Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

L’agent négociateur a déposé deux griefs de principe contestant la décision de l’employeur de refuser de rembourser aux conseillers médicaux de la Division de l’expertise médicale du ministère de l’Emploi et du Développement social leurs frais de suivi du perfectionnement professionnel continu, qui sont imposés par l’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario, ainsi que leurs primes d’assurance responsabilité professionnelle, qui sont exigées en vertu du Règlement sur l’assurance responsabilité professionnelle des médecins du Québec – la clause 21.01 de la convention collective prévoit que : « [l’]employeur rembourse à l’employé les cotisations, les droits d’inscription ou tout autre droit qu’il a versés à un ou plusieurs organismes ou corporations dans la mesure où l’employeur est convaincu qu’un tel versement est nécessaire à l’exercice continu des fonctions de l’employé » – la Commission a conclu qu’une des conditions d’emploi d’un conseiller médical est qu’il détienne une licence médicale – elle a conclu que les conseillers médicaux licenciés en Ontario doivent payer chaque année des frais de suivi du perfectionnement professionnel continu pour conserver leur licence – elle a conclu que les conseillers médicaux licenciés au Québec doivent payer des primes d’assurance responsabilité professionnelle tous les ans pour conserver leur licence – en dernier lieu, la Commission a conclu que ces frais sont « […] les cotisations, les droits d’inscription ou tout autre droit […] versés à un ou plusieurs organismes ou corporations […] » et « […] qu’un tel versement est nécessaire à l’exercice continu des fonctions de l’employé […] » en vertu de la clause 21.01 – l’employeur s’est opposé à ce que la Commission se penche sur l’allégation de l’agent négociateur selon laquelle l’employeur avait outrepassé les droits de la direction prévus à l’article 5 – la Commission a conclu qu’en raison du fait que cette allégation n’avait pas été soulevée dans le cadre de la procédure de règlement des griefs de principe, elle ne pouvait pas être soulevée pour la première fois à l’arbitrage de grief.

Objection accueillie.
Griefs accueillis.

Contenu de la décision

Date : 20191121

Dossiers : 569‑02‑175 et 178

 

Référence : 2019 CRTESPF 112

Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral et

Loi sur les relations de travail

dans le secteur public fédéral

Coat of Arms

Devant une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

ENTRE

 

Institut professionnel de la fonction publique du Canada

agent négociateur

 

et

 

Conseil du Trésor

 

employeur

Répertorié

Institut professionnel de la fonction publique du Canada c. Conseil du Trésor

Affaire concernant des griefs de principe renvoyés à l’arbitrage

Devant :  Nathalie Daigle, une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

Pour l’agent négociateur :  Christopher Olutola, Institut professionnel de la fonction publique du Canada

Pour l’employeur :  Karl Chemsi, avocat

Affaire entendue à Ottawa (Ontario)

du 12 au 14 février 2019.

(Traduction de la CRTESPF)


MOTIFS DE DÉCISION

I.  Introduction

[1]  Le 12 mars 2014, l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada (l’« agent négociateur ») a déposé deux griefs de principe contestant l’interprétation de l’article 21 d’une convention collective par le Conseil du Trésor (l’« employeur »). La convention collective applicable des parties s’applique à l’unité de négociation du groupe Services de santé; elle est venue à échéance le 30 septembre 2014 (la « convention collective des SH »).

[2]  Dans le grief au dossier 569‑02‑175, l’agent négociateur soutient que les conseillers médicaux de la Division de l’expertise médicale d’Emploi et Développement social Canada (« EDSC ») ont droit d’être remboursé pour leur perfectionnement professionnel continu (« PPC ») (ou éducation médicale continue (EMC)) en vertu de l’article 21 (intitulé « Droits d’inscription ») de la convention collective du groupe SH, parce que le paiement de ces droits constitue une condition nécessaire pour conserver une licence médicale à jour et valide dans une province ou un territoire du Canada.

[3]  L’employeur est d’avis qu’ils ont droit au remboursement de leurs frais de suivi du PPC non en vertu de l’article 21, mais en vertu de la clause 18.04 de la convention collective du groupe SH, parce qu’elle porte sur les cours de formation professionnelle continue nécessaires pour satisfaire aux normes actuelles de délivrance de licences. Par conséquent, il a rejeté le grief.

[4]  Dans le grief au dossier 569‑02‑178, l’agent négociateur soutient que les conseillers médicaux ont droit au remboursement des primes d’assurance responsabilité professionnelle, conformément à l’article 21 de la convention collective du groupe SH.

[5]  L’employeur est d’avis qu’ils n’ont pas droit au remboursement des primes d’assurance responsabilité professionnelle en vertu de l’article 21 de la convention collective du groupe SH. Par conséquent, il a rejeté le grief.

[6]  Le 27 mai et le 18 août 2015, l’agent négociateur a renvoyé les griefs de principe à l’arbitrage.

[7]  Le 19 juin 2017, la Loi modifiant la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique et d’autres lois et comportant d’autres mesures (L.C. 2017, ch. 9) a reçu la sanction royale et a modifié le nom de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique et le titre de la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique et de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique pour qu’ils deviennent, respectivement, la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (la « Commission »), la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral et la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral (la « Loi »).

[8]  Pour les motifs suivants, je conclus que les frais de suivi du PPC des conseillers médicaux, tels qu’ils sont abordés dans la présente décision (les droits des non‑membres versés au Collège des médecins de famille du Canada (le « CMFC »)) sont visés par l’article 21 de la convention collective du groupe SH. L’agent négociateur a établi que [traduction] « […] un tel versement est nécessaire à l’exercice continu des fonctions de l’employé [du conseiller médical]. »

[9]  Je conclus également que, dans une certaine mesure, les primes d’assurance responsabilité professionnelle des conseillers médicaux d’EDSC sont visées par l’article 21 de la convention collective du groupe SH. L’agent négociateur a établi que [traduction] « […] un tel versement est nécessaire à l’exercice continu des fonctions de l’employé [du conseiller médical]. »

II.  Griefs de principe et décisions

[10]  Le 12 mars 2014, l’agent négociateur a déposé le grief de principe au dossier 569‑02‑175. Il est ainsi rédigé :

[Traduction]

Détails relatifs au grief

Il s’agit d’un grief de principe déposé par l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada en vertu de l’article 220 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (art. 220 de la LRTFP).

L’Institut soutient que l’employeur a violé, mal appliqué et mal interprété l’article 21 (Article sur les droits d’inscription) et tout autre article connexe de la convention collective du groupe Services de santé (SH) conclue entre l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada et le Conseil du Trésor.

Le 7 février 2014, Emploi et Développement social Canada (EDSC) a informé les conseillers médicaux de sa division de l’expertise médicale qu’il ne rembourserait pas les droits liés au perfectionnement professionnel continu (PPC) officiel mis en œuvre en 2013 par l’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario (OMCO).

L’Institut conteste la façon dont l’Employeur applique et interprète la convention collective.

Conformément à larticle 21 portant sur les droits dinscription de la convention collective du groupe Services de santé (SH) conclue entre l’IPFPC et le Conseil du Trésor :

21.01 L’employeur rembourse à l’employé les cotisations, les droits d’inscription ou tout autre droit qu’il a versés à un ou plusieurs organismes ou corporations dans la mesure où l’employeur est convaincu qu’un tel versement est nécessaire à l’exercice continu des fonctions de l’employé.

De plus, conformément à l’article 1 de la convention collective du groupe Services de santé (SH) conclue entre l’IPFPC et le Conseil du Trésor :

1.02 Les parties à la présente convention ont un désir commun d’améliorer la qualité de la fonction publique du Canada, d’appliquer des normes professionnelles et de favoriser le bien‑être des employés et l’accroissement de leur efficacité afin que les Canadiens soient servis convenablement et efficacement. Par conséquent, elles sont décidées à établir, dans le cadre des lois existantes, des rapports de travail efficaces à tous les niveaux de la fonction publique auxquels appartiennent les employés faisant partie de l’unité de négociation.

Mesures correctives

L’Institut demande une réparation complète, y compris, sans toutefois s’y limiter :

  • i. une déclaration selon laquelle l’employeur a violé la convention collective du groupeSH;

  • ii. une déclaration selon laquelle les droits liés au PPC constituent des droits au sens de larticle21 de la convention collective du groupe SH;

  • iii. une ordonnance enjoignant à l’employeur de rembourser les frais liés au PPC à tous ses médecins autorisés en Ontario;

  • iv. toute réparation que lIPFPC peut demander et estime juste dans les circonstances et que la Commission peut autoriser.

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

[11]  La décision de l’employeur relative au grief de principe au dossier 569‑02‑175 est datée du 2 septembre 2015. Elle se lit en partie comme suit :

[Traduction]

[…]

Dans le grief, l’IPFPC énonce que le 7 février 2014, Emploi et Développement social Canada a informé les conseillers médicaux de sa division de l’expertise médicale qu’il ne rembourserait pas les frais liés au programme de perfectionnement professionnel continu (PPC) mis en œuvre en 2013 par l’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario (OMCO). L’IPFPC allègue que l’employeur a contrevenu à l’article 21 de la convention collective conclue entre l’IPFPC et le Conseil du Trésor à l’égard du groupe Services de santé (SH).

[…]

L’agent négociateur fait valoir que les conseillers médicaux ont droit à un remboursement relatif au PPC, conformément à l’article 21 de la convention collective du groupe SH parce que le PPC constitue une condition relative au maintien d’une licence médicale à jour et valide dans une province ou un territoire du Canada.

Dans le cadre de l’examen des faits en l’espèce, je constate que la disposition pertinente pour régler cette question n’est pas l’article 21 de la convention collective, mais l’alinéa 18.04a)(i), qui porte sur la formation professionnelle continue nécessaire pour satisfaire aux normes actuelles de délivrance de licences. La clause énonce ce qui suit :

18.04 Perfectionnement professionnel

a.  Les parties à la présente convention ont un même désir d’améliorer les normes professionnelles en donnant aux employés la possibilité, à l’occasion :

i.  participer à des ateliers, des cours de brève durée, des programmes externes semblables ou des cours d’éducation permanente afin de maintenir leurs connaissances et compétences dans leur domaine respectif, d’obtenir les crédits particuliers nécessaires pour satisfaire ou continuer de satisfaire aux normes d’enregistrement ou de délivrance de licences liées à leur profession.

Le PPC répond aux critères d’un cours d’éducation permanente qui permet à vos membres de maintenir leurs connaissances et compétences dans leur domaine respectif, dobtenir les crédits particuliers nécessaires pour satisfaire ou continue de satisfaire aux normes d’enregistrement ou de délivrance de licences liées à leur profession visées à l’alinéa 18.04a)(i).

En outre, je fais remarquer que les droits visés à larticle 21 visent l’enregistrement ou ladhésion à un organisme ou à une organisation professionnelle. Il ne vise pas linscription aux programmes de perfectionnement professionnel. Les coûts assumés par lemployeur ne visent pas les exigences indirectes, comme le PPC.

Par conséquent, je conclus que les conseillers médicaux n’ont pas droit au remboursement du PPC en vertu de l’article 21 de la convention collective du groupe SH et le grief est donc rejeté.

[12]  Aucune des parties ne conteste que le grief et la décision de l’employeur à son égard s’appliquent tous les deux aux frais de suivi du PPC.

[13]  Le 12 mars 2014, l’agent négociateur a également déposé le grief de principe au dossier 569‑02‑178, qui est ainsi rédigé :

Énoncé de grief

L'Institut professionnel de la fonction publique du Canada présente un grief de principe conformément à l'article 220 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP a. 220).

L'Institut considère que l'employeur a violé, erré dans l'application et mal interprété l'article 21 (Droit d'inscription) ainsi que toute autre disposition pertinente de la convention collective des Services de santé (SH) liant le Conseil du Trésor et l'Institut professionnel de la fonction publique du Canada.

Le 7 février 2014, le ministère Emploi et développement social Canada (EDSC) a informé les conseillers médicaux de la Division de l'expertise médicale du ministère que celui-ci ne rembourserait plus les frais d'assurance responsabilité professionnelle de ses médecins détenant un permis d'exercice au Québec.

L'Institut conteste l'interprétation et l'application erronée de la convention collective par l'employeur.

L'article 21 sur les droits d'inscription de la convention collective SH liant l’Institut et le Conseil du Trésor prévoit que :

21.01 L'employeur rembourse à l'employé les cotisations, les droits d’inscription ou tout autre droit qu'il a versés à un ou plusieurs organismes ou corporations dans la mesure où l'employeur est convaincu qu'un tel versement est nécessaire à l'exercice continu des fonctions de l'Employé.

De plus, conformément à l'article 1 de la convention collective SH liant l’Institut et le Conseil du Trésor :

1.02 Les parties à la présente convention collective ont un désir commun d'améliorer la qualité de la fonction publique du Canada, d’appliquer des normes professionnelles et de favoriser le bien-être des employés et l'accroissement de leur efficacité afin que les Canadiens soient servis convenablement et efficacement. Par conséquent, elles sont décidées à établir, dans le cadre des lois existantes, des rapports pratiques et efficaces à tous les niveaux de la fonction publique auxquels appartiennent les employés faisant partie de l'unité de négociation.

Mesures correctives

L'Institut cherche à obtenir toute mesure corrective permettant de remédier complètement à la situation incluant mais sans se limiter à :

  • i. Une déclaration que l'employeur a violé la convention collective SH;

  • ii. Une déclaration que les frais d'assurance responsabilité professionnelle entre dans le cadre de l'article 21 de la convention collective SH;

  • iii. Un ordre que l'employeur rembourse les frais d'assurances responsabilité professionnelle de ses médecins titulaires d’un permis d'exercice au Québec;

  • iv. Toute autre mesure que l’Institut pourrait demander et considère juste dans les circonstances et que la Commission pourrait accorder.

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

[14]  La décision de l’employeur relative au grief de principe au dossier 569‑02‑178 est datée du 29 juillet 2015. Elle se lit en partie comme suit :

[Traduction]

[…]

Dans le grief, l’IPFPC énonce que, le 7 février 2014, Emploi et Développement social Canada (EDSC) a informé les conseillers médicaux de sa division de l’expertise médicale qu’il ne rembourserait pas les primes d’assurance responsabilité professionnelle aux médecins ayant le droit de pratiquer au Québec. L’IPFPC allègue que l’employeur a contrevenu à l’article 21 de la convention collective conclue entre l’IPFPC et le Conseil du Trésor à l’égard du groupe Services de santé (SH).

[…]

L’agent négociateur fait valoir que les conseillers médicaux au Québec ont droit à un remboursement relatif à l’assurance responsabilité professionnelle, conformément à l’article 21 de la convention collective du groupe SH parce qu’elle constitue une condition nécessaire au maintien d’une licence médicale à jour et valide dans cette province du Canada.

Je fais remarquer tout d’abord que l’article 21 vise [traduction] « les cotisations, les droits d’inscription ou droits qui y sont liés ». Il ne vise pas les primes payées en vertu d’un contrat d’assurance, lesquelles ne sont pas de même nature ou ne comportent pas les mêmes caractéristiques que les cotisations ou les droits d’inscription. De plus, dans le cadre de l’examen des faits de l’espèce, je constate que les droits visés à l’article 21 correspondent à des exigences directes exigées par l’employeur. Les coûts assumés par l’employeur ne visent pas les exigences indirectes, comme les primes d’assurance responsabilité professionnelle.

En outre, je fais remarquer que larticle 3.03 du Règlement sur l’assurance responsabilité professionnelle des médecins, CQLR c M‑ 9, r. 15 (le Règlement), prévoit quun médecin n’est pas tenu de détenir et maintenir en vigueur un contrat d’assurance sil nexerce en aucune circonstance lune des activités mentionnées à larticle 31 de la Loi médicale. EDSC n’exige pas que ses conseillers médicaux exercent l’une des activités mentionnées à l’article 31 de la Loi médicale et, en conséquence, les conseillers médicaux peuvent remplir le formulaire à l’annexe 1 du Règlement et déclarer qu’ils n’exercent aucune des activités.

Par conséquent, je conclus que les conseillers médicaux n’ont pas droit au remboursement des primes d’assurance responsabilité professionnelle en vertu de l’article 21 de la convention collective du groupe SH et le grief est donc rejeté.

III.  Questions en litige

[15]  Voici les questions en litige :

A.  Grief de principe au dossier 569‑02‑175 : L’employeur interprète‑t‑il mal l’article 21 de la convention collective du groupe SH lorsqu’il refuse de rembourser aux conseillers médicaux d’EDSC leurs frais de suivi du PPC en Ontario?

B.  Grief de principe au dossier 569‑02‑178 :

1.  Question en litige 1 – L’employeur interprète‑t‑il mal l’article 21 de la convention collective du groupe SH lorsqu’il refuse de rembourser les conseillers médicaux d’EDSC qui travaillent au Québec leurs primes d’assurance responsabilité professionnelle?

2.  Question en litige 2 – L’agent négociateur m’a également demandé si, lorsqu’il refuse de rembourser les primes d’assurance responsabilité professionnelle des conseillers médicaux d’EDSC qui travaillent au Québec, l’employeur interprète mal l’article 5 de la convention collective du groupe SH et ses obligations et fonctions implicites qui exigent que la direction exerce correctement son pouvoir discrétionnaire?

IV.  Analyse

A.  Grief de principe au dossier 569‑02‑175 : L’employeur interprète‑t‑il mal l’article 21 de la convention collective du groupe SH lorsqu’il refuse de rembourser aux conseillers médicaux d’EDSC leurs frais de suivi du PPC en Ontario?

[16]  L’agent négociateur a cité à témoigner Pierre Bourassa, conseiller médical, Division de l’expertise médicale, Direction des prestations d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC), Sécurité du revenu et développement social, EDSC. L’employeur a cité à témoigner Me Marc Racine, le directeur de cette division.

[17]  M. Bourassa détient une licence médicale au Québec et en Ontario. Il est employé par EDSC dans sa Division de l’expertise médicale. Il occupe un poste au groupe et niveau MD‑MOF‑02 depuis juillet 2001. Depuis 2005, il travaille au Québec. En plus de son travail à EDSC, le Dr Bourassa est médecin d’urgence à temps partiel à un hôpital et coroner à temps partiel pour la province de Québec. En général, au courant d’une semaine, il travaille l’équivalent de trois jours à EDSC, un jour à l’urgence de l’hôpital, et deux tiers d’une journée en tant que coroner.

[18]  À EDSC, le Dr Bourassa effectue des évaluations médicales des dossiers. Il reçoit des dossiers contenant des rapports médicaux, des résultats des examens médicaux et des avis de médecins. Ces renseignements sont fournis par les demandeurs (les demandeurs de prestations d’invalidité du RPC qui interjettent appel du refus de leur admissibilité aux prestations d’invalidité du RPC). Le travail du Dr Bourassa consiste à donner son avis sur le pronostic et le traitement d’un problème médical ou d’une maladie, ainsi que sur l’évolution du problème médical du demandeur. Il peut aussi demander une évaluation médicale indépendante. En conséquence, il aborde les questions de diagnostic, de limitations, de répercussions sur la capacité d’un demandeur de gagner son revenu, sur sa capacité de travailler, entre autres. Il travaille en français et en anglais. Plus particulièrement, il produit des rapports dans les deux langues.

[19]  Le Dr Bourassa a témoigné que les conseillers médicaux devaient détenir une licence médicale pour garder leur emploi à EDSC. De plus, leur description de travail, à la page 2, comprend l’activité ou l’exigence principale de [traduction] « se tenir au courant des nouvelles avancées médicales qui influent sur la détermination et la gestion des dossiers d’invalidité. » 

[20]  Il a indiqué qu’il avait été embauché à EDSC parce qu’il pratique la médecine. En 2007, sa description de travail indiquait que son rôle était, entre autres, comme suit :

[Traduction]

Key Activities – Activités principales

Effectue une évaluation médicale des dossiers des clients qui touchent des prestations dinvalidité du RPC qui interjettent appel du refus de leur admissibilité aux prestations dinvalidité du RPC et effectue une évaluation non médicale de la conformité du dossier avec les dispositions législatives et assure un examen équitable de la situation particulière de lappelant et lapplication uniforme des dispositions du Programme de prestations d’invalidité du RPC.

Examine, analyse et évalue les décisions du Tribunal de révision, de la Commission d’appel des pensions et de la Cour fédérale et formule des recommandations quant à la gestion des dossiers et aux appels à l’intention du conseiller médical principal.

[…]

[21]  Le Dr Bourassa a expliqué que, dans le passé, son rôle consistait notamment à témoigner en tant qu’expert médical devant divers tribunaux de révision. En raison du fait qu’il pratiquait la médecine, il avait davantage de crédibilité. Il a donné un avis d’expert à l’égard des dossiers. En outre, en sa qualité de témoin, il a fait l’objet de contre‑interrogatoires de la part de la partie adverse. En conséquence, il devait posséder une expérience de la pratique de la médecine pour faire son travail. De même, il a expliqué que lorsqu’il a été embauché, l’employeur l’a assuré qu’il paierait sa licence médicale, les droits de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (la « FMOQ ») (cotisations de l’association), l’assurance et la formation continue. Le Dr Bourassa a confirmé que tous les médecins du groupe et niveau MD‑MOF‑02, comme lui, détiennent une licence médicale.

[22]  Il détient des licences médicales du Collège des médecins du Québec (le « CMQ ») et de l’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario (l’« OMCO »). Il est également un membre de la FMOQ et de l’Association canadienne de protection médicale (l’« ACPM »).

[23]  Le Dr Bourassa a expliqué qu’il est également membre du Collège des médecins de famille du Canada (« CMFC »), qui fait le suivi de ses heures de formation professionnelle. Il a expliqué que, depuis 2014, il devait être membre du CMFC puisque l’OMCO lui avait demandé de compiler les heures de formation des médecins. Puisqu’il doit démontrer chaque année à l’OMCO qu’il a suivi toute la formation continue obligatoire requise pour renouveler sa licence en Ontario, il doit payer des droits au CMFC afin que celui‑ci fasse le suivi de ses heures de formation et confirme le nombre d’heures de formation qu’il a suivi. Les activités de PPC sont obligatoires en Ontario.

[24]  Afin de démontrer la nécessité de faire suivre ses activités de PPC par le CMFC, le Dr Bourassa a déposé en preuve une copie d’une lettre datée du 25 mars 2013, qu’il a reçue de l’OMCO. Elle précisait, entre autres, ce qui suit :

[Traduction]

[…]

[…] Ces modifications [apportées au règlement « Quality Assurance »] sont entrées en vigueur en 2011 et elles exigent que tous les médecins participent à un programme de PPC qui répond aux exigences établies par le CMFC ou par le CRMCC [Collège royal des médecins et chirurgiens du Canada] ou d’une autre organisation approuvée par le Conseil et fournir une preuve de leur participation. Lors de sa réunion du 26 février 2013, le Conseil a approuvé l’Association des Omnipraticiens(nes) Psychothérapeutes (AOP) en tant qu’autre organisation.

Votre sondage annuel de renouvellement de 2012 a indiqué que vous ne participez pas à un programme de PPC approuvé, même si vous répondez peut‑être à leurs conditions dans le cadre de vos propres activités de PPC autodirigées. Puisque vous devez déclarer vos activités de PPC dans le cadre d’une organisation approuvée, je vous encourage à examiner les programmes des organisations approuvées et d’en devenir membre afin de commencer à suivre officiellement vos activités de PPC.

[…]

Le Collège s’attend à ce que lorsque vous aurez achevé votre renouvellement annuel en 2013, vous vous conformiez au Règlement. Si vous ne le faites pas, un examen des renseignements relatifs à votre pratique et à toute autre considération pertinente sera mené, ce qui est susceptible de donner lieu à une évaluation de votre pratique (à vos frais) ou à une enquête concernant votre inobservation.

[…]

[25]  Le 28 mai 2013, le Dr Bourassa a envoyé à son nouveau directeur, soit James van Raalte, un courriel au sujet du suivi des activités de PPC. Voici une partie de son courriel :

[Traduction]

[…]

Je crois comprendre que cette année, en raison du suivi obligatoire du PPC, il s’ajoute au montant, mais ne pourrions‑nous pas être rémunérés des montants semblables à ceux de l’année dernière, en attendant l’examen de la nature obligatoire du suivi du PPC. Après tout, les frais de suivi du PPC sont obligatoires, alors pourquoi le gouvernement ne l’accepte‑t‑il pas? Nous avons des lettres de nos collèges qui nous disent que nous allons faire l’objet d’une enquête si nous ne sommes pas membres de ces associations qui font le suivi de notre EMC. Il me semble assez évident que c’est obligatoire.

[…]

[26]   Ensuite, le 4 juillet 2013, M. van Raalte a informé les conseillers médicaux que le sous‑ministre avait approuvé le remboursement de leurs frais liés au suivi de leurs activités de PPC.

[27]  Le Dr Bourassa a précisé qu’en demandant le remboursement du montant qu’il avait versé au CMFC, il ne demandait pas l’autorisation d’assister à une conférence. Il demandait plutôt à l’employeur de lui rembourser les droits qu’il a versés à l’organisation qui fait le suivi de ses heures de formation. À son avis, il avait droit au remboursement de ces droits en vertu de l’article 21 de la convention collective du groupe SH parce que s’il ne les payait pas, l’organisation n’effectuerait pas le suivi de ses heures de formation et sa licence médicale serait restreinte ou révoquée.

[28]  Le 7 février 2014, Patricia Wilson, directrice par intérim, Division de l’expertise médicale, Direction des prestations d’invalidité du Régime de pensions du Canada, Sécurité du revenu et développement social, EDSC, a informé les conseillers médicaux d’EDSC de ce qui suit :

[Traduction]

[…]

Le présent courriel a pour objet de clarifier la disposition de la convention collective ayant trait à l’article 21 qui énonce ce qui suit : « L’employeur rembourse à l’employé les cotisations, les droits d’inscription ou tout autre droit qu’il verse à un ou plusieurs organismes ou corporations dans la mesure où l’employeur est convaincu qu’un tel versement est nécessaire à l’exercice continu des fonctions de l’employé. »

Remboursement des cotisations des conseillers médicaux

Les dispositions de la convention collective concernant le remboursement des frais énoncent que l’employeur doit rembourser le paiement des cotisations ou des droits d’inscription s’il est nécessaire à l’exercice continu des fonctions du poste, mais elles ne prévoient pas le remboursement des frais de scolarité aux fins du perfectionnement professionnel.

En ce sens, les « frais de perfectionnement professionnel continu » sont considérés comme des frais de scolarités et ne seront pas remboursés par lemployeur.

Toutefois, Emploi et Développement social Canada reconnaît que, pour maintenir et améliorer l’expertise professionnelle, les employés doivent avoir des occasions d’apprentissage afin d’assister à des activités de perfectionnement professionnel ou d’y participer et ils sont invités à discuter de la possibilité d’inclure la formation requise dans leur plan d’apprentissage.

[…]

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

[29]  Puisque sa demande ne concernait que ses frais de suivi, le Dr Bourassa a envoyé un courriel à des fins de clarification. Le 12 mars 2014, il a envoyé un courriel et a demandé le [traduction] « remboursement de [ses] dépenses liées à l’ensemble de ses frais d’éducation médicale continue (suivi de l’EMC). » Son message indiquait ce qui suit : [traduction] « Voici le reçu du montant de 410 $ payés en 2013. Veuillez m’informer par écrit (note ou courriel) si ce montant ne sera pas remboursé. »

[30]  Le 27 mars 2014, Mme Wilson a envoyé le courriel suivant au Dr Bourassa :

[Traduction]

[…]

Je réponds à votre courriel ci‑dessous. Conformément à mon courriel du 7 février 2014, EDSC ne sera pas en mesure de rembourser les frais de suivi de l’EMC de 2013. Selon ce courriel, je suis heureuse de discuter de la possibilité d’inclure les frais de 2014 dans le cadre du plan d’apprentissage de 2014‑2015.

[…]

[31]   En contre‑interrogatoire, le Dr Bourassa a reconnu que chaque année, il acquiert des crédits de PPC et qu’en vertu de l’article 18 de la convention collective du groupe SH, l’employeur rembourse les frais d’ateliers, de cours et de programmes semblables qui offrent des services externes ou des cours d’éducation continue, y compris ses droits au CMFC pour le regroupement de ses heures de formation.

[32]  Le Dr Bourassa a également reconnu que l’outil utilisé par le CMFC pour regrouper les heures de formation suivies par les médecins s’appelle « Mainpro ». Un extrait d’un document rédigé par l’OMCO en 2012 intitulé « Dialogue » lui a été montré et il a déclaré le connaître; l’extrait a été déposé en preuve. Un des sujets est le suivi des activités de PPC. Les médecins ont été informés que leur PPC était maintenant obligatoire. En raison du fait que le suivi des crédits de PPC constituerait une nouvelle expérience pour certains médecins, l’OMCO a regroupé un certain nombre de questions fréquemment posées, dont en voici quelques‑unes :

[Traduction]

[…]

Q. Je ne suis membre d’aucun organisme national [le CMFC ou le CRMCC]. L’un des collèges me permettra‑t‑il de suivre mon PPC avec lui?

Oui. Depuis 2006, le CMFC et le CRMCC ont tous les deux mis au point des services de suivi pour plusieurs milliers de médecins qui ne sont membres d’aucun organisme. Si les médecins choisissent de recourir aux services des organismes nationaux pour suivre le PPC, ce service correspondra aux mêmes exigences que celles auxquelles les membres sont assujettis. Ce service comporte des frais.

Q : Et si je veux qu’une autre organisation fasse le suivi de mon PPC pour mon compte?

Est‑ce possible? Le règlement prévoit une solution de rechange pour les médecins qui souhaitent sacquitter de ses obligations en matière de PPC avec des organisations autres que les deux organismes nationaux. Toutefois ces organisations doivent être approuvées par le Collège.

[…]

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

[33]  Me Racine est un avocat et membre du Barreau de l’Ontario, en plus d’être le directeur de la Division de l’expertise médicale. Il est chargé des cas d’invalidité qui sont renvoyés au Tribunal de la sécurité sociale du Canada. À la date d’audience, il a dirigé une équipe de 11 médecins qui examine les dossiers et qui offre des conseils.

[34]  Me Racine explique que les conseillers médicaux examinent les dossiers, offrent des analyses médicales et non médicales en fonction des critères de la loi et donnent des directives aux services juridiques de l’employeur. Auparavant, les conseillers médicaux comparaissaient devant la Commission d’appel des pensions dont le mandat était de décider si les éléments de preuve étayaient une décision d’accorder des prestations. Ils ont également comparu devant la Cour fédérale. Il a expliqué que le Tribunal de la sécurité sociale avait été créé en 2013 et que la description de travail des conseillers médicaux de 2007 n’avait pas été mise à jour. En conséquence, elle fait référence à leurs fonctions antérieures. Toutefois, depuis la création du Tribunal de la sécurité sociale, leur rôle ne consistait plus à témoigner devant un tribunal.

[35]  Me Racine a expliqué que la procédure de révision des cas de refus de prestations a changé. Un arbitre ministériel peut accorder ou non des prestations, selon les critères de la loi et il peut réexaminer une décision, en fonction de nouveaux éléments de preuve. Ensuite, si les prestations sont refusées et l’affaire est portée devant le Tribunal de la sécurité sociale, l’arbitre représente EDSC. Il ou elle reçoit des recommandations des conseillers médicaux. Enfin, l’affaire peut être portée devant la Division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale. À ce stade, les conseillers médicaux formulent des recommandations à l’intention de l’avocat si l’autorisation d’appel est accordée. Par conséquent, les conseillers médicaux ne témoignent plus devant un tribunal ou une cour.

[36]  Me Racine a confirmé que les conseillers médicaux embauchés par le Ministère doivent être des membres en règle d’un ordre des médecins provincial et ils doivent posséder une expérience pratique au niveau clinique. Il a également reconnu que les conseillers médicaux doivent suivre un PPC pour conserver leur licence médicale. Plus particulièrement, le par. 29(1) de l’Ontario Regulation 114/94, pris en vertu de la Loi de 1991 sur les médecins (L.O. 1991, chap. 30), précise que les [traduction] « Membres doivent participer à un programme de perfectionnement professionnel continu […] ».

[37]  Me Racine est également au courant du fait que Mainpro constitue un programme de CMFC utilisé par les médecins de famille pour consigner et surveiller leurs progrès en matière de PPC. Tous les collèges de médecins au Canada s’assurent que leurs membres répondent à toutes les exigences en matière de délivrance de licences et ils peuvent utiliser la certification Mainpro pour vérifier leurs progrès en matière de PPC.

[38]  Toutefois, Me Racine a expliqué qu’un médecin n’est pas tenu d’être membre du CMFC pour acquérir des crédits dans Mainpro. L’employeur a déposé en preuve des exemples de reçus officiels qui lui ont été présentés par des conseillers médicaux qui ont versé des paiements de « Mainpro – non‑membre » dans le passé. Les médecins peuvent présenter une demande pour devenir des participants non membres de Mainpro et se voir attribuer un cycle Mainpro de cinq ans. Les membres du CMFC et les participants non membres de Mainpro peuvent demander des crédits Mainpro au titre d’activités de PPC.

[39]  Me Racine a expliqué que l’employeur rembourse aux conseillers médicaux leur paiement de participant non membre de Mainpro de la même manière qu’il leur rembourse leurs frais de participation à une conférence ou à une formation. Il a déposé en preuve un tableau indiquant que pour chaque conseiller médical à EDSC, les frais de formation (les cours ou les ateliers) et les [traduction] « Crédits Mainpro – Droits du CMFC » seront tous les deux remboursés en 2014‑2015 et en 2016‑2017. Me Racine a expliqué que ces dépenses, engagées par les conseillers médicaux, seront remboursées en vertu des clauses 18.03 et 18.04 de la convention collective, qui sont ainsi rédigées :

18.03 Présence aux conférences et aux congrès

  1. Les parties à la présente convention reconnaissent que la présence ou la participation à des conférences, congrès, colloques, réunions scientifiques, ateliers et autres activités semblables contribue au maintien de normes professionnelles élevées.

  2. Afin de bénéficier d’un échange de connaissances et d’expérience, un employé a le droit d’assister de temps à autre à des conférences et des congrès qui se rattachent à son domaine de spécialisation, sous réserve des nécessités du service.

  3. L’employeur peut accorder un congé payé et un montant de dépenses de voyage raisonnables, y compris les droits d’inscription, pour assister à ces rencontres, sous réserve des contraintes budgétaires et des nécessités du service.

  4. L’employé qui assiste à une conférence ou à un congrès à la demande de l’employeur pour représenter les intérêts de l’employeur est réputé être en fonction et, au besoin, en situation de déplacement. L’employeur défraie les droits d’inscription à la conférence ou au congrès lorsque l’employé est obligé d’y assister.

  5. L’employé invité à participer à une conférence ou à un congrès à titre officiel, par exemple pour présenter une communication officielle ou pour donner un cours se rattachant à son domaine d’emploi, peut bénéficier d’un congé payé à cette fin et peut, en plus, recevoir le remboursement des droits d’inscription à une conférence ou à un congrès et de ses dépenses de voyage raisonnables.

  6. L’employé n’a pas droit à une rémunération en vertu de l’article 9, Heures supplémentaires, et 13, Temps de déplacement, pour les heures passées à la conférence ou au congrès et pour celles passées en voyage à destination ou en provenance d’une conférence ou d’un congrès, conformément aux dispositions du présent paragraphe, sauf dans les circonstances prévues à l’alinéa d) ci‑dessus.

  7. Sous réserve des contraintes budgétaires et opérationnelles, l’employeur fait tout effort raisonnable pour accepter les changements de postes ou changements de jours de repos nécessaires afin de permettre la présence à des conférences, congrès, colloques, réunions scientifiques, ateliers et autres activités semblables pendant les heures de travail.

18.04 Perfectionnement professionnel

  1. Les parties à la présente convention ont un même désir d’améliorer les normes professionnelles en donnant aux employés la possibilité, à l’occasion :

  1. participer à des ateliers, des cours de brève durée, des programmes externes semblables ou des cours d’éducation permanente afin de maintenir leurs connaissances et compétences dans leur domaine respectif, d’obtenir les crédits particuliers nécessaires pour satisfaire ou continuer de satisfaire aux normes d’enregistrement ou de délivrance de licences liées à leur profession.

  2. de mener des recherches ou d’exécuter des travaux se rattachant à leur programme de recherche normal dans des établissements ou des endroits autres que ceux de l’employeur, incluant, sous réserve de l’approbation de l’Employeur, la présentation des résultats de travaux de recherche à des organismes externes.
    ou

  3. d’effectuer des recherches dans le domaine de spécialisation de l’employé qui n’est pas directement relié aux projets qui lui sont assignés lorsque, de l’avis de l’employeur, ces recherches permettront à l’employé de mieux remplir ses tâches actuelles, incluant, sous réserve de l’approbation de l’Employeur, la présentation des résultats de travaux de recherche à des organismes externes.

  1. Sous réserve de l’approbation de l’employeur, un employé recevra un congé payé pour prendre part aux activités décrites à l’alinéa 18.04a).

  2. L’employé peut faire, n’importe quand, une demande relative au perfectionnement professionnel, en vertu du présent paragraphe, et l’employeur peut choisir un employé, n’importe quand, pour le faire bénéficier d’un tel perfectionnement professionnel.

  3. Lorsqu’un employé est choisi par l’employeur pour bénéficier d’un perfectionnement professionnel, en vertu du présent paragraphe, l’employeur consulte l’employé avant de déterminer l’endroit et la durée du programme de travail ou d’études à entreprendre.

  4. L’employé choisi pour bénéficier d’un perfectionnement professionnel, en vertu du présent paragraphe, continue de toucher sa rémunération normale, y compris toute augmentation à laquelle il peut devenir admissible. L’employé n’a droit à aucune espèce de rémunération en vertu de l’article 9, Heures supplémentaires, et 13, Temps de déplacement, durant le temps passé à un stage de perfectionnement professionnel prévu dans le présent paragraphe.

  5.  

  1. L’employé qui suit un programme de perfectionnement professionnel, en vertu du présent paragraphe, peut être remboursé de ses dépenses de voyage raisonnables et des autres dépenses que l’employeur juge appropriées.

Le sous‑alinéa f)(ii) s’applique seulement aux NU‑CHN de Santé Canada qui travaillent à la Direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits (DGSPNI).

  1. L’employé qui est inscrit au programme d’habilités en soins primaires est réputé être en situation de voyage.

  1. Sous réserve des contraintes budgétaires et opérationnelles, l’employeur fait tout effort raisonnable pour accepter les changements de postes ou changements de jours de repos nécessaires pour faciliter la participation à des ateliers, à des cours de brève durée, à des programmes externes semblables ou à des cours d’éducation permanente pendant les heures de travail.

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

[40]  Me Racine a expliqué que l’employeur estime que les coûts de Mainpro font partie intégrante du perfectionnement professionnel. Mainpro permet de suivre la formation que les médecins ont suivie.

[41]  Me Racine a expliqué que l’employeur ne rembourse pas les frais de suivi de l’EMC en vertu de l’article 21 puisque les médecins ne sont pas tenus d’être membres du CMFC. Par souci de précision, Mainpro n’est pas une licence et les médecins ne sont pas tenus d’être membres du CMFC pour que leurs heures de formation soient suivies à l’aide de Mainpro.

[42]  L’employeur rembourse donc les frais de suivi de PPC des conseillers médicaux en vertu de l’article 18 de la convention collective du groupe SH. Il est d’avis que ces frais répondent aux critères d’un cours d’éducation continu qui permettent aux conseillers médicaux de se tenir à jour en ce qui concerne les connaissances et les compétences dans leur domaine respectif et d’acquérir leurs crédits de perfectionnement continu particulier nécessaires pour achever ou respecter les normes actuelles en matière de délivrance de licence ou d’enregistrement prévues à l’alinéa 18.04a)(i) de la convention collective du groupe SH.

[43]  À l’audience, l’agent négociateur a indiqué qu’il voulait que je tranche la question suivante : L’employeur viole‑t‑il l’article 21 de la convention collective du groupe SH lorsqu’il ne rembourse pas aux conseillers médicaux d’EDSC leurs frais de suivi de PPC alors que l’article énonce : « […] les cotisations, les droits d’inscription ou tout autre droit qu’il a versés à un ou plusieurs organismes ou corporations […] » lorsque le paiement de tels droits « […] est nécessaire à l’exercice continu des fonctions de l’employé »?

[44]  À l’appui de sa thèse selon laquelle l’article 21 s’applique en l’espèce, l’agent négociateur a présenté les arguments suivants.

[45]  L’agent négociateur m’a renvoyé au paragraphe 4:2120 de Brown et Beatty, Canadian Labour Arbitration, qui énonce, en partie, ce qui suit :

[Traduction]

[…]

Selon une autre ligne directrice générale connexe en matière d’interprétation, dans le cadre de l’interprétation d’une convention collective, il faut présumer que tous les mots utilisés étaient censés avoir un sens. Il faut également présumer qu’ils n’étaient pas censés être en conflit. Toutefois, si la seule interprétation possible entraîne ce résultat, le règlement du conflit qui en découle peut être effectué en appliquant les hypothèses suivantes : les dispositions spéciales ou particulières auront préséance sur les dispositions générales. […]

[46]  L’agent négociateur m’a également renvoyé à Association des pilotes fédéraux du Canada c. Conseil du Trésor, 2017 CRTEFP 13. Le paragraphe 26 de cette décision énonce ce qui suit :

[26] Même s’il est vrai qu’au moment d’appliquer ou d’interpréter une convention collective, l’objectif premier est de rechercher l’intention des parties, il faut commencer l’analyse par le libellé exact que les parties ont accepté. Si ce libellé est clair et sans équivoque, nul besoin d’aller au‑delà des mots, et il y a lieu de donner effet aux mots que les parties ont choisis, à moins qu’en faire autant ne conduise à une absurdité.

[47]  L’agent négociateur fait valoir que le libellé de l’article 21 est clair et sans ambiguïté et que je devrais donner effet aux mots choisis par les parties, à moins qu’en faire autant ne conduise à une absurdité. Il soutient que le libellé clair de l’article 21 devrait s’appliquer en l’espèce. Le Dr Bourassa a expliqué que les frais de suivi du PPC sont liés « […] [aux] cotisations, [aux] droits d’inscription ou [à] tout autre droit qu’il a versé à un ou plusieurs organismes ou corporations […] ». Il a expliqué que l’OMCO, l’un de ses organismes de réglementation puisqu’il est autorisé à pratiquer la médecine en Ontario et au Québec, exige qu’il participe à des programmes de PPC. Toutefois, l’OMCO a décidé que seules certaines organisations qu’il reconnaît peuvent faire le suivi de ses heures de PPC; le CMFC en est un. Le Dr Bourassa a déclaré que si ses heures de formation n’étaient pas consignées par l’une de ces organisations reconnues, cela pourrait avoir une incidence sur sa licence médicale, qui pourrait être restreinte ou révoquée. De plus, les conseillers médicaux sont tenus de tenir une licence médicale pour conserver leur emploi en tant que conseillers médicaux à l’EDSC.

[48]  L’agent négociateur soutient que si l’employeur a choisi d’interpréter l’article 21 d’une manière qui le rend inapplicable – il rembourse aux conseillers médicaux les frais de suivi du PPC en vertu de l’article 18 – le fait d’appliquer son interprétation encouragerait une tendance qui rendrait l’article 21 superflu ou inutile. Cela conduirait à une absurdité, comme il est mentionné dans Association des pilotes fédéraux du Canada. Tous les mots d’une convention collective sont censés avoir un sens et toutes les conventions collectives doivent être lues et interprétées dans leur ensemble.

[49]  En résumé, selon l’agent négociateur, compte tenu des articles 18 et 21, il est plus raisonnable de déterminer que les parties avaient l’intention d’activer l’article 21 lorsqu’il existe un lien entre un droit d’adhésion ou d’inscription et la condition de travail. Il s’agit du facteur distinctif le plus clair entre la clause 18.04 et l’article 21. Cette interprétation continuerait de donner un sens aux mots de la convention collective du groupe SH, y compris l’énoncé prévu à la clause 1.02, qui est ainsi rédigé :

1.02 Les parties à la présente convention ont un désir commun d’améliorer la qualité de la fonction publique du Canada, d’appliquer des normes professionnelles et de favoriser le bien‑être des employés et l’accroissement de leur efficacité afin que les Canadiens soient servis convenablement et efficacement. Par conséquent, elles sont décidées à établir, dans le cadre des lois existantes, des rapports de travail efficaces à tous les niveaux de la fonction publique auxquels appartiennent les employés faisant partie de l’unité de négociation.

[50]  Pour sa part, l’employeur a porté mon attention au passage suivant d’Irving Pulp & Paper Ltd. v. Communications, Energy and Paperworkers Union of Canada, Local 30, 2002 NBCA 30, au par. 10 :

[Traduction]

 

[10] […] En résumé, il faut donner aux mots d’une convention collective leur sens ordinaire normal à moins d’avoir une raison valable d’en adopter un autre. De même, les mots doivent être interprétés dans leur contexte immédiat et dans le contexte de la convention prise dans son ensemble. Autrement, l’interprétation basée sur le sens normal pourrait être incompatible avec une autre disposition.

[51]  L’employeur m’a également renvoyé au paragraphe 28 de Foote c. Conseil du Trésor (Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux), 2009 CRTFP 142, qui énonce ce qui suit :

[28] Pour déterminer le sens normal ordinaire des mots, le point de départ est qu’on suppose que les parties voulaient dire ce qu’elles ont dit. Il peut arriver à l’occasion qu’un arbitre ou un arbitre de grief doive déduire la présence implicite d’un mot, mais cela se produit seulement lorsqu’il faut donner à la convention collective l’efficacité d’une convention collective ou commerciale, et ce seulement s’il est déterminé que les parties se seraient entendues sans hésitation sur le terme implicite dans l’éventualité où elles auraient été informées d’une telle lacune (voir Brown et Beatty, 4:2100).

[52]  L’employeur fait valoir que l’OMCO a approuvé Mainpro, qui est utilisé pour suivre les activités de PPC des médecins en Ontario. Toutefois, il soutient que les éléments de preuve permettent d’établir qu’un médecin n’est pas tenu d’être un membre du CMFC ou d’une autre organisation pour utiliser Mainpro. Il m’a renvoyée à un extrait du document « Dialogue » de l’OMCO, qui comprend une foire aux questions. L’un de ces extraits énonce ce qui suit :

[Traduction]

Q. Je ne suis membre d’aucun organisme national [le CMFC ou le CRMCC]. L’un des collèges me permettra‑t‑il de suivre mon PPC avec lui?

Oui. Depuis 2006, le CMFC et le CRMCC ont tous les deux mis au point des services de suivi pour plusieurs milliers de médecins qui ne sont membres d’aucun organisme. Si les médecins choisissent de recourir aux services des organismes nationaux pour suivre le PPC, ce service correspondra aux mêmes exigences que celles auxquelles les membres sont assujettis. Ce service comporte des frais.

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

[53]  L’employeur fait valoir que les éléments de preuve permettent d’établir qu’un médecin n’est pas tenu d’être un membre du CMFC pour acquérir des crédits Mainpro. Il a démontré que les conseillers médicaux qui ont versé des paiements de participant non membre de Mainpro dans le passé ont été remboursés par l’employeur de la même manière qu’il rembourse les frais de participation aux conférences ou à une formation en vertu de l’article 18 de la convention collective du groupe SH.

[54]  L’employeur soutient que toutes les questions liées à la formation sont visées par l’article 18, qui est très complet et comprend plusieurs catégories visées par les clauses 18.01 à 18.07. Plus particulièrement, l’agent négociateur a porté à mon attention l’alinéa 18.04a)(ii) qui porte sur les cours de formation continue qui sont « requis » pour respecter les normes actuelles en matière de délivrance de licences. Il est ainsi rédigé :

18.04 Perfectionnement professionnel

  1. Les parties à la présente convention ont un même désir d’améliorer les normes professionnelles en donnant aux employés la possibilité, à l’occasion :

  1. participer à des ateliers, des cours de brève durée, des programmes externes semblables ou des cours d’éducation permanente afin de maintenir leurs connaissances et compétences dans leur domaine respectif, d’obtenir les crédits particuliers nécessaires pour satisfaire ou continuer de satisfaire aux normes d’enregistrement ou de délivrance de licences liées à leur profession.

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

[55]  L’employeur fait valoir que le suivi des heures de PPC est logiquement lié au perfectionnement professionnel. Il ajoute que, tel qu’il a été indiqué au paragraphe 4:2120 de Brown and Beatty, [traduction] « […] les dispositions spéciales ou particulières auront préséance sur les dispositions générales. […] ». En conséquence, il soutient que l’argument de l’agent négociateur selon lequel l’article 21 (le paiement des cotisations, des droits d’inscriptions et de tout autre droit) devrait être interprété de façon à englober ces frais, y compris les frais de suivi du PPC, n’est pas valide puisque l’article 18 est plus précis et est désigné à s’appliquer au perfectionnement professionnel.

[56]  L’employeur ajoute que l’article 21 vise le paiement des cotisations, des droits d’inscription ou de tout autre droit, ce qui signifie les frais liés à l’inscription et à l’adhésion. Il a donné l’exemple de certains coûts engagés par les avocats. Il a expliqué qu’après avoir terminé son stage, lorsqu’il embauche l’avocat, il doit payer les cotisations au barreau, les frais d’examen du barreau et d’autres frais semblables. Il m’a renvoyée aux paragraphes 47 et 54 d’Association des juristes du ministère de la Justice c. Conseil du Trésor, 2015 CRTEFP 23. Le paragraphe 47 énonce ce qui suit :

[47] J’accepte la proposition des deux avocats qu’il existe trois types de droits que les étudiants en droit doivent payer, soit :

  1. la demande d’adhésion;

  2. les coûts des cours et des examens;

  3. les droits d’admission au barreau.

[57]  La question dans cette affaire consistait à déterminer si l’étudiant devait payer de tels frais afin qu’il puisse acquérir sa qualification professionnelle. La Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique a décidé que les étudiants en droit à qui un emploi permanent était offert à titre d’avocat devaient payer les cotisations et les droits d’adhésion pour acquérir leur qualification professionnelle.

[58]  Toutefois, l’employeur soutient que pour utiliser Mainpro, les conseillers médicaux d’EDSC ne sont pas tenus d’être des membres du CMFC (il régit Mainpro). En conséquence, ils peuvent conserver leurs qualifications professionnelles en utilisant Mainpro sans être membres du CMFC. Plus particulièrement, en utilisant Mainpro, ils bénéficient du suivi de leurs heures de perfectionnement professionnel. Cependant, l’adhésion au CMFC n’est pas « nécessaire » en vertu de l’article 21 de la convention collective du groupe SH. En conséquence, l’article 21 ne s’applique pas.

[59]  En conséquence, l’employeur fait valoir qu’il est plus approprié qu’il rembourse les frais de suivi du PPC en vertu de l’article 18 de la convention collective du groupe SH.

[60]  En réponse, l’agent négociateur soutient que le grief de principe ne concerne non seulement les coûts liés à Mainpro, mais également les frais de suivi du PPC.

[61]  Je conclus qu’un conseiller médical d’EDSC titulaire d’une licence médicale de l’OMCO doit déclarer ses activités de PPC par l’intermédiaire d’une organisation approuvée, comme le CMFC. Je reconnais qu’il n’est pas nécessaire que le conseiller médical soit membre du CMFC pour bénéficier du suivi de ses activités de PPC au moyen du service Mainpro administré par cette organisation. Il ou elle peut devenir un participant non membre de Mainpro auprès du CMFC et il peut toujours déclarer ses activités de PPC à l’aide de Mainpro et demander ses crédits de Mainpro auprès de l’OMCO.

[62]  Encore une fois, la clause 21.01, qui porte sur les cotisations, les droits d’inscription et tout autre droit, prévoit ce qui suit :

21.01 L’employeur rembourse à l’employé les cotisations, les droits d’inscription ou tout autre droit qu’il a versés à un ou plusieurs organismes ou corporations dans la mesure où l’employeur est convaincu qu’un tel versement est nécessaire à l’exercice continu des fonctions de l’employé.

 [Le passage en évidence l’est dans l’original]

[63]  Selon l’employeur, étant donné que l’adhésion à une organisation comme le CMFC n’est pas « nécessaire » en vertu de l’article 21 de la convention collective du groupe SH, l’article 21 ne s’applique pas.

[64]  Je ne souscris pas à ce point de vue. Les conseillers médicaux inscrits auprès de l’OMCO qui ne sont pas membres d’aucune des organisations approuvées en Ontario pour faire le suivi des heures de PPC doivent néanmoins verser des cotisations à une organisation, telles que les cotisations de participants non membres du CMFC, afin qu’elle consigne leurs activités de PPC auprès de l’OMCO. En d’autres termes, les médecins doivent s’inscrire auprès du CMFC pour obtenir au moins un statut de participant non membre afin que leurs activités de PPC fassent l’objet d’un suivi à l’aide de Mainpro aux fins de la délivrance de licences de l’OMCO. Ce service n’est pas gratuit – il comporte des frais d’inscription. Je suis donc d’avis que les frais de participant non membre du Mainpro versés par les conseillers médicaux d’EDSC au CMFC sont visés par les « […] les cotisations, les droits d’inscription ou tout autre droit qu’il a versés à un ou plusieurs organismes ou corporations […] ».

[65]  De plus, je suis d’avis que le paiement de ces frais « […] est nécessaire à l’exercice continu des fonctions de l’employé. » Selon les éléments de preuve, si un conseiller médical d’ESDC choisit de ne pas payer les frais de participant non membre du Mainpro (ou les frais d’inscription), l’organisme approuvé ne consignera pas ses activités de PPC et la licence médicale du conseiller médical serait en péril. Plus particulièrement, l’agent négociateur a déposé des éléments de preuve qui précisent que, par exemple, le Dr Bourassa est tenu de déclarer ses activités de PPC par l’entremise d’une organisation approuvée et que, s’il ne le fait pas, il pourrait subir des conséquences. Plus particulièrement, le 25 mars 2013, il a été informé, entre autres, de ce qui suit par l’OMCO :

[Traduction]

[…]

Puisque vous devez déclarer vos activités de PPC dans le cadre d’une organisation approuvée, je vous encourage à examiner les programmes des organisations approuvées et d’en devenir membre afin de commencer à suivre officiellement vos activités de PPC.

[…]

Le Collège s’attend à ce que lorsque vous aurez achevé votre renouvellement annuel en 2013, vous vous conformiez au Règlement. Si vous ne le faites pas, un examen des renseignements relatifs à votre pratique et toute autre considération pertinente sera mené, ce qui est susceptible de donner lieu à une évaluation de votre pratique (à vos frais) ou à une enquête concernant votre inobservation.

[66]  Même si l’employeur n’est pas convaincu que le paiement des cotisations au CMFC est nécessaire à l’exercice continu des fonctions de l’employé (les conseillers), il est clair que l’OMCO a conclu qu’un médecin doit déclarer ses activités de PPC par l’intermédiaire d’une organisation approuvée pour conserver sa licence. De plus, afin de continuer d’exercer leurs fonctions à titre de conseillers médicaux d’EDSC, les médecins doivent renouveler leur licence de médecine chaque année.

[67]  Je reconnais que l’employeur a choisi de rembourser les frais de suivi du PPC des conseillers médicaux en vertu de l’article 18 de la convention collective du groupe SH. Il soutient que les frais de suivi du PPC sont remboursables en vertu de l’article 18 de la convention collective du groupe SH parce que cet article est une disposition visant particulièrement les activités de PPC et de perfectionnement professionnel. Il soutient que je devrais interpréter les deux clauses 18.04 et 21.01, selon les lignes directrices selon lesquelles [traduction] « […] les dispositions spéciales ou particulières auront préséance sur les dispositions générales. […] » (voir Brown et Beatty, au paragraphe 4:2120). L’employeur est d’avis que l’article 18 est plus précis et devrait s’appliquer au perfectionnement professionnel.

[68]  Il est vrai que, comme le soutient l’employeur, le suivi des activités de PPC est logiquement lié au perfectionnement professionnel. L’alinéa 18.04a) porte clairement sur l’acquisition de la formation. Toutefois, rien dans l’alinéa ne porte sur le suivi de la formation. À mon avis, l’alinéa 18.04a) peut être considérée comme portant particulièrement sur l’acquisition de la formation, tandis que la clause 21.01 porte sur les frais de conservation de la certification professionnelle. Les frais de suivi de l’EMC ont trait à la [traduction] « conservation » de la certification professionnelle et non à l’[traduction] « acquisition » de la formation.

[69]  Je suis également du même avis que l’agent négociateur : le fait de permettre à l’employeur de maintenir son interprétation pourrait avoir un effet négatif à l’avenir. Selon une des raisons, l’avantage conféré par l’alinéa 18.04a) n’est accordé qu’occasionnellement et non de façon régulière. L’alinéa 18.04a) prévoit particulièrement que même si les deux parties ont un commun désir d’améliorer les normes professionnelles, elle précise qu’elles ont convenu que l’employeur donnerait aux employés la possibilité, à l’occasion :

[…]

  1. participer à des ateliers, des cours de brève durée, des programmes externes semblables ou des cours d’éducation permanente afin de maintenir leurs connaissances et compétences dans leur domaine respectif, d’obtenir les crédits particuliers nécessaires pour satisfaire ou continuer de satisfaire aux normes d’enregistrement ou de délivrance de licences liées à leur profession.

[70]  Par conséquent, il est convenu qu’à l’occasion, l’employeur permettra aux employés de participer à de la formation afin de maintenir leurs connaissances et d’obtenir des crédits particuliers nécessaires pour satisfaire ou continuer de satisfaire aux normes de certification ou de délivrance de licences liées à leur profession.

[71]  Par ailleurs, un conseiller médical doit déclarer ses activités de PPC chaque année à l’OMCO par l’intermédiaire d’une organisation approuvée. Le conseiller ne peut le faire qu’occasionnellement. De plus, tel que je l’ai mentionné antérieurement, si les heures de formation d’un conseiller médical ne sont pas consignées, cela pourrait avoir une incidence négative sur sa licence médicale.

[72]  En résumé, je conclus que le libellé de l’article 21 est clair et sans ambiguïté. Il n’est pas nécessaire de lui donner un sens qui dépasse son libellé. Il s’applique lorsqu’un droit est requis pour acquérir ou maintenir une certification professionnelle nécessaire à l’exercice continu des fonctions de l’employé.

[73]  Je conclus donc que les frais de suivi de PPC (ou les frais de participant non membre de Mainpro) sont remboursables en vertu de l’article 21 de la convention collective du groupe SH, et non en vertu de l’article 18.

B.  Grief de principe au dossier 569‑02‑178

[74]  L’agent négociateur fait valoir que les questions soulevées dans le présent grief de politique (dossier 569‑02‑178) sont les suivantes : 1) L’employeur viole‑t‑il l’article 21 de la convention collective du groupe SH lorsqu’il refuse de rembourser aux conseillers médicaux d’EDSC qui pratiquent au Québec les primes d’assurance responsabilité professionnelle qu’ils versent tous les ans? et 2) Lorsqu’il refuse ce remboursement, l’employeur viole‑t‑il l’article 5 (intitulé « Droits de la direction ») et manque‑t‑il à ses fonctions et obligations à l’égard desquelles il doit exercer son pouvoir discrétionnaire de direction?

1.  Question en litige 1 – L’employeur interprète‑t‑il mal l’article 21 de la convention collective du groupe SH lorsqu’il refuse de rembourser les conseillers médicaux d’EDSC qui travaillent au Québec leurs primes d’assurance responsabilité professionnelle?

[75]  Le Dr Bourassa a expliqué que les primes d’assurance responsabilité assumées par les médecins au Québec varient selon la nature de leur travail. Les primes d’assurance sont moins élevées pour les travaux administratifs. Ils sont plus élevés pour les travaux plus dangereux. Chaque province a un barème de primes d’assurance responsabilité.

[76]  Le Dr Bourassa a expliqué que dans le passé, l’employeur a remboursé la part de ses primes d’assurance responsabilité qui correspondait aux travaux administratifs qu’il avait accomplis pour EDSC au Québec. Il a déposé en preuve des documents de 2007 à 2013 qui indiquent que l’employeur lui a remboursé chaque année une part de ses dépenses payées à l’ACPM au cours de ces années.

[77]  Depuis 2014, l’employeur refuse de rembourser une part de ses primes d’assurance responsabilité.

[78]  Plus particulièrement, le 7 février 2014, Mme Wilson a informé les conseillers médicaux d’EDSC de ce qui suit :

[Traduction]

Le présent courriel a pour objet de clarifier les dispositions de la convention collective ayant trait à l’article 21 qui énonce ce qui suit : « L’employeur rembourse à l’employé les cotisations, les droits d’inscription ou tout autre droit qu’il a versés à un ou plusieurs organismes ou corporations dans la mesure où l’employeur est convaincu qu’un tel versement est nécessaire à l’exercice continu des fonctions de l’employé. »

Primes d’assurance responsabilité

Conformément à l’interprétation de l’article 21 de la convention collective du groupe Services de santé, des consultations ont été tenues avec le Conseil du Trésor sur le remboursement de l’assurance responsabilité. Dans le passé, les primes d’assurance responsabilité étaient remboursées aux conseillers médicaux autorisés au Québec. Toutefois, les fonctionnaires sont déjà protégés contre responsabilité personnelle, conformément à la Politique sur les services juridiques et l’indemnisation adoptée en vertu de l’article 7 de la Loi sur la gestion des finances publiques. Par conséquent, l’employeur n’est pas tenu d’assumer ces coûts.

Compte tenu de ces faits, les primes d’assurance responsabilité ne seront plus remboursées par l’employeur. Toutefois, les frais remboursés dans le passé ne seront pas recouvrés. Le tout entre en vigueur le 7 février 2014.

Si vous avez des questions ou des préoccupations concernant cette interprétation de l’article 21 de la convention collective du groupe Services de santé (IPFPC), n’hésitez pas à communiquer avec Patricia Wilson […]

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

[79]  Le Dr Bourassa a expliqué que même si l’employeur a reconnu dans le passé que les conseillers médicaux avaient besoin d’une assurance pour exécuter leur travail administratif et leur a remboursé les droits de l’ACPM (ou la part de ces droits qui correspondait aux coûts associés aux travaux administratifs), il a cessé de les rembourser en février 2014 et a rejeté le grief de principe déposé par l’agent négociateur.

[80]  Le Dr Bourassa a témoigné en disant qu’il doit être membre de la FMOQ (association) et de l’ACPM (assurance) pour faire son travail à EDSC au Québec. Plus particulièrement, il a déclaré qu’il doit démontrer chaque année au CMQ qu’il a une preuve d’assurance auprès de l’ACPM afin de renouveler sa licence médicale. Il a expliqué que l’ACPM n’est pas une compagnie d’assurance privée, mais que le CMQ et l’OMCO, ses deux organismes de réglementation, l’ont autorisée en tant qu’organisme indépendant, à fournir une assurance aux médecins.

[81]  Il a expliqué que le montant de l’assurance exigée au Québec et en Ontario diffère. Le montant est moins élevé au Québec qu’en Ontario. Les deux collèges provinciaux de médecins exigent que les médecins remplissent un formulaire en ligne chaque année, lorsque leur licence est renouvelée. Le Dr Bourassa a expliqué qu’il doit fournir son numéro d’enregistrement de l’ACPM au CMQ pour obtenir sa licence chaque année. La procédure en Ontario est légèrement différente.

[82]  Le Dr Bourassa a expliqué que l’OMCO a reconnu la « Politique sur les services juridiques et l’indemnisation » (« la politique sur l’indemnisation ») de l’employeur comme applicable et suffisante. Il a expliqué qu’une directive de l’OMCO précise la façon dont un médecin peut satisfaire à l’exigence d’assurance professionnelle, comme suit :

[Traduction]

[…]

Déclaration du demandeur :

Assurance responsabilité professionnelle

Selon le règlement sur l’inscription du Collège, les personnes qui demandent de s’inscrire doivent avoir une assurance responsabilité professionnelle qui est conforme aux règlements administratifs du Collège.

Les demandeurs doivent signer une déclaration selon laquelle ils se conforment à l’art. 50.2 du règlement administratif, comme suit :

Chaque membre doit obtenir et maintenir une assurance responsabilité professionnelle qui couvre tous les domaines de la pratique du membre, à l’aide de l’une ou de plusieurs des moyens suivants :

  • a) l’adhésion à l’Association canadienne de protection médicale;

  • b) une police d’assurance responsabilité professionnelle délivrée par une société autorisée à exploiter une entreprise en Ontario qui prévoit une protection d’au moins 10 000 000 $;

  • c) une protection en vertu de la Politique sur les services juridiques et l’indemnisation du Conseil du Trésor (pour les fonctionnaires de l’État du Canada).

[…]

[83]  Toutefois, puisqu’il travaille au Québec, le Dr Bourassa explique qu’il doit satisfaire aux exigences du CMQ en matière d’assurance. De plus, il a expliqué que puisqu’il détient deux licences médicales, l’une au Québec et l’autre en Ontario, l’ACPM décide le montant de l’assurance responsabilité qu’il doit détenir. Selon sa politique, il veille à ce que chaque médecin bénéficie d’une protection adéquate et, par conséquent, chacun doit souscrire l’assurance la plus élevée pour les types de pratique médicale précis.

[84]  Le Dr Bourassa a insisté sur le fait que le CMQ ne reconnaît pas la politique sur l’indemnisation comme applicable et suffisante. Au contraire, dans les règles qu’il a adoptées, il déclare qu’un médecin qui travaille auprès d’un ministère exerce des activités médicales qui l’obligent à souscrire à une assurance responsabilité professionnelle. En conséquence, il doit souscrire à une assurance professionnelle auprès de l’ACPM.

[85]  À la suite du refus de son employeur de payer une part de ses primes d’assurance responsabilité, le 11 mars 2014, le Dr Bourassa a communiqué avec le CMQ en vue d’obtenir une confirmation écrite selon laquelle l’assurance est obligatoire pour conserver une licence médicale au Québec.

[86]  Le 19 mars 2014, le CMQ a répondu au Dr Bourassa. Il a déclaré que l’art. 2.01 du Règlement applicable (Règlement sur l’assurance responsabilité professionnelle des médecins (RLRQ c M‑ 9, r. 15; le « Règlement)) énonce que le médecin doit « […] détenir et maintenir en vigueur un contrat d’assurance établissant une garantie contre la responsabilité qu’il peut encourir lui‑même ou par ses employés et préposés, en raison des fautes et négligences commises dans l’exercice de sa profession. »

[87]  Le Dr Bourassa a expliqué qu’il doit détenir une police d’assurance responsabilité professionnelle annuelle suffisante pour protéger toutes ses activités. Il a expliqué que, dans son cas, il doit souscrire une assurance responsabilité professionnelle en utilisant le code 82 (en Ontario), qui s’applique à la pratique de la médecine d’urgence. Le code 20 s’applique à la pratique de la médecine administrative. Tel que je l’ai mentionné auparavant, les primes d’assurance responsabilité professionnelle associées à la pratique de la médecine administrative sont inférieures aux frais associés à la pratique de la médecine d’urgence. Par exemple, en 2018, l’assurance responsabilité professionnelle en Ontario associée à la pratique de la médecine administrative s’élevait à 2 700 $. Toutefois, puisqu’il pratique la médecine d’urgence, son assurance responsabilité professionnelle s’élevait à 13 872 $.

[88]  Le Dr Bourassa a déposé en preuve la confirmation qu’il avait payé ses cotisations annuelles à l’ACPM. En 2013, ses primes d’assurance responsabilité professionnelle s’élevaient à 7 812 $, ce qui était associé à la pratique de la médecine d’urgence en Ontario. De même, en 2014, ses cotisations à l’ACPM s’élevaient à 10 992 $. En 2015, ils s’élevaient à 12 852 %; en 2016, à 12 336 $; en 2017, à 16 644 $; en 2018, à 13 872 %; et en 2019, à 12 948 $.

[89]  Le Dr Bourassa a expliqué qu’entre 2001 et 2013, l’employeur a remboursé ses primes d’assurance responsabilité professionnelle associées à la pratique de la médecine administrative dans la province où il travaillait. Puisqu’il travaille au Québec depuis 2005, on lui aurait remboursé le montant associé à la pratique de la médecine administrative dans cette province. Par exemple, si l’employeur avait continué de le rembourser, en 2018, il aurait reçu une somme de 1 020,24 $, selon le tableau applicable.

[90]  Le Dr Bourassa m’a également renvoyée aux règles régissant l’assurance responsabilité professionnelle et les obligations des médecins du Québec. Plus particulièrement, les règles prévoient que le contrat d’assurance prévoit notamment les éléments suivants :

  • a) l'assureur s'engage à payer, aux lieu et place de l'assuré et jusqu'à concurrence du montant de la garantie, tous dommages-intérêts que l'assuré peut légalement être tenue de payer à un tiers relativement à une réclamation présentée pendant la période de garantie et résultant de services professionnels rendus ou de l'omission de rendre des services par l'assuré dans l'exercice de ses fonctions; l'engagement s'étend à toute réclamation présentée pendant les trois ans qui suivent la période de garantie au cours de laquelle un assuré décède;

  • b) l'assureur s'engage à prendre les faits et causes de l'assuré, et à assumer sa défense dans toute demande dirigée contre lui devant une juridiction civile;

  • c) la garantie fournie par l'assureur doit s'étendre à toute réclamation présentée contre l'assuré pendant les cinq années qui suivent celle où il n'a plus l'obligation de maintenir une garantie contre sa responsabilité ou celles où il cesse d'être membre de l'ordre;

  • d) la garantie s’étend de plein droit, sans avis à l'assureur, aux personnes qui se joignent à l'assuré comme employés pendant la période de garantie, de même qu’aux médecins qui se joignent à l'assuré comme associés et, en ce cas, la société ainsi formée ou modifiée est tenue à toutes fins pour l'assuré.

[91]  Dans certains cas, en vertu de ces règles, un médecin n’est pas tenu de détenir et de maintenir un contrat d’assurance établissant une protection contre la responsabilité professionnelle. Cependant, le Dr Bourassa a expliqué que ces situations ne s’appliquent pas à lui. Les voici :

Les exemptions

Un médecin n'est pas tenu de détenir et maintenir en vigueur un contrat d'assurance établissant une garantie contre sa responsabilité professionnelle :

1o s'il n'exerce en aucune circonstance l’une les activités mentionnées à l'article 31 de la Loi médicale;

20 s’il exerce sa profession exclusivement à l'extérieur du Québec.

Aux fins de l'exemption de l'assurance, il est bon de rappeler que l'exercice de la médecine ne se limite pas à la prescription de médicaments et d'examens. Voici d'autres exemples concrets d’exercice de la profession médicale :

  • le médecin conseil (par ex., BEM, SAAQ, Ministère, RAMQ, CNESST).

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

[92]  L’article 31 de la Loi médicale du Québec est ainsi rédigé :

L’exercice de la médecine consiste à évaluer et à diagnostiquer toute déficience de la santé chez l’être humain en interaction avec son environnement, à prévenir et à traiter les maladies dans le but de maintenir la santé, de la rétablir ou d’offrir le soulagement approprié des symptômes.

Dans le cadre de l’exercice de la médecine, les activités réservées au médecin sont les suivantes :

(1) diagnostiquer les maladies;

(2) prescrire les examens diagnostiques;

(3) utiliser les techniques diagnostiques invasives ou présentant des risques de préjudice;

(4) déterminer le traitement médical;

(5) prescrire les médicaments et les autres substances;

(6) prescrire les traitements;

(7) utiliser les techniques ou appliquer les traitements, invasifs ou présentant des risques de préjudice, incluant les interventions esthétiques;

(8) exercer une surveillance clinique de la condition des personnes malades dont l’état de santé présente des risques;

(9) effectuer le suivi de la grossesse et pratiquer les accouchements;

(10) décider de l’utilisation des mesures de contention;

(11) décider de l’utilisation des mesures d’isolement dans le cadre de l’application de la Loi sur les services de santé et les services sociaux (chapitre S‑ 4.2) et de la Loi sur les services de santé et les services sociaux pour les autochtones cris (chapitre S‑ 5);

(12) administrer le médicament ou la substance permettant à une personne en fin de vie d’obtenir l’aide médicale à mourir dans le cadre de l’application de la Loi concernant les soins de fin de vie (chapitre S‑ 32.0001).

[93]  Le Dr Bourassa a expliqué qu’il ne pouvait pas être dispensé de souscrire à une assurance au motif qu’il « n’exerce en aucune circonstance l’une des activités mentionnées à l’article 31 de la Loi médicale ». La raison en est que les règles précisent que la pratique de la médecine ne se limite pas à la prescription de médicaments et à l’exécution d’examen et qu’un médecin‑conseil dans un ministère exerce également la profession médicale.

[94]  Cependant, le 8 mars 2016, Me Racine lui a envoyé une lettre l’informant de ce qui suit :

[…]

Faisant suite à votre demande par courriel du 23 février 2016, concernant le remboursement de vos frais d’Association Canadienne de Protection Médicale (ACPM), nous vous informons que nous ne pouvons vous rembourser ces frais, tel que le stipulent les deux derniers paragraphes de la lettre de Md. Debi Daviau, Présidente de l'Institut Professionnel de la Fonction Publique du Canada, datée du 29 juillet 2015.

[95]  Les derniers paragraphes de la lettre envoyée à la présidente de l’agent négociateur, Debi Daviau, le 29 juillet 2015, sont reproduits ci‑dessous :

[Traduction]

[…]

De plus, dans le cadre de l’examen des faits de l’espèce, je constate que les droits visés à l’article 21 correspondent à des exigences directes exigées par l’employeur. Les coûts assumés par l’employeur ne visent pas les exigences indirectes, comme les primes d’assurance responsabilité professionnelle.

En outre, je fais remarquer que larticle 3.03 du Règlement sur l’assurance responsabilité professionnelle des médecins, CQLR c M‑ 9, r. 15 (le Règlement), prévoit quun médecin n’est pas tenu de détenir et maintenir en vigueur un contrat d’assurance sil nexerce en aucune circonstance lune des activités mentionnées à larticle 31 de la Loi médicale. EDSC n’exige pas que ses conseillers médicaux exercent l’une des activités mentionnées à l’article 31 de la Loi médicale et, en conséquence, les conseillers médicaux peuvent remplir le formulaire à l’annexe 1 du Règlement et déclarer qu’ils n’exercent aucune des activités.

Par conséquent, je conclus que les conseillers médicaux n’ont pas droit au remboursement des primes d’assurance responsabilité professionnelle en vertu de l’article 21 de la convention collective du groupe SH et le grief est donc rejeté.

[96]  Le Dr Bourassa a déclaré qu’il exerçait les activités prévues à l’art. 31 de la Loi médicale du Québec. Il a expliqué que même si un tiers (le médecin traitant d’un demandeur) déclare le diagnostic du demandeur qui est présenté à l’EDSC dans les documents qui lui sont fournis, en sa qualité de conseiller médical, il doit préciser l’état ou la maladie du demandeur. Il doit également préciser le traitement approprié. En conséquence, il fait un pronostic qu’il communique à son employeur.

[97]  Le 1er février 2019, le Dr Bourassa a envoyé un autre courriel au CMQ. Il a précisé que les règles sur l’assurance responsabilité professionnelle précisent qu’un médecin‑conseil qui travaille dans un ministère exerce également la profession médicale. Il a donc demandé ce qui suit :

[…]

Ainsi, j'interprète ceci comme signifiant qu’un médecin-conseil œuvrant dans un ministère gouvernemental (au Québec) est tenu d'avoir une assurance responsabilité du type ACPM.

Pourriez-vous me confirmer ceci par un courriel et/ou une lettre…

Vous trouverez de plus en annexe une copie (en Anglais) de ma description d'emploi. Vous serait-il aussi possible de confirmer que ce type d'emploi (médecin conseil pour un ministère fédéral, qui travaille au Québec), m’oblige aussi à maintenir une assurance responsabilité de type ACPM.

[…]

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

[98]  Le directeur adjoint et avocat du CMQ a répondu au Dr Bourassa le 8 février 2019, comme suit :

[Traduction]

Un médecin qui exerce sa profession uniquement pour le compte d'un organisme privé ou public sur une base salariale peut, au moment de son inscription au tableau de l'ordre, remplir une déclaration selon laquelle son employeur détient un contrat d'assurance dont la garantie s’étend nommément à lui-même, pourvu que ce contrat d'assurance comporte une garantie pour les limites minimales indiquées dans le Règlement sur l'assurance responsabilité [in article 2.02]. Néanmoins, le médecin qui est couvert par son employeur, mais qui exerce des activités médicales en dehors de son emploi doit obligatoirement souscrire une assurance responsabilité professionnelle pour ces activités.

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

[99]  Le Dr Bourassa a expliqué que la décision de l’employeur de ne plus lui rembourser la part de ses primes d’assurance responsabilité professionnelle a comme conséquence qu’il n’a pas reçu une somme moyenne de 1 000 $ par année depuis 2014. En 2019, ce montant avait atteint 6 000 $.

[100]  En contre‑interrogatoire, le Dr Bourassa a reconnu qu’il est possible pour un conseiller médical d’EDSC de travailler uniquement pour cet employeur. Toutefois, il a ajouté qu’il est avantageux pour l’employeur que les conseillers médicaux aient une expérience dans la pratique de la médecine.

[101]  Le Dr Bourassa a également reconnu que dans son rôle à EDSC, il ne voit pas de patients. Il ne communique pas non plus de diagnostic aux patients, mais il révise les tests médicaux et les documents disponibles et donne des conseils juridiques au ministère quant aux pronostics de l’état de santé des patients.

[102]  Selon les éléments de preuve déposés, l’employeur a remboursé au Dr Bourassa ses cotisations au CMQ pour la période de 2016‑2017 (1 471 $) et ses cotisations à la FMOQ (association) pour 2015‑2016 (1 893 $).

[103]  L’année suivante, l’employeur a remboursé au Dr Bourassa ses cotisations à l’OMCO pour 2018 (1 725 $) et ses cotisations à la FMOQ (association) pour 2017‑2018 (1 951 $). Selon un courriel déposé en preuve, il a présenté une demande de remboursement de sa licence de l’Ontario cette année‑là parce qu’elle est plus chère.

[104]  Me Racine a témoigné en disant qu’un conseiller médical d’EDSC, qui travaille uniquement au nom d’EDSC à titre de salarié au Québec, lorsqu’il s’inscrit auprès du CMQ, peut remplir une déclaration selon laquelle « l’employeur détient un contrat d’assurance dont la garantie s’étend nommément à ce médecin, pourvu que ce contrat d’assurance comporte une garantie pour les limites minimales indiquées dans le présent règlement. » Me Racine a déclaré que la politique sur l’indemnisation répond aux exigences d’un contrat d’assurance dont la garantie répond aux limites minimales requises par les règles régissant l’assurance responsabilité professionnelle. Il m’a également renvoyé à l’art. 3.02 du Règlement, qui est reproduit ci‑dessous :

3.02 Un médecin qui exerce sa profession uniquement pour le compte d’un organisme privé ou public sur une base salariale est réputé s’être conformé au présent règlement s’il transmet au secrétaire de l’ordre, avec son inscription au tableau, une déclaration selon laquelle son employeur détient un contrat d’assurance dont la garantie s’étend nommément à ce médecin, pourvu que ce contrat d’assurance comporte une garantie pour les limites minimales indiquées dans le présent règlement.

[105]  Me Racine a également porté mon attention aux dispositions suivantes du Règlement :

[…]

2.01 Le médecin qui exerce sa profession à son propre compte à temps partiel ou à temps plein, soit seul, soit en société avec d’autres médecins, doit détenir et maintenir en vigueur un contrat d’assurance établissant une garantie contre la responsabilité qu’il peut encourir lui‑même ou par ses employés et préposés, en raison des fautes et négligences commises dans l’exercice de sa profession.

Dans le cas d’une société de médecins, le contrat d’assurance peut être conclu au nom de la société mais la garantie doit s’étendre à chacun des médecins associés ou employés personnellement.

Dans le cas d’un médecin ayant d’autres médecins à son emploi, la garantie doit s’étendre à chacun de ceux‑ci, personnellement.

[…]

3.03 Malgré l’article 2.01, un médecin n’est pas tenu de détenir et maintenir en vigueur un contrat d’assurance établissant une garantie contre sa responsabilité professionnelle :

(1) s’il n’exerce en aucune circonstance l’une des activités mentionnées à l’article 31 de la Loi médicale (chapitre M‑9);

(2) s’il exerce sa profession exclusivement à l’extérieur du Québec.

[…]

[106]  Me Racine a ajouté que les conseillers médicaux d’EDSC sont protégés par la politique sur l’indemnisation, comme tous les fonctionnaires. Il m’y a renvoyé. Elle prévoit une définition générale de « fonctionnaire de l’État ». Il m’a également renvoyé à l’article 5.1, qui est ainsi rédigé :

5.1 Objectif

Les objectifs de la présente politique sont les suivants :

  • protéger les fonctionnaires de l’État de pertes financières personnelles ou de dépenses subies pendant qu’ils exerçaient leurs fonctions ou dans le cadre de leur emploi, et qu’ils n’agissaient pas à l’encontre des intérêts de l’État;

  • protéger les intérêts de l’État en ce qui concerne sa responsabilité réelle ou éventuelle résultant des actes ou des omissions de ses fonctionnaires;

  • assurer aux Canadiens la pérennité et l’efficacité des services de la fonction publique.

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

[107]  Il m’a également renvoyée à la section E de l’annexe A de cette politique, qui déclare ce qui suit :

E) Tout autre fonctionnaire de l’État non mentionné précédemment

Demandeur

Approbation exigée de

Limites des services juridiques et de l’indemnisation

 

·  En poste et anciennement en poste

Administrateur général

 

·  Indemnisation – aucune limite

·  Services juridiques fournis par le ministère de la Justice – aucune limite

·  Services juridiques fournis par un avocat du secteur privé – jusqu’à 50 000 $

·  En poste et anciennement en poste

Ministre

·  Services juridiques fournis par un avocat du secteur privé – plus de 50 000 $

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

[108]  L’agent négociateur soutient que, lorsqu’il ne rembourse pas les primes d’assurance responsabilité professionnelle des conseillers médicaux d’EDSC qui travaillent au Québec, l’employeur viole l’article 21 de la convention collective du groupe SH, pour les motifs suivants.

[109]  L’agent négociateur fait valoir que les primes d’assurance responsabilité professionnelle payées par les conseillers médicaux constituent une condition d’une licence médicale provinciale et que l’employeur devrait les rembourser en vertu de l’article 21 de la convention collective du groupe SH.

[110]  Il soutient que, selon un principe d’interprétation, si le libellé d’une convention collective est clair et sans ambiguïté, il devrait être appliqué. Au contraire, s’il est ambigu, l’ambiguïté peut être résolue en recourant à des éléments de preuve extrinsèques. Il invoque Brown et Beatty, au paragraphe 3:4401, intitulé [traduction] « Ambiguïté », aux termes de la convention. Ce paragraphe prévoit en partie ce qui suit :

  [Traduction]

[…]

Lorsqu’une ambiguïté est évidente, c’est‑à‑dire, elle est manifeste au vu de la convention, un arbitre de grief peut recourir à une preuve extrinsèque pour faciliter son interprétation. Lorsqu’une ambiguïté n’est pas évidente, c’est‑à‑dire, lorsqu’elle n’est pas manifeste à première vue, un arbitre de grief peut se fonder sur une preuve extrinsèque, non seulement pour résoudre l’ambiguïté une fois qu’elle est établie, mais également pour divulguer l’ambiguïté. […]

[…]

[111]  L’agent négociateur fait valoir que même s’il semble que certains arbitres de différends et arbitres de grief ne sont pas du même avis, la Cour d’appel de l’Ontario a déclaré qu’une ambiguïté non évidente peut figurer non seulement dans le libellé de l’instrument, mais également dans son application aux faits. En l’espèce, l’agent négociateur soutient que tant dans le libellé que dans l’application, on pourrait conclure qu’il existe une ambiguïté non évidente à l’article 21 de la convention collective du groupe SH. En premier lieu, il n’est peut‑être pas évident si le terme « nécessaire » s’applique en l’espèce, étant donné que l’employeur fait valoir qu’il n’est pas tenu d’assumer les coûts en vertu de l’hypothèse selon laquelle une politique interne puisse permettre de satisfaire aux exigences d’un tiers.

[112]  L’agent négociateur fait valoir que la question consiste à déterminer qui est responsable de l’exigence. Il soutient que l’employeur refuse d’appliquer l’article 21 de la convention collective du groupe SH (et qu’il a refusé une demande plus récente de remboursement de primes d’assurance responsabilité professionnelle d’un conseiller médical d’EDSC situé au Québec) aux motifs suivants :

  • (1) l’article 21 ne s’applique pas aux primes payées en vertu d’un contrat d’assurance qui ne sont pas de la même nature et qui ne partagent pas les mêmes caractéristiques que les cotisations ou les droits d’inscription;

  • (2) les frais visés à l’article 21 sont des obligations directes de l’employeur et les coûts visés n’englobent pas les exigences indirectes, comme les primes d’assurance responsabilité professionnelle;

  • (3) Les conseillers médicaux d’EDSC n’exercent pas les activités médicales décrites à l’art. 31 de la Loi médicale du Québec (CQLR, c. M‑9); ils peuvent donc demander une exemption.

[113]  L’agent négociateur soutient qu’il existe clairement une ambiguïté dans le mot « nécessaire ». Encore une fois, l’ambiguïté est du point de vue de la personne qui crée l’exigence; est‑ce nécessaire du point de vue de l’employeur, sans égard aux exigences d’une organisation ou est‑ce nécessaire pour l’organisation?

[114]  Il fait valoir que les arbitres de différends et les arbitres de grief ont mentionné l’idée selon laquelle une ambiguïté peut être établie ou résolue par une preuve extrinsèque, des pratiques passées ou les antécédents en matière de négociation. Ce concept remonte à 1967. L’agent négociateur m’a renvoyé au paragraphe 12 d’I.A.M., Local 1740 v. John Bertram & Sons Co., 1967 CarswellOnt 782, qui énonce en partie ce qui suit :

[Traduction]

12 Une deuxième utilisation de la « pratique passée » est tout à fait différente et se produit même lorsqu’il n’existe aucune dépendance préjudiciable. Si une disposition d’une convention, tel qu’elle s’applique à un problème de relations de travail est ambiguë dans ses exigences, l’arbitre des différends doit utiliser la conduite des parties pour aider à clarifier l’ambiguïté. […]

[115]  L’agent négociateur soutient que les éléments de preuve démontrent que, dans le passé, l’employeur a interprété la convention collective du groupe SH de façon à permettre aux conseillers médicaux d’EDSC du Québec ayant un bureau à l’externe de demander le remboursement, à condition qu’il existe un lien avec leur travail. Puisque le type de travail qu’ils exécutaient pour l’employeur pouvait être visé par une assurance médicale, par exemple, le travail administratif qui avait été évalué à une prime d’environ 1 000 $, l’employeur remboursait ce montant de la prime.

[116]  L’agent négociateur déclare que la Commission devrait tenir compte de la conduite des parties afin de l’aider à clarifier l’ambiguïté de l’article. Dans le passé, l’employeur a reconnu son obligation de rembourser le montant en litige avant de décider de ne plus le faire. Compte tenu des antécédents des mesures de la direction, l’employeur devrait être empêché, en raison de la préclusion, de modifier sa pratique établie consistant à rembourser aux conseillers médicaux du Québec leur assurance responsabilité professionnelle.

[117]  Par souci de précision, le Dr Bourassa a témoigné en disant qu’à l’époque, l’employeur savait qu’il avait un bureau externe qui touchait ses cotisations à l’ACPM et qu’en raison de ses mesures, il a reconnu qu’une part des cotisations qu’il payait pouvait lui être remboursée, ce qui était équivalent aux frais exigés pour pratiquer la médecine administrative. Il n’est pas contesté que le travail des conseillers médicaux est de nature administrative. Me Racine a également utilisé le terme « administratif » pour décrire leur travail et il a confirmé que le libellé de l’article 21 de la convention collective du groupe SH n’avait pas été modifié au cours des dernières années.

[118]  L’agent négociateur m’a renvoyé à Harper c. Agence canadienne d’inspection des aliments, 2002 CRTFP 87. La clause en litige dans cette affaire concernait l’indemnité pour droits d’inscription du groupe Médicine vétérinaire. La fonctionnaire s’estimant lésée, une vétérinaire, demandait le remboursement des droits d’inscription qu’elle avait payés au Collège de médecine vétérinaire de l’Ontario pour l’année 2001. La disposition pertinente de la convention collective dans cette affaire exigeait que l’employeur rembourse à un employé le versement de ces frais lorsqu’ils étaient « […] indispensable à l’exercice continu des fonctions de son emploi ». La preuve a permis d’établir que, dans l’exercice de ses fonctions, la fonctionnaire s’estimant lésée aurait été obligée d’utiliser des médicaments contrôlés pour pratiquer l’euthanasie sur des animaux en détresse ou pour calmer des animaux avant d’effectuer certains tests. Même si elle n’était pas obligée de détenir un permis d’exercer pour utiliser le médicament en question, elle était tenue de l’acquérir. Dans le cadre de ses fonctions, elle devait remplacer le vétérinaire de district pendant son absence. À ce titre, elle pourrait être tenue d’acquérir le médicament contrôlé pour le bureau, ce qu’elle ne pourrait faire sans son permis de vétérinaire. À ce titre, l’arbitre de grief a conclu qu’il était nécessaire qu’elle détienne un permis d’exercer pour accomplir ses fonctions.

[119]  L’agent négociateur m’a renvoyé au paragraphe 54 de cette décision, qui est reproduit ci‑dessous

[54] Il importe peu de savoir si Dre Harper utilise un médicament contrôlé à titre exceptionnel ou de manière courante; on lui a demandé d’obtenir du pentobarbital sodique et de l’utiliser. Pour ce faire, elle doit être autorisée à exercer, sinon elle contreviendrait à la loi.

[120]  L’agent négociateur fait valoir que des circonstances peuvent survenir dans un emploi où l’on peut choisir d’agir d’une certaine façon, ce qui peut déclencher une exigence légale. Tel qu’il a été mentionné dans Harper, les deux conditions suivantes doivent être remplies pour qu’une clause semblable à l’article 21 de la convention collective du groupe SH s’applique :

[93] L’application de l’article E2.01 est assortie de deux conditions, soit qu’il est nécessaire de payer les droits d’inscription exigés pour être autorisés à exercer la profession et « [qu’] un tel versement est indispensable à l’exercice continu des fonctions de son emploi. »

[121]  L’agent négociateur soutient qu’en l’espèce, ces deux conditions sont remplies : (1) pour être titulaire d’une licence, l’assurance doit être payée et (2) la licence est
« […] nécessaire à l’exercice continu des fonctions de l’employé », conformément à l’article 21 de la convention collective du groupe SH. Il ajoute que les professionnels de la santé doivent avoir un choix de protection et que le Dr Bourassa a expliqué qu’il croyait fortement qu’il avait besoin d’une protection au titre d’une assurance au Québec et pour garder son poste à l’EDSC. Il a utilisé le mot « diagnostique » pour décrire son travail. Il a comparé son travail à un diagnostic en ce qu’il peut donner un avis médical après avoir examiné la preuve médicale ou il peut prendre une décision.

[122]  En ce qui concerne l’interprétation de l’article 21, l’agent négociateur soutient que l’une des conclusions de l’employeur dans sa décision relative au grief est problématique et qu’elle démontre une mauvaise interprétation de la convention collective du groupe SH. Voici la décision de l’employeur au sujet du grief de principe :

[Traduction]

De plus, dans le cadre de l’examen des faits de l’espèce, je constate que les droits visés à l’article 21 correspondent à des exigences directes exigées par l’employeur. Les coûts assumés par l’employeur ne visent pas les exigences indirectes, comme les primes d’assurance responsabilité professionnelle.

[123]  L’agent négociateur soutient que l’article 21 de la convention collective du groupe SH n’établit aucune distinction entre une exigence directe et une exigence indirecte. Il insiste sur le fait que les primes d’assurance responsabilité professionnelle doivent être payées pour détenir une licence médicale au Québec.

[124]  Pour ce qui est de la conclusion de l’employeur selon laquelle les conseillers médicaux d’EDSC ne sont pas tenus de détenir une assurance responsabilité professionnelle puisqu’ils n’exercent aucune des activités énumérées à l’art. 31 de la Loi médicale, l’agent négociateur soutient que les éléments de preuve permettent d’établir qu’il n’est pas clair si le CMQ considère le type de travail qu’ils accomplissent comme étant la pratique de la médecine.

[125]  En outre, l’agent négociateur s’oppose aux conclusions de l’employeur selon lesquelles l’article 21 de la convention collective du groupe SH vise « […] les cotisations, les droits d’inscription ou tout autre droit » et qu’il ne vise pas les primes payées en vertu d’un contrat d’assurance qui ne sont pas, à son avis, de la même nature et qui ne partagent pas les mêmes caractéristiques par rapport aux cotisations ou aux droits d’inscription. L’agent négociateur soutient que l’article 21 ne décrit pas un degré de relation. Il fait valoir que le mot « tout » devrait avoir un sens large.

[126]  En réponse, l’employeur fait valoir qu’il s’agit d’une audience de novo (commence du début) dans laquelle la Commission est invitée à examiner la preuve dont elle est saisie et à trancher la question à neuf.

[127]  L’employeur soutient qu’un conseiller médical qui travaille à EDSC doit détenir une licence médicale valide dans une des provinces ou territoires du Canada. Il s’agit d’une condition d’emploi. En conséquence, l’employeur rembourse, en vertu de l’article 21 de la convention collective du groupe SH, le paiement de la licence médicale du conseiller médical. Il rembourse le paiement des cotisations parce qu’il est convaincu que le paiement de ces frais est nécessaire à l’exercice continu des fonctions du poste de l’employé.

[128]  Toutefois, pour plusieurs raisons, l’employeur ne rembourse pas les primes d’assurance des conseillers médicaux.

[129]  La première raison est que les conseillers médicaux sont visés par la politique sur l’indemnisation. L’employeur fait remarquer que la politique précise trois critères d’admissibilité de base à l’article 6.1.5, comme suit :

6.1.5 Trois critères d’admissibilité de base : évaluer la demande de services juridiques ou d’indemnisation du fonctionnaire de l’État, en établissant si le fonctionnaire :

  • a agi de bonne foi;

  • n’a pas agi à l’encontre des intérêts de l’État;

  • a agi dans l’exercice de ses fonctions ou dans le cadre de son emploi, relativement à l’acte ou à l’omission qui a donné lieu à la demande.

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

[130]  Selon l’employeur, les conseillers médicaux qui travaillent pour EDSC sont visés par cette politique et bénéficient de la protection qu’elle offre. De plus, les critères d’admissibilité sont typiques de ceux du secteur de l’assurance.

[131]  De plus, selon l’employeur, la section E de l’annexe A énonce qu’il n’existe aucune limite à l’indemnisation offerte aux fonctionnaires de l’État. En conséquence, les conseillers médicaux d’EDSC qui travaillent au Québec peuvent simplement remplir un formulaire de déclaration et indiquer qu’ils sont visés par la politique et le CMQ l’accepte. Je fais remarquer toutefois que cette demande n’est étayée par aucun élément de preuve.

[132]  L’employeur soutient donc que l’agent négociateur n’a fourni aucune preuve que la politique sur l’indemnisation ne s’applique pas et ne vise pas les conseillers médicaux d’EDSC ou que le CMQ ne l’accepte pas en tant que protection valable. Toutefois, il lui incombait de s’acquitter de ce fardeau.

[133]  L’employeur ajoute que l’OMCO reconnaît expressément que la politique sur l’indemnisation est équivalente à la protection offerte par l’ACPM. La directive de l’OMCO précise qu’il reconnaît cette politique comme une protection de la responsabilité professionnelle valable. Elle énonce ce qui sut quant à la façon dont un médecin peut signer une déclaration :

[Traduction]

[…]

Déclaration du demandeur :

Assurance responsabilité professionnelle

Selon le règlement sur l’inscription du Collège, les personnes qui demandent de s’inscrire doivent avoir une assurance de responsabilité professionnelle qui est conforme aux règlements administratifs du Collège.

Les demandeurs doivent signer une déclaration selon laquelle ils se conforment à l’art. 50.2 du règlement administratif, comme suit :

Chaque membre doit obtenir et maintenir une assurance responsabilité professionnelle qui couvre tous les domaines de la pratique du membre, à l’aide de l’une ou de plusieurs des moyens suivants :

  • a) l’adhésion à l’Association canadienne de protection médicale;

  • b) une police d’assurance responsabilité professionnelle délivrée par une société autorisée à exploiter une entreprise en Ontario qui prévoit une protection d’au moins 10 000 000 $;

  • c) une protection en vertu de la Politique sur les services juridiques et l’indemnisation du Conseil du Trésor (pour les fonctionnaires de l’État du Canada).

[…]

[134]  L’employeur ajoute que puisque la politique sur l’indemnisation est reconnue en Ontario, il n’y a aucune raison de croire qu’elle n’est pas valide au Québec.

[135]  Plus particulièrement, l’employeur soutient que le Dr Bourassa a envoyé une lettre au CMQ pour demander des précisions sur la protection offerte par son assurance. Il a répondu qu’un médecin qui exerce sa profession uniquement au nom d’un organisme public à titre de salarié peut, au moment de l’inscription, remplir une déclaration selon laquelle son employeur détient un contrat d’assurance dont la garantie s’étend nommément à ce médecin, pourvu que ce contrat d’assurance comporte une garantie pour les limites minimales énoncées à l’art. 2.02 du Règlement. Néanmoins, il a insisté sur le fait qu’un médecin qui est protégé par son employeur, mais qui exerce des activités médicales à l’extérieur de cet emploi, doit souscrire une assurance responsabilité professionnelle pour ses activités. Par conséquent, le CMQ n’a pas déclaré que la politique sur l’indemnisation n’était pas applicable.

[136]  En outre, l’employeur soutient qu’une conseillère médicale d’EDSC du Québec qui a demandé le remboursement de sa prime d’assurance responsabilité le 21 avril 2016, que l’employeur a refusé au motif que la politique sur l’indemnisation offrait déjà une protection, ne l’a pas informé par la suite que le CMQ avait refusé de lui permettre de remplir un formulaire de déclaration. De plus, elle n’a déposé aucun grief. Par conséquent, l’employeur croit comprendre que le CMQ accepte les déclarations signées des conseillers médicaux qui travaillent pour EDSC. En outre, Me Racine a témoigné en disant qu’il se souvenait d’une discussion à un moment donné avec une personne du CMQ à ce sujet. Selon sa compréhension de cet appel, le CMQ accepterait la politique sur l’indemnisation comme suffisante.

[137]  La deuxième raison pour laquelle l’employeur ne rembourse pas les primes d’assurance des conseillers médicaux d’EDSC est que la Loi médicale énonce que les médecins ne sont pas tenus d’avoir une assurance s’ils exercent certaines activités énoncées dans cette loi.

[138]  Il fait valoir que les tâches des conseillers médicaux d’EDSC ne correspondent pas à celles énoncées à l’art. 31 de la Loi médicale du Québec. Selon leur description de travail, ils pratiquent la médecine administrative. Ils ne rencontrent pas les personnes qui demandent des prestations. Ils examinent les rapports rédigés par les médecins traitants particuliers. L’employeur a déclaré que le Dr Bourassa estime que son examen d’un dossier équivaut à la délivrance d’un avis médical. Toutefois, selon l’employeur, les conseillers médicaux, y compris le Dr Bourassa, ne font aucun diagnostic puisqu’ils ne voient pas les patients. Ils ne prescrivent aucun traitement ni aucun médicament. Par conséquent, puisqu’ils ne pratiquent pas la médecine active, ils n’ont pas besoin d’assurance responsabilité.

[139]  La troisième raison est qu’en se fondant sur son interprétation juridique, l’article 21 de la convention collective vise « […] les cotisations, les droits d’inscription ou tout autre droit ». Il ne s’applique pas aux primes payées en vertu d’un contrat d’assurance, qui ne sont pas de même nature et qui ne partagent pas les mêmes caractéristiques que les cotisations ou les droits d’inscription.

[140]  En outre, selon l’employeur, les droits visés à l’article 21 de la convention collective du groupe SH correspondent à ses exigences directes. Sa thèse est fondée sur le fait que la dernière partie de l’article énonce clairement que « […] dans la mesure où l’employeur est convaincu qu’un tel versement est nécessaire à l’exercice continu des fonctions de l’employé. » Par conséquent, les coûts assumés par l’employeur n’englobent pas les exigences indirectes, comme les primes d’assurance responsabilité professionnelle puisque le fait d’être membre de l’ACPM n’est pas nécessaire à l’exercice continu des fonctions des conseillers médicaux.

[141]  L’employeur a également porté à mon attention le paragraphe 129 d’Association des juristes de justice c. Conseil du Trésor, 2015 CRTEFP 18, qui comprend ce qui suit :

[…]

[129] […] Comme il est indiqué à la page 236 de Cardinal Transportation B.C. Inc., que Wamboldt cite et approuve au paragraphe 47 :

[Traduction]

Lorsque le droit à un avantage pécuniaire est allégué, il incombe normalement au Syndicat de démontrer en des termes clairs, précis et sans équivoque que l’avantage pécuniaire fait partie de la compensation globale de l’employé. Une telle intention n’est normalement pas imposée par inférence ou déduction. […]

[142]  Par conséquent, selon l’employeur, pour plusieurs raisons, il n’est pas tenu de rembourser les conseillers médicaux pour leurs primes d’assurance. Il ajoute que toutes les raisons énoncées sont applicables et liées. En conséquence, plusieurs conclusions sont possibles, y compris le fait que les conseillers médicaux exercent des activités visées par l’art. 31 de la Loi médicale, mais qu’ils bénéficient de la protection d’assurance offerte par la politique sur l’indemnisation. Une autre conclusion possible serait qu’ils n’exercent aucune des activités visées par l’art. 31 et qu’il n’est donc pas nécessaire qu’ils soient membres de l’ACPM.

[143]  En ce qui concerne le Dr Bourassa, l’employeur soutient qu’il doit souscrire une police d’assurance particulière pour une raison très directe. Ce n’est pas parce que, comme il est mentionné à la dernière partie de l’article 21 de la convention collective du groupe SH, « […] l’employeur est convaincu qu’un tel versement est nécessaire à l’exercice continu des fonctions de l’employé. » Au contraire, c’est parce qu’en plus de ses fonctions de conseiller médical d’EDSC, il travaille également ailleurs en tant que médecin d’urgence et de coroner, ce qui n’a rien à voir avec son travail à EDSC.

[144]  L’employeur a également ajouté que, malgré l’affirmation du Dr Bourassa selon laquelle son travail en tant que médecin d’urgence ajoute de la valeur à son travail de conseiller médical parce qu’il lui permet de se tenir au courant des nouvelles réalisations en médecine, cela ne constitue pas un facteur pertinent qui doit être pris en compte en vertu de l’article 21 de la convention collective du groupe SH. Il soutient que la pratique de la médecine d’urgence dans un milieu hospitalier (et l’acquisition de l’adhésion à l’ACPM) ne peut pas simplement améliorer la capacité d’un employé à accomplir son travail. Tel qu’il est indiqué dans Ells c. Conseil du Trésor (ministère des Pêches et des Océans), 2013 CRTFP 120, au par. 35, l’employé doit exercer les fonctions du poste. Le paragraphe mentionne ce qui suit :

[35] Le libellé de la convention collective est clair. L’affiliation à un ordre professionnel ne peut pas être simplement un élément rehaussant l’aptitude d’un employé à accomplir son travail, mais doit être nécessaire à l’accomplissement de son travail à un point tel que, sans une telle affiliation, l’employé ne peut pas continuer à exercer les fonctions de son poste. La jurisprudence soutient cette interprétation. Les décisions Mulleret Rosendaal et al. sont particulièrement pertinentes, eu égard aux circonstances du présent grief, car dans ces deux cas, comme dans le présent cas, l’importance de la désignation professionnelle en vue de l’admission à titre de témoinexpert avait été invoquée au soutien d’une réclamation visant le remboursement de cotisations professionnelles.

[145]  L’employeur a insisté sur le fait que même si le Dr Bourassa n’était pas membre de l’ACPM, il pouvait quand même exercer ses fonctions de conseiller médical auprès d’EDSC, puisque sa licence médicale du Québec serait toujours valide. Elle serait valide parce qu’il n’a pas besoin d’une assurance puisqu’il n’exerce aucune des activités énumérées à l’art. 31 de la Loi médicale du Québec ou parce que, subsidiairement, le CMQ accepte les déclarations signées des conseillers médicaux qui travaillent à EDSC.

[146]  Enfin, l’employeur fait valoir que sa pratique antérieure n’est pas pertinente en l’espèce. Il fait remarquer que l’agent négociateur demande plus ou moins une ordonnance qui obligerait la Commission à accepter la conclusion antérieure de l’employeur selon laquelle il devrait rembourser une part des primes d’assurance de ses conseillers médicaux qui correspondait au montant associé au travail administratif en fonction du principe d’une question déjà tranchée.

[147]  L’employeur fait remarquer que les éléments fondamentaux du concept de la question déjà tranchée sont énoncés par Brown et Beatty au paragraphe 2:2211, comme suit :

[Traduction]

2:2211 — Les éléments de base

Le concept de la préclusion équitable est solidement ancré en common law et a été énoncé comme suit :

Le principe, tel que je le conçois, veut que dans des circonstances où une des parties a, par ses paroles ou sa conduite, fait une promesse à l’autre partie ou lui a donné une assurance dans l’intention d’affecter les rapports juridiques entre les parties et qu’il y soit dûment donné suite, alors une fois que l’autre partie s’est fondée sur cet engagement et a agi en conséquence, la personne qui a fait la promesse ou donné l’assurance ne peut ensuite être justifiée de s’en remettre aux rapports juridiques existant auparavant comme si telle promesse ou assurance n’avait pas été faite, mais doit plutôt accepter les rapports juridiques liant les parties assorties de la condition que cette partie a elle‑même proposée, bien qu’elle ne soit pas appuyée par quelque autre considération de nature juridique outre sa parole donnée.

[…]

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

[148]  L’employeur soutient que la Commission ne devrait pas appliquer le principe de la question déjà tranchée en l’espèce. Il soutient que Mme Wilson a informé les conseillers médicaux en 2014 qu’une interprétation de la convention collective du groupe SH avait été demandée au Conseil du Trésor à ce sujet. En conséquence, après avoir reçu des conseils du Conseil du Trésor, EDSC a informé les conseillers médicaux qu’il ne paierait plus ces frais pour les raisons qu’il a indiquées.

[149]  L’employeur soutient que le rôle de la Commission consiste à déterminer de nouveau le sens de l’article 21 de la convention collective du groupe SH et non à appliquer le principe de la question déjà tranchée. Une fois que l’employeur a informé l’agent négociateur qu’il ne rembourserait plus les frais, la pratique antérieure a cessé d’être pertinente.

[150]  En outre, l’employeur fait remarquer qu’il n’a pas recouvré les frais remboursés aux conseillers médicaux, même si son interprétation antérieure de l’article 21 de la convention collective du groupe SH était erronée. Il fait valoir que le principe de la question déjà tranchée serait pertinent seulement dans le cas où il tenterait de recouvrer ces droits. Il fait remarquer que la durée de la préclusion est décrite par Brown et Beatty comme suit au paragraphe 2:2213 :

[Traduction]

2:2213 – Durée d’une préclusion

[…] Toutefois, une fois qu’une préclusion est survenue, les arbitres de différends se sont généralement entendus pour dire que la préclusion peut avoir une durée limitée. En conséquence, un avis d’intention de revenir aux conditions strictes de l’entente ou la conduite qui indique qu’il y aura un retour aux droits juridiques stricts de la partie, comme le dépôt d’un grief ou la négociation du règlement d’un grief, mettra fin à la préclusion. […]

[…]

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

[151]  L’employeur est également d’avis que la préclusion ne peut pas servir directement de fondement à un grief. Il m’a renvoyée à l’extrait suivant de Brown et Beatty, au paragraphe 2:2214 :

2:2214 – Préclusion fondée sur la relation de négociation ou uniquement sur le contrat

Certains arbitres de différends et tribunaux sont d’avis que la doctrine peut s’appliquer uniquement en tant que « bouclier » et non en tant qu’« épée ». C’est‑à‑dire, la préclusion ne peut pas servir directement de fondement à un grief, mais elle peut plutôt être utilisée pour empêcher la réussite d’une allégation de violation des obligations contractuelles. […]

[…]

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

[152]  En outre, l’employeur soutient qu’il n’a jamais fait de promesse expresse ou implicite aux conseillers médicaux, y compris le Dr Bourassa, de rembourser leurs primes d’assurance. Il a porté mon attention aux paragraphes 46 et 47 de Dubé c. Canada (Procureur général), 2006 CF 796. Dans cette décision, la Cour fédérale a énoncé le principe selon lequel une promesse peut donner lieu à une préclusion. Toutefois, il faut qu’une promesse ait été faite. Voici les paragraphes pertinents :

46 En somme, la jurisprudence établit qu’il ne peut exister une telle préclusion promissoire en l’absence d’une promesse, expresse ou implicite, dont les effets sont clairs et précis. Il est également établi que la doctrine de préclusion promissoire exige que la promesse ait mené celui qui a reçu cette promesse à agir autrement qu’il ou qu’elle l’aurait fait en d’autres circonstances : voir La Reine c. Association canadienne du contrôle du trafic aérien, [1984] 1 C.F. 1081 (C.A.F.) à la page 1085.

47 Afin d’établir les exigences de la doctrine de préclusion promissoire, les demandeurs doivent faire preuve des éléments suivants :

  • (1) que le Ministère, par ses paroles ou sa conduite, a fait une promesse d’accorder une priorité aux demandeurs visant à modifier leurs rapports juridiques et à inciter à l’accomplissement de certains actes; et

  • (2) en raison de cet engagement, que les demandeurs ont pris une mesure quelconque ou ont de quelque manière changé leur position.

 

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

[153]  L’employeur soutient qu’il ne peut exister une préclusion en l’absence de promesse, expresse ou implicite. Il m’a renvoyé à Pronovost c. Conseil du Trésor (ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences), 2007 CRTFP 93.

[154]  En contre‑preuve, l’agent négociateur a abandonné son argument concernant la préclusion et a répété sa demande de tenir compte de la pratique antérieure des parties afin d’aider à interpréter la convention collective.

[155]  Je conclus, d’après les éléments de preuve, qu’il a été établi que l’employeur interprète mal l’article 21 de la convention collective du groupe SH. Tel que je l’ai déjà mentionné, l’employeur avait décidé que toutes les primes d’assurance responsabilité professionnelle ne relevaient pas de l’article 21. En conséquence, il ne les a pas remboursés à ses conseillers médicaux autorisés au Québec.

[156]  Encore une fois, l’article 21 prévoit ce qui suit :

21.01 L’employeur rembourse à l’employé les cotisations, les droits d’inscription ou tout autre droit qu’il a versés à un ou plusieurs organismes ou corporations dans la mesure où l’employeur est convaincu qu’un tel versement est nécessaire à l’exercice continu des fonctions de l’employé.

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

[157]  Dans la version anglaise de la convention collective, l’article, intitulé « Registration Fees », est ainsi rédigé :

21.01 The Employer shall reimburse an employee for the payment of membership, registration or other related fees to organizations or governing bodies when the Employer is satisfied that the payment of such fees is a requirement for the continuation of the performance of the duties of the employee’s position.

[158]  L’employeur estime qu’il n’a pas été établi que le paiement des primes d’assurance responsabilité professionnelle versé à l’ACPM par les conseillers médicaux autorisés d’EDSC au Québec sont « […] nécessaire[s] à l’exercice continu des fonctions de l’employé. » Il fonde son argument sur le fait que le directeur adjoint et avocat du CMQ a informé le Dr Bourassa le 8 février 2019, comme suit :

Un médecin qui exerce sa profession uniquement pour le compte d'un organisme privé ou public sur une base salariale peut, au moment de son inscription au tableau de l'ordre, remplir une déclaration selon laquelle son employeur détient un contrat d'assurance dont la garantie s’étend nommément à lui-même, pourvu que ce contrat d'assurance comporte une garantie pour les limites minimales indiquées dans le Règlement sur l'assurance responsabilité [au par. 2.02].

[159]  Je souligne que deux conditions doivent être remplies pour obtenir l’autorisation du CMQ de ne pas verser des primes à l’assurance responsabilité professionnelle. Premièrement, le médecin doit exercer sa profession uniquement au nom d’un organisme public à titre de salarié et deuxièmement, au moment de l’inscription, le médecin doit remplir une déclaration selon laquelle son employeur détient un contrat d’assurance dont la garantie s’étend nommément à ce médecin, pourvu que ce contrat d’assurance comporte une garantie pour les limites minimales prévues à l’art. 2.02 du Règlement.

[160]  Un conseiller médical qui travaille exclusivement pour EDSC au Québec répondrait à la première condition. Toutefois, à mon avis, un conseiller médical qui travaille exclusivement pour EDSC au Québec ne peut pas répondre à la deuxième condition parce que la « déclaration » mentionnée ci‑dessus fait référence à un « contrat d’assurance ». Je ne vois pas comment un conseiller médical d’EDSC peut faire une déclaration selon laquelle, conformément aux art. 2.01, 3.02 et 3.03 du Règlement, son employeur détient « […] un contrat d’assurance dont la garantie s’étend nommément à ce médecin […] » parce la politique sur l’indemnisation n’est pas « un contrat d’assurance ».

[161]  Je comprends que Me Racine a exprimé le point de vue selon lequel la politique sur l’indemnisation prévoit une protection équivalente à un contrat d’assurance. Quoi qu’il en soit, peu importe ce que la politique sur l’indemnisation indique, il ne s’agit pas d’un « contrat d’assurance ». Une politique est un document rédigé unilatéralement par l’employeur et peut être modifiée en tout temps. De plus, dans certains cas, selon la politique sur l’indemnisation, les paiements doivent être autorisés par l’administrateur général ou le ministre. En théorie, elles peuvent être refusées. D’autre part, un contrat, qui est un accord signé par deux parties, est censé être exécutoire par la loi.

[162]  Évidemment, la question de savoir si la politique sur l’indemnisation prévoit une protection équivalente à un contrat d’assurance pour l’application des art. 2.01, 3.02 et 3.03 du Règlement constitue une question que le CMQ doit régler. Je ne crois pas que j’ai compétence pour me prononcer sur les exigences du Règlement. Je n’ai pas non plus compétence pour modifier le libellé des art. 2.01, 3.02 et 3.03 du Règlement, qui font référence à un « contrat d’assurance ». L’employeur n’a fourni aucune preuve que le CMQ (comme l’OMCO) reconnaît que la politique sur l’indemnisation constitue une protection responsabilité professionnelle valide pour les fonctionnaires de l’État. Toutefois, il lui incombait de l’établir lorsqu’il s’en est appuyé pour défendre le grief. Il appartient donc au CMQ de décider si la politique sur l’indemnisation a le même effet qu’un contrat d’assurance et si la protection qu’elle offre est semblable à une protection qui satisfait aux limites minimales indiquées dans le Règlement (à l’art. 2.02).

[163]  Je souligne que l’employeur a porté à mon attention le fait qu’une conseillère médicale d’EDSC du Québec qui a demandé le remboursement de sa prime d’assurance responsabilité le 21 avril 2016, que l’employeur a refusé au motif que la politique sur l’indemnisation offrait déjà une protection, ne l’a pas informé par la suite que le CMQ avait refusé de lui permettre de remplir les formulaires de déclaration. De plus, elle n’a déposé aucun grief. Il ne s’agit pas d’une preuve claire que le CMQ n’accepte pas la politique sur l’indemnisation comme une protection responsabilité valide en vertu des dispositions législatives du Québec. La conseillère médicale concernée n’a pas témoigné à l’audience et il pourrait exister d’autres explications justifiant son omission de déposer un grief contre la décision.

[164]  De plus, même si Me Racine a témoigné qu’il se souvenait avoir eu une discussion à un moment donné avec un représentant inconnu du CMQ qui a dit qu’il accepterait la politique sur l’indemnisation comme étant suffisante, il n’existe aucune preuve claire de ce fait. Nous ne savons pas qui était cette personne du CMQ et si cette interprétation de cette personne du Règlement (et de la Loi médicale du Québec) peut être présentée par écrit.

[165]  Les deux seules exceptions à l’exigence d’avoir un contrat d’assurance ou de bénéficier d’un tel contrat sont prévues à l’art. 3.03 du Règlement. Plus particulièrement, un contrat d’assurance est requis, à moins que

·  le médecin n’exerce l’une des activités mentionnées à l’art. 31 de la Loi médicale du Québec;

·  le médecin exerce sa profession exclusivement à l’extérieur du Québec.

[166]  Ici, une question consiste à savoir si la première possibilité – soit qu’un médecin n’exerce l’une des activités mentionnées à l’art. 31 de la Loi médicale du Québec – s’applique. L’employeur fait valoir que les tâches des conseillers médicaux d’EDSC ne correspondent pas à celles énoncées à l’art. 31 de la Loi médicale du Québec parce que les conseillers médicaux ne font aucun diagnostic, ne voient pas de patients et ne prescrivent pas de traitements ni de médicaments. En résumé, il s’appuie sur le point de vue de Me Racine selon lequel, puisqu’ils ne pratiquent pas la médecine activement, ils n’ont pas besoin d’assurance responsabilité. Me Racine n’a pas été reconnu comme un témoin expert. Par conséquent, je ne peux retenir son point de vue d’expert. Toutefois, aucun autre élément de preuve n’a été présenté pour étayer cet argument. D’autre part, le Dr Bourassa a témoigné en disant le contraire.

[167]  Je conclus que la décision de ce qui est ou non une activité médicale en vertu de l’art. 31 de la Loi médicale du Québec relève de la compétence provinciale. Je n’ai pas à trancher cette question. En même temps, je me demande sérieusement pourquoi l’employeur demanderait aux conseillers médicaux de détenir une licence médicale s’ils n’exercent réellement aucune activité médicale. Quoi qu’il en soit, je ne peux qu’apprécier la preuve dont je suis saisie. Les règles sur l’assurance responsabilité professionnelle précisent qu’un médecin‑conseil qui travaille dans un ministère exerce également la profession médicale. Je conclus donc que l’employeur n’a pas établi que cette exception – l’obligation de détenir un contrat d’assurance ou d’en bénéficier – s’applique.

[168]  En ce qui concerne la deuxième possibilité – c’est‑à‑dire qu’un médecin ne pratique pas la médecine au Québec – elle ne s’applique pas en l’espèce. Le grief de politique concerne particulièrement les conseillers médicaux d’EDSC qui travaillent au Québec.

[169]  En ce qui concerne le Dr Bourassa, il travaille pour EDSC, à titre de salarié, en plus d’exercer des activités médicales à l’extérieur de son emploi – il travaille comme médecin d’urgence et comme coroner. Compte tenu de ces circonstances, il doit souscrire une assurance responsabilité professionnelle suffisante pour garantir toutes ses activités. Je conviens que le fait qu’il doit souscrire une assurance responsabilité professionnelle pour ses autres activités n’est pas « […] nécessaire à l’exercice continu de […] » ses fonctions de conseiller médical à EDSC, conformément à ce qui est énoncé à l’article 21 de la convention collective du groupe SH. Toutefois, l’article 21 s’applique à la partie de ses activités professionnelles qui fait partie de ses fonctions à EDSC. Il a besoin d’une assurance responsabilité professionnelle pour détenir sa licence médicale au Québec. De plus, afin de continuer à exercer ses fonctions de conseiller médical d’EDSC au Québec, il doit renouveler chaque année sa licence de pratiquer la médecine au Québec.

[170]  Je comprends que le Dr Bourassa pourrait continuer à exercer ses fonctions de conseiller médical d’EDSC au Québec, même s’il ne détenait pas une licence médicale au Québec, mais seulement en Ontario (où la politique sur l’indemnisation est reconnue par l’OMCO). Mais il s’agit d’un grief de principe et non d’un grief déposé par le Dr Bourassa. Le grief de principe porte sur l’interprétation ou l’application de la convention collective du groupe SH à l’égard des conseillers médicaux d’EDSC au Québec.

[171]  Je conclus que les conseillers médicaux qui détiennent une licence du CMQ et qui travaillent au Québec paient des frais pour acquérir une assurance responsabilité professionnelle. Il s’agit du paiement d’un droit au sens de « cotisations […] ou tout autre droit qu’il a versés » de la phrase « […] les cotisations, les droits d’inscription ou tout autre droit qu’il a versés […] » de la version française de l’article 21 de la convention collective du groupe SH – ou au sens de « fees » de la phase « membership, registration or other related fees » de la version anglaise de l’article 21. Le droit est payé à une organisation, conformément à l’article 21. Et le paiement de ces droits – en ce qui concerne les fonctions du poste d’EDSC – est nécessaire à l’exercice continu des fonctions des conseillers médicaux. Les conseillers médicaux sont tenus par la loi de produire une preuve de leur assurance responsabilité. Au Québec, ils doivent fournir au CMQ leur numéro d’inscription à l’ACPM pour renouveler chaque année leur licence médicale.

[172]  Pour ces motifs, je conclus qu’il a été établi que certaines des primes d’assurance responsabilité professionnelle des conseillers médicaux d’EDSC qui travaillent au Québec sont visées par l’article 21 de la convention collective du groupe SH. Par conséquent, je conclus que l’employeur doit, en vertu de l’article 21 de la convention collective du groupe SH, rembourser aux conseillers médicaux d’EDSC au Québec la part de leurs primes d’assurance responsabilité professionnelle liée à l’exercice des fonctions de leur poste.

2.  Question en litige 2 – Lorsqu’il refuse de rembourser les primes d’assurance responsabilité professionnelle des conseillers médicaux d’EDSC qui travaillent au Québec, l’employeur interprète‑t‑il mal l’article 5 de la convention collective du groupe SH et ses obligations et fonctions implicites qui exigent que la direction exercice correctement son pouvoir discrétionnaire?

[173]  L’agent négociateur soutient également que l’employeur viole l’article 5 de la convention collective du groupe SH (intitulé « Droits de la direction ») lorsqu’il décide de ne pas rembourser aux conseillers médicaux leurs primes d’assurance responsabilité professionnelle en vertu de l’article 21 de la convention collective du groupe SH. L’agent négociateur convient que l’article 21 exige un certain niveau de discrétion de la part de la direction. Toutefois, il fait valoir que le pouvoir discrétionnaire de l’employeur n’est pas sans restriction. L’agent négociateur m’a renvoyée à un certain nombre de principes énoncés par l’arbitre de différends dans Bell Canada v. Unifor, Local 34‑0, 2016 CanLII 11573 (CA LA), au par. 46. Les deux paragraphes sont reproduits ci‑dessous :

[Traduction]

[…]

4. l’exercice des droits de la direction, tant en ce qui concerne une disposition d’une convention collective que de manière générale, constitue un exercice du pouvoir discrétionnaire qui est au cœur des droits et des obligations d’une convention collective; c’est‑à‑dire, l’exercice des droits de la direction est fondamental à l’application d’une convention collective.

5. en tant que question fondamentale à l’application et au fonctionnement d’une convention collective, tout exercice des droits de la direction doit être faire l’objet d’une contestation fondée sur le caractère raisonnable, ou peut‑être, plus particulièrement, au motif que le droit de la direction a été exercé de manière arbitraire, discriminatoire ou de mauvaise foi (ce qui, je crois, couvre effectivement le domaine du caractère déraisonnable et de la bonne foi);

[…]

[174]  L’agent négociateur estime que la décision de l’employeur de refuser de rembourser à ses conseillers médicaux autorisés du Québec leurs primes d’assurance responsabilité professionnelle était déraisonnable et arbitraire. Il estime que la décision de l’employeur constituait un exercice déraisonnable de son pouvoir discrétionnaire en vertu des articles 5 et 21 de la convention collective en raison d’un certain nombre de choix, de mesures ou d’observation de la direction tout au long de l’affaire. Par exemple, la politique sur l’indemnisation sur laquelle l’employeur a fondé sa décision de refuser les remboursements en 2014 était en fait en vigueur depuis 2008. La politique avait toujours été à la disposition du public. Malgré cela, la direction a continué de rembourser à ses médecins autorisés du Québec leurs primes d’assurance responsabilité professionnelle ou leurs cotisations versées à l’ACPM qui correspondaient au travail d’une nature administrative en vertu de l’article 21 de 2008 à 2013. Il aurait pu invoquer la politique pour refuser les remboursements pendant ces années‑là, mais il ne l’a pas fait. Toutefois, il a déclaré clairement en février 2014 que la politique était la raison de son refus de rembourser les primes. L’employeur a été incohérent. Dans le passé, il a reconnu que les conseillers médicaux avaient besoin d’une assurance pour accomplir leur travail administratif, mais son opinion est maintenant différente. Il ne peut pas changer d’avis à son gré. Le manque d’harmonisation crée de la confusion pour les conseillers médicaux.

[175]  L’agent négociateur se préoccupe également des différentes raisons que l’employeur a données pour rejeter le grief de principe. Elles ont changé d’une année à l’autre. L’agent négociateur fait valoir que la raison donnée par Mme Wilson en 2014 pour refuser de rembourser les primes était que les conseillers médicaux du Québec étaient visés par la politique sur l’indemnisation; l’employeur soutient donc qu’ils bénéficient d’une assurance. Toutefois, les raisons données par Me Racine en 2016 étaient qu’EDSC n’exige pas que ses conseillers médicaux exercent l’une des fonctions énumérées à l’art. 31 de la Loi médicale du Québec et que les droits visés à l’article 21 constituent des exigences directes, et non indirectes, de l’employeur.

[176]  L’agent négociateur estime que le courriel de Mme Wilson envoyé aux conseillers médicaux d’EDSC en 2014 constituait la reconnaissance de la nécessité d’une protection, tandis qu’au contraire, la décision de 2016 concernant le grief alléguait qu’elle n’était pas nécessaire. Il estime que l’employeur n’a pas été tout à fait franc, ouvert et direct. Il aurait dû être cohérent et franc en ce qui concerne la question de savoir si une protection est nécessaire. L’agent négociateur comprend que l’employeur peut faire valoir qu’il s’agit d’une audience de novo ayant un but autre que de revoir la décision de l’employeur relativement au grief. D’autre part, l’agent négociateur suggère que cela entraîne un vice de procédure, qui devrait être corrigé.

[177]  L’agent négociateur soutient que l’employeur doit être franc et honnête dans son interprétation de la convention collective du groupe SH. Le fait de renvoyer à des raisons toujours changeantes en ce qui concerne la décision que les conseillers médicaux n’ont pas droit au remboursement des primes d’assurance responsabilité professionnelle conformément à l’article 21 ne constitue pas une façon franche et honnête d’interpréter la convention collective du groupe SH.

[178]  Enfin, l’agent négociateur fait valoir que la présente affaire revêt une grande importance puisqu’elle démontre la dévaluation ou l’affaiblissement de la professionnalisation du travail de professionnels dans la fonction publique. Il demande que la convention collective du groupe SH soit interprétée de manière à ce que le statut professionnel de ces employés soit reconnu puisque l’employeur tire un avantage du fait qu’ils conservent leurs statuts professionnels.

[179]  L’employeur, pour sa part, souligne d’abord qu’il est important de garder à l’esprit qu’il s’agit d’un grief de principe et non d’un grief déposé par le Dr Bourassa. Par conséquent, il me demande de garder à l’esprit le fait que le témoignage du Dr Bourassa doit servir à étayer le grief de principe.

[180]  En deuxième lieu, l’employeur a soulevé une objection à l’audience concernant cette question en invoquant Burchill v. Attorney General of Canada, [1981] 1 F.C. 109 (C.A.), au motif que dans son grief de principe, l’agent négociateur n’a pas allégué que lorsqu’il a refusé de rembourser les primes d’assurance responsabilité professionnelle des conseillers médicaux d’EDSC qui travaillent au Québec, l’employeur a mal interprété l’article 5 de la convention collective du groupe SH. Par conséquent, l’employeur soutient que l’agent négociateur ne pouvait pas renvoyer cette question à l’arbitrage. En d’autres termes, l’agent négociateur a modifié la nature de son grief, ce qu’il ne devrait pas être autorisé à faire.

[181]  Néanmoins, en invoquant Canada (Procureur général) c. Lâm, 2008 CF 874, l’employeur soutient que l’article 5 de la convention collective du groupe SH ne confère aucun droit substantiel.

[182]  Je conclus que, essentiellement, l’agent négociateur a ajouté un nouvel élément au grief après qu’il ait été renvoyé à l’arbitrage.

[183]  Selon Burchill, une fois qu’un grief a été traité aux différents paliers de la procédure de règlement des griefs, il ne peut être modifié une fois qu’il est renvoyé à l’arbitrage. Tel qu’il est mentionné au paragraphe 27 d’Alliance de la fonction publique du Canada c Conseil du trésor (Agence des services frontaliers du Canada), 2016 CRTEFP 19 : « Le raisonnement dans Burchill est appliqué pour empêcher une partie de soulever une nouvelle question à [l’arbitrage] […] qui pourrait surprendre la partie adverse. Il s’agit essentiellement d’une question d’équité procédurale. »

[184]  Même si Burchill n’empêche pas de préciser la nature d’un grief à l’arbitrage, un changement fondamental de la nature du grief au niveau de l’arbitrage n’est pas autorisé.

[185]  Je conclus que je n’ai pas compétence pour trancher la présente question. Il s’agit d’une nouvelle question qui n’a pas fait l’objet de discussions entre les parties dans le cadre de la procédure de règlement de griefs et la nature d’un grief ne peut être modifiée après son renvoi à l’arbitrage.

[186]  En conséquence, l’objection soulevée par l’employeur concernant la deuxième question soulevée par l’agent négociateur est maintenue.

[187]  Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

(L’ordonnance apparaît à la page suivante)


V.  Ordonnance

[188]  Le grief au dossier 569‑02‑175 est accueilli. Je déclare que l’employeur a violé l’article 21 de la convention collective du groupe SH. Je déclare que l’employeur doit rembourser, en vertu de l’article 21 de la convention collective du groupe SH, aux médecins autorisés de l’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario qui travaillent en tant que conseillers médicaux à Emploi et Développement social Canada le paiement des frais de suivi du perfectionnement professionnel continu (c.‑à‑d. les frais de participants non membres de Mainpro).

[189]  L’objection soulevée par l’employeur concernant la deuxième question soulevée par l’agent négociateur à l’égard du grief au dossier 569‑02‑178 est maintenue.

[190]  Le grief au dossier 569‑02‑178 est accueilli. Je déclare que l’employeur a violé l’article 21 de la convention collective du groupe SH. Je déclare que l’employeur doit rembourser, en vertu de l’article 21 de la convention collective du groupe SH, aux médecins autorisés du Collège des médecins du Québec qui travaillent en tant que conseillers médicaux à Emploi et Développement social Canada le paiement des primes d’assurance responsabilité professionnelle relativement à leur travail administratif.

[191]  J’ordonne à l’employeur d’interpréter, d’appliquer et d’administrer l’article 21 de la convention collective du groupe SH conformément à la présente décision.

Le 21 novembre 2019.

Traduction de la CRTESPF

Nathalie Daigle,

une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

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