce qui m’empêche de saisir à fond les limitations de Mme Holmes, leur étendue et leur durée, ou les restrictions la concernant, afin d’être certain qu’elle peut retourner au travail, que ce soit à son propre poste ou dans un autre secteur.

De plus, la lettre du Dr Wai-Sun Chan semble indiquer que si les renseignements et l’avis qu’il fournit demeurent insuffisants, je dois renvoyer l’affaire à un agent de santé au travail interne. À ce titre, dans les prochains jours je fournirai les documents nécessaires pour procéder à une évaluation de l’aptitude au travail de Santé Canada, afin d’obtenir les éclaircissements nécessaires qui m’aideront à cerner et à évaluer des mesures d’adaptation possibles pour Mme Holmes.

J’ai demandé à Mme Holmes de préciser quand et comment je dois communiquer avec vous à cet égard. Elle a simplement indiqué que je dois répondre à vos questions. J’apprécierais que vous ou Mme Holmes puissiez donner plus de précisions là‑dessus.

[…]

[83]  Le 13 avril 2015, à 14 h 57, M. MacGillivray a répondu comme suit :

[Traduction]

[…]

Je me sens contraint de dire qu’après avoir lu plusieurs rapports médicaux au fil des ans, il me semble que celui du Dr Wei‑Sun [sic] Chan laisse très peu de place à l’imagination. Cela étant dit, j’apprécie le fait que vous souhaitiez recueillir autant de renseignements que possible pour parvenir à trouver une mesure d’adaptation à l’état grave de Mme Holmes.

Mme Holmes a pris rendez‑vous chez son médecin pour le 14 avril 2015; à ce moment‑là, elle priera celui‑ci de répondre aux six questions énoncées dans votre lettre. Lorsque j’aurai ces réponses en main, je vous les transmettrai.

Vous concluez votre courriel en indiquant que vous avez prié Mme Holmes de préciser quand et comment vous devez communiquer avec moi. Je souhaiterais que vous communiquiez directement avec Mme Holmes, en vue de trouver une mesure d’adaptation à sa situation médicale, même si, pour l’instant, il ne s’agissait que d’une mesure d’adaptation temporaire. À l’exception d’un retour à son lieu de travail habituel, Mme Holmes semble apte à tout autre emploi.

[…]

[84]  Le 14 avril 2015, à 16 h 22, M. Fox a répondu comme suit :

[Traduction]

[…]

J’examinerai tout nouveau renseignement fourni par le Dr Wai-Sun Chan, mais en raison du manque de renseignements constant et de la réponse un peu hostile de sa part dans son rapport du 2 avril 2015, je procéderai à une évaluation de Santé Canada. Veuillez noter que même si nous avons le sentiment que la facture qu’a préparée le Dr Wai‑Sun Chan le 2 avril dépasse nettement les taux habituels raisonnables qui s’appliquent à ce genre d’évaluation, afin de minimiser les répercussions supplémentaires sur Mme Holmes, nous acceptons de rembourser cette somme. Nous n’avons pas l’intention, cependant, de rembourser des frais supplémentaires applicables aux renseignements fournis.

Conformément à votre précision, je continuerai à communiquer directement avec Mme Holmes à l’égard de toutes ces questions.

[…]

[85]  Le 16 avril 2015, à 16 h 22, la conseillère en rémunération et avantages sociaux du SPPC, Micheline Luc‑Duc, a écrit une lettre de sept pages à la fonctionnaire au sujet du congé de maladie non payé et des prestations d’invalidité. Cette lettre fait état des conséquences découlant du congé de maladie et de celles des autres avantages tels que le régime de pension, le régime dentaire et le régime d’assurance‑maladie, ainsi que des exigences et du processus de qualification et de demande de prestations d’invalidité en vertu de la politique de l’employeur.

[86]  Le 17 avril 2015, à 16 h 50, M. Fox a envoyé à la fonctionnaire un courriel qui était rédigé comme suit :

[Traduction]

[…]

Comme vous l’avez demandé, j’écris afin de réitérer la nature de votre congé et de préciser certains renseignements indiqués dans votre message précédent.

En ce qui concerne la nature de votre congé, depuis mon courriel du 16 mars 2015 je vous ai priée à maintes reprises de communiquer avec votre conseiller en rémunération pour discuter de votre congé et des prestations d’invalidité pour le cas où vous en auriez besoin. J’ai aussi indiqué que si un autre congé n’était pas utilisé, vous seriez mise en congé de maladie non payé, ce qui est généralement automatique lorsqu’une personne demeure malade après avoir épuisé ses congés de maladie. Tout récemment, j’ai confirmé, le 27 mars, que si vous ne soumettiez pas de demande de congé supplémentaire pour le 30 mars, je vous considèrerais en congé de maladie non payé. À mon retour au bureau le 7 avril, j’ai réitéré qu’étant donné que je n’avais reçu aucune réponse d’une manière ou d’une autre, je demanderais à la rémunération de vous mettre en congé de maladie non payé à compter du 30 mars. Je l’ai fait le 9 avril. Après avoir reçu votre message, aujourd’hui, j’ai de nouveau confirmé auprès de la rémunération que vous étiez actuellement en congé de maladie non payé à compter du 30 mars 2015 et qu’une lettre vous avait été envoyée le 16 avril. Cette situation devrait se refléter sur votre prochaine paye.

Je dois aussi éclaircir la déclaration suivante qui figure dans votre message : « Nous convenons tous deux que ma maladie est attribuable au milieu de travail […] ». Vous vous souviendrez que le 12 février, j’ai initialement coché le choix « non reliée au travail » sur le Formulaire de détermination des capacités fonctionnelles, et que vous avez exprimé votre désaccord. Vous vous souviendrez aussi que dans mon message subséquent, le 19 février, j’avais modifié cette coche et indiqué ceci : « maintenant je comprends mieux le sens de cette case ». Afin de clarifier, j’ai modifié cette case après avoir lu l’énoncé qui suit dans un document du SCT traitant des ressources et des pratiques exemplaires : « Il n’appartient pas au gestionnaire de déterminer si une maladie, un accident ou un problème de santé est lié au travail. Si l’employé dit qu’il l’est, on doit le considérer comme tel à moins, ou jusqu’à ce, qu’une commission des accidents du travail en décide autrement. » Je n’ai pas modifié l’indication pour signifier que j’étais d’accord ou non, je reconnaissais que cette décision appartient à une autre personne. Sur le formulaire 7 de l’employeur concernant la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail, j’ai indiqué un renvoi à votre note médicale. Votre demande est encore en cours de traitement; une fois que la décision sera prise, elle nous sera signifiée à tous deux par écrit et nous aurons la possibilité d’en appeler.

[…]

[87]  Le 28 avril 2015, à 11 h 19, la fonctionnaire a envoyé à M. Fox, à Mme Roussel et à d’autres personnes, un courriel qui était rédigé comme suit :

[Traduction]

[…]

Malgré les renseignements que vous avez fournis, je suis fermement convaincue qu’aucun motif ne justifiait que la Rémunération suspende ma paye sans que j’aie accordé mon consentement, mon autorisation, ou que je sois au courant, et, dans le même ordre d’idée, que MM. Fox et Desharnais ont autorisé une mesure prise contre moi sans motif valable et apparemment en contravention de la Directive sur les congés du SCT. Je crois que cela constitue une activité frauduleuse, dont quelqu’un est responsable. J’aimerais savoir en quoi consiste le protocole des Services de la rémunération du ministère de la Justice (JUS) en matière d’examen des plaintes de demande inappropriée d’application de la Directive sur les congés du SCT.

Je discuterai de cette situation avec mon avocat, puisque je ne comprends toujours pas pour quelle raison on m’a mise en congé de maladie et on a interrompu ma paye en tout premier lieu; comme vous pouvez l’imaginer, cela été extrêmement préjudiciable et néfaste pour moi. Je me trouve encore devant le dilemme qui consiste à attendre la confirmation des Services de la rémunération de JUS quant à savoir ce que je dois faire des renseignements concernant la demande de prestations d’invalidité et le formulaire d’attestation du congé d’invalidité qu’ils m’ont fournis. Comme je l’ai dit à maintes reprises, ci‑dessous, j’ai confirmé par écrit à M. Fox, il y a plus d’un mois, à la suite de ma visite chez le médecin, que j’étais apte à retourner au travail le 18 mars. M. Fox a accepté mes notes médicales et je n’ai jamais demandé de congé de maladie après le 18 mars, ni signifié mon intention de le faire, puisque j’avais prévu de retourner au travail le lundi 23 mars. Par conséquent, je demeure abasourdie qu’une mesure visant à suspendre ma paye et à me mettre unilatéralement en congé de maladie non payé ait été autorisée.

[…]

[88]  En contre‑interrogatoire, la fonctionnaire a questionné M. Fox sur le processus d’administration des congés et lui a demandé comment il avait pu décider de la mettre en congé de maladie non payé, alors qu’il ne disposait pas de renseignements suffisants pour prendre une mesure d’adaptation à son égard. Celui‑ci a répondu qu’il n’avait pas contesté le fait qu’elle était malade, et qu’il avait reconnu l’existence d’une certaine forme de maladie. Il a affirmé qu’il s’était interrogé sur sa capacité à accomplir sa tâche ou une autre. Il a dit qu’il avait demandé des éclaircissements au sujet de son problème précis et sur la question de savoir s’il s’agissait d’un problème de santé, d’une incapacité ou d’un conflit interpersonnel.

[89]  Les documents de l’employeur énumérés ci‑dessous ont été produits en preuve :

  • « Gestion de l’incapacité : Ressource pour le mieux-être des employés »;
  • « La gestion des cas d’incapacité - L’Outil »;
  • « Gestion du mieux-être - Guide de gestion de l’incapacité à l’intention des gestionnaires de la fonction publique fédérale »;
  • « Obtenir des renseignements auprès des professionnels de soins de santé en cas de maladie ou de blessure d’un employé ».

[90]  Le document intitulé « La gestion des cas d’incapacité – L’Outil » renferme un schéma qui illustre le processus de gestion des demandes connexes à une maladie ou à un accident qui nécessite l’absence du travail. La première étape consiste à signaler une maladie ou une blessure reliée au travail. À la deuxième étape, l’employé utilise ses crédits de congé de maladie payé. La troisième étape est le dépôt d’une demande d’indemnisation à la commission des accidents du travail compétente de la province. La quatrième étape consiste à décider ce qu’il faut faire à la suite de la décision de la commission.

[91]  À la quatrième étape, le processus diffère en fonction de la décision rendue par la commission compétente. Si celle‑ci accueille la demande, l’employeur traite ensuite la question dans le cadre du congé pour accident du travail. Si la demande est refusée, l’employé a la possibilité d’interjeter appel de la décision et peut demeurer en congé de maladie aussi longtemps qu’il le faut, y compris se voir accorder un congé de maladie non payé. L’employé peut demander des prestations d’assurance‑invalidité dans le cadre du régime de l’employeur, s’il est probable que la période d’absence requise pour son rétablissement dépassera 13 semaines.

[92]  À une date qui n’est pas précisée, mais qui précède le 11 février 2015, la fonctionnaire a déposé une demande auprès de la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail de l’Ontario (« CSPAAT »). Une copie non signée de cette demande en date du 10 février 2015 a été déposée en preuve. Il s’agit d’un formulaire imprimé de la CSPAAT, qui s’intitule « Avis de lésion ou de maladie (travailleur) » (« formulaire 6 »). Il comprend diverses sections où fournir des renseignements.

[93]  La fonctionnaire a désigné M. Fox comme étant la personne‑ressource de l’employeur et a donné son numéro de téléphone au bureau. Elle a indiqué que la date et l’heure de sa prise de connaissance de la maladie ou de la blessure étaient celles du 19 janvier 2015, à 16 h 30. Cependant, à côté du nombre « 19 », le nombre « 26 » est écrit à la main. La fonctionnaire a écrit en caractères d’imprimerie la date et l’heure de la maladie ou de la blessure qui avaient été signalées à l’employeur, soit le 20 janvier 2015, à 9 h. Encore une fois, cependant, le nombre « 27 » est indiqué à la main à côté du nombre « 20 ». La fonctionnaire a désigné M. Fox comme étant le représentant de l’employeur qu’elle avait avisé de la maladie ou de l’accident.

[94]  Le formulaire 6 comprend 39 cases à cocher pour indiquer la région du corps atteinte et une quarantième indiquant « Autre », où un espace est prévu pour préciser la blessure. La fonctionnaire a coché cette case et a écrit [traduction] « psychologique ». Elle a indiqué que la maladie ou l’accident était survenu au lieu de travail de l’employeur et dans la province de l’Ontario, et qu’elle n’avait jamais éprouvé de problème de cette nature auparavant. La fonctionnaire a écrit ce qui suit pour préciser la maladie ou l’accident : [traduction] « Blessure liée à un stress prolongé par suite d’inconduite et de harcèlement irrésolus au travail. Le 2 février, j’ai avisé par écrit le gestionnaire du fait que la blessure consistait en un stress psychologique attribuable à un milieu de travail (professionnel) toxique. VOIR NOTES ADDITIONNELLES. »

[95]  À la section du formulaire 6 où il est demandé quand la fonctionnaire avait commencé à éprouver les troubles liés à cette lésion ou maladie, celle‑ci a indiqué [traduction] « Printemps 2012 », puis a écrit : [traduction] « J’ai à maintes reprises signalé des problèmes [à la direction], mais ils ont continué à nier l’existence de quelque problème que ce soit malgré la preuve, les multiples recours et les départs. » La fonctionnaire a indiqué qu’elle avait vu un professionnel de la santé (qui n’est pas identifié) et s’était vu prescrire un médicament. À la question du formulaire où il est demandé si elle avait consulté son professionnel de la santé au sujet d’un retour au travail régulier ou d’un travail modifié, elle a répondu que oui, et qu’elle faisait l’objet de modifications à ce moment‑là. Elle a ajouté que le 2 février 2015 elle avait dit à M. Fox qu’elle suivait ce traitement médical.

[96]  Une section du formulaire 6 traite de l’interruption de travail et du retour au travail. À cette section, la fonctionnaire a indiqué que la date à laquelle elle avait interrompu son travail ou subi une perte de gains pour la première fois était celle du 20 janvier 2015. Une section est prévue afin que les demandeurs puissent saisir des renseignements supplémentaires; la fonctionnaire a rempli cette section comme suit :

[Traduction]

J’ai subi une blessure provoquée par un stress prolongé, de nature psychologique, qui est survenue graduellement par suite de problèmes d’inconduite et de harcèlement au travail de la part des gestionnaires de la direction générale. Je suis une fonctionnaire non syndiquée, et j’ai tenté de soumettre mes problèmes à la haute direction par les voies de recours disponibles, y compris l’administrateur général de mon organisation, sans parvenir à un règlement. À maintes reprises la haute direction a omis de prendre des mesures pour corriger les problèmes d’inconduite et de harcèlement, et je maintiens que ce défaut de remédier aux problèmes dans le milieu de travail a instauré une culture d’indifférence, qui a entraîné la détresse psychologique qui m’a rendue malade à tel point que j’ai demandé l’intervention de mon médecin, l’ordonnance d’une période de congé lié au stress et une demande de mesure d’adaptation immédiate, qui consiste à me placer dans une autre direction générale, afin de me soustraire à toute détresse supplémentaire découlant de ce milieu toxique. Le 2 février 2015, j’ai avisé par écrit mon gestionnaire immédiat du fait que ma blessure était un stress psychologique découlant d’un milieu de travail toxique et de problèmes irrésolus au bureau (c’est‑à‑dire : un accident du travail), liés au harcèlement et à l’intimidation, et je lui ai envoyé le même jour une copie scannée de la note originale du médecin confirmant cette information.

[…]

[97]  Le 10 février 2015, à 11 h 49, la fonctionnaire a envoyé un courriel à Elsie Lalonde, dont le poste ne m’a pas été précisé, mais qui, d’après l’échange de courriels, pourrait avoir été la gestionnaire de la santé et sécurité au travail. Dans ce courriel, la fonctionnaire indiquait qu’elle savait qu’elle devait fournir une copie du formulaire 6 à l’employeur, et demandait à Mme Lalonde si elle était la responsable. Dans sa réponse, Mme Lalonde indiquait qu’elle disposait du formulaire 6 et en avait transmis une copie à M. Fox. Ces courriels ne m’ont pas été fournis. Dans le dernier paragraphe de son courriel de réponse à la fonctionnaire, le 11 février 2015, à 12 h 47, Mme Lalonde indiquait ce qui suit :

[Traduction]

En terminant, je crois comprendre que vous êtes momentanément en congé à ce stade‑ci, et que vous espérez retourner au travail avant que votre congé de maladie ne soit épuisé. Vous devez savoir que si la période de congé se prolonge et que vous décidez ultérieurement de présenter une demande de prestations d’invalidité à long terme dans le cadre du Régime d’assurance pour les cadres de gestion de la fonction publique (RACGFP), la période d’attente est de 13 semaines. Par conséquent, je vous recommande d’en faire la demande dès maintenant, puisque vous pouvez toujours annuler votre demande si vous êtes en mesure de retourner au travail avant la fin de la période de 13 semaines.

[98]  Le 18 février 2015, M. Fox a rédigé la réponse de l’employeur au formulaire 6, qui s’effectue sur un formulaire de la CSPAAT (« formulaire 7 »). Il en a envoyé une copie à Mme Lalonde par courrier électronique le 20 février 2015, à 11 h 36. Ce formulaire indique ce qui suit :

  • M. Fox a été avisé de la maladie ou de l’accident de la fonctionnaire le 2 février 2015;
  • il indique que la maladie ou l’accident est survenu graduellement au fil du temps;
  • il indique que la maladie ou l’accident est un stress, selon la note médicale que M. Fox a reçue;
  • M. Fox y précise comme suit la maladie ou l’accident : [traduction] « L’employée décrit l’accident comme “une blessure provoquée par un stress prolongé, de nature psychologique, qui est survenue graduellement par suite de problèmes d’inconduite et de harcèlement” au travail de la part des gestionnaires de la direction générale »;
  • à titre de renseignements supplémentaires, M. Fox déclare ceci : [traduction] « À ma connaissance, les allégations d’inconduite et de harcèlement de l’employée ont été examinées et tranchées à l’aide de divers mécanismes de recours officiels et informels ».

[99]  Une lettre de la CSPAAT à la fonctionnaire, datée du 21 avril 2015, a été produite en preuve. Cette lettre est rédigée comme suit :

[Traduction]

Objet : Examen de l’admissibilité initiale pour un état de stress traumatique

La présente lettre confirme la récente décision prise dans votre cas à l’égard d’un stress traumatique.

Énoncé du cas

Une demande a été présentée auprès de la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail (CSPAAT) concernant une blessure liée à un stress traumatique (ST).

Lors de notre conversation, vous nous avez avisés que vous attribuiez votre blessure liée à un stress traumatique aux mesures de votre employeur dans le cadre d’une situation d’emploi.

Vous avez confirmé que vous n’aviez pas fait l’objet d’une agression physique.

Vous avez aussi confirmé qu’aucune menace de mort n’avait été proférée contre vous.

Critères

L’indemnisation de la perte de gains (PG) par suite d’une incapacité psychotraumatique attribuable aux effets d’un stress mental lié au travail peut être envisagée dans les cas suivants :

1. Une réaction psychologique aiguë à un événement traumatisant soudain et imprévu qui est survenu du fait et au cours de l’emploi;

ou

2. Une réaction psychologique définitive à une série d’événements soudains et traumatisants qui sont survenus du fait et au cours de l’emploi (l’effet cumulatif de ces événements).

À moins de circonstances exceptionnelles, la réaction au stress est considérée comme étant temporaire.

Un travailleur n’est pas admissible à l’indemnisation d’un stress traumatique causé par des décisions ou des mesures qu’a prises son employeur à l’égard de son emploi. Un travailleur qui éprouve progressivement un stress mental au fil du temps, en raison des conditions de travail générales, n’est pas admissible à l’indemnisation.

Pour qu’une demande d’indemnisation du stress mental soit accueillie, une preuve suffisante doit confirmer la série d’événements qui a entraîné la réaction au stress, et le diagnostic doit être lié à ces événements.

La politique ne confère pas le droit à l’indemnisation du stress occasionné par un événement traumatisant soudain et imprévu, par exemple :

- être témoin d’un accident mortel ou horrible;

- être témoin ou victime d’un vol à main armée;

- être témoin ou faire l’objet d’une prise d’otages;

- faire l’objet de violence physique;

- faire l’objet de menaces de violence physique;

- faire l’objet de harcèlement comportant de la violence physique ou des menaces de violence;

- faire l’objet de harcèlement comportant une situation qui met ou peut mettre le travailleur en danger de mort.

La politique ne confère pas le droit à l’indemnisation du stress qui apparaît par suite des décisions ou des mesures qu’a prises l’employeur, par exemple :

- un licenciement;

- une rétrogradation;

- une mutation;

- l’évolution des attentes relatives à la productivité;

- une mesure disciplinaire;

- la modification des heures et/ou des fonctions.

Décision

J’ai examiné votre cas en détail et j’ai constaté qu’il ne répondait pas aux critères du stress traumatique, puisqu’il n’est survenu ni événement ni série d’événements traumatisants soudains et imprévus qui aurait déclenché votre réaction psychologique. Par conséquent, l’admissibilité à l’indemnisation du stress traumatique n’est pas recevable.

J’ai pris cette décision en fonction des renseignements dont je disposais. Si vous ne comprenez pas la décision, ou si vous n’êtes pas d’accord avec les conclusions auxquelles je suis parvenu, n’hésitez pas à m’appeler. Je me ferai un plaisir de discuter de vos préoccupations.

Il est important de savoir que la Loi sur la sécurité professionnelle et l’assurance contre les accidents du travail (la Loi) impose des délais à l’égard du processus de contestation. Si vous souhaitez contester ma décision, selon la Loi vous devez m’aviser par écrit au plus tard le 21 octobre 2015.

[…]

[Les passages en évidence le sont dans l’original]

[100]  En contre-interrogatoire, la fonctionnaire a confirmé qu’elle avait présenté une demande à la CSPAAT, qu’elle avait rendu compte de son déficience, que la demande avait été rejetée (comme il est indiqué dans la lettre de la CSPAAT datée du 21 avril 2015), et qu’elle n’avait pas interjeté appel de cette décision.

[101]  La fonctionnaire est retournée au travail, quoique ce fût dans le cadre d’un détachement à Industrie Canada, à compter du 13 octobre 2015. Elle et M. Fox ont signé l’entente de détachement le 30 septembre 2015. Le lundi 30 mai 2016, la fonctionnaire a été mutée de façon permanente à un poste à Santé Canada (SC).

1. Mme A

[102]  Mme A était une collègue de travail de la fonctionnaire, qui a livré un témoignage sur une mesure d’adaptation que l’employeur lui avait accordée au début de 2014. Une copie d’une lettre qu’un médecin traitant (un oncologue) avait écrite le 23 janvier 2014, et qui faisait état des limitations fonctionnelles et des restrictions découlant du diagnostic précédent que Mme A avait reçu, ainsi que des traitements qu’exigeait sa maladie, a été produite en preuve. Dans cette correspondance, le médecin déclarait que Mme A devait faire l’objet de certaines restrictions en raison de son traitement anticancéreux en cours, qui devait s’étendre sur une période précise.

[103]  Mme A a témoigné au sujet de la mesure d’adaptation dont elle avait fait l’objet. Bien qu’elle ait affirmé que la mesure d’adaptation ne lui avait pas été accordée dans les plus brefs délais, après quelques discussions l’employeur la lui avait accordée. Mme A a aussi affirmé qu’elle avait dû se soumettre à deux évaluations ayant pour objet de remplir deux FDCF, ce qui avait été fait par son oncologue. Elle avait reçu le premier FDCF peu de temps après avoir apporté la lettre du 23 janvier 2014 à M. Fox. Ce formulaire a été rempli le 23 avril 2014. Mme A a reçu le deuxième formulaire en août 2014, et il a été rempli en novembre 2014.

[104]  Sans entrer dans les détails, Mme A a subi des traitements contre le cancer.

C. Dossier 566-02-11833

[105]  Il est allégué dans ce grief (en date du 4 novembre 2015) qu’au moment de rendre sa décision au dernier palier, après avoir entendu deux autres griefs, l’agent des griefs était intervenu de manière disciplinaire, et que ses gestes étaient assimilables à du harcèlement et étaient de nature punitive, ce qui donnait à penser que la décision était humiliante et constituait une prolongation du congédiement déguisé qui était allégué dans le dossier 566-02-11224.

[106]  Les deux griefs en question ont été produits en preuve le 24 juillet 2015. L’un porte le numéro de dossier de l’employeur 675-3-1143 (« grief 1143 »), et l’autre, le numéro de dossier 675-3-1144 (« grief 1144 »).

[107]  Le grief 1143 était énoncé comme suit :

[Traduction]

[…]

Je conteste le fait que le SPPC m’a mise en congé de nature frauduleuse, à savoir un « congé de maladie non payé », alors qu’aucun certificat, diagnostic ou avis médical n’a été présenté pour donner à penser ou conclure que cela est juste. Au contraire, le SPPC a été en possession de renseignements médicaux qui confirment que le 17 mars 2015, mon médecin m’a déclarée apte à travailler avec une mesure d’adaptation nécessaire pour des motifs médicaux, ce qu’a ultérieurement confirmé Santé Canada dans sa lettre au SPPC le 3 juillet 2015, par suite de la demande du SPPC selon laquelle je devais me soumettre à une Évaluation de l’aptitude au travail.

Ce congé de nature illégitime me porte préjudice, puisqu’il me pénalise sur le plan financier et qu’il a un effet défavorable sur ma situation d’emploi actuelle et future.

[…]

Redressement […]

[…]

- corriger sans délai la nature de mon congé, et ce, rétroactivement au 23 mars 2015, afin qu’il soit indiqué « Congé payé – Autre »;

- rembourser la semaine de congé que j’ai été forcée de prendre du 23 au 27 mars 2015, alors que le Ministère a laissé entendre en toute connaissance de cause que j’applique de manière inappropriée des crédits de congé, au lieu d’être mise arbitrairement en « Congé de maladie non payé » par mon gestionnaire alors qu’aucun motif ne le justifie;

- rétablir ma paye à compter du 30 mars 2015

[…]

[Les passages en évidence le sont dans l’original]

[108]  Le grief 1144 était énoncé comme suit :

[Traduction]

[…]

Je conteste le fait que le SPPC a continué à exercer une pratique préjudiciable et discriminatoire, afin de m’empêcher d’obtenir mon salaire malgré le fait qu’il était en possession de renseignements médicaux qui confirment que le 17 mars 2015, mon médecin m’a déclarée apte à travailler avec une mesure d’adaptation nécessaire pour des motifs médicaux, ce qu’a ultérieurement confirmé Santé Canada dans sa lettre au SPPC le 3 juillet 2015, par suite de la demande du SPPC selon laquelle je devais me soumettre à une Évaluation de l’aptitude au travail.

Ce traitement discriminatoire me porte préjudice, puisqu’il m’a injustement pénalisée sur le plan financier depuis le 30 mars 2015.

[…]

Redressement […]

[…]

- rétablir ma paye à compter du 30 mars 2015

[…]

[Les passages en évidence le sont dans l’original]

[109]  George Dolhai, qui, à l’époque, était directeur adjoint du SPPC et agent au troisième palier de la procédure de règlement des griefs, a présenté une réponse au dernier palier à l’égard des deux griefs, le 29 octobre 2015 (la « réponse du 29 octobre »). Cette réponse est énoncée comme suit :

[Traduction]

[…]

La présente est la réponse à vos griefs datés du 24 juillet 2015, dans lesquels vous alléguez ce qui suit :

675-3-1143 Le Service des poursuites pénales du Canada (SPPC) vous a frauduleusement mise en congé de maladie non payé. Vous affirmez qu’un congé de cette nature est contraire à l’attestation médicale et que la nature de ce congé vous porte préjudice, puisqu’il vous pénalise sur le plan financier et a un effet défavorable sur votre situation d’emploi actuelle et future. En guise de redressement, vous demandez que le SPPC remplace votre congé par un congé payé – autre à compter du 23 mars 2015; que votre congé allant du 23 au 27 mars 2015 soit remboursé, et que votre salaire soit rétabli à compter du 30 mars 2015.

675-3-1144 Le SPPC a continué à exercer une pratique préjudiciable et discriminatoire afin de vous empêcher d’obtenir votre salaire. Vous affirmez que ce traitement discriminatoire vous porte préjudice. En guise de redressement, vous demandez que votre salaire soit rétabli à compter du 30 mars 2015.

Comme vos griefs sont essentiellement identiques, je répondrai aux deux dans la présente décision.

La direction s’est efforcée de vous accorder une période raisonnable pour présenter votre argumentation au premier palier; cependant, vous en avez décidé autrement. Subséquemment, vous avez demandé que vos griefs soient transmis directement au troisième palier. Comme la direction n’a pas souscrit à cette demande, le 26 août 2015 vous avez été avisée que vos griefs seraient entendus au deuxième palier.

Le 9 septembre 2015, vous avez présenté des arguments écrits concernant les deux griefs. Une prorogation de délai a été accordée jusqu’au 27 octobre 2015, afin que l’employeur réponde, et, par conséquent, vous avez été priée de présenter vos arguments écrits pour le 20 octobre 2015. Vous nous avez avisés par voie de courriel, le 22 octobre 2015, que vous ne souhaitiez plus présenter des arguments supplémentaires. Je tiens aussi à réitérer que même si vous avez eu la possibilité de bénéficier d’une audience en personne à chaque palier, vous avez décidé de présenter des arguments écrits. Une réponse au deuxième palier à ces griefs a été rendue le 15 septembre 2015.

Avant de rendre une décision, j’ai examiné tous les faits pertinents et les arguments présentés antérieurement, comme il était demandé. Je crois comprendre que le fond de vos allégations a déjà été abordé dans le cadre des griefs précédents, dont l’un est actuellement déposé auprès de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique et n’a pas encore été tranché à l’arbitrage, et je ne me prononcerai pas davantage. La réponse à ces griefs au dernier palier a été rendue le 1er mai 2015.

Pour ce qui est des mesures de la direction depuis cette date, je suis convaincu que le SPPC continue à s’acquitter de ses responsabilités connexes à l’administration des congés et qu’il s’efforce de trouver une mesure d’adaptation à vos restrictions médicales.

Par conséquent, votre grief et les mesures correctives demandées sont rejetés.

[…]

[110]  En contre-interrogatoire, la fonctionnaire a déclaré qu’elle n’avait renvoyé aucun des griefs à la Commission; elle n’en a pas demandé le contrôle judiciaire non plus. Elle a déclaré que le grief 1143 ne pouvait pas être renvoyé à l’arbitrage parce qu’il n’était pas arbitrable.

[111]  La fonctionnaire n’a présenté aucune preuve concernant l’audition du grief au dernier palier qui a donné lieu à la réponse du 29 octobre. En contre-interrogatoire, elle a déclaré que le motif pour lequel elle avait déposé un grief contre la réponse au dernier palier, c’était que l’employeur avait refusé de modifier son poste.

III. Résumé de l’argumentation

A. Pour la fonctionnaire s’estimant lésée

[112]  La fonctionnaire a soutenu qu’elle avait de bons antécédents professionnels à son arrivée au SPPC et que les choses avaient changé au printemps 2013. La haute direction n’avait pas répondu à ses préoccupations au sujet d’un milieu de travail dysfonctionnel. Elle y est restée et est tombée malade.

[113]  La haute direction n’a pas répondu aux conclusions de l’enquête sur le harcèlement, ce qui a exacerbé l’état de la fonctionnaire. Celle‑ci a soutenu qu’elle avait eu le sentiment que cela avait amplifié son stress. Les répercussions de ces pressions ont atteint un point culminant en janvier 2015, le jour où la fonctionnaire s’est réveillée et n’a pas été en mesure de se rendre au travail. Elle a soutenu qu’à son avis, la maladie était attribuable au fait que la direction n’avait pas dissipé ses préoccupations. Elle a déclaré qu’elle avait eu le sentiment que sa plainte avait été mal interprétée et que le SPPC l’avait minimisée.

[114]  La fonctionnaire a soutenu qu’elle avait envoyé un courriel à M. Fox le 27 janvier 2015. Elle a ajouté qu’elle avait eu le sentiment que le Ministère savait que son problème de santé était grave, et ce, pour les raisons suivantes :

  • elle communiquait par l’intermédiaire d’un avocat;
  • elle avait déposé une demande auprès de la CSPAAT;
  • elle avait avisé la direction qu’elle avait subi un accident au travail.

[115]  La fonctionnaire a soutenu qu’à son avis, elle avait été franche avec M. Fox, et que celui‑ci avait eu un comportement antagoniste. Elle a affirmé qu’elle avait eu le sentiment que l’employeur s’était : [traduction] « acharné sur elle à un moment où elle était déprimée », et a dit de son gestionnaire : « il a menacé de me renvoyer à mon poste d’attache » et [traduction] « m’a provoquée intentionnellement afin que je réagisse ».

[116]  La fonctionnaire a soutenu qu’une fois qu’elle avait été jugée apte au travail, à la mi‑mars 2015, le SPPC avait tenté [traduction] « maintes fois » de [traduction] « retarder, de compromettre et d’entraver » sa demande de mesure d’adaptation, et que même si elle avait remis plusieurs notes de son médecin, elle avait été priée de retourner à son poste d’attache.

[117]  La fonctionnaire a déclaré qu’elle s’était pliée à chacune des demandes de la direction, même si son médecin et elle en avaient éprouvé de la frustration. Elle a affirmé avoir agi ainsi afin d’éviter les retards.

[118]  La fonctionnaire a déclaré que plus d’une fois, elle avait demandé une réunion en lien avec la mesure d’adaptation. Cela donne à penser qu’elle recherchait une solution gagnante et la collaboration, et qu’il y avait des dossiers ministériels qui pouvaient être transférés. Mais l’employeur a affirmé que cela serait difficile.

[119]  La fonctionnaire a soutenu que lorsque M. Fox l’avait avisée qu’elle devait retirer ses effets personnels du milieu de travail, elle s’était sentie humiliée. Elle a déclaré qu’elle avait estimé que le comportement de M. Fox constituait du harcèlement continu.

[120]  La fonctionnaire a soutenu que M. Fox ne comprenait pas ses besoins médicaux, même si Mme A s’était vu accorder une mesure d’adaptation et était issue du même milieu toxique. M. Fox a affirmé qu’il ne comprenait pas, et que la fonctionnaire avait dit qu’elle [traduction] « trouvait cela insultant ».

[121]  La fonctionnaire a soutenu que M. Fox avait dépassé les bornes lorsqu’il avait écrit à son médecin et laissé entendre qu’elle était en bonne santé. Il avait dit de ses griefs qu’ils étaient non fondés ou résolus. La fonctionnaire a affirmé qu’il avait fait cela pour la discréditer auprès de son médecin, et qu’elle avait eu le sentiment qu’il cherchait à convaincre son médecin qu’elle était une employée problématique. Il avait jeté le doute sur ce qu’elle avait dit à son médecin et avait laissé entendre que cela n’était pas vrai.

[122]  La fonctionnaire a déclaré que lorsqu’elle avait demandé une avance de congé de maladie, M. Fox l’avait refusée. Elle a affirmé que c’était intentionnel, tout comme le fait qu’il avait refusé de lui dire combien de crédits de congé il lui restait. Elle a soutenu que les gestes de M. Fox ne l’avaient pas convaincue que l’employeur répondrait à sa demande de mesure d’adaptation. M. Fox avait agi de manière froide et dure, et lorsqu’il avait menacé d’interrompre son salaire, cela avait été la goutte de trop. La fonctionnaire a déclaré que M. Fox s’était comporté de manière abusive et offensante.

[123]  La fonctionnaire a déclaré que l’employeur avait interrompu sa paye et qu’elle n’en avait pas été avisée. Elle a affirmé que M. Fox ne lui avait pas envoyé de copie des courriels, et qu’il savait donc qu’elle serait prise au dépourvu. Elle a déclaré que le Ministère lui avait caché cela.

[124]  La fonctionnaire a soutenu que le Ministère l’avait soumise à une évaluation effectuée à SC, malgré le fait qu’elle affirmait avoir le sentiment de ne pas en éprouver le besoin. Elle a déclaré qu’à son avis, lorsque le Ministère avait fait parvenir la trousse d’évaluation à SC, cela montrait que le Ministère la présentait sous un faux jour, comme une personne qui utilisait mal les congés, ce qui, selon elle, n’était pas vrai.

[125]  La fonctionnaire a soutenu que le Ministère avait refusé de tenir une réunion en lien avec la mesure d’adaptation. Il ne l’a jamais questionnée au sujet d’une mesure d’adaptation temporaire parce qu’il n’en voulait pas.

[126]  La fonctionnaire a soutenu que l’employeur lui avait refusé son congé payé même s’il savait qu’au moins une autre personne se l’était vu accorder.

[127]  La fonctionnaire a soutenu que les évaluations de SC avaient été effectuées en juillet 2015. Le Ministère a refusé de la réinstaller dans ses fonctions et n’a consenti à tenir une réunion en lien avec la mesure d’adaptation qu’en septembre 2015. La fonctionnaire a affirmé qu’elle avait trouvé un emploi en octobre 2015. Elle a affirmé que le Ministère l’avait laissée dans l’incertitude. Il n’avait jamais retiré son nom de la liste de congé non payé.

[128]  La fonctionnaire a déclaré qu’elle avait déposé son deuxième grief en novembre 2015. Elle a affirmé que le SPPC n’avait pas eu l’intention de la reprendre. Elle a déclaré qu’elle avait entamé son détachement le 13 octobre 2015, date à laquelle sa paye avait été rétablie.

[129]  La fonctionnaire a déclaré que le Ministère avait été malveillant et avait abusé d’elle.

[130]  La fonctionnaire a déclaré qu’elle est traitée pour des problèmes d’anxiété et de dépression, et que sa vie n’était jamais revenue à la normale après son départ du SPPC.

1. Compétence à l’égard du grief de congédiement déguisé (566-02-11224)

[131]  La fonctionnaire a soutenu qu’elle considérait que les mesures de l’employeur constituaient un congédiement déguisé. Elle a affirmé que M. Fox ne lui avait jamais donné raison de croire qu’il s’acquitterait de son obligation de prendre des mesures d’adaptation à son égard. Son comportement indiquait le contraire; il n’était disposé qu’à la renvoyer à son poste d’attache. Elle a affirmé qu’il était au courant de ses problèmes psychologiques et du fait qu’elle avait subi du harcèlement et avait reçu une recommandation médicale selon laquelle elle ne devait pas retourner à son poste d’attache. M. Fox avait fait régner la détresse et la méfiance. Il avait présenté le milieu de travail sous un faux jour, ce qui démontrait qu’il n’avait pas pris sa demande au sérieux. Il n’avait déployé aucun effort pour démontrer qu’il se souciait d’elle et avait refusé de la rencontrer pour discuter de la demande de mesure d’adaptation.

[132]  Selon Potter c. Commission des services d’aide juridique du NouveauBrunswick, 2015 CSC 10, un congédiement déguisé peut prendre deux formes. Suivant la première, un employeur peut violer unilatéralement le contrat de travail en démontrant qu’il ne sera pas lié par celui‑ci. Suivant la seconde, l’employeur peut démontrer par une série d’actes qu’il n’a plus l’intention d’être lié par le contrat; en conséquence, il y a violation. Au dire de la fonctionnaire, l’employeur l’a congédiée de façon déguisée de la deuxième façon.

[133]  La fonctionnaire m’a renvoyé à la définition du [traduction] « contrat de travail » présentée dans le Black’s Law Dictionary – Free Online Legal Dictionary, 2e éd., ainsi qu’à une deuxième définition, qu’elle a obtenue dans le site BusinessDictionary.com.

[134]  La fonctionnaire a déclaré que selon son offre d’emploi, elle devait être liée par le Code de valeurs et d’éthique du secteur public (le « code de valeurs et d’éthique »), et qu’un employeur et un employé ont des obligations l’un envers l’autre. Elle a soutenu que le SPPC avait dérogé au code de valeurs et d’éthique, et que ses droits n’avaient pas été pris en compte. Le code de valeurs et d’éthique prévoit le respect de la règle de droit. De l’avis de la fonctionnaire, le SPPC ne l’a pas respectée. La fonctionnaire m’a renvoyé à des extraits du site Web du CT qui affiche une foire aux questions sur le code de valeurs et d’éthique.

[135]  Le SPPC n’a pas tenu compte de la demande présentée à la CSPAAT et n’a pas investigué la demande de renseignements de la fonctionnaire sur le milieu de travail. Celle‑ci m’a renvoyé à un extrait du site Web de Ressources humaines et Développement des compétences Canada, qui s’intitule « Renseignements sur la santé et la sécurité au travail – Feuillet 8 Prévention de la violence dans le lieu de travail ».

[136]  La fonctionnaire m’a renvoyé à un extrait du site Web Canada.ca, qui s’intitule « L’assurance-emploi et la fraude ». Elle a soutenu que le Ministère n’avait pas respecté la loi en signifiant délibérément un faux congédiement, ce qui contrevenait à la loi.

[137]  La fonctionnaire m’a renvoyé à la Politique sur les conditions d’emploi, à la Directive sur les conditions d’emploi, à la Directive sur les congés et les modalités de travail spéciales et à la Politique sur la prévention et la résolution du harcèlement. Elle a soutenu que selon la Directive sur les congés et les modalités de travail spéciales, l’employeur doit gérer les congés de manière transparente. Elle prétend que le SPPC l’a mise en congé de maladie non payé en l’absence de preuve.

[138]  En ce qui concerne la Politique sur la prévention et la résolution du harcèlement, la fonctionnaire a soutenu que le SPPC ne s’était pas assuré qu’il n’y avait pas eu harcèlement.

[139]  La fonctionnaire m’a renvoyé à un extrait du site Web du SPPC, ainsi qu’à son mandat, à sa mission et à ses valeurs. Elle a déclaré que le SPPC ne s’en était pas tenu à ses valeurs, ni au respect, à l’intégrité et au leadership.

[140]  En ce qui concerne ses politiques en matière de gestion de l’incapacité, le SPPC ne les a pas respectées, son comportement y a été contraire, et il n’a pas fourni un milieu de travail sain et sécuritaire à la fonctionnaire.

[141]  Le SPPC n’a pas fait preuve de collaboration au sein du milieu de travail. L’employeur a l’obligation de prendre des mesures d’adaptation tant qu’elles ne constituent pas de la contrainte excessive. Rien n’indique que le SPPC ait subi une contrainte excessive. Il avait l’obligation de prendre des mesures d’adaptation à l’égard de la fonctionnaire. Celle‑ci a affirmé que son médecin l’avait évaluée et avait conclu qu’elle était atteinte d’une déficience. Elle a déclaré qu’elle avait été franche au sujet de ses problèmes, et qu’il était évident pour elle que M. Fox n’avait aucunement eu l’intention de prendre des mesures d’adaptation à son égard. Elle a affirmé qu’elle avait signifié clairement qu’elle avait besoin de temps pour s’ajuster, et qu’elle avait le sentiment que M. Fox n’avait pas eu l’intention d’admettre quelque mesure d’adaptation que ce fût.

[142]  La fonctionnaire m’a renvoyé à Colombie-Britannique (Public Service Employee Relations Commission) c. BCGSEU, [1999] 3 RCS 3. Elle a déclaré que l’employeur devait fournir un effort soutenu, et qu’à son avis le SPPC n’avait aucunement eu l’intention de prendre des mesures d’adaptation à son égard le 9 mars 2015.

[143]  La fonctionnaire m’a renvoyé à : Nicol c. Conseil du Trésor (Service Canada), 2014 CRTEFP 3; Rogers c. Agence du revenu du Canada, 2016 CRTEFP 101; Emond c. Conseil du Trésor (Commission nationale des libérations conditionnelles), 2016 CRTEFP 4; Martin c. Conseil du Trésor (ministère des Anciens Combattants), 2014 CRTFP 37; Canada (Procureur général) c. Gatien, 2016 CAF 3; Vorvis c. Insurance Corporation of British Columbia, [1989] 1 RCS 1085; Honda Canada Inc. c. Keays, 2008 CSC 39; Bhasin c. Hrynew, 2014 CSC 71; Antunes v. Limen Structures Ltd., 2015 ONSC 2163; Boucher v. Wal-Mart Canada Corp., 2014 ONCA 419.

[144]  En guise de redressement, la fonctionnaire a demandé ce qui suit :

  • la différence au titre de la perte de salaire;
  • le remboursement des cinq jours de vacances qu’elle a dû utiliser;
  • le remboursement de tous les honoraires qu’elle a versés aux avocats;
  • des dommages en vertu de la LCDP;
  • des dommages majorés ou pour mauvaise foi.

B. Pour l’employeur

1. Dossier 566-02-11224

[145]  L’argumentation de la fonctionnaire a porté exclusivement sur le présent grief.

[146]  Le présent grief a été renvoyé à l’arbitrage en vertu du sous‑alinéa 209(1)c)(i) de la Loi, qui confère la compétence à la Commission en matière de licenciement ou de rétrogradation pour cause de rendement insatisfaisant ou autre. La fonctionnaire a aussi allégué qu’il y avait eu violation de l’obligation de prendre des mesures d’adaptation, et que la situation dans laquelle elle s’était retrouvée équivalait à un congédiement déguisé.

[147]  L’employeur a soutenu en premier lieu que le congédiement déguisé ne s’applique pas au secteur public. À l’appui de son allégation, il m’a renvoyé à Hassard c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada), 2014 CRTFP 32, ainsi qu’à Cameron.

[148]  Potter énonce les principes qui sous‑tendent un congédiement déguisé. Tout d’abord, la fonctionnaire a le fardeau de prouver qu’il a eu lieu. Ensuite, le congédiement déguisé peut prendre l’une des deux formes suivantes :

  • l’employeur a modifié unilatéralement les conditions du contrat de travail de manière suffisamment sérieuse pour constituer un congédiement déguisé;
  • il a posé une séries de gestes qui, considérés dans leur ensemble, montrent qu’il n’avait plus l’intention d’être lié par le contrat de travail.

[149]  S’il est reconnu que le congédiement déguisé s’applique au secteur public (l’employeur a soutenu que la Commission ne devrait pas le reconnaître), la fonctionnaire a le fardeau de prouver, selon la prépondérance des probabilités, qu’une modification qui était suffisamment importante pour équivaloir à la fin de son contrat de travail a été apportée à ses conditions d’emploi.

[150]  Le critère n’est pas la perception de la situation par la fonctionnaire; celle‑ci devait démontrer que la conduite avait signifié la fin de son contrat de travail.

[151]  L’employeur m’a renvoyé à Nadeau c. Administrateur général (Service correctionnel du Canada), 2017 CRTEFP 31, qui traitait de l’application du congédiement déguisé et laissait ouverte la question de savoir s’il s’appliquait au secteur public, en fonction des faits de l’affaire. Cependant, la Commission a reconnu que le critère permettant d’établir le congédiement déguisé est énoncé dans Potter.

[152]  En se fondant sur Hassard et sur Cameron, l’employeur a principalement prétendu que le congédiement déguisé ne s’applique pas au secteur public fédéral. Cependant, pour le cas où la porte serait encore ouverte, comme dans Nadeau, la fonctionnaire n’a pas établi en se fondant sur une preuve qu’elle avait été licenciée.

[153]  Si la Commission conclut qu’elle n’a pas compétence, soit parce que le congédiement déguisé n’existe pas dans le secteur public fédéral, soit parce que la fonctionnaire n’a pas établi qu’elle avait été congédiée de manière déguisée, la Commission doit automatiquement rejeter la partie du grief qui concerne l’allégation selon laquelle l’employeur a omis de prendre des mesures d’adaptation à l’égard de la fonctionnaire.

[154]  Selon la jurisprudence, la compétence en matière d’obligation de prendre des mesures d’adaptation n’est pas un droit autonome. L’arbitre de grief doit être habilité avant d’avoir compétence sur l’obligation de prendre des mesures d’adaptation. L’employeur m’a renvoyé à Chamberlain c. Conseil du Trésor (ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences), 2013 CRTFP 115, ainsi qu’à Malhi c. Conseil du Trésor (ministère de l’Emploi et du Développement social), 2016 CRTEFP 2.

[155]  Dans son grief du 9 mars 2015, la fonctionnaire a allégué qu’elle avait été licenciée à cette date. Elle avait le fardeau de prouver ces faits.

[156]  La Commission n’a besoin que d’un seul document pour trancher la présente affaire, à savoir le dernier courriel de la chaîne échangée entre la fonctionnaire et M. Fox, que ce dernier a adressé à la fonctionnaire le 9 mars 2015, à 14 h 55. Les courriels de cette chaîne dévoilent l’attitude et le ton de la fonctionnaire, de même que sa disposition à collaborer au processus de mesure d’adaptation.

[157]  La présente affaire est simple. Elle commence avec la note du Dr Chan datée du 28 janvier, qui indique que la fonctionnaire a vécu un stress lié au travail. Le Dr Chan l’a mise en congé et a recommandé qu’elle soit mutée à l’extérieur de la direction générale où elle travaillait et au sein d’une autre, ce qui a lancé la demande de mesure d’adaptation.

[158]  M. Fox a respecté les politiques. La première chose qu’il a faite a été de déterminer s’il pouvait utiliser la note du Dr Chan datée du 28 janvier. La note ne disait rien au sujet du retour au travail de la fonctionnaire et faisait uniquement allusion à un problème de santé mentale. Le SPPC est réduit, et tous ses secteurs ont des contacts avec la DGRH. La note n’indiquait rien non plus au sujet des limitations fonctionnelles de la fonctionnaire ou des restrictions la concernant. La note n’indiquait pas la cause du stress de la fonctionnaire, ni si elle pouvait ou non travailler avec certaines personnes.

[159]  En soi, la note du Dr Chan datée du 28 janvier ne peut pas s’appliquer. Cependant, M. Fox a entrepris d’y donner suite. Il voulait que le Dr Chan remplisse un FDCF. Dans le cadre de ce processus, des renseignements devaient être fournis au Dr Chan. Lors du premier volet du processus, la fonctionnaire devait examiner et signer le formulaire de consentement. M. Fox a suivi le processus et l’a expliqué à la fonctionnaire. La jurisprudence en la matière est unanime; l’employeur est en droit de demander de plus amples renseignements. L’obligation de prendre des mesures d’adaptation ne contraint pas l’employeur à accepter aveuglément la recommandation d’un médecin.

[160]  M. Fox n’était pas obligé d’accepter la recommandation du Dr Chan; cela était insensé. Deux plaintes de harcèlement avaient été déposées, et pourtant, la recommandation ne faisait pas mention des contacts avec des personnes précises, du volume et des heures de travail, ou encore de la nature du travail. L’employeur était en droit de demander et d’obtenir des renseignements. C’est à ce moment que la fonctionnaire a commencé à éprouver du mécontentement, comme il ressort clairement de son témoignage et de son argumentation. Elle a principalement maintenu qu’elle avait présenté la note du Dr Chan datée du 28 janvier qui indiquait qu’elle devait travailler à l’extérieur de la DGRH. L’employeur devait s’y conformer. En substance, la fonctionnaire a maintenu ceci : [traduction] « Abstenez‑vous de me demander quelque renseignement que ce soit, et je ne signerai pas le formulaire de consentement ».

[161]  Le processus ne se déroule pas comme la fonctionnaire l’aurait souhaité.

[162]  Une grande partie de l’argumentation de la fonctionnaire portait sur M. Fox et son comportement présumé. À la demande de la fonctionnaire, toutes les communications s’effectuaient par écrit. Le courriel daté du 2 février 2015 indiquait qu’elle avait demandé de communiquer par courrier électronique plutôt que par téléphone. La fonctionnaire voulait que ce fût par écrit; M. Fox a accepté.

[163]  Ensuite, devant la Commission, la fonctionnaire a déclaré qu’il n’y avait eu aucun dialogue, mais c’est elle qui a créé cette situation en exigeant que toutes les communications s’effectuent par écrit. Elle ne voulait pas dialoguer. Ensuite, elle a laissé entendre que le comportement de M. Fox révélait qu’il n’avait pas voulu prendre de mesures d’adaptation à son égard, puis elle l’a accusé de s’être comporté de manière harcelante et menaçante, ce qui ne ressort aucunement des documents. Toute personne raisonnable qui examinerait les communications écrites de la fonctionnaire avec M. Fox en arriverait à la même conclusion. Ce dernier a été poli, professionnel et efficace. Il a saisi le problème et a abordé les préoccupations de la fonctionnaire.

[164]  En revanche, le ton des communications électroniques de la fonctionnaire est vindicatif et accusatoire. Elle a refusé de se plier aux demandes.

[165]  Dans le courriel du 20 février, la fonctionnaire a refusé de consentir à l’évaluation des capacités fonctionnelles. Le 23 février 2015, à 8 h 2, elle a déclaré ceci : [traduction] « Pour la deuxième et la dernière fois, je ne signerai pas le formulaire de consentement (volontaire). » Le 26 mars 2015, à 8 h 15, elle a envoyé à M. Fox un courriel dont le troisième paragraphe était rédigé en ces termes : [traduction] « Il est tout à fait inutile pour moi de signer un formulaire de consentement, et, en outre, j’ai convenu à maintes reprises depuis mon courriel du 5 février de transmettre les questions à mon médecin de votre part, puis de vous communiquer ses réponses. »

[166]  Dans le courriel du 9 mars, M. Fox a avisé la fonctionnaire que des discussions avaient eu lieu avec toutes les directions générales du SPPC, mais qu’on n’avait trouvé aucun poste approprié pour elle à l’extérieur de la DGRH. Cela a été confirmé dans les témoignages de vive voix de Mme Roussel et de M. Fox. Ce dernier a aussi indiqué les soldes de congé de la fonctionnaire dans le corps du courriel, et a déclaré qu’à ce moment‑là, il n’était pas disposé à lui avancer des congés de maladie. Il a ensuite conseillé à la fonctionnaire de s’adresser à son conseiller en rémunération au sujet de l’obtention de prestations d’invalidité, au cas où elle en aurait besoin. M. Fox a envoyé ce courriel le jour même de la rédaction du grief et quelques heures avant l’envoi du courriel de la fonctionnaire.

[167]  Bref, le 9 mars 2015, jour du grief, une personne raisonnable pouvait‑elle avoir le sentiment, en fonction de tous les renseignements disponibles à cette date et à cette heure, de faire l’objet d’un licenciement? Cela n’est pas possible. Il est évident qu’à cette date et à cette heure, l’employeur s’efforçait de trouver une mesure d’adaptation, et que la fonctionnaire a créé un obstacle en refusant de signer le formulaire de consentement concernant son médecin.

[168]  La politique relative au traitement des cas de gestion de l’incapacité prévoit les étapes du processus, en fonction de la situation factuelle. Le processus habituel donne lieu à la mise en congé de maladie, à l’épuisement de ce congé, puis à la demande de prestations d’invalidité. Les 9 et 23 mars 2015, M. Fox a dit à la fonctionnaire de s’adresser à son conseiller en rémunération.

[169]  La note du Dr Chan datée du 17 mars n’indiquait rien qui pût aider l’employeur, ni comment fournir une mesure d’adaptation à l’égard de la fonctionnaire.

[170]  La fonctionnaire a insisté sur le fait qu’elle était apte à retourner au travail. Elle l’a déclaré dans son témoignage et dans son argumentation. Cependant, elle n’a jamais été apte à retourner au travail à son poste. Elle aurait pu y être apte avec une mesure d’adaptation. Cependant, cela diffère de l’aptitude au travail, et les deux concepts ne devraient pas être confondus. La fonctionnaire avait un problème de santé, et elle n’était pas apte à retourner au travail.

[171]  La fonctionnaire a par ailleurs créé un autre obstacle à son retour au travail et à une mesure d’adaptation possible en présentant sa demande à la CSPAAT, qui, en dernier ressort, a été rejetée. L’employeur n’a jamais admis que la fonctionnaire avait subi un accident au travail.

[172]  Le 2 mars 2015, le Dr Chan a daté et signé un FDCF sur lequel il a coché 21 cases précisant des difficultés (sans donner de détails) ayant trait aux exigences sur les plans social ou émotionnel et cognitif ou mental, mais n’a fourni aucun autre renseignement. Après cela, le 2 avril, il a écrit à l’employeur une lettre très dure, dans laquelle il déclarait essentiellement qu’il se portait à la défense de la fonctionnaire, qu’elle se sentait intimidée et harcelée, que l’employeur devait prendre une mesure d’adaptation à son égard, et qu’il ne fallait pas le déranger.

[173]  La fonctionnaire a retardé le processus de mesure d’adaptation. Cependant, les retards qu’elle a occasionnés sont survenus après le dépôt du grief. Par conséquent, selon elle, l’employeur n’a manifestement pas voulu faire quoi que ce fût pour faciliter son retour au travail, et tout ce qu’il a fait était un leurre. Elle devait en convaincre la Commission. Cependant, même après le dépôt du grief de la fonctionnaire, l’employeur a encore essayé de faciliter son retour au travail. Cela montre que la fonctionnaire n’a pas été congédiée de manière déguisée. Elle a été la seule personne à contrecarrer le processus.

[174]  L’employeur a pris des mesures afin que SC effectue une évaluation de l’aptitude au travail (EAT). M. Fox a préparé les documents. Une EAT a eu lieu, et un rapport a été produit le 3 juillet 2015; les renseignements qui y étaient présentés différaient de la documentation que le Dr Chan avait fournie, notamment en ce qui concernait ce que la fonctionnaire pouvait faire ou non et ses interactions avec des personnes précises. Malgré ce qu’elle avait laissé entendre, elle ne pouvait pas être placée à l’extérieur de la DGRH tout en effectuant le même travail. Elle ne devait pas avoir de contacts avec les personnes qui faisaient partie de sa structure hiérarchique.

[175]  Lorsqu’il a reçu le rapport de l’EAT, l’employeur a eu une meilleure idée de ce qu’il pouvait faire pour aller de l’avant. Des efforts ont été déployés. Éventuellement, la fonctionnaire a trouvé un poste qui lui convenait et a quitté le SPPC. Cependant, il n’y a eu ni licenciement, ni mesure disciplinaire, ni rétrogradation.

[176]  La fonctionnaire a sa perception des faits. Malgré ce qui s’est réellement passé, ce qui est clair à la lecture des documents dans lesquels cela est écrit, elle a fait valoir le contraire en se fondant sur sa perception de ce qui avait eu lieu. Elle a fait des déclarations fausses. Elle a laissé entendre que le ton de M. Fox avait été irrespectueux. Cependant, lorsqu’elle a été priée de démontrer à quel moment il en avait été ainsi, elle n’a pas été en mesure de le démontrer. Elle a affirmé que M. Fox l’avait menacée, ce qu’il n’a pas fait. Cependant, il lui a dit ce qui pouvait arriver si certains événements se produisaient. La fonctionnaire a déclaré qu’elle s’était pliée à toutes les demandes, mais elle a refusé de signer le formulaire de consentement au FDCF, ce qui démontre qu’elle ne s’est pas pliée aux demandes à chaque fois. À l’audience, elle n’a pas cessé d’affirmer qu’elle n’était pas malade, mais elle s’est contredite, parce qu’elle a été malade, qu’elle a affirmé avoir été malade, et que les documents médicaux l’ont confirmé.

[177]  L’employeur m’a renvoyé à : Baun c. Opérations des enquêtes statistiques, 2014 CRTFP 26; Theaker c. Administrateur général (ministère de la Justice), 2013 CRTFP 163; Hood c. Agence canadienne d’inspection des aliments, 2013 CRTFP 49; Leclair c. Administrateur général (Service correctionnel du Canada), 2016 CRTEFP 97; Central Okanagan School District No. 23 c. Renaud, [1992] 2 RCS 970; Taticek c. Conseil du Trésor (Agence des services frontaliers du Canada), 2015 CRTEFP 12.

[178]  Bien que la fonctionnaire ait renvoyé son grief à l’arbitrage en vertu du sous‑alinéa 209(1)c)(i) de la Loi, elle a fait allusion au comportement de l’employeur en laissant entendre qu’il avait été malveillant. Il ressort clairement de la jurisprudence qu’une demande de renseignements ne constitue pas de la malveillance ni de la mauvaise foi; il s’agit d’une mesure administrative légitime, que l’employeur s’est précisément efforcé de prendre. Il n’est pas exigé de suivre aveuglément les instructions d’un médecin de famille.

[179]  Le 9 mars 2015, la fonctionnaire n’a pas été licenciée de son poste; elle a été mise en congé payé. Un processus était en cours relativement à l’obligation de prendre des mesures d’adaptation.

[180]  La fonctionnaire a fait beaucoup d’allégations. Cependant, il s’agit de ses perceptions. Elle a accusé de fraude et de malveillance toutes les personnes qui représentaient l’employeur, surtout M. Fox. Selon elle, l’employeur a agi de manière frauduleuse en mettant en place un processus qui devait s’appliquer à elle, compte tenu de sa situation. Elle a insisté sur le fait qu’elle était apte au travail, et que, par conséquent, les mesures de l’employeur avaient été frauduleuses.

[181]  L’employeur m’a renvoyé à une citation de l’enquêteur concernant la fonctionnaire qui est énoncée dans le résumé du rapport sur les plaintes de harcèlement contre M. Desharnais :

[Traduction]

[…]

La nature a horreur du vide, tout comme les employés qui cherchent à obtenir des renseignements. En fonction des renseignements limités qu’elle possédait, la plaignante a élaboré des propositions et les a incorporées à une argumentation cohérente. De la part d’une auteure aussi hautement qualifiée, la position de la plaignante semble avoir une certaine crédibilité à première vue. Cependant, elle est ancrée dans des conjectures qui ne se fondent pas sur des faits, mais plutôt sur une vision tronquée des actes du défendeur.

[…]

2. Dossier 566-02-11833

[182]  Le présent grief n’est pas un véritable grief devant la Commission, puisqu’il est formulé contre la réponse au troisième palier aux griefs 1143 et 1144, qui n’ont pas été renvoyés à l’arbitrage ni l’un ni l’autre. La fonctionnaire a laissé entendre que la réponse au troisième palier de M. Dolhai constituait une mesure disciplinaire, puisqu’elle a renvoyé le grief en vertu de l’alinéa 209(1)b) de la Loi.

[183]  Si la fonctionnaire souhaitait contester les questions soulevées dans les griefs 1143 et 1144, elle aurait dû les renvoyer à l’arbitrage. L’employeur a soutenu que pour avoir compétence, je dois conclure que la réponse de M. Dolhai constituait une mesure disciplinaire déguisée. Rien ne l’indique, et la fonctionnaire ne l’a pas soutenu.

[184]  Cette question ne peut pas être déterminée au moyen du paragraphe 241(1) de la Loi, puisqu’il ne s’agit pas d’un vice de la procédure; il n’y a eu aucune erreur technique. La fonctionnaire savait ce qu’elle faisait lorsqu’elle a déposé ce grief. Selon sa formulation, ce grief indique que M. Dolhai a instruit les griefs 1143 et 1144 dans un mauvais état d’esprit.

C. La réponse de la fonctionnaire s’estimant lésée

[185]  La fonctionnaire a soutenu qu’elle avait présenté un grief concernant les plaintes de harcèlement.

[186]  La fonctionnaire a soutenu que les témoins de l’employeur n’étaient ni fiables ni crédibles.

IV. Motifs

A. Demande de sceller les documents

[187]  La fonctionnaire a présenté des copies des rapports sur le harcèlement qui ont été produits à l’égard des plaintes de harcèlement qu’elle avait déposées contre M. Desharnais (pièce G-41) et Mme Kelly (pièce G-42). Des copies des renseignements médicaux (pièces E-2, G-35 et G-36) concernant Mme A, qui a témoigné, ont aussi été présentées. Les deux parties ont demandé que ces documents soient scellés.

[188]  Dans Basic c. Association canadienne des employés professionnels, 2012 CRTFP 120, aux paragraphes 9 à 11, la Commission des relations de travail dans la fonction publique a déclaré ce qui suit :

[9] La mise sous scellés de documents ou de dossiers déposés en vue d’une audience judiciaire ou quasi judiciaire va à l’encontre du principe fondamental consacré dans notre système de justice selon lequel les audiences sont publiques et accessibles. La Cour suprême du Canada a statué que l’accès du public aux pièces et aux autres documents déposés dans le cadre d’une procédure judiciaire était un droit protégé par la Constitution en vertu des dispositions sur la « liberté d’expression » de la Charte canadienne des droits et libertés; voir Société Radio-Canada c. Nouveau-Brunswick (Procureur général), [1996] 3 R.C.S. 480; Dagenais c. Société Radio‑Canada, [1994] 3 R.C.S. 835; R. c. Mentuck, 2001 CSC 76, Sierra Club du Canada c. Canada (Ministre des Finances), 2002 CSC 41 (CanLII).

[10] Cependant, la liberté d’expression et le principe de transparence et d’accessibilité publique des audiences judiciaires et quasi judiciaires doivent parfois être soupesés en fonction d’autres droits importants, dont le droit à une audience équitable. Bien que les cours de justice et les tribunaux administratifs aient le pouvoir discrétionnaire d’accorder des demandes d’ordonnance de confidentialité, de non‑publication et de mise sous scellés de pièces, ce pouvoir discrétionnaire est limité par l’exigence de soupeser ces droits et intérêts concurrents. Dans Dagenais et Mentuck, la Cour suprême du Canada a énuméré les facteurs à prendre en considération pour déterminer s’il convient d’accepter une demande de restriction de l’accès aux procédures judiciaires ou aux documents déposés dans le cadre de ces procédures. Ces décisions ont mené à ce que nous connaissons aujourd’hui comme étant le critère Dagenais/Mentuck.

[11] Le critère Dagenais/Mentuck a été établi dans le cadre de demandes d’ordonnance de non‑publication dans des instances criminelles. Dans Sierra Club of Canada, la Cour suprême du Canada a précisé le critère en réponse à une demande d’ordonnance de confidentialité dans le cadre d’une procédure civile. Le critère adapté est le suivant :

[…]

1. elle est nécessaire pour écarter un risque sérieux pour un intérêt important, y compris un intérêt commercial, dans le contexte d’un litige, en l’absence d’autres options raisonnables pour écarter le risque.

2. ses effets bénéfiques, y compris ses effets sur le droit des justiciables civils à un procès équitable, l’emportent sur ses effets préjudiciables, y compris ses effets sur la liberté d’expression qui, dans ce contexte, comprend l’intérêt du public dans la publicité des débats judiciaires.

[…]

[189]  L’objet du dossier 566-02-11223 était la question de savoir si la fonctionnaire avait été congédiée de son poste de manière déguisée. Les plaintes de harcèlement portées contre M. Desharnais et Mme Kelly ont fourni un certain contexte historique, mais ni l’un ni l’autre n’ont témoigné. Les questions soulevées dans les plaintes de harcèlement, même si elles ne sont pas négligeables, ne sont pas essentielles à la présente audience, et n’ont pas non plus fait l’objet d’un examen rigoureux. Les effets bénéfiques de l’ordonnance l’emportent sur ses effets préjudiciables pour le droit à la liberté d’expression, étant donné que les allégations contenues dans les plaintes étaient en grande partie non fondées, que les défendeurs n’étaient pas parties à l’audience, que les questions relevées dans ces plaintes n’étaient pas essentielles à l’audience et que la présente formation de la Commission ne les a pas examinées en détail.

[190]  Quant aux documents médicaux concernant Mme A, la fonctionnaire a invoqué les problèmes médicaux personnels de Mme A pour traiter du processus de mesure d’adaptation. Ces documents contiennent des renseignements qui ne doivent pas faire partie du domaine public. Il existe un risque important pour la protection des renseignements personnels de Mme A, qui n’est pas partie à la présente procédure et dont la situation médicale personnelle est sans pertinence pour l’affaire dont je suis saisi.

[191]  Par conséquent, j’ordonne la mise sous scellés des documents qui ont été déposés sous les cotes E-2, G-35, G-36, G-41 et G-42.

B. Dossier 566-02-11223

[192]  L’employeur a contesté ma compétence à instruire la présente affaire, en faisant valoir qu’elle ne relevait pas du sous‑alinéa 209(1)c)(i) de la Loi, en vertu duquel la fonctionnaire l’a renvoyée à l’arbitrage. Compte tenu de la nature du grief, qui consiste en une allégation de congédiement déguisé, il n’était pas possible d’entendre la preuve concernant l’objection sans entendre celle concernant le bien‑fondé du grief. À ce titre, j’ai entendu l’ensemble de la preuve et j’ai remis à plus tard la question de la compétence.

[193]  Pour relever de la compétence de la Commission en vertu du sous‑alinéa 209(1)c)(i) de la Loi, un grief doit avoir pour objet la rétrogradation ou le licenciement d’un employé dans l’administration publique centrale en vertu de l’alinéa 12(1)d) de la Loi sur la gestion des finances publiques (L.R.C. (1985), ch. F-11; LGFP) pour cause de rendement insuffisant, ou en vertu de l’alinéa 12(1)e) de la LGFP pour des raisons non liées à un manquement à la discipline ou à une inconduite.

[194]  Les alinéas 12(1)d) et e) de la LGFP sont rédigés comme suit :

12 (1) Sous réserve des alinéas 11.1(1)f) et g), chaque administrateur général peut, à l’égard du secteur de l’administration publique centrale dont il est responsable :

[…]

d) prévoir le licenciement ou la rétrogradation à un poste situé dans une échelle de traitement comportant un plafond inférieur de toute personne employée dans la fonction publique dans les cas où il est d’avis que son rendement est insuffisant;

e) prévoir, pour des raisons autres qu’un manquement à la discipline ou une inconduite, le licenciement ou la rétrogradation à un poste situé dans une échelle de traitement comportant un plafond inférieur d’une personne employée dans la fonction publique […]

[195]  Pour les motifs énoncés ci‑dessous, il est fait droit à l’objection de l’employeur à la compétence, et le grief est rejeté.

[196]  Pour que j’aie compétence, la fonctionnaire devait établir, selon la prépondérance des probabilités, que les actes de l’employeur constituaient un licenciement (puisque c’est ce que la fonctionnaire a allégué, à savoir un congédiement déguisé), et cela, pour un rendement insuffisant allégué ou d’autres motifs (sous‑alinéa 209(1)c)(i) de la Loi).

[197]  Rien dans le grief, la preuve ou l’argumentation ne laissait croire à une rétrogradation. Il n’y avait pas non plus d’allégation en ce sens. De plus, je n’ai pas entendu la fonctionnaire déclarer dans son témoignage ou soutenir que le congédiement déguisé allégué était lié de quelque façon que ce fût à son rendement. À ce titre, le grief ne pouvait pas être renvoyé à la Commission en vertu du sous‑alinéa 209(1)c)(i) de la Loi ou de l’alinéa 12(1)d) de la LGFP.

1. Congédiement déguisé allégué

[198]  Dans Potter, aux paragraphes 30 à 33, la Cour suprême du Canada a commenté comme suit le congédiement déguisé :

30 Lorsque, par sa conduite, l’employeur manifeste l’intention de ne plus être lié par le contrat de travail, le salarié peut soit acquiescer à la conduite de l’employeur ou à la modification qu’il apporte au contrat, soit y voir la répudiation du contrat et intenter contre l’employeur une poursuite pour congédiement injustifié […]

31 Il appartient au salarié de prouver qu’il y a eu congédiement déguisé. S’il y parvient, il a droit à une indemnité tenant lieu de préavis raisonnable de cessation d’emploi […]

32 […] Deux volets ont vu le jour pour l’application du critère. Dans la plupart des cas, il faut d’abord établir la violation d’une condition expresse ou tacite du contrat, puis décider si elle est suffisamment grave pour constituer un congédiement déguisé […]

33 Or, la conduite de l’employeur constitue également un congédiement déguisé lorsqu’elle traduit généralement son intention de ne plus être lié par le contrat […]

[199]  Selon Potter, la fonctionnaire avait le fardeau d’établir qu’elle avait été congédiée de manière déguisée, en démontrant qu’il y avait eu violation d’une condition expresse du contrat de travail et que la violation était suffisamment sérieuse pour constituer un congédiement, ou que la conduite de l’employeur démontrait qu’il ne voulait pas être lié par le contrat. La fonctionnaire ne s’est pas acquittée de ce fardeau.

[200]  Au moment du dépôt du grief, la fonctionnaire avait quitté le milieu de travail, était en congé de maladie avec certificat médical et touchait un salaire en fonction des crédits de congé de maladie qu’elle avait acquis dans le cadre de son contrat de travail. Cette situation a perduré après le dépôt de son grief. À vrai dire, à partir de la date de dépôt de son grief, l’employeur avait cherché un poste pour elle à l’extérieur de la DGRH, comme elle l’avait demandé, mais il n’en avait pas trouvé.

[201]  Ces mesures que M. Fox a prises pour le compte de l’employeur n’indiquent certainement pas que celui‑ci ait eu l’intention de ne plus être lié par les relations employeur‑employée, ni qu’il y ait eu violation d’une condition du contrat de travail. M. Fox a dit à la fonctionnaire que son poste était là pour elle, et que l’employeur et lui étaient disposés, en ce qui concernait la mesure d’adaptation, à mettre en place un plan à l’appui de sa réintégration dans son poste d’attache, en fonction des besoins.

[202]  Même si, à ce moment‑là, M. Fox a déclaré qu’il n’était pas disposé à accorder à la fonctionnaire une avance de crédits de congé de maladie payé, il a par ailleurs avisé celle‑ci de ses soldes de congé et du fait qu’elle pouvait les utiliser pour couvrir son absence au travail en cours. Dans le cadre de ses relations de travail, la fonctionnaire avait acquis des crédits de congé aux fins des vacances et des congés de maladie, ainsi qu’un congé annuel accordé en une seule fois qu’elle pouvait utiliser pour s’absenter du travail, et l’employeur a confirmé qu’elle y avait droit. Les employés licenciés à la fonction publique fédérale perdent leurs crédits de congé de maladie payé.

[203]  Dans le grief, l’allégation est formulée de manière très précise, comme suit :

  1. le SPPC a pris de nombreuses mesures pour contrecarrer la demande de la fonctionnaire et retarder son retour au travail avec une mesure d’adaptation;
  2. dans le courriel du 9 mars, M. Fox a refusé de prendre une mesure d’adaptation à l’égard des contraintes médicales de la fonctionnaire;
  3. M. Fox a tenté de rendre les conditions de travail de la fonctionnaire intolérables à un point tel que celle-ci se sentirait contrainte de démissionner.

[204]  Dans Renaud, la Cour a ainsi énoncé les principes maintenant bien reconnus qu’il faut suivre dans les cas concernant l’obligation de prendre des mesures d’adaptation :

[…]

43 La recherche d’un compromis fait intervenir plusieurs parties. Outre l’employeur et le syndicat, le plaignant a également l’obligation d’aider à en arriver à un compromis convenable. La participation du plaignant à la recherche d’un compromis a été reconnue par notre Cour dans l’arrêt O’Malley. Le juge McIntyre y affirme, à la p. 555 :

Cependant, lorsque ces mesures ne permettent pas d’atteindre complètement le but souhaité, le plaignant, en l’absence de concessions de sa propre part, comme l’acceptation en l’espèce d’un emploi à temps partiel, doit sacrifier soit ses principes religieux, soit son emploi.

Pour faciliter la recherche d’un compromis, le plaignant doit lui aussi faire sa part. À la recherche d’un compromis raisonnable s’ajoute l’obligation de faciliter la recherche d’un tel compromis. Ainsi, pour déterminer si l’obligation d’accommodement a été remplie, il faut examiner la conduite du plaignant.

44 Cela ne signifie pas qu’en plus de porter à l’attention de l’employeur les faits relatifs à la discrimination, le plaignant est tenu de proposer une solution. Bien que le plaignant puisse être en mesure de faire des suggestions, l’employeur est celui qui est le mieux placé pour déterminer la façon dont il est possible de composer avec le plaignant sans s’ingérer indûment dans l’exploitation de son entreprise. Lorsque l’employeur fait une proposition qui est raisonnable et qui, si elle était mise en œuvre, remplirait l’obligation d’accommodement, le plaignant est tenu d’en faciliter la mise en œuvre. Si l’omission du plaignant de prendre des mesures raisonnables est à l’origine de l’échec de la proposition, la plainte sera rejetée. L’autre aspect de cette obligation est le devoir d’accepter une mesure d’accommodement raisonnable. C’est cet aspect que le juge McIntyre a mentionné dans l’arrêt O’Malley. Le plaignant ne peut s’attendre à une solution parfaite. S’il y a rejet d’une proposition qui serait raisonnable compte tenu de toutes les circonstances, l’employeur s’est acquitté de son obligation.

[…]

2. Le SPPC a pris de nombreuses mesures pour contrecarrer la demande de la fonctionnaire ou retarder son retour au travail avec une mesure d’adaptation 

[205]  Dans certains cas, la recherche commune des diverses parties peut se traduire simplement par une lettre ou une note brièvement rédigée par un médecin de famille, et l’employeur peut facilement mettre en œuvre les mesures nécessaires. Cependant, cela ne signifie pas que l’employeur doive mettre en place ce qu’un médecin déclare nécessaire ou ce que souhaite l’employé. Certains cas exigeront un processus plus exhaustif, ainsi que des discussions, un apport et une collaboration plus approfondis.

[206]  D’après la preuve dont je dispose, il est évident qu’au 9 mars 2015, le processus de mesure d’adaptation en était au stade préliminaire. Entre le 26 janvier 2015 (le dernier jour de travail de la fonctionnaire au SPPC) et le 9 mars 2015 (la date indiquée dans le grief à l’égard de l’acte, de l’omission ou de toute autre affaire y ayant donné lieu), les renseignements que le médecin de famille de la fonctionnaire avait fournis à l’employeur étaient les suivants :

  • la note du Dr Chan datée du 28 janvier;
  • une note datée du 30 janvier 2015, qui indiquait simplement que la fonctionnaire ne pouvait pas se présenter au travail du 27 au 30 janvier 2015, et dans laquelle il était mentionné : [traduction] « Stress lié au travail »;
  • une note datée du 2 mars 2015, qui indiquait simplement que la fonctionnaire ne pouvait pas se présenter au travail du 2 au 31 mars 2015;
  • le FDCF caviardé en date du 2 mars.

[207]  À la fin de janvier, le Dr Chan a indiqué que la fonctionnaire souffrait de stress, ce qu’il attribuait à son milieu de travail. Cependant, le Dr Chan n’a pas témoigné, et ses notes ou dossiers cliniques n’ont pas été produits. À ce titre, je ne suis pas au courant de ce qu’il savait, ni de ce que la fonctionnaire lui avait dit.

[208]  Il est clair que le 2 mars 2015, le Dr Chan a rédigé une note qui indiquait que la fonctionnaire n’était pas apte au travail du 2 au 31 mars 2015, et qu’il a rempli le FDCF, que la fonctionnaire a caviardé unilatéralement. Même s’il était caviardé, le FDCF daté du 2 mars précisait que la fonctionnaire avait des limitations fonctionnelles ou faisait l’objet de restrictions applicables à 21 capacités non physiques liées au travail, dans les domaines social, émotionnel, cognitif et mental. L’employeur pouvait à juste titre demander de plus amples renseignements au Dr Chan, afin de déterminer si une mesure d’adaptation au travail s’avérait nécessaire, en quoi elle consisterait, et s’il y avait lieu de demander et d’obtenir une évaluation des professionnels de la santé de SC; c’est ce que l’employeur a fait en dernier ressort.

[209]  Dans son témoignage, la fonctionnaire a déclaré que le 2 mars 2015, elle s’était vu prescrire un nouveau médicament qui avait agi après trois semaines. En contre‑interrogatoire, elle a convenu que le 9 mars 2015, elle n’était pas apte au travail. Par conséquent, il est difficile de comprendre que le 9 mars 2015 (date du grief), l’employeur retardait son retour au travail, alors qu’elle n’était pas apte au travail. Il était illogique de la part de la fonctionnaire de laisser entendre que le 10 mars 2015, son retour au travail était retardé en vertu de la position que M. Fox avait adoptée dans le courriel du 9 mars, puisqu’à cette date, ni son médecin de famille ni elle n’estimaient qu’elle pouvait retourner au travail. Il n’y a tout simplement aucune preuve du fait que l’employeur retardait son retour au travail, avec une mesure d’adaptation ou non, à la date du grief.

[210]  Il est clair que le 9 mars 2015, la seule chose que l’employeur n’était pas disposé à faire était de consentir à la demande de la fonctionnaire d’être mutée à un poste à l’extérieur de la DGRH. Cette mutation n’était pas nécessairement une mesure d’adaptation, simplement du fait que la fonctionnaire et son médecin l’y avaient assimilée.

[211]  De nombreux facteurs et variables doivent être pris en compte lorsque la maladie ou la déficience d’un employé touche son milieu de travail. Dans Herbert c. Administrateur général (Commission nationale des libérations conditionnelles), 2018 CRTESPF 76, au paragraphe 393, j’ai formulé les commentaires qui suivent au sujet de la participation des professionnels de la santé à la prise de mesures d’adaptation au travail :

[393] Dans son témoignage devant moi, le Dr Suddaby a affirmé que la plupart des psychiatres et psychologues font des recommandations concernant des mesures d’adaptation qui ne sont pas appropriées parce qu’ils n’ont pas suffisamment de connaissances au sujet du milieu de travail ou de l’emploi visé. Il a déclaré que, lorsque tous les intervenants concernés communiquent de manière efficace avec le niveau de divulgation approprié, il est probable que l’employé sera dans une meilleure position. Les commentaires de tous les intervenants sont importants, mais très rares dans notre système de soins de santé. Les commentaires du Dr Suddaby sont particulièrement pertinents, surtout lorsqu’ils ont trait au fonctionnaire et à sa situation.

[212]  Les professionnels de la santé recherchent le bien‑être de leurs patients, et je ne doute pas qu’il en ait été ainsi dans le cas du Dr Chan et de sa relation avec la fonctionnaire. La difficulté réside dans le fait que les médecins traitants font face à des problèmes à multiples facettes qui ne sont pas toujours de nature physique et médicale, ce qui est particulièrement problématique dans le cadre des problèmes en milieu de travail qui donnent lieu à des conflits entre les employés. Les médecins traitants peuvent ou non être en mesure de résoudre un conflit en milieu de travail. Cela ne veut pas dire que leur apport n’est pas le bienvenu, ni qu’il est inutile; ils peuvent aider et aident souvent en jouant un rôle dans la résolution des problèmes liés aux mesures d’adaptation en milieu de travail. La question devient celle de savoir quel rôle ils jouent, et dans quelle mesure.

[213]  Même si la fonctionnaire a témoigné et a évoqué à certains moments ce qu’elle a affirmé avoir dit au Dr Chan, pour les motifs que j’énoncerai plus loin dans la présente décision, j’hésite à accepter une bonne part de ce qu’elle a affirmé être exact, puisque j’estime que sa preuve n’est pas crédible en grande partie.

3. Dans le courriel du 9 mars, le SPPC a refusé de prendre une mesure d’adaptation à l’égard des contraintes médicales de la fonctionnaire

[214]  Les motifs énoncés à la section précédente s’appliquent également à l’allégation ci‑dessus.

[215]  En plus de ces motifs, le courriel du 9 mars indique le contraire.

[216]  Le courriel du 9 mars indiquait que M. Fox n’était pas en mesure de satisfaire à la demande de la fonctionnaire et à la recommandation du Dr Chan, selon lesquelles la fonctionnaire devait travailler à l’extérieur de la DGRH. Le motif que M. Fox a invoqué, c’est qu’il n’y avait aucun poste adéquat à l’extérieur de la DGRH, et qu’il était problématique d’effectuer un travail relevant de la DGRH à l’extérieur de cette direction, en raison du caractère unique de son travail et de sa structure hiérarchique. Il s’agissait d’un travail spécialisé, et à ce titre, il aurait été difficile pour la fonctionnaire de s’en acquitter en dehors de cette structure.

[217]  Le courriel du 9 mars indiquait aussi que M. Fox était disposé à mettre en place un plan qui aurait soutenu la réintégration de la fonctionnaire dans son milieu de travail, à son poste d’attache, et, dans la mesure du possible, d’accélérer son retour au travail en élaborant, en collaboration avec elle et le Dr Chan, un plan qui aurait assuré le soutien approprié.

[218]  Le courriel du 9 mars ne fait pas allusion aux contraintes médicales ou à la maladie de la fonctionnaire, mais il indique que M. Fox priait cette dernière de l’aviser si la situation évoluait (en gardant à l’esprit qu’à l’exception du FDCF caviardé le 2 mars, la note médicale la plus récente du Dr Chan était datée du 2 mars 2015, et qu’elle indiquait que la fonctionnaire ne pouvait pas se présenter au travail du 2 au 31 mars 2015).

[219]  En contre‑interrogatoire, M. Fox a déclaré qu’à l’époque (le 9 mars 2015), il n’avait pas de précisions au sujet des capacités et des limitations de la fonctionnaire. Lorsque celle‑ci lui a laissé entendre qu’il refusait de prendre une mesure d’adaptation à son égard, il l’a nié, en déclarant que selon les renseignements dont il disposait, il n’était pas en mesure d’évaluer une mesure d’adaptation adéquate.

4. Le SPPC a tenté de rendre les conditions de travail de la fonctionnaire intolérables à un point tel que celle‑ci se sentirait contrainte de démissionner

[220]  Il n’y avait aucune preuve concernant les conditions de travail de la fonctionnaire. Le grief a été déposé le 9 mars 2015, et la fonctionnaire n’avait pas été au travail depuis le 26 janvier 2015, une trentaine de jours avant le dépôt.

[221]  Bien que le rapport sur les plaintes de harcèlement contre M. Desharnais ait laissé entendre, en bonne partie, que le harcèlement allégué dont la fonctionnaire avait été victime découlait du fait qu’au cours de l’été 2013, M. Desharnais n’avait pas tenu celle‑ci au courant du travail, qu’une partie de ses tâches était bloquée, et qu’elle avait vu une baisse du nombre de dossiers qui lui étaient assignés, rien n’indiquait que l’employeur lui avait retiré des fonctions ou avait notablement modifié ses fonctions. Cela n’était pas allégué non plus dans le grief, ni dans le témoignage ou dans l’argumentation de la fonctionnaire.

[222]  La fonctionnaire n’a fourni aucune preuve des modifications que l’employeur avait tenté d’apporter à ses conditions de travail, le cas échéant.

[223]  Rien n’indique que la fonctionnaire ait démissionné. Rien n’indique non plus qu’elle ait envisagé de démissionner.

a. Défaut de prendre une mesure d’adaptation à titre de grief autonome

[224]  La fonctionnaire pouvait certainement déposer un grief en vertu de l’article 208 de la Loi, en alléguant que l’employeur n’avait pris aucune mesure d’adaptation à son égard, et à vrai dire, elle en a déposé un qui faisait partie des deux qu’elle a envoyés à M. Fox le 10 mars 2015, à 7 h 4. Cependant, elle n’a pas renvoyé ce grief à la Commission pour arbitrage.

[225]  En soi, le droit de déposer un grief et de le soumettre à la procédure de règlement des griefs ne donne pas compétence à la Commission. Pour que ce soit le cas, le grief doit relever de l’un des domaines définis à l’article 209 de la Loi. Dans la plupart des cas, la Commission a compétence sur un manquement allégué à l’obligation de prendre des mesures d’adaptation, parce qu’il relève de l’alinéa 209(1)a), qui confère la compétence sur l’interprétation, ou l’application à l’égard d’un employé d’une disposition d’une convention collective ou d’une décision arbitrale. La plupart, sinon la totalité, des conventions collectives entre le CT et les agents négociateurs de la fonction publique fédérale renferment un article qui traite de la discrimination.

[226]  La clause suivante, qui est énoncée dans la convention entre le CT et l’Alliance de la Fonction publique du Canada pour le groupe Services des programmes et de l’administration (la « convention collective du groupe PA »), renferme des dispositions qui se retrouvent dans toutes les conventions collectives de la fonction publique fédérale de façon générale :

ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION

19.01  Il n’y aura aucune discrimination, ingérence, restriction, coercition, harcèlement, intimidation, ni aucune mesure disciplinaire exercée ou appliquée à l’égard d’un employé-e du fait de son âge, sa race, ses croyances, sa couleur, son origine nationale ou ethnique, sa confession religieuse, son sexe, son orientation sexuelle, son identité sexuelle et l’expression de celle-ci, sa situation familiale, son état matrimonial, son incapacité mentale ou physique, son adhésion à l’Alliance ou son activité dans celle-ci ou une condamnation pour laquelle l’employé-e a été gracié.

[227]  La difficulté que pose la situation de la fonctionnaire, c’est que celle‑ci n’était pas visée par une convention collective; par conséquent, elle ne pouvait pas renvoyer un grief à l’arbitrage en alléguant un manquement à l’obligation de prendre des mesures d’adaptation. Bien que cela puisse sembler injuste, la loi est claire. La Commission n’a pas une compétence inhérente à toutes les questions liées au travail et à l’emploi à la fonction publique fédérale, mais seulement à l’égard de celles qui sont expressément énoncées dans la Loi. À vrai dire, même les employés qui sont visés par une convention collective comprenant une clause d’élimination de la discrimination, comme celle qui est énoncée dans la convention collective du groupe PA, peuvent être empêchés de renvoyer à l’arbitrage un grief de manquement à l’obligation de prendre des mesures d’adaptation, si leur agent négociateur n’est pas disposé à les représenter à l’arbitrage (voir le paragraphe 209(2) de la Loi).

[228]  À ce titre, les allégations de la fonctionnaire dans son grief pour contester le défaut de prendre une mesure d’adaptation ne sont pas arbitrables.

C. Dossier 566-02-11833

[229]  L’employeur a aussi contesté ma compétence à entendre le présent grief, en soutenant qu’il ne relevait pas de l’article 209 de la Loi, et plus particulièrement que la fonctionnaire n’avait pas établi que la mesure énoncée dans le grief équivalait à une mesure disciplinaire qui avait entraîné un licenciement, une suspension ou une rétrogradation en vertu de l’alinéa 209(1)b).

[230]  Pour les motifs qui suivent, je fais droit à l’objection de l’employeur, et le grief est rejeté.

[231]  La Commission a compétence sur les griefs individuels qui sont prévus à l’article 209 de la Loi.

[232]  Dans le grief 1143, la fonctionnaire a allégué que l’employeur l’avait frauduleusement mise en congé de maladie non payé, et dans le grief 1144, elle a allégué qu’il avait agi de manière discriminatoire en l’empêchant d’obtenir son salaire. M. Dolhai, le titulaire du pouvoir délégué, a rejeté les deux griefs au dernier palier de la procédure de règlement des griefs.

[233]  La fonctionnaire n’a présenté aucune preuve concernant la procédure de règlement des griefs ayant mis en cause les griefs 1143 et 1144. D’après la réponse au dernier palier de M. Dolhai, la seule preuve liée à ces griefs indique qu’ils avaient été rejetés aux paliers antérieurs, et que la fonctionnaire s’était vu accorder la possibilité d’une audience en personne aux autres paliers de la procédure de règlement des griefs, ce qu’elle avait refusé parce qu’elle préférait soumettre des arguments écrits.

[234]  Les décisions relatives aux griefs 1143 et 1144 sont énoncées intégralement à la section qui traite de la preuve dans la présente décision.

[235]   La procédure de règlement des griefs à la fonction publique fédérale est actuellement énoncée dans le Règlement, et elle est la continuation de celle, en grande partie inchangée, qui a été mise en place il y a des décennies. Cette procédure a initialement été mise en œuvre à l’époque du prédécesseur de la Commission, soit la Commission des relations de travail dans la fonction publique, en vertu de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (L.R.C. (1985), ch. P-35), puis a été poursuivie en vertu de la LRTFP.

[236]  Selon la procédure établie par le Règlement, si un employé qui a déposé un grief individuel n’est pas satisfait de la décision obtenue à un palier de la procédure de règlement des griefs, il peut renvoyer le grief plus loin dans la procédure jusqu’à ce qu’elle soit épuisée. Lorsque cela se produit, en fonction de la nature du grief, le fonctionnaire s’estimant lésé peut le renvoyer à la Commission aux fins d’arbitrage, si la Commission est compétente (actuellement en vertu de l’article 209 de la Loi).

[237]  Bien que l’article 208 de la Loi autorise le dépôt d’un grief à l’égard de presque tous les aspects de la relation employeur‑employé, l’article 209 délimite les questions qui peuvent être portées devant la Commission pour arbitrage. Comme je l’ai déjà mentionné dans la présente décision, les griefs déposés en vertu de l’article 208 ne relèvent pas tous de la compétence de la Commission. Dans le cas de la fonctionnaire, qui n’était pas visée par une convention collective, ces questions sont encore plus restreintes. Les conditions d’emploi qui sont énoncées dans une convention collective, qui englobent les questions liées à la paye et aux congés, peuvent valablement être renvoyées à la Commission pour arbitrage en vertu de l’alinéa 209(1)a) de la Loi, ce qui confère la compétence sur des questions mettant en cause la violation d’une condition de la convention collective.

[238]  Comme les conditions d’emploi de la fonctionnaire n’étaient pas régies en partie par une convention collective, la Commission n’a pas la compétence d’entendre et de trancher les allégations de violation de ces conditions, compétence qu’elle aurait eu dans un cas contraire, parce que ces conditions auraient été énoncées dans une convention collective. Encore une fois, bien que cela puisse sembler injuste, il s’agit clairement de ce que la loi prévoit.

[239]  Aucune preuve que ce soit n’a été présentée pour démontrer que le rejet des griefs 1143 et 1144 par M. Dolhai était de nature disciplinaire d’une façon ou d’une autre; la fonctionnaire n’a pas non plus fait valoir ce point. Il est évident qu’elle a déposé ce grief pour tenter de faire trancher une question sur laquelle la Commission n’avait pas compétence, ce qu’elle savait.

D. Crédibilité

[240]  Le critère applicable à la crédibilité est formulé dans Faryna v. Chorny, [1952] 2 D.L.R. 354, comme suit :

[Traduction]

[…]

Si la conclusion qu’un juge de première instance tirait à l’égard de la crédibilité d’un témoin dépendait uniquement de son opinion quant à la personne qui a, selon lui, fait preuve de la plus grande sincérité à la barre des témoins, nous nous trouverions avec un résultat purement arbitraire, et l’administration de la justice dépendrait alors des talents d’acteur des témoins. Réflexion faite, il devient presque évident que l’apparence de sincérité n’est qu’un des éléments qui entrent en ligne de compte lorsqu’il s’agit d’apprécier la crédibilité d’un témoin. Les possibilités qu’avait le témoin d’être plus au courant des faits, sa capacité d’observation, son jugement, sa mémoire, son aptitude à décrire avec précision ce qu’il a vu et entendu contribuent, de concert avec d’autres facteurs, à créer ce qu’on appelle la crédibilité […] Par son attitude, un témoin peut donner au juge de première instance une impression très défavorable quant à sa sincérité, mais il se peut que les circonstances permettent de conclure sans l’ombre d’un doute qu’il dit la vérité. Je ne pense pas ici aux cas relativement peu fréquents où un juge surprend le témoin en flagrant délit de mensonge maladroit.

La crédibilité du témoin intéressé ne peut être évaluée, plus particulièrement dans les cas de témoignages contradictoires, en se fondant exclusivement sur la question de savoir si le comportement du témoin permet de penser qu’il dit la vérité. Le critère applicable consiste plutôt à examiner si la version des faits d’un témoin est compatible avec les probabilités qui entourent les faits de l’espèce. Bref, le véritable critère applicable à la véracité de la version du témoin en pareil cas doit être sa conformité à la prépondérance des probabilités qu’une personne pratique et éclairée estimerait d’emblée comme étant raisonnable dans le lieu et le contexte en question […]

[…]

[241]  En grande partie, la preuve de la présente affaire est documentaire. La plupart des témoignages de vive voix ont été livrés par des témoins cités par l’employeur. Bien que la fonctionnaire ait témoigné et cité un témoin, Mme A, le témoignage de cette dernière portait uniquement sur ce qui s’était produit dans son cas en particulier, et elle n’avait rien à apporter au sujet de la situation de la fonctionnaire, puisqu’elle n’était pas concernée.

[242]  Dans son témoignage principal, son contre‑interrogatoire et ses arguments, de même que dans un bon nombre de courriels dont elle est l’auteure, la fonctionnaire a évoqué ce qu’elle avait ressenti, perçu, cru et présumé au sujet des convictions ou des opinions d’autres personnes et des motifs de celles qui avaient agi pour le compte de l’employeur, surtout M. Fox. Cependant, il ne s’agit pas d’une preuve de ce qui s’est passé, mais de suppositions et de conjectures.

[243]  Le fond du témoignage principal que la fonctionnaire a présenté était très mince. Comme je l’ai déjà mentionné dans la présente décision, elle a alloué une grande partie de son temps à identifier les documents énoncés dans ses exposés. Son témoignage de vive voix, qui a largement été obtenu en contre-interrogatoire, par l’avocat de l’employeur, ne lui a pas été utile; bref, il a sapé sa crédibilité.

[244]  L’exemple le plus frappant du manque de crédibilité de la fonctionnaire, c’est la question qui entoure la signature du formulaire de consentement, que M. Fox l’avait priée de signer. À maintes reprises devant moi, la fonctionnaire a déclaré qu’elle avait toujours collaboré avec l’employeur (en particulier, M. Fox) et qu’elle apportait tous les formulaires qui s’avéraient nécessaires à son médecin. Ce n’est tout simplement pas vrai, puisqu’elle a dit expressément à M. Fox (dans deux courriels au moins) qu’elle ne signerait pas le formulaire de consentement (volontaire). En contre‑interrogatoire, lorsque ce refus a été porté à son attention, ainsi que la dichotomie dans sa déclaration et ses courriels, elle en a disconvenu. Elle a laissé entendre que le fait d’aller voir son médecin signifiait qu’elle collaborait.

[245]  Souvent, la fonctionnaire ne répondait pas aux questions simples qui lui étaient posées en contre‑interrogatoire. Elle a déclaré que le formulaire de consentement ne lui avait pas été expliqué, mais à la question de savoir ce qui n’avait pas été expliqué, elle s’est contentée de répondre qu’il n’avait pas été expliqué, puis a poursuivi en déclarant qu’elle ne croyait pas avoir besoin d’une autre évaluation. Le formulaire de consentement, qui est cité plus haut dans la présente décision, est clair et sans ambiguïté. Si M. Fox n’a pas clairement indiqué le motif du formulaire de consentement à la fonctionnaire au départ, il le lui a clairement expliqué dans le courriel du 19 février.

[246]  La fonctionnaire a écrit la lettre du 30 mars au Dr Chan. Aucune copie n’en a été fournie à l’employeur à l’époque des événements en cause. En contre‑interrogatoire, la partie de la lettre où la fonctionnaire dit au Dr Chan que M. Fox a été irrespectueux envers elle dans ses communications avec elle a été portée à l’attention de la fonctionnaire. Celle‑ci a été priée de préciser aux fins de l’audience quelles étaient les [traduction] « communications irrespectueuses » de M. Fox, selon elle. Elle n’a pas été en mesure de le dire.

[247]  J’ai examiné toutes les communications échangées entre la fonctionnaire et M. Fox (avant la lettre du 30 mars) qui ont été produites à l’audience, et dans aucune d’entre elles les communications ou les mesures de M. Fox ne m’ont semblé inappropriées, harcelantes, irrespectueuses, punitives ou offensantes; or c’est en ces termes que la fonctionnaire a décrit les communications de M. Fox avec elle. Il se peut que les courriels de celui‑ci n’aient pas indiqué ce qu’elle souhaitait entendre à l’occasion, et que le ton ait parfois été tranchant et direct. Cependant, cela n’équivaut pas à du harcèlement, ni à des communications irrespectueuses.

[248]  En ce qui concerne les griefs désignés sous les numéros 1143 et 1144, après avoir épuisé ses crédits de congé de maladie payé et avoir été mise en congé de maladie non payé, la fonctionnaire a laissé entendre, à la fois dans sa correspondance et dans son témoignage devant moi, que ces mesures avaient été prises sans l’aviser. Elle a laissé entendre que cela lui avait, en quelque sorte, causé un choc.

[249]  Cela est absolument faux. À de multiples reprises, l’employeur a avisé la fonctionnaire du solde de crédits de congé de maladie qu’il lui restait (ainsi que des autres congés dont elle disposait) et qu’elle pouvait utiliser. L’employeur lui a conseillé de se mettre en rapport avec son conseiller en rémunération au cas où ses crédits de congé seraient épuisés. M. Fox lui a expressément dit dans le courriel du 9 mars qu’il ne lui avancerait pas de crédits de congé de maladie. Il est clair et évident que la fonctionnaire a expressément reçu de l’employeur des renseignements dont elle a décidé de ne pas tenir compte.

[250]  Le geste le plus grave que la fonctionnaire a posé dans le cadre de la présente affaire est sans doute la falsification du FDCF. Le Dr Chan lui a remis le FDCF rempli afin qu’elle le présente à l’employeur. De son plein gré, elle y a caviardé des renseignements, qu’elle a cachés à l’employeur. Cela a montré que la fonctionnaire était prête à falsifier les choses et à induire l’employeur en erreur pour obtenir ce à quoi elle croyait avoir droit.

[251]  Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

(L’ordonnance apparaît à la page suivante)


V. Ordonnance

[252]  Je n’ai pas compétence à l’égard de ces deux griefs.

[253]  Les deux griefs sont rejetés.

[254]  Les pièces E-2, G-35, G-36, G-41 et G-42 doivent être scellées.

Le 5 juillet 2019.

Traduction de la CRTESPF

 

John G. Jaworski,

une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

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