Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

À 5 reprises au cours d’une période de 15 mois, la fonctionnaire s’estimant lésée s’est vu imposer des mesures disciplinaires et a été suspendu pour ne pas avoir respecté son horaire de travail prévu – trois mesures disciplinaires portaient uniquement sur des retards relatifs à son assiduité au travail et les deux autres portaient sur des retards relatifs à son assiduité et un incident isolé non lié à son assiduité – elle a déposé un grief pour chaque suspension et mesure disciplinaire – une série de registres des laissez‑passer couvrant certaines périodes ont été déposés en preuve, y compris ceux couvrant les périodes durant lesquelles l’employeur allègue que la fonctionnaire s’estimant lésée était en retard au travail – il ne serait pas déraisonnable de dire que, pendant l’heure de pointe du matin, lorsque de nombreux employés arrivent au travail, bon nombre de ceux‑ci talonnent dans les lieux sécurisés sans réellement glisser (ou tapoter) leur laissez‑passer – les employés peuvent être au travail à temps sans aucun enregistrement du glissement de leur laissez passer – il existe des moyens beaucoup plus simples et précis de surveiller l’assiduité – l’employeur a augmenté progressivement la mesure disciplinaire imposée, car il a conclu que la fonctionnaire s’estimant lésée faisait preuve de récidive – il a commencé par une suspension de trois jours, il a ensuite imposé deux suspensions de cinq jours, ensuite de 10 jours et enfin de 20 jours – la Commission a fait droit au grief en ce qui concerne la suspension de 10 jours en fonction du principe de la tolérance – dans l’ensemble, la fonctionnaire s’estimant lésée a comparu devant la Commission en présentant cinq griefs contre des mesures disciplinaires visant des suspensions totalisant 39 jours – la Commission réduit les mesures disciplinaires à 17 jours et a ordonné à l’employeur de lui rembourser l’équivalent de 22 jours de salaire et tous les avantages sociaux associés, moins les déductions prévues par la loi et les cotisations syndicales.

Un grief est rejeté.
Trois griefs sont accueillis.
Trois griefs sont accueillis en partie.

Contenu de la décision

Date : 20191202

Dossiers : 566‑02‑9644 à 9647, 10121,

11621 et 12603

 

Référence : 2019 CRTESPF 115

Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral et Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral

Coat of Arms

Devant une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

 

ENTRE

 

Vivian Valderrama

fonctionnaire s’estimant lésée

 

et

 

ADMINISTRATEUR GÉNÉRAL

(ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement)

 

employeur

Répertorié

Valderrama c. Administrateur général (ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement)

Affaire concernant des griefs individuels renvoyés à l’arbitrage

Devant :  John G. Jaworski, une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

Pour la fonctionnaire s’estimant lésée :  Amy Kishek, Alliance de la Fonction publique du Canada

Pour l’employeur :  Joel Stelpstra, avocat

Affaire entendue à Ottawa (Ontario),

du 23 au 25 octobre 2017.

(Traduction de la CRTESPF)


MOTIFS DE DÉCISION  (TRADUCTION DE LA CRTESPF)

I.  Griefs individuels renvoyés à l’arbitrage

[1]  Vivian Valderrama, la fonctionnaire s’estimant lésée (la « fonctionnaire »), était, à la date des griefs et de l’audience, employée par le Conseil du Trésor (CT ou l’« employeur ») à Affaires étrangères, Commerce et Développement Canada (ACDC) à titre d’agente de développement international, classifiée au groupe et au niveau de gestionnaire de programmes (PM) 03. Les conditions de son emploi étaient régies en partie par une convention conclue entre le CT et l’Alliance de la Fonction publique du Canada pour le groupe Services des programmes et de l’administration, qui a été signée le 1er mars 2011 et qui est venue à échéance le 20 juin 2014 (la « convention collective »).

A.  Les griefs dans les dossiers 566‑02‑9645 et 9646

[2]  Le 4 juillet 2013, la fonctionnaire s’est vu imposer une suspension disciplinaire de trois jours pour avoir omis de respecter ses heures de travail fixées et pour avoir utilisé de manière inappropriée sa carte de crédit émise par le gouvernement. Le 24 juillet 2013, elle a déposé un grief visant à la fois la mesure disciplinaire et le refus déraisonnable de l’employeur concernant sa demande de travailler selon un horaire mobile. À titre de mesure corrective, elle a demandé ce qui suit :

  • que ses heures de travail soient modifiées, passant de 9 h à 17 h, à 9 h 30 à 17 h 30;
  • que l’employeur respecte la convention collective;
  • que la lettre du 4 juillet 2013 soit annulée, que toute preuve de celle‑ci soit retirée des dossiers de l’employeur, qu’elle soit détruite en sa présence et celle de son agent négociateur et qu’elle ne soit remplacée par aucune autre mesure disciplinaire;
  • qu’elle soit rétablie entièrement dans ses fonctions;
  • que des crédits soient portés à son compte au titre des trois jours de paie et d’avantages sociaux perdus;
  • qu’elle reçoive une copie corrigée à jour de son compte de congés et de crédits de congés pour 2013‑2014;
  • que l’employeur lui donne une assurance écrite selon laquelle elle ne subira aucun préjudice découlant du dépôt du grief;
  • qu’elle bénéficie d’une indemnisation intégrale;
  • toute autre mesure corrective qu’un arbitre de grief peut imposer.

[3]  Au troisième palier de la procédure de règlement des griefs, la mesure disciplinaire a été réduite à une suspension d’un jour.

B.  Les griefs dans les dossiers 566‑02‑9644 et 9647

[4]  Le 26 juillet 2013, la fonctionnaire s’est vu imposer une suspension disciplinaire de cinq jours pour avoir omis de respecter ses heures de travail fixées. Le 7 août 2013, elle a déposé un grief visant la mesure disciplinaire et le refus déraisonnable de l’employeur de sa demande de travailler selon un horaire mobile et elle a demandé ce qui suit :

  • · que la lettre du 26 juillet 2013 soit annulée, que toute preuve de celle‑ci soit retirée des dossiers de l’employeur, qu’elle soit détruite en sa présence et celle de son agent négociateur et qu’elle ne soit remplacée par aucune autre mesure disciplinaire;

  • · que sa demande de modifier ses heures de travail soit accordée;

  • · que la convention collective soit respectée;

  • · que des crédits soient portés à son compte au titre des cinq jours de paie et d’avantages sociaux perdus;

  • · qu’elle bénéficie d’une indemnisation intégrale;

  • · que l’employeur lui donne une assurance écrite selon laquelle elle ne subira aucun préjudice découlant du dépôt du grief;

  • · toute autre mesure corrective qu’un arbitre de grief peut imposer.

[5]  Au troisième palier de la procédure de règlement des griefs, la mesure disciplinaire a été réduite à une suspension de trois jours.

C.  Le grief dans le dossier 566‑02‑10121

[6]  Le 7 février 2014, la fonctionnaire s’est vu imposer une suspension disciplinaire de cinq jours pour avoir omis de respecter ses heures de travail fixées lorsqu’elle s’est présentée au travail en retard et pour son attitude envers un collègue et un partenaire externe et son interaction avec cette personne dans le cadre d’un échange de courriels. Le 17 mars 2014, elle a déposé un grief visant la mesure disciplinaire et a demandé ce qui suit :

  • · que la lettre du 7 février 2014 soit annulée, que toute preuve de celle‑ci soit retirée des dossiers de l’employeur, qu’elle soit détruite en sa présence et celle de son agent négociateur et qu’elle ne soit remplacée par aucune autre mesure disciplinaire;

  • · que la convention collective soit respectée;

  • · que des crédits soient portés à son compte au titre des cinq jours de paie et d’avantages sociaux perdus;

  • · que sa demande de modifier ses heures de travail soit accordée;

  • · que l’employeur lui donne une assurance écrite selon laquelle elle ne subira aucun préjudice découlant du dépôt du grief;

  • · qu’elle bénéficie d’une indemnisation intégrale;

  • · toute autre mesure corrective qu’un arbitre de grief peut imposer.

D.  Le grief dans le dossier 566‑02‑11621

[7]  Le 13 avril 2015, la fonctionnaire s’est vu imposer une suspension disciplinaire de 10 jours pour avoir omis de respecter ses heures de travail fixées lorsqu’elle s’est présentée au travail en retard. Le 6 mai 2015, elle a déposé un grief visant la mesure disciplinaire et a demandé ce qui suit :

  • · que la lettre du 13 avril 2015 soit annulée, que toute preuve de celle‑ci soit retirée des dossiers de l’employeur, qu’elle soit détruite en sa présence et celle de son agent négociateur et qu’elle ne soit remplacée par aucune autre mesure disciplinaire;

  • · que la convention collective soit respectée;

  • · que des crédits soient portés à son compte au titre des 10 jours de paie et d’avantages sociaux perdus;

  • · que l’employeur cesse d’utiliser son dossier de laissez‑passer d’accès comme horloge temporelle pour surveiller sa présence;

  • · que l’employeur lui donne une assurance écrite selon laquelle elle ne subira aucun préjudice découlant du dépôt du grief;

  • · qu’elle bénéficie d’une indemnisation intégrale;

  • · toute autre mesure corrective qu’un arbitre de grief peut imposer.

[8]  Le 1er novembre 2014, la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique (L.C. 2013, ch. 40, article 365; LCRTEFP) a été proclamée en vigueur (TR/2014-84), et a créé la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique (CRTEFP) qui remplace la Commission des relations de travail dans la fonction publique et le Tribunal de la dotation de la fonction publique. Le même jour, les modifications corrélatives et transitoires édictées par les articles 366 à 466 de la Loi no 2 sur le plan d’action économique de 2013 (L.C. 2013, ch. 40) sont aussi entrées en vigueur (TR/2014-84). En vertu de l’article 393 de la Loi no 2 sur le plan d’action économique de 2013, une instance engagée au titre de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (L.C. 2003, ch. 22, art. 2; LRTFP) avant le 1er novembre 2014 se poursuit sans autres formalités en conformité avec la LRTFP, dans sa forme modifiée par les articles 365 à 470 de la Loi no 2 sur le plan d’action économique de 2013.

E.  Le grief dans le dossier 566‑02‑12603

[9]  Le 14 octobre 2015, la fonctionnaire s’est vu imposer une suspension
disciplinaire de 20 jours pour avoir omis de respecter ses heures de travail fixées lorsqu’elle s’est présentée au travail en retard. Le 26 octobre 2015, elle a déposé un grief visant la mesure disciplinaire et a demandé ce qui suit :

  • · que la lettre du 14 octobre 2015 soit annulée, que toute preuve de celle‑ci soit retirée des dossiers de l’employeur, qu’elle soit détruite en sa présence et celle de son agent négociateur et qu’elle ne soit remplacée par aucune autre mesure disciplinaire;

  • · que la convention collective soit respectée;

  • · que des crédits soient portés à son compte au titre des 20 jours de paie et d’avantages sociaux perdus;

  • · que l’employeur cesse d’utiliser son dossier de laissez‑passer d’accès comme horloge temporelle pour surveiller sa présence;

  • · que l’employeur lui donne une assurance écrite selon laquelle elle ne subira aucun préjudice découlant du dépôt du grief;

  • · qu’elle bénéficie d’une indemnisation intégrale;

  • · toute autre mesure corrective qu’un arbitre de grief peut imposer.

[10]  La fonctionnaire a renvoyé les griefs à l’arbitrage en vertu des alinéas 209(1)a) et b) de la LRTFP.

[11]  Le 19 juin 2017, la Loi modifiant la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique et d’autres lois et comportant d’autres mesures (L.C. 2017, ch. 9) a reçu la sanction royale et a modifié le nom de la CRTEFP et le titre de la LCRTEFP et de la LRTFP pour qu’ils deviennent respectivement la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (la « Commission »), la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral et la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral (la « Loi »).

II.  Résumé de la preuve

[12]  La fonctionnaire est titulaire d’un baccalauréat ès arts de l’Université Concordia, d’une maîtrise en administration publique de la Carleton University et d’un certificat en traduction. Elle a commencé sa carrière dans la fonction publique fédérale en décembre 2007 auprès de l’Agence canadienne de développement international.

[13]  À la date de l’audience, Steve Jaltema était employé par le CT à titre de directeur adjoint et de conseiller en développement à la mission du gouvernement du Canada auprès de l’Association des Nations de l’Asie du Sud‑Est, à Jakarta, en Indonésie. Pendant la période pertinente à la mesure disciplinaire et aux griefs, il était un gestionnaire à la Section de la gouvernance de la Direction de la croissance économique et de la gouvernance d’ACDC et était le superviseur immédiat de la fonctionnaire. Il relevait de François Montour, directeur général de la Direction.

[14]  À l’époque pertinente à la mesure disciplinaire et aux griefs, la fonctionnaire vivait à proximité des rues Elgin et Catherine, au centre‑ville d’Ottawa, en Ontario et son unité de travail était située au 200, promenade du Portage, à Gatineau, au Québec (« Place du Portage »). La distance, selon la route, est d’un peu moins de 4 km.

[15]  M. Jaltema a témoigné en disant qu’environ 120 personnes faisaient partie de l’unité de travail et qu’elle avait une structure de gestion peu hiérarchique. Ils ont fait affaire avec environ une douzaine d’organisations internationales canadiennes bien connues et ils avaient des liens directs au public et aux médias. Il a indiqué que ce n’était pas rare que leurs décisions soient soulevées à la Chambre des communes pendant la période des questions et dans les discussions tenues par les cabinets des ministres avec l’organisation.

[16]  Il a affirmé que les heures de travail fixées ont été fixées à l’unité de travail de la fonctionnaire afin de permettre l’attribution et la surveillance du travail. Il a dit qu’il devait connaître les heures de travail des employés qui relevaient de lui afin qu’il puisse gérer et effectuer les travaux et de traiter les choses, y compris les demandes urgentes et imprévues.

[17]  M. Jaltema a témoigné en disant qu’il est devenu le superviseur de la fonctionnaire en avril 2013 et qu’à ce moment‑là, il avait été informé des préoccupations que son superviseur avait cernées, plus particulièrement les difficultés concernant ses heures d’arrivée et de départ et la difficulté d’obtenir une rétroaction. Il a indiqué qu’immédiatement avant la mutation de la fonctionnaire à son équipe, une lettre datée du 12 mars 2013 (la « lettre du 12 mars ») de M. Montour a été donnée à la fonctionnaire, dont la partie pertinente énonçait ce qui suit :

[Traduction]

[…]

La présente lettre a pour but de décrire les conditions administratives, les mécanismes associés à la demande et à l’autorisation de diverses formes de congé, ainsi que les attentes en matière de comportement en milieu de travail, que vous devez respecter dans le contexte de votre emploi.

Horaire de travail

Vos heures de travail seront comprises dans les heures de travail de base acceptables de 9 h à 17 h, avec un déjeuner d’une demi‑heure. Vous avez droit à deux (2) périodes de repos de quinze (15) minutes par jour de travail à plein temps (un pendant l’avant‑midi et l’autre pendant l’après‑midi), si les nécessités du service le permettent.

Les absences non autorisées seront considérées comme un congé non payé et ne donnent donc pas droit à pension.

Un horaire mobile est autorisé avec le consentement de l’employeur, selon les circonstances opérationnelles et si les exigences le permettent.

Attentes en matière de comportement en milieu de travail auxquelles vous devez vous conformer

Je m’attends à ce que vous ayez une attitude de professionnalisme et de respect en tout temps au travail, que vous fassiez votre part pour créer un milieu de travail sain et que vous fassiez preuve de collaboration et de tact dans vos relations avec vos collègues, par exemple :

  • accepter des opinions différentes de la vôtre;

  • accepter les directives, les recommandations, la rétroaction ou les commentaires de vos gestionnaires;

  • accepter que vous ne puissiez pas toujours avoir raison;

  • faire preuve d’un bon jugement;

  • communiquer de manière respectueuse verbalement et par courriel à la direction, à nos collègues et à nos partenaires.

Vous devez vous conformer aux conditions énoncées dans la présente lettre. À défaut, des mesures disciplinaires progressives pourraient être prises à votre égard, ce qui pourrait donner lieu à votre licenciement.

[…]

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

[18]  La fonctionnaire a témoigné en disant que la modification de ses heures de travail n’a pas été discutée avec elle; on lui a simplement dit que ses heures seraient de 9 h à 17 h. Elle a dit qu’avant de recevoir la lettre, elle travaillait dans un autre lieu et ses heures de début et de départ étaient mobiles en ce qu’elle commençait entre 9 h 30 et 10 h et terminait entre 17 h 30 et 18 h. Elle a confirmé qu’elle avait reçu la lettre du 12 mars et qu’elle comprenait que son heure de début était à 9 h et que son heure de départ était de 17 h.

A.  La convention collective

[19]  L’article 19 de la convention collective est intitulé « Élimination de la discrimination » et la clause 19.01 énonce ce qui suit :

19.01  Il n’y aura aucune discrimination, ingérence, restriction, coercition, harcèlement, intimidation, ni aucune mesure disciplinaire exercée ou appliquée à l’égard d’un employé‑e du fait de son âge, sa race, ses croyances, sa couleur, son origine nationale ou ethnique, sa confession religieuse, son sexe, son orientation sexuelle, sa situation familiale, son incapacité mentale ou physique, son adhésion à l’Alliance ou son activité dans celle‑ci, son état matrimonial ou une condamnation pour laquelle l’employé‑e a été gracié.

[20]  L’article 25 de la convention collective est intitulé « Durée du travail » et les clauses de cet article et d’autres articles pertinents aux présents griefs sont reproduits ci‑dessous :

[…]

Généralités

25.01  Aux fins de l’application du présent article :

a)  la semaine est une période de sept (7) jours consécutifs qui commence à 0 h le lundi matin et se termine à 24 h le dimanche;

b)  le jour est une période de vingt‑quatre (24) heures qui commence à 0 h.

25.02  Aucune disposition du présent article ne doit être interprétée comme garantissant une durée de travail minimale ou maximale. Cela ne permet aucunement à l’Employeur de réduire en permanence les heures de travail d’un employé‑e à temps plein.

25.03  Les employé‑e‑s peuvent être tenus d’inscrire leur présence sur le ou les formulaires prescrits par l’Employeur.

[…]

25.05  L’Employeur doit assurer deux (2) périodes de repos de quinze (15) minutes chacune par journée de travail complète, sauf dans les cas où les nécessités du service ne le permettent pas.

Travail de jour

25.06  Sauf indication contraire dans les paragraphes 25.09, 25.10 et 25.11 :

a)  la semaine normale de travail est de trente‑sept virgule cinq (37,5) heures et s’étend du lundi au vendredi inclusivement;

et

b)  la journée normale de travail est de sept virgule cinq (7,5) heures consécutives, sauf la pause‑repas, et se situe entre 7 h et 18 h.

25.07  Les employé‑e‑s sont informés par écrit de leur horaire de travail, ainsi que des changements qui y sont apportés.

25.08  Horaire mobile

Sous réserve des nécessités du service, l’employé‑e qui travaille de jour a le droit de demander de travailler selon un horaire mobile allant de 7 h à 18 h, aux heures que l’employé‑e choisit, et cette demande ne peut être refusée sans motif valable.

[…]

Article 28

HEURES SUPPLÉMENTAIRES

[…]

28.03  Généralités

a)  L’employé‑e a droit à la rémunération des heures supplémentaires prévue aux paragraphes 28.05 et 28.06 pour chaque période complète de quinze (15) minutes de travail supplémentaire qu’il ou elle accomplit :

i)  quand le travail supplémentaire est autorisé d’avance par l’Employeur ou est conforme aux consignes d’exploitation normales;

et

ii)  quand l’employé‑e ne décide pas de la durée du travail supplémentaire.

[…]

28.04  Attribution du travail supplémentaire

a)   Sous réserve des nécessités du service, l’Employeur s’efforce autant que possible de ne pas prescrire un nombre excessif d’heures supplémentaires et d’offrir le travail supplémentaire de façon équitable entre les employé‑e‑s qualifiés qui sont facilement disponibles.

[…]

Article 44

CONGÉ NON PAYÉ POUR LES OBLIGATIONS PERSONNELLES

44.01  Un congé non payé est accordé pour les obligations personnelles, selon les modalités suivantes :

a)  sous réserve des nécessités du service, un congé non payé d’une durée maximale de trois (3) mois est accordé à l’employé‑e pour ses obligations personnelles;

b)  sous réserve des nécessités du service, un congé non payé de plus de trois (3) mois mais ne dépassant pas un (1) an est accordé à l’employé‑e pour ses obligations personnelles; […]

[…]

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

B.  Registre des laissez‑passer

[21]  À l’audience, Daniel Lavigueur était employé par le CT. Il était un coordinateur de la sécurité matérielle et avait occupé ce poste au complexe de la Place du Portage pendant six ans. Il était chargé de coordonner tous les aspects de la sécurité du bâtiment, qui comprenait les lieux de travail de la fonctionnaire et tous les programmes de contrôle d’accès des points d’entrée et de sortie et des lieux de travail du gouvernement.

[22]  M. Lavigueur a témoigné en disant que les employés autorisés à accéder aux lieux de travail du gouvernement reçoivent des laissez‑passer personnels qui les identifient. Ceux‑ci permettent aux employés d’accéder à leur lieu de travail par des barrières, y compris des portes, qui sont verrouillées. Il a déclaré que tous les employés sont censés glisser leur laissez‑passer lorsqu’ils entrent dans leur lieu de travail; ils ne sont pas censés suivre une autre personne sans glisser leur propre laissez‑passer. Cette pratique est connue sous le nom de [traduction] « talonnage ».

[23]  Lorsqu’un laissez‑passer sert à déverrouiller un point d’entrée, un dossier informatisé est créé de l’emplacement et du laissez‑passer utilisé, ainsi que l’heure à laquelle le laissez‑passer a été utilisé pour ouvrir un lieu d’accès particulier pour permettre l’entrée. On peut accéder à ces renseignements et les trier. Selon M. Lavigueur, les heures d’accès enregistrées sont, selon le cas, à l’heure normale de l’Est ou à l’heure avancée de l’Est, selon la période de l’année.

[24]  Il a affirmé qu’à la demande de la direction, il pouvait produire des rapports indiquant l’utilisation par l’employé de son laissez‑passer des points d’accès contrôlés du complexe de la Place du Portage. Les rapports indiquent la date et l’heure, ainsi que le point d’accès utilisé. Dans son témoignage, il a indiqué que, de temps à autre, on lui demandait de produire des rapports sur l’utilisation du laissez‑passer de la fonctionnaire pour certaines périodes, ce qu’il a dit avoir fait. Des rapports sur l’utilisation de son laissez‑passer (les « registres des laissez‑passer ») pour les périodes pertinentes aux mesures disciplinaires ont été déposés en preuve.

[25]  Les registres des laissez‑passer indiquent les renseignements pertinents en colonnes. Ils comprennent le nom de la fonctionnaire, le numéro de son laissez‑passer visible, un code lié au laissez‑passer, une date et l’heure (selon le format : [traduction] « heure : minute; secondes ») indiquées chaque fois que son laissez‑passer était glissé, si l’accès a été accepté ou refusé, et où il a été glissé pour obtenir l’accès.

[26]  Je n’ai entendu aucun témoignage quant à la question de savoir si les téléphones et les ordinateurs de travail affichaient ou étaient configurés en même temps que le système de cartes d’accès utilisé et enregistré.

[27]  Je n’ai entendu aucun témoignage au sujet d’horloges dans le lieu de travail de la fonctionnaire.

[28]  Je n’ai entendu aucun témoignage selon lequel la fonctionnaire ou un autre employé était en mesure de connaître le temps enregistré dans le système de sécurité de leur laissez‑passer particulier lorsqu’ils sont glissés.

[29]  Dans un échange de courriels les 5 et 6 août 2015, M. Lavigueur a confirmé à la fonctionnaire que le système qui enregistre les laissez‑passer des employés et produit des rapports n’a pas été créé pour contrôler les heures de travail des employés, mais plutôt à des fins de sécurité; il est synchronisé au réseau de sécurité et, par conséquent, il pourrait exister une différence de quelques minutes par rapport aux horloges des ordinateurs du bureau; un employé pourrait entrer dans le bâtiment avec un autre employé; et les portes de sécurité du lieu de travail de la fonctionnaire permettaient à plus d’un employé d’entrer grâce au glissement d’un seul laissez‑passer.

[30]  En contre‑interrogatoire, M. Jaltema a confirmé que le lieu de travail de la fonctionnaire a changé à la fin de l’été 2015; la date exacte n’a pas été donnée. Ce changement était important parce qu’à la Place du Portage, où l’ensemble des présumées inconduites ont eu lieu, les laissez‑passer des employés ouvraient une porte à travers de laquelle plusieurs personnes pouvaient passer une fois qu’elle était ouverte.

C.  Code de valeurs et d’éthique du secteur public

[31]  Une copie du Code de valeurs et d’éthique du secteur public (le « Code de V et E ») a été déposée en preuve, les parties suivantes ont été surlignées pour moi :

[…]

L’intendance

Les fonctionnaires fédéraux se voient confier la responsabilité d’utiliser et de gérer judicieusement les ressources publiques, tant à court qu’à long terme.

[…]

Comportements attendus

Les fonctionnaires fédéraux sont censés se conduire conformément aux valeurs du secteur public et aux comportements attendus suivants.

1. Respect de la démocratie

Les fonctionnaires préservent le régime canadien de démocratie parlementaire et ses institutions.

[…]

1.2 Ils exécutent avec loyauté les décisions prises par leurs dirigeants conformément à la loi et aident les ministres à rendre compte au Parlement et à la population canadienne.

[…]

2. Respect des personnes

Les fonctionnaires respectent la dignité humaine et reconnaissent la valeur de chaque personne en adoptant les comportements suivants :

[…]

2.3 Ils favorisent l’établissement et le maintien de milieux de travail sûrs et sains, exempts de harcèlement et de discrimination

 2.4 Ils travaillent ensemble dans un esprit d’ouverture, d’honnêteté et de transparence qui favorise l’engagement, la collaboration et la communication respectueuse.

[…]

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

D.  La mesure disciplinaire du 4 juillet 2013 : Suspension de trois jours sans solde réduite à un jour (dossiers 566‑02‑9645 et 9646)

1.  Assiduité

[32]  M. Jaltema a témoigné en disant qu’en avril 2013, les heures de travail prévues à l’horaire de la fonctionnaire étaient de 9 h à 17 h.

[33]  Un courriel du 19 mars 2013 de la fonctionnaire à l’intention des MM. Jaltema et Montour et indiquant ce qui suit a été déposé en preuve :

[Traduction]

[…]

Je n’ai aucun problème à commencer à 9 h et à finir à 17 h. Jusqu’à maintenant, je suis arrivée entre 9 h 30 et 10 h et je suis partie entre 18 h et 19 h. Comme je vous l’ai dit à maintes reprises, je dois consacrer un peu plus de temps, ce qui a toujours été pendant mes heures libres – aucune heure supplémentaire n’a été facturée […].

[…]

[34]  M. Jaltema a témoigné en disant que, peu après que la fonctionnaire a commencé à relever de lui, il a commencé à constater qu’elle ne se présentait pas à temps au travail. Il a dit qu’il lui en avait parlé et que, le 24 mai 2013, à 9 h 55, il lui a envoyé un courriel qui indiquait ce qui suit :

[Traduction]

[…]

J’ai constaté que vous n’êtes toujours pas ici ce matin. Lorsque vous êtes en retard, veuillez en informer Christopher et moi. Veuillez vous assurer de consigner dans le système l’heure tardive à laquelle vous êtes arrivée. Il est important de maintenir des heures régulières. Je suis tout à fait disposé à faire preuve de souplesse lorsque des choses imprévues surgissent, mais cela doit être discuté au préalable.

Merci

Steve

[…]

[35]  La fonctionnaire a répondu à 10 h 53 ce matin‑là en disant ce qui suit :

[Traduction]

[…]

Je suis désolée pour ce matin. Je suis arrivée à 10 h, puisque mon autobus était en retard en raison de la pluie. Malheureusement, je n’avais pas mon cellulaire avec moi pour vous appeler ou pour appeler Christ pour vous dire que j’arriverais en retard. Pour cette heure, je remplirai un formulaire de congé annuel et je vous l’enverrai aux fins d’approbation.

Soyez assuré que je vous appellerai ou que j’appellerai Christ pour vous informer que je serai en retard si quelque chose d’imprévu se reproduit.

Merci.

Vivian

[…]

[36]  « Christ » est un raccourci pour « Christopher » qui, à l’époque, était l’adjoint de M. Jaltema. M. Jaltema a dit que tous les employés qui relèvent de lui doivent l’informer, ainsi que Christopher, s’ils seront en retard ou absents.

[37]  M. Jaltema a affirmé que, le 5 juin 2013, il a discuté avec la fonctionnaire de ses heures de travail, qu’il a résumé dans un courriel qu’il lui a envoyé le lendemain à 14 h 19. Il a dit qu’il ne s’agissait pas de la première discussion qu’il avait eue avec elle au sujet de ses heures de travail. Les parties pertinentes du courriel sont reproduites ci‑dessous :

[Traduction]

[…]

J’ai estimé qu’il serait utile que j’écrive une brève note pour résumer les principaux points de notre discussion d’hier au sujet de mes attentes en matière d’heures de travail. Il ne s’agit pas d’un résumé exhaustif de toute la conversation, mais seulement des principaux points.

· Je m’attends à ce que vos heures de travail soient de 9 h à 17 h, du lundi au vendredi.

· J’ai expliqué qu’aux fins de la planification du travail, de réunions, entre autres, il est important que tous les membres de l’équipe aient des heures de travail régulières prévues à l’horaire et non un horaire mobile (par exemple, malheureusement, commencer le travail entre 9 h et 10 h et terminer le travail entre 17 h et 18 h ne fonctionne pas puisqu’il serait difficile de fixer des réunions et d’attribuer le travail.)

· Vous avez indiqué que ce n’est pas votre préférence, mais vous avez accepté de vous tenir aux heures de 9 h à 17 h.

· J’ai expliqué que l’on ne s’attend pas à ce que les employés travaillent au‑delà de leurs heures de travail prévues à l’horaire et que cela n’est pas acceptable, ainsi que mes attentes à ce sujet sont uniformes à l’égard de tous les membres de l’équipe.

· J’ai expliqué la raison pour laquelle je ne veux pas que les personnes travaillent des heures en sus des heures régulières prévues à l’horaire (nous avons discuté de l’uniformité parmi les membres de l’équipe, de la charge de travail, de l’équilibre travail‑vie personnelle, d’éviter l’épuisement professionnel, de l’attribution équitable du travail, etc.).

· Vous espériez qu’il y aurait une certaine souplesse pour rester un peu plus tard de votre propre gré de temps à autre pour rattraper le retard de la lecture des articles des médias, des documents envoyés à des fins d’information et pour nettoyer votre bureau. J’ai expliqué qu’il serait acceptable parfois de rester un peu plus tard, mais « un peu » est en fait de 15 à 45 minutes, environ, de temps à autre, et que ce n’est pas quelque chose à laquelle je m’attends ou que j’encourage et cela ne constitue pas des heures supplémentaires autorisées.

· J’ai expliqué que je m’attends à ce que tous les employés respectent leurs heures de travail régulières, mais que je peux faire preuve de souplesse en cas d’événements occasionnels et peu fréquents qui surgissent (par exemple, un réparateur ou réparatrice qui vient à la maison, emmener un animal de compagnie au vétérinaire, etc.). Ces événements doivent être approuvés au préalable et ils doivent être peu fréquents.

J’estime que notre discussion d’hier a été très constructive et j’espère que le fait d’avoir le présent courriel en tant que dossier de notre conversation sera utile comme référence.

[…]

[38]  Le 11 juin 2013, à 15 h 20, la fonctionnaire a envoyé une réponse par courriel. Elle a intégré les commentaires suivants dans le courriel de M. Jaltema :

[Traduction]

[…]

Merci de votre message de suivi qui décrit les principaux points de notre discussion du 6 juin concernant vos attentes en matière d’heures de travail à mon égard. Tout d’abord, je tiens à répéter que je me conformerai à toutes vos attentes. Toutefois, comme il se peut que je ne me sois pas bien expliqué au sujet de certains points au cours de notre discussion, veuillez trouver mes éclaircissements en bleu.

[…]

Je me suis rendue compte que vous ne donnez qu’un exemple, mais je tiens à souligner que je ne vous ai pas demandé si je pouvais venir au travail et finir de travailler au cours d’une période donnée. Étant donné que je réside à Ottawa et que jutilise le transport en commun pour me rendre au travail, je vous ai demandé si je pouvais venir à 9 h 30 et terminer à 17 h 30. Je respecte votre décision de refuser ma demande, même si vous ne m’avez pas donné la raison pour laquelle vous n’avez pas accepté ma demande alors que vous avez accepté les demandes d’autres membres du personnel de la Gouvernance de commencer après 9 h.

[…]

Comme vous le dites, des choses imprévues surgissent parfois. Par conséquent, même si l’on veut votre approbation au préalable, ce n’est pas toujours possible de le faire. Cependant, je peux vous assurer que j’ai toujours fait de mon mieux pour prendre les dispositions qui s’imposent afin que je puisse me présenter au travail à temps et que je continuerai à le faire.

[…]

[39]  En ce qui concerne la demande de la fonctionnaire de modifier ses heures de travail afin qu’elles soient de 9 h 30 à 17 h 30, M. Jaltema a dit qu’il lui a dit que, si elle démontrait une uniformité en se présentant au travail à temps (début à 9 h), qu’en échange, j’autoriserai la modification de l’heure de début, soit 9 h 30. Il a indiqué que, malgré cet incitatif, elle ne pouvait pas respecter l’heure de début à 9 h.

[40]  Pour ce qui est du commentaire de la fonctionnaire selon lequel elle était en retard en raison du transport en commun, M. Jaltema a affirmé que la grande partie de ses employés à l’époque utilisaient le transport en commun et n’éprouvaient aucune difficulté de se rendre au travail à temps.

[41]  Voici l’échange de courriels entre M. Jaltema et la fonctionnaire, daté
du 25 juin 2013, qui a été déposé en preuve :

[Traduction]

[De M. Jaltema à la fonctionnaire, à 16 h 45]

[…]

Je suis venu à votre bureau pour discuter de la question de vérification de [nom du client omis] ce matin vers 9 h 20, mais vous n’étiez pas encore au bureau.

Le respect des heures de travail régulières semble être une difficulté récurrente. Je vous inviterai à une réunion sur les heures de travail plus tard cette semaine en vue d’en discuter. Veuillez me faire savoir s’il y a une heure vendredi où vous n’êtes pas disponible.

[…]

[De la fonctionnaire à M. Jaltema, à 17 h 28 :]

[…]

Je n’ai pas l’intention de me trouver des excuses, mais je suis allée à Montréal pour rendre visite à ma famille pour la fin de semaine et je suis revenue tard hier soir. Puisque je suis arrivée au bureau à 9 h 35 ce matin et que je rattrape mes heures maintenant, mais je partirai dans cinq minutes.

Je suis disponible à tout moment pour vous rencontrer vendredi.

[…]

[42]  M. Jaltema a reçu une copie du registre du laissez‑passer de la fonctionnaire pour la période du 2 avril au 25 juin 2013. Il y avait des points de données pour 48 jours. Un conseiller en relations de travail (LR) a rédigé un résumé du contenu du registre, qui a été envoyé à M. Jaltema. Le résumé indiquait qu’il n’y avait aucun enregistrement de l’utilisation du laissez‑passer de la fonctionnaire avant 9 h pour aucun de ses jours de travail au cours de cette période. Un examen du registre des laissez‑passer déposé en preuve a permis de relever ce qui suit :

  • le 1er jour, les données relatives à la première utilisation du laissez‑passer de la fonctionnaire étaient illisibles;
  • pour les 47 jours comportant des points de données lisibles, il a été utilisé pour la première fois plus de cinq minutes après 9 h;
  • cinq fois au cours de ces 47 jours, il a été utilisé pour la première fois entre 9 h et 9 h 29;
  • au cours de 23 jours de ces 47 jours, il a été utilisé pour la première fois entre 9 h 30 et 10 h;
  • au cours de 19 jours de ces 47 jours, il a été utilisé plus de deux heures après 9 h;
  • de ces 19 jours, 11 des premières utilisations étaient plus de 2,5 heures après 9 h et les autres 8 ont été enregistrées en après‑midi.

[43]  Il ressort de la preuve que, pendant cette période, la fonctionnaire n’avait pas été informée que son laissez‑passer était utilisé pour surveiller les arrivées au travail; elle n’a pas reçu non plus les registres des laissez‑passer avant environ la date de l’audience disciplinaire.

[44]  M. Jaltema a rédigé son propre registre des heures à l’égard desquelles il savait personnellement que la fonctionnaire n’était pas arrivée au travail à temps. Il énonce ce qui suit :

[Traduction]

· 2013‑04‑10, j’ai constaté que Vivian était en retard, je n’ai fait aucun suivi

· 2013‑04‑11, j’ai constaté que Vivian était en retard, je n’ai fait aucun suivi

· 2013‑05‑24, Vivian était en retard d’une heure au travail. J’ai fait un suivi verbal et par écrit auprès d’elle. Elle a répondu au courriel.

· 2013‑06‑05, Vivian était en retard. Nous avons eu une longue discussion sur les attentes et j’ai fait un suivi par écrit. Vivian a répondu au courriel.

· 2013‑06‑19, Vivian est restée très tard au travail sans autorisation. J’ai fait un suivi par courriel. Elle a répondu au courriel.

· 2013‑06‑21, Vivian était en retard de 35 minutes au travail. J’ai fait un suivi par écrit. Vivian a répondu au courriel.

· 2013‑06‑25, Vivian était en retard au travail. J’ai fait un suivi par écrit. Vivian a répondu au courriel.

· 2013‑05‑25, Vivian est restée tard au travail sans autorisation. Elle m’a envoyé un courriel à 17 h 30.

· 2013‑06‑26, Vivian était encore au travail à 17 h 45. Je lui ai demandé verbalement de quitter le bureau, car il était en dehors des heures de bureau.

[45]  Le 2 juillet 2013, la fonctionnaire a envoyé un courriel à M. Jaltema. Aux termes de la convention collective, elle a demandé de modifier ses heures de travail, passant d’une heure de début de 9 h à 9 h 30. Dans le courriel, elle a indiqué qu’il lui était difficile de se présenter au travail à 9 h parce qu’elle résidait à Ottawa et utilisait le transport en commun. Il a répondu cinq minutes plus tard. Il a dit qu’ils pourraient en discuter lors de leur réunion plus tard dans la journée sur les heures de travail.

[46]  La fonctionnaire a témoigné en disant que son trajet en autobus prenait normalement 45 minutes, mais qu’en hiver, il lui fallait une heure.

[47]  Dans son témoignage, elle a indiqué qu’elle ne glissait pas toujours son laissez‑passer pour entrer dans son lieu de travail parce que, parfois, les personnes tenaient la porte ouverte pour elle. Elle a déclaré que, parfois, lorsqu’elle entrait, elle leur disait qu’elle le glissait simplement pour être certaine.

[48]  Malgré le fait qu’elle est arrivée en retard certains jours, il ne ressort aucunement de la preuve que la fonctionnaire n’a pas travaillé tous ses jours de travail de 7,5 heures ni qu’elle n’a pas présenté des demandes de congés lorsqu’elles étaient nécessaires.

2.  Carte American Express

[49]  Une carte de crédit American Express (la « carte Amex ») a été émise à la fonctionnaire, qui devait être utilisée uniquement pour les affaires du gouvernement. La preuve a révélé qu’elle l’avait utilisé cinq fois entre le 20 mai 2013 et le 16 juin 2013 pour des achats non liés aux affaires du gouvernement.

[50]  M. Jaltema a déclaré que la fonctionnaire lui avait dit que la carte Amex ressemblait à sa carte de crédit personnelle et qu’elle l’avait utilisée par erreur. Elle a également indiqué que, même si le numéro d’identification personnel (NIP) de la carte Amex était, à l’origine, différente, elle l’a volontairement changé afin qu’il corresponde à celui de sa carte de crédit personnel.

[51]  Avant d’utiliser la carte Amex en mai et en juin 2013, plus tôt, en juillet 2012, elle avait reçu un avertissement quant à son utilisation inappropriée.

[52]  Le 27 juin 2013, elle a envoyé une lettre à l’équipe des services de voyage de la carte Amex et lui a demandé volontairement d’annuler sa carte, car elle ne prévoyait aucun déplacement pendant plusieurs années. Elle a été annulée.

3.  Mesures disciplinaires

[53]  Le 2 juillet 2013, M. Jaltema a rencontré la fonctionnaire et le représentant de son agent négociateur pour discuter de son utilisation de la carte Amex et des difficultés qu’elle a éprouvées à respecter ses heures de travail prévues à l’horaire. Le 4 juillet 2013, il lui a imposé une mesure disciplinaire sous forme de suspension de trois jours sans solde. Les extraits pertinents de la lettre disciplinaire, du même jour, énoncent ce qui suit :

[Traduction]

La présente fait suite à notre réunion prédisciplinaire du 2 juillet 2013 concernant les heures de travail et l’utilisation inappropriée de votre carte de voyage ministériel American Express. […] Avant cette réunion, je vous ai donné une copie du dossier que j’ai obtenu de votre utilisation de votre carte d’accès pour entrer au lieu de travail indiquant les heures et les dates d’entrée entre le 1er avril et le 25 juin 2013, ainsi que le rapport sur l’utilisation de la carte de crédit ministériel relativement à des dépenses non liées aux déplacements. […]

J’ai examiné attentivement les documents et j’ai tenu compte des explications que vous avez fournies au cours de notre réunion. Plus particulièrement, jai tenu compte de ce qui suit :

Heures de travail

· vous avez reçu une lettre administrative du directeur général en mars de cette année indiquant clairement que vos heures de travail sont de 9 h à 17 h;

· nous avons eu plusieurs discussions de suivi et communications écrites depuis lors dans le cadre desquelles j’ai indiqué très clairement que je m’attendais à ce que vous respectiez des heures de travail régulières de 9 h à 17 h.

· vous vous êtes engagée à respecter ces heures de travail à maintes reprises, mais vous ne l’avez pas fait;

· le rapport sur la carte d’accès indique que vous avez toujours été en retard au travail, malgré ce qui précède, et que vous êtes toujours restée au‑delà des heures de travail approuvées.

Utilisation abusive de la carte de crédit de voyage ministériel

· lorsque vous avez demandé votre carte American Express, vous avez accepté les conditions d’utilisation qui expliquaient · que l’utilisation abusive pourrait donner lieu à des mesures disciplinaires;

· vous avez reçu un avertissement en juillet 2012 concernant la première utilisation inappropriée de la carte;

· vous avez utilisé la carte de manière inappropriée à quatre (4) reprises entre mai et juin 2013;

· vous avez remboursé le montant dû sur votre carte;

· vous avez reconnu vos propres défis relatifs à la carte et, comme contribution à la résolution du problème, vous avez choisi volontairement d’annuler votre carte de crédit ministériel.

À la lumière des considérations qui précèdent, jai conclu quil est approprié de vous imposer une suspension de trois (3) jours de travail sans solde. […]

Ces actes d’inconduite sont graves et je m’attends à ce que vous corrigiez immédiatement votre comportement. Des infractions ultérieures pourraient donner à la prise de mesures plus sévères, y compris jusqu’au congédiement.

Au lieu de suivre ce parcours, j’espère que vous redoublerez davantage vos efforts pour respecter les conditions de travail que nous avons examiné. Lors de notre réunion du 2 juillet 2013, vous vous êtes engagée à utiliser votre carte d’accès tous les matins à votre arrivée au travail. Je surveillerai votre ponctualité en examinant l’heure que vous entrez dans le bâtiment à l’aide de votre carte d’accès.

[…]

[54]  Au cours de la période de règlement des griefs, cette mesure disciplinaire a été réduite à une suspension d’un jour.

E.  La mesure disciplinaire du 26 juillet 2013 : Suspension de cinq jours sans solde réduite à trois jours (dossiers 566‑02‑9644 et 9647)

[55]  Un registre des laissez‑passer du 2 juin au 24 juillet 2013 a été déposé en preuve. Un résumé de ses renseignements a été rédigé et déposé en preuve. Il y avait points de données pour 14 jours. Le registre a révélé ce qui suit :

  • · le 1er jour, le laissez‑passer de la fonctionnaire a été utilisé pour la première fois avant 9 h;

  • · au cours de trois jours, il a été utilisé pour la première fois dans les cinq minutes après 9 h;

  • · au cours de 10 jours, il a été utilisé pour la première fois dans les cinq minutes après 9 h;

  • · de ces 10 jours, il a été utilisé pour la première fois dans les 20 minutes de 9 h, et ce, à cinq reprises;

  • · de ces 10 jours, il a été utilisé pour la première fois plus de 30 minutes après 9 h, et ce, à quatre reprises

  • · de ces 10 jours, il a été utilisé pour la première fois entre 10 h et 10 h 30, et ce, une fois;

  • · de ces 10 jours, il a été utilisé pour la première fois après 10 h 30, et ce, une fois;

[56]  Malgré le fait qu’elle est arrivée en retard certains jours, il ne ressort aucunement de la preuve que la fonctionnaire n’a pas travaillé tous ses jours de travail de 7,5 heures ni qu’elle n’a pas présenté des demandes de congés lorsqu’elles étaient nécessaires.

[57]  Le 25 juillet 2013, M. Jaltema a rencontré la fonctionnaire et un représentant de l’agent négociateur pour discuter de ses heures de travail prévues à l’horaire. Le 26 juillet 2013, il lui a imposé une mesure disciplinaire sous forme de suspension de cinq jours sans solde. Les extraits pertinents de la lettre disciplinaire, datée du même jour, énoncent ce qui suit :

[Traduction]

[…]

La présente fait suite à notre réunion prédisciplinaire du 25 juillet 2013 concernant les heures de travail. Vous avez eu loccasion lors de cette réunion dexpliquer la raison pour laquelle vous navez pas été en mesure de respecter les heures de travail fixées. Vous étiez accompagnée de votre représentant syndical. […]

Avant cette réunion, je vous ai donné une copie du dossier que j’ai obtenu de votre utilisation de votre carte d’accès pour entrer au lieu de travail indiquant les heures et les dates d’entrée. Nous avons également discuté à maintes reprises de la nécessité de maintenir des heures de travail régulières de 9 h à 17 h depuis que vous vous êtes jointe à la Section de la gouvernance le 1er avril de cette année. Il y a trois semaines, soit le 4 juillet 2013, une suspension disciplinaire de trois (3) jours vous a été imposée pour le non‑respect de vos heures de travail. À ce moment‑là, vous vous êtes engagée à respecter les heures de travail prévues à l’horaire. Malgré ces discussions antérieures, de ces attentes claires et d’une mesure disciplinaire très récente, vous n’avez pas respecté des heures de travail régulières.

[…]

[…] Lors de notre réunion du 2 juillet 2013, vous vous êtes engagée à utiliser votre carte d’accès tous les matins à votre arrivée au travail. Je continuerai de surveiller votre ponctualité en examinant l’heure que vous entrez dans le bâtiment à l’aide de votre carte d’accès. Ces rapports devraient me signaler que vous êtes entrée dans le bâtiment au plus tard 9 h les jours de travail.

[…]

[58]  Il ressort de la preuve que la fonctionnaire n’a pas reçu les registres des laissez‑passer avant environ la date de l’audience disciplinaire.

[59]  Le 6 février 2014, à la suite du troisième palier de la procédure de règlement des griefs, cette mesure disciplinaire a été réduite à une suspension de trois jours.

F.  La mesure disciplinaire du 7 février 2014 : suspension de cinq jours sans solde (dossier 566‑02‑10121)

1.  Assiduité

[60]  Lorsqu’il a été interrogé au sujet de l’assiduité de la fonctionnaire à la suite de l’imposition de la mesure disciplinaire du 26 juillet 2013, M. Jaltema a dit qu’elle semblait s’être améliorée quelque peu, mais pas autant que ce à quoi il s’attendait. Il a également indiqué qu’à l’époque, elle a soulevé un problème médical et a fourni une note du médecin datée du 1er août 2013 (la « note du 1er août »), qui énonce ce qui suit :

[Traduction]

[…]

La présente a pour but d’attester qu’en raison d’un problème médical, Vivian a besoin d’une certaine souplesse relativement à son heure d’arrivée au travail. Certains jours où son problème médical est aggravé, il peut lui falloir du temps supplémentaire pour se préparer au travail et ce fait doit être pris en compte en ce qui concerne son heure de début.

[…]

[61]  Le 7 août 2013, M. Montour a envoyé un courriel à la fonctionnaire et à M. Jaltema au sujet de la note du 1er août, indiquant ce qui suit :

[Traduction]

[…]

J’accuse réception de la note médicale signée par le Dr Zahra Saleh du 1er août 2013, que vous m’avez donnée hier après‑midi.

Nous sommes disposés à vous offrir la souplesse nécessaire. En conséquence, vous pouvez commencer votre journée de travail entre 7 h 30 et 9 h. Votre jour de travail se terminera entre 15 h 30 et 17 h, selon votre heure d’arrivée.

Si vous ne pouvez pas arriver avant 9 h, je vous demande d’appeler votre gestionnaire, ou moi-même lorsqu’il est en vacances, avant 9 h pour nous informer que vous serez en retard et pour nous donner votre heure d’arrivée. Tel que cela est expliqué dans la note du médecin, il se peut que vous ne puissiez pas arriver à 9 h certains jours où votre problème médical est aggravé. Dans ce cas, nous vous demanderons de soumettre une demande de congé de maladie, car votre arrivée tardive serait due à votre problème de santé. Veuillez noter que, si votre problème médical est tel que vous n’êtes pas en mesure de vous préparer au travail à temps, votre capacité à effectuer le travail ce jour‑là pourrait être diminuée. Je vous encourage donc à prendre toute la journée en congé de maladie et à bien vous reposer à la maison.

[…]

[62]  M. Jaltema a témoigné en disant que, même s’il était au courant du courriel de M. Montour, la fonctionnaire lui avait dit que les heures mobiles de début devaient être entre 8 h et 9 h 30. Le 21 août 2013, M. Jaltema et la fonctionnaire se sont rencontrés pour discuter de la question. Le 27 août 2013, il lui a envoyé le courriel suivant :

[Traduction]

[…]

La présente lettre fait suite à notre réunion du 21 août 2013 concernant votre demande de prise en compte de considération spéciale relativement à vos heures de travail en raison de votre problème médical. Lors de cette réunion, vous avez fait part de nouveaux renseignements sur votre problème médical et la raison pour laquelle il vous est difficile de respecter des heures de travail régulières le matin et le respect d’une heure de début de 9 h.

[…]

[…] Même si nous vous avions déjà accordé un horaire de travail mobile vous permettant de vous présenter au travail au cours d’une période de 90 minutes (arrivée entre 7 h 30 et 9 h et fin du travail entre 15 h 30 et 17 h), vous avez expliqué que vous souhaitez modifier cette période afin d’avoir une heure de début plus tard, en raison de la disponibilité de votre médecin. Je vous ai remercié de votre ouverture à offrir volontairement plus de renseignements sur la nature de vos besoins médicaux. Je me suis engagé à examiner votre demande, compte tenu du contexte opérationnel et de l’obligation de prendre des mesures d’adaptation raisonnables pour répondre à vos besoins médicaux. La présente lettre et la réunion d’aujourd’hui sont en réponse à cette réunion.

Je répondrai à votre demande d’une heure d’arrivée et de départ plus tard mobile afin de répondre à vos besoins médicaux. Votre heure d’arrivée sera donc entre 8 h et 9 h 30 les jours de travail et votre heure de départ sera entre 16 h et 17 h 30, selon votre heure d’arrivée ce jour‑là.

Votre horaire de travail mobile ne vous dispense pas de vous présenter au travail à temps et ne vous soustrait pas de l’imposition de mesures disciplinaires si vous omettez de le faire. Nous nous attendons à ce que vous travailliez 7,5 heures par jour, avec deux périodes de repos de 15 minutes, une le matin et une l’après‑midi, selon les conditions opérationnelles, et une pause‑repas de 30 minutes. Si votre problème médical vous empêche d’être disponible pour vous présenter au travail avant 9 h 30, vous devez m’appeler pour m’informer de votre retard et vous devez consigner l’heure tardive, selon le type de congé approprié pris. Dans la mesure du possible, les arrivées tardives et les rendez‑vous chez le médecin devraient être planifiés au préalable. Des congés annuels ne seront pas accordés pour des retards imprévus. Les retards imprévus qui ne correspondent pas aux congés de maladie ou à toute autre forme de congé admissible prévue dans votre convention collective seront considérés comme des congés non autorisés et seront déduits de votre salaire. Si vous ne glissez pas votre carte d’accès avant 9 h 30 et que vous ne m’appelez au préalable, vous serez considéré comme en retard et des mesures disciplinaires pourraient être imposées. De même, vous ne devez pas travailler des heures supplémentaires non autorisées. Si vous restez au bureau au‑delà de vos heures normales de travail, des mesures disciplinaires peuvent être prises. Je continuerai à surveiller votre respect des heures de travail à l’aide de votre carte d’accès. Puisque vos heures de travail commencent à 9 h 30 au plus tard, vous devez être à votre bureau prête à travailler à 9 h 30. Le rapport sur l’utilisation de votre carte doit indiquer que vous êtes entrée dans le lieu de travail avant 9 h 30, dont 9 h 30 est la dernière heure d’entrée acceptable.

Afin de permettre cette mesure d’adaptation, vos fonctions de travail seront modifiées afin de réduire l’incidence de votre horaire mobile sur les intervenants internes et externes avec lesquels vous travaillez. […]

[…]

[63]   M. Jaltema a déclaré que, parfois, la fonctionnaire était en retard et avait téléphoné. Toutefois, elle ne l’informait pas ni ne lui demandait l’approbation au préalable, de manière systématique. Il a dit que parfois, elle arrivait en retard, sans explication.

[64]  Un registre des laissez‑passer du 25 juillet au 16 août 2013 a été déposé en preuve. Il y avait points de données pour 11 jours. Le registre indiquait ce qui suit :

  • au cours de deux des jours, le laissez‑passer de la fonctionnaire a été utilisé pour la première fois avant 9 h;
  • au cours de cinq des jours, il a été utilisé pour la première fois dans les cinq minutes après 9 h;
  • au cours de quatre des jours, il a été utilisé pour la première fois plus de cinq minutes après 9 h;
  • de ces quatre jours, les heures indiquées étaient 9 h 6, 9 h 7, 9 h 9 et 9 h 28;
  • une note manuscrite pour le 16 août 2013 indiquait une utilisation initiale du laissez‑passer à 11 h 20.

[65]  Le 5 août 2013, M. Montour a envoyé un courriel à la fonctionnaire (et une copie conforme à M. Jaltema). Il lui a rappelé ses heures de travail et lui a dit que, les 13 et 14 août, il avait constaté qu’elle était toujours au bureau vers 17 h 30. Il a mentionné que le non‑respect de ses heures de travail pouvait donner lieu à d’autres mesures disciplinaires, y compris le licenciement. Elle a répondu par courriel (copie conforme à M. Jaltema) en indiquant que, le 13 août, elle a travaillé jusqu’à 17 h 10 parce qu’elle avait cru comprendre qu’il souhaitait avoir une note d’information à la fin de la journée et que, le 14 août, elle avait travaillé jusqu’à 17 h 5. Elle est ensuite restée pour nettoyer son bureau et est partie à 17 h 25.

[66]  Une série de courriels du 16 août au 12 septembre 2013, entre la fonctionnaire, M. Jaltema et Kimberley Heuckroth (qui a agi au nom de M. Jaltema le 16 août 2013), a été déposée en preuve. Ce jour‑là, la fonctionnaire est arrivée entre 11 h 10 et 11 h 20. Elle a appelé Mme Heuckroth et lui a envoyé un courriel. Un courriel provenant de M. Jaltema du 19 septembre 2013, visant à signaler aux relations de travail (RL) que la fonctionnaire était arrivée en retard le 16 août, à 11 h 20, le 28 août, à 9 h 32 et le 13 septembre à 9 h 31, a été déposé en preuve. Dans son courriel, il a suggéré de continuer à la surveiller, mais de ne prendre aucune mesure.

[67]  Les registres des laissez‑passer du 13 septembre 2013 au 6 janvier 2014, qui comportaient des points de données pour 52 jours et qui indiquaient ce qui suit, ont été déposés en preuve :

  • au cours de 38 des jours, le laissez‑passer de la fonctionnaire a été utilisé pour la première fois avant 9 h;
  • au cours de sept des jours, il a été utilisé pour la première fois dans les cinq minutes après 9 h 30;
  • au cours de quatre des jours, il a été utilisé pour la première fois dans les 10 minutes après 9 h 30, y compris une fois à 9 h 37 et trois fois à 9 h 38;
  • le 28 novembre, il a été utilisé pour la première fois à 11 h 8 (en raison d’un rendez‑vous médical, dont elle en avait informé M. Jaltema);
  • au cours de deux autres jours, sa première utilisation a été indiquée à 10 h 58 et 20 h 24, respectivement.

[68]  Un registre des laissez‑passer du 7 au 13 janvier 2014 a été déposé en preuve. Il comportait des points de données pour cinq jours. Il indiquait ce qui suit :

  • au cours d’un jour, le laissez‑passer de la fonctionnaire a été utilisé pour la première fois avant 9 h 30;
  • au cours d’un jour, il a été utilisé pour la première fois à 9 h 30;
  • au cours de deux jours, il a été utilisé pour la première fois dans les cinq minutes après 9 h 30;
  • au cours d’un jour, il a été utilisé pour la première fois plus de cinq minutes après 9 h 30, soit à 9 h 47.

[69]  Un courriel du 8 novembre 2013 de la fonctionnaire à M. Jaltema a été déposé en preuve. Il indique que, le mardi 12 novembre, il se pouvait qu’elle soit en retard d’une demi‑heure parce qu’elle s’était engagée à faire un dessert pour le repas‑partage ce jour‑là et elle devait le préparer en matinée. Le registre des laissez‑passer indiquait que son laissez‑passer a été glissé pour la première fois ce jour‑là à 10 h 58.

[70]  Le 13 janvier 2014, la fonctionnaire a envoyé un courriel à M. Jaltema indiquant qu’elle commencerait à travailler à 9 h puisqu’elle devait terminé sa thérapie et était [traduction] « complètement rétablie ». De plus, le même jour, M. Jaltema a envoyé un courriel aux RL, et une copie conforme à M. Montour, indiquant ce qui suit :

[Traduction]

[…]

J’ai examiné l’assiduité pendant la période et voici mon analyse des données brutes :

· depuis le 4 octobre 2013, Vivian s’est présentée au travail un peu plus des deux tiers des jours où elle est arrivée au travail soit exactement à 9 h 30, soit un peu plus avant;

· cela n’est pas conforme aux directives qui lui ont été données (notamment, elle devrait arriver avant 9 h 30, afin qu’elle soit à son bureau au plus tard à 9 h 30)

· elle est arrivée en retard au travail 18 fois pendant la période (après 9 h 30) – y compris aujourd’hui

· sur ces 18 fois, je constate qu’un des retards découlait d’un rendez‑vous chez le médecin dont elle m’avait informé au préalable (2013‑11‑28), alors il ne devrait pas être pris en compte

· les 17 autres fois, elle ne m’en avait informé que de trois (2013‑11‑15, 2013‑12‑16 et 2014‑01‑07) […]

[…]

· elle s’est présentée au travail un samedi soir et un dimanche soir, sans raison professionnelle dont je suis au courant et sans autorisation préalable (les 1er et 2 décembre).

· elle est arrivée très tôt au travail un jour (6 h 34) et est partie, en raison du stress, et a pris un jour de congé de maladie (le 3 décembre) – dont elle m’a informé ultérieurement être lié à la santé mentale. […]

· l’utilisation de sa carte indique qu’elle continue de rester au travail après 17 h 30, malgré les plusieurs discussions, directives verbales et écrites de ne pas le faire, et dans certains cas, très tard, sans autorisation

· l’utilisation de sa carte indique qu’elle entre et quitte le lieu de travail très fréquemment – par exemple, elle est entrée par une porte de sécurité 14 fois le 13 décembre

[…]

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

2.  Rainbow of Hope

[71]  Rainbow of Hope était un projet de construction d’une école dans une zone du Pérou dévastée par un tremblement de terre. Le projet était coordonné à partir d’Edmonton, en Alberta. La fonctionnaire a affirmé qu’elle a commencé à participer à ce projet en 2010. Michelle Veilleux était la gestionnaire responsable de la proposition.

[72]  Selon la fonctionnaire, la proposition contenait de fausses déclarations. Une chaîne de courriels a été déposée en preuve. Le premier courriel a été envoyé par le responsable du projet au Pérou. Il a été envoyé le 19 janvier 2014 et indiquait qu’il envoyait des documents concernant le transfert de terrains, d’un bâtiment et d’équipement. Il a été envoyé à la suite d’une téléconférence à laquelle il avait participé avec la fonctionnaire et Mme Veilleux. La fonctionnaire lui a répondu le 22 janvier 2014 (le « courriel du 22 janvier »), indiquant ce qui suit :

[Traduction]

[…]

Merci de nous avoir fourni les documents supplémentaires sur le groupe scolaire, y compris les permis de construire obtenus récemment. Toutefois, selon les notes que j’ai prises au sujet d’une conversation téléphonique tenue avec le premier dirigeant [nom supprimé] de Rainbow of Hope for Children en septembre 2012 après qu’il ait présenté son rapport de projet définitif auquel était joint un énoncé (constance) de la « Direccion Regional de Educacion de Ica (DREI) » dans le cadre duquel il a accusé réception du terrain où le groupe a été construit, il m’a informé que Rainbow était le propriétaire du bâtiment et qu’afin de le transférer légalement à la DREI et de se conformer à l’exigence relative à la cession des biens prévue à l’entente de contribution, une déclaration d’usine était essentielle. Il a répété cette exigence dans plusieurs courriels qu’il m’a envoyés et dont une copie conforme vous a été envoyée, au sujet des progrès que vous avez réalisés dans l’obtention d’un tel document. Je vous souhaite beaucoup de succès dans la réalisation de ce processus et le transfert légal du bâtiment à la DREI.

[…]

[73]  Une copie conforme du courriel du 22 janvier a été envoyée à Mme Veilleux et à la personne qui avait signé l’entente de contribution. Mme Veilleux a répondu le même jour en envoyant une copie conforme à M. Jaltema en indiquant ce qui suit :

[Traduction]

[…]

Je suis surprise par votre courriel ci‑dessous.

Je vous ai dit que, de mon point de vue, [le gestionnaire de projet] avait fourni une preuve suffisante du transfert de l’école au gouvernement péruvien.

Veuillez lui envoyer un autre courriel indiquant que nous estimons qu’il s’est conformé à cet aspect de l’entente de contribution. Toutefois, s’il estime qu’il serait utile à la durabilité de l’école, il pourrait poursuivre l’obtention d’une déclaration d’usine, mais nous ne continuerons pas à insister sur ce document.

Je considère que vous avez fait votre travail pour assurer la durabilité du projet.

Le seul aspect qui pourrait maintenant nécessiter un suivi de votre part serait lié à l’audit financier.

Pour conclure, j’estimais que le ton de votre courriel était ferme et pouvait être interprété comme agressif ou non collaboratif.

[…]

[74]  Le 23 janvier 2014, M. Jaltema a envoyé un courriel à la fonctionnaire (copie conforme à Mme Veilleux), en indiquant ce qui suit :

[Traduction]

Le gestionnaire responsable a déterminé qu’on a fait preuve de diligence raisonnable et que personne ne tente de « décevoir » le gouvernement du Canada et qu’il est clair que les intérêts du gouvernement du Canada ont été traités et que les fonds publics ont été protégés. Le gestionnaire responsable vous l’a expliqué et vous a donné des directives à cet égard et vous pouvez le consigner dans le dossier du projet. Cet aspect du dossier est maintenant clos. La suggestion selon laquelle le gestionnaire ne se préoccupe pas de la diligence raisonnable ou de la protection des fonds publics est une interprétation des faits inappropriée et erronée des faits.

La façon dont vous avez choisi de traiter cette question est sérieuse et fera l’objet d’un suivi.

[…]

[75]  La fonctionnaire a témoigné en disant que la directive qu’elle a reçue au cours d’une réunion individuelle avec Mme Veilleux était de fermer le dossier. À l’audience, lorsque la fonctionnaire a été interrogée au sujet du courriel du 22 janvier et qu’on lui a demandé ce qu’elle avait fait, elle a répondu qu’à son avis, elle avait suivi cette directive. Elle a déclaré qu’elle ne souscrivait pas à la décision de Mme Veilleux, mais que celle‑ci avait le dernier mot. Selon l’interprétation de la fonctionnaire, dans leurs courriels des 22 et 23 janvier, Mme Veilleux et M. Jaltema ont interprété le courriel du 22 janvier comme une non-conformité. Elle comprenait que son courriel pouvait être interprété différemment.

[76]  La fonctionnaire a indiqué qu’elle estimait que Mme Veilleux [traduction] « évaluait » ses compétences en gestion de projet et qu’elle savait que la fonctionnaire avait un pouvoir délégué. Mme Veilleux l’évaluait afin de déterminer si la fonctionnaire accepterait ce que le partenaire local (au Pérou) lui disait. Elle a dit que, s’il s’agissait d’une évaluation, elle voulait être prudente, parce que Mme Veilleux pouvait révoquer son autorité. La fonctionnaire a ensuite admis qu’elle avait dépassé les bornes et qu’elle estimait qu’elle était devenue émotive et n’y avait pas réfléchi comme il faut.

[77]  Le 6 février 2014, la fonctionnaire a envoyé un courriel de suivi au courriel du 22 janvier, qu’elle a décrit comme [traduction] « clarifiant » parce que Mme Veilleux et M. Jaltema estimaient que le courriel du 22 janvier était ambigu. Il indiquait ce qui suit :

[Traduction]

[…]

Pour donner suite à mon courriel du 21 janvier 2014, Michelle Veilleux, gestionnaire de la Section de la croissance économique durable, estime que Rainbow of Hope for Children s’est acquittée de ses obligations contractuelles concernant la cession des biens en fonction des documents que vous nous avez fournis. Cependant, si vous estimez que cela puisse être utile aux fins de la durabilité du groupe scolaire, elle indique que vous pourriez poursuivre le processus d’obtention d’une déclaration d’usine, mais que Partenariats pour l’innovation dans le développement ne continuera pas d’exiger que vous le fassiez.

[…]

[78]  En contre‑interrogatoire, la fonctionnaire a confirmé qu’au troisième palier de la procédure de règlement des griefs, elle n’a pas soulevé la possibilité que son pouvoir délégué soit en péril.

[79]  La fonctionnaire a créé un document imprimé de huit pages qui a été déposé en preuve et qui est intitulé [traduction] « Chronologie des événements – Insubordination et heures de travail (Vivian Valderrama – le 30 juin 2014) ». Elle a confirmé qu’il a été créé après la mesure disciplinaire de février et pendant la procédure de règlement des griefs. En contre‑interrogatoire, elle a également confirmé que ce document ne fait aucune référence à la préoccupation selon laquelle son pouvoir délégué avait été révoqué. Elle a également confirmé que rien dans son exposé de griefs n’indiquait qu’elle estimait que Mme Veilleux l’évaluait.

[80]  Dans son témoignage en interrogatoire principal, la fonctionnaire n’a pas divulgué ses échanges avec M. Jaltema et Mme Veilleux entre le 23 janvier et le 6 février. Les extraits pertinents de ces échanges sont reproduits ci‑dessous :

[Traduction]

[De la fonctionnaire à M. Jaltema (copie conforme à Mme Veilleux), le 23 janvier à 12 h 17 :]

[…]

Veuillez noter que je tourne la page au moment où Michelle m’a ordonné de cesser de faire preuve de diligence raisonnable à l’égard du transfert légal de l’école. C’est précisément pour cette raison qu’à la dernière ligne du deuxième paragraphe, je lui souhaite des succès dans la réalisation du processus de transfert et que je ne lui demande pas de présenter une copie de la déclaration d’usine. […] Néanmoins, comme vous l’indiquez, j’enverrai [au gestionnaire de projet] un autre courriel clarifiant que je ne ferai aucun suivi à l’égard de cette question particulière, conformément aux directives de la direction.

Même si mon courriel peut être qualifié de strict, je crois réellement qu’il peut également être qualifié de poli. En ce qui concerne le commentaire selon lequel j’étais insensible, j’ai remercié [le gestionnaire de projet] d’avoir envoyé les documents supplémentaires. […]

Peut‑être que Michelle pourrait expliquer pourquoi elle estime que mon message pourrait être interprété comme « agressif ou non collaboratif ». Dans quel sens?

J’estimais réellement que la direction aurait souhaité que je fasse remarquer à Rainbow, de façon indirecte et polie, qu’elle fait preuve de contradiction : soit le premier dirigeant qui minforme que Rainbow était propriétaire du bâtiment et que la déclaration d’usine était essentielle aux fins du transfert légal de l’école et m’envoyant des mises à jour préparées par [le gestionnaire de projet] lui‑même quant aux progrès réalisés à cet égard. Et, le fait que [le gestionnaire de projet] a dit à Michelle et à moi au cours de la réunion que la déclaration d’usine n’est pas nécessaire et qu’il s’agit uniquement d’un titre foncier. En fait, la déclaration d’usine est la suivante :

[…]

Compte tenu de tout ce qui précède, je dois conclure qu’à Rainbow, il semble que la main droite ne sait pas ce que fait la main gauche ou que Rainbow tente de décevoir le MAECD en espérant que son versement différé lui soit remboursé.

Quoi qu’il en soit, je ne ferai aucun suivi à cet égard, puisque Michelle m’a ordonné de cesser de faire preuve de diligence raisonnable en ce qui a trait au Transfer légal du groupe scolaire aux autorités locales et, implicitement, d’exercer mon obligation à titre de fonctionnaire, en vue de protéger les intérêts du gouvernement du Canada et les fonds des contribuables.

 […]

[De la fonctionnaire à Mme Veilleux (copie conforme à M. Jaltema), le 29 janvier à 16 h 45 :]

[…]

Veuillez accepter mes excuses pour avoir suggéré que vous ne vous souciez peut‑être pas de la protection des intérêts du gouvernement du Canada et des fonds des contribuables. En tant qu’agente de projet, je prends cette responsabilité tellement au sérieux que, parfois, elle obscurcit mon raisonnement. Soyez assuré que cela ne se reproduira plus.

[…]

[De Mme Veilleux à la fonctionnaire (copie conforme à M. Jaltema), le 4 février à 15 h 11 :]

[…]

Avez‑vous envoyé un courriel à [le gestionnaire de projet] au sujet du fait que nous estimons qu’il s’est conformé à l’entente de contributions comme je vous l’ai demandé?

[…]

[De la fonctionnaire à Mme Veilleux (copie conforme à M. Jaltema), le 4 février, à 16 h 33 :]

[…]

Je ne l’ai pas encore fait. Je souhaitais d’abord discuter de cette question avec Steve, car je la considère comme une question de nature très délicate qui pourrait avoir des répercussions pour le MAECD pour les raisons suivantes :

1) établir un précédent (on pourrait considérer que Rainbow bénéficie d’un traitement spécial);

2) si une demande d’AIPRP concernant ce projet est déposée, il se peut que le document de transfert légal (déclaration d’usine) n’en fasse pas partie, puisque l’on donne à Rainbow, le choix d’obtenir ou non ce document.

Cette discussion a eu lieu hier. Je suppose qu’il vous en a informé. Puisque j’ai fait mon travail en tant qu’agente de projet visant à signaler les problèmes à la direction, voici le texte du courriel que j’ai l’intention d’envoyer [au gestionnaire de projet] :

[…]

Pour donner suite à mon courriel du 21 janvier 2014, Michelle Veuilleux [sic] […] estime que Rainbow of Hope for Children s’est conformée à l’exigence concernant la cession des biens prévue à l’entente de contribution que votre organisation a signée en mars 2009. Cependant, si vous estimez que cela peut être utile aux fins de la durabilité du groupe scolaire, elle indique que vous pouvez poursuivre le processus d’obtention d’une déclaration d’usine afin d’effectuer le transfert légal du groupe scolaire à la Direccion Regional de Educacion de Ica (DREI), mais nous ne continuerons pas d’exiger que vous le fassiez.

[…]

Veuillez examiner le texte ci‑dessus et me faire savoir si vous l’acceptez.

Steve : Je souhaite également obtenir votre approbation.

[…]

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

[…]

[De M. Jaltema à la fonctionnaire (copie conforme à Mme Veilleux), le 5 février à 17 h 22 :]

[…]

Vous avez exprimé votre point de vue à cet égard et la direction a pris une décision. Que vous souscriviez ou non à la décision prise, vous devez mettre en œuvre la décision de la direction fondée sur les documents fournis par mon [sic] [gestionnaire de projet]. Vous devez immédiatement : 1) envoyer à Rainbows [sic] of Hope un courriel qui l’informe clairement que le MAECD estime qu’elle s’est acquittée de ses obligations contractuelles sans lui demander d’autres documents sur le transfert de la cession des biens et que nous ne lui demanderons plus d’autres documents; et 2) cesser de remettre en question davantage la décision de la direction concernant cette affaire – l’occasion pour le faire est passée et une décision a été prise.

Votre courriel au [gestionnaire de projet] devrait indiquer ce qui suit :

Pour donner suite à mon courriel du 21 janvier 2014, Michelle Veilleux, gestionnaire de la Section de la croissance économique durable, estime que Rainbow of Hope for Children s’est acquittée de ses obligations contractuelles concernant la cession des biens en fonction des documents que vous nous avez fournis. Cependant, si vous estimez que cela peut être utile aux fins de la durabilité du groupe scolaire, elle indique que vous pourriez poursuivre le processus d’obtention d’une déclaration d’usine, mais que nous ne continuerons pas d’exiger que vous le fassiez.

Je m’attends à ce que vous suiviez ces directives sans délai. Veuillez envoyer une copie conforme de votre courriel au [gestionnaire de projet] à Michelle et à moi.

[…]

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

[…]

[De la fonctionnaire à M. Jaltema (copie conforme à Mme Veilleux), le 6 février à 14 h 51 :]

[…]

Je suis désolée que vous estimez que je remets en question la décision de Michelle d’informer [le gestionnaire de projet] que nous ne ferons plus de suivi de la cession des biens découlant du projet de Rainbow of Hope for Children au Pérou. Ce n’était jamais mon intention de le faire. Je tiens à vous rappeler que, lorsqu’elle m’a demandé de ne plus donner suite à cette affaire et de lui envoyer un courriel en conséquence, j’ai suivi ses directives, même si je n’ai pas utilisé ses termes exacts dans le courriel que je lui ai envoyé le 21 janvier.

Comme je vous l’ai indiqué lors de notre réunion du 3 février et j’ai répété ma réponse à Michelle le lendemain, j’étais d’avis qu’il valait mieux ne pas être trop explicite sur le fait que nous ne continuerons pas d’insister sur la question concernant la cession des biens dans le courriel à l’intention de [gestionnaire de projet] puisque le MAECD pourrait subir des conséquences à une date ultérieure, pour les raisons que j’ai soulignées dans mon courriel que je lui ai envoyé. Je suis d’accord pour dire que j’aurais dû en discuter avec vous et Michelle avant de lui envoyer mon courriel. Quoi qu’il en soit, je tiens à souligner que je crois réellement que je devais, à titre d’agente de projet, souligner les problèmes à la direction. Je regrette que vous l’ayez interprété comme si je remettais en question la décision de Michelle.

J’enverrai bientôt un autre courriel [au gestionnaire de projet] à l’aide du texte que vous avez modifié et je vous enverrai une copie conforme, ainsi qu’à elle.

[…]

3.  Mesures disciplinaires

[81]  Le 3 février 2014, M. Jaltema a rencontré la fonctionnaire et le représentant de
son agent négociateur pour discuter de son assiduité et du dossier de Rainbow of Hope. Le 7 février 2014, il lui a imposé une mesure disciplinaire sous forme de suspension de cinq jours sans solde. Les extraits pertinents de la lettre disciplinaire, datée du même jour, énoncent ce qui suit :

[Traduction]

[…]

La présente fait suite à l’audience disciplinaire qui a été tenue le 3 février 2014, au cours de laquelle vous étiez accompagné par votre représentante syndicale, Anna Bogdanthukral, et j’étais accompagné par Guillaume Séguin, conseiller en relations de travail.

Au cours de cette réunion, vous avez eu l’occasion de présenter votre version des faits concernant votre retard au travail et votre interaction et votre attitude envers un collègue et un partenaire externe (Rainbows [sic] of Hope) dans le cadre d’un échange de courriels.

[…]

Ces actes d’insubordination sont graves et je m’attends à ce que vous corrigiez immédiatement votre comportement. Toute infraction subséquente ne sera tolérée et pourra entraîner des mesures disciplinaires plus sévères pouvant aller jusqu’au congédiement.

Lors de notre réunion du 3 février 2014, vous avez demandé et j’ai accepté de modifier vos heures de travail et, en conséquence, vos nouvelles heures de travail sont de 9 h à 17 h. Veuillez noter que je surveillerai votre assiduité à l’aide du système de carte d’accès à l’immeuble.

[…]

[82]  Il ressort de la preuve que la fonctionnaire n’a pas reçu les registres des laissez‑passer avant environ la date de l’audience disciplinaire.

G.  La mesure disciplinaire du 13 avril 2015 : Suspension de 10 jours sans solde (dossier 566‑02‑11621)

[83]  La fonctionnaire a témoigné en disant qu’entre janvier et mars 2015, sa mère, âgée de 94 ans, qui vivait à Montréal, au Québec, a commencé à vivre avec elle. Elle a dit qu’elle a tenté de se lever plus tôt, d’aider sa mère et de faire les choses à l’avance pour elle et qu’un voisin s’occupait de sa mère après le déjeuner. À la date de l’audience, sa mère avait déménagé de nouveau à Montréal. La fonctionnaire a reconnu qu’elle n’avait jamais divulgué ces renseignements à son employeur au moment pertinent.

[84]  Les registres des laissez‑passer pour la période du 3 février 2014 au 5 mars 2015 ont été déposés en preuve. Il y avait des points de données pour 218 jours. Elles indiquaient ce qui suit :

  • au cours de 62 jours, le laissez‑passer de la fonctionnaire a été utilisé pour la première fois avant ou à 9 h;
  • au cours de 36 jours, il a été utilisé pour la première fois dans les cinq minutes après 9 h;
  • au cours de 120 jours, il a été utilisé pour la première fois plus de cinq minutes après 9 h;
  • de ces 120 jours, au cours de 43 jours, la première utilisation était plus d’une heure après 9 h.

[85]  La ventilation des registres des laissez‑passer de février au 31 août 2014, qui comporte des points de données pour 120 jours, indique ce qui suit :

  • au cours de 58 jours, le laissez‑passer de la fonctionnaire a été utilisé pour la première fois avant ou à 9 h;
  • au cours de 31 jours, il a été utilisé pour la première fois dans les cinq minutes après 9 h;
  • au cours de 31 jours, il a été utilisé pour la première fois plus de cinq minutes après 9 h;
  • des 31 jours, la première utilisation était plus de cinq minutes après 9 h, la première utilisation a été indiquée aux heures suivantes :
    • trois fois à 9 h 6;
    • quatre fois à 9 h 7;
    • deux fois à 9 h 8;
    • deux fois à 9 h 9;
    • une fois à 9 h 10;
    • deux fois à 9 h 11;
    • une fois à 9 h 12, à 9 h 13 et à 9 h 15, respectivement;
    • deux fois à 9 h 16;
  • de ces mêmes 31 jours, au cours de 11 de ceux‑ci, la première utilisation a été plus d’une heure après 9 h.

[86]  La ventilation des registres des laissez‑passer de septembre 2014 au 5 mars 2015, qui comportent des points de données pour 96 jours, indique ce qui suit :

  • au cours de quatre jours, le laissez‑passer de la fonctionnaire a été utilisé pour la première fois avant ou à 9 h;
  • au cours de cinq des jours, il a été utilisé pour la première fois dans les cinq minutes après 9 h;
  • des 96 jours, au cours de 87 jours, il a été utilisé pour la première fois plus de cinq minutes après 9 h;
  • de ces 87 jours, au cours de 29 jours, la première utilisation a été entre 9 h 7 et 9 h 29;
  • de ces 87 jours, au cours de neuf jours, la première utilisation a été entre 9 h 30 et 9 h 35 et au cours de quatre jours, la première utilisation a été entre 9 h 37 et 10 h;
  • de ces 87 jours, au cours de 31 jours, la première utilisation était après 10 h;
  • de ces 31 jours, au cours de 18 jours, la première utilisation était plus de trois heures après 9 h.

[87]  Au cours de son interrogatoire principal, la fonctionnaire a admis qu’entre la mi‑octobre 2014 et mars 2015, elle a été en retard quelques fois par semaine. Elle a déclaré qu’elle était arrivée entre 9 h 15 et 9 h 20.

[88]  Le 31 mars 2015, M. Montour a rencontré la fonctionnaire, le représentant de son agent négociateur et M. Jaltema pour discuter de ses heures de travail prévues à l’horaire. Le 13 avril 2015, M. Montour lui a imposé une mesure disciplinaire sous forme de suspension de 10 jours sans solde. Les extraits pertinents de la lettre de discipline datée de ce jour‑là (la « lettre du 13 avril ») sont reproduits ci‑dessous :

[Traduction]

[…]

La présente fait suite à l’audience disciplinaire qui a été tenue le 31 mars 2015, au cours de laquelle vous étiez accompagné par votre représentante syndicale, Anna Bogdan, et j’étais accompagné par Steve Jaltema, directeur adjoint de la Section de la Gouvernance (KGG) et Guillaume Séguin, conseiller principal en relations de travail.

Au cours de cette réunion, vous avez eu l’occasion de présenter votre version des faits concernant votre retard au travail.

J’ai examiné tous les renseignements recueillis et j’ai tenu compte de l’explication que vous avez fournie au cours de notre réunion. Vous avez reconnu le fait que vous êtes arrivée en retard au travail à maintes reprises depuis la mi‑octobre pour des raisons personnelles et vous avez indiqué que vous n’en avez pas informé votre superviseur parce que vous espériez que votre situation personnelle s’améliorerait. J’ai déterminé que votre comportement constitue une insubordination.

[…]

Cet acte d’insubordination est grave et je m’attends à ce que vous corrigiez immédiatement votre comportement. Toute infraction subséquente ne sera tolérée et pourra entraîner des mesures disciplinaires plus sévères pouvant aller jusqu’au congédiement.

Je dois vous rappeler que vos heures de travail sont de 9 h à 17 h. Veuillez noter que la direction continuera de surveiller votre assiduité à l’aide du système de carte d’accès à l’immeuble.

[…]

[89]  Il ressort de la preuve que la fonctionnaire n’a pas reçu les registres des laissez‑passer avant environ la date de l’audience disciplinaire.

H.  La mesure disciplinaire du 14 octobre 2015 : Suspension de 20 jours sans solde (dossier 566‑02‑12603)

[90]  Le 29 avril 2015, la fonctionnaire a demandé de modifier ses heures de travail passant de 9 h à 17 h, à de 9 h 30 à 17 h 30 en raison de sa situation familiale. Sa demande a été accordée, ce qui a été confirmé par un courriel de M. Jaltema le 1er mai 2015. La date à laquelle la modification a été mise en œuvre ne ressort pas clairement de la preuve. Il se peut que ce soit ce jour‑là.

[91]  Les registres des laissez‑passer de la fonctionnaire du 28 avril 2015 jusqu’à la fin de juillet 2015 ont été déposés en preuve. Toutefois, trois des registres visaient la période du 28 au 30 avril 2015. Il y avait des points de données pour 57 jours. Le registre des laissez‑passer du 1er mai à la fin de juillet 2015, indiquait ce qui suit :

  • au cours de 19 jours, son laissez‑passer a été utilisé pour la première fois avant ou à 9 h 30;
  • au cours de neuf jours, il a été utilisé pour la première fois dans les cinq minutes après 9 h 30;
  • au cours de 29 jours, il a été utilisé pour la première fois plus de cinq minutes après 9 h 30;
  • de ces 29 jours, au cours de neuf jours, il a été utilisé pour la première fois entre 9 h 35 et 10 h et, au cours d’un jour, à 10 h 15;
  • de ces 29 jours, 19 écritures sont plus d’une heure après 9 h 30.

[92]  En ce qui concerne la période du 28 au 30 avril 2015, le registre des laissez‑passer indique les premières utilisations à 9 h 9, à 9 h 33 et à 9 h 12, respectivement.

[93]  La fonctionnaire a déposé en preuve un document qui expose ses heures d’arrivée enregistrée du 5 mai au 24 juillet 2015, visant une période de 27 jours pendant lesquels les renseignements ont été consignés. Il indiquait ce qui suit :

  • au cours de 17 jours, l’heure enregistrée a indiqué qu’elle était au travail avant ou à 9 h 30;
  • au cours de cinq jours, l’heure enregistrée a indiqué qu’elle était au travail dans les cinq minutes après 9 h 30;
  • au cours de deux jours, aucune heure n’a été indiquée, simplement [traduction] « arrivée tardive, informé le superviseur »;
  • au cours d’un jour, un rendez‑vous médical avec certificat a été enregistré;
  • au cours d’un jour, il a été inscrit qu’elle avait assisté à une séance à l’extérieur du bureau qui avait été approuvé par son superviseur.

[94]  Dans son témoignage, la fonctionnaire a confirmé qu’elle n’avait pas présenté ce document à M. Jaltema.

[95]  La fonctionnaire a déposé en preuve un document intitulé [traduction] « Vivian Valderranma [sic] – Heures de travail juillet 2015 ». Il portait sur les jours où elle ne souscrivait pas aux heures inscrites dans les registres des laissez‑passer et indiquait ce qui suit :

  • en ce qui concerne l’heure d’entrée enregistrée le 7 juillet à 12 h 44, elle a déclaré qu’elle avait un rendez‑vous médical approuvé au préalable;
  • en ce qui concerne l’heure d’entrée enregistrée le 8 juillet à 11 h 53, elle a déclaré qu’elle est arrivée au travail à 9 h 30;
  • en ce qui concerne l’heure d’entrée enregistrée le 15 juillet à 9 h 28, elle a déclaré qu’elle est arrivée au travail à 9 h 30;
  • en ce qui concerne l’heure d’entrée enregistrée le 16 juillet à 10 h 47, elle a déclaré qu’elle avait informé son superviseur qu’elle serait en retard et qu’elle avait un congé annuel approuvé;
  • en ce qui concerne l’heure d’entrée enregistrée le 17 juillet à 13 h 20, elle a déclaré qu’elle est arrivée au travail à 9 h 30;
  • en ce qui concerne l’heure d’entrée enregistrée le 20 juillet à 9 h 28, elle a déclaré qu’elle est arrivée au travail à 9 h 30;
  • en ce qui concerne l’heure d’entrée enregistrée le 21 juillet à 9 h 48, elle a déclaré qu’elle avait informé son superviseur qu’elle serait en retard et qu’elle avait un congé annuel approuvé;
  • en ce qui concerne l’heure d’entrée enregistrée le 23 juillet à 9 h 59, elle a déclaré qu’elle est arrivée au travail à 9 h 30;
  • en ce qui concerne l’heure d’entrée enregistrée le 24 juillet à 11 h 55, elle a déclaré qu’elle est arrivée au travail à 9 h 30.

[96]  Dans le document, la fonctionnaire a également déclaré qu’il existait des écarts entre les dates indiquées dans le registre des laissez‑passer quant à ses premières entrées au lieu de travail et ses heures d’arrivée réelles. Elle a déclaré dans le document et dans son témoignage que, parfois, lorsqu’elle arrivait, la porte était ouverte ou tenue ouverte pour elle, puis elle entrait.

[97]  Le 17 août 2015, Elissa Golberg, sous‑ministre adjointe, Partenariats pour le développement, Direction générale de l’innovation, a rencontré la fonctionnaire, la représentante de son agent négociateur et Michelle Veilleux, la superviseure par intérim de la fonctionnaire, en vue de discuter de l’assiduité de la fonctionnaire. Le 15 octobre 2015, Mme Golberg a imposé une mesure disciplinaire à la fonctionnaire en la suspendant de son travail pendant 20 jours sans solde. Les extraits pertinents de la lettre disciplinaire datée de ce jour‑là sont reproduits ci‑dessous :

[Traduction]

[…]

La présente fait suite à l’audience disciplinaire qui a été tenue le 17 août 2015, au cours de laquelle vous étiez accompagné par votre représentante syndicale, Shahrzad Sedigh, et j’étais accompagné par Michelle Veilleux, directrice générale par intérim de la Croissance économique durable (KGD) et Guillaume Séguin, conseiller principal, Centre d’expertise des relations de travail (HSSS).

Au cours de cette réunion, vous avez eu l’occasion de présenter votre version des faits concernant votre retard au travail.

J’ai examiné tous les renseignements recueillis et j’ai tenu compte de l’explication que vous avez fournie au cours de notre réunion. Les fiches [registres des laissez‑passer] indiquent que vous avez été en retard à maintes reprises entre mai et août 2015. Vous avez été informé à maintes reprises que la direction continuerait de surveiller votre assiduité à l’aide du système de carte d’accès à l’immeuble. Je conclus que, selon la prépondérance des probabilités, vous avez été en retard à maintes reprises sans fournir une justification. J’ai donc déterminé que votre comportement constitue une insubordination.

[…]

Cet acte d’insubordination est grave et je m’attends à ce que vous corrigiez immédiatement votre comportement. Toute infraction subséquente ne sera tolérée et entraînera votre congédiement.

Je dois vous rappeler que vos heures de travail sont de 9 h 30 à 17 h 30. Veuillez noter que la direction continuera de surveiller votre assiduité à l’aide du système de carte d’accès à l’immeuble que vous devez glisser votre carte chaque jour lorsque vous arrivez. […]

[…]

[98]  Il ressort de la preuve que la fonctionnaire n’a pas reçu le registre des laissez‑passer avant environ la date de l’audience disciplinaire.

[99]  La fonctionnaire a déclaré que, dans le cadre de la préparation à l’audition de son grief, elle a examiné les dossiers du registre des laissez‑passer et a communiqué avec ses collègues afin de déterminer si elle était arrivée au travail à temps ou en retard.

III.  Résumé de l’argumentation

A.  Pour l’employeur

[100]  La fonctionnaire a choisi de ne pas se conformer aux directives de base.

1.  Assiduité

[101]  En ce qui concerne la question liée aux retards, des directives et des attentes claires avaient été communiquées à la fonctionnaire. Sans préavis ni justification, elle était en retard à maintes reprises. Elle a reçu des avertissements en vain et a continué à arriver en retard. Une mesure disciplinaire mineure a été imposée; cette mesure est devenue plus sévère plus tard.

[102]  La lettre du 12 mars avait été communiquée à la fonctionnaire avant que M. Jaltema ne devienne son superviseur. Après cela, il se préoccupait de son retard, ce qui a été validé par les registres des laissez‑passer qu’il a demandés et reçus.

[103]  Malgré les avertissements et les mesures disciplinaires, le comportement de la fonctionnaire en matière d’assiduité n’a pas changé. La tendance en matière de retard a continué, ce qui était grave.

[104]  Il y a eu un répit entre la période de juillet 2013 et janvier 2014, au cours de laquelle M. Jaltema a accordé un délai à la fonctionnaire afin de s’améliorer. Elle a demandé une mesure d’adaptation médicale, qui a été approuvée. Cette mesure d’adaptation consistait en la modification de ses heures de travail fixées. À un moment donné, elle a informé M. Jaltema que la mesure d’adaptation médicale n’était plus nécessaire et elle a résumé ses heures de travail de 9 h à 17 h. Pendant une certaine période, son assiduité s’est améliorée, mais elle s’est ensuite détériorée de nouveau. Un examen des registres des laissez‑passer a permis de conclure qu’elle était souvent en retard, malgré le fait qu’elle a été informée qu’elle faisait l’objet d’une surveillance et qu’elle connaissait les risques.

[105]  L’employeur était clair. Il l’a informé de ses heures de travail et du fait qu’il surveillait ses heures d’arrivée. Même s’il avait accepté le fait que la fonctionnaire ne souscrivait pas à la façon dont il la surveillait, elle était au courant des attentes.

[106]  Même à la suite de quatre suspensions, la fonctionnaire a continué de ne pas respecter ses heures de travail. Même s’il semble parfois mineur, elle est arrivée à peine quelques minutes après l’heure de début désigné, ce n’était pas le cas. Même si le lieu de travail n’est guère un atelier comportant des besoins et des exigences particulières, elle avait été informée et avertie à maintes reprises des attentes à son égard et des conséquences. On lui a rappelé à maintes reprises les exigences et elle était en retard à maintes reprises.

[107]  Les explications de la fonctionnaire ne tiennent pas; elles sont insuffisantes. Plutôt que de se présenter au travail à temps ou d’admettre ses erreurs, sa réponse a été de remettre en question l’exactitude des registres des laissez‑passer. En fin de compte, elle avait le contrôle de sa carte d’accès et de son accès au lieu de travail.

[108]  Même si en fin de compte, la fonctionnaire a pu être mécontente de sa situation de travail et du fait que ce malheur ait pu être légitime, cela ne justifiait pas un manque de respect de son horaire de travail, surtout dans le contexte des conséquences qui lui avaient été clairement communiquées.

[109]  L’employeur avait des préoccupations au sujet de l’assiduité de la fonctionnaire. Il a défini des mesures et en a expliqué les conséquences. Il a établi un équilibre entre les besoins de la fonctionnaire, ses besoins et ceux des autres employés; il a également tenu compte des intervenants externes. M. Jaltema a témoigné en disant qu’il avait besoin d’uniformité et qu’il devait l’appliquer de façon équilibrée afin de s’acquitter des obligations de l’organisation. Lorsqu’elle avait besoin d’une mesure d’adaptation et qu’elle en faisait la demande, elle a été accordée et ses heures de travail ont été ajustées en conséquence.

2.  Carte Amex

[110]  En ce qui concerne la carte Amex, la mesure disciplinaire a été réduite de trois jours à un jour. Cela a été effectué malgré le fait que la fonctionnaire avait déjà été avertie.

3.  Rainbow of Hope

[111]  Le comportement de la fonctionnaire relatif à la situation concernant Rainbow of Hope constituait manifestement une insubordination. Elle a participé pendant deux semaines à un échange de messages avec ses supérieurs. Elle était censée agir, mais elle ne l’a pas fait. Son courriel de réponse à Mme Veilleux était offensant; elle a remis en question la probité financière de Mme Veilleux.

[112]  L’employeur m’a renvoyé à Wm. Scott & Company Ltd. v. Canadian Food and Allied Workers Union, Local P‑162, [1977] 1 CLRBR 1; Cooper c. Administrateur général (Service correctionnel du Canada), 2013 CRTFP 119; Nowoselsky c. Conseil du Trésor (Solliciteur général Canada), dossier de la CRTFP 166‑02‑14291 (19840724), [1984] C.R.T.F.P.C. 20 (QL); Bétournay c. Agence du revenu du Canada, 2012 CRTFP 128; Byfield c. Agence du revenu du Canada, 2006 CRTFP 119; Phillips c. Administrateur général (Agence des services frontaliers du Canada), 2013 CRTFP 67; Beer c. Conseil du Trésor (Solliciteur général – Service correctionnel Canada), dossier de la CRTFP 166‑02‑23075 (19930217), [1993] C.R.T.F.P.C. no 75 (QL); Leduc c. Conseil du Trésor (Défense nationale), dossiers de la CRTFP 166‑02‑15153 et 15779 (19860922), [1986] C.R.T.F.P.C. no 238 (QL); Riche c. Conseil du Trésor (ministère de la Défense nationale), 2013 CRTFP 35; Yarney c. Administrateur général (ministère de la Santé), 2011 CRTFP 112; Morrow c. Conseil du Trésor (ministère des Ressources naturelles), 2017 CRTESPF 8.

[113]  L’employeur a répété les directives de base à la fonctionnaire. Elle a omis de les respecter à maintes reprises. L’employeur lui a communiqué ses attentes claires et lui a donné un avis clair. Elle ne s’y est pas conformée.

[114]  L’employeur a agi de manière raisonnable dans ses efforts visant à régulariser
le comportement de la fonctionnaire.

[115]  L’employeur a demandé que les griefs soient rejetés.

B.  Pour la fonctionnaire s’estimant lésée

[116]  La fonctionnaire a soutenu que je devais répondre aux quatre questions principales suivantes :

  • 1. L’employeur a‑t‑il retardé l’application de la mesure disciplinaire?

  • 2. Y a‑t‑il eu une inconduite?

  • 3. La mesure disciplinaire imposée à l’égard de l’inconduite était‑elle appropriée?

  • 4. Si la mesure disciplinaire n’était pas appropriée, quelle mesure est appropriée?

[117]  La fonctionnaire a fait valoir que, même lorsqu’une convention collective ne prévoit pas des délais pour imposer une mesure disciplinaire, l’employeur doit sanctionner les employés pour des actes répréhensibles dans un délai raisonnablement court. Si les employés contreviennent à une règle, un retard dans son traitement peut les amener à croire que leurs actes sont tolérés.

[118]  Le retard dans le traitement des présumés retards a fait en sorte qu’il soit difficile pour la fonctionnaire de les corriger et de lui expliquer où elle se trouvait lorsqu’on lui a fourni les registres des laissez‑passer aux audiences disciplinaires.

[119]  L’employeur n’a pas pu expliquer le retard. Lorsque M. Jaltema a été interrogé en contre‑interrogatoire au sujet du retard, il a indiqué que la sous‑ministre adjointe avait traité le dossier le plus tôt possible. Cela n’était pas approprié; il ne suffisait pour appliquer le processus. Cette question aurait dû être soulevée auprès de la fonctionnaire et ne pas être autorisée pendant de nombreux mois. La fonctionnaire m’a renvoyé à Canadian Union of Public Employees, Local 1718 and Valerie Dobson v. Stapleford Medical Management Inc., 2007 CarswellSask 132.

[120]  Une demande de production légitime a été présentée. L’employeur ne s’y est pas conformé. La fonctionnaire a soutenu qu’elle avait des raisons légitimes de ne pas se présenter au travail à temps.

[121]  L’article 25 de la convention collective prévoit un horaire mobile. L’employeur ne l’a pas appliqué et a refusé d’accorder un horaire mobile à la fonctionnaire. Il ressort de la preuve qu’elle lui avait demandé à maintes reprises et que ses demandes avaient été refusées. Les éléments de preuve ont révélé qu’elle est arrivée au travail entre 9 h 30 et 10 h, tandis que l’employeur voulait qu’elle respecte un jour de travail de 9 h à 17 h. Le refus était de nature punitive; l’employeur a refusé un droit enchâssé dans la convention collective.

[122]  M. Jaltema a inversé l’article 25. Plutôt que de donner des raisons opérationnelles, il a demandé à la fonctionnaire d’ajuster ses heures. Aucune nécessité du service n’exigeait une heure de début de 9 h. Les employés avaient différentes heures de travail. La seule raison invoquée par l’employeur était d’avoir les employés au travail à des heures précises et d’attribuer les travaux et fixer les réunions. Il n’existait aucune nécessité du service.

[123]  Les heures de travail ne correspondent pas à l’arrivée au travail à temps. L’employeur a mis la fonctionnaire sur la voie de l’échec en lui attribuant des heures de début qui ne pouvaient pas convenir à ses déplacements, à son mode de vie ou à son horaire de travail antérieur. Le refus de la demande d’un horaire mobile a contribué en partie à un certain nombre d’arrivées tardives.

[124]  Le transport en commun et la façon dont la fonctionnaire se rendait au travail ne relevaient pas de la prérogative de M. Jaltema. Il n’aurait pas dû faire cette évaluation.

[125]  Il n’y avait aucune preuve de vol de temps, d’une omission de se présenter au travail, du fait que le travail de la fonctionnaire est de nature administrative et dépend d’autrui ou du fait que le travail d’autrui dépend de son travail. Il n’existait aucun problème opérationnel.

[126]  La fonctionnaire n’a pas contesté le fait que les heures de travail doivent être régulières; cependant, la période aurait pu être établie entre 7 h et 18 h. Elle m’a renvoyé à Cloutier c. Conseil du Trésor (ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CRTFP 46.

[127]  La fonctionnaire a soutenu que l’employeur ne s’est pas acquitté de son fardeau de la preuve. Les registres des laissez‑passer sont erronés. Elle travaillait dans une zone à forte circulation dont le point d’accès n’était pas contrôlé; il n’y avait aucun bureau de sécurité. Il n’est pas contesté qu’elle entrait dans le lieu derrière d’autres collègues. Le système n’est pas exact à la minute.

[128]  Dans les registres des laissez‑passer, certaines écritures tardives peuvent être expliquées, tandis que d’autres ne le peuvent pas. La gestion de l’assiduité d’un employé exige qu’un gestionnaire vérifie si l’employé est arrivé. Les registres de sécurité peuvent être utilisés que dans une certaine mesure et ils n’en excusent pas un manque de surveillance. Ils aident et constituent un guide, mais ils peuvent être la seule preuve. La fonctionnaire m’a renvoyé à Pronovost c. Agence du revenu du Canada, 2017 CRTEFP 43, dans laquelle le principe des registres est analogue aux feuilles de temps.

[129]  La fonctionnaire m’a également renvoyé à BA International Inc. v. Amalgamated Transit Union, Local 279, 2010 CanLII 17184, à The Government of the Province of British Columbia v. B.C. Government and Service Employees’ Union (2003), 116 L.A.C. (4e) 193, et à Canada Post Corporation v. Canadian Union of Postal Employees (1990), 18 L.A.C. (4e) 64.

[130]  En ce qui a trait à la mesure disciplinaire liée au projet scolaire de Rainbow of Hope, les actes de la fonctionnaire ne constituent pas une insubordination ou une conduite abusive. Une conduite qui exprime un désaccord ne constitue pas une insubordination. Rien dans la preuve ne permet de conclure qu’elle avait l’intention de désobéir. Examiner la preuve. Elle n’a pas désobéi à un ordre clair. Elle m’a renvoyé à Lortie c. Administrateur général (Agence des services frontaliers du Canada), 2016 CRTEFP 108.

[131]  En ce qui concerne la question liée à la carte Amex, la fonctionnaire a reconnu l’erreur. Il s’agissait d’un événement mineur et la preuve étaye le fait qu’elle a commis une erreur de bonne foi. Il n’y a aucune preuve de fraude ni d’imprudence de la part de la fonctionnaire.

[132]  La fonctionnaire m’a également renvoyé à Pugh c. Administrateur général (ministère de la Défense nationale), 2013 CRTFP 123.

C.  Durée de la mesure disciplinaire

[133]  La fonctionnaire a reconnu que, parfois, elle est arrivée en retard au travail. La sévérité de la peine sous forme de suspensions de 10 et de 20 jours était excessive. Un employeur devrait tenir compte de la gravité de l’infraction et reconnaître que la mesure disciplinaire est utilisée pour corriger un comportement et qu’elle ne devrait pas être arbitraire ou sévère. L’état d’esprit de l’employé devrait également être pris en compte. Ces facteurs ne sont pas nécessairement égaux et peuvent être pondérés pour déterminer la sanction à imposer à un employé.

[134]  Lorsque l’état d’esprit de la fonctionnaire est pris en compte, il faut déterminer si son comportement était prémédité. Son intention était de s’acquitter de son obligation de se présenter au travail à temps. Elle s’est exprimée ainsi, avec déférence, et s’est conformée à l’exigence de la convention collective en demandant un horaire mobile en vertu de l’article 25.

[135]  Si elle a fait preuve d’insubordination, ce n’était certainement pas au sommet de ce comportement; les retards sont habituellement traités dans le cadre d’un programme de gestion de l’assiduité. Par ailleurs, son comportement a été toléré. La fonctionnaire a été mise sur une voie de mesures disciplinaires progressives lorsque son comportement n’a pas été modifié, ce qui était, tout compte fait, encore assez di minimis.

[136]  Il n’y a peu, voire aucune preuve, que le rendement de la fonctionnaire s’est détérioré.

D.  La réponse de l’employeur

[137]  Les registres des laissez‑passer sont clairs. La fonctionnaire savait ce qui était évalué et ce qui était pris en considération. Elle a eu l’occasion de présenter des éléments de preuve devant le décideur, ce qu’elle a fait.

[138]  Une tendance s’est manifestée au fil du temps. Il n’existait aucun incident unique et discret d’inconduite, mais plutôt un certain nombre de différents incidents qui se sont transformés, au fil du temps, en une tendance.

[139]  Même si à maintes reprises la fonctionnaire n’a été en retard que de quelques minutes, parfois moins de cinq minutes, elle était encore en retard. Des possibilités de s’adapter à ses heures (périodes de grâce) lui ont été accordées afin de constater si la tendance surviendrait de nouveau. L’employeur n’était pas dirigiste.

[140]  Soit que la fonctionnaire était régulièrement en retard, à savoir la tendance que l’employeur souhaitait corriger et qui était établie par les registres des laissez‑passer, les témoignages de M. Jaltema et de la fonctionnaire, soit que les registres étaient inexacts parce qu’elle ne pouvait pas ou n’a pas glissé son laissez‑passer. Après avoir examiné les registres des laissez‑passer, il est clair qu’elle a glissé son laissez‑passer à l’entrée, peut‑être pas à 9 h, mais à 9 h 45 et l’heure de 9 h 45 ne peut compter comme sa deuxième ou sa troisième entrée au lieu de travail.

[141]  Une distinction existe entre une violation de la politique et une insubordination. Lorsqu’il s’agit d’une insubordination, il n’existe aucune obligation d’établir l’intention. Elle exige un refus clair et non pas un employé qui manifeste délibérément une intention de désobéir.

[142]  En ce qui concerne l’école de Rainbow of Hope, la direction a demandé à la fonctionnaire de dire une chose, mais lui a ensuite dit qu’une autre chose était plus appropriée. Il s’agissait quand même d’une insubordination.

[143]  En ce qui concerne l’article 25 de la convention collective, le libellé comprend ce qui suit : « ne peut être refusée sans motif valable ». Il faut appliquer le critère du caractère raisonnable. Les nécessités du service sont énoncées de différentes manières dans la convention collective.

IV.  Motifs

[144]  Les auditions d’arbitrage relativement aux mesures disciplinaires aux termes de l’alinéa 209(1)b) de la Loi sont des audiences de novo et le fardeau de la preuve incombe au défendeur.

[145]  Le fondement habituel pour trancher les questions disciplinaires est l’examen des trois questions suivantes (voir Wm. Scott & Company Ltd.) : Y a‑t‑il eu inconduite de la part de la fonctionnaire? Dans l’affirmative, la mesure disciplinaire imposée par l’employeur constituait‑elle la mesure appropriée dans les circonstances? Si la mesure disciplinaire n’était pas appropriée, quelle sanction de rechange est juste et équitable dans les circonstances?

A.  Heures, heures de travail et la convention collective

[146]  Cinq des griefs dont je suis saisi portent sur la mesure disciplinaire imposée à la fonctionnaire. Trois ont trait uniquement aux retards relatifs à son assiduité au travail et deux portent sur les retards et un incident isolé non lié à son assiduité. Je trancherai les griefs individuels et l’inconduite propre à ceux‑ci de manière distincte dans les présents motifs. Toutefois, certains aspects des éléments de preuve et de l’argumentation portant sur les retards relatifs à son assiduité au travail sont les mêmes pour l’ensemble des mesures disciplinaires et des griefs.

[147]  Au cours de la période visée par la mesure disciplinaire qui a donné lieu à tous les griefs, la fonctionnaire travaillait à la Place du Portage à Gatineau et résidait au centre‑ville d’Ottawa. Elle travaillait cinq jours par semaine, soit 37,5 heures par semaine, du lundi au vendredi, soit 7,5 heures par jour. La convention collective prévoyait que ces 7,5 heures devaient être travaillées entre 7 h et 18 h.

[148]  Pour avoir accès à son lieu de travail, la fonctionnaire et les autres employés avaient besoin d’un laissez‑passer de sécurité, ce qui est courant dans le monde d’aujourd’hui. Ils ne sont pas propres au monde de l’emploi ou au secteur public fédéral. Les employeurs délivrent des laissez‑passer aux personnes qui ont le droit d’avoir accès à certaines zones des lieux de travail. Les laissez‑passer sont habituellement sous forme de cartes d’un type quelconque comportant un code électronique ou magnétique qui doit être activé d’une manière quelconque en vue de déverrouiller toute fonction qui est utilisée pour contrôler l’accès. La plupart des clés d’hôtel modernes sont maintenant sous cette forme.

[149]  Selon l’endroit, un tapotage ou un glissement d’un laissez‑passer ouvre une barrière de sécurité ou déverrouille une porte. Le système de barrières de sécurité vise à garantir que seule une personne ayant un laissez‑passer autorisée à entrer dans une zone (ou à franchir un lieu particulier) peut y avoir accès. Si une personne n’a pas un laissez‑passer ou son laissez‑passer n’est pas activé pour une zone donnée, la barrière ne s’ouvrira pas. De tels systèmes de barrières semblent courants dans les systèmes modernes de transport rapide ou de métro.

[150]   Il ressort de la preuve dont je suis saisi qu’à la Place du Portage, la fonction de sécurité du lieu de travail de la fonctionnaire était une porte verrouillée. Un tapotage ou un glissement d’un laissez‑passer déverrouillait la porte et permettait à la personne d’entrer. Cependant, il est également ressorti de la preuve qu’une fois déverrouillées, un certain nombre de personnes pouvaient entrer aussi longtemps qu’elle était ouverte, ce qui pouvait se faire simplement en la tenant ouverte. Dans le domaine de la sécurité, il s’agit du talonnage.

1.  Le laissez‑passer enregistre simplement lorsqu’il est glissé ou tapoté

[151]  Une série de registres des laissez‑passer visant certaines périodes, y compris celles qui coïncidaient avec les dates auxquelles l’employeur a allégué que la fonctionnaire était en retard au travail, a été déposée en preuve. À un moment donné en avril 2013, M. Jaltema a utilisé le système de laissez‑passer de sécurité pour surveiller son assiduité. Il l’a fait au péril de l’employeur, car les registres des laissez‑passer ne contenaient que des renseignements sur le moment où la fonctionnaire a réellement glissé sa carte pour entrer dans le lieu de travail sécurisé. En d’autres termes, les registres indiquent quand elle a déverrouillé la porte.

[152]  Même si M. Jaltema a effectivement informé la fonctionnaire qu’il la surveillerait à l’aide du système de sécurité, le système enregistre simplement l’utilisation des laissez‑passer et non l’assiduité réelle d’une personne. En supposant que la fonctionnaire n’a jamais laissé une autre personne utiliser son laissez‑passer, pratique à l’égard de laquelle il n’y a aucune preuve, les registres des laissez‑passer indiquent simplement les heures auxquelles elle a glissé ou tapoté son laissez‑passer aux points d’accès sécurisés, synchronisé avec une horloge ou une horloge interne au système de sécurité.

[153]  Un employé pouvait ostensiblement talonner dans le lieu de travail à chaque fois. En conséquence, il ou elle pouvait être au travail un jour donné et les registres des laissez‑passer ne comporteraient aucun renseignement à cet égard. Même s’il est improbable que cela se produise chaque fois, il ne serait pas déraisonnable de dire que pendant l’heure de pointe du matin, lorsque de nombreux employés arrivent au travail, bon nombre de ceux‑ci talonnent dans les lieux sécurisés sans réellement glisser (ou tapoter) leur laissez‑passer.

[154]  Les employeurs peuvent être au travail à temps sans aucun enregistrement du glissement de leur laissez‑passer.

2.  La signification des heures enregistrées dans les registres des laissez‑passer

[155]  Il n’est pas rare de nos jours que les horloges soient intégrées dans de nombreux appareils et dispositifs électroniques qui existent dans notre monde moderne, ou en font partie, comme les téléphones filaires, les téléphones intelligents, les ordinateurs, les fours à micro‑ondes, les tablettes et les télévisions, pour ne citer que quelques‑uns des plus évidents.

[156]  Je fais remarquer que dans les bureaux de la Commission, il existe quatre horloges murales visibles, y compris dans la cuisine. Aucun d’eux n’affiche la même heure. Une horloge se trouvait à l’arrière de la salle où la présente audience a été tenue; j’ai constaté qu’elle n’affichait pas la même heure que ma montre ou mon téléphone intelligent. Elle ne coïncidait pas non plus avec les heures affichées sur les quatre autres horloges murales de la Commission.

[157]  Il ne ressort aucunement de la preuve que l’heure enregistrée par le système de sécurité de la Place du Portage était exacte par rapport à d’autres horloges ou pièce d’horlogerie, comme l’ordinateur ou téléphone de travail de la fonctionnaire, encore moins les horloges dans son lieu de travail, sa montre, son téléphone cellulaire ou son téléphone intelligent personnels.

[158]  Même si M. Lavigueur a témoigné en disant que l’horloge du système de sécurité était exacte et qu’elle était réglée soit à l’heure normale de l’Est ou à l’heure avancée de l’Est (selon l’heure dictée par l’époque de l’année), et je soupçonne qu’il existait une certaine précision dans les horloges, ordinateurs et téléphones dans le lieu de travail de la fonctionnaire, il ne ressort aucunement de la preuve qu’elles étaient synchronisées aux heures enregistrées dans le système de sécurité. En bref, selon l’horloge murale, le téléphone ou l’ordinateur invoqué, les pièces d’horlogerie ou l’équipement peuvent afficher des heures différentes.

[159]  Il ressort de la preuve que la fonctionnaire avait reçu les registres des laissez‑passer au moment où ses audiences disciplinaires ont été tenues ou près de ce moment. Il n’y avait aucune preuve qu’elle était au courant des heures que le système de cartes d’accès de sécurité enregistrait.

[160]  Étant donné la possibilité de certaines différences entre les horloges dans le lieu de travail de la fonctionnaire et les pièces d’horlogerie sur lesquelles elle aurait pu se fier, lorsque j’ai examiné les registres, j’ai regroupé les heures enregistrées en tant que le premier glissage du laissez‑passer selon un minimum des trois catégories suivantes :

  • 1. à ou avant l’heure de début du travail indiqué (9 h ou 9 h 30, selon la mesure disciplinaire et le grief);

  • 2. dans les cinq minutes de l’heure de début du travail indiqué;

  • 3. plus de cinq minutes après l’heure de début du travail indiqué.

[161]  En résumé, étant donné les divergences en ce qui concerne la détermination de l’heure exacte, il faudrait prévoir un certain tampon des heures pour corriger les écarts et les incohérences entre les heures auxquelles la fonctionnaire pouvait estimer être au travail, soit à partir des pièces d’horlogerie dans son lieu de travail, à sa maison ou sur elle, et celles du système de sécurité, dont elle n’était pas au courant de l’heure par rapport aux pièces d’horlogerie auxquelles elle pourrait s’être fiée. Cela dit, je suis d’avis qu’un tampon de cinq minutes serait raisonnable pour tenir compte de toute différence. Par conséquent, si la fonctionnaire est arrivée dans les cinq minutes de 9 h ou de 9 h 30 (selon son heure de début), il faut considérer qu’elle était à l’heure.

[162]  En fonction de ce qui précède, si j’évalue simplement l’assiduité de la fonctionnaire en fonction d’uniquement les registres des laissez‑passer, selon la prépondérance des probabilités, les quatre éléments suivants peuvent être extrapolés de ces registres avec un certain degré de certitude :

  • 1. Si un glissement ou un tapotage du laissez‑passer a été enregistré avant l’heure de début désignée de la fonctionnaire (9 h ou 9 h 30), selon toute vraisemblance, elle est arrivée au travail à temps.

  • 2. Si un glissement ou un tapotage du laissez‑passer a été enregistré dans les cinq minutes de son heure de début désignée de la fonctionnaire (9 h ou 9 h 30), selon toute vraisemblance, elle est peut‑être arrivée au travail à temps.

  • 3. Si un glissement ou un tapotage du laissez‑passer a été enregistré plus de cinq minutes après son heure de début désignée (9 h ou 9 h 30), moins de 15 à 30 minutes après, selon toute vraisemblance, ces glissements ou tapotages constituaient des représentations exactes de ses arrivées au travail puisqu’elle ne se serait pas présentée au travail à l’heure de début désignée uniquement pour partir immédiatement et y retourner dans les quelques minutes après ce glissement ou tapotage.

  • 4. Si un glissement ou un tapotage du laissez‑passer a été enregistré plus de 30 minutes après son heure de début désignée (9 h ou 9 h 30), sans aucun autre renseignement autre que le registre des laissez‑passer, il est certainement possible qu’elle ait talonné dans le lieu de travail et qu’elle est ensuite partie et revenue.

3.  La méthode utilisée par l’employeur pour surveiller l’assiduité de la fonctionnaire s’estimant lésée

[163]  L’employeur a choisi de surveiller l’assiduité de la fonctionnaire en obtenant les registres des laissez‑passer relatifs aux points d’accès au lieu de travail. Je ne dispose d’aucun élément de preuve indiquant que le glissement ou le tapotage de son laissez‑passer constituait une condition de son emploi.

[164]  La fonctionnaire n’a pas fait l’objet d’une mesure disciplinaire pour ne pas avoir glissé ou tapoter son laissez‑passer. Même si on peut lui avoir dit que M. Jaltema la surveillait de cette façon et qu’elle pouvait même avoir accepté d’utiliser son laissez‑passer ou d’essayer de l’utiliser, si elle ne l’a pas fait, cela ne signifie pas qu’elle était en retard. Le fait qu’elle a accepté d’utiliser son laissez‑passer ne change aucunement le fardeau de la preuve au cours d’une audience devant la Commission, de sorte qu’on lui ait imposé une inversion du fardeau de la preuve pour réfuter qu’elle avait été en retard en se fondant sur les renseignements contenus dans les registres des laissez‑passer.

[165]  Il existe des moyens beaucoup plus simples et précis de surveiller l’assiduité. Selon le plus simple, étant donné qu’elle travaillait avec un ordinateur, M. Jaltema aurait pu avoir exigé qu’elle lui envoie un courriel dès son arrivée à son bureau. Il faut quelques secondes pour ouvrir une session et les courriels comportent des horodateurs. Les parties auraient tout simplement pu convenir que l’heure indiquée à l’ordinateur serait considérée comme la base exacte de son heure de début et, par conséquent, il n’y aurait eu aucune contestation.

4.  Rester au‑delà de son heure de fin prévue

[166]  Les éléments de preuve et les documents comportent parfois des références au fait que la fonctionnaire est restée au travail après son heure de fin prévue (17 h ou 17 h 30).

[167]  Il ne ressort aucunement de la preuve que la fonctionnaire a demandé d’être rémunérée des heures supplémentaires pour ces heures. Rien ne laisse entendre que les employés ne peuvent pas rester dans leur lieu de travail ou leur bureau au‑delà des heures nécessaires pour terminer leurs jours de travail de 7,5 heures. Évidemment, cette situation rappelle celle de Pugh, à laquelle la fonctionnaire m’a renvoyé.

[168]  Tel que cela sera énoncé plus tard dans la présente décision, certains jours, la fonctionnaire est arrivée en retard au travail. Ces jours‑là, si elle partait à l’heure de fin précisée, elle aurait été coupable de deux types d’inconduite distincts, soit arrivée en retard et vol de temps (ne pas travailler toute une journée de travail).

[169]  Il ne ressort aucunement de la preuve que la fonctionnaire agissait de mauvaise foi ou de manière néfaste lorsqu’elle est restée au bureau après son heure de fin prévue. Aucun élément de preuve ne permet de conclure qu’elle avait tenté d’obtenir une rémunération au titre d’heures supplémentaires. Le fait de rester au travail après 17 h ou 17 h 30, selon le cas, ne répondait pas à la définition d’inconduite.

5.  La convention collective

[170]  La clause 25.08 de la convention collective confère aux employés le droit de choisir et de demander un horaire mobile entre 7 h et 18 h. Cela ne signifie pas qu’ils peuvent aller et venir comme bon leur semble ou fixer ou modifier leurs heures de travail à leur gré, selon leur horaire personnel. Les employeurs ont le droit de s’attendre à ce que leurs employés se présentent au travail à leurs heures de travail attribuées ou convenues. La souplesse peut être régie par le type de travail exécuté par une unité de travail donnée, ainsi que par la nature temporelle de ce travail.

[171]  Il est ressorti de la preuve qu’avant que M. Jaltema ne devienne le superviseur de la fonctionnaire, elle avait des heures de début et de fin mobiles. La lettre du 12 mars ne faisait que fixer ses heures de travail, à compter de cette date, de 9 h à 17 h. Il ressort manifestement de la preuve dont je dispose qu’elle comprenait la modification et qu’au moins jusqu’au printemps 2013, elle a accepté de respecter ces heures.

B.  La suspension de trois jours du 4 juillet 2013 (réduite à un jour)

[172]  La présumée inconduite qui a donné lieu à l’imposition de la suspension de trois jours le 4 juillet 2013, comportait deux volets en ce que la fonctionnaire a effectué ce qui suit :

  • 1. elle n’a pas maintenu des heures de travail régulières de 9 h à 17 h, tel qu’il en a été convenu;

  • 2. elle a mal utilisé sa carte Amex émise par le gouvernement.

1.  Assiduité

[173]  Il est ressorti de la preuve que, à maintes reprises entre le 2 avril et le 26 juin 2013, la fonctionnaire n’est pas arrivée au travail à temps, et ce, selon la preuve, une combinaison des registres des laissez‑passer, de la correspondance par courrier électronique entre la fonctionnaire et M. Jaltema et le témoignage de M. Jaltema.

[174]  La fonctionnaire était bien consciente du fait que ses heures de travail étaient de 9 h à 17 h, du lundi au vendredi, ce qu’elle a reconnu à maintes reprises, verbalement et par écrit, à M. Jaltema. Les confirmations écrites ont été reproduites antérieurement dans la présente décision. De plus, M. Jaltema a tenu son propre registre de ses retards, qu’il a soulevé auprès d’elle et qu’il a parfois confirmé par écrit.

[175]  Je suis convaincu que l’employeur a établi que, selon la prépondérance des probabilités, la fonctionnaire a été en retard à maintes reprises entre le 2 avril et le 26 juin 2013. En conséquence, malgré le libellé plutôt médiocre de la lettre du 4 juillet 2013, une inconduite s’est produite à l’égard de son assiduité.

2.  Carte Amex

[176]  Il est également ressorti de la preuve que la fonctionnaire avait mal utilisé sa carte Amex émise par le gouvernement pour des achats personnels. Les éléments de preuve ont révélé qu’elle l’avait fait dans un passé relativement proche et qu’elle avait été avertie à ce sujet environ un an plus tôt, soit en juillet 2012.

[177]  La fonctionnaire a admis l’utilisation non autorisée et a expliqué que la carte Amex ressemblait à sa carte de crédit personnelle et qu’elle avait modifié son NIP pour qu’il corresponde à celui de sa carte personnelle. Même si cela a certainement rendu les choses plus faciles, si elle avait laissé les NIP différents, cela aurait peut‑être éveillé son attention au fait qu’elle avait retiré et utilisé par erreur la mauvaise carte. Elle aurait se montrer plus avisée et prendre des mesures de précautions. De plus, elle a admis qu’elle ne se déplaçait pas souvent aux fins des affaires du gouvernement (d’où la raison pour laquelle elle avait demandé volontairement d’annuler la carte) et, par conséquent, le problème aurait été facilement réglé en retirant la carte Amex de son portefeuille et en la laissant dans un lieu sûr, chez‑elle ou à son bureau. Je suis convaincu que l’employeur a établi que, selon la prépondérance des probabilités, une inconduite s’est produite relativement à l’utilisation par la fonctionnaire de sa carte Amex du gouvernement.

3.  Durée des mesures disciplinaires

[178]  Étant donné que l’inconduite a été établie, la seule question qu’il me reste à trancher est celle de savoir si la mesure disciplinaire était appropriée dans les circonstances. Pour ce qui est des inconduites concernant à la fois ses retards et sa mauvaise utilisation de la carte Amex, la fonctionnaire a fait l’objet d’une suspension de trois jours sans solde. Au cours de la procédure de règlement des griefs, elle a été réduite à un jour. Je suis convaincu que, selon les faits et la jurisprudence, la suspension d’un jour n’était pas inappropriée; je ne suis donc pas disposé à la modifier.

4.  Violation de la convention collective

[179]  Dans le cadre du grief, la fonctionnaire a soutenu que l’employeur avait violé l’article 25 de la convention collective. À un moment donné au début de juin 2013, elle a demandé de modifier ses heures de travail, passant de 9 h à 17 h à de 9 h 30 à 17 h 30. M. Jaltema a répondu que, si elle démontrait une arrivée régulière à temps pour une heure de début de 9 h, il accepterait sa demande.

[180]  Même si, dans son témoignage, M. Jaltema a expliqué la nécessité pour les employés d’avoir un horaire de travail quotidien fixe plutôt que des heures de début et de fin mobiles (dont la fonctionnaire a joui avant la lettre du 12 mars), je n’ai entendu aucun témoignage quant à la raison pour laquelle il n’a pas modifié ses heures passant d’une heure de début de 9 h à 9 h 30, autre qu’elle n’était pas en mesure de se présenter à temps à 9 h. Il n’existe certainement aucun élément de preuve d’une nécessité de service qui laisserait entendre qu’elle ne pouvait pas accomplir son jour de travail de 7,5 heures entre 9 h 30 et 17 h 30, plutôt qu’entre 9 h et 17 h. Par conséquent, son refus constituait une violation de la convention collective.

[181]  Même si la demande de la fonctionnaire à la mi‑juin 2013 n’a peut‑être pas eu d’incidence sur son retard avant qu’elle ne l’ait présentée, un changement à 9 h 30 aurait certainement permis de mettre fin à ses retards après cette date.

[182]  Il n’est pas ressorti de la preuve que la fonctionnaire n’a pas effectué tout un jour de travail de 7,5 heures, malgré ses heures d’arrivée. On n’a pas laissé entendre qu’elle était coupable de ce qui est communément appelé, dans le domaine du droit du travail, un vol de temps.

C.  La suspension de cinq jours du 26 juillet 2013 (réduite à trois jours)

1.  Assiduité

[183]  La présumée inconduite qui a donné lieu à la suspension de cinq jours le 26 juillet 2013 était le fait que la fonctionnaire n’a pas maintenu les heures de travail régulières de 9 h à 17 h dont elle avait convenu.

[184]  L’employeur s’est fié aux registres des laissez‑passer du 27 juin au 24 juillet 2013. Tel que cela a été indiqué antérieurement, les registres des laissez‑passer indiquaient les heures auxquelles la fonctionnaire a glissé ou tapoté son laissez‑passer à un lieu d’accès. Selon ce que j’ai dit au début des présents motifs et les registres des laissez‑passer, au cours de cette période, il y avait des données sur les laissez‑passer pour 14 jours. D’après ma conclusion selon laquelle un laissez‑passer glissé dans les cinq minutes de l’heure de début du travail prévu pourrait être considéré comme à l’heure, les registres des laissez‑passer indiquent que la fonctionnaire était à l’heure pendant quatre jours de la période de 14 jours.

[185]  Encore une fois, selon les registres des laissez‑passer, au cours de 10 jours, le premier glissement du laissez‑passer de la fonctionnaire a été effectué à 9 h 5. Au cours de cinq de ces 10, il est indiqué que le premier glissement était dans les 20 minutes de 9 h. Selon ma conclusion et ce qui est exposé au début des présents motifs, il est très improbable qu’elle soit arrivée avant 9 h, qu’elle ait talonné dans son lieu de travail, qu’elle soit allée au travail et qu’elle a ensuite quitté son lieu de travail uniquement pour y revenir au cours des 20 premières minutes du jour de travail. En conséquence, je conclus qu’au cours de ces cinq jours, elle était en retard au travail.

[186]  Des 10 jours au cours desquels le premier glissement du laissez‑passer de la fonctionnaire a été effectué après 9 h 5, au cours de cinq de ces jours, le glissement a été effectué plus de 30 minutes après 9 h. De ces cinq jours, deux des glissements ont été effectués à 10 h et à 10 h 30, respectivement. D’après ce que j’ai exposé au début des présents motifs, il n’existe pas suffisamment de renseignements, en se fondant uniquement sur les registres des laissez‑passer et compte tenu du temps qui s’est écoulé depuis une heure de début de 9 h, pour conclure que la fonctionnaire n’était pas entrée avant 9 h au moyen d’un talonnage.

[187]  Je suis convaincu que l’employeur a établi, selon la prépondérance des probabilités, qu’au cours d’au moins cinq jours entre le 27 juin et le 24 juillet 2016, la fonctionnaire était en retard au travail.

2.  Violation de la convention collective

[188]  De plus, dans le cadre du présent grief, la fonctionnaire a allégué que l’employeur avait contrevenu à l’article 25 de la convention collective lorsqu’il n’a pas accordé sa demande de modification de ses heures de travail, passant d’une heure de début de 9 h à une heure de début de 9 h 30. Tel que cela a déjà été indiqué dans la section portant sur la mesure disciplinaire du 4 juillet 2013, il n’existait aucune raison compatible avec l’article 25 de refuser sa demande. En conséquence, je conclus que l’employeur a violé la convention collective.

[189]  Si j’examine les renseignements contenus dans les registres des laissez‑passer à la lumière de la demande légitime de la fonctionnaire de modifier son heure de début à 9 h 30 et si elle avait été accordée, les renseignements indiquent qu’elle se serait présentée au travail à temps 10 fois.

[190]  La mesure disciplinaire initiale relativement à cette affaire était une suspension de cinq jours. Toutefois, au cours de la procédure de règlement des griefs, elle a été réduite à trois jours. Compte tenu du fait que l’employeur a continué de violer la convention collective, je suis prêt à réduire davantage cette mesure disciplinaire à une suspension de deux jours.

D.  La suspension de cinq jours du 7 février 2014

[191]  La présumée inconduite qui a donné lieu à la deuxième suspension de cinq jours le 7 février 2014, comportait deux volets en ce que la fonctionnaire a fait ce qui suit :

  • 1. elle n’a pas maintenu des heures de travail régulières, tel qu’il en a été convenu;

  • 2. elle a fait preuve d’insubordination dans ses interactions avec un collègue et un partenaire externe relativement au projet scolaire de Rainbow of Hope.

1.  Assiduité

[192]  La lettre disciplinaire datée du 7 février 2014 n’était pas précise quant à la période examinée relativement aux arrivées tardives de la fonctionnaire au travail. L’audience disciplinaire portant sur la mesure disciplinaire a été tenue le 3 février 2014. Par conséquent, je soupçonne que la période visée aurait été la période entre l’imposition de la mesure disciplinaire antérieure (le 24 juillet 2013) et le 3 février. Étant donné que le 3 février était un lundi, la période visée ostensiblement était du 24 juillet 2013 jusqu’au 31 janvier 2014.

[193]  Les registres des laissez‑passer pour la période du 25 juillet 2013 au 31 janvier 2014 étaient disponibles et les heures de travail de la fonctionnaire ont changé deux fois, comme suit :

  • 1. du 25 juillet au 16 août 2013 : ses heures de travail étaient de 9 h à 17 h;

  • 2. du 4 octobre 2013 au 13 janvier 2014 : ses heures de travail étaient de 9 h 30 à 17 h 30;

  • 3. du 14 au 31 janvier 2014 : ses heures de travail étaient de 9 h à 17 h.

[194]  Du 25 juillet au 16 août 2013, il y avait des données pour 11 jours sur le laissez‑passer de la fonctionnaire. D’après ma conclusion selon laquelle un laissez‑passer glissé dans les cinq minutes de l’heure de début du travail prévu pourrait être considéré comme à l’heure, le registre des laissez‑passer indique que la fonctionnaire était à l’heure pendant sept jours de la période de 11 jours. Au cours de quatre des 11 jours, le registre des laissez‑passer indique des entrées à 9 h 6, à 9 h 7, à 9 h 9 et à 9 h 28. De plus, selon ma conclusion et ce qui est exposé au début des présents motifs, il est très improbable qu’elle soit arrivée avant 9 h, qu’elle ait talonné dans son lieu de travail, qu’elle soit allée au travail et qu’elle ait ensuite quitté son lieu de travail uniquement pour y revenir à 9 h 6, à 9 h 7, à 9 h 9 et à 9 h 28. En conséquence, je conclus qu’au cours de ces quatre jours, elle était en retard au travail.

[195]  Du 4 octobre 2013 au 13 janvier 2014, les heures de travail de la fonctionnaire ont été modifiées à 9 h 30 à 17 h 30. Les registres des laissez‑passer pour cette période comportent des données pour 42 jours sur l’utilisation de son laissez‑passer. D’après ma conclusion selon laquelle un laissez‑passer glissé dans les cinq minutes de l’heure de début du travail prévu pourrait être considéré comme à l’heure, le registre des laissez‑passer indique que la fonctionnaire était à l’heure ou peut‑être à l’heure pendant 35 jours de la période de 42 jours.

[196]  Des sept autres jours, les registres des laissez‑passer indiquent qu’au cours de quatre de ces jours, la fonctionnaire est arrivée à 9 h 37 une fois et à 9 h 38 trois fois. Encore une fois, étant donné une heure de début de 9 h 30 et le fait que les horloges auxquelles elle s’est fiée à sa maison ou à son bureau pourraient être erronées, les arrivées à 9 h 37 et à 9 h 38 étaient tardives.

[197]  Il est ressorti de la preuve que les premiers glissements au cours des trois autres jours ont été effectués à 10 h 58, à 11 h 8 et à 20 h 24, respectivement. En ce qui concerne le glissement à 11 h 8 le 28 novembre 2013, les éléments de preuve ont révélé un rendez‑vous médical à l’égard duquel la fonctionnaire avait informé son superviseur. En ce qui concerne les glissements à 10 h 58 et à 20 h 24, d’après ce que j’ai conclu et ce qui est indiqué au début des présents motifs, il n’existe pas suffisamment de renseignements, en se fondant uniquement sur les registres des laissez‑passer et compte tenu du temps qui s’est écoulé depuis une heure de début de 9 h 30, pour supposer qu’elle n’était pas entrée avant 9 h 30 au moyen d’un talonnage.

[198]  Du 14 au 31 janvier 2014, les heures de travail de la fonctionnaire ont été modifiées de nouveau à 9 h à 17 h. Les registres des laissez‑passer pour cette période comportent des données pour 10 jours sur l’utilisation de son laissez‑passer. D’après ma conclusion selon laquelle un laissez‑passer glissé dans les cinq minutes de l’heure de début du travail prévu pourrait être considéré comme à l’heure, le registre des laissez‑passer indique que la fonctionnaire était à l’heure ou peut‑être à l’heure pendant quatre jours de la période de 10 jours. Sur les six autres jours, au cours de trois de ces jours, elle est arrivée à 9 h 6, à 9 h 7 et à 9 h 11, respectivement, et au cours des trois autres jours, elle est arrivée à 9 h 13, à 9 h 15 et à 9 h 18, respectivement. Encore une fois, il est très improbable qu’elle ait talonné à ou avant 9 h et qu’elle ait ensuite quitté son lieu de travail simplement pour entrer de nouveau peu après son heure de début de 9 h. Par conséquent, je conclus qu’au cours de cette période, la fonctionnaire était en retard au cours de six de ces jours.

[199]  Selon mon évaluation de la preuve et mes conclusions, l’employeur a établi que, selon la prépondérance des probabilités, entre le 25 juillet 2013 et le 31 janvier 2014, la fonctionnaire a été en retard au travail 14 jours.

2.  Rainbow of Hope

[200]  La lettre du 7 février énonce que la partie de la mesure disciplinaire concernant cette question visait l’[traduction] « […] interaction et l’attitude [de la fonctionnaire] envers un collègue et un partenaire externe (Rainbows [sic] of Hope) dans le cadre d’un échange de courriels ». M. Jaltema a qualifié l’interaction et l’attitude d’insubordination.

[201]  En ce qui concerne le partenaire externe, le courriel qui a été suggéré constituer une insubordination était celui du 22 janvier. Mme Veilleux a suggéré dans un courriel qu’elle a envoyé le même jour que le « ton » du courriel du 22 janvier était assertif et qu’il pourrait être interprété comme agressif ou non collaboratif. Il se peut qu’elle ait lu et interprété le courriel de manière différente que moi. À première vue, je n’y constate aucun ton. Les faits concernant le projet scolaire de Rainbow of Hope, tel qu’ils ont été présentés, ne me convainquent pas que la fonctionnaire a agi d’une manière qui pourrait être qualifiée d’inconduite.

[202]  Si Mme Veilleux avait témoigné, il se peut qu’un meilleur aperçu ait été décrit, de sorte que je pourrais comprendre pourquoi elle et à son tour M. Jaltema estimaient que le courriel du 22 janvier était inapproprié. Je soupçonne qu’il existe plus de faits que ceux que la fonctionnaire et M. Jaltema m’ont donnés.

[203]  L’autre élément de l’inconduite auquel on a fait allusion relativement à cette mesure disciplinaire du 7 février 2014 était également fondé sur l’interaction et l’attitude envers un collègue, qui a été identifié comme Mme Veilleux.

[204]  Les échanges de courriels qui ont suivi le courriel du 22 janvier permettent de clarifier quelque peu les faits et indiquent clairement que la fonctionnaire estimait que toutes les mesures nécessaires pour protéger l’investissement financier du gouvernement canadien n’avaient pas été prises dans le cadre du projet.

[205]  Une copie du Code de V et E a été déposée en preuve. Il contient un titre, « Intendance », qui pourrait être décrit dans le cadre de l’énoncé de mission. Il prévoit ce qui suit : « Les fonctionnaires fédéraux se voient confier la responsabilité d’utiliser et de gérer judicieusement les ressources publiques, tant à court qu’à long terme. »

[206]  Je n’ai aucune raison de douter que, comme ses collègues, la fonctionnaire avait et continue d’être tenue de protéger les intérêts du gouvernement canadien, de son employeur et des contribuables canadiens. À un moment donné, ce faisant, je ne doute pas non plus que leurs actes pourraient passer d’une enquête légitime sur ce qui est approprié ou inapproprié à un comportement qui pourrait constituer une inconduite.

[207]  Il est clair que, d’après les courriels envoyés à M. Jaltema (copie conforme à Mme Veilleux), la fonctionnaire a suggéré que Mme Veilleux ne prenait pas les mesures qu’elle était censée prendre pour protéger l’investissement financier au Pérou. L’extrait pertinent du courriel du 23 janvier 2013 de la fonctionnaire est reproduit ci‑dessous :

[Traduction]

[…]

[…] je ne ferai aucun suivi à cet égard, puisque Michelle m’a ordonné de cesser de faire preuve de diligence raisonnable en ce qui a trait au transfert légal du groupe scolaire aux autorités locales et, implicitement, d’exercer mon obligation à titre de fonctionnaire, en vue de protéger les intérêts du gouvernement du Canada et les fonds des contribuables.

[208]  Dans cette phrase, la fonctionnaire déclare clairement à M. Jaltema et à Mme Veilleux qu’elle était d’avis qu’on lui avait demandé de cesser d’agir prudemment et de cesser de protéger les intérêts du gouvernement et des contribuables. Elle a clairement invoqué à l’égard de Mme Veilleux une allégation très sérieuse de mauvaise gestion, sinon une violation pure et simple de son obligation fiduciaire.

[209]  La fonctionnaire, Mme Veilleux et M. Jaltema ont une obligation envers leur employeur; ils sont tenus de soulever ces préoccupations à l’interne. Cela dit, il existe des manières appropriées de soulever des préoccupations et d’en discuter. Toutefois, ces discussions peuvent être difficiles et passionnées, ce qui peut et devrait se produire lorsqu’une personne est confiée la protection des biens de l’employeur. Des faits constructifs de fond et des arguments devraient être présentés. Les actes de la fonctionnaire ne correspondaient pas à cela, mais constituaient plutôt des énoncés inappropriés qui correspondaient à une allégation d’actes répréhensibles irréfléchie et sarcastique contre Mme Veilleux.

[210]  Dans une certaine mesure, la fonctionnaire l’a admis, car elle a présenté des excuses à Mme Veilleux dans un autre courriel le 29 janvier 2013 dans lequel elle a dit qu’elle prenait ses responsabilités si sérieusement que [traduction] « […] parfois, elle obscurcit [son] raisonnement ».

E.  Gravité des mesures disciplinaires

[211]  Puisque j’ai établi l’inconduite de la fonctionnaire relativement à ses retards et à sa conduite en ce qui a trait à l’interaction avec Mme Veilleux dans le cadre du projet scolaire de Rainbow of Hope, la seule question que je dois trancher est celle de savoir si la mesure disciplinaire sous forme de suspension de cinq jours était appropriée.

[212]  Il n’est pas évident qu’une ventilation a été faite relativement à la durée de la mesure disciplinaire imposée pour les retards de la fonctionnaire par rapport à la gravité visant son interaction et son attitude envers Mme Veilleux et le partenaire externe.

[213]  En ce qui concerne ses retards, il est clair qu’au cours de la période commençant en mars 2013, l’employeur se préoccupait des retards de la fonctionnaire.

[214]  Selon la preuve dont je suis saisi, malgré le fait qu’elle ait fait l’objet de mesures disciplinaires à deux reprises (au moyen d’une suspension de trois jours et de cinq jours qui ont été réduites dans le cadre de la procédure de règlement des griefs), la fonctionnaire n’a pas modifié son comportement de façon suffisamment significative pour s’assurer d’arriver au travail à temps ou dans un délai raisonnable près le début de ses heures de travail prévues.

[215]  Étant donné que la mesure disciplinaire est censée être de nature corrective et que la fonctionnaire avait l’objet de mesures disciplinaires auparavant (du moins en partie) pour le même comportement et que cette mesure disciplinaire avait été réduite, je ne vois aucune raison de modifier la durée de la mesure disciplinaire qui serait imposée relativement à son assiduité.

[216]  En ce qui a trait à l’inconduite décrite comme une attitude et à l’interaction dans le cadre du projet scolaire de Rainbow of Hope, j’ai conclu que le comportement de la fonctionnaire envers Mme Veilleux constituait une inconduite. Toutefois, elle s’est excusée presque immédiatement.

[217]  Étant donné que la suspension de cinq jours a été imposée pour toute l’inconduite et que j’ai conclu que la fonctionnaire n’a commis aucune inconduite à l’égard du partenaire externe, la mesure disciplinaire devrait être quelque peu réduite. Je la réduirais d’un jour. Par conséquent, le grief dans le dossier 566‑02‑10121 est accueilli en partie et la suspension de cinq jours est réduite à une suspension de quatre jours.

1.  La suspension de 10 jours du 13 avril 2015

[218]  L’inconduite décrite dans la lettre du 13 avril concerne uniquement l’assiduité de la fonctionnaire. Le dispositif de la lettre énonce ce qui suit :

[Traduction]

[…]

Au cours de cette réunion, vous avez eu l’occasion de présenter votre version des faits concernant votre retard au travail.

J’ai examiné tous les renseignements recueillis et j’ai tenu compte de l’explication que vous avez fournie au cours de notre réunion. Vous avez reconnu le fait que vous êtes arrivée en retard au travail à maintes reprises depuis la mi‑octobre pour des raisons personnelles et vous avez indiqué que vous n’en avez pas informé votre superviseur parce que vous espériez que votre situation personnelle s’améliorerait. J’ai déterminé que votre comportement constitue une insubordination.

[…]

[219]  La lettre du 13 avril ne précise pas la période d’assiduité de la fonctionnaire visée par la mesure disciplinaire. Toutefois, étant donné qu’elle mentionne qu’elle a reconnu son arrivée tardive au travail depuis la mi‑octobre et qu’aucun autre élément de preuve ne m’a été présenté pour établir la période particulière visée, je considérerai que l’employeur estime que la période est celle du 20 octobre 2014 (date du registre des laissez‑passer fournis, de la mi‑octobre jusqu’à la fin d’octobre) jusqu’au 31 mars 2015, soit la date de l’audience disciplinaire.

[220]  Cela dit, les registres des laissez‑passer déposés en preuve comprenaient la période après février 2014 jusqu’à la fin de mars 2015, englobant des données pour 218 jours.

[221]  Du 20 octobre 2014 au 31 mars 2015, les heures de travail de la fonctionnaire étaient de 9 h à 17 h. Les registres des laissez‑passer comportent des données pour 79 jours sur l’utilisation de son laissez‑passer. D’après ma conclusion selon laquelle un laissez‑passer glissé dans les cinq minutes de l’heure de début du travail prévu pourrait être considéré comme à l’heure, les registres des laissez‑passer indiquent que la fonctionnaire était à l’heure ou peut‑être à l’heure pendant trois jours de la période de 79 jours. Les registres indiquent également ce qui suit :

  • 10 fois, son premier glissement était dans les 15 minutes après 9 h;
  • 21 fois, il était entre 15 et 30 minutes après 9 h;
  • 19 fois, il était entre 30 minutes et une heure après 9 h;
  • 8 fois, il était entre une et deux heures après 9 h;
  • 18 fois, il était plus de deux heures après 9 h.

[222]  Selon les registres des laissez‑passer, au cours de 10 jours, le premier glissement du laissez‑passer de la fonctionnaire a été effectué après 9 h 5, mais avant 9 h 15. Au cours de 21 jours, le premier glissement a été effectué après 9 h 15, mais avant 9 h 30. Selon ma conclusion et ce qui est exposé au début des présents motifs, il est très improbable qu’elle soit arrivée avant 9 h, qu’elle ait talonné dans son lieu de travail, qu’elle soit allée au travail et qu’elle ait ensuite quitté son lieu de travail uniquement pour y revenir au cours des 30 premières minutes du jour de travail. En conséquence, je conclus qu’au cours de cette période, elle était en retard au travail au moins 31 jours.

[223]  Au cours de 19 jours, le premier glissement du laissez‑passer de la fonctionnaire a été effectué après 9 h 30, mais avant 10 h. En examinant de plus près ces données, de ces 19 jours, au cours de 15 jours, le glissement a été fait entre 9 h 31 et 9 h 41. Encore une fois, selon ma conclusion et ce qui est exposé au début des présents motifs, il est très improbable qu’elle soit arrivée avant 9 h, qu’elle ait talonné dans son lieu de travail, qu’elle soit allée au travail et qu’elle ait ensuite quitté son lieu de travail uniquement pour y revenir au cours des 30 à 41 premières minutes du jour de travail. Par conséquent, je conclus qu’au cours de cette période, elle était en retard au cours de 15 de ces jours.

[224]  Les autres jours concernent des heures suffisamment tard au cours du jour de travail et la preuve ne suffit pas, selon la prépondérance des probabilités, pour établir que la fonctionnaire n’avait pas talonné plus tôt et qu’elle était ensuite partie et y est revenue.

[225]  La fonctionnaire a soutenu que l’on avait fait preuve de tolérance. Dans Chopra c. Canada, 2014 CF 246, la Cour a déclaré ce qui suit aux paragraphes 195 à 198, 205, 208 et 209 :

[195] […] si une longue période s’écoule avant qu’une mesure disciplinaire soit prise, l’employé peut supposer que son comportement a été toléré par l’employeur étant donné qu’aucun avertissement ne lui a été servi et qu’il n’a reçu aucun avis relativement à la prise éventuelle de mesures disciplinaires. Il est injuste de laisser des employés croire que leur comportement a été toléré, pour leur donner un faux sentiment de sécurité en attendant de les punir plus tard […]

[196] Pour décider si une mesure disciplinaire doit être annulée à cause de la longue période écoulée depuis le comportement fautif, les arbitres tiennent compte de trois principaux facteurs. Il s’agit de la durée de la période écoulée, des motifs du retard et des préjudices causés par ce dernier […]

[197] Lorsqu’il y a eu retard à prendre une mesure disciplinaire, l’arbitre doit chercher un équilibre entre l’explication fournie par l’employeur pour le justifier et le préjudice subi par l’auteur du grief afin de trouver une [TRADUCTION] « solution juste et équitable compte tenu de ces intérêts divergents » […]

[198] Dans la décision Lawrie Grievance, l’arbitre a poursuivi en soulignant que tout comme l’auteur d’un grief doit faire valoir rapidement les droits que lui confère la convention collective, [traduction] « l’employeur peut quant à lui perdre son droit de prendre des mesures disciplinaires contre un employé relativement à une allégation d’inconduite parce qu’il a tardé à exercer ce droit » […]

[…]

[205] […] il s’agissait de déterminer s’ils [les Drs Chopra et Haydon] avaient été avertis en temps opportun que leur employeur estimait que leurs propos justifiaient la prise de mesures disciplinaires.

[…]

[208] […] En fait, Santé Canada a laissé le Dr Chopra et la Dre Haydon faire de nombreuses déclarations publiques au cours d’une longue période, sans jamais les informer que, à son avis, leurs propos justifiaient la prise de mesures disciplinaires.

[209] Santé Canada a eu connaissance des déclarations publiques des demandeurs au moment même où elles ont été faites ou peu de temps après. Par conséquent, il n’est pas possible de soutenir que le temps écoulé avant la prise des mesures disciplinaires pourrait s’expliquer par le fait que l’employeur n’avait eu connaissance que peu de temps auparavant des déclarations du Dr Chopra et de la Dre Haydon.

[226]  Les faits ont révélé que, certainement en ce qui concerne la mesure disciplinaire imposée les 4 et 26 juillet 2013 et le 7 février 2014, l’employeur a surveillé l’assiduité de la fonctionnaire, quoique de façon discutable au moyen des registres des laissez‑passer, et qu’il lui a imposé des mesures disciplinaires à la suite de périodes relativement courtes. Toutefois, la mesure disciplinaire imposée le 13 avril 2015 a été imposée 14 mois après la mesure disciplinaire précédente. Même s’il semble que la mesure disciplinaire visait une période d’environ uniquement cinq mois, cela suppose que l’employeur ne tenait compte que de la période commençant à la mi‑octobre 2014. L’audience portant sur cette mesure disciplinaire a été tenue le 31 mars 2015 et ce n’est qu’à ce moment qu’elle a reçu les registres des laissez‑passer. L’employeur aurait pu avoir porté les registres des laissez‑passer à son attention en temps opportun. Ce qu’il n’a pas fait.

[227]  Il était certainement loisible à M. Jaltema de continuer de surveiller l’assiduité de la fonctionnaire d’une façon plus pratique, comme en vérifiant quotidiennement son poste de travail pour constater quand elle arrivait ou en lui demandant de lui envoyer un courriel dès son arrivée. Il n’a fait aucun de ceux‑ci. Par conséquent, l’employeur s’est retrouvé avec une preuve qui était parfois douteuse et inexacte.

[228]  En fait, devant moi, lorsqu’il a été interrogé au sujet de l’assiduité de la fonctionnaire, M. Jaltema a indiqué qu’il n’estimait pas qu’elle s’était améliorée. Toutefois, malgré avoir fait l’objet de mesures disciplinaires progressives sous forme de suspensions de trois jours et ensuite de cinq jours, et en vu que son assiduité de ne s’était pas améliorée, l’employeur n’a pris aucune mesure à cet égard entre le 4 février 2014 et la date de l’audience tenue le 31 mars 2015. En fait, un examen des registres des laissez‑passer indique que son assiduité a continué de constituer un problème, mais que l’employeur n’a pris aucune mesure à cet égard.

[229]  Cela ne veut pas dire que tout acte d’inconduite à l’égard duquel une mesure disciplinaire n’a pas été imposée rapidement sera annulé en raison de la tolérance. Toutefois, dans ces circonstances, le problème est que la fonctionnaire, qui avait été vigoureusement reprochée au sujet de son assiduité, semblait n’avoir pas changé ses manières et rien ne lui a été dit avant bien plus d’un an. Si je suis le raisonnement exposé dans Chopra, décrit ci‑dessus, il incombait à l’employeur d’agir plus tôt qu’il ne l’a fait. Par conséquent, dans ces circonstances, la fonctionnaire a établi la tolérance. Je conclus donc que, malgré le fait qu’il est ressorti de la preuve qu’elle avait été, en toute vraisemblance, en retard au travail au moins 45 jours, en retardant la prise de mesure, l’employeur a toléré son comportement. Je suis donc prêt à annuler la mesure disciplinaire.

2.  La suspension de 20 jours du 14 octobre 2015

[230]  L’inconduite alléguée et énoncée dans la lettre disciplinaire du 14 octobre 2015, qui a donné lieu à la suspension de 20 jours, était que [traduction] « [l]es fiches [registres des laissez‑passer] indiquent que vous avez été en retard à maintes reprises entre mai et août 2015 ».

[231]  Encore une fois, la preuve sur laquelle l’employeur s’est fié était les registres des laissez‑passer. Tel que cela a été indiqué antérieurement, les registres des laissez‑passer indiquaient les heures auxquelles la fonctionnaire a glissé ou tapoté son laissez‑passer à un point d’accès. La lettre disciplinaire n’indique pas la date de début de la période au mois de mai 2015; les données des registres des laissez‑passer déposés en preuve portent sur tout ce mois. De plus, la lettre n’indique pas la date au mois d’août 2015 à laquelle la période visée prend fin. Toutefois, puisque l’audience disciplinaire a été tenue le 17 août 2015, je suppose que la période examinée serait jusqu’à cette date, y compris celle‑ci. Toutefois, aucun registre des laissez‑passer visant la période après le mois de juillet 2015 n’a été déposé en preuve. Les éléments de preuve portent donc sur une période de trois mois, soit mai, juin et juillet 2015. Au cours de cette période, les heures de travail de la fonctionnaire ont été fixées de 9 h 30 à 17 h 30.

[232]  Selon les registres des laissez‑passer, cette période comptait des données sur les laissez‑passer pour 57 jours. D’après ma conclusion selon laquelle un laissez‑passer glissé dans les cinq minutes de l’heure de début du travail prévu pourrait être considéré comme à l’heure, les registres des laissez‑passer indiquent que la fonctionnaire était à l’heure pendant 28 jours de la période de 57 jours.

[233]  Selon les registres des laissez‑passer, au cours de cinq jours, le premier glissement du laissez‑passer a été effectué après 9 h 30, mais avant 9 h 45. Selon ma conclusion et ce qui est exposé au début des présents motifs, il est très improbable que la fonctionnaire soit arrivée avant 9 h 30, qu’elle ait talonné dans son lieu de travail, qu’elle soit allée au travail et qu’elle ait ensuite quitté son lieu de travail uniquement pour y revenir au cours des 15 premières minutes du jour de travail. En conséquence, je conclus qu’au cours de ces cinq jours, elle était en retard au travail. De même, les registres des laissez‑passer indiquent qu’au cours d’une autre période de cinq jours, le premier glissement de son laissez‑passer a été effectué après 9 h 45, mais avant 10 h. Pour les motifs déjà exposés, je conclus qu’au cours de ces cinq jours, elle était également en retard au travail.

[234]  Concernant les 18 autres jours, au cours d’un jour, le premier glissement du laissez‑passer de la fonctionnaire est indiqué comme étant effectué après 10 h, mais avant 10 h 15. Au cours de 17 jours, le premier glissement a été effectué après 10 h 30. D’après ce que j’ai conclu et ce qui est indiqué au début des présents motifs, il n’existe pas suffisamment de renseignements, en se fondant uniquement sur les registres des laissez‑passer et compte tenu du temps qui s’est écoulé depuis une heure de début de 9 h 30, pour supposer qu’elle n’était pas entrée avant 9 h 30 au moyen d’un talonnage et qu’elle est ensuite partie et revenue.

[235]  Je suis donc convaincu que l’employeur a établi que, selon la prépondérance des probabilités, la fonctionnaire a été en retard pendant au moins 10 jours entre le 1er mai et le 31 juillet 2015.

[236]  Il ressort clairement de la preuve que l’employeur a augmenté progressivement la mesure disciplinaire imposée, car il a conclu que la fonctionnaire faisait preuve de récidive. Il a commencé par une suspension de trois jours. Il a ensuite imposé des suspensions de cinq jours, ensuite de 10 jours et enfin de 20 jours. Il a réduit la suspension initiale de trois jours à une suspension d’un jour et la suspension initiale de cinq jours à une suspension de trois jours que j’ai réduite davantage à deux jours. J’ai réduit la troisième mesure disciplinaire d’une suspension de cinq jours à quatre jours. J’ai fait droit au grief en ce qui concerne la suspension de 10 jours en fonction du principe de la tolérance. Étant donné que j’ai conclu que la fonctionnaire était en retard pendant au moins 10 jours et que l’employeur avait eu recours à un processus de mesures disciplinaires progressives, il serait approprié de réduire la sanction d’une suspension de 20 jours à une suspension de 10 jours.

V.  Conclusion

[237]  Dans l’ensemble, la fonctionnaire a comparu devant la Commission en présentant cinq griefs contre des mesures disciplinaires visant des suspensions totalisant 39 jours. J’ai réduit les mesures disciplinaires de 17 jours et l’employeur est tenu de lui rembourser l’équivalent de 22 jours de salaire et de tous les avantages sociaux équivalents, moins les déductions prévues par la loi et les cotisations syndicales.

[238]  Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

(L’ordonnance apparaît à la page suivante)


VI.  Ordonnance

[239]  Le grief dans le dossier 566‑02‑9644 est rejeté.

[240]  Il est fait droit en partie au grief dans le dossier 566‑02‑9645. La suspension de cinq jours qui a été réduite à une suspension de trois jours est réduite davantage à une suspension de deux jours à titre de réparation de la violation par l’employeur de la convention collective dans le grief dans le dossier 566‑02‑9647.

[241]  Il est fait droit au grief dans le dossier 566‑02‑9646.

[242]  Il est fait droit au grief dans le dossier 566‑02‑9647.

[243]  Il est fait droit en partie au grief dans le dossier 566‑02‑10121. La suspension de cinq jours est réduite à une suspension de quatre jours.

[244]  Il est fait droit au grief dans le dossier 566‑02‑11621.

[245]  Il est fait droit en partie au grief dans le dossier 566‑02‑12603. La sanction est réduite d’une suspension de 20 jours à une suspension de 10 jours.

[246]  L’employeur doit rembourser à la fonctionnaire l’équivalent de 22 jours de salaire et de tous les avantages sociaux équivalents, moins les déductions prévues par la loi et les cotisations syndicales.

Le 2 décembre 2019.

Traduction de la CRTESPF

John G. Jaworski,

une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

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