Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

La fonctionnaire s’estimant lésée a déposé un grief à la suite de son licenciement pour rendement insuffisant – elle allègue que l’employeur était de mauvaise foi et que la décision était déraisonnable compte tenu des lacunes dans la procédure d’évaluation du rendement – la Commission a appliqué les critères qui suivent pour déterminer s’il était raisonnable que l’employeur juge que le rendement de la fonctionnaire s’estimant lésée était insuffisant :1) l’employeur a-t-il fixé à la fonctionnaire s’estimant lésée des objectifs de travail raisonnables et les lui a-t-il clairement communiqués à l’avance?; 2) l’employeur a-t-il fixé à la fonctionnaire s’estimant lésée des indicateurs de rendement raisonnables et les lui a-t-il clairement communiqués à l’avance?; 3) l’employeur a-t-il accordé à la fonctionnaire s’estimant lésée un délai raisonnable pour lui permettre de rencontrer les objectifs de travail et les indicateurs de rendement qu’il lui avait fixés?; 4) l’employeur a-t-il fourni à la fonctionnaire s’estimant lésée tout l’appui dont elle avait besoin pour lui permettre de rencontrer les objectifs de travail et les indicateurs de rendement qu’il lui avait fixés dans le délai qu’il lui a accordé? –la Commission a conclu qu’il n’était pas raisonnable que l’employeur estime que le rendement de la fonctionnaire s’estimant lésée était insuffisant pendant la période où elle était assujettie à un plan de gestion de rendement.

Grief accueilli.

Contenu de la décision

Date: 20200219

Dossier: 566-02-9657

 

Référence: 2020 CRTESPF 18

Loi sur la Commission

des relations de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral et

Loi sur les relations de travail

dans le secteur public fédéral

Armoiries

Devant une formation de la

Commission des relations

de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral

ENTRE

 

SHIRLEY DUSSAH

fonctionnaire s'estimant lésée

 

 

et

 

ADMINISTRATEUR GÉNÉRAL

(Bureau du dirigeant principal des ressources humaines)

 

défendeur

Répertorié

Dussah c. Administrateur général (Bureau du dirigeant principal des ressources humaines)

Affaire concernant un grief individuel renvoyé à l'arbitrage

Devant :  Steven B. Katkin, une formation de la Commission des relations de travail et de l'emploi dans le secteur public fédéral

Pour la fonctionnaire s'estimant lésée : Bertrand Myre, Association canadienne des employés professionnels

Pour le défendeur :  Kétia Calix, avocate

Affaire entendue à Ottawa (Ontario),

du 3 au 6 mars et du 27 au 30 juillet 2015, et du 8 au 10 mars 2016.


MOTIFS DE DÉCISION

I.  Grief individuel renvoyé à l'arbitrage

[1]   Cette décision traite de la décision du sous-ministre adjoint, Secteur de la gouvernance, de la planification et des politiques, Bureau du dirigeant principal des ressources humaines, Conseil du Trésor (l’ « employeur »), de licencier Shirley Dussah, la fonctionnaire s’estimant lésée (la « fonctionnaire »), pour rendement insuffisant.

[2]  Depuis décembre 2011, la fonctionnaire occupait le poste de gestionnaire, Sondage auprès des fonctionnaires fédéraux, Secteur de la gouvernance, de la planification et des politiques, Bureau du dirigeant principal des ressources humaines, Conseil du Trésor. Ce poste était classifié au groupe et au niveau EC-07. Par lettre en date du 16 décembre 2013 (pièce E-1, onglet 30), l’employeur a licencié la fonctionnaire pour rendement insuffisant à compter du 6 janvier 2014.

[3]  La lettre de licenciement, datée du 16 décembre 2013 (pièce E 1, onglet 30), se lit comme suit :

[…]

Depuis votre arrivée dans le secteur de la gouvernance, de la planification et des politiques en décembre 2011, des lacunes quant à votre rendement comme Conseillère principale au niveau EC-07 ont été notées.

Dans le cadre de votre examen de rendement semestriel, la direction s’est entretenue avec vous le 6 novembre 2012 au sujet de votre entente de rendement pour 2012-2013. Durant l’entretien, votre gestionnaire vous a fait part de ses préoccupations concernant votre capacité à remplir les exigences de votre poste. Le même jour, votre gestionnaire a mis en œuvre un plan d’action officiel afin de vous aider à améliorer votre rendement. Le processus comportait la définition des attentes en matière de rendement dans un plan de travail bimensuel. De plus, la direction a tenu des réunions toutes les deux semaines afin de déterminer si le travail avait été effectué en conformité avec le plan de travail. Enfin, ces réunions ont été résumées dans des rapports écrits, qui vous ont été présentés, et vous avez eu l’occasion de fournir des commentaires et une rétroaction ainsi que de discuter de vos besoins en formation avec votre superviseur.

Votre gestionnaire vous a rencontrée le 19 avril 2013 au sujet de votre évaluation de rendement pour 2012-2013. Durant la discussion, vous avez été informée que vous aviez obtenu le « Niveau 2 (Réussi -) » pour l’exercice 2012-2013.

Le 14 mai 2013, la direction vous a rencontrée et vous a offert une affectation au niveau AS-06 dans le cadre de votre plan de redressement pour rendement insatisfaisant, sous la gouvernance de Marc Tremblay, Directeur exécutif des langues officielles. Vous avez été avisée que vous auriez droit à la protection salariale pour la période de l’affectation. Après réflexion, vous avez refusé cette offre.

Le 6 juin 2013, dans le cadre de votre plan de redressement, pour rendement insatisfaisant, vous avez reçu une lettre vous informant que vous alliez être assignée à des fonctions de niveau EC-07 sans supervision d’équipe sous la gouvernance de Debra Tattrie, au sein de la Division de la gestion du rendement, pour la période du 10 juin au 10 décembre 2013. La lettre d’affectation vous avisait par ailleurs que si votre rendement devenait pleinement satisfaisant, vous seriez placée dans un poste EC-07 comprenant des fonctions de gestion de personnel, et que la gestion de votre rendement se poursuivrait afin de vous aider à pallier les lacunes restantes. Elle vous avisait également qu’en cas d’échec, nous devrions procéder à votre congédiement pour rendement insatisfaisant.

En juin 2013, Debra Tattrie vous a informée des exigences du poste EC-07 sans supervision d’équipe en précisant, dans un plan d’action, les objectifs de rendement à atteindre. Vous avez eu des rencontres bilatérales avec elle afin de discuter de votre rendement et vous avez reçu de la rétroaction à tous les mois vous avisant que votre rendement n’était toujours pas satisfaisant, les mêmes lacunes perdurant; notamment le jugement et la compréhension, la capacité de comprendre les éléments liés au travail et la communication.

Ainsi, depuis novembre 2012, votre gestionnaire vous a officiellement informée des exigences de votre poste; vous avez reçu une rétroaction hebdomadaire et avez eu des occasions de négocier les objectifs et de discuter de votre rendement avec votre superviseur. Vous avez également eu la possibilité de suivre plusieurs formations, de recevoir de l’encadrement et du coaching et d’améliorer votre rendement dans le cadre d’une affectation.

Malgré tout ce qui a été mis à votre disposition pour vous aider à pallier vos difficultés, votre rendement est resté insatisfaisant. En conséquence, conformément à l’autorité qui m’est déléguée par l’administrateur général en vertu de l’alinéa 12. (1)(d) [sic] et du paragraphe 121(3) de la Loi sur la gestion des finances publiques, vous serez licenciée pour rendement insatisfaisant **le 6 janvier 2014. Veuillez noter que cette date est ferme et finale**.

[…]

[Le passage en caractère gras l’est dans l’original]

[4]  Depuis cette époque, l’alinéa 12(1)d) et le paragraphe 12(3) de la Loi sur la gestion des finances publiques (L.R.C. (1985), ch. F‑11; la « LGFP »), se sont toujours lus comme suit :

 (1) […] chaque administrateur général peut, à l’égard du secteur de l’administration publique centrale dont il est responsable :

[…]

d) prévoir le licenciement ou la rétrogradation à un poste situé dans une échelle de traitement comportant un plafond inférieur de toute personne employée dans la fonction publique dans les cas où il est d’avis que son rendement est insuffisant;

[…]

[…]

(3) Les mesures disciplinaires, le licenciement ou la rétrogradation découlant de l’application des alinéas (1) […] d) […] doivent être motivés.

[5]  Le 24 décembre 2013, la fonctionnaire a déposé un grief contestant son licenciement. La fonctionnaire y allègue qu’il était déraisonnable que l’employeur estime son rendement insuffisant, compte tenu des lacunes dans la procédure utilisée pour évaluer son rendement et de la mauvaise foi de l’employeur. La fonctionnaire réclame l’annulation de son licenciement, le retrait de toute mention de son licenciement de son dossier d’employée, sa réintégration dans un poste classifié au groupe et au niveau EC‑07 auprès de l’employeur, le remboursement de la rémunération et des avantages qu’elle a perdus et toute mesure lui permettant d’obtenir réparation complète.

[6]  Après avoir été rejeté au dernier palier de la procédure applicable aux griefs individuels, le grief de la fonctionnaire a été renvoyé à l’arbitrage le 24 mars 2014, en vertu du sous-alinéa 209(1)c)(i) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (L.C. 2003, ch. 22, art. 2), qui vise, entre autres, la rétrogradation ou le licenciement d’un fonctionnaire de l’administration publique centrale sous le régime de l’alinéa 12(1)d) de la LGFP pour rendement insuffisant.

[7]  Le 1er novembre 2014, la Loi sur la Commission des relations de travail et de l'emploi dans la fonction publique (L.C. 2013, ch. 40, art. 365) a été proclamée en vigueur (TR/2014-84) et a créé la Commission des relations de travail et de l'emploi dans la fonction publique, qui remplace la Commission des relations de travail dans la fonction publique et le Tribunal de la dotation de la fonction publique. Le même jour, les modifications corrélatives et transitoires édictées par les articles 366 à 466 de la Loi no 2 sur le plan d'action économique de 2013 (L.C. 2013, ch. 40) sont aussi entrées en vigueur (TR/2014-84). En vertu de l'article 393 de la Loi no 2 sur le plan d'action économique de 2013, une instance engagée au titre de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (L.C. 2003, ch. 22, art. 2) avant le 1er novembre 2014 se poursuit sans autres formalités en conformité avec la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, dans sa forme modifiée par les articles 365 à 470 de la Loi no 2 sur le plan d'action économique de 2013.

[8]  Le 19 juin 2017, la Loi modifiant la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique et d’autres lois et comportant d’autres mesures (L.C. 2017, ch. 9) a reçu la sanction royale et a modifié le nom de la Commission et le titre de la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique et de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique pour qu’ils deviennent, respectivement, la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (la « Commission »), la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral et la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral (la « LRTSPF »).

II.  Résumé de la preuve

[9]  L’employeur a appelé les neuf témoins suivants, qui travaillaient tous au Secteur de la gouvernance, de la planification et des politiques, Bureau du dirigeant principal des ressources humaines, Conseil du Trésor : Suzanne Lehouillier, directrice, Mesure de rendement et surveillance, et supérieure immédiate de la fonctionnaire; Deborah Kovacs, directrice par intérim, Mesure de rendement et surveillance; Debra Tattrie, directrice principale, Division de la gestion du rendement; Martin Béliveau, directeur, Mesure de rendement et surveillance; Christine Nassrallah, directrice exécutive, Infrastructure stratégique, gestion de l’information et recherche; Vickie Coghlan, analyste, Mesure de rendement et surveillance; Kathy Malizia, chef d’équipe, Équipe de l’assurance de la qualité des données et de la gestion de l’information des personnes; Ross MacLeod, sous-ministre adjoint; et Andrea Chatterton, analyste/conseillère. La fonctionnaire a témoigné pour son compte.

A.  Pour l’employeur

1.  Mme Lehouillier

[10]  En 2011, la fonctionnaire a perdu son emploi auprès de Services publics et Approvisionnement Canada, lorsque l’unité des Services de consultation de ce ministère a été abolie. Par la suite, Mme Lehouillier a reçu le curriculum vitae de la fonctionnaire et l’a rencontrée dans le cadre d’une entrevue informelle. Mme Lehouillier a eu une discussion avec la directrice de la fonctionnaire et, après vérification, elle a conclu que les références de la fonctionnaire étaient assez bonnes.

[11]  Tel qu’il est indiqué dans la lettre d’offre d’emploi signée par Mme Lehouillier et la fonctionnaire (pièce S-25), la fonctionnaire a commencé à travailler auprès de l’employeur le 12 décembre 2011. Elle travaillait au sein du groupe responsable de la gestion du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux. Ses responsabilités comprenaient la gestion d’une équipe d’analystes, dont les résultats attendus comprenaient la production de présentations pour environ 90 ministères et agences, la préparation de notes de breffage et l’analyse des résultats des sondages.

[12]  L’équipe que la fonctionnaire devait gérer comprenait huit employés, dont deux EC-06, deux EC-05, deux EC-04, un EC-02 et une adjointe administrative. Mme Lehouillier a souligné que la fonctionnaire avait été informée, avant d’accepter le poste, qu’il y avait des difficultés au sein de l’équipe, notamment qu’un des employés avait des problèmes de rendement.

[13]  Selon Mme Lehouillier, le rendement de la fonctionnaire était inadéquat pour plusieurs raisons. Entre autres, la fonctionnaire n’a pas démontré qu’elle avait les compétences requises pour gérer une équipe. Elle a également manifesté des lacunes en ce qui concerne sa compréhension du travail et son jugement au quotidien.

[14]  Dans les trois mois suivant son embauche, Mme Lehouillier a autorisé la fonctionnaire à suivre des sessions de coaching à l’École de la fonction publique. De plus, au cours de ses premiers mois en poste, la fonctionnaire a communiqué avec le Service des relations de travail concernant la gestion d’une équipe difficile, et elle a reçu une présentation à ce sujet.

[15]  Le premier rapport de gestion du rendement et d’apprentissage de la fonctionnaire pour la période allant du 12 décembre 2011 au 31 mars 2012 (pièce S-1) ne contenait pas de cote de rendement, parce que, selon Mme Lehouillier, il s’agissait d’une période d’apprentissage et que, par conséquent, il était prématuré de faire une évaluation. Ce premier rapport mentionnait des points positifs ainsi que le fait que la fonctionnaire avait remplacé Mme Lehouillier pendant une semaine. Il indiquait aussi que la fonctionnaire avait de la difficulté à respecter des échéances et qu’elle devait mieux gérer le temps qu’elle consacrait à conseiller les employés de son équipe.

[16]  Mme Lehouillier a suggéré que la fonctionnaire assiste au Forum de développement professionnel de la Communauté nationale des gestionnaires qui avait lieu à Winnipeg, en mai 2012, car il s’agissait d’une belle occasion d’apprentissage et de réseautage. La fonctionnaire était la seule employée de l’employeur à participer au forum en 2012. En novembre 2012, la fonctionnaire a participé au programme du Secrétariat du Conseil du Trésor en développement du leadership d’une durée de trois jours, suivi d’une évaluation à 360° et de 10 à 12 heures de coaching.

[17]  Le 1er octobre 2012, Mme Malizia a rencontré Mme Lehouillier pour se plaindre d’un courriel que la fonctionnaire avait fait parvenir le même jour à deux gestionnaires (pièce E-1, onglet 18), alléguant que Mme Malizia avait monopolisé le temps de la fonctionnaire la semaine précédente, à raison de 2.5 jours personnes. Mme Malizia a dit à Mme Lehouillier qu’elle avait dû prendre le temps d’expliquer et de réexpliquer certains concepts à la fonctionnaire. Mme Lehouillier a pris des notes de cette rencontre au sujet du courriel que lui avait fait parvenir Mme Malizia.

[18]  Le 18 octobre 2012, Mme Lehouillier a informé la fonctionnaire qu’elle devrait s’interroger à savoir si elle était la bonne personne pour le poste qu’elle occupait étant donné que, selon les propres termes de la fonctionnaire, elle « courait après le train ». Mme Lehouillier a remarqué que le rythme du poste était trop rapide pour la fonctionnaire et lui causait du stress. Elle a consigné ses observations par écrit dans des courriels à elle-même les 21, 22 et 27 octobre 2012, dont certaines concernaient une évaluation à 360° (pièce E-1, onglet 1). Ses observations mentionnaient aussi que la fonctionnaire était transparente, honnête, sincère et collaborative et qu’elle déployait tous ses efforts pour accomplir ses tâches. Cependant, selon Mme Lehouillier, la fonctionnaire déléguait souvent le travail sans le comprendre et les employés s’en apercevaient. La gestion d’une équipe difficile affectait la santé de la fonctionnaire.

[19]  Mme Lehouillier a dit que le 22 octobre 2012, la fonctionnaire a fait parvenir à un de ses employés un courriel concernant un document qu’il avait préparé. Dans ce courriel, qu’elle a envoyé à tous les membres de son équipe ainsi qu’à Mme Lehouillier, la fonctionnaire a critiqué le rendement de l’employé et lui a dit qu’il n’était pas à la hauteur de ce qui est attendu de son poste (pièce E-1, onglet 19). Le même jour, Mme Lehouillier a indiqué à la fonctionnaire par courriel qu’elle n’aurait pas dû envoyer le courriel à l’équipe et que cela avait été humiliant pour l’employé en question. L’employé en a discuté avec Mme Lehouillier et a avisé la fonctionnaire qu’il envisageait déposer une plainte de harcèlement ou en informer la haute direction. Par courriel en date du 23 octobre 2012, la fonctionnaire s’est excusée auprès de l’employé, de l’équipe et de Mme Lehouillier.

[20]  Selon le témoignage de Mme Lehouillier, à deux occasions, la fonctionnaire a fait des commentaires à deux gestionnaires, dont un commentaire sur le syndrome prémenstruel. Lorsque Mme Lehouillier lui a dit que ces commentaires étaient inappropriés, la fonctionnaire a répondu « on a tous des tics ».

[21]  Le vendredi 2 novembre 2012, Mme Lehouillier a tenu une rencontre avec la fonctionnaire d’une durée de deux heures pour discuter de son rapport de gestion du rendement et d’apprentissage de mi-année, pour la période du 1er avril au 30 septembre 2012 (pièce E-2). En raison de lacunes à l’égard du respect des échéanciers et des interactions avec ses subalternes et ses collègues, Mme Lehouillier lui a accordé la cote de rendement « Niveau 2 (Réussi -) », qui est définie comme suit :

Ce niveau de rendement indique que les résultats obtenus n’ont pas satisfait pleinement aux attentes en matière de rendement. L’employé n’a pas produit les résultats requis pour prouver qu’il possède certaines des compétences les plus importantes pour ce poste.

[Le passage en caractères gras l’est dans l’original]

[22]  Mme Lehouillier a dit que cette rencontre avait été difficile et que la fonctionnaire n’avait pas signé le rapport de gestion du rendement et d’apprentissage, puisqu’elle n’était pas d’accord avec la cote. La fonctionnaire s’est plainte de certains de ses employés, en particulier d’une employée qui avait des problèmes de comportement. Tel qu’il est indiqué dans ses notes de la discussion (pièce E-1, onglet 2), Mme Lehouillier était d’accord que l’équipe de la fonctionnaire était difficile et croyait que la santé de la fonctionnaire en était affectée.

[23]  Lors de la rencontre du 2 novembre 2012, Mme Lehouillier a informé la fonctionnaire que, tel qu’elles en avaient discuté auparavant, la fonctionnaire commencerait à faire l’objet d’un plan de gestion de son rendement, y compris d’un plan de travail comprenant sept objectifs fixés par Mme Lehouillier. Mme Lehouillier a confirmé ceci le jour même par courriel (pièce E-1, onglet 3), comme suit :

[…]

Suite à ton évaluation de rendement daté du 2 novembre 2012, je me dois de commencer une gestion de rendement pour toi.

Tel que discuté aujourd’hui:

1. Nous allons nous rencontrer à tous les deux semaines pour faire un suivi/bilan sur les sept objectifs identifiés sur ton plan de travail afin de t’aider à améliorer tes capacités et compétences en gestion. Ces sept objectifs sont:

a) Améliorer le jugement, compréhension […]

b) Devenir agile et plus rapide dans sa capacité à comprendre les éléments reliés au travail […]

c) Effectuer des tâches de gestion elle-même […]

d) Améliorer son style et approche de gestion (focus sur la communication) […]

e) Livrer les éléments de travail dans les délais convenus […]

f) Garder les items reliés au personnel de manière confidentiel en tout temps […]

g) Fournir du support et guider les employés […]

h) Je te joins une copie électronique de ton plan de travail tel que demandé.

[…]

2. A chaque deux semaine, le résultat de nos discussions sera écrit dans ton plan de travail.

3. Notre prochaine rencontre sera le 15 novembre prochain.

4. Tous les problèmes d’équipe ou autre qui pourrait se passer dans le futur devrait m’être adressé. Si requis, j’impliquerai moi-même les relations de travail.

Notre objectif est que tu réussisses professionnellement et nous te fournirons le soutien dont tu as besoin pour t’améliorer dans tes fonctions. Tu dois toutefois savoir que si ton rendement ne s’améliore pas, nous n’aurons d’autre choix que de procéder à une rétrogradation ou un licenciement.

[…]

[Sic pour l’ensemble de la citation]

[24]  Mme Lehouillier a transmis le plan de travail à la fonctionnaire par voie électronique le vendredi 2 novembre 2012, à 17 h 48. Le courriel de transmission indiquait que, si le rendement de la fonctionnaire ne s’améliorait pas, l’employeur pouvait la rétrograder ou la licencier.

[25]  Les observations de Mme Lehouillier étaient le seul indicateur de rendement à l’égard des items « a », « b » et « g » du plan de gestion du rendement de la fonctionnaire (pièce E-1, onglet 3). Le seul indicateur de rendement à l’égard de l’item « c » était le nombre de tâches effectuées personnellement par la fonctionnaire. Les indicateurs de rendement à l’égard de l’item « d » étaient 1) une réduction du nombre d’incidents et d’erreurs et 2) la rareté de tels incidents et erreurs. Le seul indicateur de rendement à l’égard de l’item « e » était la livraison des éléments de travail dans les délais convenus. Enfin, le seul indicateur de rendement à l’égard de l’item « f » était une absence totale de bris de confidentialité.

[26]  La fonctionnaire a répondu à Mme Lehouillier dans un courriel en date du 6 novembre 2012 (pièce E-1, onglet 3). Elle a souligné que, selon elle, les objectifs du plan de travail étaient trop vagues et qu’elle fournirait d’autres commentaires à une date ultérieure.

[27]  Dans un courriel à elle-même en date du 13 novembre 2012 (pièce E-1, onglet 4), Mme Lehouillier a noté que, pour la semaine du 5 au 9 novembre 2012, la fonctionnaire était plus productive et qu’il s’agissait de la première fois que la fonctionnaire accomplissait tant de tâches dans une semaine.

[28]  La fonctionnaire a fait parvenir un courriel détaillé à Mme Lehouillier le 22 novembre 2012, accompagné du plan de travail et de ses propres commentaires (pièce E-1, onglet 6). La fonctionnaire a fait état, entre autres, du fait que son rapport de gestion du rendement et d’apprentissage indiquait qu’elle avait atteint 9 des 10 objectifs fixés et que certains objectifs de son plan de travail manquaient de précision.

[29]  Mme Lehouillier a écrit ses propres notes sur le document de la fonctionnaire et a eu une discussion avec elle concernant son courriel du 22 novembre 2012. La fonctionnaire a persisté à dire qu’il s’agissait de menaces, plutôt que d’accepter le plan de travail comme un outil d’amélioration de son rendement. Tel que l’a demandé la fonctionnaire, Mme Lehouillier a examiné chaque item du plan et lui a dit ce qu’elle devait faire. La fonctionnaire établissait elle-même les délais pour livrer le travail. Cependant, Mme Lehouillier lui a demandé de l’en informer si elle changeait les délais.

[30]  Dans ses notes du 31 octobre 2012 (pièce E-1, onglet 20), Mme Lehouillier a renvoyé à un incident qui a eu lieu le même jour impliquant la fonctionnaire et un de ses employés EC-06, Aloysia Pinto. Cette dernière était chargée d’un dossier concernant la modélisation par équation structurelle (« structural equation modelling ») et avait planifié une réunion avec Statistique Canada. La fonctionnaire a changé le lieu de la réunion et a invité une autre personne sans en aviser Mme Pinto. Mme Lehouillier a dit que la fonctionnaire, en tant que gestionnaire, aurait dû juger approprié de consulter Mme Pinto concernant le dossier.

[31]  Mme Lehouillier a abordé le plan de travail du 15 novembre 2012 (pièce E-1, onglet 5). L’objectif no 1 concernait l’amélioration du jugement et de la compréhension. À cet égard, Mme Lehouillier a noté que le 13 novembre 2012, la fonctionnaire lui a demandé si elle avait approuvé qu’un des employés transmette à ses collègues un sondage fait par une firme externe sur l’engagement des employés. Mme Lehouillier a expliqué à la fonctionnaire qu’il s’agissait d’une étude et non pas d’un sondage, et que l’employé n’avait pas besoin d’une approbation pour partager avec ses collègues une étude qui pouvait les intéresser. Mme Lehouillier a noté que la fonctionnaire ne semblait pas comprendre.

[32]  Mme Lehouillier a aussi fait des commentaires positifs. L’objectif no 6 portait sur le maintien de la confidentialité des items liés au personnel. À cet égard, Mme Lehouillier a noté une amélioration, puisque la fonctionnaire fermait la porte de son bureau lorsqu’elle rencontrait ses employés. En ce qui concerne l’objectif no 7, soit de fournir de l’appui et une orientation aux employés, Mme Lehouillier a noté que la fonctionnaire avait offert plus d’appui à une employée et qu’il y avait un certain changement dans le comportement de la fonctionnaire.

[33]  Mme Lehouillier a dit qu’après la préparation du plan de travail, elle rencontrait la fonctionnaire toutes les deux semaines et lui donnait une copie papier du plan.

[34]  Le prochain plan de travail visait la période du 15 novembre au 7 décembre 2012 (pièce E-1, onglet 8). Pendant cette période, Mme Lehouillier a été absente du 23 novembre au 2 décembre 2012. La fonctionnaire, pour sa part, s’est absentée l’après-midi du 6 décembre ainsi que le 7 décembre. Pendant l’absence de Mme Lehouillier, quelques commentaires ont été faits par son remplaçant, Benoît Cadieux, gestionnaire, Cadre de responsabilisation de gestion, Secteur de la gouvernance, de la planification et des politiques, Bureau du dirigeant principal des ressources humaines, Conseil du Trésor.

[35]  Tel qu’il est indiqué à l’objectif no 1 du plan de travail (améliorer le jugement, compréhension), M. Cadieux a mentionné à Mme Lehouillier que la fonctionnaire l’avait rencontré au sujet d’un courriel concernant la modélisation par équation structurelle que Mme Pinto avait envoyé directement à Mme Lehouillier ainsi qu’à la fonctionnaire. La fonctionnaire croyait qu’il était inapproprié d’avoir envoyé le courriel directement à Mme Lehouillier et a dit à M. Cadieux qu’elle voulait faire parvenir un courriel à Mme Pinto à cet égard. M. Cadieux a avisé la fonctionnaire que ça ne valait pas la peine d’en faire tout un plat et lui a suggéré d’en discuter directement avec Mme Pinto plutôt que de lui envoyer un courriel.

[36]  Mme Lehouillier a dit que la fonctionnaire n’était pas d’accord avec ses commentaires et qu’elle n’en profitait pas pour s’améliorer. Entre autres commentaires, Mme Lehouillier a mentionné à l’objectif no 3 – effectuer des tâches de gestion elle-même – que la fonctionnaire avait rédigé une mise à jour stratégique à l’intention du Conseil des ressources humaines, composé de directeurs généraux de plusieurs ministères, mais que le document était trop détaillé pour ce groupe. Comme l’échéance pour le document était le 6 décembre 2012, et que la fonctionnaire était absente, Mme Lehouillier s’est chargée de réécrire le document (pièce E-1, onglet 9). Elle a noté que la fonctionnaire continuait à fermer sa porte de bureau lorsqu’elle rencontrait ses employés.

[37]  Mme Lehouillier a déposé un courriel en date du 10 décembre 2012, à titre d’exemple d’instructions qu’elle donnait par écrit à la fonctionnaire (pièce E-1, onglet 10). Ce courriel se lit comme suit :

[…]

Salut,

Voici quelques items qu’on doit livré [sic].

[Traduction]

1. Note d’information sur le SAFF de 2014 exigée d’ici le vendredi 14 décembre. Tel qu’il t’a été mentionné la semaine dernière, elle devrait souligner la valeur ajoutée de la tenue d’un SAFF, le délai de haut niveau que nous proposons, le financement estimé, etc. Je te conseille de te référer aux plans d’actions des organismes… En quoi le SAFF est-il utile aux organismes?

2. Les délais de haut niveau proposés devraient être indiqués dans un document distinct. Quels sont les jalons? (En dehors de la note d’information sur la valeur ajoutée, etc.) Christine souhaite l’avoir dans un document distinct.

3. Remarque : Évitons les répétitions. Nous ne poserons pas les mêmes questions que dans le sondage sur la dotation de la CFP.

4. Christine aimerait présenter les thèmes que nous proposons pour le sondage au Comité de la haute direction. Avant cela, nous devrions consulter notre groupe de travail consultatif du CRH et nos centres de politiques. Le groupe de travail consultatif du CRH devrait être relancé et consulté au sujet des concepts et des thèmes proposés qui, à son avis, devraient être explorés dans le prochain SAFF.

5. Il faudrait avoir un plan de mobilisation pour le SAFF de 2014. Christine souhaiterait recevoir une proposition au cours des prochaines semaines (assez rapidement).

Merci,

[…]

[38]  La fonctionnaire a été en congé maladie du 12 décembre 2012 au 12 janvier 2013. Mme Lehouillier l’a rencontrée le 16 janvier 2013, de 10 h 30 à 12 h 55. Lors de cette réunion, elle a remis à la fonctionnaire une copie de ses plans de travail du 7 décembre 2012 et du 16 janvier 2013 (pièce E-1, onglet 11), et elle lui a fourni une rétroaction. Dans un courriel en date du 17 janvier 2013, qu’elle s’est envoyée à elle-même et à Estelle Guilhem, conseillère principale en relations de travail, Direction des ressources humaines, Conseil du Trésor, Mme Lehouillier a rédigé un sommaire des discussions tenues lors de cette réunion (pièce E-1, onglet 11).

[39]  Dans le cadre de la réunion du 16 janvier 2013, Mme Lehouillier a informé la fonctionnaire qu’elle avait placé un des employés de son équipe, qui était un employé difficile, sous la responsabilité de Mme Chatterton afin de permettre à cette dernière de développer des compétences en gestion. La fonctionnaire ne s’y est pas opposée. Elle a également dit à la fonctionnaire qu’elle était satisfaite en ce qui concerne l’objectif relatif à la confidentialité, puisque la fonctionnaire fermait dorénavant sa porte lorsqu’elle discutait avec ses employés.

[40]  Mme Lehouillier a dit à la fonctionnaire que ses analystes EC-06 comprenaient rapidement et qu’elle prenait souvent du retard en essayant de comprendre. La fonctionnaire a répondu qu’elle n’était pas statisticienne ou spécialiste. Mme Lehouillier lui a répondu qu’elle ne l’était pas non plus et qu’en embauchant la fonctionnaire elle avait embauché une gestionnaire, non une spécialiste.

[41]  Mme Lehouillier a mentionné à la fonctionnaire que les plans de travail étaient en place pour améliorer ses compétences essentielles en gestion et parce qu’elle voulait qu’elle prenne en main le projet du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux. La fonctionnaire croyait qu’il s’agissait d’un outil pour faciliter son licenciement, mais Mme Lehouillier l’a rassuré et lui a dit que ce n’était pas son but. La fonctionnaire lui a alors demandé si elle devait chercher un autre emploi et Mme Lehouillier a répondu que, si elle croyait qu’un autre emploi lui conviendrait, libre à elle d’en trouver un autre. Elle a alors réitéré que son but était de l’aider et que c’était pour cette raison qu’elle lui donnait des exemples et la rencontrait toutes les deux semaines.

[42]  Mme Lehouillier a informé la fonctionnaire qu’une gestionnaire avait fourni de la rétroaction négative à son égard concernant un projet appelé « tableau de bord » (« dashboard ») et des déclarations que la fonctionnaire avait faites lors d’une réunion de directeurs. La fonctionnaire a dit à Mme Lehouillier qu’elle pensait que Mme Lehouillier ne lui faisait pas confiance, ce que Mme Lehouillier a nié. La fonctionnaire a dit qu’elle avait perdu confiance en Mme Lehouillier lorsqu’elle a lu la lettre du 2 novembre 2012, indiquant que, si elle ne s’améliorait pas, elle pouvait être rétrogradée ou licenciée. La fonctionnaire a dit à Mme Lehouillier qu’elle se sentait limitée, parce qu’elle savait que cette dernière documentait son rendement et qu’elle était critiquée par les gens du Conseil du Trésor. Mme Lehouillier a dit que des gens avaient communiqué avec elle, car ils étaient frustrés par le manque de compréhension et de jugement de la fonctionnaire.

[43]  Le prochain plan de travail était en date du 30 janvier 2013 (pièce E-1, onglet 12). Au sujet de l’objectif no 1 (améliorer jugement, compréhension), Mme Lehouillier a mentionné que l’élaboration de la présentation du sondage de 2014 auprès des fonctionnaires fédéraux avait été source de frustration pour l’une des EC‑06 se rapportant à la fonctionnaire. Le 23 janvier 2013, Mme Chatterton a dû passer 1,5 heures assises à côté de la fonctionnaire pour lui indiquer quoi écrire et comment commander et formater les diapositives. Le 30 janvier 2013, la fonctionnaire a envoyé un courriel à Mme Chatterton qui ne faisait pas de sens aux yeux de Mmes Chatterton et Lehouillier, en ce que la fonctionnaire demandait une définition des concepts et du mot « thèmes ».

[44]  Mme Lehouillier a rencontré la fonctionnaire le 31 janvier 2013, de 9 h à 10 h, pour discuter du plan de travail (pièce E-1, onglet 12). Elle a résumé la discussion dans un courriel à Mme Guilhem le même jour (pièce E-1, onglet 12). Pendant la discussion, Mme Lehouillier a mentionné que la fonctionnaire pourrait se prévaloir d’un mentor, ce à quoi la fonctionnaire a répondu qu’il lui restait des séances de coaching à la suite du programme du Secrétariat du Conseil du Trésor en développement du leadership et que, comme elle était occupée, faire appel à un mentor prendrait trop de son temps. Mme Lehouillier a dit qu’il s’agissait d’un autre « outil » pour l’aider.

[45]  Dans son courriel, Mme Lehouillier a mentionné que ces discussions étaient difficiles pour elle, parce que la fonctionnaire ne semblait pas comprendre son manque de jugement et de compréhension dans ses interactions quotidiennes. Elle a écrit que la fonctionnaire croyait probablement que Mme Lehouillier voulait lui nuire, mais que ce n’était pas le cas. Elle voulait lui fournir de la rétroaction ponctuelle et l’aider à devenir une bonne gestionnaire.

[46]  De 10 h à 12 h, le même jour, Mme Lehouillier ainsi que la fonctionnaire et son équipe ont eu une rencontre avec un centre de politiques. Par la suite, Mme Coghlan et Mme Chatterton sont venues au bureau de Mme Lehouillier pour exprimer leurs doutes quant à la capacité de la fonctionnaire à gérer le sondage de 2014 auprès des fonctionnaires fédéraux, puisqu’il lui fallait beaucoup trop de temps pour comprendre la matière. Dans son courriel, Mme Lehouillier a écrit qu’elle était d’accord avec elles.

[47]  Le plan de travail du 18 février 2013 (pièce E-1, onglet 13) visait les deux premières semaines du mois. Mme Lehouillier a rencontré la fonctionnaire le 18 février 2013. Elle lui a fourni une copie du plan de travail dans lequel elle avait complété la colonne « résultats obtenus ». Mme Lehouillier lui a mentionné qu’elle n’avait pas atteint les deux premiers objectifs, puisque les réponses qu’elle avait rédigées dans un document sur la recherche d’opinion publique ne répondaient pas aux questions posées. Mme Lehouillier a revu la première ébauche de la fonctionnaire avec elle et lui a dit que, même si elle n’avait pas complété toutes les questions, elle s’attendait à ce que les réponses soient convenables sans toutefois être parfaites. Mme Lehouillier a dit que la fonctionnaire avait reconnu que ses réponses n’étaient pas les bonnes. Après avoir vu la deuxième ébauche, Mme Lehouillier a dû reprendre les réponses elle-même. Selon Mme Lehouillier, comme la fonctionnaire faisait partie du groupe depuis décembre 2011, soit depuis 15 mois, elle aurait dû savoir comment répondre aux questions. C’est également ce qu’elle a écrit dans un courriel du 7 février 2013, à Mme Guilhem (pièce E-1, onglet 13). Lors de la rencontre du 18 février 2013, la fonctionnaire a dit qu’elle avait besoin de plus de temps pour se concentrer. Mme Lehouillier lui a offert de travailler à la maison et lui a demandé ce qu’elle pouvait faire pour l’aider avec du travail semblable à l’avenir. Mme Lehouillier a fait part de cette rencontre à Mme Guilhem dans un courriel en date du 18 février 2013 (pièce E-1, onglet 13).

[48]  Le prochain plan de travail visait la période du 19 février au 8 mars 2013 (pièce E-1, onglet 14). À titre d’observations générales, Mme Lehouillier a noté ce qui suit: [traduction] « Shirley travaille très fort pour satisfaire les exigences de son poste. Elle tente toujours de faire ce qui est demandé. Malheureusement, son manque de jugement et de compréhension ressortent [sic] souvent dans le cadre de ses interactions quotidiennes ». Dans l’objectif no 2 – devenir agile et plus rapide dans sa capacité à comprendre les éléments reliés au travail – Mme Lehouillier a mentionné une lettre d’entente avec Statistique Canada que la fonctionnaire devait rédiger depuis plus d’un mois et pour laquelle aucune ébauche n’avait été présentée. Mme Lehouillier lui a rappelé l’urgence d’envoyer une ébauche à Statistique Canada. Elle lui a également dit que peu de modifications étaient nécessaires depuis la lettre d’entente précédente.

[49]  La rencontre du 8 mars 2013 avec la fonctionnaire a duré 1 h 40. Le même jour, Mme Lehouillier a résumé la discussion dans un courriel à Mme Guilhem (pièce E-1, onglet 14). Parmi les sujets discutés, selon le témoignage de Mme Lehouillier, la fonctionnaire a mentionné qu’elle croyait que des gens la critiquaient et parlaient d’elle. Mme Lehouillier lui a dit que ses employés avaient des attentes à son égard, tout comme sa directrice générale par rapport à elle-même et Mme Lehouillier à l’égard de ses gestionnaires de projets.

[50]  La fonctionnaire lui a dit que, dans ses emplois antérieurs, les projets qu’elle gérait lui laissaient le temps de penser, par exemple lors de la planification de conférences internationales ou de la révision de documents. Mme Lehouillier a tenté de faire réaliser à la fonctionnaire que le domaine des sondages, qui était un emploi opérationnel, était peut-être trop différent de ses domaines d’emploi antérieurs, ce qui expliquerait certaines de ses difficultés. La fonctionnaire a demandé à Mme Lehouillier si elle était en train de lui dire de chercher un autre emploi, ce à quoi elle a répondu qu’elle ne lui dirait jamais cela. Toutefois, elle a dit à la fonctionnaire qu’elle devait penser à elle-même et que, si elle avait besoin de temps pour penser dans le cadre de l’exercice de ses fonctions, il se pouvait que cet emploi opérationnel ne lui convienne pas. Mme Lehouillier lui a demandé d’y réfléchir.

[51]  Elles ont discuté en détail du poste de gestionnaire du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux, entre autres du fait que ses employés lui posaient des questions plus détaillées que ce à quoi elle était habituée. À titre de gestionnaire, elle n’avait pas à être une experte en sondages, mais ses employés s’attendaient à ce qu’elle pose les bonnes questions et qu’elle comprenne assez rapidement.

[52]  Mme Lehouillier a informé la fonctionnaire qu’elle recevait quotidiennement les annonces de postes sur Carrière à l’écoute. Elle lui a montré ce qu’elle recevait sur son ordinateur et a envoyé l’hyperlien à la fonctionnaire pour qu’elle puisse s’enregistrer.

[53]  La fonctionnaire a demandé à Mme Lehouillier si elle lui faisait confiance. Mme Lehouillier a répondu que ce n’était pas une question de manque de confiance, mais qu’elle essayait de l’aider au moyen du plan de travail. La fonctionnaire lui a demandé pendant combien de temps elle devrait se conformer au plan et Mme Lehouillier lui a répondu que, selon les Relations de travail, le rendement des employés pouvait être géré de façon formelle pendant environ un an, selon le poste. Lorsque la fonctionnaire lui a demandé s’il s’agissait d’un plan formel, Mme Lehouillier a répondu affirmativement.

[54]  Selon Mme Lehouillier, la fonctionnaire n’a jamais accepté de se prendre en main pour s’améliorer. Elle a mentionné une rencontre avec la fonctionnaire, le 4 avril 2013, qu’elle a résumé dans un courriel à Mme Guilhem le même jour (pièce E-1, onglet 16). Pendant cette rencontre, la fonctionnaire lui a dit que le plan de travail lui causait beaucoup de stress et qu’elle ne se sentait pas en confiance au travail. Elle a dit que le milieu de travail manquait de respect. La fonctionnaire a défini « respect » comme n’étant pas seulement la culture ou l’éducation d’une personne, mais aussi comment la personne se sent par rapport aux autres. La fonctionnaire a dit que les lignes de communication étaient floues, car ses employés allaient voir Mme Lehouillier concernant le travail. Selon la fonctionnaire, Mme Lehouillier croyait tout ce que les employés lui disaient et insérait ensuite leurs commentaires dans son plan de travail. La fonctionnaire a dit qu’elle avait besoin de temps pour s’ajuster à un nouveau milieu de travail. Lorsque Mme Lehouillier lui a mentionné qu’elle occupait son poste depuis un an et demi, la fonctionnaire a répondu que ce n’était pas suffisant pour s’ajuster.

[55]  Le 10 avril 2013, la fonctionnaire a fait parvenir à Mme Lehouillier un courriel de plusieurs pages auquel étaient jointes six pièces (pièce E-1, onglet 15). Le courriel comprenait des commentaires de la fonctionnaire concernant la façon dont son rendement était géré par Mme Lehouillier. Essentiellement, selon la teneur des commentaires de la fonctionnaire, le processus était vicié. Entre autres, la fonctionnaire a écrit que le plan de travail était vague et reposait sur des jugements de valeur plutôt que sur des critères de rendement concrets et des objectifs mesurables.

[56]   Les six pièces jointes comprennent les commentaires de la fonctionnaire sur les plans de travail des dates suivantes : le 15 novembre 2012, le 7 décembre 2012, le 16 janvier 2013, le 30 janvier 2013, le 18 février 2013 et le 8 mars 2013. Dans son courriel du 15 avril 2013, Mme Lehouillier a aussi répondu à chacun des commentaires de la fonctionnaire (pièce E-1, onglet 15) et a écrit ce qui suit :

[…]

J’ai ajouté mes commentaires à tous les points soulevés dans ce courriel et dans les 6 pièces jointes. Je trouve cela malheureux que tu choisisses de chercher des explications sur des items qui ont été soulevés il y a 5 mois….Pourquoi ne pas avoir choisi d’en discuter au préalable si tu avais des questions? Cela t’aurait permis de mieux comprendre comment t’améliorer… Je dois t’avouer qu’aux fils des mois passés, j’ai trouvé ces discussions de performance très difficile [sic] car à chaque fois, tu essayais de te défendre sans chercher à comprendre le « pourquoi »…

En espérant le [sic] tout répond à tes questions…

[…]

[57]  Mme Lehouillier a préparé le rapport de gestion du rendement et d’apprentissage de la fonctionnaire pour la période du 1er avril 2012 au 31 mars 2013 (pièce E-1, onglet 16) et lui a accordé une cote globale de « Niveau 1 (Non atteint) », qui est définie comme suit :

Ce niveau de rendement indique que les résultats obtenus n’ont pas satisfait aux attentes en matière de rendement. L’employé a constamment de la difficulté à faire preuve des compétences les plus importantes pour ce poste.

Les gestionnaires sont chargés de s’assurer qu’un plan d’action sur les problèmes de rendement soit élaboré par [sic] les employés qui ont reçu la cote 1.

[Le passage en caractères gras l’est dans l’original]

[58]  Le rapport a été remis à la fonctionnaire le 16 avril 2013. Le jour même, Mme Lehouillier a résumé cette rencontre dans un courriel à Mme Guilhem. Selon le rapport, la fonctionnaire n’avait atteint qu’un objectif, soit celui de la confidentialité. Mme Lehouillier a témoigné à l’effet que l’évaluation accordée à la fonctionnaire rencontrait la définition de la cote qui correspondait à son rendement. Dans l’évaluation narrative, Mme Lehouillier a noté entre autres que des employés faisant partie de l’équipe de la fonctionnaire venaient la voir directement lorsqu’ils croyaient que la fonctionnaire démontrait un manque de jugement ou de compréhension ou qu’elle consacrait trop de temps sur certains dossiers. Ces rencontres n’étaient pas sollicitées par Mme Lehouillier et, selon elle, les employés avaient peur que cela leur cause des problèmes avec la fonctionnaire.

[59]  Mme Lehouillier a aussi noté dans l’évaluation narrative qu’elle avait assumé la responsabilité des activités liées à l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) afin que la fonctionnaire puisse se concentrer sur son rôle de gestionnaire du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux.

[60]  La fonctionnaire n’était pas d’accord avec la cote et n’a pas signé le rapport de gestion du rendement et d’apprentissage. Elle a fait des commentaires à Mme Lehouillier, dont certains ont été acceptés par cette dernière à la suite d’une discussion. Mme Lehouillier a donc révisé la cote globale de la fonctionnaire à « Réussi - » (pièce S-8). La fonctionnaire n’était toujours pas d’accord et n’a pas signé le rapport.

[61]  Mme Lehouillier m’a renvoyé à un courriel que lui a envoyé Mme Coghlan le 23 janvier 2013 (pièce E-1, onglet 22). Un courriel de la fonctionnaire en date du 7 septembre 2012, et un autre du 29 novembre 2012, adressé à Mme Coghlan, était joint à ce courriel. Dans son courriel à Mme Lehouillier, Mme Coghlan a dit qu’elle avait fait le ménage dans ses courriels et que les courriels joints lui avaient rappelé qu’elle avait dû fournir à la fonctionnaire la même information quatre fois en trois mois et que, chaque fois, la fonctionnaire lui avait demandé si leur équipe possédait cette information. Mme Lehouillier a renvoyé ces courriels à Mme Guilhem avec la mention « [à] mettre dans la filière de Shirley Dussah ».

[62]  En contre-interrogatoire, Mme Lehouillier a dit qu’elle avait été contente d’embaucher la fonctionnaire, puisque, sur papier et avec ses références, elle répondait aux exigences du poste.

[63]  Concernant le fait que la fonctionnaire l’avait remplacé à titre intérimaire du 3 au 20 juillet 2012, Mme Lehouillier a dit qu’elle était en vacances et que la fonctionnaire était une gestionnaire qui se rapportait à elle.

[64]  Mme Lehouillier a été interrogée au sujet de la situation concernant l’employé dont le rendement a été critiqué par la fonctionnaire dans un courriel envoyé à son équipe et à Mme Lehouillier. Plus précisément, elle a été interrogée à savoir si elle avait imposé une mesure disciplinaire à la fonctionnaire, ce à quoi elle a répondu par la négative, mais qu’elle aurait dû le faire. Elle a nié qu’elle avait inclus cet incident dans le rapport de gestion du rendement et d’apprentissage au lieu d’imposer une mesure disciplinaire.

[65]  Quant à l’absence de sa signature et de celle de la fonctionnaire sur le rapport de gestion du rendement et d’apprentissage de mi-année, soit du 1er avril 2012 au 31 mars 2013 (pièce E-2), Mme Lehouillier a répondu qu’elle avait classé le document tel quel.

[66]  Concernant son courriel à la fonctionnaire en date du 2 novembre 2012 (pièce E-1, onglet 3) et la phrase « […] nous te fournirons le soutien dont tu as besoin pour t’améliorer dans tes fonctions […] », Mme Lehouillier a dit que le soutien consistait en la participation de la fonctionnaire au Forum de développement professionnel de la Communauté nationale des gestionnaires, au programme du Secrétariat du Conseil du Trésor en développement du leadership, qui était suivi d’une évaluation à 360°, et de coaching, de la gestion de conflits informels, de l’aide de son équipe et de la rétroaction.

[67]  À la question de savoir s’il n’avait pas été drastique d’ajouter au courriel qu’à défaut d’une amélioration de son rendement, la fonctionnaire pouvait être rétrogradée ou licenciée, Mme Lehouillier a répondu que non. Elle a ajouté qu’elle avait dit à la fonctionnaire qu’elle suivait les procédures recommandées par les Relations de travail.

[68]  Lorsqu’elle a été renvoyée à la réponse de la fonctionnaire, en date du 6 novembre 2012, selon laquelle elle n’acceptait pas le plan de travail, Mme Lehouillier a dit que la fonctionnaire lui avait souvent exprimé son désaccord et mentionné qu’il s’agissait de menaces.

[69]  Lorsqu’elle a été interrogée à savoir s’il n’était pas normal qu’une employée perçoive un tel courriel, qui lui fournit tout d’abord de l’aide, comme une menace, Mme Lehouillier a répondu qu’il y avait plusieurs éléments du rendement de la fonctionnaire qui justifiaient l’ajout d’une mention concernant la possibilité de rétrogradation ou de licenciement, incluant la critique du rendement d’un employé. Toutefois, je note que cet incident a eu lieu le 22 octobre 2012, donc avant que le plan de travail ne soit instauré.

[70]  À la question de savoir si elle avait répondu à la fonctionnaire par écrit, Mme Lehouillier a dit qu’elle était certaine d’en avoir discuté avec la fonctionnaire et d’avoir dit à cette dernière à plusieurs reprises que l’objectif du plan était de l’aider.

[71]  Mme Lehouillier a dit qu’elle avait elle-même rédigé les engagements de la fonctionnaire sur le plan de travail. Elle en a discuté avec elle. L’engagement de Mme Lehouillier était d’aviser la fonctionnaire lorsqu’elle n’atteignait pas les objectifs de rendement.

[72]  À la question concernant l’objectif no 6, qui porte sur la confidentialité, à savoir pourquoi elle n’avait pas cru bon d’indiquer à la fonctionnaire l’appui disponible pour atteindre cet objectif, Mme Lehouillier a répondu qu’elle lui avait dit qu’il fallait fermer la porte de son bureau quand elle discutait du rendement d’un employé et qu’il n’y avait pas de formation à cet égard.

[73]  Selon Mme Lehouillier, l’objectif du plan de travail était d’aider la fonctionnaire et d’améliorer ses compétences en gestion. À la question de savoir si signaler des problèmes constituait de l’aide, Mme Lehouillier a dit que, lorsque la fonctionnaire faisait une erreur, Mme Lehouillier le portait à son attention en donnant des exemples. Concernant les mesures du rendement, certains objectifs ne sont pas toujours mesurables. Lorsqu’il y avait un incident, elles en discutaient souvent sur le coup, sinon par écrit après l’incident. De plus, Mme Lehouillier fournissait de la rétroaction toutes les deux semaines.

[74]  Mme Lehouillier a reconnu qu’elle a tenu compte, en partie, des observations d’autres personnes, telles que Mmes Coghlan, Kovacs et Pinto. Mme Lehouillier a été renvoyée à un document préparé par Mme Pinto et dont elle a reçu copie le 1er novembre 2012 (pièce S-3). Il s’agissait de ses doléances concernant l’incident relatif au rôle de la fonctionnaire dans le cadre de la modélisation par équation structurelle et d’autres critiques à l’égard de la fonctionnaire. Mme Lehouillier a dit ne pas savoir si Mme Pinto avait déposé une plainte formelle. Elle en a discuté avec elle et elle ne voulait pas poursuivre. Mme Lehouillier n’a pas montré le document à la fonctionnaire, puisque Mme Pinto lui avait donné le document en toute confidentialité.

[75]  Par rapport au document de Mme Pinto dont elle a reçu copie le 1er novembre 2012 (pièce S-3), on a demandé à Mme Lehouillier, en réinterrogatoire, de décrire ses observations de cette employée. Elle a répondu que Mme Pinto avait un caractère bouillant.

[76]  Concernant Mme Coghlan, Mme Lehouillier a dit qu’elle était une employée exceptionnelle qui produisait vite et comprenait vite. En ce qui a trait à Mme Chatterton, elle a dit qu’elle était une excellente employée avec un bon jugement et une bonne connaissance de la matière.

[77]  Lorsqu’il a été suggéré à Mme Lehouillier, en contre-interrogatoire, que le plan de travail du 2 novembre 2012 contenait sept points qui ressemblaient aux sept points du document de Mme Pinto, dont elle a reçu copie le 1er novembre 2012, elle a dit que le plan avait été préparé d’avance. Elle a maintenu qu’elle n’avait jamais parlé à Mme Pinto ou aux autres employés du plan de travail ou du manque de jugement de la fonctionnaire.

[78]  Mme Lehouillier a été renvoyée à un courriel du 21 novembre 2012, qui lui a été envoyé par Mme Pinto, critiquant la fonctionnaire et affirmant qu’elle le faisait suivant les recommandations de Mme Lehouillier. Selon cette dernière, Mme Pinto était venue à son bureau pour lui faire part de ce qu’elle vivait quotidiennement avec la fonctionnaire et lui demander si elle pouvait le documenter. Mme Lehouillier lui a accordé la permission, puisque Mme Pinto sentait que cela la protégerait. Mme Pinto était frustrée et voulait tout mettre par écrit. Mme Lehouillier a dit : « [e]lle est comme ça ».

[79]  À la question de savoir pourquoi elle n’en avait pas informé la fonctionnaire, Mme Lehouillier a dit que Mme Pinto en avait discuté avec la fonctionnaire. Mme Pinto voulait écrire sa propre évaluation de la situation et lui a acheminé le courriel en toute confidentialité. Mme Lehouillier ne voulait pas briser cette confidentialité en informant la fonctionnaire. Elle a ajouté que le plan de travail couvrait plusieurs des points soulevés par Mme Pinto. Elle a affirmé que les employés ne savaient pas que la fonctionnaire faisait l’objet d’un plan de travail.

[80]  Concernant le courriel du 22 novembre 2012 de la fonctionnaire à Mme Lehouillier (pièce E-1, onglet 6), cette dernière a dit que la fonctionnaire n’aurait pas dû être surprise par le plan de suivi de la gestion de son rendement, puisqu’elles ont eu plusieurs rencontres informelles où Mme Lehouillier lui a donné des documents écrits et lui a rédigé des notes après les rencontres.

[81]  En ce qui a trait à sa note manuscrite sur le courriel mentionnant « 1 an suffit », en faisant référence à la période de gestion du rendement, Mme Lehouillier a dit qu’il n’y avait pas d’échéancier précis pour ce processus et que cela dépendait du cas. Selon elle, d’après une discussion avec les Relations de travail, le processus pouvait se dérouler sur un, deux ou trois ans.

[82]  Sur la version papier du courriel de la fonctionnaire, à côté de l’endroit où elle mentionne « […] j’ai atteint 9 sur 10 des objectifs fixés dans mon évaluation de rendement […] », Mme Lehouillier a inscrit la note manuscrite suivante [traduction] « [c]e n’est pas juste une question de résultat ». À cet égard, Mme Lehouillier a expliqué qu’elle faisait alors référence aux capacités et compétences de niveau EC-07 qui devaient être améliorées.

[83]  Concernant les objectifs du plan de travail, la fonctionnaire a aussi écrit ce qui suit : « [c]ertains de ces items manquent de précision et j’aimerai [sic] passer à travers pour comprendre mieux ce qu’on s’attend [sic] de moi et comment ma performance à l’égard de ces items va être évaluée ». Mme Lehouillier a répondu par la note manuscrite suivante « [p]as de problème ». À la question de savoir s’il s’agissait d’une reconnaissance que le plan de travail manquait de précision, Mme Lehouillier a répondu que non; elle reconnaissait qu’elle devait en discuter, ce qu’elle a fait pendant plusieurs heures avec la fonctionnaire.

[84]  La fonctionnaire a terminé son courriel en invitant Mme Lehouillier à une rencontre facilitée par un individu du bureau de gestion informelle des conflits. Selon les notes manuscrites de Mme Lehouillier, cette dernière a refusé. Mme Lehouillier a témoigné à l’effet que cette mesure n’était pas appropriée, puisqu’il n’y avait pas de conflit interpersonnel avec la fonctionnaire et qu’il s’agissait d’un problème de gestion du rendement.

[85]  La fonctionnaire a rédigé un document indiquant quelles étaient ses réalisations additionnelles (pièce E-1, onglet 7) aux fins de son plan de travail. Elle y a mentionné qu’un de ses employés demandait constamment des conseils de la directrice, contournant ainsi l’autorité de la fonctionnaire. Mme Lehouillier a dit qu’il s’agissait de Mme Pinto et qu’elle lui disait de s’adresser à la fonctionnaire lorsqu’elle lui demandait des conseils pour le travail. Toutefois, si un employé voulait lui parler de choses personnelles, elle ne refusait pas.

[86]  Mme Lehouillier a été renvoyée aux notes à elle-même qu’elle a rédigées le 9 novembre 2012 (pièce S-5) et qui donnent des explications pour le plan de travail. Concernant ses notes relativement à l’objectif no 1 (améliorer le jugement, compréhension) selon lesquelles la fonctionnaire ne comprenait pas correctement les explications relatives aux concepts ou autres items, Mme Lehouillier a précisé que telles avaient été ses observations et celles des membres de l’équipe. Concernant l’objectif no 3 (effectuer des tâches de gestion elle-même), Mme Lehouillier a mentionné que la fonctionnaire déléguait tout à son équipe et qu’elle avait rarement vu un item que la fonctionnaire avait produit elle-même. Mme Lehouillier a dit que, comme directrice, elle l’avait aussi constaté.

[87]  En ce qui a trait à l’objectif no 5 (livrer les éléments de travail dans les délais convenus), Mme Lehouillier a mentionné, entre autres, qu’elle avait perdu confiance. Lorsqu’on lui a mentionné qu’elle avait fait ce commentaire sept jours après la mise en place du plan de travail, Mme Lehouillier a répondu qu’il fallait tenir compte du contexte. La fonctionnaire fixait ses échéanciers elle-même et, à plusieurs reprises, ne les respectait pas. Mme Lehouillier l’avait porté à l’attention de la fonctionnaire avant même la mise en place du plan de travail. Par conséquent, elle n’avait plus confiance quand la fonctionnaire lui donnait des délais.

[88]  En réinterrogatoire, Mme Lehouillier a précisé qu’elle n’avait pas remis à la fonctionnaire de copies des notes à elle-même du 9 novembre 2012 (pièce S-5).

[89]  En contre-interrogatoire, Mme Lehouillier a été renvoyée à un courriel qu’elle a envoyé à Mme Coghlan le 31 décembre 2012, lequel résumait une discussion qu’elles avaient eue le 20 décembre 2012 concernant la fonctionnaire (pièce E-1, onglet 21). Dans ce courriel, Mme Lehouillier demandait à Mme Coghlan si le résumé était exact et l’invitait à partager d’autres exemples de ses interactions avec la fonctionnaire.

[90]  Un des exemples fourni par Mme Coghlan, et noté par Mme Lehouillier dans le courriel, concernait l’aide qu’elle avait fournie à l’équipe du cadre de responsabilisation de gestion (« management accountability framework ») pendant une heure ou 1,5 heures. Selon le résumé de l’exemple, la fonctionnaire a passé 30 minutes à expliquer à Mme Coghlan pourquoi cette dernière devrait documenter ce qu’elle avait fait, même si Mme Coghlan lui disait qu’il ne s’agissait pas d’un travail d’importance. Le résumé comprend la remarque suivante : « [c]’est un manque de jugement de la part de Shirley […] » Mme Lehouillier a témoigné à l’effet que le commentaire était de Mme Coghlan, mais qu’elle était d’accord, parce que les demandes de la fonctionnaire n’avaient pas de sens. Mme Lehouillier ne se souvenait pas si elle avait partagé cet exemple avec la fonctionnaire.

[91]  À la question de savoir s’il n’était pas humiliant pour la fonctionnaire d’apprendre que Mme Lehouillier avait dit à Mme Coghlan que les membres de l’équipe savaient que la fonctionnaire ne comprenait pas grand-chose, Mme Lehouillier a répondu que la fonctionnaire n’en avait pas été informée.

[92]  Mme Lehouillier a été renvoyée à un échange de courriels entre elle et Mme Coghlan, en date du 28 mars 2013 (pièce S-6). Le premier courriel, de Mme Coghlan, envoyé à 14 h 26, mentionne : « [v]eux-tu encore des exemples »? La réponse de Mme Lehouillier, à 14 h 30, consistait en un seul mot, en lettres majuscules: « OUI! ». À 14 h 37, Mme Coghlan a fait parvenir à Mme Lehouillier un courriel que la fonctionnaire lui avait adressé le même jour, à 13 h 30, ayant trait à une comparaison du nombre de questions dans les sondages auprès des fonctionnaires fédéraux de 2011 et de 2014. Ce courriel a débuté avec la demande de Mme Coghlan que l’information soit gardée de façon confidentielle par Mme Lehouillier. Après avoir critiqué le travail de la fonctionnaire, Mme Coghlan a ajouté que, à son avis, on ne pouvait pas se fier au travail de la fonctionnaire. À la question de savoir si elle en avait discuté avec la fonctionnaire, Mme Lehouillier a dit qu’elle ne s’en souvenait pas.

[93]  Mme Lehouillier a été renvoyée à un échange de courriels entre elle et Mme Coghlan, en date du 5 juin 2013 (pièce E-17), alors que Mme Lehouillier avait déjà quitté l’employeur pour assumer d’autres fonctions; Mme Kovacs l’avait remplacée comme directrice par intérim et supérieure immédiate de la fonctionnaire. Mme Lehouillier a dit que Mme Coghlan et une autre employée l’avaient contactée, parce qu’elles n’étaient pas d’accord avec leurs rapports de gestion du rendement et d’apprentissage respectifs préparés par la fonctionnaire. Dans un courriel à Mme Coghlan, Mme Lehouillier a dit que la fonctionnaire manquait de jugement dans les termes suivants : « OMG! Elle ne comprend [sic] pas. Je le sais, elle m’a blamé [sic] aussi pour le SEM et c’est carrément SON manque de jugement! » À la question de savoir si le fait de dire une telle chose à une employée qui se rapportait à la fonctionnaire ne constituait pas également un manque de jugement, elle a répondu qu’elle avait aussi vécu cela.

[94]  Par courriel du 9 janvier 2013, Mme Lehouillier a demandé à Mme Kovacs sa rétroaction concernant la fonctionnaire. Mme Kovacs a répondu le 14 janvier 2013, à 16 h 55, que la fonctionnaire ne semblait pas maîtriser le travail dont elle était responsable et qu’elle avait fait preuve de comportements préoccupants; à 17 h 08, Mme Lehouillier a transmis son courriel à Mme Guilhem (pièce E-1, onglet 11). À la question de savoir si, dans les 13 minutes entre la réception du courriel de Mme Kovacs et le renvoi à Mme Guilhem, elle en avait discuté avec la fonctionnaire, Mme Lehouillier a répondu que non et qu’il s’agissait d’une bonne pratique de gestion de demander de la rétroaction aux clients.

[95]  À la question de savoir s’il aurait été raisonnable de rencontrer une employée qui faisait l’objet d’une plainte avant de conclure qu’elle manquait de jugement, Mme Lehouillier a répondu qu’elle avait déjà discuté avec la fonctionnaire de son manque de jugement et que c’était Mme Kovacs qui avait porté l’exemple à son attention.

[96]  Mme Lehouillier a été renvoyée aux rapports de gestion du rendement et d’apprentissage de la fonctionnaire pour 2012-2013, que cette dernière n’avait pas signée (pièce E-1, onglet 16 et pièce S‑8). La cote globale du rapport de gestion du rendement et d’apprentissage était « Non atteint » (pièce E-1, onglet 16) et celle du second était « Réussi - » (pièce S‑8). Mme Lehouillier ne se souvenait pas d’avoir signé le second rapport de gestion du rendement et d’apprentissage. On lui a alors présenté une version signée par elle, le 19 avril 2013, dont la cote était « Réussi - » (pièce S-8). Mme Lehouillier a été renvoyée à certaines différences entre la version signée (pièce S-8) et la version non signée (pièce E-1, onglet 17). Par exemple, dans la partie « évaluation narrative » pour la période du 1er octobre 2012 au 31 mars 2013, la version non signée indique que la fonctionnaire a atteint un des objectifs de son plan de travail, tandis que, dans la version signée, il est inscrit qu’elle a atteint quatre objectifs. Mme Lehouillier a répondu qu’elle se fiait à ce qu’elle avait écrit.

[97]  En réinterrogatoire, on a demandé à Mme Lehouillier d’expliquer les différences entre les rapports de gestion du rendement et d’apprentissage non signés (pièce E-1, onglets 16 et 17) et le rapport de gestion du rendement et d’apprentissage signé par elle (pièce S-8). Elle a dit qu’après avoir remis le rapport initial à la fonctionnaire, elles en ont discuté et Mme Lehouillier a fait des ajustements. Mme Lehouillier a dit qu’entre le rapport non signé (pièce E-1, onglet 17) et le rapport final (pièce S-8), elle n’a pas eu de discussions avec la fonctionnaire.

[98]  On a porté à l’attention de Mme Lehouillier que la pièce S-8 indiquait qu’il y avait eu une note autocollante sur le document avec la mention [traduction] « [d]ernière entente de gestion du rendement remise à Shirley le 19 avril 2013 ». Mme Lehouillier ne semblait pas certaine s’il s’agissait de la pièce S-8 ou de l’onglet 17 de la pièce E-1. Dans un courriel à Mme Guilhem, le 19 avril 2013 (pièce E-1, onglet 16), à la suite d’une réunion avec la fonctionnaire, Mme Lehouillier a dit que la fonctionnaire lui avait demandé de réviser quelques phrases de son rapport de gestion du rendement et d’apprentissage.

[99]  En contre-interrogatoire, concernant le courriel du 8 mars 2013, qu’elle a envoyé à Mme Guilhem à la suite d’une rencontre avec la fonctionnaire et dans lequel elle a dit que la fonctionnaire croyait que les employés lui parlaient dans le dos, Mme Lehouillier a affirmé qu’elle lui avait dit qu’elle ne pouvait pas empêcher les employés de venir la voir.

[100]  Mme Lehouillier a été renvoyée au courriel du 4 avril 2013, adressé à Mme Guilhem, et qui résumait la rencontre avec la fonctionnaire qui a eu lieu le même jour (pièce E-1, onglet 16). Mme Lehouillier mentionne dans ce courriel que la fonctionnaire lui a dit qu’elle l’avait humiliée dans le cadre de l’incident de la modélisation par équation structurelle avec Statistique Canada. À la question de savoir pourquoi elle a réagi en faisant le commentaire suivant : [traduction] « [j]e l’ai humiliée???!!! », Mme Lehouillier a dit qu’elle ne comprenait pas pourquoi la fonctionnaire avait dit cela et qu’il s’agissait d’un autre exemple qu’elle ne comprenait pas.

[101]  Quant au courriel de la fonctionnaire à Mme Lehouillier, en date du 10 avril 2013 (pièce E-1, onglet 15), dans lequel elle allègue que Mme Lehouillier minait son autorité et sa crédibilité en donnant des instructions directement aux employés, Mme Lehouillier a répondu qu’elle redirigeait les employés à la fonctionnaire, mais que ceux-ci revenaient la voir, parce que la fonctionnaire n’avait pas la compréhension et le jugement d’une gestionnaire.

[102]  Quant à l’allégation de la fonctionnaire que Mme Lehouillier incitait les employés à venir la voir, Mme Lehouillier a ajouté qu’elle ne pouvait pas fermer sa porte et que les employés qui se rapportaient à la fonctionnaire avaient besoin de parler à quelqu’un en qui ils avaient confiance. En ce qui concerne Mme Coghlan, Mme Lehouillier a dit qu’elle avait un très bon rendement. Elle a ajouté qu’il était démotivant de travailler pour quelqu’un qui ne comprend pas.

[103]  Dans l’item 3 du courriel, la fonctionnaire a allégué que le plan de travail reposait sur des jugements de valeur plutôt que sur des critères de rendement concrets. Lorsqu’on lui a demandé de définir l’expression « jugements de valeur », Mme Lehouillier a répondu qu’il s’agissait du jugement qu’on exerce tous les jours au travail et a ajouté que la fonctionnaire devait améliorer ses compétences clés de gestion.

[104]  Mme Lehouillier a été renvoyée au courriel qu’elle a envoyé le 16 avril 2013 à Mme Guilhem (pièce E-1, onglet 16), à la suite de sa rencontre du même jour avec la fonctionnaire. Dans ce courriel, elle a écrit que la fonctionnaire lui avait dit qu’elle se sentait harcelée en raison du plan de travail et que le processus avait nui à son bien-être. À la question de savoir si elle avait remarqué que le processus avait nui au bien-être de la fonctionnaire, Mme Lehouillier a répondu qu’elle était inquiète de sa santé, parce que la fonctionnaire avait dit qu’elle « courait après le train ». Mme Lehouillier a dit qu’elle en avait parlé avec la fonctionnaire.

[105]  Mme Lehouillier a été renvoyée à un courriel qu’elle a envoyé à Mme Guilhem le 11 avril 2013 (pièce S-9), dans lequel elle lui fait part des conversations qu’elle a eues avec Mme Coghlan les 10 et 11 avril 2013. Mme Lehouillier a expliqué que Mme Coghlan était venue la voir pour lui dire que, vu le départ de Mme Lehouillier du Bureau du dirigeant principal des ressources humaines pour de nouvelles fonctions, elle avait l’impression qu’elle n’aurait pas d’appui de la fonctionnaire. À la question de savoir si la fonctionnaire avait eu l’appui de sa gestionnaire, soit Mme Lehouillier, cette dernière a répondu qu’elle lui avait donné tout ce qu’elle pouvait et qu’elle ne pouvait en faire plus. Elle a ajouté qu’elle avait même allégé la charge de travail de la fonctionnaire.

[106]  Dans un courriel du 18 juin 2013 à Mme Guilhem (pièce S-11), Mme Lehouillier a mentionné une rencontre avec la fonctionnaire dans un ascenseur. Lors de cette rencontre, elle a remarqué que la fonctionnaire avait l’air triste et fatiguée. À la question de savoir si, vu cette observation, elle avait des regrets, Mme Lehouillier a répondu que non et qu’elle lui avait dit de penser à elle. Mme Lehouillier a dit qu’elle avait eu de bonnes références concernant la fonctionnaire, mais qu’elle n’était peut-être pas la « bonne personne » pour le poste. À la question de savoir si elle regrettait avoir envoyé à la fonctionnaire un courriel disant qu’elle manquait de jugement, Mme Lehouillier a répondu que non, puisqu’elle lui en avait parlé. À la question de savoir ce qu’elle ferait aujourd’hui si elle recevait une plainte qui consistait en du ouï-dire, Mme Lehouillier a répondu qu’elle parlerait aux employés concernés.

2.  Mme Kovacs

[107]  Mme Kovacs occupait un poste d’analyste, classifié au groupe et au niveau EC‑07, et de gestionnaire au sein de l’équipe des sondages auprès des fonctionnaires fédéraux. Du 22 avril au 10 juin 2013, elle a été directrice par intérim, soit le poste qu’occupait auparavant Mme Lehouillier. Elle était la superviseure de la fonctionnaire pendant cette période.

[108]  En décrivant le rendement de la fonctionnaire, Mme Kovacs a indiqué que cette dernière avait de la difficulté à exécuter ses fonctions en tant que gestionnaire du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux, notamment en ce qui concerne les communications opportunes avec ses collègues, l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux et Mme Kovacs. Elle a également déclaré que la fonctionnaire avait une incapacité à résumer l’information et à l’utiliser en vue de planifier les prochaines étapes, et à mettre en œuvre des mesures de suivi concrètes ou à les communiquer à son équipe pour qu’elle y donne suite. Elle a ajouté que la fonctionnaire avait également une relation conflictuelle avec plusieurs membres de son équipe.

[109]  Mme Kovacs a fourni plusieurs exemples. En ce qui concerne la communication, à plusieurs reprises, la fonctionnaire a pris beaucoup de temps à répondre à des demandes urgentes. Lorsqu’elle en a discuté avec la fonctionnaire, celle-ci a indiqué qu’elle n’était pas en mesure de répondre, parce que la boîte de réception de son courrier électronique était pleine. Mme Kovacs a ensuite partagé avec la fonctionnaire des pratiques sur la façon de garder sa boîte de réception propre. La fonctionnaire était incapable de gérer la correspondance clé. Mme Kovacs a donné comme exemple un appel qu’elle avait reçu d’un représentant de Statistique Canada, un partenaire important, qui attendait un courriel de la fonctionnaire.

[110]  En ce qui concerne les relations de la fonctionnaire avec les membres de son équipe, Mme Kovacs a déclaré avoir été informée d’une certaine dysfonction au sein de l’équipe peu de temps après qu’elle ait assumé les fonctions de directrice par intérim. Les membres de l’équipe estimaient que la fonctionnaire n’était pas une gestionnaire dynamique et qu’elle n’était pas accessible en temps opportun pour discuter du travail. Ils estimaient que ces conditions avaient une incidence sur leur travail, notamment en ce qui concerne un projet très visible.

[111]  Pour ce qui est de la capacité de la fonctionnaire à comprendre l’information et à la transformer en plan d’action, Mme Kovacs a mentionné une réunion à laquelle elles avaient assisté avec un directeur général des Services des ressources humaines du Secrétariat du Conseil du Trésor, qui était chargé des relations avec les intervenants des services des ressources humaines au sein du gouvernement. La réunion avait pour but d’obtenir des conseils sur la façon de demander une rétroaction à ce groupe. L’étape suivante consistait à élaborer un plan visant à obtenir la rétroaction de ce groupe selon un échéancier et constituait un mini-projet dans le cadre du projet du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux, qui était de plus grande envergure.

[112]  À la suite de cette réunion, la fonctionnaire a posé de nombreuses questions sur la façon d’assurer un suivi de l’information et de traduire cette information en un plan qui pourrait être respecté. Mme Kovacs a expliqué à maintes reprises ce qui avait été dit lors de la réunion avec le directeur général et a utilisé un tableau blanc pour illustrer à quoi un tel plan pourrait ressembler. La fonctionnaire est demeurée confuse quant à ce qui était requis. Au cours de nombreuses discussions tenues pendant plusieurs jours, Mme Kovacs a essayé de nombreuses approches pour expliquer l’information obtenue et la placer dans différents contextes afin de permettre à la fonctionnaire d’assurer un suivi. Elles s’étaient engagées envers leurs collègues du Secrétariat du Conseil du Trésor à fournir un plan pour les étapes suivantes et elles n’ont pas respecté le délai prévu. Lorsque la fonctionnaire a fourni une première ébauche, celle-ci était inadéquate et a donné lieu à davantage de conversations et de mesures de suivi, ainsi qu’à une réécriture. Selon Mme Kovacs, il s’agissait d’une tâche qui, exécutée par un EC‑07, n’aurait pas dû nécessiter un temps excessif.

[113]   On a ensuite demandé à Mme Kovacs de formuler des commentaires sur l’équipe de la fonctionnaire. Mme Kovacs a décrit l’équipe comme étant difficile. Elle a ajouté qu’une équipe avec une telle configuration avait besoin d’un gestionnaire organisé et disponible, qui comprend les paramètres du projet et qui est capable de prendre position, de prévoir les prochaines étapes et d’assurer un suivi clair et uniforme. Elle a déclaré qu’un tel niveau de soutien n’était pas offert à l’équipe.

[114]  Mme Kovacs a ensuite abordé les outils fournis à la fonctionnaire pour améliorer son rendement. Avant d’occuper le poste de directrice par intérim, elle a rencontré Mme Lehouillier, qui lui a transmis les renseignements nécessaires pour l’appuyer dans les principaux dossiers du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux et du cadre de responsabilisation de gestion, et pour lui mentionner le contexte entourant le plan de suivi de la gestion du rendement de la fonctionnaire et les documents connexes. De la documentation concernant la gestion de personnes difficiles a été fournie à la fonctionnaire, dont une version pendant que Mme Lehouillier était la directrice et une autre, alors que Mme Kovacs était la directrice par intérim. L’employé assujetti à un plan de suivi de la gestion du rendement a été placé sous la supervision d’une employée EC‑06. Par conséquent, l’employée EC‑06 a acquis de l’expérience en supervision, puisqu’elle était responsable d’offrir un soutien à l’employé en question et d’exécuter le plan de suivi de la gestion du rendement à son égard, accordant ainsi à la fonctionnaire plus de temps pour travailler sur ses projets et respecter les délais. En même temps, la fonctionnaire était dégagée de la responsabilité de travailler avec une personne assujettie à un plan de suivi de la gestion du rendement, ce qui nécessite beaucoup de temps. En outre, lorsque la fonctionnaire a communiqué avec Mme Kovacs pour obtenir des conseils sur les problèmes de gestion, Mme Kovacs s’est assurée d’être disponible après les heures de travail, y compris après 17 h, 18 h ou 19 h.

[115]  Le 22 avril 2013, son premier jour en tant que directrice par intérim, Mme Kovacs a rencontré la fonctionnaire. Elle l’a informé qu’elle continuerait d’exécuter le plan de travail afin de l’appuyer. Elle souhaitait donner à la fonctionnaire l’occasion de poser des questions et l’aider à gérer les attentes concernant ce qu’elle pouvait faire pour l’aider à améliorer son rendement. Au cours de cette conversation, la fonctionnaire a mentionné trois points importants : premièrement, elle a dit qu’elle avait rencontré son coach récemment; deuxièmement, elle a demandé une semaine de vacances en raison de la fatigue, ce qui lui a été accordé; troisièmement, elle souhaitait démissionner de son poste de gestionnaire du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux afin de chercher d’autres possibilités. Mme Kovacs a informé la fonctionnaire qu’elle ferait de son mieux pour la soutenir en ce qui concerne le troisième point. Mme Kovacs a indiqué qu’elles n’avaient pas discuté des raisons pour lesquelles la fonctionnaire souhaitait démissionner de son poste. Elle souhaitait explorer d’autres possibilités d’emploi. Elle était parvenue à cette réalisation après avoir rencontré son coach.

[116]  Le 23 avril 2013, la fonctionnaire a demandé à rencontrer Mme Kovacs. Elle l’a alors informée qu’après y avoir réfléchi, elle continuerait d’occuper le poste de gestionnaire du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux. Mme Kovacs a indiqué qu’elle l’appuierait dans l’exercice de ses fonctions en tant que gestionnaire. La fonctionnaire a demandé un congé de six jours, soit du 26 avril au 3 mai 2013, inclusivement, et a suggéré que Mme Kovacs lui envoie directement tout courriel lié au travail durant son absence. Mme Kovacs lui a dit qu’elles pourraient élaborer un protocole qui fonctionnerait mieux pour l’équipe et le projet, et la fonctionnaire en a convenu.

[117]  Le matin du 24 avril 2013, la fonctionnaire a informé Mme Kovacs qu’elle préférait ne pas prendre congé, puisqu’il y avait trop de travail à accomplir. Mme Kovacs a répondu qu’elles en discuteraient pendant leur réunion de l’après‑midi. Au cours de cette réunion, la fonctionnaire a indiqué qu’elle souhaitait prendre un congé de quatre ou cinq jours. Mme Kovacs lui a demandé si elle signerait son rapport de gestion du rendement et d’apprentissage et la fonctionnaire a répondu qu’elle la tiendrait informée dès son retour au travail. Mme Kovacs a consigné ses discussions du 22 au 24 avril 2013 avec la fonctionnaire dans une note au dossier le 24 avril 2013, dont une copie a été envoyée à Mme Guilhem (pièce E‑1, onglet 23).

[118]  Mme Kovacs a ensuite abordé le plan de travail de la fonctionnaire pour la période du 22 avril au 14 mai 2013 (pièce E‑1, onglet 23), qu’elle avait préparé et dont une copie a été fournie à la fonctionnaire. Elle a déclaré qu’elle avait tenté à maintes reprises de discuter de chacun des éléments du plan de travail avec la fonctionnaire afin de l’appuyer dans l’exercice de ses fonctions en tant que gestionnaire EC‑07. Mme Kovacs a prévu des réunions avec la fonctionnaire pour discuter de son plan de travail, mais cette dernière n’a jamais assisté à une réunion en vue de discuter des détails de chaque objectif ou de la façon de travailler différemment pour améliorer son rendement.

[119]  À titre d’observation générale relative au plan de travail de la fonctionnaire, Mme Kovacs a indiqué que les longues heures de travail de la fonctionnaire constituaient un cercle vicieux, entrainant ainsi la fatigue. Ses longues heures étaient requises en raison de son incapacité à travailler à un rythme plus soutenu, d’examiner la correspondance et de fournir des réponses rapides aux courriels. Afin d’être à jour dans son travail, la fonctionnaire n’était souvent pas disponible pour son équipe, ce qui a fait l’objet de plaintes de la part de plus d’un membre de l’équipe.

[120]  En ce qui concerne le premier objectif (améliorer le jugement et la compréhension), un exemple a été fourni concernant une note d’information à l’intention du président du Conseil du Trésor, dont le but était d’obtenir l’autorisation d’exécuter le sondage de 2014 auprès des fonctionnaires fédéraux. La fonctionnaire était d’avis que l’intitulé de la note d’information devait demeurer [traduction] « à titre d’information » au lieu de [traduction] « pour approbation ». Le directeur général a constaté l’erreur en fin de journée et l’a retournée à Mme Kovacs. Ce retour exigeait une mise à jour et de multiples copies aux fins de signature. Selon Mme Kovacs, il s’agissait d’un exemple du manque de compréhension de la nature des documents d’information.

[121]  L’exemple fourni au deuxième objectif (devenir agile et comprendre plus rapidement les éléments en lien avec le travail) a été mentionné antérieurement dans la présente décision, lorsqu’il a été question de la réunion avec un directeur général des Services des ressources humaines du Secrétariat du Conseil du Trésor.

[122]  Selon le troisième objectif du plan de travail, la fonctionnaire devait exécuter elle‑même les tâches de gestion. Au cours de la période d’établissement de rapports sur le plan de suivi de la gestion du rendement et après cette période, Mme Kovacs a signalé que, lorsqu’une décision exigeait un suivi d’un membre de la gestion ou que le gestionnaire fasse preuve de leadership, la fonctionnaire n’agissait pas comme tel.

[123]  Mme Kovacs a donné l’exemple suivant, qui n’a pas été mentionné dans le plan de travail pour la période du 22 avril au 14 mai 2013. Lors de son premier jour de retour au travail à la suite de ses vacances en mai, Mme Kovacs a appris que l’équipe avait prévu une séance d’information avec les intervenants dans l’après‑midi et qu’elle devait en être la modératrice. Elle a rencontré l’équipe ce matin‑là pour discuter d’une approche en vue de travailler avec le groupe d’intervenants et a indiqué clairement qu’elle s’en remettrait à la fonctionnaire en tant qu’experte en la matière aux fins du projet. Au cours de la réunion, Mme Kovacs a fait un discours d’ouverture et a répondu aux questions. Si elle ne connaissait pas une réponse, elle s’en remettait à la fonctionnaire. Au lieu d’y répondre elle‑même, la fonctionnaire s’en est remise à un de ses collègues. Mme Kovacs a déclaré que la direction d’une séance d’information est habituellement une tâche qui est exécutée par un gestionnaire de projet. En l’espèce, le directeur général a demandé à Mme Kovacs de diriger la séance afin d’obtenir les résultats voulus. La fonctionnaire semblait soulagée que Mme Kovacs en assume la direction.

[124]  En ce qui concerne le quatrième objectif (améliorer son style et son approche de gestion), Mme Kovacs a déclaré que la réponse de la fonctionnaire [traduction] « vous êtes la patronne » ne constituait pas une manière constructive de faire part d’une insatisfaction concernant une décision. Elle a décrit leur relation de travail comme étant difficile, compte tenu de la réticence de la fonctionnaire à entendre un message.

[125]  Le cinquième objectif (améliorer les séances d’information officieuses) s’est avéré très difficile pour la fonctionnaire, puisque des séances d’information verbales étaient souvent requises. À maintes reprises, lorsque Mme Kovacs lui demandait des mises à jour verbales, la fonctionnaire lui répondait qu’elle lui acheminerait une mise à jour écrite plus tard dans la journée. Cela s’est produit suffisamment souvent pour ressembler à une tendance. Les mises à jour verbales de la fonctionnaire n’étaient pas fournies de manière opportune ou régulière.

[126]  Le sixième objectif (garder les items reliés au personnel de manière confidentielle) a été atteint.

[127]  En ce qui concerne le septième objectif (appuyer et orienter les employés), Mme Kovacs a suggéré à la fonctionnaire de réserver une période de disponibilité pour les employés et, ainsi, rassurer le personnel et aider à la planification de sa propre charge de travail. La fonctionnaire a répondu qu’elle allait y réfléchir. La fonctionnaire ne s’est pas rendue disponible, parce qu’elle devait se tenir à jour quant à l’exécution de son travail et non pour éviter son équipe. Il s’agissait d’un mécanisme d’adaptation, mais il a eu une incidence négative sur l’équipe et sur l’appui qu’elle estimait pouvoir recevoir de la part de la gestionnaire.

[128]  Mme Kovacs a rencontré la fonctionnaire à la fois officieusement et quotidiennement au sujet des problèmes de travail. Des réunions bilatérales toutes les semaines ou toutes les deux semaines ont été tenues. Ces réunions avaient pour but de discuter des problèmes liés aux dossiers et des prochaines étapes, de clarifier les questions dont elle devait assurer le suivi et de déterminer les priorités. Elles discutaient également de questions liées à l’équipe. Il s’agissait d’une occasion de fournir à la fonctionnaire un appui concernant son rendement.

[129]  Lorsqu’elle a été interrogée au sujet de ses interactions avec la fonctionnaire avant de devenir directrice par intérim, Mme Kovacs a dit qu’elle travaillait dans une autre division de la même direction à titre de gestionnaire, Équipe de l’assurance de la qualité des données et de la gestion de l’information des personnes, qui traitait des renseignements démographiques concernant l’effectif de la fonction publique. Mme Kovacs a déclaré que le tableau de bord de gestion de la fonction publique était un système qui, entre autres, contenait des renseignements historiques sur les résultats antérieurs du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux. Les fonctions de Mme Kovacs comprenaient alors la prise en charge du tableau de bord.

[130]  Mme Kovacs et ses collègues ont travaillé avec la fonctionnaire et son équipe pour mettre à jour l’information dans la composante du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux du tableau de bord, notamment la façon dont les renseignements historiques étaient affichés et afin de fournir des renseignements statistiques supplémentaires. Elle a demandé à la fonctionnaire que les membres de son équipe l’appuient dans le cadre de la mise à l’essai de l’élément du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux du tableau de bord, puisqu’ils étaient les experts en la matière. La fonctionnaire était d’accord. Mme Kovacs a informé la fonctionnaire que des scripts de test seraient fournis à son équipe.

[131]  L’échéancier a été annoncé publiquement à la communauté desservie par le Bureau du dirigeant principal des ressources humaines. La fonctionnaire et son équipe ont reçu tous les outils nécessaires pour réaliser l’essai, qui s’est tenu sur quelques jours. L’équipe de Mme Kovacs exécutait également des essais. À la fin de la période d’essai, l’un des collègues de Mme Kovacs a indiqué que la fonctionnaire avait déclaré que le système était inexact. Un suivi a été fait avec les Services de la technologie de l’information et, après une conversation approfondie avec la fonctionnaire, on a appris qu’elle travaillait dans un environnement de production au lieu d’un environnement d’essai. Des questions ont alors été soulevées à savoir pourquoi elle ne pouvait pas distinguer les deux environnements. Dans un suivi avec la fonctionnaire, cette dernière a indiqué qu’elle n’avait pas reçu suffisamment de renseignements ou de conseils appropriés. Mme Kovacs a exprimé sa consternation et la frustration des membres de son équipe vis-à-vis de la fonctionnaire. À titre de gestionnaire chargée du projet, Mme Kovacs a dû renégocier du temps d’essai additionnel avec les Services de la technologie de l’information afin de régler le problème rapidement. Elle a indiqué qu’il s’agissait d’une expérience qu’elle n’avait jamais vécue avec d’autres équipes dans la prise en charge du tableau de bord.

[132]  En ce qui concerne le courriel qu’elle a envoyé à Mme Lehouillier le 14 janvier 2013 (pièce E‑1, onglet 11), Mme Kovacs a indiqué qu’il s’agissait d’une réponse à la demande de rétroaction de Mme Lehouillier sur les expériences de Mme Kovacs avec les gestionnaires membres de l’équipe de Mme Lehouillier, puisqu’ils avaient des dossiers d’intérêt et collaboreraient à l’avenir. Les commentaires de Mme Kovacs concernaient ses rapports avec la fonctionnaire, en tant que pair EC‑07 dans la même direction. Mme Kovacs a témoigné à l’effet qu’il était important que la fonctionnaire sache où acheminer les demandes et comment mobiliser les bonnes personnes au bon moment pendant les réunions. Pour ce qui est du suivi relatif à la mesure à prendre, Mme Kovacs avait vécu la même expérience que Mme Lehouillier, soit que, tel qu’indiqué dans son courriel, la fonctionnaire ne semblait pas comprendre facilement le suivi relatif à la mesure à prendre.

[133]  Le courriel de Mme Kovacs renvoyait à des commentaires inappropriés de la fonctionnaire au sujet du cycle menstruel d’une collègue. La fonctionnaire a dit à Mme Kovacs que la collègue était agitée, instable et sensible et qu’elle lui avait demandé si son comportement était attribuable à son cycle menstruel. Mme Kovacs a indiqué qu’elle était alors une collègue de la fonctionnaire et qu’elle n’était pas en mesure de faire quoi que ce soit, sauf être consternée.

[134]  Mme Kovacs a ensuite abordé les options examinées par l’employeur à l’égard de la fonctionnaire. En mai 2013, elle a rencontré la fonctionnaire pour l’informer qu’une affectation avait été négociée afin qu’elle occupe un poste AS‑06 au sein de l’équipe des langues officielles, Secteur de la gouvernance, de la planification et des politiques, Bureau du dirigeant principal des ressources humaines, Conseil du Trésor, où elle n’aurait aucune responsabilité de supervision ou de gestion, et qu’elle bénéficierait d’une protection salariale au groupe et au niveau EC‑07 jusqu’en mars 2014. De plus, la fonctionnaire ne serait pas assujettie à un plan de travail ou à un plan de gestion du rendement, à moins que son nouveau gestionnaire n’estime qu’un tel plan soit nécessaire. Ce poste lui aurait donné l’occasion de travailler dans une autre capacité sans exercer un rôle de supervision et de démontrer qu’elle pouvait prendre en charge avec succès des dossiers ministériels clés. Lors de leur conversation initiale, la fonctionnaire n’était pas ouverte à l’idée de changer de groupe et de niveau professionnel, même si elle bénéficiait d’une protection salariale. Elle a demandé à Mme Kovacs de lui présenter d’autres options. Mme Kovacs a fait de son mieux pour convaincre la fonctionnaire d’accepter cette affectation, puisqu’elle lui donnerait d’autres occasions d’occuper un poste en tant qu’EC‑07 dans la fonction publique.

[135]  La deuxième option présentée à la fonctionnaire était un poste EC‑07 dans une autre partie du Bureau du dirigeant principal des ressources humaines et la poursuite de la gestion de son rendement. Le poste ne comprenait aucune responsabilité de gestion ou de supervision, mais la fonctionnaire aurait quand même été assujettie à un plan de travail. La fonctionnaire a accepté l’offre d’affectation, qui était du 10 juin au 10 décembre 2013. Mme Nassrallah et Mme Kovacs se sont toutes deux engagées à soutenir la fonctionnaire dans sa recherche d’emploi. Même si la fonctionnaire ne relevait plus d’elle, lorsque Mme Kovacs voyait des annonces de possibilités d’emploi, elle envoyait un courriel à la fonctionnaire avec un lien vers l’affectation afin de l’encourager dans sa recherche d’emploi.

[136]  Vers la fin du mois de juin 2013, lorsque les rapports de gestion du rendement et d’apprentissage pour 2012‑2013 préparés par la fonctionnaire ont été distribués, trois des membres de l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux ont contesté leur rapport. Une des employés a demandé une réunion pour discuter de son rapport, ce qui a donné lieu à une conversation difficile. Cette employée a soutenu que l’employeur ne devrait pas permettre à la fonctionnaire, qu’elle considérait être une gestionnaire incompétente, d’évaluer son travail et elle a contesté certaines des allégations figurant dans son rapport. Au cours de la réunion, à laquelle la fonctionnaire a assisté à la demande de l’employée, l’employée était perturbée et émotive au sujet de son rapport. À la suite de cette réunion, l’employée a fondu en larmes dans le bureau de Mme Kovacs et a demandé que son rendement soit réévalué. Mme Kovacs a ensuite rencontré la fonctionnaire, qui a également fondu en larmes, puisqu’elle éprouvait des difficultés à travailler dans sa nouvelle affectation. Il a alors été convenu que les rapports de gestion du rendement et d’apprentissage des trois des membres de l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux seraient révisés par Mme Lehouillier.

[137]  Mme Kovacs a fait référence à un échange de courriels entre elle et la fonctionnaire entre le 22 mai et le 14 juin 2013 (pièce E‑3). La fonctionnaire a fait part de problèmes relatifs au processus lié au plan de travail. Elle estimait que les objectifs n’étaient pas clairs, que les commentaires de Mme Kovacs n’étaient pas fondés sur son observation directe de la fonctionnaire et que le processus lié au plan de travail n’était pas conforme à l’éthique. Dans son courriel du 22 mai 2013, la fonctionnaire a demandé que le recours au processus lié au plan de travail pour régler des problèmes soit réexaminé. Le 10 juin 2013, Mme Kovacs a répondu qu’en tant que directrice par intérim, elle était tenue de continuer d’appliquer le plan de travail.

[138]  En contre‑interrogatoire, on a souligné à Mme Kovacs que, dans sa note de service au dossier sur sa discussion du 22 avril 2013 avec la fonctionnaire (pièce E‑1, onglet 23), elle a déclaré que la fonctionnaire lui avait indiqué qu’elle souhaitait démissionner de son poste de gestionnaire, Sondage auprès des fonctionnaires fédéraux. La fonctionnaire, pour sa part, a déclaré dans son courriel du 22 mai 2013 (pièce E‑3), que Mme Kovacs avait indiqué qu’elle ne pouvait plus continuer d’occuper son poste et qu’elle lui avait proposé d’occuper un poste AS‑06. À la question de savoir pourquoi Mme Kovacs n’a pas répondu, le 10 juin 2013, à l’allégation de la fonctionnaire, Mme Kovacs a indiqué que, lorsqu’elle a reçu le courriel de la fonctionnaire, elle a consulté les Relations de travail afin de s’assurer que la réponse était conforme aux politiques et pour savoir si elle devait répondre catégoriquement à chaque paragraphe. Elle a été informée qu’elle n’était pas tenue de répondre aux commentaires de la fonctionnaire, car il s’agissait d’opinions. Elle a indiqué qu’elle n’avait pas rédigé le courriel, mais qu’il indiquait sa position.

[139]  À la question de savoir pourquoi elle avait dit à la fonctionnaire dans son courriel du 10 juin 2013 (pièce E-3) que le plan de suivi de la gestion du rendement se poursuivrait pendant son affectation, Mme Kovacs a déclaré que, même si la fonctionnaire relevait de son autorité, elle contestait son autorité à exécuter le plan, remettait en question la légitimité du programme et affirmait qu’elles n’avaient travaillé ensemble que pendant huit jours ouvrables en raison de leurs congés respectifs. Mme Kovacs a affirmé qu’il y avait d’autres jours pour observer directement la capacité de la fonctionnaire de s’acquitter de ses responsabilités. À la question de savoir si elle était au courant de la clause 37 de la convention collective qui prévoit une période de six mois pour le rapport de gestion du rendement et d’apprentissage, Mme Kovacs a indiqué qu’elle ne l’était pas, mais qu’elle était au courant de sa responsabilité à gérer le rendement.

[140]  Dans un courriel en date du 6 mai 2013, à l’intention de Mme Guilhem (pièce S‑12), Mme Kovacs a demandé des conseils au sujet du poste AS‑06 qui serait proposé à la fonctionnaire, qui revenait au travail le lendemain. À la question de savoir si elle prévoyait une discussion difficile avec la fonctionnaire, Mme Kovacs a répondu que le but n’était pas un encadrement sur les conversations difficiles, qu’elle avait été gestionnaire depuis de nombreuses années et qu’elle avait déjà eu des discussions difficiles. Elle demandait conseil quant aux paramètres de la réunion et anticipait les questions que la fonctionnaire pourrait lui poser. Elle a déclaré qu’elle était bien préparée et informée pour la réunion et qu’elle était en mesure d’avoir une réunion productive si on concluait qu’elle la dirigerait.

[141]  À la question de savoir pourquoi son courriel du 14 mai 2013, à l’intention de Mme Guilhem, résumant sa discussion de la même journée avec la fonctionnaire (pièce S‑14) indiquait que la fonctionnaire n’avait bénéficié que d’une seule journée pour réfléchir à l’offre du poste AS‑06, Mme Kovacs a répondu qu’un autre candidat était envisagé pour le poste et que la direction souhaitait le doter rapidement. Selon les paramètres de l’affectation, la fonctionnaire relèverait d’un AS‑07, bénéficierait d’une protection salariale pendant la durée de l’affectation, n’aurait aucune responsabilité de supervision et ne serait assujettie à aucun plan de suivi de la gestion du rendement, à moins que le gestionnaire ne l’estime nécessaire. Mme Kovacs a déclaré que bon nombre d’employés demandent des affectations afin de changer d’organisation et que, dans le cas de la fonctionnaire, l’affectation lui a été proposée en tant qu’outil de gestion du rendement en vue de démontrer qu’elle pouvait répondre aux compétences d’un poste AS‑06. La fonctionnaire a demandé que Mme Kovacs approche la haute direction en vue de chercher d’autres possibilités au groupe et au niveau EC‑07.

[142]  On a demandé à Mme Kovacs d’expliquer pourquoi elle a précisé dans le courriel qu’elle avait indiqué clairement à la fonctionnaire que son maintien au poste de gestionnaire du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux n’était pas une option. Elle a indiqué qu’il s’agissait de la position adoptée par la direction en fonction des rapports de gestion du rendement et d’apprentissage et de la nécessité que l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux soit dirigée par un gestionnaire chevronné, ayant la capacité et les compétences pour offrir un soutien. Il a été démontré que la fonctionnaire ne pouvait pas s’acquitter de ses fonctions de gestionnaire du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux.

[143]  Mme Kovacs a été renvoyée à un échange de courriels entre elle et la fonctionnaire les 17 et 21 mai 2013 (pièce S‑15) concernant une affectation EC‑07 d’une durée de six mois avec Mme Tattrie, dans lequel Mme Kovacs a déclaré qu’elle, Mme Nassrallah et Mme Tattrie aideraient la fonctionnaire dans une recherche d’emploi au cours de cette période. Mme Kovacs a dit qu’à la fin de l’affectation, si la fonctionnaire réussissait, elle pourrait peut‑être retourner à la même direction comme EC‑07, mais qu’elle serait assujettie à un plan de suivi de la gestion du rendement. Si elle parvenait à atteindre les objectifs en tant qu’EC‑07, elle aurait alors la possibilité de trouver un poste avec des fonctions de supervision. L’engagement de la direction ne consistait pas à trouver un emploi pour la fonctionnaire, mais à l’aider dans sa recherche d’emploi, à répondre à ses questions et à examiner son curriculum vitae. À la question de savoir pourquoi elle a offert d’aider une employée qui était incompétente, Mme Kovacs a répondu que la fonctionnaire avait exprimé à maintes reprises un intérêt à quitter l’organisation du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux, puisqu’elle n’estimait pas être la bonne personne pour le poste. Mme Kovacs a affirmé que la fonctionnaire ne pouvait pas prendre en charge le sondage auprès des fonctionnaires fédéraux et l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux en raison des compétences qu’elle a démontrées pendant qu’elle relevait directement de Mme Kovacs.

[144]  Mme Kovacs a été renvoyée à l’échange de courriels entre elle et Mme Guilhem les 17 et 21 mai 2013 (pièce S-16) ayant trait à la préparation d’une lettre concernant l’affectation de la fonctionnaire à l’équipe de Mme Tattrie. Dans son courriel du 17 mai 2013, Mme Kovacs a indiqué que le but de l’affectation était de permettre à la fonctionnaire de se trouver un autre emploi. Dans sa réponse du 21 mai 2013, Mme Guilhem a demandé ce qui se passerait avec la fonctionnaire une fois son affectation terminée, soit si elle demeurerait dans l’équipe de Mme Tattrie ou bien si elle retournerait à son poste d’attache.

[145]  Mme Kovacs a témoigné à l’effet que l’idée de l’affectation était que la fonctionnaire puisse démontrer qu’elle pouvait atteindre les objectifs du poste EC-07. Lorsqu’elle a été interrogée concernant la question de Mme Guilhem sur ce qui se passerait à la fin de l’affectation de la fonctionnaire, Mme Kovacs a répondu qu’il y avait eu plusieurs discussions avec Mme Nassrallah et que, si la fonctionnaire atteignait les objectifs d’EC-07 dans son nouvel environnement, elle retournerait à son poste d’attache.

3.  Mme Tattrie

[146]  À l’époque pertinente, Mme Tattrie était la directrice principale, Division de la gestion du rendement, Secteur de la gouvernance, de la planification et des politiques, Bureau du dirigeant principal des ressources humaines, Conseil du Trésor. Les responsabilités de son unité comprenaient la mise en œuvre de la nouvelle directive sur la gestion du rendement qui a été approuvée en mai 2013, et l’appui aux ministères ou organismes dans l’administration publique centrale en vue d’instaurer la directive et de mettre en place des programmes uniformes. Son unité était composée d’une petite équipe.

[147]  Mme Tattrie a indiqué que la fonctionnaire s’était jointe à son unité, parce que les membres du comité de gestion avaient discuté des possibilités pour elle. De plus, la fonctionnaire avait communiqué avec elle à ce sujet et croyait qu’il s’agissait d’une bonne unité pour elle. Les responsabilités de la fonctionnaire consistaient à gérer le processus de questions et réponses qui avait été établi pour aider les organismes ayant besoin d’information pour interpréter les directives, afin de veiller à ce qu’elles soient pratiques et équitables.

[148]  En tant qu’outils de travail, Mme Tattrie a indiqué que, à la base, il y avait 34 experts en la matière, provenant de divers domaines, notamment les Ressources humaines, la Protection de la vie privée et les Services juridiques. Lorsqu’une question était reçue, la fonctionnaire devait l’examiner et décider à quel expert l’acheminer. Cette personne fournissait le contenu de la réponse à la fonctionnaire, qui devait alors en compléter la mise en page aux fins de communication et d’envoi à la personne qui avait posé la question. La réponse était également affichée sur le site Web du Secrétariat du Conseil du Trésor.

[149]  Mme Tattrie a résumé le rendement au travail de la fonctionnaire dans l’unité comme étant insuffisant, puisqu’elle n’était pas en mesure de répondre aux attentes liées au travail qui lui était attribué. Mme Tattrie a cerné deux préoccupations concernant la fonctionnaire : premièrement, elle n’avait pas la capacité de réflexion approfondie. Par exemple, elle n’était pas à l’aise d’envoyer les questions aux experts en la matière, car elle estimait qu’elle devait d’abord fournir le contenu, ce qui semait la confusion chez les experts. Deuxièmement, la fonctionnaire élaborait plus de processus que ce qui était nécessaire.

[150]  Mme Tattrie a indiqué que la fonctionnaire avait été informée que les experts en la matière étaient responsables des renseignements envoyés et que l’unité de la gestion du rendement ne devait que faciliter la préparation des réponses. La fonctionnaire a indiqué que sa réticence à recourir aux experts en la matière découlait du fait qu’elle ne les avait pas rencontrés en personne.

[151]  Les outils fournis à la fonctionnaire comprenaient l’expertise et le soutien des autres membres de l’équipe de la gestion du rendement, des réunions bilatérales d’une heure ou plus pour examiner des questions précises, des éclaircissements au sujet des attentes et de la rétroaction. Les experts en la matière et leur capacité à fournir des renseignements constituaient l’élément clé.

[152]  Lorsqu’elle a été renvoyée à une page non datée du document intitulé [traduction] « Renseignements sur le plan de travail et les rapports hiérarchiques, conformément à la lettre d’affectation » (pièce E‑1, onglet 26), Mme Tattrie a indiqué que la fonctionnaire lui avait fourni le document, mais qu’elle ne se souvenait pas de la date. C’était dans le cadre d’une discussion sur la lettre d’affectation de la fonctionnaire à l’équipe de la gestion du rendement.

[153]  Étant donné que la fonctionnaire était mécontente de son plan de travail antérieur, Mme Tattrie lui a dit d’établir son propre plan de travail. Mme Tattrie a écrit des commentaires sur la première ébauche de la fonctionnaire (pièce E‑4) et lui a dit que le plan de travail pouvait être simplifié. À l’origine, Mme Tattrie tenait des réunions bilatérales hebdomadaires et offrait une rétroaction et des éclaircissements quant aux attentes. Elle fournissait aussi une rétroaction verbale à la fonctionnaire quotidiennement. Elle a alors décidé qu’il y aurait des périodes d’engagements écrits. Elle a renvoyé à une série de documents mensuels de rétroaction pour la période du 10 juin au 10 décembre 2013, qui contenaient les commentaires de Mme Tattrie basés sur les réunions bilatérales (pièce E‑1, onglet 27). Ces documents étaient intitulés « plan de travail ».

[154]  Le premier document portait sur la période du 10 juin au 19 juillet 2013. Au cours de cette période, Mme Tattrie était en congé du 13 au 19 juin 2013, et la fonctionnaire était en congé du 17 juin au 2 juillet 2013. Tel qu’il est indiqué dans le document, au cours de cette période, le premier objectif de la fonctionnaire (éléments en attente du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux) était de terminer les dossiers de son ancien travail lié au sondage auprès des fonctionnaires fédéraux. Son deuxième objectif était sa transition à sa nouvelle affectation au cours d’une période de deux semaines en examinant les documents du projet de mise en œuvre de la gestion du rendement, la tenue de réunions avec les membres de l’équipe en vue de comprendre leurs responsabilités et, tel qu’il a été ordonné par Mme Tattrie, la compréhension de son propre rôle dans le cadre du projet. Dans ses commentaires au sujet de cet objectif, Mme Tattrie a noté que la fonctionnaire était heureuse de travailler sur le projet. Elle a toutefois mentionné qu’elle avait de la difficulté à cerner les forces de la fonctionnaire en ce qui concerne les capacités et les compétences relatives à un poste EC-07 et la façon dont elle pourrait contribuer au projet. Mme Tattrie a indiqué qu’elle voulait avoir une idée de la façon dont la fonctionnaire pourrait contribuer à l’équipe.

[155]  Le troisième objectif de la fonctionnaire concernait l’évaluation de soumissions relatives à un contrat portant sur la gestion du changement. Mme Tattrie a affecté la fonctionnaire à l’équipe qui devait évaluer trois des cinq soumissions reçues concernant le contrat. L’équipe était composée de Mme Tattrie, de la fonctionnaire et d’une autre personne. Les soumissions devaient être examinées individuellement et une réunion devait ensuite avoir lieu pour discuter des évaluations individuelles et parvenir à un consensus. Mme Tattrie a noté que la fonctionnaire avait évalué toutes les soumissions dans le délai requis, bien qu’elle a dû s’y consacrer à temps plein pour respecter les délais et les exigences de l’appel d’offres. Elle a précisé que la fonctionnaire avait bien contribué au projet.

[156]  Le quatrième et, selon Mme Tattrie, le principal objectif de travail de la fonctionnaire pendant la période du 10 juin au 19 juillet 2013 était de diriger l’élaboration et la gestion continue des questions et réponses liées à la gestion du rendement. Dans le document de rétroaction pour cette période, la fonctionnaire a proposé d’être responsable des questions et réponses. Le plan de travail pour la période du 22 juillet au 30 août 2013 et les plans pour les périodes subséquentes indiquaient comme premier objectif de travail que la fonctionnaire était responsable du développement et de la gestion des questions et réponses liées à la gestion du rendement. Dans ses commentaires, Mme Tattrie a indiqué que la fonctionnaire avait rencontré de nombreuses difficultés au titre de la réflexion approfondie. Elle a été chargée de préparer un plan de travail aux fins du processus de questions et réponses et de la production de réponses aux 55 questions, dont chacune devait être classée; la source du contenu pour les réponses provenait des experts en la matière; elle devait veiller à ce que les réponses soient rédigées et examinées par le projet Outils du Comité des intervenants, et les préparer par la suite sous forme finale, pour fins de publication.

[157]  Mme Tattrie savait que la fonctionnaire éprouvait des difficultés en raison de leurs discussions au cours des réunions bilatérales. Elle avait de la difficulté à comprendre le processus de triage et comment préparer des questions et réponses sous forme finale. Une partie de cette difficulté découlait de sa réticence à recourir aux experts en la matière, malgré l’encouragement reçu à cet égard, ce qui aurait permis de la libérer afin qu’elle puisse se concentrer sur l’organisation plutôt que sur la rédaction des réponses. De plus, en rédigeant les questions et réponses, la fonctionnaire ne pouvait pas comprendre qu’elle devait anticiper les réactions potentielles d’intervenants, tels que les agents négociateurs, afin de les incorporer dans le développement des réponses, ce qui obligeait plusieurs révisions des réponses. Mme Tattrie a noté qu’à la suite de plusieurs discussions, la fonctionnaire était incapable de créer un plan de travail pour les questions et réponses. Par conséquent, elle lui a donné des tâches précises à accomplir chaque semaine. La fonctionnaire semblait être plus confortable avec cette approche. Les commentaires de Mme Tattrie indiquaient également que, comme discuté avec la fonctionnaire, pour la période où elle agissait à titre de supérieure de la fonctionnaire, le rendement de cette dernière n’était pas celui d’un EC‑07.

[158]  La période suivante visée par le plan de travail de la fonctionnaire allait du 22 juillet au 30 août 2013; la fonctionnaire était en congé du 13 août au 3 septembre 2013. Au cours de cette période, elle a participé au Comité des outils des intervenants afin de mieux comprendre les besoins ministériels. Mme Tattrie a augmenté le nombre de réunions bilatérales à deux fois par semaine au cours de cette période afin de fournir à la fonctionnaire le niveau de précision et de soutien nécessaire pour accomplir ses tâches. Elle a indiqué que la situation de la fonctionnaire n’avait pas changé au cours de cette période et que les mêmes préoccupations survenaient. Mme Tattrie a noté que la fonctionnaire continuait d’éprouver des difficultés à avoir une compréhension de haut niveau des réponses aux questions afin de coordonner les réponses. Les réponses étaient révisées avec la fonctionnaire durant les réunions bilatérales, puisqu’elle avait toujours des problèmes à les rédiger et à les réviser de façon à satisfaire les attentes des divers intervenants. Pendant le congé de la fonctionnaire, Mme Tattrie a complété elle-même la catégorisation de toutes les questions ainsi que la sélection des questions à être affichées sur le site Web du Secrétariat du Conseil du Trésor.

[159]  En ce qui concerne le plan de travail pour la période du 3 au 30 septembre 2013, Mme Tattrie a souligné la bonne collaboration de la fonctionnaire avec ses collègues et l’appui qu’elle leur a donné. Mme Tattrie a fait valoir que la fonctionnaire éprouvait des problèmes à travailler de manière efficace, à utiliser les ressources disponibles et de réflexion approfondie.

[160]  Mme Tattrie a continué d’approuver le travail effectué par la fonctionnaire. Elle n’avait toujours pas recours aux experts en la matière et elle rédigeait toujours des réponses qui ne répondaient souvent pas aux questions ou n’étaient que partielles. Lorsque les questions n’étaient pas claires, la fonctionnaire hésitait à communiquer avec l’auteur de la question pour obtenir des précisions.

[161]  Mme Tattrie a indiqué que, lorsque les experts en la matière ne coopéraient pas, la fonctionnaire devait la consulter plutôt que d’attendre de l’informer des difficultés lorsqu’elles examinaient les questions. Pendant cette période, elles ont continué de tenir des réunions bilatérales deux fois par semaine, à raison d’environ une heure par réunion. Les réunions avaient pour but de confirmer de nouveau les attentes de Mme Tattrie liées à la gestion des questions et réponses par la fonctionnaire, de fournir une rétroaction et de soutenir son travail. Mme Tattrie a souligné que la fonctionnaire avait indiqué que, parfois, elle était réfractaire à la rétroaction, mais qu’elle faisait des efforts à cet égard. Mme Tattrie a noté que la fonctionnaire avait une meilleure compréhension de la gestion du rendement et avait acquis une certaine confiance. Cependant, dans son témoignage, elle a indiqué qu’elle devait continuer à expliquer ses attentes à la fonctionnaire. Mme Tattrie a témoigné à l’effet qu’elle n’avait constaté aucune amélioration dans le travail de la fonctionnaire.

[162]  En ce qui concerne le plan de travail pour la période du 1er au 31 octobre 2013, Mme Tattrie a souligné la collaboration de la fonctionnaire avec ses collègues. Mme Tattrie a noté que la fonctionnaire avait approfondi ses connaissances du projet de la gestion du rendement au cours de cette période. Elle a affirmé dans son témoignage que la fonctionnaire semblait n’avoir aucun désir de suivre les directives, puisqu’elle a continué de rédiger des réponses aux questions sans d’abord consulter les experts en la matière. Elle a cependant continué d’approuver le travail effectué par la fonctionnaire. Elle a remarqué que la fonctionnaire continuait d’être réfractaire à la rétroaction, ce qui frustrait la fonctionnaire et l’empêchait de s’acquitter de ses responsabilités.

[163]  Au cours de cette période, la fonctionnaire s’est portée volontaire pour rédiger une fiche de renseignements sur la période de stage, mais n’a pas invité pleinement la participation des experts en la matière aux fins de commentaires, ce qui a donné lieu à une importante révision. Mme Tattrie a indiqué qu’elle portait principalement attention à trois compétences. En ce qui concerne la capacité de réflexion approfondie, Mme Tattrie a informé la fonctionnaire qu’en rédigeant les questions et réponses, elle devait se mettre à la place d’un employé, d’un gestionnaire ou d’un agent négociateur. En ce qui concerne la réflexion stratégique, Mme Tattrie a dit que, parfois, la fonctionnaire n’était pas claire, par exemple en indiquant les avantages de la gestion du rendement. Pour ce qui est de la troisième compétence, soit le jugement, Mme Tattrie a renvoyé au fait que la fonctionnaire n’avait pas suffisamment recours aux experts en la matière. Mme Tattrie a indiqué qu’en conséquence, la fonctionnaire n’était pas en mesure d’exécuter les tâches d’un poste classifié EC‑07.

[164]   Les commentaires de Mme Tattrie à l’égard du plan de travail pour la période du 1er novembre au 10 décembre 2013, étaient identiques à ceux qu’elle avait formulés à l’égard de la période précédente. À la question de savoir pourquoi ses commentaires n’avaient pas changé par rapport à la période précédente, Mme Tattrie a répondu que le rendement de la fonctionnaire n’avait pas changé.

[165]  La fonctionnaire a donné ses commentaires en réponse à ceux de Mme Tattrie concernant les documents liés au plan de travail pour chaque période du 10 juin au 30 septembre 2013 (pièce E‑5). Mme Tattrie a dit qu’elle n’en avait pas discuté avec la fonctionnaire. Elle ne savait pas quand la fonctionnaire lui avait donné le document, puisqu’elle n’en avait que la copie papier; elle ne savait pas quand la fonctionnaire le lui avait envoyé par courriel. Toutefois, je note que, dans le courriel de Mme Tattrie du 30 janvier 2014 (pièce E-1, onglet 28), il est indiqué qu’elle a reçu le document le 14 novembre 2013.

[166]  Mme Tattrie m’a renvoyé à deux ensembles de questions et réponses avec suivi des modifications (pièces E‑6 et E‑7). Elle a souligné qu’elle les utilisait dans le cadre des réunions bilatérales avec la fonctionnaire pour indiquer pourquoi une révision était nécessaire aux fins de corrections.

[167]  Mme Tattrie a déclaré que l’une des responsabilités de la fonctionnaire était de créer un outil de suivi pour les questions et réponses. Le document que la fonctionnaire a préparé et lui a présenté (pièce E‑8) était préoccupant, parce que le format n’était pas le même que celui utilisé dans les autres outils de suivi. L’objectif était de permettre aux membres de l’équipe de vérifier rapidement l’état des questions. Mme Tattrie a indiqué qu’elle et la fonctionnaire avaient passé beaucoup de temps à discuter du format. La préoccupation principale concernait l’endroit où mentionner l’organisme auteur de la question, qui arrivait habituellement en premier. Selon Mme Tattrie, par rapport au format normalisé, le format présenté par la fonctionnaire augmentait la charge de travail et était plus difficile à comprendre.

[168]  Mme Tattrie a précisé que le dirigeant principal des ressources humaines lui avait demandé d’expliquer pourquoi elle n’avait pas fourni ses commentaires concernant les documents de rétroaction mensuelle sur le plan de travail concernant les trois premiers plans, soit ceux de juin, de juillet et de septembre 2013. Mme Tattrie a indiqué que, tel qu’il a été énoncé dans son courriel du 30 janvier 2014 (pièce E‑1, onglet 28), à compter de juillet, les réunions bilatérales sont devenues plus fréquentes. Au cours de ces réunions, elle a fourni des commentaires à la fonctionnaire sur des tâches précises de son travail, ainsi qu’une rétroaction verbale. Le modèle convenu pour les commentaires n’a pas été fourni par la fonctionnaire avant son retour de vacances en septembre 2013. Ce courriel se lit comme suit :

[Traduction]

[…]

À son arrivée en juin 2013, Shirley a indiqué qu’elle n’était pas d’accord avec le format du modèle utilisé à son poste précédent pour gérer son rendement. Sa principale préoccupation était qu’elle avait l’impression que le format et le contenu ne reflétaient pas son rendement et que celui-ci n’était pas mesurable – plus précisément les compétences et la façon dont le travail était accompli. Je lui ai dit à l’époque qu’elle devrait proposer un modèle, mais qu’il devait englober non seulement ce qu’elle faisait, mais aussi la façon dont elle exécutait ses tâches, et que nous en discuterions. Nous avions une rencontre chaque semaine, et à chaque rencontre, je lui demandais une mise à jour sur le modèle proposé. Elle a indiqué qu’elle y travaillait. Indépendamment du délai, je lui fournissais constamment des commentaires oraux à chaque rencontre, ainsi que des commentaires écrits et des modifications sur des parties spécifiques du travail que j’examinais avec elle. Je fournissais une orientation concrète à l’égard des questions concernant son travail et la façon dont elle pouvait s’améliorer ou travailler de manière plus efficace.

En juillet, le nombre de rencontres bilatérales est passé à deux fois par semaine, car Shirley avait besoin de plus de temps avec moi pour examiner les réponses qui continuaient de nécessiter des révisions importantes. Shirley a été absente pendant trois semaines en août et, mi-septembre, elle a présenté une proposition de format qui incluait des compétences comme la capacité de réflexion, de réflexion stratégique et de collaboration. Après plusieurs révisions, nous avons convenu d’un format. J’ai continué à lui fournir des commentaires oraux et écrits au moyen du suivi des modifications et de changements écrits dans des documents qu’elle avait préparés, ainsi qu’en discutant des raisons pour lesquelles les changements étaient nécessaires et de la façon dont elle pouvait s’améliorer – par exemple, l’utilisation d’experts en la matière plutôt que de perdre du temps à faire de la recherche et à élaborer des réponses qui n’étaient pas exactes, créant ainsi plus de travail pour les experts en la matière et elle-même. Elle a, en effet, indiqué un certain nombre de fois qu’il n’était pas nécessaire de fournir un suivi des modifications, que les changements pouvaient n’être fournis que de façon orale. Je lui ai dit que non, les modifications devaient être fournies dans ce format parce que cela lui permettrait de mieux comprendre l’étendue des révisions requises. Il n’y a eu aucune amélioration en ce qui concerne l’étendue des révisions au cours de la tâche de cinq mois.

J’ai fourni à Shirley trois mois de commentaires écrits dans le modèle du 16 septembre. J’ai lu les commentaires avec elle, puis je lui ai demandé s’il y avait quelque chose qu’elle n’avait pas entendu durant nos rencontres. Elle a répondu par la négative. Je lui ai aussi demandé de me fournir des commentaires, ce qu’elle a fait le 14 novembre 2013 de manière orale et dans un document Word; elle n’a pas fourni ses commentaires dans son modèle, comme elle était censée le faire et, lorsque je lui ai demandé de le faire, elle a répondu par la négative. Ses commentaires indiquaient que la rétroaction écrite était trop négative et que cela signifiait qu’elle n’avait pas réussi sa tâche. Elle se montrait souvent contradictoire, en reconnaissant qu’elle ne pouvait pas faire le travail, mais indiquait ensuite qu’elle n’avait aucun problème de rendement. Sa préoccupation concernant les commentaires était que mes commentaires étaient négatifs – elle a en effet indiqué qu’ils étaient erronés – mais que s’ils restaient inchangés, la tâche ne pourrait pas être réussie.

J’ai continué, jusqu’à la fin de sa tâche le 10 décembre 2013, à fournir des commentaires sur des parties spécifiques du travail ainsi que des commentaires généraux et des exemples de problèmes récurrents associés à sa capacité de réflexion et de collaboration parce qu’elle a continué à ne pas utiliser les experts en la matière de manière efficace ou efficiente; elle a plutôt continué de faire un travail de recherche qui n’était pas nécessaire. Shirley n’a fourni aucun commentaire écrit sur les modèles complétés au cours des trois premiers mois. J’ai préparé les commentaires des deux mois suivants pour la grille et je les lui ai transmis oralement, mais j’ai remarqué que Shirley semblait plus ouverte et plus à même de comprendre les commentaires oraux qui étaient fondés sur des parties spécifiques du travail que les commentaires généraux présentés dans le modèle.

[…]

[169]  En contre‑interrogatoire, Mme Tattrie a été renvoyée à son courriel à l’intention de la fonctionnaire en date du 18 novembre 2013, qui indique qu’elle avait joint des plans de travail (pièce S‑17). Mme Tattrie a souligné que les plans étaient ceux de juin, de juillet et de septembre 2013.

[170]  Mme Tattrie a été renvoyée au document d’une page, non daté, intitulé [traduction] « Renseignements sur le plan de travail et les rapports hiérarchiques, conformément à la lettre d’affectation » (pièce E‑1, onglet 26), dans lequel le sixième point indique qu’une réunion de surveillance a été tenue avec M. Béliveau le 23 juillet 2013. Mme Tattrie estimait que la réunion concernait la formation, parce que la fonctionnaire avait été affectée à l’équipe de la gestion du rendement. À la question de savoir si Mme Tattrie et M. Béliveau devaient collaborer afin d’élaborer un plan d’apprentissage pour la fonctionnaire, Mme Tattrie a répondu par la négative, puisque la fonctionnaire avait suivi une formation au cours de l’année précédente et qu’elle n’avait pas confirmé les ressources dont elle avait besoin.

[171]  Mme Tattrie a ensuite été renvoyée à un échange de courriels entre elle et M. Béliveau, en date du 22 juillet 2013 (pièce S‑18), dans lequel elle a affirmé qu’elle n’estimait pas qu’un encadrement supplémentaire aiderait la fonctionnaire et que, à son avis, la fonctionnaire devait envisager d’autres postes. Mme Tattrie a souligné que la fonctionnaire lui avait dit qu’elle avait fait l’objet d’un encadrement l’année précédente et qu’elle avait trouvé l’exercice inutile. La fonctionnaire avait également mentionné un autre poste et Mme Tattrie avait établi un contact entre la fonctionnaire et un conseiller en orientation. Mme Tattrie ne se rappelle pas la date de ces discussions avec la fonctionnaire, mais elle estimait qu’elles avaient eu lieu aux alentours de la date indiquée dans les courriels.

[172]  En réinterrogatoire, à la question de savoir pourquoi elle a envoyé les trois plans de travail à la fonctionnaire le 18 novembre 2013 (pièce S‑17), Mme Tattrie a répondu qu’elle avait discuté de tous les plans avec la fonctionnaire avant novembre et qu’elle les lui avait envoyés uniquement parce que, selon l’entente, elle devait lui donner une rétroaction écrite après avoir discuté de certaines questions. Elle ne les a pas envoyés plus tôt, parce que la fonctionnaire était bouleversée lors des réunions bilatérales et qu’elle était souvent émotive et en larmes. Elle était plus réceptive aux directives verbales. Les commentaires écrits augmentaient l’anxiété de la fonctionnaire en raison des commentaires formulés dans le cadre de son poste antérieur. Mme Tattrie a signalé qu’elles avaient examiné ses commentaires écrits selon la grille et qu’elle demandait à la fonctionnaire s’il y avait eu des changements.

4.  M. Béliveau

[173]  Le 10 juin 2013, M. Béliveau a succédé à Mme Lehouillier. Son interaction avec la fonctionnaire depuis cette date a été assez limitée, soit deux ou trois conversations qui portaient surtout sur les rapports de gestion du rendement et d’apprentissage des membres de l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux.

[174]  M. Béliveau a dit que le 11 ou 12 juin 2013, la fonctionnaire a eu une rencontre qui ne s’était pas bien déroulée avec une de ses employés de l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux; la rencontre portait sur le rapport de gestion du rendement et d’apprentissage de cette employée. L’employée en question a eu un comportement irrespectueux et la fonctionnaire envisageait de quitter si les choses ne s’amélioraient pas. Mme Nassrallah lui a dit qu’on prenait la situation au sérieux. L’employée s’est excusée auprès de la fonctionnaire et a été réprimandée pour son comportement.

[175]  Comme il y avait des questions au sujet des rapports de gestion du rendement et d’apprentissage que la fonctionnaire avait préparés pour l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux, M. Béliveau a demandé à Mme Lehouillier de les revoir. Cette dernière a changé la cote d’évaluation de certains membres de l’équipe.

[176]  La fonctionnaire a voulu savoir pourquoi les rapports de gestion du rendement et d’apprentissage avaient été révisés. M. Béliveau l’a rencontrée à ce sujet à la fin de juin ou au début de juillet 2013. Il lui a expliqué que Mme Lehouillier signerait les rapports vu certaines lacunes de gestion de la part de la fonctionnaire. Ils ont discuté d’une personne en particulier (qui n’était pas l’employée mentionnée au paragraphe 172) pour laquelle la fonctionnaire avait accordé la cote « Réussi - », alors que Mme Lehouillier lui a accordé « Réussi - ».

[177]  Lorsque M. Béliveau a demandé à la fonctionnaire d’expliquer la cote, elle a répondu que le travail avait été fait à temps. Il lui a alors posé des questions sur la qualité du travail et elle lui a répondu qu’elle laissait à désirer. M. Béliveau lui a alors expliqué que l’évaluation du travail ne comprenait pas seulement le respect des délais, mais aussi la qualité. Quand il lui a demandé si elle pensait que le rendement de l’employé répondait aux attentes de son poste, la fonctionnaire a refusé de répondre.

[178]   Vers la fin de juillet 2013, M. Béliveau a rencontré la fonctionnaire et lui a remis une lettre datée du 23 juillet 2013, en réponse à plusieurs courriels qu’elle lui avait fait parvenir ainsi qu’à Mme Nassrallah (pièce E-9). La lettre de M. Béliveau se lit comme suit :

[…]

Je vous remets cette lettre en guise de réponse à vos courriel et lettre [sic] des dernières semaines dans lesquels vous nous faites part de votre désaccord sur l’évaluation de votre rendement et sur votre plan de redressement pour rendement insatisfaisant.

Depuis novembre 2012, vous faites l’objet de plans de travail réguliers visant à pallier les difficultés que vous rencontrez dans l’exercice de vos fonctions EC‑07. A la mise en place de ce plan de rendement, vos lacunes et les attentes de l’employeur ont été clairement identifiées, de nombreux outils ont été mis à votre disposition et vous avez été prévenue que si votre rendement ne s’améliorait pas, vous feriez l’objet d’une rétrogradation ou d’un licenciement, et ce conformément aux lignes directrices en la matière.

Malgré les nombreux échanges que vous avez eus avec Suzanne Lehouillier (depuis novembre 2012), puis avec Deborah Kovacs (qui l’a remplacée en avril 2013), vous ne reconnaissez toujours pas que votre rendement est problématique et qu'il faut en prendre charge afin que vous soyez en mesure de l’améliorer. La quantité et le contenu de vos communications démontrent également votre manque d’engagement à remédier à la situation. La collaboration de l’employé est indispensable dans le cadre d’un plan de redressement pour rendement insatisfaisant. Je compte donc sur votre étroite collaboration dès aujourd’hui; à défaut de vous conformer à cette directive, je n’aurai d’autre choix que de mettre fin à votre emploi au [Secrétariat du Conseil du Trésor] sans délai.

Je vous rappelle que votre affectation temporaire au sein de la Division de la gestion de rendement a été mise en place dans le cadre du processus formel de gestion de votre rendement qui a débuté en novembre 2012. Même si vous êtes sous la supervision d’une autre gestionnaire pendant cette affectation, vous n’en restez pas moins titulaire du poste EC‑07 au sein de l’équipe du [sondage auprès des fonctionnaires fédéraux] et du CRG. Les résultats de cette affectation serviront à prendre la décision de vous maintenir à l’emploi si votre rendement s’améliore, ou de vous licencier si votre rendement reste insatisfaisant. Par conséquent, il est primordial que Christine [Nassrallah] ou moi-même demeurions informés des résultats de cette affectation.

[…]

[179]  La lettre mentionnait qu’il était très important d’avoir la collaboration de la fonctionnaire en ce qui concerne le plan de travail pour s’assurer de son succès. La fonctionnaire a demandé que son rapport de gestion du rendement et d’apprentissage soit revu, mais M. Béliveau a refusé. M. Béliveau a témoigné à l’effet que la fonctionnaire lui avait dit qu’elle était à la recherche d’un autre emploi. Il lui a offert son aide et elle a dit qu’elle lui enverrait peut-être son curriculum vitae une fois qu’elle l’aurait préparé. Toutefois, elle n’y a pas donné suite.

[180]  En contre-interrogatoire, M. Béliveau a dit que sa réponse à la demande de la fonctionnaire pour la révision de son évaluation avait été transmise à la fonctionnaire par courriel au préalable et qu’il avait expliqué que Mme Lehouillier avait suffisamment d’information lorsqu’elle avait préparé son évaluation.

[181]  Lorsqu’on a porté à l’attention de M. Béliveau que sa lettre du 23 juillet 2013 à la fonctionnaire (pièce E-9) indiquait qu’à défaut de sa collaboration dans le plan de travail, elle serait licenciée, M. Béliveau a répondu que c’était bien ce qui était écrit.

[182]  En réinterrogatoire, M. Béliveau a dit que la lettre du 23 juillet 2013 avait été préparée vers le 20 ou 21 juillet 2013, avec l’aide des Relations de travail et de Mme Nassrallah.

5.  Mme Nassrallah

[183]  Mme Nassrallah occupait le poste de directrice exécutive, Infrastructure stratégique, gestion de l’information et recherche, Secteur de la gouvernance, de la planification et des politiques, Bureau du dirigeant principal des ressources humaines, Conseil du Trésor, depuis le 21 novembre 2011. Mme Lehouillier relevait d’elle et s’occupait de l’équipe du cadre de responsabilisation de gestion et des sondages. Mme Nassrallah a eu des discussions concernant le rendement de la fonctionnaire avec Mme Lehouillier, Mme Kovacs et M. Béliveau.

[184]  Mme Lehouillier lui a signalé que le rendement de la fonctionnaire comportait des lacunes en ce qui concerne les relations interpersonnelles, le jugement et la compréhension. Mme Nassrallah lui a demandé si la fonctionnaire avait été encadrée pour gérer l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux et le dossier. Elle voulait s’assurer que la fonctionnaire avait eu la formation nécessaire pour les tâches liées à son poste. Elle a appuyé Mme Lehouillier en ce qui concerne le plan de gestion du rendement de la fonctionnaire. Mme Lehouillier lui a confirmé que la fonctionnaire avait accès à de la formation, qu’elle la rencontrait et lui donnait des conseils concernant ses tâches quotidiennes et qu’elle continuait à la soutenir afin qu’elle reçoive l’encadrement nécessaire.

[185]  Dans ses discussions avec Mme Kovacs, Mme Nassrallah lui a mentionné que la fonctionnaire avait besoin d’encadrement et qu’il fallait lui trouver un autre travail. Vers mai et juin 2013, Mme Nassrallah a communiqué avec un collègue, Marc Tremblay, directeur exécutif, Langues officielles, Secteur de la gouvernance, de la planification et des politiques, Bureau du dirigeant principal des ressources humaines, Conseil du Trésor, pour une possibilité d’affectation au sein de son service. Un poste classifié AS-06 a été offert à la fonctionnaire. Bien que la fonctionnaire aurait bénéficié d’une protection salariale au groupe et au niveau EC-07, elle n’a pas accepté l’offre.

[186]  Dans ses discussions avec Mme Kovacs, Mme Nassrallah a mentionné qu’il était nécessaire de continuer le plan de gestion du rendement commencé par Mme Lehouillier. Selon Mme Nassrallah, le plus important était que la fonctionnaire établisse de bonnes relations avec l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux, qu’elle continue d’améliorer ses capacités relatives au jugement et qu’elle soutienne la livraison des résultats attendus de l’équipe. Il y avait lieu de croire qu’il y avait des problèmes et des défis qu’il fallait régler au sein de l’équipe. Les discussions avec la fonctionnaire concernant son rendement lui donnaient l’occasion d’examiner son rapport de gestion du rendement et d’apprentissage et de s’attarder sur les points importants.

[187]  Des discussions ont aussi été tenues avec le comité de gestion, qui était formé de M. MacLeod, sous-ministre adjoint, de Mme Nassrallah, directrice exécutive, et de Mmes Lehouillier et Kovacs, respectivement directrice et directrice par intérim. Mme Nassrallah a dit que, dans le Secteur de la gouvernance, de la planification et des politiques, la pratique était d’examiner le rendement de chaque employé collectivement avec le comité de gestion. Il s’agissait de discuter, de recevoir les recommandations du directeur et de se consulter concernant les relations de travail.

[188]  Dans le cas de la fonctionnaire, le comité de gestion a examiné ses lacunes et ses points forts. Les lacunes suivantes ont été relevées : manque de jugement, problèmes avec les membres de son équipe, manque de compréhension rapide concernant l’essence et le contenu du dossier. Mme Lehouillier a mentionné les lacunes de la fonctionnaire au comité de gestion. Les membres du comité de gestion ont soulevé des parties du dossier pour lesquels d’autres membres de la direction ont fait des commentaires.

[189]  Quant au mode de fonctionnement du comité de gestion, M. MacLeod avait comme pratique de rencontrer l’ensemble de l’équipe tous les six mois, soit lors du rapport de gestion du rendement et d’apprentissage de mi-année et à la fin de l’année financière, pour partager ses propres objectifs et priorités, notamment les attentes de chaque directeur et directeur exécutif. Conformément à la pratique suivie par le comité de gestion et Mme Lehouillier, le directeur fournissait une rétroaction continue et quotidienne à l’égard de chaque membre de son équipe. Selon le rendement du membre de l’équipe, le directeur donnait des résultats positifs ou négatifs, l’objectif étant de régler les lacunes ou problèmes, le cas échéant, et de continuer les résultats positifs.

[190]  Quant au lien entre les directrices de mesure de rendement et surveillance et le comité de gestion concernant la rétroaction de la fonctionnaire, Mme Nassrallah a dit que le sondage auprès des fonctionnaires fédéraux était une priorité pour tout le monde, incluant le sous-ministre et le sous-ministre adjoint. La rétroaction avait pour but de veiller à ce que la priorité soit soutenue, que le budget du projet soit bien géré et que l’échéancier soit satisfait. La gestion des employés est importante et des commentaires ont été formulés concernant des problèmes de relation entre la gestion et les membres de l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux et le rendement de l’équipe ou la qualité du produit livré.

[191]  Le plan de gestion du rendement de la fonctionnaire s’est poursuivi avec M. Béliveau. Il devait continuer de l’encadrer et de lui donner l’occasion de travailler ailleurs, autre que le milieu de travail du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux. De plus, alors que la fonctionnaire était en affectation de six mois sous la supervision de Mme Tattrie, son poste d’attache demeurait celui de gestionnaire, Sondage auprès des fonctionnaires fédéraux, Secteur de la gouvernance, de la planification et des politiques, Bureau du dirigeant principal des ressources humaines, Conseil du Trésor.

[192]  Mme Nassrallah a témoigné à l’effet qu’elle n’avait pas discuté avec la fonctionnaire de son rendement. La fonctionnaire est venue la voir à deux ou trois reprises entre mai et juin 2013, et leurs discussions étaient en termes généraux. Mme Nassrallah a mentionné à la fonctionnaire que Mme Lehouillier lui avait parlé des lacunes de rendement de la fonctionnaire sans toutefois donner de détails. Mme Nassrallah a aussi souligné à la fonctionnaire qu’elle avait entendu parler des problèmes de relations de travail avec les membres de l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux. Il s’agissait de discussions générales qui ne portaient pas sur les difficultés rencontrées par la fonctionnaire au quotidien. Mme Nassrallah a discuté de l’importance du dossier, d’avoir de relations productives avec les membres de son équipe et d’accorder beaucoup d’attention à leurs perspectives. Elle lui a aussi mentionné l’importance de bien connaître les compétences de leadership et de les mettre en pratique pour promouvoir un milieu de travail productif et collaboratif.

[193]  Quand Mme Lehouillier a annoncé son départ, Mme Nassrallah était au courant des problèmes de l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux. Elle a invité chaque membre de l’équipe, individuellement, à la rencontrer afin d’avoir leurs perspectives sur les problèmes. Les employés cherchaient à ne pas être négatifs à l’endroit de la fonctionnaire, mais ont exprimé qu’il y avait des défis liés à la communication et au manque d’harmonisation entre ce qui devait être fait et ce qui était fait. Il y avait aussi un manque de leadership et une difficulté au niveau de la compréhension du contenu et de l’expertise dans le dossier du sondage. Les membres de l’équipe cherchaient une direction claire de la part de la fonctionnaire et voulaient être inspirés par elle au lieu de parfois être obligés de faire son travail. Par exemple, la fonctionnaire prenait du temps à comprendre le fondement d’une question. Certains membres de l’équipe étaient chevronnés en sondages et comprenaient les nuances et ils devaient passer beaucoup de temps avec la fonctionnaire pour souligner ce qui était important et ce qu’ils savaient déjà eux-mêmes. Leurs attentes à l’égard de la fonctionnaire n’étaient pas satisfaites concernant la direction, la clarté et le soutien dans le contexte de la gestion des dossiers et du personnel. Certains membres de l’équipe voulaient continuer de travailler de bonne foi avec la fonctionnaire pour relever les défis et régler les problèmes, mais d’autres, vu leur expérience depuis l’arrivée de la fonctionnaire, étaient moins optimistes.

[194]  Les mesures entreprises par la gestion pour améliorer le rendement de la fonctionnaire consistaient en des séances de coaching à l’École de la fonction publique, le programme du Secrétariat du Conseil du Trésor en développement du leadership (voir pièce E-10), la participation au Forum de développement professionnel de la Communauté nationale des gestionnaires, dont le thème était le leadership (voir pièce E-11) et du coaching quotidien par Mme Lehouillier.

[195]  Mme Nassrallah a été renvoyée à un courriel en date du 18 avril 2013, que lui avait fait parvenir la fonctionnaire concernant le plan de travail et les agissements de Mme Lehouillier (pièce E-12). Au paragraphe 8 dudit courriel, la fonctionnaire a allégué que Mme Lehouillier lui avait dit que la décision de lui donner la cote de rendement « Non atteint » ne relevait pas d’elle, mais du comité de gestion. Selon Mme Nassrallah, la cote avait été recommandée par Mme Lehouillier et confirmée par le comité de gestion en tenant compte des discussions. Bien que, au paragraphe 10 du courriel, la fonctionnaire ait écrit qu’elle songeait présenter une plainte de harcèlement contre Mme Lehouillier, elle ne l’a pas fait.

[196]  Mme Nassrallah a dit ne pas avoir discuté avec la fonctionnaire du contenu de ce courriel du 18 avril 2013, concernant le plan de travail et les agissements de Mme Lehouillier (pièce E-12), parce que la gestion du rendement se fait entre la directrice et la fonctionnaire. Mme Nassrallah a dit qu’elle était convaincue que Mme Lehouillier travaillait de bonne foi afin d’aider la fonctionnaire à améliorer son travail et l’appuyer. Elle n’a pas non plus discuté du contenu du courriel avec Mme Lehouillier.

[197]  Mme Nassrallah a ensuite été renvoyée à un courriel que la fonctionnaire lui a envoyé le lendemain, le 19 avril 2013, à l’égard de la gestion de son rendement (pièce E-13). Elle n’a pas discuté du contenu du courriel avec la fonctionnaire. À la question de savoir si elle en avait discuté avec Mme Lehouillier, elle a répondu qu’elle ne l’avait pas fait de façon spécifique, puisque le rapport de gestion du rendement et d’apprentissage faisait partie des responsabilités de la directrice.

[198]  Mme Nassrallah a été renvoyée à sa lettre en date du 6 juin 2013, à l’intention de la fonctionnaire, et à des courriels de mai 2013 en lien avec la lettre (pièce E-1, onglet 24). Cette lettre se lisait comme suit :

[…]

Objet: Plan de redressement pour rendement insuffisant/Affectation

[…]

Cette lettre vise à confirmer les propos tenus lors de votre rencontre du 17 mai 2013 avec votre Directrice par intérim, Deborah Kovacs, concernant votre rendement et la mise en œuvre d’un plan afin d’évaluer vos compétences au niveau EC‑07 sans les tâches de supervision du personnel.

D’une part, afin de pallier les importantes difficultés que vous rencontrez dans vos fonctions de Gestionnaire au sein du Secteur de la gouvernance, de la planification et des politiques (EC‑07), depuis novembre 2012, vous faites l’objet d’un plan formel de rendement. Malgré le support de la Gestion et le nombre considérable de formations dont vous avez bénéficié cette dernière année fiscale, votre plan de rendement en place depuis novembre 2012 et votre évaluation annuelle de performance d’avril 2013 indiquent que vous n’êtes toujours pas en mesure de vous acquitter de vos tâches de façon satisfaisante pour votre niveau et votre classification.

D’autre part, afin de vous aider à combler vos écarts de rendement et de trouver un environnement de travail propice à votre réussite, il a été convenu ce qui suit :

vous serez affectée à des tâches EC‑07 sans supervision d’équipe sous la Gouvernance de Debra Tattrie, au sein de la Division de la gestion du rendement, du 10 juin 2013 au 10 décembre 2013;

votre accord de rendement comprendra des objectifs clairs et des mesures de rendement réalisables, vérifiables et mesurables pour déterminer votre niveau de rendement;

si vous le souhaitez, les services d’un coach continueront de vous être fournis afin de vous aider à améliorer vos compétences;

un plan de formation ciblé en fonction de vos nouvelles tâches sera élaboré en collaboration avec votre Gestionnaire, Debra Tattrie, dans les 30 jours suivant votre entrée en fonction dans votre nouveau poste;

vous recevrez une rétroaction verbale toutes les 2 semaines et une rétroaction écrite mensuelle concernant votre niveau de rendement. Vous aurez également une rencontre bilatérale hebdomadaire avec votre Gestionnaire pendant toute la durée de l’affectation;

en cas de rendement insatisfaisant dans vos nouvelles fonctions, à l’issue de l’affectation, nous n’aurons d’autre choix que de mettre fin à votre emploi.

si votre rendement est pleinement satisfaisant, vous serez placée dans un poste EC07 comprenant des fonctions de gestion de personnel, et la gestion de votre rendement se poursuivra afin de vous aider à pallier les lacunes restantes. Vous disposerez d’une période de temps raisonnable pour y parvenir. En cas de réussite, votre plan de rendement prendra fin; vous retournerez dans votre poste substantif et récupérerez toutes les fonctions qui y sont rattachées. En cas d’échec, vous devez toutefois savoir que nous devrons procéder à votre congédiement pour rendement insatisfaisant.

[…]

[Sic pour l’ensemble de la citation]

[199]  La lettre informait la fonctionnaire de son affectation de six mois à la Division de la gestion du rendement sous la gouvernance de Mme Tattrie, sans supervision de personnel. Cette lettre précisait qu’en cas de rendement satisfaisant dans le cadre de l’affectation, la fonctionnaire serait mutée dans un poste EC‑07 comprenant des fonctions de gestion de personnel; dans le cas de rendement insatisfaisant, la fonctionnaire serait licenciée. Dans le courriel qu’elle a envoyé le 24 mai 2013 à la fonctionnaire (pièce E-1, onglet 24), Mme Nassrallah lui a précisé qu’il s’agissait d’une affectation et non d’une offre d’emploi. Elle ne se souvenait pas d’en avoir discuté avec la fonctionnaire, parce que l’information avait été transmise à la fonctionnaire par Mme Kovacs. Mme Nassrallah a dit que la décision d’envoyer la fonctionnaire en affectation avait été prise par M. MacLeod, pour donner à la fonctionnaire l’occasion de s’améliorer. La période de six mois a été déterminée comme une période d’essai. Dans le courriel du 17 mai 2013, de Mme Kovacs à la fonctionnaire, Mme Kovacs a souligné qu’elle et Mme Nassrallah se feraient un plaisir d’aider la fonctionnaire dans sa recherche d’emploi pendant la période de son affectation. Mme Nassrallah a dit que ce message avait été répété à la fonctionnaire à plusieurs reprises, dans l’éventualité où l’affectation ne lui conviendrait pas.

[200]  Suite à la lettre d’affectation du 6 juin 2013, la fonctionnaire a fait parvenir une lettre à Mme Nassrallah (pièce E-1, onglet 25), qui contestait certains éléments de la lettre d’affectation. La fonctionnaire y contestait également le processus suivi jusque-là par l’employeur pour gérer son rendement. Bien que la lettre de la fonctionnaire ne soit pas datée, la fonctionnaire a précisé qu’il s’agissait du 10 juin 2013, ce que l’employeur n’a pas contesté.

[201]  Dans sa lettre, la fonctionnaire a mentionné, entre autres, qu’alors que son rendement a fait l’objet de critiques, Mme Nassrallah lui a assigné des tâches entre la fin mai et début juin 2013. Mme Nassrallah a reconnu qu’il était fort possible qu’elle ait travaillé avec la fonctionnaire si elle agissait à titre de directrice par intérim, pendant l’absence de Mme Kovacs. Je note que, selon le plan de travail du 14 mai 2013, préparé par Mme Kovacs, celle-ci était absente les 8, 9 et 13 mai 2013. Il n’y a pas de preuve établissant que Mme Kovacs était absente entre la fin mai et le début juin, ni que la fonctionnaire avait agi à titre de directrice par intérim pendant cette période.

[202]  Mme Nassrallah a dit ne pas avoir discuté de la lettre de la fonctionnaire avec elle, parce qu’il incombait à la directrice, soit Mme Kovacs, de le faire étant donné qu’elle gérait le rendement de la fonctionnaire. Quant à la demande de la fonctionnaire que son dossier de gestion du rendement soit révisé par un comité, Mme Nassrallah a dit qu’elle n’y avait pas répondu, puisque, selon elle, le comité de gestion avait déjà vu son dossier conformément à la pratique. Elle a témoigné à l’effet qu’elle avait tenu compte de la lettre, puisque l’évaluation effectuée par Mme Tattrie avait été faite en tenant également compte de la teneur de la lettre. À la question de savoir si quelqu’un avait répondu à cette lettre, Mme Nassrallah a dit que M. Béliveau lui avait répondu par lettre en date du 23 juillet 2013 (pièce E‑9). Elle a eu connaissance de cette lettre de réponse avant son envoi, puisqu’elle en a discuté avec lui. Selon Mme Nassrallah, la lettre rappelait à la fonctionnaire qu’elle devait déployer des efforts pour améliorer son rendement. Comme M. Béliveau entrait en fonction au début de juin 2013, Mme Nassrallah devait discuter avec lui des démarches à prendre concernant la fonctionnaire.

[203]  En contre-interrogatoire, Mme Nassrallah a été renvoyée à son approbation de la nomination de la fonctionnaire à titre de directrice par intérim, en remplacement de Mme Lehouillier, du 12 au 16 mars 2012 (pièce S-19). À la question de savoir si cela voulait dire que la fonctionnaire faisait bien son travail, Mme Nassrallah a répondu que ce n’était pas nécessairement le cas. En ce qui concerne la question de savoir si la fonctionnaire avait bien fait son travail intérimaire, elle a dit qu’elle ne s’en souvenait pas. Quant à son approbation de la nomination de la fonctionnaire pour agir à titre de directrice par intérim du 3 au 20 juillet 2012 (pièce S-2), Mme Nassrallah a été renvoyée à son courriel du 23 juillet 2012, à la fonctionnaire et à Mme Lehouillier (pièce S‑20), dans lequel elle a écrit : « Shirley, merci d’avoir pris la relève. L’équipe et moi étions bien soutenues. »

[204]  Lorsqu’elle a été renvoyée au courriel du 11 avril 2013, de la part de Mme Lehouillier à l’intention de Mme Guilhem (pièce S‑9), qui indiquait que le jour même il y avait une rencontre entre Mme Nassrallah, Mme Lehouillier et Mme Coghlan, Mme Nassrallah a reconnu que c’était bien ce que le courriel indiquait. À la question de savoir si elle avait tenu des rencontres individuelles avec les autres employés de l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux au cours de la même période, elle a dit ne pas se souvenir des dates précises.

[205]  Dans un courriel en date du 19 avril 2013, que Mme Nassrallah a envoyé à Mme Guilhem (pièce S-21), il est indiqué que la fonctionnaire était venue la voir le même jour pour confirmer qu’elle lui avait envoyé un courriel et pour demander son appui. Mme Nassrallah croyait qu’elle faisait référence au courriel que la fonctionnaire lui avait fait parvenir le 18 avril 2013, concernant le plan de travail et les agissements de Mme Lehouillier (pièce E-12). Mme Nassrallah a confirmé ne pas avoir rencontré la fonctionnaire à la suite de ses discussions avec Mme Lehouillier, Mme Kovacs ou M. Béliveau, parce que la fonctionnaire était déjà au courant des problèmes.

[206]  Mme Nassrallah a dit que ses discussions avec les employés de l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux avaient pour objectif de recueillir leurs perspectives sur le milieu de travail, soit ce qui fonctionnait bien et ce qui fonctionnait mal et s’ils faisaient face à des obstacles dans le cadre de la progression de leurs dossiers. Le ton des discussions était neutre. Selon Mme Nassrallah, le rendement de la fonctionnaire n’a pas fait l’objet de discussions avec les employés de l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux. Mme Nassrallah a dit qu’il était assez commun de solliciter le point de vue des employés.

[207]  À la question de savoir pourquoi avoir exclu la fonctionnaire des discussions, Mme Nassrallah a répondu que l’évaluation de son rendement avait déjà fait l’objet de discussions détaillées et qu’en affectant la fonctionnaire à un autre poste, la gestion cherchait un emploi qui convenait mieux à ses compétences. À la question de savoir pourquoi elle n’avait pas rencontré la fonctionnaire si la démarche avait été prise de bonne foi, Mme Nassrallah a répondu que la fonctionnaire était assujettie à un plan de gestion du rendement et qu’elle ne voulait pas le changer. De plus, Mme Nassrallah a dit que les discussions avec la fonctionnaire au sujet du plan de gestion du rendement avaient lieu avec sa directrice, qui fournissait une rétroaction spécifique.

[208]  Mme Nassrallah a été renvoyée à un courriel que la fonctionnaire lui a envoyé le 12 avril 2013 (pièce S-22), soit le jour de leur rencontre, à l’égard de son évaluation du rendement et du processus de gestion de son rendement. Entre autres, la fonctionnaire a écrit qu’elle n’avait pas eu de réponse à sa lettre du 22 novembre 2012, dans laquelle elle avait demandé que les « […] critères du plan de travail soient plus clairs, mesurables, atteignable, pertinents et délimités dans le temps et d’avoir une meilleure compréhension mutuelle sur les objectifs et les attentes de ce plan de travail ». Mme Nassrallah a dit ne pas se souvenir si elle avait rencontré la fonctionnaire avant ce jour. Elle a ensuite été renvoyée au courriel que la fonctionnaire lui a adressé le 18 avril 2013, concernant le plan de travail et les agissements de Mme Lehouillier (pièce E-12), dans lequel la fonctionnaire fait état de la rencontre entre Mme Nassrallah et la fonctionnaire le 12 avril, et qui mentionne notamment ce qui suit : 

[…]

3. Face à mon affirmation que les agissements de [Mme Lehouillier] étaient quant à moi contraires aux valeurs et éthiques de la fonction publique, vous m’avez confirmé que cela faisait partie de vos responsabilité [sic] et de vous assurer que les interactions au travail respecte [sic] les valeurs et éthiques, que vous alliez réviser le dossier et me revenir à ce sujet au milieu de la semaine suivante.

[…]

[209]  À la question de savoir pourquoi elle n’avait pas répondu au courriel de la fonctionnaire, Mme Nassrallah a dit ne pas s’être engagée à réviser le dossier de la fonctionnaire et que le comité de gestion considérait que le plan de gestion du rendement se déroulait comme il le devait. Lorsqu’on lui a dit qu’elle n’avait pas rencontré la fonctionnaire, Mme Nassrallah a répondu que les membres de l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux se plaignaient d’elle. À la question de savoir comment elle savait que le plan de gestion du rendement se déroulait conformément aux valeurs et à l’éthique de la fonction publique, Mme Nassrallah a répondu qu’elle le savait. De plus, elle n’a pas cru bon de rencontrer la fonctionnaire avant de tirer une conclusion. Lorsqu’elle a été interrogée à savoir s’il était normal d’arriver à une conclusion sans obtenir la version de toutes les parties, Mme Nassrallah a dit que l’évaluation avait été faite par Mmes Lehouillier, Kovacs, Tattrie et M. Béliveau et qu’elle n’était pas limitée à un seul incident.

[210]  Lorsqu’on a rappelé à Mme Nassrallah que la fonctionnaire lui avait écrit à quatre reprises, soit les 12, 18 et 19 avril 2013 (pièces S-22, E-12 et E-13, respectivement) et le 10 juin 2013 (pièce E-1, onglet 25) et qu’elle ne lui avait jamais répondu par écrit, Mme Nassrallah a dit qu’elle ne pouvait pas regarder au fur et à mesure les détails du travail quotidien de la fonctionnaire.

[211]  À la question de savoir si la décision d’affecter la fonctionnaire était unilatérale et non négociable, Mme Nassrallah a dit qu’il s’agissait d’une décision de bonne foi du comité de gestion dans le but d’améliorer son rendement en l’éloignant du milieu de travail qui posait problème.

[212]  Mme Nassrallah a été renvoyée au courriel du 21 mai 2013, que la fonctionnaire lui a envoyé (pièce E-1, onglet 24) pour lui demander si elle retournait à son poste d’attache après l’affectation. Mme Nassrallah a dit qu’il s’agissait d’une possibilité, selon les résultats du plan de gestion du rendement.

[213]  En ce qui concerne la lettre du 6 juin 2013, établissant les modalités de l’affectation de la fonctionnaire (pièce E-1, onglet 24), Mme Nassrallah a été interrogée à savoir si elle avait fait un suivi sur les diverses modalités mentionnées, notamment l’entente de rendement, le plan de formation ciblée et une rétroaction verbale toutes les deux semaines. Mme Nassrallah a répondu que la responsabilité des conditions de l’affectation relevait de Mme Tattrie.

[214]  En réinterrogatoire, Mme Nassrallah a dit que l’affectation de la fonctionnaire était l’initiative de M. MacLeod, parce que Mme Tattrie se rapportait à lui.

6.  Mme Coghlan

[215]  Mme Coghlan occupait un poste d’analyste, Mesure de rendement et surveillance, classifié au groupe et au niveau EC-05, depuis 2012. Elle avait travaillé dans le même groupe de 2002 à 2007. À compter de juillet 2014, elle est devenue analyste principale (EC-06).

[216]  De mars 2012 à juin 2013, Mme Coghlan relevait de la fonctionnaire. Les responsabilités de Mme Coghlan étaient d’analyser les résultats du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux de 2011 pour Statistiques Canada. Elle devait cerner les principaux résultats, analyser les corrélations, rédiger des rapports et faire des présentations pour la haute gestion et les intervenants. Il y avait beaucoup de demandes d’information de la haute gestion et du public concernant les résultats. Par la suite, elle devait préparer le sondage de 2014, incluant des consultations en vue de préparer les questions.

[217]  Au début, selon Mme Coghlan, ça allait relativement bien avec la fonctionnaire. Elle a constaté que la fonctionnaire n’avait pas beaucoup d’expérience en analyse de données qualitatives et a cru qu’il s’agissait d’une courbe d’apprentissage. Mme Coghlan a fourni des exemples de ses interactions avec la fonctionnaire.

[218]  Mme Coghlan a dit qu’elle travaillait du mardi au jeudi. Un jour, la fonctionnaire lui a téléphoné à la maison pour lui demander son aide afin de trouver une certaine information dans la base de données. Mme Coghlan lui a expliqué que l’information n’était pas dans la base de données, puisqu’elle avait déjà été publiée par l’équipe sur leur site Web. Elle a alors aidé la fonctionnaire à accéder à l’information en question.

[219]  Mme Coghlan a également mentionné que la fonctionnaire était au courant que l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux possédait des données démographiques. Un vendredi, une demande pour ce type de donnée a été reçue et la fonctionnaire a répondu par courriel que l’équipe ne possédait pas ces données. Mme Coghlan l’a constaté à son retour au travail. L’erreur avait été corrigée par une collègue, Mme Malizia, tel qu’il est indiqué dans un courriel de la fonctionnaire à Mme Malizia en date du 7 septembre 2012 (pièce E-15).

[220]  Mme Coghlan a préparé une série de rapports sur le sondage auprès des fonctionnaires fédéraux. Les ébauches de ces rapports ont été complétées à l’été 2012. Elle a demandé à la fonctionnaire de formuler des commentaires. Après quelques semaines, lors d’une discussion informelle avec Mme Lehouillier, cette dernière lui a demandé comment allaient les ébauches. Quand Mme Coghlan lui en a fait part, Mme Lehouillier lui a demandé de les partager avec elle et a convoqué une réunion avec la fonctionnaire et Mme Coghlan. Lors de cette réunion, la fonctionnaire a dit ne pas comprendre l’approche adoptée pour les rapports et que, si elle ne le comprenait pas, la population canadienne ne comprendrait pas non plus. Mme Lehouillier a dit à Mme Coghlan de continuer dans la même voie. Vu le retard, les rapports n’ont été publiés sur le site Web qu’à l’hiver 2013.

[221]  Un autre exemple fourni par Mme Coghlan concernait une demande d’analyse statistique à la suite du sondage de 2011. L’analyste qui avait fait l’analyse n’était plus à l’emploi de Statistique Canada. Il restait à en faire l’interprétation et à rédiger les rapports. Statistique Canada avait octroyé un contrat pour l’exécution de ces tâches à un consultant. Peu de temps après, Mme Coghlan a constaté que la validité de l’analyse statistique posait problème. Elle a dit avoir assez de connaissances pour savoir qu’il y avait quelque chose qui clochait. Elle en a fait part à la fonctionnaire à plusieurs reprises et celle-ci lui a répondu qu’elle devrait laisser faire les professionnels. Mme Coghlan a continué à exprimer ses doutes et en a parlé à Mme Lehouillier. Mme Coghlan lui a demandé s’il était approprié de communiquer avec l’ancien analyste de Statistique Canada pour discuter de l’interprétation afin d’avoir ses commentaires. Mme Lehouillier était d’accord. D’après l’analyste, l’interprétation était erronée et n’exprimait pas son intention. Mme Coghlan en a fait part à la fonctionnaire et a suggéré qu’elles consultent Mme Lehouillier, parce que le projet était à risque et qu’il était critique que Statistique Canada soit mis au courant du désaccord entre les analystes. La fonctionnaire lui a répondu que non et qu’il fallait attendre la prochaine rencontre avec Statistique Canada.

[222]  Mme Coghlan est quand même allée voir Mme Lehouillier, qui a immédiatement envoyé un courriel à Statistique Canada pour souligner le désaccord. Une rencontre entre Statistique Canada et toute l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux, incluant la fonctionnaire, a eu lieu. L’employé de Statistique Canada qui avait fait affaire avec le consultant a réagi très fortement. Statistique Canada ne voulait pas approuver l’interprétation du consultant et, par conséquent, aucun rapport n’a été publié. Selon Mme Coghlan, Mme Lehouillier lui a dit qu’elle avait bien agi, parce qu’aucun rapport erroné n’avait été publié. Toutefois, dans son rapport de gestion du rendement et d’apprentissage de mai-juin 2013, la fonctionnaire lui a reproché d’avoir appelé l’analyste de Statistique Canada et d’avoir miné les relations avec cette organisation. Son évaluation a ensuite été révisée par la haute gestion.

[223]  Mme Coghlan a dit qu’à maintes reprises, elle a aidé la fonctionnaire à rédiger des courriels, plus précisément des demandes d’information à la suite de la publication des résultats du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux. À ces occasions, elle restait à côté de la fonctionnaire pour l’aider à formuler les courriels.

[224]  Lorsque Mme Coghlan avait des désaccords avec la fonctionnaire relativement aux opérations professionnelles, elle le disait.

[225]  Mme Coghlan a dit qu’elle avait discuté avec Mme Lehouillier des problèmes qu’elle avait éprouvés avec la fonctionnaire. Mme Coghlan ne pensait pas que la situation se règlerait par elle-même et croyait qu’à titre de directrice, Mme Lehouillier devait être informée de ce qui se passait. Elle a dit que Mme Lehouillier avait pris ses commentaires au sérieux et que, à la suite d’une rencontre, Mme Lehouillier lui avait envoyé un résumé de la rencontre par courriel pour confirmer ce que Mme Coghlan lui avait dit. À cet égard, Mme Coghlan a cité le courriel de Mme Lehouillier, en date du 31 décembre 2012, et sa réponse en date du 16 janvier 2013 (pièce E-14). Dans son courriel, Mme Lehouillier a écrit qu’elle apprécierait d’autres exemples d’interaction entre Mme Coghlan et la fonctionnaire.

[226]  Dès janvier 2013, la fonctionnaire a eu connaissance que Mme Coghlan parlait avec Mme Lehouillier. Lors d’une conversation entre Mme Coghlan et la fonctionnaire, cette dernière lui a dit que, si elle avait des problèmes, il fallait en discuter avec elle en premier, conformément à la voie hiérarchique. Mme Coghlan s’est sentie mal à l’aise et était sous l’impression de n’avoir rien répondu, parce qu’elle ne pouvait pas respecter cet engagement et que, selon elle, elle avait le droit de parler à Mme Lehouillier. Après sa première rencontre avec Mme Lehouillier, celle-ci lui a dit que sa porte était ouverte pour discussion. Mme Coghlan a dit qu’en termes de travail, elle respectait les voies hiérarchiques. Elle s’est dite très malheureuse de la situation; elle était prête à changer d’emploi.

[227]  Mme Coghlan a ensuite été renvoyée à un échange de courriels entre elle et Mme Lehouillier, en date du 28 mars 2013 (pièce E-16, qui, en somme, est identique à la pièce S-6). Le premier courriel, envoyé par Mme Coghlan à 14 h 26, se lit comme suit : « [v]eux-tu encore des exemples? » La réponse de Mme Lehouillier, à 14 h 30, consistait en un seul mot en lettres majuscules: « OUI! » À 14 h 37, Mme Coghlan a fait parvenir à Mme Lehouillier un courriel que la fonctionnaire lui avait adressé le même jour, à 13 h 30, ayant trait à une comparaison entre le nombre de questions figurant dans les sondages de 2011 et de 2014. Après avoir critiqué le travail de la fonctionnaire, Mme Coghlan a ajouté qu’elle croyait qu’on ne pouvait pas s’y fier. La fonctionnaire lui avait demandé de vérifier des données que Mme Coghlan avait compilées elle-même pour une présentation, lesquelles portaient sur le nombre de questions relatives à chaque thème dans les sondages de 2011 et de 2014. Dans son courriel en réponse à la fonctionnaire, qui ne porte pas de date, Mme Coghlan lui a mentionné qu’il fallait aussi tenir compte des questions qui avaient été retirées ou modifiées et a indiqué en rouge les détails à corriger. Mme Coghlan ne se souvenait pas si Mme Lehouillier avait répondu à son courriel.

[228]  Mme Coghlan a mentionné un échange de courriels entre elle et Mme Lehouillier, en date du 5 juin 2013 (pièce E-17, qui est la version non caviardée de la pièce S-7). Dans cet échange, Mme Coghlan demandait à Mme Lehouillier ce qu’elle devait faire avec son rapport de gestion du rendement et d’apprentissage, préparé par la fonctionnaire, et avec lequel elle n’était pas d’accord. Plus particulièrement, elle n’était pas d’accord avec les commentaires négatifs concernant l’incident relatif à la modélisation par équation structurelle et la réaction de l’employé de Statistique Canada qui avait fait affaire avec un consultant. Le rapport mentionnait aussi que Mme Coghlan avait un rôle à jouer dans le fait que l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux était dysfonctionnelle et qu’elle n’agissait pas de manière constructive avec sa superviseure. Mme Coghlan en a parlé avec la fonctionnaire et Mme Kovacs. Le rapport a été révisé par la fonctionnaire et les commentaires concernant l’incident relatif à la réaction de l’employé de Statistique Canada ont été enlevés, mais ceux concernant l’incident relatif à la modélisation par équation structurelle ont été gardés. Mme Coghlan n’a pas signé le rapport. Mme Lehouillier a éventuellement refait son rapport de gestion du rendement et d’apprentissage et l’incident relatif à la modélisation par équation structurelle a été noté comme positif pour l’organisation.

[229]  À la question de savoir si elle avait parlé à la fonctionnaire du commentaire voulant qu’elle n’agisse pas de manière constructive avec sa superviseure, Mme Coghlan n’a pas répondu. Elle a dit que son rapport de gestion du rendement et d’apprentissage mentionnait qu’elle devait respecter les voies hiérarchiques. Quant au commentaire concernant son rôle dans une équipe dysfonctionnelle, Mme Coghlan a reconnu que ça n’allait pas bien dans l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux et qu’il y avait des problèmes. Un collègue avait des problèmes de rendement et une autre collègue en avait aussi.

[230]  Mme Coghlan a dit qu’à l’été 2012, elle avait rédigé huit ou neuf rapports de la série « Regard » pour le sondage de 2011, dont « Regard sur la mobilisation des employés » (pièce E-18) et « Regard sur l’innovation » (pièce E-19). Cependant, ces rapports n’ont été publiés qu’à l’hiver 2013, puisque la fonctionnaire ne les avait pas révisés et retournés à temps.

[231]  Mme Coghlan a dit que, quand elle rédigeait un rapport, elle n’avait aucun supérieur hiérarchique qui pouvait lui donner de la rétroaction constructive concernant le choix des mots. Il n’y avait personne pour approuver les résultats, les données qualitatives et l’interprétation.

[232]  En contre-interrogatoire, Mme Coghlan s’est dite déçue du départ de Mme Lehouillier, parce qu’elle était la seule qui connaissait la situation tendue au sein de l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux. Mme Coghlan se souvenait d’avoir rencontré Mme Nassrallah, le 11 avril 2013, et d’avoir discuté des mêmes choses dont elle avait discuté avec Mme Lehouillier. Elle lui a dit qu’elle était malheureuse, qu’elle avait reçu une offre d’emploi de Santé Canada et qu’elle quitterait si les choses ne s’amélioraient pas. Mme Nassrallah lui a dit qu’on prenait la situation au sérieux.

[233]  Mme Coghlan a été renvoyée au courriel du 11 avril 2013 de Mme Lehouillier à Mme Guilhem (pièce S-9), dans lequel il est indiqué que Mme Coghlan avait demandé que Mme Lehouillier assiste à la rencontre avec Mme Nassrallah. Mme Coghlan ne s’en souvenait pas, mais a dit que ce qui était écrit dans le courriel devait être correct. Toutefois, elle n’en avait pas reçu copie et en ignorait le contenu.

[234]  À la question de savoir quelle avait été sa réaction lorsqu’elle a appris le départ de la fonctionnaire de la division, Mme Coghlan a répondu qu’elle avait été soulagée.

7.  Mme Malizia

[235]  À l’époque pertinente, Mme Malizia était analyste, Secteur de la gouvernance, de la planification et des politiques, Bureau du dirigeant principal des ressources humaines, Conseil du Trésor. Elle était classifiée au groupe et au niveau EC‑06. Entre janvier et mars 2012, elle a été affectée temporairement à l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux pour aider à l’analyse des résultats du sondage en raison de son expérience avec les sondages précédents et en tant qu’experte en la matière. Au cours de cette période, la fonctionnaire a agi comme sa quasi-gestionnaire, en ce qu’elle gérait les activités de Mme Malizia, mais ses demandes de congé étaient traitées par la gestionnaire de son poste d’attache, soit Mme Kovacs.

[236]  En ce qui concerne les problèmes qu’elle a éprouvés pendant qu’elle travaillait avec la fonctionnaire, Mme Malizia a indiqué qu’à l’arrivée de la fonctionnaire, personne ne s’attendait à ce qu’elle ait beaucoup de connaissances au sujet de l’enquête. Mme Malizia a consacré une grande partie de son temps à l’encadrement de la fonctionnaire. Elle lui a expliqué le contexte et l’historique du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux et des questions, et l’a aidée avec les demandes de renseignements présentées au sujet du sondage. Après son retour à son poste d’attache, elle a continué d’aider la fonctionnaire à répondre aux questions et lui a offert un encadrement concernant divers aspects du sondage.

[237]  Mme Malizia a affirmé que, durant les deux premiers mois de son affectation, elle a offert du coaching à la fonctionnaire, à raison de 60 à 90 minutes par jour, dans son bureau ou dans le bureau de la fonctionnaire. En outre, des courriels ont été échangés entre elle et la fonctionnaire en vue d’aider cette dernière. Mme Malizia a indiqué qu’au début, la moitié de sa journée était consacrée à aider la fonctionnaire. Mme Kovacs souhaitait aider la fonctionnaire, tout en sachant que cette aide nuisait aux tâches de Mme Malizia.

[238]  À titre d’exemple de l’aide qu’elle a offerte à la fonctionnaire après son retour à son poste d’attache après mars 2012, Mme Malizia a d’abord mentionné les questions du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux, dont la plupart étaient posées de manière positive. Si la réponse était positive, le résultat était alors positif. Elle a ensuite donné l’exemple suivant d’une question posée de manière négative : « [l]a qualité de mon travail est affectée en raison d’un manque de stabilité. » Si la réponse à cette question est positive, le résultat est négatif. Mme Malizia a indiqué qu’elle l’avait expliqué à la fonctionnaire à maintes reprises à l’aide de mots, de symboles et parfois en mime. Elle a constaté que la fonctionnaire ne comprenait pas quand elle a vu les documents que cette dernière lui acheminait.

[239]  À titre d’exemple supplémentaire, Mme Malizia a mentionné la modélisation par équation structurelle, qui examine les relations entre les résultats et cerne les questions clés qui prévoient un résultat. Dans ce cas, le résultat était la mobilisation des employés. Mme Malizia a passé beaucoup de temps à expliquer l’analyse de la modélisation par équation structurelle à la fonctionnaire, mais elle était assez sûre que la fonctionnaire n’avait pas compris.

[240]  Dans le cadre de son coaching de la fonctionnaire, Mme Malizia l’a aidé à rédiger bon nombre de courriels. La fonctionnaire l’appelait à son bureau et Mme Malizia s’installait debout à côté de la fonctionnaire et lui dictait une partie du courriel. Souvent, elles discutaient du courriel au préalable, ce qui prenait plus de temps. Pendant les deux premiers mois de son affectation, Mme Malizia a aidé quotidiennement la fonctionnaire avec ses courriels. Son aide était moins fréquente par la suite et après son retour à son poste d’attache. Les courriels comprenaient des communications avec Mme Lehouillier, le sous‑ministre adjoint, les clients internes, les demandes du public, Statistique Canada et les centres de politiques du Conseil du Trésor.

[241]  Mme Malizia a indiqué que, toutes les fois, elle consacrait entre 30 à 60 minutes à aider la fonctionnaire avec ses courriels. Parfois, elle devait rester après son heure de départ habituelle, soit 17 h, parfois jusqu’à 18 h 30 ou 19 h, bien qu’elle ait informé la fonctionnaire qu’elle avait des obligations familiales. En janvier et février 2012, Mme Malizia a travaillé pendant ses heures du déjeuner et tard chaque soir pour aider la fonctionnaire.

[242]  À la question de savoir pourquoi elle l’avait fait, Mme Malizia a indiqué qu’elle avait foi dans le sondage auprès des fonctionnaires fédéraux et souhaitait qu’il soit un succès. Elle a ajouté qu’elle croyait en la fonctionnaire et souhaitait qu’elle réussisse. Elle a indiqué que la fonctionnaire était une personne chaleureuse, mais aussi émotive. Elle se présentait parfois au bureau de Mme Malizia en larmes et celle‑ci a laissé entendre que la fonctionnaire manquait de confiance et qu'elle souffrait d’insécurité. Son instinct était de l’aider.

[243]  La fonctionnaire a également discuté avec Mme Malizia des membres de l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux. Elle a indiqué que l’un d’eux était incompétent et qu’une autre était difficile. Elle a indiqué qu’elle avait dit à la personne difficile qu’elle était [traduction] « atteinte du syndrome prémenstruel ». Mme Malizia en a été horrifiée et a dit à la fonctionnaire de ne pas dire de telles choses, puisqu’elle pourrait être accusée de harcèlement. La fonctionnaire n’était pas d’accord.

[244]  Mme Malizia a indiqué que, même si elle n’avait travaillé avec la fonctionnaire que pendant trois mois, à l’invitation de Mme Kovacs, la fonctionnaire a contribué au rapport de gestion du rendement et d’apprentissage de Mme Malizia. Mme Malizia a souligné que sa réunion avec la fonctionnaire était en grande partie positive, sauf lorsque la fonctionnaire a affirmé que ses courriels étaient très détaillés. Mme Malizia a répondu qu’ils étaient détaillés, parce que la fonctionnaire était nouvelle et qu’elle voulait l’aider à comprendre. La fonctionnaire a répondu qu’elle n’était pas aussi stupide que Mme Malizia le pensait. Mme Malizia a dit que ce n’était pas ce qu’elle pensait. Elle a passé le reste de l’entrevue à essayer de soutenir la fonctionnaire, puisqu’elle était en larmes. La fonctionnaire a ensuite demandé à Mme Malizia si elle souhaitait dire quoi que ce soit à son sujet, mais après sa réaction, elle n’aurait rien dit de négatif. Elle a relaté ces événements à Mme Lehouillier, qui avait déjà été sa directrice.

[245]  La fonctionnaire a participé au programme du Secrétariat du Conseil du Trésor en développement du leadership comportant une évaluation à 360° et a demandé à Mme Malizia d’y participer. Mme Malizia a dit qu’elle avait pris l’évaluation au sérieux et qu’elle s’était assurée de formuler chaque commentaire comme une critique constructive, soit sa façon de dire à la fonctionnaire comment améliorer les choses. Un certain nombre de ses collègues ont également été invités à participer et leur but était d’en faire un exercice positif.

[246]  Mme Malizia a abordé certaines de ses préoccupations concernant la fonctionnaire avec Mme Kovacs, qui savait qu’elle travaillait avec la fonctionnaire. Elle a indiqué que Mme Kovacs était gentille et qu’elle était au courant que Mme Malizia avait l’expérience nécessaire pour aider la fonctionnaire. Mme Kovacs a signalé que Mme Malizia pouvait continuer d’offrir une aide pendant une certaine période, mais qu’une transition était nécessaire afin d’éliminer progressivement l’aide. Selon Mme Malizia, Mme Kovacs avait discuté avec Mme Lehouillier de cette question.

[247]  Mme Malizia a ensuite fait un commentaire au sujet d’un courriel en date du lundi 1er octobre 2012, qu’elle a envoyé à Mme Lehouillier et qui incluait une copie collée d’un courriel que la fonctionnaire avait envoyé le même jour à Mme Kovacs et à un autre gestionnaire (pièce E‑1, onglet 18). Mme Malizia avait rencontré Mme Lehouillier le même jour pour se plaindre du courriel et Mme Lehouillier lui avait demandé de le lui acheminer. Dans son courriel, la fonctionnaire avait écrit que la semaine précédente, les demandes présentées par Mme Malizia avaient monopolisé l’équipe pendant 2,5 jours‑personnes et que, par conséquent, elle a eu de la difficulté à répondre rapidement à ses demandes.

[248]  Mme Malizia a expliqué que le vendredi précédent, le 28 septembre 2012, elle avait été chargée du tableau de bord pour la fonction publique, qui contient des données démographiques pour l’ensemble de la fonction publique et pour chaque ministère. Certaines de ces données provenaient du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux, tandis que d’autres provenaient d’autres contributeurs. L’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux obtient les données et met à jour le tableau de bord trimestriellement. La personne qui est responsable des données doit supposer qu’elles sont exactes. Mme Malizia a demandé à la fonctionnaire de vérifier si les données étaient exactes, mais la fonctionnaire voulait attendre, parce que certains membres de l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux étaient absents. Mme Malizia a dit qu’elle avait envoyé sept courriels à la fonctionnaire et qu’elles s’étaient rencontrées en personne deux fois à ce sujet. Elle a également dit à la fonctionnaire de ne pas oublier les réponses négatives.

[249]  Mme Malizia m'a renvoyé à un échange de courriels entre elle et Mme Kovacs, en date du 28 septembre et du 1er octobre 2012, concernant son interaction avec la fonctionnaire (pièce E‑20). En fin de compte, les données n’ont pas été vérifiées. Mme Malizia était frustrée que la fonctionnaire ne comprenne pas. Elle estimait qu’elle rendait service à la fonctionnaire, puisqu’il s’agissait des données du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux. À un moment donné, la fonctionnaire s’est présentée au bureau de Mme Malizia pour lui dire que cette responsabilité ne lui incombait pas; son ton était dur. Mme Malizia a répondu qu’elle devrait comprendre qu’il s’agissait de sa responsabilité à titre de gestionnaire du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux. Lorsque la fonctionnaire a indiqué qu’elle ne souhaitait pas nuire à leur relation, Mme Malizia a renvoyé au courriel de la fonctionnaire. La fonctionnaire a d’abord nié l’avoir envoyé, mais lorsque Mme Malizia lui a dit qu’elle l’avait vu, la fonctionnaire a été contrariée, parce que Mme Kovacs l’avait montré à Mme Malizia. Après que Mme Kovacs lui eût montré le courriel, Mme Malizia est allée voir Mme Lehouillier; elle ne se souvenait toutefois pas de leur discussion, puisqu’elle était contrariée à ce moment‑là.

[250]  Mme Malizia a ensuite fait référence à une demande de résultats démographiques découlant du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux provenant de la boîte aux lettres de demandes de renseignements de l’Outil de requête automatisé sur la gestion de l’information des personnes. La demande visait le plus haut niveau d’études terminé. Lorsqu’une question est reçue dans la boîte aux lettres de l’Outil de requête automatisé, elle est renvoyée à la personne responsable de l’information. Mme Malizia a indiqué que, dans son courriel à Mme Coghlan en date du 29 novembre 2012 (pièce E‑15), elle a affirmé qu’il y avait eu deux ou trois demandes visant la même information et que la fonctionnaire avait dit que l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux n’avait pas les données, alors que l’information était disponible sur le lecteur commun. Les livres de code du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux dont fait mention Mme Malizia dans son courriel contiennent la fréquence des réponses à chaque question des sondages de 2008 et de 2011. Mme Malizia a indiqué que, dans les résultats du sondage de 2011 (pièce 15‑B), la question L‑Q93 traitait des niveaux de scolarité.

[251]  À la question de savoir si elle avait déjà eu des discussions avec la fonctionnaire au sujet de questions relatives au sondage de 2011 auprès des fonctionnaires fédéraux, Mme Malizia a répondu qu’elles n’avaient discuté que des questions posées de façon négative. Elle a mentionné les résultats du sondage de 2011, tel qu’ils sont affichés sur le site Web du Secrétariat du Conseil du Trésor (pièce E-21), et a expliqué qu’une réponse affirmative aux questions suivantes constituait une réponse négative : « [j]’estime que la qualité de mon travail est minée parce que […] les priorités changent constamment » (question 18a); « [j]’estime que la qualité de mon travail est minée parce que […] mon ministère ou organisme manque de stabilité » (question 18b);« [j]’estime que la qualité de mon travail est minée parce que […] il y a un trop grand nombre d’étapes d’approbation » (question 18c). Mme Malizia a indiqué qu’elle l’avait expliqué à la fonctionnaire de nombreuses façons, y compris en utilisant des émoticônes souriantes.

[252]  En contre‑interrogatoire, Mme Malizia a affirmé qu’elle avait été affectée à l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux en vue d’aider à l’analyse des résultats, ce que la fonctionnaire ne semblait pas comprendre. À la question de savoir si le coaching de la fonctionnaire faisait partie de ses tâches, Mme Malizia a indiqué que l’analyse préliminaire des résultats du sondage devait être effectuée au cours d’une courte période, puisqu’elle devait être affichée sur le site Web du Secrétariat du Conseil du Trésor. Puisqu’il y avait un nouveau gestionnaire, elle a pris l’initiative de l’aider, bien qu’aucun gestionnaire ne lui avait demandé de le faire.

[253]  À la question de savoir pourquoi, après avoir éprouvé de la frustration à l’égard de la fonctionnaire et travaillé des heures supplémentaires, elle n’a pas mis fin au coaching, Mme Malizia a répondu qu’elle avait pitié de la fonctionnaire, puisqu’elle était perdue. Bien que Mme Malizia estime que le fonctionnaire aurait dû comprendre ses tâches plus rapidement, cette dernière a continué de demander son aide. De plus, à titre de quasi-gestionnaire de Mme Malizia, la fonctionnaire aurait pu lui ordonner de l’aider. Mme Malizia a informé Mme Kovacs de la situation après mars 2012. Mme Malizia aurait pu dire à la fonctionnaire qu’elle mettait fin au coaching, mais cela n’aurait pas été collaboratif.

[254]  En ce qui concerne les courriels, Mme Malizia a demandé à la fonctionnaire pourquoi elle ne pouvait pas les rédiger à son propre bureau, ce à quoi la fonctionnaire lui a répondu de rester à proximité d’elle. La fonctionnaire estimait que cela faisait partie des fonctions de Mme Malizia, mais cette dernière n’a reçu aucune copie conforme des courriels, même s’il s’agissait de ses mots et de ses directives. Elle n’a pas arrêté d’aider la fonctionnaire, parce qu’elle fait ce que ses gestionnaires lui demandent. Mme Malizia a indiqué que cette situation s’est poursuivie très longtemps et qu’elle estimait que, au bout de deux mois, la fonctionnaire pourrait rédiger ses propres courriels. Mme Malizia a souligné qu’il serait simpliste de dire qu’elle a choisi de continuer d’aider la fonctionnaire et elle a répété que la fonctionnaire se présentait à son bureau en larmes et lui demandait de l’aider, parce qu’elle ne comprenait pas.

[255]  Mme Malizia a indiqué qu’elle n’avait jamais demandé d’être rémunérée pour les heures supplémentaires travaillées. De façon générale, elle se présentait au bureau de la fonctionnaire pour dire au revoir lorsqu’elle quittait le travail et celle-ci lui disait alors que quelque chose était urgent. À d’autres occasions, la fonctionnaire se présentait au bureau de Mme Malizia et lui disait qu’une tâche devait être accomplie avant de partir. Mme Malizia a affirmé que cela se produisait très souvent. À la question de savoir si elle a dit à la fonctionnaire qu’elle ne pouvait pas travailler des heures supplémentaires, Mme Malizia a indiqué qu’elle informait la fonctionnaire qu’elle devait s’occuper d’un des membres de sa famille et que la fonctionnaire lui répondait qu’elle aussi avait des obligations familiales. À la question de savoir si elle s’était plainte auprès d’un représentant syndical, Mme Malizia a répondu par la négative, mais a ajouté qu’elle en avait informé Mme Kovacs.

8.  M. MacLeod

[256]  M. MacLeod était le sous-ministre adjoint, Secteur de la gouvernance, de la planification et des politiques, Bureau du dirigeant principal des ressources humaines, Conseil du Trésor, de mars 2010 jusqu’au 30 octobre 2014. En conséquence, il était chargé des politiques en matière de ressources humaines et de gestion pour le gouvernement du Canada. Ses responsabilités comprenaient la modernisation des pratiques en matière de ressources humaines, de l’intégrité des valeurs et de l’éthique dans le secteur public fédéral, et en matière de langues officielles dans le secteur public fédéral, y compris les tribunaux, les sociétés d’État et les organismes gouvernementaux.

[257]  M. MacLeod a affirmé qu’il avait mis fin à l’emploi de la fonctionnaire en raison de son rendement insuffisant continu par rapport à son groupe et niveau, et ce, bien que ses objectifs aient été clairement énoncés depuis le début et que trois gestionnaires aient offert un soutien continu, notamment du coaching, de la formation, des offres de mentorat et l’examen de deux affectations que la direction estimait mieux lui convenir, dont une a été refusée. La dernière affectation de la fonctionnaire constituait une occasion d’exécuter ses fonctions sans avoir de personnel à superviser et de travailler avec une autre gestionnaire et dans un autre domaine.

[258]  En ce qui concerne la clarté des objectifs communiqués à la fonctionnaire, M. MacLeod a indiqué que, dans le cadre du processus de gestion du rendement au Secrétariat du Conseil du Trésor, tous les employés étaient visés par une entente de gestion du rendement (EGR) énonçant les objectifs pour l’année. Dans le cas de la fonctionnaire, les objectifs énoncés ont été jugés appropriés pour son groupe et niveau. Il a affirmé que le Conseil du Trésor était l’employeur le plus important du groupe EC et que le groupe d’EC de M. MacLeod était le plus important au sein du Conseil du Trésor. À la suite du premier examen semestriel du rendement de la fonctionnaire, de plus amples précisions ont été ajoutées au plan de travail régulier.

[259]  En ce qui concerne comment il pouvait savoir que les objectifs avaient été clairement communiqués à la fonctionnaire, M. MacLeod a indiqué qu’un processus était en place pour examiner le rendement de tous les cadres supérieurs afin de s’assurer que la rétroaction fournie aux employés était raisonnable et appropriée dans le contexte de l’ensemble du secteur du Secrétariat du Conseil du Trésor. L’ensemble de l’équipe de gestion a eu l’occasion d’examiner les commentaires fournis. Dans le cas de la fonctionnaire, M. MacLeod connaissait bien les trois superviseures qui ont fourni une rétroaction et il estimait qu’elles étaient des gestionnaires compétentes qui réalisaient bien ce processus.

[260]  L’équipe de gestion était constituée d’un comité exécutif dont la taille et la composition variaient et qui était composé de quatre directeurs exécutifs, d’un directeur principal, et de six à huit directeurs. Le comité se rencontrait deux fois par année pour examiner le rendement, une fois à la mi-année et une fois à la fin de l’année, en avril, en vue d’examiner les résultats définitifs de chaque employé. M. MacLeod présidait les réunions.

[261]  En décrivant le fonctionnement du comité exécutif, M. MacLeod a dit que les résultats du rendement des employés principaux, y compris la fonctionnaire, avaient été fournis à tous les membres du comité. Ils ont examiné les documents et se sont réunis deux ou trois fois pour s’assurer que les cotes étaient raisonnables et appropriées les unes par rapport aux autres. Le comité a également examiné toutes les questions liées à la gestion générale dans le secteur et le programme d’élaboration de politiques.

[262]  Le rendement insuffisant de la fonctionnaire pendant plus d’une année a été pris en considération par M. MacLeod avant de la licencier. Même si les superviseures de la fonctionnaire lui ont accordé une aide importante, il n’y a eu aucune amélioration conséquente. Une rétroaction a clairement été fournie et M. MacLeod a examiné tous les documents pertinents; ces documents ont également été discutés à la réunion du comité de gestion. Un investissement important a été consacré à la formation et à l’encadrement de la fonctionnaire, ainsi qu’à sa participation au Forum de développement professionnel de la Communauté nationale des gestionnaires. Des occasions d’affectation lui permettant de trouver un poste où elle pourrait mieux réussir ont également été offertes à la fonctionnaire. M. MacLeod a indiqué qu’il existait parfois des problèmes de chimie et, par conséquent, il a cherché un poste qui répondait mieux aux capacités et aux compétences de la fonctionnaire. Il a ordonné à une directrice principale, Mme Tattrie, d’offrir un poste à la fonctionnaire en vue de l’aider à réussir dans son groupe et niveau. Puisqu’il n’y avait aucune indication qu’elle obtiendrait les résultats escomptés, il a décidé de la licencier.

[263]  Les documents concernant la rétroaction que M. MacLeod a examinés étaient composés de l’entente de rendement et de la première communication de Mme Lehouillier en 2012. Il a vu le plan de travail continu préparé par Mme Lehouillier, qui offrait une orientation précise à la fonctionnaire et une rétroaction quant à son rendement par rapport aux objectifs. Il a examiné les documents des différentes superviseures et de l’équipe de gestion du rendement. Il a affirmé que les documents étaient élaborés de la même manière, qu’ils comportaient des objectifs entièrement clairs et que, par conséquent, la fonctionnaire savait exactement ce qu’elle devait faire.

[264]  M. MacLeod a affirmé que l’affectation de la fonctionnaire auprès de Mme Tattrie est survenue dans le cadre de l’examen de la gestion de son rendement, durant lequel on a discuté des endroits où la fonctionnaire aurait une possibilité de réussir. Mme Tattrie mettait sur pied une équipe en vue de mettre en œuvre la nouvelle directive sur la gestion du rendement. M. MacLeod a ordonné que l’affectation ait lieu et le comité de gestion a appuyé cette décision, en tant que bonne occasion de succès, puisque la fonctionnaire collaborerait avec une nouvelle gestionnaire dans un nouveau domaine.

[265]  M. MacLeod a ensuite été renvoyé à la partie de la lettre de licenciement dans laquelle il est indiqué que la fonctionnaire avait eu l’occasion de fournir ses commentaires et sa rétroaction concernant les plans de travail. À la question de savoir s’il a tenu compte des commentaires écrits de la fonctionnaire, il a répondu par l’affirmative, puisqu’ils figuraient au dossier. Il a ajouté qu’il savait que les directeurs avaient examiné certains commentaires en particulier, mais que cela n’avait eu aucune incidence sur sa décision. Selon le résultat, le rendement de la fonctionnaire ne s’était pas amélioré.

[266]  M. MacLeod a affirmé que la classification au groupe et au niveau EC‑07 est supérieure et qu’on s’attend à ce que l’employé ainsi classifié offre une contribution maximale. À ce niveau, l’employé est le gestionnaire responsable d’un dossier et il doit avoir des connaissances fondamentales et faisant autorité quant au travail à accomplir et la capacité de travailler avec des collaborateurs dans l’ensemble du gouvernement. L’employé doit également élaborer fondamentalement le contexte des dossiers traités. Puisqu’au sein du Conseil du Trésor, à titre d’organisme central, la portée, la complexité et l’incidence des dossiers de l’organisation de M. MacLeod attiraient l’attention de l’ensemble du gouvernement au niveau des sous‑ministres et même au niveau des ministres, les attentes étaient élevées.

[267]  À la suite d’une demande à cet égard, M. MacLeod a fourni des précisions sur la section « Capacités » de l’énoncé des critères de mérite du poste de la fonctionnaire (pièce E‑22). La première de ces capacités est la « capacité de maintenir des réseaux et d’établir des relations avec les ministères clients ». Il a indiqué que la personne doit être en mesure de travailler avec d’autres intervenants au sein du Secrétariat du Conseil du Trésor et avec d’autres interlocuteurs. En ce qui concerne le sondage de 2014 auprès des fonctionnaires fédéraux, cela signifiait de travailler avec des collègues de haut niveau des Ressources humaines, avec les fournisseurs de services, par exemple Statistique Canada, et avec des collègues qui sont des agents négociateurs, lesquels formulent des commentaires concernant le sondage.

[268]  La deuxième capacité est la « capacité de communiquer efficacement de vive voix et par écrit » et signifie que la personne est en mesure de faire une présentation rigoureuse au cours de réunions, et ce, avec un niveau élevé de compétence et de compréhension, ce qui comprend la prestation de conseils et une analyse faisant autorité. À titre d’exemples, M. MacLeod a inclus la collaboration avec d’autres ministères dans la mise en œuvre de la nouvelle directive sur la gestion du rendement, l’élaboration de réponses communes, la consultation avec des experts et la synthèse des conseils sans l’intervention d’un superviseur. Cela comprend le travail visant pratiquement n’importe quel public, qu’il s’agisse d’un sous‑ministre, du président d’un agent négociateur ou de M. MacLeod lui‑même.

[269]  La troisième capacité est la « capacité de penser de façon analytique ». Il s’agit d’une compétence de base du groupe EC et d’un des premiers facteurs que les gestionnaires examinent lorsqu’ils dotent un poste dans ce groupe. Une personne qui a cette capacité est en mesure de prendre les données, les principes et la recherche et de les intégrer dans des produits sophistiqués qui sont à la fois solides sur le plan analytique et faciles à comprendre.

[270]  La quatrième capacité est la « capacité de travailler efficacement en équipe ». Dans le cadre de la gestion d’une équipe, il faut travailler de manière efficace avec les employés et s’assurer que les travaux requis sont accomplis. Les produits de l’équipe doivent être solides et résister à un examen minutieux dans plusieurs forums. Cette capacité signifie également que la personne est en mesure de travailler avec une équipe élargie, composée d’intervenants provenant de l’extérieur du Secrétariat du Conseil du Trésor, d’obtenir leur point de vue, d’être à l’écoute de leurs préoccupations et de soupeser les différents points de vue afin de créer des produits finaux qui tiennent compte du consensus du groupe et de démontrer une valeur ajoutée par la contribution de ces intervenants.

[271]  La cinquième capacité est la « capacité de faire la synthèse d’ensembles d’information vastes et diversifiés pour pouvoir fournir des conseils », ce qui implique d’avoir recours à diverses sources de renseignements et de données pour produire les résultats. La personne doit examiner diverses recherches, données et pratiques exemplaires provenant d’autres organisations et les traduire en une analyse et en des conseils convaincants à l’intention des cadres, comme les sous-ministres, les sous‑ministres adjoints et les chefs des Ressources humaines.

[272]  La dernière capacité est la « capacité d’organiser et de superviser le travail pour respecter des échéances serrées et souvent conflictuelles ». M. MacLeod a indiqué que, dans le cadre de la gestion du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux et de la mise en œuvre de la nouvelle directive sur la gestion du rendement, il y avait des délais clairs et rigoureux. Dans tout projet, la capacité de respecter le délai exige que la personne respecte la plupart, sinon tous les délais internes. Il s’agit d’une compétence de gestion essentielle, surtout pour les analystes principaux, afin de diriger des projets importants. Dans le cas des sondages auprès des fonctionnaires fédéraux, l’inobservation des délais peut avoir une incidence importante. Il s’agissait d’un projet d’un million de dollars approuvé par le président du Conseil du Trésor et touchant 200 000 employés. Il était utilisé par les sous‑ministres en vue de mieux gérer leurs ministères. Du point de vue opérationnel, Statistique Canada disposait d’un délai particulier pour exécuter le sondage. Lorsqu’un projet horizontal est exécuté dans l’ensemble du gouvernement, un grand nombre de gens provenant d’autres organisations y participent et il est important qu’ils reçoivent ce dont ils ont besoin à temps pour faire leur travail.

[273]  M. MacLeod a été renvoyé à une section de la lettre de licenciement qui indiquait que le jugement de la fonctionnaire constituait un problème. Il a affirmé que, conformément aux renseignements qui lui ont été fournis, il existait clairement des problèmes relatifs à son personnel et à la façon dont elle s’organisait pour accomplir les travaux. En ce qui concerne les tâches attribuées à la fonctionnaire dans le groupe de la mise en œuvre de la nouvelle directive sur la gestion du rendement, le problème était lié à la consultation peu fréquente des experts en la matière au sujet des questions. Une ressource très riche et chevronnée dans ce domaine n’a pas été entièrement utilisée comme elle aurait dû l’être. Cela présentait un obstacle au succès de l’initiative, parce que le Bureau du dirigeant principal des ressources humaines s’en remet à ses propres experts, ainsi qu’aux collègues d’autres ministères, dont les conseils lui sont essentiels.

[274]  Un autre problème mentionné dans la lettre de licenciement était la capacité de la fonctionnaire à comprendre les éléments liés à son travail. M. MacLeod a indiqué que cela renvoyait à l’obligation de travailler en consultation avec la communauté d’experts afin de préparer des documents qui peuvent être utilisés avec peu d’intervention de la part du superviseur, ce qui n’était pas le cas de la fonctionnaire.

[275]  Le problème de communication de la fonctionnaire concernait ses collègues dans le domaine des relations de travail. Leurs conseils étaient essentiels. En ne communiquant pas avec eux et en s’abstenant de recourir à leur expertise, elle n’utilisait pas une ressource importante. En outre, les documents écrits présentés par la fonctionnaire nécessitaient une révision considérable.

[276]  À la question de savoir s’il avait rencontré la fonctionnaire, M. MacLeod a indiqué qu’il l’avait rencontré quelques fois en vue de discuter de dossiers qu’elle traitait dans le cadre du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux. Il ne l’a pas rencontré pour discuter des problèmes liés à son rendement, parce que ces problèmes étaient traités par ses gestionnaires.

[277]  En contre‑interrogatoire, M. MacLeod affirmé qu’il avait examiné les rapports de gestion du rendement et d’apprentissage de la fonctionnaire. Il a été renvoyé au rapport de gestion du rendement et d’apprentissage de la fonctionnaire pour la période du 1er avril 2012 au 31 mars 2013 (pièce S‑8), qui mentionne ce qui suit au sujet de la période du 1er octobre 2012 au 31 mars 2013 : [traduction] « [a]u cours des six derniers mois, Shirley a réussi à réaliser tous ses objectifs de travail, malgré le fait que son équipe était plutôt difficile à gérer. » À la question de savoir si les objectifs de travail de la fonctionnaire avaient été atteints, M. MacLeod a répondu que le rapport comptait deux parties pour cette période et que, même si les objectifs de travail avaient été atteints, le prochain paragraphe énonçait qu’elle devait améliorer ses compétences clés en matière de gestion. Plus précisément, la fonctionnaire devait améliorer son style de communication et son approche dans le milieu de travail, puisque cela avait un impact sur son équipe et ses collègues quant à la façon dont le travail est livré, et que c’était une source de frustrations. Le même rapport de gestion du rendement et d’apprentissage de la fonctionnaire indiquait que [traduction] « De plus, les répercussions se traduisent souvent par le fait que Shirley est perçue comme n’étant pas en mesure de faire preuve de jugement efficace ou de comprendre le travail en soi. » De même, bien que le rapport indique que la fonctionnaire a atteint quatre des objectifs de son plan de travail, elle ne les a pas tous atteints, ce qui a donné lieu à une cote générale de « Réussi - ».

[278]  À la question de savoir s’il avait examiné le plan de travail de la fonctionnaire (pièce E‑1, onglet 3) avant de décider de la licencier, M. MacLeod a répondu qu’il avait examiné des documents connexes (dont il n’a pas précisé la nature) et qu’il n’était pas le gestionnaire. À la question de savoir comment le plan de travail pouvait aider la fonctionnaire en ce qui concerne la clarification des attentes, M. MacLeod a indiqué qu’un certain nombre d’objectifs étaient énoncés, notamment les engagements de la fonctionnaire et l’attribution des tâches par le gestionnaire. Certains des engagements étaient concrets, comme l’exécution des travaux conformément aux délais. M. MacLeod a indiqué qu’il n’était pas au courant de la mesure dans laquelle la fonctionnaire s’était acquittée de ses engagements, mais que la direction déterminait les travaux à accomplir. Il a toutefois ajouté qu’il avait foi dans les opinions de Mmes Lehouillier, Kovacs et Tattrie à l’égard de la capacité de la fonctionnaire à atteindre ses objectifs de travail.

[279]  M. MacLeod a dit qu’il était au courant de la formation offerte à la fonctionnaire dans le contexte de la gestion, soit l’encadrement seul à seul de la Commission de la fonction publique, le programme du Secrétariat du Conseil du Trésor en développement du leadership et le Forum de développement professionnel de la Communauté nationale des gestionnaires. En tant que responsable de ce forum, il savait combien il était utile et qu’uniquement 1 000 des 40 000 gestionnaires avaient la possibilité d’y assister.

[280]  M. MacLeod a ensuite été renvoyé à un échange de courriels entre M. Béliveau et Mme Tattrie en date du 22 juillet 2013 (pièce S‑18), dans lequel Mme Tattrie a affirmé qu’elle n’estimait pas que du coaching supplémentaire aiderait la fonctionnaire et qu’elle était d’avis que la fonctionnaire devrait envisager d’autres postes. M. MacLeod a signalé qu’il n’avait pas pris connaissance de ce courriel avant de décider de licencier la fonctionnaire, mais qu’il était au courant que le coaching était offert, conformément à ce qui avait été discuté à la réunion du comité de gestion. Il était d’avis que ce courriel ne signifiait pas que Mme Tattrie avait indiqué qu’aucun coaching n’avait été offert. En tant que sous‑ministre adjoint qui devait approuver la formation, il savait, en consultant le budget, que la fonctionnaire avait suivi une formation. Il s’agissait d’un investissement considérable par rapport à celui effectué à l’égard d’autres employés ou d’autres cadres. De plus, la formation a été offerte pendant la période où la fonctionnaire faisait partie de son organisation. M. MacLeod ne savait pas si une formation ou du coaching avait été offert à la fonctionnaire après juin 2013, puisqu’il n’était pas le gestionnaire.

[281]  M. MacLeod a été renvoyé à la lettre datée du 6 juin 2013 à l’intention de Mme Tattrie, qui énonce les modalités de l’affectation de la fonctionnaire (pièce E‑1, onglet 24), y compris l’élaboration d’un plan de formation. À la question de savoir s’il avait fait un suivi afin de s’assurer qu’un plan de formation avait réellement été élaboré, M. MacLeod a répondu qu’il serait extrêmement rare qu’un sous‑ministre adjoint chargé de 200 employés examine un plan de formation. Il a ajouté que cette tâche incombait à Mme Tattrie. Il a répété qu’il savait qu’une formation avait été offerte à la fonctionnaire et qu’il aurait vu les documents avant de prendre sa décision. À la question de savoir si un employé devait suivre une formation avant une nouvelle affectation, M. MacLeod a indiqué qu’il s’agissait d’une question à laquelle seules Mme Tattrie et la fonctionnaire pouvaient répondre et que les employés ne suivent pas nécessairement une formation immédiatement lors de leur entrée en poste dans le cadre d’une nouvelle affectation.

[282]  Étant donné que la lettre renvoyait également à la rétroaction écrite, M. MacLeod a été interrogé à savoir si ce type de rétroaction avait été fourni à la fonctionnaire, ce à quoi il a répondu qu’il en avait été question et qu’il avait été informé que Mme Tattrie avait fourni une rétroaction.

[283]  M. MacLeod a été renvoyé au courriel de Mme Tattrie à l’intention de la fonctionnaire en date du 18 novembre 2013, qui indique qu’elle avait joint des plans de travail (pièce S‑17) identifiés par Mme Tattrie comme étant ceux de juin, juillet et septembre 2013. Il a affirmé qu’il n’avait pas connaissance de ce courriel, mais qu’il savait que des réunions bilatérales et des plans écrits avaient été offerts. À la question de savoir s’il était important que la fonctionnaire reçoive les plans de travail à temps, M. MacLeod a affirmé qu’il aurait souhaité savoir qu’elle avait reçu les plans de travail ou qu’elle avait eu une discussion avec Mme Tattrie.

[284]  Pour ce qui est de la lettre d’offre concernant une affectation au sein de l’équipe des langues officielles, M. MacLeod a indiqué que cette question avait fait l’objet d’une discussion avec la fonctionnaire, mais que cette affectation ne l’intéressait pas. À la question de savoir s’il savait que la fonctionnaire avait été informée que, si elle refusait l’affectation avec Mme Tattrie, elle pourrait être licenciée, M. MacLeod a indiqué que l’offre avait été faite de bonne foi en vue de lui donner l’occasion de réussir auprès d’une gestionnaire compétente comme Mme Tattrie. La lettre de licenciement énonçait les possibilités offertes à la fonctionnaire afin de lui donner une chance raisonnable de réussir, y compris la formation, du coaching et les deux possibilités d’affectation. À sa connaissance, aucun ultimatum n’avait été donné à la fonctionnaire selon lequel elle devait accepter l’offre ou être licenciée.

[285]  M. MacLeod a été renvoyé à un courriel que la fonctionnaire avait rédigé à l’intention du dirigeant principal des ressources humaines en date du 5 décembre 2013, et qu’elle lui a fait suivre le 8 décembre 2013. Dans ce courriel, elle formule des allégations concernant un processus de gestion du rendement vicié (pièce S‑23). M. MacLeod a indiqué qu’il n’avait pas répondu, puisqu’il s’agissait d’un cas des relations de travail et que le Secrétariat du Conseil du Trésor avait un processus à cette fin. À la question de savoir s’il aurait été utile d’entendre ce que la fonctionnaire avait à dire à ce sujet, il a répondu qu’il n’estimait pas nécessaire de tenir une réunion avec elle. Elle avait fourni suffisamment de rétroaction tout au long du processus et cette rétroaction avait été discutée à fond avec le comité de gestion.

[286]  En réinterrogatoire, en ce qui concerne le plan de formation et de perfectionnement de la fonctionnaire pendant son affectation avec Mme Tattrie, M. MacLeod a fait référence à un document d’une page, sans date, intitulé [traduction] « Renseignements sur le plan de travail et les rapports hiérarchiques, conformément à la lettre d’affectation » (pièce E‑1, onglet 26) et il a m’a renvoyé au point 4, qui affirmait que la fonctionnaire et Mme Tattrie s’étaient entendues pour qu’aucun tel plan ne soit requis.

[287]  M. MacLeod a été renvoyé au courriel de Mme Tattrie daté du 30 janvier 2014 (pièce E‑1, onglet 28), dans lequel elle a consigné la préoccupation de la fonctionnaire selon laquelle elle estimait que le format et le contenu du modèle du plan de travail de son poste à l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux ne tenaient pas compte de son rendement et que celui-ci n’était pas mesurable, plus particulièrement en ce qui concerne les compétences et la façon dont les travaux étaient accomplis. M. MacLeod a indiqué qu’il était au courant de l’essentiel du courriel et il a affirmé qu’en ce qui concerne la gestion du rendement dans l’ensemble du gouvernement, il importe d’évaluer non seulement le travail effectué, mais aussi la façon dont le travail est exécuté. Bien que l’argument relatif à la question de savoir si les compétences sont mesurables constitue un débat dans le cadre de la gestion du rendement, il est attendu des employés qu’ils soient en mesure de démontrer les compétences requises pour leur poste. M. MacLeod n’était pas au courant du désaccord entre la fonctionnaire et Mme Tattrie concernant le modèle, mais il savait que de la rétroaction avait été fournie à la fonctionnaire, verbalement et par écrit.

9.  Mme Chatterton

[288]  Depuis octobre 2014, Mme Chatterton est gestionnaire au sein d’Emploi et Développement social Canada (tel qu’il est maintenant connu). Elle occupait antérieurement un poste d’analyste/conseillère, Secteur de la gouvernance, de la planification et des politiques, Bureau du dirigeant principal des ressources humaines, Conseil du Trésor, de 2009 à août 2013. Dans le cadre de son travail avec le sondage de 2014 auprès des fonctionnaires fédéraux, la fonctionnaire a été sa gestionnaire pendant environ un an et demi, soit jusqu’à ce que cette dernière soit remplacée par Mme Kovacs.

[289]  Mme Chatterton avait divers problèmes liés au travail avec la fonctionnaire. Elle devait consacrer plus de temps que prévu à aider la fonctionnaire, y compris à lui montrer de nouveau certaines choses, ce qui prenait du temps dont elle avait besoin pour accomplir son propre travail. Elle a passé beaucoup de temps dans le bureau de la fonctionnaire, quasi quotidiennement, pour lui dicter le contenu simple du travail, comme les courriels et les présentations.

[290]  Cependant, lorsqu’elle a demandé de l’aide ou des conseils à la fonctionnaire pour son propre travail, cette dernière ramenait rapidement la conversation à elle-même. La fonctionnaire commençait à pleurer et Mme Chatterton la consolait; par conséquent, le problème de Mme Chatterton était rapidement oublié.

[291]  Mme Chatterton était également parfois insultée par la fonctionnaire et n’appréciait pas ses commentaires. À une occasion, la fonctionnaire a mentionné que Mme Chatterton ne souriait pas suffisamment. Une autre fois, devant un collègue, la fonctionnaire a demandé à Mme Chatterton à quelle religion elle appartenait. Elle a également dit à Mme Chatterton que cette dernière n’était pas en mesure de rester après les heures de travail en raison d’obligations familiales, comme si c’était la faute de Mme Chatterton.

[292]  Mme Chatterton estimait aussi qu’elle ne pouvait pas faire confiance à la fonctionnaire. À une occasion, elle et un collègue ont demandé de l’aide à la fonctionnaire pour régler un problème lié au travail d’un autre membre de l’équipe. Ils lui ont dit, en toute confidentialité, que le rendement d’un de leurs collègues ne correspondait pas au niveau de son poste et que cette lacune touchait leur travail. La fonctionnaire a rédigé un courriel à l’intention de cet employé, en indiquant qu’on s’était plaint à son sujet et elle a envoyé une copie conforme aux autres membres de l’équipe. Cette situation a été difficile pour Mme Chatterton.

[293]  Mme Chatterton a discuté avec la fonctionnaire de ces problèmes. Elle estimait toutefois qu’elle n’était pas écoutée. La fonctionnaire lui a dit qu’elle était trop sensible. Elle a eu l’impression qu’il lui incombait de régler le problème et la fonctionnaire a ramené la conversation à elle-même. Puisqu’elle a conclu qu’elle n’obtiendrait aucune solution auprès de la fonctionnaire, Mme Chatterton est allée consulter Mme Lehouillier, qui lui a offert des conseils et lui a suggéré la façon de procéder. À la suite de la discussion, Mme Lehouillier a demandé à Mme Chatterton de lui envoyer une note résumant leur discussion.

[294]  Mme Chatterton a été appelée à commenter un courriel qu’elle a envoyé à Mme Lehouillier le 23 janvier 2013 (pièce E‑23). Dans ce courriel, elle explique de manière détaillée comment elle a passé 1,5 heures, la veille, à dicter à la fonctionnaire le contenu de la présentation du sondage de 2014 auprès des fonctionnaires fédéraux à l’intention du dirigeant principal des ressources humaines (pièce E‑24). Le courriel découlait d’une demande de Mme Lehouillier, lors d’une discussion avec Mme Chatterton, à savoir si elle avait contribué à la présentation. Lorsque Mme Chatterton a répondu par l’affirmative, Mme Lehouillier a indiqué que ce n’était pas ce qu’elle avait compris. Mme Chatterton a affirmé avoir dit à la fonctionnaire quels mots écrire, l’ordre de la présentation, le formatage des diapositives et comment sauvegarder la présentation dans le système de gestion des données électroniques, qui était utilisé quotidiennement par les membres de l’équipe pour sauvegarder des documents.

[295]  Mme Chatterton a affirmé que la fonctionnaire éprouvait des difficultés relativement à une question figurant dans les résultats du sondage de 2014 auprès des fonctionnaires fédéraux (pièce E‑25). La plupart des questions étaient formulées de manière positive. Ainsi, lorsque les employés étaient d’accord, il s’agissait habituellement d’une réponse positive. Toutefois, la question 21a a été formulée négativement comme suit : « [j]’estime que la qualité de mon travail est minée parce que […] les priorités changent constamment. » Dans ce cas, lorsque l’employé était d’accord, la réponse positive donnait un résultat négatif. Cette situation a posé problème lors de la préparation de la présentation, alors qu’il a fallu expliquer à la fonctionnaire à maintes reprises qu’en ce qui concerne de telles questions, les réponses négatives devaient être présentées comme étant positives, parce que la question a été posée de façon négative.

[296]  Mme Chatterton a reconnu que Mme Lehouillier lui avait déjà imposé une mesure disciplinaire, soit une réprimande verbale. Elle a dit que l’incident avait eu lieu après qu’elle ait demandé et reçu des conseils de son syndicat au sujet des propos que la fonctionnaire lui avait fait. Le syndicat l’avait informé que les commentaires de la fonctionnaire concernant les obligations familiales de Mme Chatterton pourraient être considérés comme étant de la discrimination fondée sur la situation familiale. Elle s’est rendue au bureau de la fonctionnaire pour lui dire, mais la fonctionnaire est devenue bouleversée. Lorsque Mme Chatterton a quitté le bureau de la fonctionnaire, cette dernière l’a poursuivie dans le corridor et lui a demandé de discuter avec Mme Lehouillier. Lorsque Mme Chatterton a refusé, la fonctionnaire a continué vers le bureau de Mme Chatterton tout en insistant. Plus tard, Mme Chatterton a été convoquée à une réunion avec Mme Lehouillier et la fonctionnaire. Elle a été informée que la fonctionnaire avait dit à Mme Lehouillier qu’elle se sentait menacée par Mme Chatterton. Mme Lehouillier a dit à Mme Chatterton que ce comportement devait cesser. Lorsque Mme Chatterton a mentionné les commentaires de la fonctionnaire au sujet de ses obligations familiales, Mme Lehouillier a répondu qu’elle n’aurait jamais formulé de tels commentaires. Mme Chatterton a ensuite demandé à la fonctionnaire de dire la vérité et elle a répondu [traduction] « aucun commentaire ». Mme Chatterton a ensuite été convoquée à une audience disciplinaire à laquelle son représentant syndical, Mme Lehouillier et Mme Guilhem ont assisté et où elle a reçu une réprimande orale. Elle n’a pas contesté la décision, parce qu’elle se sentait vaincue, personne ne la croyait et elle était épuisée sur le plan émotif.

[297]  Mme Chatterton a indiqué qu’à la demande de Mme Lehouillier, elle a supervisé un employé de l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux à la fin du mois de décembre 2012. Le rapport de gestion du rendement et d’apprentissage de l’employé en question a été préparé par la fonctionnaire et Mme Chatterton y a contribué. Elles ne s’entendaient pas sur la cote; le fonctionnaire estimait qu’il avait réussi, alors que Mme Chatterton était d’avis que la cote aurait dû être plus basse, ce qui a été porté à l’attention de Mme Lehouillier, qui a attribué la cote « Non atteint » à l’égard de son rendement. Mme Chatterton croyait que la cote aurait dû être « Réussi - ».

[298]  En contre‑interrogatoire, au sujet des questions du sondage de 2014 auprès des fonctionnaires fédéraux formulées de manière négative, Mme Chatterton a affirmé que, si l’employé était d’accord, la réponse positive donnait un effet négatif. Mme Chatterton a dit qu’il s’agissait des mêmes questions qui étaient incluses dans le sondage de 2011, à l’égard duquel la fonctionnaire a travaillé.

[299]  À la question de savoir si elle s’était plainte régulièrement auprès de Mme Lehouillier au sujet des heures qu’elle a consacrées à aider la fonctionnaire dans son bureau, Mme Chatterton a affirmé qu’elles en avaient discuté, que Mme Lehouillier lui avait donné des conseils et qu’elle lui avait parfois demandé de résumer leur discussion par courriel. À la question de savoir si elle était au courant que les courriels qu’elle envoyait à Mme Lehouillier étaient acheminés au conseiller en relations du travail, Mme Chatterton ne se souvenait pas d’en avoir été informée. Elle n’en avait jamais discuté avec la fonctionnaire, quoique la fonctionnaire l’ait peut-être déjà soulevée.

[300]  Mme Chatterton a été renvoyée aux notes de l’audience disciplinaire qui a donné lieu à la réprimande orale (pièce S‑24). À la question de savoir si elle se considérait comme une employée problème, elle l’a nié.

[301]  Lorsqu’elle a été interrogée au sujet de sa réaction au moment où la fonctionnaire a quitté l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux en juin 2013, Mme Chatterton a répondu qu’elle était soulagée et qu’elle espérait que la fonctionnaire améliore son rendement dans une situation différente. Mme Chatterton a été très surprise lorsqu’elle a été informée du licenciement de la fonctionnaire.

B.  Pour la fonctionnaire s’estimant lésée

[302]  Titulaire d’une maitrise en gestion de projet, la fonctionnaire a œuvré pendant 17 ans comme travailleuse autonome dans le domaine du développement international. De 2006 à juin 2011, elle a travaillé auprès de ce qui est aujourd’hui appelé Services publics et Approvisionnement Canada, au sein des Services de consultation. Selon la fonctionnaire, pendant ce temps, ses cotes de rendement étaient entièrement satisfaisantes et, à deux occasions, exceptionnelles. Lorsque les Services de consultation de Services publics et Approvisionnement Canada ont été fermés en juin 2011, elle a cherché un autre emploi. Elle a accepté l’offre du Bureau du dirigeant principal des ressources humaines et a commencé à y travailler le 12 décembre 2011.

[303]  La fonctionnaire a dit que sa relation avec Mme Lehouillier était bonne et qu’elles travaillaient bien ensemble. La fonctionnaire supervisait six employés, dont trois étaient nommés pour une période indéterminée et trois travaillaient à temps partiel. Elle avait une relation difficile avec une des employés, qui avait occupé le poste de gestionnaire par intérim; cette employée lui en voulait d’occuper ce poste. La fonctionnaire a dit qu’elle et cette employée avaient quand même réussi à travailler ensemble. Toutefois, chaque employé avait un comportement différent, d’où découlaient des problèmes différents; certains faisaient à leur tête, alors que d’autres ne suivaient pas les voies hiérarchiques ou ne respectaient pas l’autorité.

[304]  Pendant qu’elle remplaçait Mme Lehouillier à titre intérimaire, du 12 au 16 mars 2012, la fonctionnaire a dit que l’équipe avait bien travaillé et atteint tous les objectifs. À son retour, Mme Lehouillier lui a dit qu’elle avait fait un bon travail. La fonctionnaire a aussi remplacé Mme Lehouillier du 3 au 20 juillet 2012, et tout s’est bien passé. Elle a même reçu un courriel de Mme Nassrallah la remerciant et lui disant que l’équipe était bien soutenue (pièce S‑20).

[305]  Dans le premier rapport de gestion du rendement et d’apprentissage de la fonctionnaire (pièce S-1), pour la période allant du 12 décembre 2011 au 31 mars 2012, Mme Lehouillier a noté qu’elle était au courant que presque chaque employé de l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux avait des problèmes de rendement et de comportement et qu’elle désirait que la fonctionnaire continue à faire un suivi serré de chaque cas. La fonctionnaire a expliqué qu’elle avait commencé à rencontrer les employés une fois par semaine et à faire des rapports d’activités pour atteindre les objectifs et établir un échéancier à cet égard. La fonctionnaire a dit que Mme Lehouillier était contente et a suggéré que des ententes de rendement soient incluses et qu’il y ait des rencontres formelles trois fois par an.

[306]  La fonctionnaire a été renvoyée à un document préparé par Mme Pinto et dont Mme Lehouillier a reçu copie le 1er novembre 2012 (pièce S-3). La fonctionnaire a mentionné qu’elle en avait pris connaissance en avril 2014, à la suite d’une demande d’accès à l’information. Elle a été perturbée par la teneur du document et a constaté que des commentaires de ce document avaient été repris dans les objectifs du plan de travail que lui a remis Mme Lehouillier le 2 novembre 2012 (pièce E‑1, onglet 3). La pièce S-3 est un document de trois pages dans lequel Mme Pinto fait état de quelques incidents et indique que, selon elle, la fonctionnaire démontre ce qui suit : [traduction] « un mauvais jugement; manque de connaissances; n’a pas démontré la capacité d’apprendre rapidement; délègue aux employés des activités qui devraient être accomplies par la gestionnaire; a besoin de développer ses compétences en gestion et relations avec les employés ».

[307]  La fonctionnaire s’est demandée pourquoi Mme Lehouillier ne lui avait pas montré ce document, qu’elle avait placé dans son dossier personnel à son insu. La fonctionnaire avait fait deux demandes d’accès à l’information. La première demande concernait tout document dans son dossier personnel et elle a reçu ces documents en avril 2014. Elle a reçu les documents relatifs à la deuxième demande en juin 2014. Ainsi, elle a pris connaissance de plusieurs courriels à l’intention de Mme Guilhem, demandant que des documents soient placés dans son dossier personnel.

[308]  La fonctionnaire a été avisée qu’elle avait des problèmes de rendement pour la première fois lors de la rencontre de mi-année, le 2 novembre 2012, avec Mme Lehouillier. Elle avait reçu la cote « Réussi - », alors qu’elle avait presque atteint tous ses objectifs. La fonctionnaire a dit que Mme Lehouillier lui avait glissé un plan de travail au bout de la table. La fonctionnaire lui a dit qu’elle ne lui avait jamais mentionné qu’il y avait des lacunes ou des erreurs relativement à son travail, ce à quoi Mme Lehouillier a répondu que les employés s’étaient plaints à son sujet.

[309]  La fonctionnaire était dévastée de constater que le courriel de Mme Lehouillier en date du 2 novembre 2012, concernant le plan de travail (pièce E-1, onglet 3), la menaçait de licenciement, puisqu’il s’agissait de la première fois qu’un problème était porté à son attention. Selon la fonctionnaire, agir comme tel allait à l’encontre de la pratique dans la fonction publique, puisqu’avant de faire une telle menace, il fallait mettre en place un programme de gestion du rendement. La fonctionnaire n’a pas participé à l’élaboration du plan de travail. Mme Lehouillier l’a complété et y a inscrit les objectifs et engagements de l’employé. Mme Lehouillier a également complété la colonne « résultats accomplis » en se basant sur ses propres observations.

[310]  Selon la fonctionnaire, les objectifs du plan de travail n’étaient ni précis, ni mesurables, ni atteignables. D’après elle, les objectifs devaient être clarifiés, à défaut de quoi elle ne pourrait jamais les rencontrer. La fonctionnaire a fait parvenir un courriel détaillé à Mme Lehouillier le 22 novembre 2012, accompagné du plan de travail qui incluait ses propres commentaires (pièce E-1, onglet 6). La fonctionnaire a fait état, entre autres, du fait que son rapport de gestion du rendement et d’apprentissage indiquait qu’elle avait atteint 9 des 10 objectifs fixés et que certains objectifs de son plan de travail manquaient de précision. Mme Lehouillier n’a pas répondu à ce courriel.

[311]  Entre le 15 novembre 2012 et le 8 mars 2013, six plans de travail ont été élaborés. Pendant ce temps, Mme Lehouillier ne s’est jamais assise avec la fonctionnaire pour lui donner la chance de participer à l’élaboration d’un plan de travail, de discuter des activités à réaliser dans les deux semaines à venir ou des mesures de rendement.

[312]  Mme Lehouillier lui a remis le premier plan le 22 novembre 2012, et non le 15 novembre, contrairement à ce qui est indiqué sur le plan. Les six plans de travail étaient rétroactifs; Mme Lehouillier observait et sollicitait des commentaires d’autres personnes. Les plans étaient constitués uniquement de critiques et ne donnaient pas de détails ou de faits indiquant pourquoi le travail de la fonctionnaire n’était pas bon. Les plans de travail préparés par Mme Lehouillier étaient inadéquats. De plus, comme Mme Lehouillier lui avait dit qu’elle lui remettrait un plan de travail toutes les deux semaines, la fonctionnaire aurait dû en recevoir douze. Trois des plans de travail n’ont pas été remis à la fonctionnaire à la date prévue. Le plan de travail terminant le 15 novembre 2012 lui a été remis le 22 novembre 2012. Le plan de travail terminant le 7 décembre 2012 lui a été remis le 16 janvier 2013, après son retour au travail le 14 janvier, et il ne comportait qu’une journée d’observation directe par Mme Lehouillier en raison des absences respectives de la fonctionnaire et de Mme Lehouillier. Cette journée-là, Mme Lehouillier lui a remis deux plans de travail : celui se terminant le 7 décembre 2012 et celui se terminant le 16 janvier 2013. Le plan de travail terminant le 30 janvier 2013 lui a été remis le 31 janvier 2013.

[313]  La fonctionnaire a rédigé un document énonçant ses réalisations additionnelles (pièce E-1, onglet 7), aux fins de son plan de travail. Dans ce document, la fonctionnaire a inscrit qu’une de ses employés demandait constamment les conseils de la directrice, contournant ainsi l’autorité de la fonctionnaire. Mme Lehouillier a informé la fonctionnaire qu’il s’agissait de Mme Pinto. Mme Lehouillier a dit à la fonctionnaire qu’en ce qui concerne le travail, elle disait à Mme Pinto de s’adresser à la fonctionnaire, comme elle le disait aux autres employés. Toutefois, lorsqu’il s’agissait de choses personnelles, si un employé voulait lui parler, Mme Lehouillier ne refusait pas.

[314]  La fonctionnaire a été renvoyée à un courriel que Mme Lehouillier a envoyé à Mme Guilhem le 19 avril 2013 (pièce S-10), qui résumait sa rencontre de la veille avec la fonctionnaire. Mme Lehouillier a écrit que la fonctionnaire croyait qu’elle et Mme Lehouillier se faisaient manipuler par les employés. Dans son témoignage, la fonctionnaire a dit qu’elle s’était rendu compte que, lorsque les employés voulaient quelque chose, ils s’adressaient à elle, et que, si elle refusait, ils s’adressaient à Mme Lehouillier, et vice-versa.

[315]  La fonctionnaire a été renvoyée aux échanges de courriels entre Mme Lehouillier et Mme Coghlan en date du 28 mars 2013 (pièce S-6) et du 5 juin 2013 (pièce S-7), dans lesquels Mme Coghlan critiquait le travail de la fonctionnaire. Elle en a pris connaissance en avril 2014, au moyen d’une demande d’accès à l’information. Elle en a été surprise, car elle ne s’attendait pas à recevoir tous ces documents qui étaient dans son dossier personnel. Elle s’est aperçue qu’il y avait beaucoup de manigances qui se faisaient dans son dos.

[316]  La fonctionnaire a aussi reçu, au moyen d’une demande d’accès à l’information, le courriel que Mme Lehouillier avait envoyé à Mme Guilhem le 11 avril 2013 (pièce S-9), dans lequel elle lui a fait part de ses conversations avec Mme Coghlan les 10 et 11 avril 2013. Selon la fonctionnaire, le courriel contenait des railleries et des médisances à son égard.

[317]  Quant à sa réaction lorsqu’elle a appris le départ de Mme Lehouillier, la fonctionnaire s’est dit qu’elle aurait la chance de reprendre avec un nouveau directeur.

[318]  Mme Kovacs a supervisé la fonctionnaire du 22 avril au 10 juin 2013. Toutefois, selon la fonctionnaire, en raison de leurs absences respectives, Mme Kovacs ne l’a supervisée que pendant 12 jours.

[319]  Le 15 mai 2013, Mme Kovacs lui a remis le plan de travail pour la période du 22 avril au 14 mai 2013. La fonctionnaire en a été abasourdie. Elle avait reçu le dernier plan de Mme Lehouillier le 8 mars 2013. Ce plan de travail lui a été remis 8.5 semaines après par Mme Kovacs sans même la prévenir qu’elle ferait l’objet d’un plan de suivi de la gestion du rendement. Mme Kovacs ne lui a jamais parlé d’objectifs clairs, précis et mesurables. Elle a repris le modèle de Mme Lehouillier textuellement, et rapportait les critiques et ouï-dire des autres employés. Je note que l’objectif no 5 (Livrer les éléments de travail dans les délais convenus) a été remplacé par «Améliorer les rapports informels ». Dans les deux cas, la fonctionnaire devait, entre autres, fournir des mises à jour. De toute façon, le commentaire de Mme Kovacs pour cet objectif était que la fonctionnaire avait fourni les mises à jour pertinentes. Mme Kovacs a rédigé les engagements de la fonctionnaire dans la colonne « employée ». La fonctionnaire a dit que ce plan ne couvrait que huit jours d’observation par Mme Kovacs en raison de leurs absences respectives.

[320]  La fonctionnaire a dit qu’elle avait envoyé 5 courriels en 10 jours à Mme Nassrallah. La première réponse qu’elle a reçue à leur égard était une lettre en date du 6 juin 2013, concernant un plan de redressement et les modalités de son affectation avec Mme Tattrie (pièce E-1, onglet 24).

[321]  La fonctionnaire était heureuse de son affectation avec Mme Tattrie à compter du 10 juin 2013. Il s’agissait d’une nouvelle équipe et d’une occasion de repartir sur une base différente. Elle était prête à accepter les modalités de l’affectation dans la mesure où les critères étaient suivis.

[322]  La fonctionnaire a rencontré Mme Tattrie le 11 juin 2013. Mme Tattrie lui a dit qu’il n’y avait rien de préparé pour son arrivée, que Mme Tattrie partait en congé et qu’à son retour, elles parleraient du travail. Entre temps, la fonctionnaire devait nettoyer son ancien bureau. Mme Tattrie lui a dit de se présenter à ses nouveaux collègues et de voir s’ils avaient besoin d’aide.

[323]  Quant au plan de travail de Mme Tattrie, la fonctionnaire a dit qu’elle n’avait pas reçu de rétroaction écrite entre le 10 juin et le 22 octobre 2013. Le 22 octobre 2013, elle a reçu trois plans d’action le même jour, alors qu’elle aurait dû en recevoir un par mois, soit quatre plans de travail pour cette période. Elle n’a jamais reçu d’autres plans de travail de Mme Tattrie.

[324]   Le 14 novembre 2013, la fonctionnaire a écrit une lettre à Mme Tattrie (pièce S‑26) soulignant que les trois plans de travail étaient truffés de critiques. La fonctionnaire a témoigné à l’effet qu’ils contenaient trente commentaires négatifs et qu’aucun commentaire ne lui disait comment s’améliorer. Elle n’a reçu aucune réponse à sa lettre.

[325]  En ce qui concerne l’échange de courriels entre Mme Tattrie et M. Béliveau, en date du 22 juillet 2013, dans lequel Mme Tattrie disait qu’il serait inutile de fournir du coaching supplémentaire à la fonctionnaire et qu’elle devrait mettre son résumé à jour pour se trouver un autre emploi (pièce S-18), la fonctionnaire a dit qu’elle en a pris connaissance au moyen de sa demande d’accès à l’information. Elle a alors compris que Mme Tattrie ne la voulait pas dans son équipe et qu’elle ne respectait pas les modalités de la lettre d’affectation.

[326]  Le 31 décembre 2013, la fonctionnaire a écrit un courriel à M. Béliveau (pièce S‑27), dans lequel elle lui a mentionné, entre autres, que, le 6 décembre 2013, elle avait demandé à Mme Tattrie quel était son statut, puisque son affectation se terminait le 10 décembre 2013 et Mme Tattrie ne lui avait rien répondu à ce sujet. Elle n’a reçu aucune réponse de M. Béliveau.

[327]  Le 8 décembre 2013, la fonctionnaire a envoyé un courriel à M. Béliveau et à d’autres personnes (pièce S-28), demandant des clarifications quant à son statut. Elle n’a reçu aucune réponse à ce courriel.

[328]  Dans un courriel de Mme Lehouillier à Mme Guilhem, en date du 1er mars 2013 (pièce S-29), dont la fonctionnaire a pris connaissance au moyen d’une demande d’accès à l’information, Mme Lehouillier a proposé d’enlever les responsabilités de gestion de la fonctionnaire à compter du 1er avril 2013. La fonctionnaire a dit que Mme Lehouillier n’en avait jamais discuté avec elle.

[329]  La demande d’accès à l’information de la fonctionnaire a aussi révélé un courriel que Mme Guilhem avait envoyé à une conseillère en relations de travail le 30 octobre 2013 (pièce S-30), l’invitant à une rencontre avec Mme Nassrallah le même jour concernant « l’imminent congédiement » de la fonctionnaire.

[330]  Il y avait deux versions de la lettre de licenciement. La première, en date du 9 décembre 2013 (pièce E-1, onglet 29), indiquait que le licenciement prenait effet immédiatement. Cette lettre a été livrée à la fonctionnaire pendant qu’elle était en congé de maladie. Dans la deuxième version, en date du 16 décembre 2013 (pièce E-1, onglet 30), le licenciement prenait effet le 6 janvier 2014.

[331]  Une partie de la lettre de licenciement indique que la direction avait tenu des réunions avec la fonctionnaire toutes les deux semaines, pour déterminer si le travail avait été effectué selon le plan de travail, et que ces réunions avaient été résumées dans des rapports écrits qui ont été présentés à la fonctionnaire. La fonctionnaire a témoigné à l’effet qu’aucun rapport écrit ne lui avait été remis à la suite de ces réunions. Les plans de travail ne comprenaient que les commentaires de la direction, qui figuraient dans la dernière colonne.

[332]  En ce qui concerne la possibilité d’affectation à un poste classifié AS-06, qui est mentionnée dans la lettre de licenciement et que la fonctionnaire a refusée, la fonctionnaire a dit que cette offre avait été faite par Mme Kovacs, à peine trois semaines après qu’elle devienne sa directrice par intérim, soit le 22 avril 2013. Mme Kovacs était alors venue dans le bureau de la fonctionnaire et, après avoir fermé la porte, lui avait dit qu’elle avait une offre que la fonctionnaire devait accepter immédiatement, en ajoutant uniquement que le poste était sous la direction de M. Tremblay.

[333]  Dans le rapport de gestion du rendement et d’apprentissage pour la période d’évaluation du 1er avril 2012 au 31 mars 2013 (pièce S-8), il est indiqué que les fonctions de la fonctionnaire relatives à la gestion d’une équipe avaient un impact sur sa santé et qu’elle souffrait notamment d’insomnie et de fatigue. La fonctionnaire a dit qu’elle l’avait elle-même mentionné à Mme Lehouillier. La fonctionnaire a dit que depuis la lettre du 2 novembre 2012, elle ressentait de la pression et avait peur de perdre son emploi. Elle avait de la difficulté à gérer cette situation, car la direction ne répondait jamais à ses courriels et ne lui donnait jamais l’heure juste.

[334]  La fonctionnaire a été en congé maladie du 12 décembre 2012 au 12 janvier 2013 (pièce S-32). Elle a dit qu’elle a consulté son médecin, parce que la procédure appliquée par l’employeur pour assurer le suivi de la gestion de son rendement l’avait dévastée. Selon elle, l’employeur ne répondait pas à ses courriels et ne lui expliquait pas les mesures à prendre pour s’améliorer. Elle vivait de l’angoisse, parce que, selon elle, la direction ne respectait pas les politiques de la fonction publique. Son médecin lui a dit qu’on voulait sa peau et que c’est ce qui arriverait si elle n’arrêtait pas.

[335]  La fonctionnaire est retournée au travail le 14 janvier 2013. Le 16 janvier 2013, Mme Lehouillier lui a remis deux plans de travail et ne lui a posé aucune question concernant sa santé. La fonctionnaire a écrit plusieurs fois à l’employeur concernant les plans de travail et a mentionné l’impact sur sa santé. Les plans ne lui donnaient aucune chance de s’améliorer. Elle a souligné que personne ne l’écoutait, même si elle envoyait des courriels à tous les paliers de la hiérarchie. Toutefois, je note que Mme Lehouillier a répondu le 15 avril 2013 (pièce E-1, onglet 15) aux commentaires que la fonctionnaire lui a envoyés le 10 avril 2013 au sujet des plans de travail. Elle a ajouté que personne n’avait lu les documents et que le processus était vicié. Le plan de travail est un outil dont l’objectif est d’améliorer le rendement de l’employé. Dans son rapport de gestion du rendement et d’apprentissage, elle a atteint tous les objectifs fixés par Mme Lehouillier.

[336]  En ce qui concerne les témoignages des employées de l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux, la fonctionnaire a réagi en soulignant qu’elles avaient continué de lui nuire et de lui faire des reproches, notamment qu’elle n’était pas compétente, et ce, même après qu’elle ait quitté le poste. La fonctionnaire a dit que ce n’était pas ainsi qu’elle comprenait la gestion du rendement.

[337]  Quant à l’impact de son licenciement, elle a subi l’humiliation de se faire renvoyer en raison des médisances de ses employés. Les circonstances étaient pénibles. Mme Lehouillier incluait les ouï-dire de Mmes Pinto, Chatterton et Coghlan dans ses plans de travail. Elle y incluait aussi ceux de Mme Kovacs, qui était alors une de ses collègues. Dans sa lettre, M. Béliveau lui a dit que, si elle continuait de contester, elle serait immédiatement licenciée. Mme Lehouillier ne s’est jamais assise avec elle et les objectifs qu’elle avait fixés étaient généraux.

[338]  En contre-interrogatoire, l’employeur a abordé le témoignage de la fonctionnaire selon lequel Mme Lehouillier lui avait dit qu’elle avait fait du bon travail lorsqu’elle l’a remplacée de façon intérimaire du 12 au 16 mars 2012. L’employeur a suggéré que Mme Lehouillier lui aurait plutôt demandé comment ça s’était passé, sans formuler de commentaire lorsque la fonctionnaire lui a répondu que tout s’était bien passé. La fonctionnaire a répondu qu’elle croyait avoir fait un bon travail et elle a interprété l’absence de commentaire de la part de Mme Lehouillier comme une confirmation qu’elle avait fait un bon travail.

[339]  La fonctionnaire a été renvoyée au fait qu’elle avait rencontré Mme Lehouillier et que cette dernière lui avait proposé des rencontres formelles, tous les trois mois, avec les employés que la fonctionnaire supervisait, pour discuter de leur rendement. La fonctionnaire n’était pas d’accord. Elle a dit que Mme Lehouillier avait inscrit dans son rapport de gestion du rendement et d’apprentissage qu’elle devait faire du mentorat pour chaque individu. Elles se sont entendues pour que le rapport de gestion du rendement et d’apprentissage comprenne une rencontre trimestrielle avec chaque individu pour discuter de son rendement, alors que, normalement, ces rencontres avaient lieu deux fois par année.

[340]  La fonctionnaire a été renvoyée au fait que, selon Mme Lehouillier, il était entendu que ce ne sont pas tous les employés qui avaient des problèmes de rendement et que le but de rencontrer tous les employés était d’éviter que certains ne se sentent visés. La fonctionnaire a répondu qu’il s’agissait de l’interprétation de l’employeur et que, en réalité, elle a rencontré tous les employés tous les trois mois. Dans son rapport de gestion du rendement et d’apprentissage, Mme Lehouillier a dit que chaque employé avait des problèmes différents.

[341]  En ce qui concerne son témoignage à l’effet qu’avant le 2 novembre 2012, Mme Lehouillier ne l’avait jamais informé de ses faiblesses, la fonctionnaire a répondu qu’elle n’avait pas reçu d’avis écrit de ses lacunes ou erreurs. À la question de savoir si elle reconnaissait qu’avant le 2 novembre 2012, elle avait des rencontres informelles avec Mme Lehouillier concernant certains problèmes avec des travaux qu’elle devait lui remettre, la fonctionnaire a dit se rappeler un courriel qu’elle avait envoyé à toute l’équipe concernant le rendement d’un de ses employés. Par la suite, Mme Lehouillier lui avait envoyé un courriel pour lui dire que c’était humiliant pour l’employé et, lors d’une rencontre informelle ultérieure, lui a demandé de s’excuser auprès de l’employé et de prendre les moyens de rétablir les relations, ce qu’elle a fait.

[342]  La fonctionnaire et Mme Lehouillier se sont également rencontrées au sujet de Mme Chatterton. Après que cette dernière ait été disciplinée, Mme Lehouillier a convoqué la fonctionnaire dans son bureau où elle lui a dit, tout en demeurant debout, qu’elle devait mieux gérer ses émotions.

[343]  La fonctionnaire a dit qu’elle n’avait jamais eu de rencontres informelles avec Mme Lehouillier concernant ses lacunes, seulement des rencontres bilatérales concernant le côté opérationnel.

[344]  La fonctionnaire a été renvoyée au courriel que lui a envoyé Mme Lehouillier le 23 octobre 2012 (pièce E-1, onglet 19), indiquant que Mme Kovacs lui avait mentionné que la fonctionnaire lui avait demandé d’enlever ses sandales; elle se demandait pourquoi. Après avoir enlevé ses sandales, la fonctionnaire avait dit à Mme Kovacs qu’elle devrait avoir une pédicurie. La fonctionnaire a dit qu’elle avait pris connaissance du courriel en avril 2014, par le biais de sa demande d’accès à l’information. Elle a dit que Mme Kovacs l’avait accueilli dans son bureau et qu’il s’agissait d’une conversation privée entre deux femmes, à porte fermée. Elle ne comprenait pas quel rapport il y avait avec la gestion de son rendement.

[345]  La fonctionnaire a été renvoyée à son témoignage concernant le courriel qu’elle avait envoyé à Mme Lehouillier le 22 novembre 2012, auquel était joint le plan de travail qui incluait ses propres commentaires (pièce E-1, onglet 6), et auquel, selon elle, Mme Lehouillier n’avait pas répondu par écrit. L’employeur a reconnu que Mme Lehouillier n’avait pas répondu par écrit. Néanmoins, la fonctionnaire a été renvoyée au fait qu’elle avait reçu une réponse orale. À cet égard, l’employeur a mentionné le courriel de Mme Lehouillier à l’intention de Mme Guilhem, en date du 19 avril 2013 (pièce E-1, onglet 16), qui résumait la rencontre que Mme Lehouillier avait eue le même jour avec la fonctionnaire et qui mentionnait ce qui suit :

[Traduction]

[…]

Elle a dit que je n’avais jamais répondu à son courriel du 22 novembre 2012. Je lui ai répondu qu’on en avait parlé, ce à quoi elle a répondu qu’elle s’attendait à une réponse écrite. Elle a également dit que je n’avais répondu à aucune de ses questions relatives au plan de travail. Je lui ai dit que j’avais répondu à toutes ses questions. Elle l’a reconnu, mais je suppose que ce n’était pas suffisant pour elle.

[…]

[346]  La fonctionnaire a dit ne pas se souvenir que Mme Lehouillier avait répondu point par point à ses questions concernant le plan de travail de la façon décrite dans son courriel du 19 avril 2013 (pièce E-1, onglet 16).

[347]  En ce qui a trait à son témoignage à l’effet qu’elle n’a reçu que 6 plans de travail au lieu de 12, la fonctionnaire a reconnu qu’elle était en congé maladie du 12 décembre 2012 au 12 janvier 2013. L’employeur a fait part à la fonctionnaire que Mme Lehouillier témoignerait en contre-preuve, à l’effet que le dernier plan de travail était celui du 8 mars 2013, parce que, après le 8 mars 2013, Mme Lehouillier avait été en congé pendant une semaine. À son retour de congé, Mme Lehouillier a cessé de préparer les plans de travail, parce qu’elle devait préparer des rapports de gestion du rendement et d’apprentissage. La fonctionnaire a répondu qu’elle n’avait pas de commentaire à cet égard.

[348]  Concernant le fait que la fonctionnaire avait reçu deux plans de travail le même jour, soit le 16 janvier 2013, l’employeur a dit que Mme Lehouillier témoignerait à l’effet que la fonctionnaire avait été absente les 6 et 7 décembre 2012 et qu’elle n’était revenue que le 14 janvier 2013. La fonctionnaire a reconnu qu’elle était absente ces deux jours-là.

[349]  La fonctionnaire a témoigné à l’effet que Mme Tattrie n’avait rien préparé pour son arrivée au sein de son équipe. L’employeur a souligné que, le 10 juin 2013, Mme Tattrie avait organisé une rencontre d’équipe et que, le 11 juin 2013, elle avait rencontré la fonctionnaire pour discuter de son travail. La fonctionnaire a répondu qu’il s’agissait de l’opinion de Mme Tattrie. La fonctionnaire a réitéré que Mme Tattrie lui avait dit qu’elle devait prendre le temps, pendant l’absence de cette dernière, de rencontrer chaque membre de l’équipe de la gestion du rendement afin de déterminer comment elle pouvait aider. Il n’y avait pas de bureau prêt pour elle et Mme Tattrie lui avait dit de fermer ses dossiers du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux et de nettoyer son ancien bureau.

[350]  En ce qui concerne le fait que Mme Tattrie lui avait dit qu’elle lui donnerait de la documentation, la fonctionnaire a répondu que Mme Tattrie lui avait dit que son adjointe lui enverrait de la documentation au cours de la semaine.

[351]  La fonctionnaire a été renvoyée à son témoignage selon lequel Mme Tattrie voulait se débarrasser d’elle, vu son courriel à M. Béliveau du 22 juillet 2013, dans lequel Mme Tattrie avait écrit que fournir plus de coaching à la fonctionnaire serait inutile et qu’elle devrait mettre son curriculum vitae à jour pour se trouver un autre emploi (pièce S-18). La fonctionnaire a dit qu’elle pensait ne pas avoir été bien accueillie dans l’équipe de la gestion du rendement, puisqu’il n’y avait pas de travail et pas de bureau.

[352]  L’employeur a suggéré que c’était la fonctionnaire qui voulait quitter le Bureau du dirigeant principal des ressources humaines et trouver un emploi ailleurs. L’employeur a également souligné que la direction lui avait offert de l’aide pour mettre à jour son curriculum vitae, ainsi que du coaching pour se préparer aux entrevues. La fonctionnaire a dit être sous l’impression que, dans son courriel du 17 mai 2013, Mme Kovacs avait déclaré qu’elle, Mme Nassrallah et Mme Tattrie aideraient la fonctionnaire dans une recherche d’emploi au cours de la période de son affectation. La fonctionnaire a ajouté qu’elle ne voulait pas quitter l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux. Lorsqu’on lui a rappelé le témoignage de Mme Kovacs à l’effet que la fonctionnaire voulait trouver un emploi ailleurs, la fonctionnaire a dit que Mme Kovacs avait quitté en mai et que l’affectation avec Mme Tattrie lui avait déjà été offerte. Lorsque l’employeur a rappelé à la fonctionnaire que Mme Kovacs avait dit que, le 22 avril 2013, la fonctionnaire lui avait mentionné qu’elle voulait quitter le Bureau du dirigeant principal des ressources humaines, la fonctionnaire a répondu qu’en avril 2013, elle était encore sous le choc, que l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux voulait sa peau et que c’est pourquoi elle a dit qu’elle voulait quitter. Le poste avec Mme Tattrie lui a été offert en mai.

[353]  En ce qui concerne le fait que, selon Mme Tattrie, des arrangements de coaching pour la recherche d’emploi avaient été faits pour la fonctionnaire, mais qu’elle n’avait fait aucun suivi, la fonctionnaire a répondu que ça allait à l’encontre de ce qui était dans sa lettre d’affectation.

[354]  L’employeur a mentionné à la fonctionnaire que, bien qu’elle prétende n’avoir reçu que trois plans de travail de Mme Tattrie au lieu de six, Mme Tattrie lui a remis tous les plans de travail. La fonctionnaire a répondu qu’elle n’avait reçu que trois plans, qu’elle avait commentés. Je note que Mme Tattrie a témoigné à l’effet que, dans son courriel à la fonctionnaire du 18 novembre 2013 (pièce S-17), elle avait joint les plans de travail pour juin, juillet et septembre 2013.

C.  Contre-preuve de l’employeur

1.  Mme Lehouillier

[355]  Concernant la période du 12 au 16 mars 2012, pendant laquelle la fonctionnaire l’a remplacée à titre intérimaire, Mme Lehouillier a dit qu’elle avait demandé à la fonctionnaire, à son retour, comment ça s’était passé et que celle-ci lui avait répondu que tout s’était très bien passé, rien de plus.

[356]  En ce qui concerne les rencontres trimestrielles de la fonctionnaire avec les employés de l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux pour discuter de leur rendement, Mme Lehouillier a expliqué que certains employés de l’équipe avaient des problèmes. Elle était d’accord avec les rencontres, mais s’est entendue avec la fonctionnaire pour que tous les employés soient rencontrés de façon uniforme afin d’éviter que certains employés se sentent visés et estiment être traités de façon inéquitable.

[357]  À la question de savoir pourquoi, sur une période de 24 semaines, la fonctionnaire n’a reçu que 6 plans de travail au lieu de 12, Mme Lehouillier a dit avoir été absente du 23 novembre au 2 décembre 2012, et qu’elle n’avait pas divulgué à la personne qui la remplaçait que la fonctionnaire faisait l’objet d’un plan de travail. La fonctionnaire s’est absentée les 6 et 7 décembre 2012. Le 12 décembre 2012, Mme Lehouillier a reçu un billet médical justifiant l’absence de la fonctionnaire du 12 décembre 2012 au 12 janvier 2013. Lorsque la fonctionnaire est revenue au bureau le 14 janvier 2013, Mme Lehouillier lui a remis le plan de travail du 7 décembre 2012. À compter du 16 janvier 2013, elle a recommencé à rencontrer la fonctionnaire toutes les deux semaines. En mars 2013, Mme Lehouillier a pris une semaine de congé et n’a pas partagé l’information du plan de travail avec sa remplaçante. Par la suite, Mme Lehouillier a dû se consacrer à la préparation des rapports de gestion du rendement et d’apprentissage de fin d’année. Elle avait des discussions avec la fonctionnaire, mais a conclu qu’il serait trop exigeant pour la fonctionnaire de lui donner des plans de travail en plus.

[358]  En contre-interrogatoire, à la question de savoir si elle avait avisé la fonctionnaire qu’il n’y aurait plus de plans de travail après le 8 mars 2013, en raison des rapports de gestion du rendement et d’apprentissage, Mme Lehouillier ne s’en rappelait pas et assumait que la fonctionnaire devait le savoir. Elle trouvait que c’était suffisant, parce que le rapport de gestion du rendement et d’apprentissage de la fonctionnaire contenait des éléments qu’elle devait améliorer.

[359]  Lorsqu’on lui a demandé de préciser son commentaire voulant que ce soit trop de continuer à donner les plans de travail à la fonctionnaire, Mme Lehouillier a dit que c’était beaucoup d’information pour une personne.

2.  Mme Tattrie

[360]  Mme Tattrie a indiqué que, le 10 juin 2013, une réunion d’équipe a eu lieu, au cours de laquelle la fonctionnaire a été présentée à l’équipe de la gestion du rendement. Le 11 juin 2013, Mme Tattrie a eu une réunion bilatérale avec la fonctionnaire et lui a décrit ce qu’elle ferait. La fonctionnaire avait encore des tâches à accomplir dans le cadre de son poste antérieur, notamment, remplir les rapports de gestion du rendement et d’apprentissage et nettoyer son bureau.

[361]  Lorsqu’elle a été interrogée à savoir comment elle avait préparé la transition de la fonctionnaire de son ancienne équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux à sa nouvelle équipe de la gestion du rendement, Mme Tattrie a répondu que la première étape consistait à convoquer une réunion du personnel. La deuxième étape était d’organiser une rencontre bilatérale avec la fonctionnaire. Mme Tattrie partait en congé et a donné à la fonctionnaire quelques tâches à faire pendant son absence. Outre celles déjà mentionnées, elle lui a demandé de rencontrer des employés pour apprendre ce qu’ils faisaient. La fonctionnaire devait également lire la documentation sur les projets, étant donné qu’elle devait traiter les Questions et Réponses, qui étaient des renseignements en temps opportun pour appuyer les ministères dans la mise en œuvre de leur programme de gestion du rendement.

[362]  À la question de savoir si elle avait demandé à la fonctionnaire de mettre à jour son curriculum vitae et de chercher un autre poste, Mme Tattrie a répondu qu’au cours de leur réunion bilatérale au sujet de leur discussion sur le plan d’apprentissage du début de juillet 2013, elles avaient discuté de l’apprentissage et de ce que Mme Tattrie pensait être les prochaines étapes pour la fonctionnaire. La fonctionnaire a convenu de mettre à jour son curriculum vitae et Mme Tattrie a pris des dispositions avec une entreprise externe de gestion des ressources humaines pour aider la fonctionnaire avec son curriculum vitae et le processus d’entrevue.

[363]  En contre-interrogatoire, à la question de savoir s’il y avait un espace de bureau pour la fonctionnaire, Mme Tattrie a répondu que toute l’équipe de la gestion du rendement était installée dans un concept ouvert, comprenant six postes de travail; la fonctionnaire occupait l’un de ces postes de travail à compter du 10 juin 2013.

[364]  À la question de savoir si ses discussions avec la fonctionnaire concernant sa nouvelle affectation avaient eu lieu pendant leur première rencontre bilatérale, Mme Tattrie a corrigé son témoignage principal en disant que ces discussions avaient eu lieu au début de juillet 2013, lors de leur discussion concernant le plan d’apprentissage.

III.  Résumé de l’argumentation

A.  Pour l’employeur

[365]  Mme Lehouillier a embauché la fonctionnaire après avoir reçu d’excellentes références et avoir passé une entrevue avec elle pour lui expliquer les exigences du poste et les défis qu’elle aurait à rencontrer. La fonctionnaire devait s’occuper du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux et gérer une équipe d’analystes.

[366]  Le premier rapport de gestion du rendement et d’apprentissage de la fonctionnaire visait la période du 12 décembre 2011 au 31 mars 2012. Il y était noté que la fonctionnaire s’était bien adaptée à ses nouvelles fonctions et qu’elle avait de belles relations de travail avec les personnes qui l’entouraient. Il était notamment mentionné qu’elle devait respecter les échéanciers et gérer le temps consacré aux employés sous sa supervision. Ce rapport n’a pas été coté, parce qu’il fallait donner à la fonctionnaire le temps de s’ajuster et de comprendre les différents aspects du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux.

[367]  Au cours de 2012, Mme Lehouillier a reçu des plaintes de certains employés sous la supervision de la fonctionnaire ainsi que d’autres employés, collègues et superviseurs d’équipe. Selon les plaintes, la fonctionnaire avait fait des commentaires inappropriés envers certains employés, ne semblait pas maitriser certains concepts du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux, dont elle était responsable, avait des problèmes de jugement et de compréhension, et ne respectait pas les échéanciers qu’elle avait elle-même établis. Mme Lehouillier a noté les plaintes des employés et ses discussions avec la fonctionnaire concernant les plaintes dans ses courriels à elle-même, dont, par exemple, dans celui du 23 octobre 2012 (pièce E-1, onglet 19). Une partie de ce courriel concernait le fait que, le 22 octobre 2012, la fonctionnaire a fait parvenir à un de ses employés un courriel concernant un document qu’il avait préparé. Dans ce courriel, qu’elle a envoyé à tous les membres de son équipe ainsi qu’à Mme Lehouillier, la fonctionnaire a critiqué le rendement de l’employé et lui a dit qu’il n’était pas à la hauteur de ce qui est attendu de son poste (pièce E-1, onglet 19). Le courriel renvoyait aux discussions que Mme Lehouillier avait eues avec l’employé et la fonctionnaire concernant l’incident. Dans son courriel, Mme Lehouillier a écrit que, vers le 2 octobre 2012, elle avait discuté avec la fonctionnaire de la nécessité de maintenir la confidentialité des questions relatives au rendement de ses employés et de ne pas en discuter avec d’autres. Mme Lehouillier a aussi averti la fonctionnaire de ne pas faire des commentaires inappropriés et lui a fourni deux exemples à cet égard : lorsque la fonctionnaire a dit à un employé, à la première journée de travail de ce dernier, « maintenant tu connais tout, n’est-ce pas? »; lorsque la fonctionnaire a demandé à Mme Kovacs d’enlever ses sandales. Mme Lehouillier a témoigné à l’effet qu’elle a discuté avec la fonctionnaire des lacunes observées.

[368]  En renvoyant à certaines pièces, l’employeur a fait valoir que la fonctionnaire avait divulgué certains renseignements confidentiels concernant certains employés à d’autres personnes, dont l’évaluation d’un employé et l’allégation que Mme Malizia avait monopolisée le temps de l’équipe.

[369]  L’employeur a abordé la question de savoir si Mme Lehouillier s’était basée sur les documents reçus des employés pour élaborer le plan de travail de la fonctionnaire, dont le document de Mme Pinto reçu le 1er novembre 2012 (pièce S-3). L’employeur a souligné que Mme Lehouillier avait dit, en contre-interrogatoire, que le plan de travail avait déjà été préparé quand elle a reçu le document. Elle a affirmé avoir observé les lacunes de la fonctionnaire et élaboré le plan par la suite. Le plan de travail comportait sept objectifs; la fonctionnaire a refusé d’accepter le plan.

[370]  L’employeur a fait valoir que, lorsque la fonctionnaire était sous la supervision de Mme Tattrie, elle lui avait fait part de ses préoccupations relatives au plan de travail élaboré par Mme Lehouillier. Mme Tattrie lui a proposé d’élaborer un plan de travail qui pourrait convenir tant à la fonctionnaire qu’à Mme Tattrie. Le plan rédigé par la fonctionnaire a été révisé par Mme Tattrie, qui y a apporté des modifications. En dépit de cela, Mme Tattrie a témoigné à l’effet que la fonctionnaire était réfractaire aux commentaires et sur la défensive.

[371]  Selon l’employeur, la preuve a établi qu’il y avait un manque de collaboration de la part de la fonctionnaire pour améliorer son rendement. Mme Lehouillier tenait des rencontres avec la fonctionnaire toutes les deux semaines pour discuter du plan de travail. À chacune des rencontres, elle donnait des exemples concrets pour chacun des objectifs afin d’aider la fonctionnaire à s’améliorer, notamment lors de sa rencontre avec la fonctionnaire le 16 janvier 2013, qu’elle a résumé dans son courriel du 17 janvier 2013 (pièce E-1, onglet 11). Dans le rapport de gestion du rendement et d’apprentissage de la fonctionnaire pour la période du 1er avril 2012 au 31 mars 2013, Mme Lehouillier lui a accordé la cote globale « Non atteint ». À la suite des commentaires de la fonctionnaire, la cote globale a été modifiée à « Réussi - ».

[372]  Mme Kovacs a remplacé Mme Lehouillier à titre intérimaire du 22 avril au 9 juin 2013. Bien que Mme Kovacs et la fonctionnaire aient respectivement pris des congés pendant cette période, Mme Kovacs a dit qu’elle a pu observer certaines lacunes chez la fonctionnaire et lui en a fait part lors de rencontres. La fonctionnaire avait de la difficulté à gérer l’équipe qu’elle devait superviser et à respecter un échéancier pour répondre à une demande urgente à temps. La fonctionnaire a expliqué à Mme Kovacs que le délai était dû au fait que sa boîte de réception de courriels était pleine.

[373]  Mme Kovacs a observé que la fonctionnaire avait de la difficulté à comprendre les renseignements qui lui étaient donnés. Elle a reçu des commentaires de la part d’employés de l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux à l’effet que la fonctionnaire n’exerçait pas un leadership solide qui pouvait les appuyer dans leur travail, et que le sondage auprès des fonctionnaires fédéraux en était affecté. Lorsque la fonctionnaire lui demandait des conseils de gestion, Mme Kovacs s’est rendue disponible après les heures de travail. Elle lui a aussi donné de la documentation qui expliquait comment gérer une équipe difficile.

[374]   Mme Kovacs a témoigné à l’effet que, selon ses observations, la fonctionnaire ne semblait pas comprendre les dossiers qui lui étaient assignés ou le rôle des membres de l’équipe qu’elle supervisait. Elle avait aussi de la difficulté à comprendre le concept technique du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux et la terminologie utilisée.

[375]  Mme Kovacs a donné à la fonctionnaire l’appui nécessaire pour l’aider à s’améliorer. Lorsque Mme Kovacs a quitté le Bureau du dirigeant principal des ressources humaines, elle a communiqué avec la fonctionnaire pour lui dire qu’elle était toujours disponible pour l’aider dans sa recherche d’emploi.

[376]  Lors de son affectation sous la supervision de Mme Tattrie, la fonctionnaire a dit à cette dernière qu’elle n’était pas d’accord avec le plan de travail préparé par Mme Lehouillier. Mme Tattrie a convenu que la fonctionnaire prépare un plan de travail qui conviendrait aux deux et la fonctionnaire ne lui a remis le gabarit qu’en septembre 2013.

[377]  À compter de juin 2013, Mme Tattrie a rencontré la fonctionnaire toutes les semaines et lui a donné de la rétroaction verbale et écrite sur les travaux que cette dernière lui remettait. La rétroaction écrite consistait en une série de documents mensuels de rétroaction pour la période du 10 juin au 10 décembre 2013, qui contenaient les commentaires de Mme Tattrie basés sur les réunions bilatérales (pièce E‑1, onglet 27).

[378]  En juillet 2013, la fonctionnaire a eu de la difficulté à exécuter les tâches assignées. Mme Tattrie a alors augmenté les rencontres avec la fonctionnaire à deux fois par semaine; chaque rencontre durait une heure ou plus. Les commentaires de Mme Tattrie dans les trois plans de travail remis à la fonctionnaire en octobre 2013 avaient été discutés avec la fonctionnaire lors de leurs rencontres.

[379]  Mme Tattrie a remarqué que la fonctionnaire avait des problèmes de compréhension en ce qui concerne les éléments liés à son travail. Elle a mentionné à la fonctionnaire qu’elle n’utilisait pas les experts en la matière pour développer les questions et réponses concernant la directive sur la gestion du rendement. Elle a témoigné à l’effet que les lacunes de la fonctionnaire s’étaient poursuivies pendant toute la période où elle était sous sa supervision.

[380]  L’employeur a fait valoir qu’il avait fourni amplement de formation à la fonctionnaire, conformément aux témoignages de M. MacLeod, Mme Nassrallah et Mme Lehouillier. De plus, lorsque Mme Lehouillier a recommandé à la fonctionnaire de recourir aux services d’un mentor, celle-ci a décliné en disant qu’elle n’avait pas le temps.

[381]  L’employeur m’a renvoyé aux témoignages des employées que la fonctionnaire avait supervisées dans l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux, soit Mmes Chatterton, Coghlan et Malizia. Selon Mmes Coghlan et Chatterton, lorsqu’elles avaient besoin d’aide ou d’appui dans leur travail, elles n’en recevaient pas de la fonctionnaire. À plusieurs reprises, elles devaient expliquer les concepts du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux à la fonctionnaire, qui ne semblait pas comprendre. Mme Coghlan a témoigné à l’effet qu’alors qu’elle était en congé, la fonctionnaire l’a appelé à sa résidence pour obtenir de l’information qui avait déjà été publiée et qui était accessible au public. Mme Coghlan avait aussi préparé une série d’analyses, qu’elle a remises à la fonctionnaire pour ses commentaires et qui sont demeurées sans réponse pendant quelques semaines, nécessitant l’intervention de Mme Lehouillier. Ces rapports n’ont été publiés sur le site Web qu’à l’hiver 2013. Quant à Mme Malizia, cette dernière est demeurée au bureau après les heures de travail pour aider la fonctionnaire avec les tâches qu’elle devait accomplir.

[382]  M. MacLeod a témoigné à l’effet que la fonctionnaire a été licenciée, parce que son rendement est demeuré insuffisant. Son rendement n’était pas à la hauteur de ce qui est attendu d’un employé occupant un poste classifié à ce groupe et à ce niveau, malgré les objectifs clairs qui lui ont été communiqués. Les trois gestionnaires qui ont supervisé la fonctionnaire lui ont fourni de la rétroaction écrite et verbale. La fonctionnaire n’a démontré aucune amélioration notable qui rencontrait toutes les attentes de rendement. M. MacLeod a pris en compte les difficultés rencontrées par la fonctionnaire pour gérer l’équipe qu’elle supervisait.

[383]  En ce qui a trait à la question en litige, l’employeur a fait valoir que la preuve a démontré qu’il était raisonnable qu’il estime le rendement de la fonctionnaire insuffisant et que le licenciement est motivé aux termes de l’article 230 de la LRTSPF. Les normes de rendement étaient appropriées et ont été clairement communiquées à la fonctionnaire. L’employeur a agi de bonne foi et voulait que la fonctionnaire ait du succès.

[384]  À l’appui de son argumentation, l’employeur a cité les décisions suivantes : Raymond c. Conseil du Trésor, 2010 CRTFP 23; Plamondon c. Administrateur général (ministère des Affaires étrangères et du Commerce international), 2011 CRTFP 90; Mazerolle c. Administrateur général (ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CRTFP 6; Reddy c. Bureau du surintendant des institutions financières, 2012 CRTFP 94; Forner c. Administrateur général (ministère de l’Environnement), 2014 CRTFP 95; Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9; Gagné c. Agence canadienne d’inspection des aliments, 2016 CRTEFP 3; Burchill c. Canada (Procureur général), [1981] 1 C.F. 109 (C.A.); Gibson c. Conseil du Trésor (ministère de la Santé), 2008 CRTFP 68; Halfacree c. Canada (Procureur général), 2014 FC 360 (appel rejeté : 2015 CAF 98); et Kagimbi c. Canada (Procureur général), 2014 CF 400.

B.  Pour la fonctionnaire s’estimant lésée

[385]  En vertu de l’article 230 de la LRTSPF, le pouvoir de la Commission se limite à déterminer si, dans le cas de la fonctionnaire, la décision de la licencier était raisonnable. Le mandat de la Commission n’est pas de valider ou de justifier si la fonctionnaire était compétente ou si elle rencontrait les exigences de son poste.

[386]  En l’espèce, il est clair que la preuve découle de plaintes exprimées à Mme Lehouillier à l’endroit de la fonctionnaire. Les plaintes constituent essentiellement des doléances provenant majoritairement des employés de la fonctionnaire, que bon nombre de témoins ont qualifiés d’employés difficiles. Les plaintes en question ne constituent pas des lacunes en soi ni des manquements à des normes de rendement prédéterminées.

[387]  Les employés de la fonctionnaire ont témoigné de leurs doléances, soit les heures supplémentaires, les sandales d’une employée et le fait que la fonctionnaire n’atteignait pas un certain niveau de compréhension technique. Lorsque des plaintes sont déposées contre quelqu’un, il est de la responsabilité morale et légale minimale du gestionnaire de faire enquête sur les allégations et d’entendre la version de la personne visée avant de tirer une conclusion.

[388]  Mme Lehouillier prenait des décisions en fonction des caprices des employés et la fonctionnaire devait gérer ses employés en fonction de leurs doléances. La fonctionnaire a fait valoir que, au bout du compte, elle avait été licenciée parce qu’elle n’avait pas été en mesure de plaire aux caprices de ses employés. Elle n’avait pas de problème de rendement, mais il s’agissait d’un moyen de l’employeur pour parvenir à ses fins.

[389]  Selon la fonctionnaire, il s’agit essentiellement d’une collusion entre un groupe d’individus, soit Mmes Lehouillier, Kovacs, Tattrie, Nassrallah et Guilhem et M. Béliveau, pour se débarrasser d’elle.

[390]  Lorsque les employés rencontraient Mme Lehouillier pour rapporter des doléances, problèmes ou plaintes, mêmes frivoles, elle les acceptait d’emblée et basait ses décisions en fonction de ces plaintes, sans même en discuter avec la fonctionnaire. Selon la fonctionnaire, il ne s’agit pas d’un dossier de rendement insuffisant, mais de congédiement déguisé.

[391]  Le document le plus important de l’employeur pour justifier sa position est le rapport de gestion du rendement et d’apprentissage. Or, Mme Lehouillier a déposé deux rapports non signés et ne se souvenait pas d’en avoir signé un.

[392]  Concernant la cote globale de la fonctionnaire pour la période du 1er avril 2012 au 31 mars 2013, la modification de celle-ci de « Non atteint » à « Réussi - » n’a pas eu lieu lors du processus de révision, mais lors d’une discussion entre la fonctionnaire et Mme Lehouillier. La fonctionnaire avait fait part à Mme Lehouillier de son travail dans le dossier de l’OCDE et c’est pourquoi la cote a été modifiée. Étrangement, ce dossier a été retiré à la fonctionnaire en cours de route. Je note que, dans son courriel à Mme Guilhem du 19 avril 2013 (pièce S-10), Mme Lehouillier a indiqué qu’elle ajouterait le travail de la fonctionnaire dans le dossier de l’OCDE à son rapport de gestion du rendement et d’apprentissage.

[393]  La fonctionnaire a fait valoir que son rapport de gestion du rendement et d’apprentissage indique que, pour la période du 1er octobre 2012 au 31 mars 2013, elle a réussi à compléter tous ses objectifs de travail, en dépit du fait qu’elle avait une équipe difficile à gérer. Pendant cette période, elle faisait l’objet d’un plan de travail.

[394]  Bien que le rapport de gestion du rendement et d’apprentissage indique que la fonctionnaire a reçu plusieurs occasions de formation, elle a souligné qu’une de ces occasions avait eu lieu avant que la direction identifie ses problèmes de rendement. Par exemple, le Forum de développement professionnel de la Communauté nationale des gestionnaires à Winnipeg a eu lieu en mai 2012 (pièce E-11) et le programme du Secrétariat du Conseil du Trésor en développement du leadership a eu lieu en même temps (pièce E-10). Je note qu’en fait, la fonctionnaire a suivi le programme de leadership en novembre 2012 (pièce S-8).

[395]  La fonctionnaire a fait valoir que le plan de travail est un outil de gestion ou de communication, entre un gestionnaire et un employé, qui doit nécessairement être rédigé par le gestionnaire. Il doit comprendre les items à améliorer et les engagements de l’employeur et de l’employé. Le plan de travail doit aussi indiquer de façon détaillée les normes de rendement que l’employé doit atteindre dans un délai raisonnable. Selon la fonctionnaire, le plan de travail vise à répondre aux critères établis dans Raymond.

[396]  En l’espèce, le 2 novembre 2012, la fonctionnaire a reçu un courriel de Mme Lehouillier, comprenant un plan de travail déjà complété par cette dernière. Il n’y a eu aucune consultation ni échange entre Mme Lehouillier et la fonctionnaire dans l’élaboration du plan de travail. Même les engagements de la fonctionnaire ont été rédigés par Mme Lehouillier, ce qui est un non-sens. La fonctionnaire a fait part à Mme Lehouillier que les objectifs à atteindre étaient vagues et ne pouvaient être rencontrés.

[397]  Quant aux normes de rendement, Mme Lehouillier a dit à la fonctionnaire qu’elles seraient fixées en fonction des observations de Mme Lehouillier. Il n’y avait donc aucune norme de rendement préétablie. La fonctionnaire s’est interrogée à savoir comment un employé pouvait satisfaire aux normes de rendement lorsque celles-ci sont établies à partir d’observations. La fonctionnaire n’avait aucune façon de savoir clairement ce qu’on attendait d’elle.

[398]  Pour chacun des plans d’action discutés avec la fonctionnaire entre le 2 novembre 2012 et le 8 mars 2013, la colonne « résultats accomplis » était composée de critiques, de plaintes ou de doléances rapportées à Mme Lehouillier. Les observations de Mme Lehouillier étaient en réalité les observations d’autres personnes. Lorsque Mme Lehouillier ne recevait pas de plainte à l’égard de la fonctionnaire, elle inscrivait sur le plan de travail « rien de spécial à rapporter ».

[399]  La fonctionnaire a écrit plusieurs fois à Mme Lehouillier pour exprimer ses sentiments quant au processus. Ce que l’employeur a caractérisé de contestation est en réalité une demande légitime de la fonctionnaire d’obtenir un minimum de renseignements, dont elle avait besoin pour répondre à ce qu’on lui reprochait. Il était impossible pour la fonctionnaire de connaître ses lacunes, puisque les reproches de Mme Lehouillier variaient en fonction des plaintes qu’elle recevait.

[400]  De plus, comme les lacunes reprochées étaient rétroactives, comment pouvait-elle s’améliorer alors qu’on reprochait ce qui était déjà passé? Pour être capable de démontrer qu’un employé a atteint les normes de rendement, les critères de Raymond doivent être appliqués. L’employeur doit donner un délai raisonnable pour permettre à l’employé de démontrer qu’il a satisfait aux normes de rendement établies. Le plan de travail du 7 décembre 2012 a été remis à la fonctionnaire le 16 janvier 2013. Est-il raisonnable de demander à l’employé d’atteindre les objectifs pour la période se terminant le 7 décembre?

[401]  La fonctionnaire a su par une demande d’accès à l’information que, le 1er novembre 2012, Mme Pinto a fait parvenir à Mme Lehouillier une plainte à l’égard de la fonctionnaire (pièce S-3). La plainte contient sept doléances qui se trouvent mot à mot dans le plan de travail. Tout cela a été fait à l’insu de la fonctionnaire.

[402]  Le rendement de la fonctionnaire a été évalué, non pas en fonction d’objectifs non rencontrés, mais en fonction des plaintes de ses employés. Les courriels des employés à Mme Lehouillier ont été acheminés aux Relations de travail. Dans ces courriels, les employés se sont servi de Mme Lehouillier, ou vice-versa, dans le cadre de la gestion du rendement de la fonctionnaire. En révisant la preuve, je note qu’à une occasion, soit le 23 janvier 2013, Mme Lehouillier a fait suivre à Mme Guilhem un courriel que lui a envoyé Mme Coghlan le même jour (pièce E-1, onglet 22). Joint à ce courriel étaient un courriel de la fonctionnaire en date du 7 septembre 2012, et un autre du 29 novembre 2012, adressé à Mme Coghlan. Dans son courriel à Mme Lehouillier, Mme Coghlan a dit qu’elle avait fait le ménage dans ses courriels et que les courriels joints lui avaient rappelé qu’elle avait dû fournir à la fonctionnaire la même information quatre fois en trois mois et que, chaque fois, la fonctionnaire lui avait demandé si leur équipe possédait cette information. Un gestionnaire doit traiter les employés avec dignité et respect. Dans un courriel de Mme Lehouillier à Mme Coghlan, en date du 5 juin 2013 (pièce E-17), alors que Mme Lehouillier avait déjà quitté l’employeur pour assumer d’autres fonctions, elle a écrit au sujet de la fonctionnaire, « OMG! Elle ne comprends [sic] pas! ». Selon la fonctionnaire, il s’agit de mauvaise foi.

[403]  En ce qui a trait à Mme Kovacs, sa période réelle d’observation de la fonctionnaire entre le 19 avril et le 10 juin 2013, n’était que de 12 jours ouvrables. Mme Kovacs a élaboré un plan de travail pour la fonctionnaire après seulement huit jours d’observation. Avec si peu d’observation, comment est-il possible de conclure que la fonctionnaire ne répondait pas aux exigences de son poste?

[404]  Lors de son affectation auprès de Mme Tattrie, la lettre d’affectation indiquait que Mme Tattrie devait rédiger un plan de formation, mais la fonctionnaire n’en a jamais reçu. Il est clair, selon le courriel que Mme Tattrie a envoyé à M. Béliveau en date du 22 juillet 2013 (pièce S‑18), que Mme Tattrie n’était pas intéressée à rédiger un plan de formation.

[405]  Mme Tattrie était désintéressée par la fonctionnaire. Alors qu’elle devait rédiger un plan de travail mensuellement, la preuve a démontré que la fonctionnaire n’en a reçu que trois, tous le 22 octobre 2013, soit 132 jours après avoir commencé à occuper son poste. Dans un message en date du 14 novembre 2013, la fonctionnaire a exprimé ses inquiétudes, dont ce long délai avant de recevoir la rétroaction de sa gestionnaire.

[406]  Dans un courriel de Mme Guilhem à une conseillère en relations de travail en date du 30 octobre 2013 (pièce S-30), soit huit jours après la remise des plans de travail à la fonctionnaire, Mme Guilhem faisait référence à l’« imminent congédiement » de la fonctionnaire.

[407]  La fonctionnaire a fait valoir que, selon Raymond, si l’évaluation de l’employeur n’est pas raisonnable, la décision de licenciement doit être annulée. Au paragraphe 128 de Raymond, l’arbitre de grief a considéré la définition de « raisonnabilité » en révision judiciaire donnée dans Dunsmuir, comme suit :

[128] Le concept de la raisonnabilité au sens où l’entend la Cour suprême en matière de révision judiciaire peut également s’avérer utile et, à cet égard, je reprends la définition donnée dans Dunsmuir :

[…]

[47]  Le caractère raisonnable tient principalement à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit.

[…]

[408]  Concernant la justification de la décision, la fonctionnaire a fait valoir que l’employeur n’a déposé aucune preuve établissant qu’elle n’était pas en mesure de se conformer à des normes claires et bien définies à l’intérieur d’un délai prescrit.

[409]  En ce qui a trait à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, la fonctionnaire a avancé qu’en aucun temps pendant le processus de gestion de son rendement, elle n’a été informée ou consultée; de plus, elle n’a reçu aucune réponse à ses questions. Ce n’est qu’en avril 2014, à la suite de sa demande d’accès à l’information, qu’elle a été en mesure de constater la collusion de la direction.

[410]  Le fait que Mme Lehouillier se servait des employés pour élaborer son système de gestion du rendement de la fonctionnaire allait à l’encontre du principe de l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit. La fonctionnaire a fait valoir qu’en demandant des exemples aux employés de l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux ou en acceptant les exemples qu’ils lui ont fournis, Mme Lehouillier s’est soustraite à ses obligations.

[411]  La fonctionnaire a fait valoir que la conclusion de rendement insuffisant tirée à son endroit était déraisonnable et qu’aucun des quatre critères de Raymond n’a été respecté. Elle a fait valoir que, en somme, l’employeur s’est livré à un exercice empreint de mauvaise foi dès le départ. Les normes de rendement étaient inappropriées et l’employeur n’a jamais clairement communiqué à la fonctionnaire les normes qu’elle devait respecter. La fonctionnaire n’a jamais reçu les outils, la formation ou l’encadrement nécessaire pour respecter les normes de rendement dans un délai jugé raisonnable.

[412]  La fonctionnaire a demandé que la décision de l’employeur de la licencier soit annulée et qu’elle soit réintégrée dans son poste ou dans un poste équivalent au groupe et au niveau EC-07, avec compensation et avantages sociaux, au taux d’intérêt prescrit par la Banque du Canada, rétroactivement à la date de son licenciement.

[413]  La fonctionnaire a cité Tipple c. Administrateur général (ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux), 2009 CRTFP 110 (« Tipple 2009 »), à l’appui de sa demande de se voir accorder des dommages moraux. Elle mentionne les effets du processus de gestion de rendement sur sa santé et le fait que Mme Lehouillier l’ait constaté (voir pièces S-8 et S-11). La fonctionnaire a avancé que, lorsqu’un employé a un problème de santé, la gestion a une obligation morale de s’enquérir si l’employé a besoin d’aide. La fonctionnaire a fait valoir que je peux évaluer le poids de l’opinion du médecin dans le certificat médical du 25 juillet 2015 (pièce S-34). De plus, le fait de se rendre au travail tous les jours et de se faire critiquer devient humiliant. La fonctionnaire a été déclarée inapte au travail avant son licenciement. Pendant une année, Mme Lehouillier a eu l’occasion de mettre fin au processus qu’elle avait entamé. Elle aurait pu dire aux employés de cesser leurs plaintes. Il s’agit de harcèlement. La fonctionnaire demande donc des dommages moraux de 300 000 $.

[414]  La fonctionnaire demande aussi des dommages exemplaires de 150000 $. Elle fait valoir que rien ne peut justifier les agissements de l’employeur, une agence centrale du gouvernement fédéral. Le Bureau du dirigeant principal des ressources humaines a la responsabilité de développer et de mettre en œuvre les politiques qui empêchent de tels comportements au sein des ministères. De plus, il s’agit du secteur responsable de concevoir le nouveau système de gestion du rendement dans la fonction publique.

[415]  La fonctionnaire a fait valoir que son affectation dans l’équipe de la gestion du rendement n’était qu’un subterfuge et qu’elle ne pouvait pas être licenciée alors qu’elle était en affectation. L’affectation pour une période temporaire est pour acquérir de nouvelles connaissances. Elle aurait dû d’abord être réintégrée dans son poste substantif, soit comme gestionnaire de l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux.

[416]  À l’appui de ses arguments, la fonctionnaire a cité les décisions suivantes : Nnagbo c. Conseil du Trésor (Travaux publics et Services gouvernementaux Canada), 2002 CRTFP 1; Raymond; Tipple 2009; Tipple c. Canada (Procureur général), 2012 CAF 158; et Wallace c. United Grain Growers Ltd., [1997] 3 RCS 701.

C.  Réfutation de l’employeur

[417]  Concernant l’allégation de la fonctionnaire à l’effet que son licenciement constituait un congédiement déguisé, l’employeur a souligné que son grief a été renvoyé à l’arbitrage en vertu l’article 209(1)c) de la LRTSPF. Il s’agit d’une nouvelle allégation dont le but est de transformer le grief et dont je ne dois pas tenir compte (voir Burchill).

[418]  Quant au certificat médical du 25 juillet 2015 (pièce S-34), l’employeur a consenti à son dépôt sur la foi qu’il ne serait pas utilisé et seulement parce que la fonctionnaire insistait pour qu’il soit déposé. L’employeur a fait valoir qu’aucun poids ne devait être accordé au certificat médical.

[419]  En ce qui a trait à l’argument de la fonctionnaire voulant que les plans de travail préparés par Mme Lehouillier et Kovacs reposaient sur les plaintes et doléances des employés, l’employeur a souligné que trois de ces employés ont témoigné relativement aux lacunes qu’elles ont observées chez la fonctionnaire. Les travaux remis par la fonctionnaire exigeaient un haut niveau de révision et devaient souvent être refaits par les gestionnaires. Les témoins de l’employeur ont présenté des exemples concrets et cette preuve n’a pas été contredite.

[420]  L’employeur a fortement nié l’allégation d’un complot impliquant le Service des relations de travail, dont le rôle est d’aider et de conseiller la gestion. En l’espèce, la gestion demandait conseil aux Relations de travail et les courriels, entre la gestion et Mme Guilhem, déposés par la fonctionnaire étaient largement caviardés. L’employeur demande qu’aucun poids ne soit accordé à cet argument.

[421]   Quant au projet de l’OCDE, l’employeur a souligné que Mme Lehouillier avait témoigné à l’effet qu’elle avait assumé la responsabilité du projet afin de permettre à la fonctionnaire de se concentrer sur son rôle de gestionnaire du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux.

[422]  En ce qui concerne les outils de formation, l’employeur a souligné que le Forum de développement professionnel de la Communauté nationale des gestionnaires et le programme du Secrétariat du Conseil du Trésor en développement du leadership consistaient en deux formations distinctes, tel qu’expliqué par Mmes Nassrallah et Lehouillier et M. MacLeod.

[423]  En ce qui concerne l’argument de la fonctionnaire voulant qu’elle avait avisé la gestion que les objectifs de ses plans de travail n’étaient pas atteignables, cet argument a été mentionné pour la première fois dans le témoignage de la fonctionnaire.

[424]  L’employeur a soulevé que l’allégation de la fonctionnaire, voulant que Mme Kovacs avait témoigné à l’effet qu’elle était soulagée et heureuse du départ de la fonctionnaire, était erronée et non conforme au témoignage de Mme Kovacs.

[425]  L’employeur a contesté l’argument de la fonctionnaire voulant que Mme Tattrie n’ait pas préparé un plan d’apprentissage. À cet égard, il s’est appuyé sur le document intitulé [traduction] « Renseignements sur le plan de travail et les rapports hiérarchiques, conformément à la lettre d’affectation », qui indiquait qu’il s’agissait d’une décision conjointe entre Mme Tattrie et la fonctionnaire (pièce E-1, onglet 26).

[426]  En ce qui concerne l’argument de la fonctionnaire concernant son licenciement alors qu’elle était en affectation, l’employeur a fait valoir qu’en l’espèce, il ne s’agit pas d’un grief relatif à une affectation. De plus, l’affectation n’est pas une nomination à un poste et le poste d’attache de la fonctionnaire demeurait son poste substantif.

[427]  En ce qui concerne la demande de dommages, selon l’employeur, si le grief est accueilli, aucun dommage ne doit être accordé. L’employeur a agi de bonne foi tout au long du processus, son seul désir étant que la fonctionnaire puisse répondre aux objectifs de rendement. L’employeur a fait valoir qu’il n’y avait aucun subterfuge et que les quatre facteurs de Raymond ont été rencontrés.

IV.  Analyse

[428]  En vertu de l’alinéa 12(1)d) de la LGFP, cité plus tôt dans cette décision, un administrateur général a le pouvoir de licencier un fonctionnaire qui fait partie de l’administration publique centrale lorsqu’il est d’avis que son rendement est insuffisant. Cependant, le paragraphe 12(3) de la LGFP exige que la décision de l’administrateur général soit motivée.

[429]  Le paragraphe 11(1) de la LGFP définit « administration publique centrale » comme étant les ministères figurant à l’annexe I de la LGFP et les autres secteurs de l’administration publique fédérale figurant à l’annexe IV. Le Conseil du Trésor figure à l’annexe I et il fait donc partie de l’administration publique centrale. L’article 6 de la LGFP précise que le dirigeant principal des ressources humaines est l’un des fonctionnaires publics du Conseil du Trésor et qu’il a le rang d’administrateur général. J’en conclus donc que le Bureau du dirigeant principal des ressources humaines fait aussi partie de l’administration publique centrale.

[430]  La compétence de la Commission à l’égard du licenciement d’un fonctionnaire pour rendement insuffisant est limitée, jusqu’à un certain point, par l’article 230 de la LRTSPF, qui se lit comme suit :

230 Saisi d’un grief individuel portant sur le licenciement […] pour rendement insuffisant d’un fonctionnaire de l’administration publique centrale […], […] la Commission […] doit décider que le licenciement […] étaient motivés s’il conclut qu’il était raisonnable que l’administrateur général estime le rendement du fonctionnaire insuffisant.

[Sic pour l’ensemble de la citation]

[431]  Cette compétence a été exercée de façon constante dans plusieurs décisions. Dans Reddy, l’arbitre de grief a formulé la portée de cette compétence comme suit aux paragraphes 87 et 88 :

87 […] Le rôle de l’arbitre de grief est de déterminer s’il était raisonnable que l’employeur juge que le rendement de l’employé était insuffisant, pas si le licenciement était raisonnable. Si l’évaluation de l’employeur selon laquelle le rendement de l’employé était insuffisant est raisonnable, je dois conclure que le licenciement qui en résulte est justifié, et je ne peux pas intervenir dans cette décision, puisque ma compétence est épuisée. Le licenciement ne peut être annulé que si l’évaluation de l’employeur selon laquelle le rendement était insuffisant est déraisonnable. Aucune autre conclusion n’est possible. […]

88 Ainsi, la portée de mon intervention se limite à répondre à une seule question : « Était-il raisonnable, selon les éléments de preuve présentés par les parties, pour l’employeur de juger que le rendement de l’employé en question était insuffisant? »

[432]  Cette approche a été entérinée par la Cour d’appel fédérale dans Forner c. Canada (Procureur général), 2016 CAF 136, lorsqu’elle a conclu comme suit, au paragraphe 17, que l’arbitre de grief n’aurait pas dû procéder à une évaluation du rendement de l’employé :

[17] L'arbitre a d'abord cherché à déterminer si le rendement de la demanderesse était insatisfaisant; il a ensuite examiné la question du caractère raisonnable de l'évaluation faite par l'administrateur général, en utilisant les trois critères tirés de la décision Raymond qui ont été soulevés par la demanderesse. Comme l'administrateur général avait déterminé que le rendement de la demanderesse était insatisfaisant, l'arbitre aurait dû se limiter à la question de savoir si la décision de l'administrateur général était raisonnable, au lieu de procéder à une analyse en deux étapes comme il l'a fait.

[433]  L’arbitre de grief dans Raymond avait énoncé comme suit les critères pour déterminer si l’évaluation de l’administrateur général en ce qui concerne le rendement insuffisant d’un fonctionnaire était raisonnable :

[…]

131 […] Ainsi, je ne vois pas comment on pourrait conclure qu’il était raisonnable qu’un administrateur général estime le rendement de l’un de ses fonctionnaires insuffisant, si preuve est faite que :

L’administrateur général ou les superviseurs qui ont apprécié le rendement du fonctionnaire se sont livrés à un exercice empreint de mauvaise foi;

Le fonctionnaire n’était pas assujetti à des normes de rendement appropriées;

L’employeur n’avait pas communiqué clairement au fonctionnaire les normes de rendement qu’il devait satisfaire; ou

le fonctionnaire n’avait pas reçu les outils, la formation et l’encadrement nécessaires pour atteindre les normes de rendement dans un délai jugé raisonnable.

[…]

Ces critères ont été repris dans d’autres décisions depuis.

[434]  En l’espèce, je crois cependant utile de reformuler les critères de Raymond comme suit :

  • L’employeur a-t-il fixé à la fonctionnaire des objectifs de travail raisonnables et les lui a-t-il clairement communiqués à l’avance?

  • L’employeur a-t-il fixé à la fonctionnaire des indicateurs de rendement raisonnables et les lui a-t-il clairement communiqués à l’avance?

  • L’employeur a-t-il accordé à la fonctionnaire un délai raisonnable pour lui permettre de rencontrer les objectifs de travail et les indicateurs de rendement qu’il lui avait fixés?

  • L’employeur a-t-il fourni à la fonctionnaire tout l’appui dont elle avait besoin pour lui permettre de rencontrer les objectifs de travail et les indicateurs de rendement qu’il lui avait fixés dans le délai qu’il lui a accordé?

[435]  M. MacLeod a pris la décision de licencier la fonctionnaire. Toutefois, selon son témoignage, il n’avait pas de connaissance directe des éléments soutenant les motifs du licenciement, puisqu’il s’est fié à l’opinion des superviseures de la fonctionnaire. Par conséquent, j’accorde peu de poids à son témoignage à cet égard.

[436]  M. MacLeod a aussi témoigné au sujet de l’importance et des capacités requises pour le poste qu’occupait la fonctionnaire, conformément à l’énoncé de critères de mérite de ce poste (pièce E-22). Cependant, j’estime que cette partie du témoignage de M. MacLeod, bien qu’offrant un fonds contextuel, n’est pas pertinente à la question en litige. En aucun temps pendant le processus de suivi du rendement de la fonctionnaire, y inclus le licenciement, l’employeur s’est interrogé à savoir si la fonctionnaire répondait aux critères de mérite du poste de gestionnaire de l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux. Les motifs sur lesquels l’employeur s’est fondé pour licencier la fonctionnaire étaient la rencontre des objectifs du plan de gestion de son rendement. Je considère donc qu’il soit inéquitable que l’employeur puisse s’appuyer sur cette partie de la preuve pour justifier maintenant le licenciement de la fonctionnaire et je n’en tiens pas compte pour cette raison.

[437]  Par contre, je note le témoignage de M. MacLeod à l’effet que la « capacité de penser de façon analytique » est une compétence de base du groupe EC et l’un des premiers facteurs que Mme Lehouillier devait évaluer avant d’offrir à la fonctionnaire le poste de gestionnaire, Sondage auprès des fonctionnaires fédéraux, Secteur de la gouvernance, de la planification et des politiques, Bureau du dirigeant principal des ressources humaines. Je note aussi l’admission de Mme Lehouillier voulant que la fonctionnaire rencontrait les exigences de ce poste lorsqu’elle le lui a offert. J’en conclus que, puisque Mme Lehouillier a offert ce poste à la fonctionnaire, la fonctionnaire possédait alors la capacité de penser de façon analytique requise pour ce poste.

[438]  La preuve indique cependant que, lors d’un entretien avec la fonctionnaire en novembre 2012 au sujet de l’examen de rendement semestriel, Mme Lehouillier lui a fait part de ses préoccupations concernant sa capacité à remplir les exigences de son poste : bien que la lettre de licenciement indique que cet entretien a eu lieu le 6 novembre 2012, la preuve indique clairement qu’il a plutôt eu lieu le 2 novembre 2012.

[439]  La lettre de licenciement indique aussi que Mme Tattrie avait avisé la fonctionnaire que son « […] rendement n’était toujours pas satisfaisant, les mêmes lacunes perdurant; notamment, le jugement et la compréhension, la capacité de comprendre les éléments liés au travail, et la communication ». La lettre de licenciement ne mentionnait aucune autre lacune de la part de la fonctionnaire.

[440]  Je traiterai d’abord de la période pendant laquelle la fonctionnaire faisait l’objet d’un plan de travail sous la supervision de Mme Lehouillier, soit du 2 novembre 2012 au 8 mars 2013, et de Mme Kovacs, soit du 22 avril au 9 juin 2013. Par la suite je traiterai de la période de son affectation à la division de la gestion du rendement sous la supervision de Mme Tattrie, du 10 juin au 10 décembre 2013.

A.  La période sous la supervision de Mmes Lehouillier et Kovacs

[441]  Le vendredi 2 novembre 2012, Mme Lehouillier a rencontré la fonctionnaire pendant deux heures pour discuter de son rapport de gestion du rendement et d’apprentissage de mi-année, soit pour la période allant du 1er avril au 30 septembre 2012 (pièce E-2). Mme Lehouillier lui a accordé la cote de rendement « Réussi - » en raison de lacunes à l’égard du respect des échéanciers et des interactions avec ses subalternes et ses collègues. La fonctionnaire n’a pas signé le rapport de gestion du rendement et d’apprentissage, parce qu’elle n’était pas d’accord avec la cote.

[442]  Lors de cette rencontre, Mme Lehouillier a informé la fonctionnaire qu’elle ferait l’objet d’un plan de gestion de son rendement, y compris un plan de travail comprenant sept objectifs fixés par Mme Lehouillier.

[443]  Le même jour, à 17 h 48, Mme Lehouillier a envoyé un courriel à la fonctionnaire, l’avisant qu’elle instaurait un plan de gestion de son rendement et y a joint un plan de travail. Ce courriel avisait également la fonctionnaire que, si son rendement ne s’améliorait pas, elle serait rétrogradée ou licenciée. Les sept objectifs énumérés plus tôt dans cette décision sont reproduits ci-dessous pour en faciliter la consultation :

[…]

a)Améliorer le jugement, compréhension […]

b)Devenir agile et plus rapide dans sa capacité à comprendre [sic] les éléments reliés au travail […]

c)Effectuer des tâches de gestion elle-même […]

d)Améliorer son style et approche de gestion (focus sur la communication) […]

e)Livrer les éléments de travail dans les délais convenus […]

f)Garder les items reliés au personnel de manière confidentiel [sic] en tout temps […]

g)Fournir du support et guider les employés […]

[…]

[Sic pour l’ensemble de la citation]

[444]  Le courriel prévoyait des rencontres entre Mme Lehouillier et la fonctionnaire toutes les deux semaines pour faire un suivi des sept objectifs. Le résultat de leurs discussions devait être écrit dans le plan de travail de la fonctionnaire.

[445]  En ce qui a trait au plan de travail, Mme Lehouillier a elle-même fixé les objectifs de la fonctionnaire. Les observations de Mme Lehouillier constituaient le seul indicateur de rendement qu’elle a fixé à l’égard des deux objectifs suivants du plan de gestion du rendement de la fonctionnaire mentionnés dans la lettre de licenciement: « améliorer le jugement, compréhension »; « devenir agile et plus rapide dans sa capacité à comprendre les éléments liés au travail ». À titre d’exemple, le soi-disant indicateur de rendement concernant l’objectif « améliorer le jugement, compréhension » était « les observations de [Mme Lehouillier] portant sur l’interprétation que [la fonctionnaire] faisait de ses tâches ». De même, le soi-disant indicateur de rendement concernant l’objectif de « devenir agile et plus rapide dans sa capacité à comprendre les éléments liés au travail » était « les observations de [Mme Lehouillier] portant sur la capacité de [la fonctionnaire] de comprendre ses tâches.

[446]  La troisième lacune de la fonctionnaire mentionnée dans la lettre de licenciement était la « communication ». La seule mention relative à la « communication » dans le plan de travail établi par Mme Lehouillier se trouve dans l’objectif « améliorer son style et approche de gestion (focus sur la communication) ». Les indicateurs de rendement que Mme Lehouillier avait fixés à l’égard de cet objectif étaient 1) une réduction du nombre d’incidents et d’erreurs et 2) la rareté de tels incidents et erreurs.

[447]  Je n’ai pas à traiter des autres objectifs du plan de travail, parce qu’ils ne n’ont pas trait aux lacunes de la fonctionnaire mentionnées dans la lettre de licenciement.

[448]  D’emblée, la fonctionnaire a soulevé le manque de précision des objectifs et des indicateurs de rendement du plan de travail. Elle a répondu à Mme Lehouillier dans un courriel en date du 6 novembre 2012, dans lequel elle a souligné que, selon elle, les objectifs étaient trop vagues et qu’elle fournirait d’autres commentaires à une date ultérieure.

[449]  La fonctionnaire a fait parvenir un courriel détaillé à Mme Lehouillier le 22 novembre 2012, accompagné du plan de travail qui incluait ses propres commentaires (pièce E-1, onglet 6). La fonctionnaire a fait état, entre autres, du fait que son rapport de gestion du rendement et d’apprentissage indiquait qu’elle avait atteint 9 des 10 objectifs fixés et que certains objectifs de son plan de travail manquaient de précision. La fonctionnaire a aussi indiqué qu’elle et Mme Lehouillier devaient établir ensemble des critères objectifs qui détermineraient si elle avait satisfait aux sept attentes du plan de travail. À cet égard, la fonctionnaire a écrit que certains des objectifs manquaient de précision et qu’elle voulait mieux comprendre ce que la gestion attendait d’elle et comment son rendement à l’égard des objectifs serait évalué.

[450]  La fonctionnaire a, de façon constante, maintenu sa position concernant le manque de clarté des objectifs et des indicateurs de rendement de son plan de travail utilisé dans le cadre de la gestion de son rendement. Dans un courriel à Mme Nassrallah le 12 avril 2013 (pièce S-22), la fonctionnaire lui a fait part de la situation qu’elle avait vécue avec Mme Lehouillier. Entre autres, elle a écrit qu’elle n’avait jamais reçu de réponse à son courriel du 22 novembre 2012, dans lequel elle demandait que les objectifs du plan de travail soient plus clairs, mesurables, atteignables, pertinents et délimités dans le temps. Dans son courriel à Mme Nassrallah du 18 avril 2013 (pièce E-12), elle indique que la gestion de son rendement ne suit pas les normes. Le lendemain, la fonctionnaire a de nouveau écrit à Mme Nassrallah à cet égard (pièce E-13). Dans le courriel de Mme Lehouillier à Mme Guilhem du 19 avril 2013, ayant trait à la rencontre du 18 avril 2013 entre Mme Lehouillier et la fonctionnaire (pièce S-10), Mme Lehouillier indique que la fonctionnaire lui a dit qu’elle n’acceptait pas le plan de travail, qu’elle le trouvait vicié et qu’il ne suivait pas les étapes de la gestion de rendement du Conseil du Trésor. Elle y indique que la fonctionnaire trouvait que le plan de travail « […] n’est pas assez ‘SMART’ ([traduction] précis, mesurable, atteignable, réaliste, opportun) ».

[451]  Le 15 mai 2013, Mme Kovacs a remis un plan de travail à la fonctionnaire pour la période du 22 avril au 14 mai 2013. Il s’agissait du premier plan de travail soumis à la fonctionnaire depuis celui du 8 mars 2013, soit le dernier de Mme Lehouillier. Dans un courriel à Mme Kovacs le 22 mai 2013 (pièce E-3), la fonctionnaire a écrit, entre autres, ce qui suit :

Le plan de travail qui m’est soumis ne doit pas uniquement reposer sur des « attitudes et comportements » mais plutôt sur des objectifs clairs, atteignables et mesurables. Il est essentiel de convenir au préalable entre les parties de produits à livrer et commenter quelques semaines plus tard si les résultats ont été atteints. Ce n’est pas ce que fait le plan de travail qui m’a été présenté, qui est une liste de critiques qui offre peu ou pas de contexte.

[452]  Dans sa lettre à Mme Nassrallah du 10 juin 2013 (pièce E-1, onglet 25), la fonctionnaire a réitéré que les plans de travail étaient mal conçus et qu’ils ne comprenaient pas d’objectifs clairs et mesurables.

[453]  Quelle était la réponse de l’employeur aux préoccupations soulevées par la fonctionnaire concernant les plans de travail? La fonctionnaire avait écrit à Mme Nassrallah à quatre reprises, soit les 12, 18 et 19 avril et le 10 juin 2013, et cette dernière ne lui a jamais répondu par écrit. La lettre de M. Béliveau à la fonctionnaire, en date du 23 juillet 2013, était en réponse aux communications de la fonctionnaire faisant part de son désaccord avec l’évaluation de son rendement et, dans les mots de M. Béliveau, « le plan de redressement pour rendement insatisfaisant ». Entre autres, M. Béliveau a écrit ce qui suit :

[…]

La quantité et le contenu de vos communications démontrent également votre manque d’engagement à remédier à la situation. La collaboration de l’employé est indispensable dans le cadre d’un plan de redressement pour rendement insatisfaisant. Je compte donc sur votre étroite collaboration dès aujourd’hui; à défaut de vous conformer à cette directive, je n’aurai d’autre choix que de mettre fin à votre emploi au [Secrétariat du Conseil du Trésor] sans délai.

[…]

[454]  La fonctionnaire a soulevé des préoccupations qu’elle croyait légitimes, à savoir que, selon elle, le plan de travail était vicié, puisque les objectifs devaient être plus clairs, mesurables, atteignables et délimités dans le temps.

[455]  Concernant la clarté des objectifs fixés par Mme Lehouillier, « améliorer jugement, compréhension » et « devenir agile et plus rapide dans sa capacité à comprendre les éléments liés au travail » ne peuvent être qualifiés de modèles de précision. Comme le plan de travail préparé par Mme Lehouillier n’indiquait pas à la fonctionnaire quels objectifs spécifiques elle devait atteindre, elle n’a pas pu connaître à l’avance en quoi améliorer son rendement à leur égard. J’en conclus que l’employeur n’a pas fixé à la fonctionnaire des objectifs de travail raisonnables en ce qui les concerne et qu’il ne lui a pas clairement communiqués à l’avance de tels objectifs de travail.

[456]  Par ailleurs, les résultats obtenus notés sur les plans de travail n’étaient pas toujours ceux découlant d’observations directes de la fonctionnaire par Mme Lehouillier ou par Mme Kovacs. Pendant l’absence de Mme Lehouillier, du 23 novembre au 2 décembre 2012, elle a été remplacée par M. Cadieux. Ce sont les observations de ce dernier, formulées à partir de son interaction avec la fonctionnaire concernant le courriel sur la modélisation par équation structurelle, que Mme Pinto a envoyées directement à Mme Lehouillier et qui se trouvent dans la colonne des « résultats obtenus » pour l’objectif « améliorer jugement, compréhension » dans le plan de travail du 7 décembre 2012.

[457]  Mme Lehouillier a reconnu qu’elle avait tenu compte en partie des observations d’autres personnes, telles que Mmes Coghlan, Kovacs et Pinto. À titre d’exemple, le 20 décembre 2012, Mme Coghlan a eu une rencontre avec Mme Lehouillier concernant ses interactions avec la fonctionnaire. Le 31 décembre 2012, Mme Lehouillier a envoyé un courriel à Mme Coghlan résumant leur rencontre et demandant d’autres exemples d’interaction entre Mme Coghlan et la fonctionnaire (pièce E-14). Dans un autre échange de courriels entre elle et Mme Lehouillier en date du 28 mars 2013 (pièce E-16), le premier courriel, envoyé par Mme Coghlan, à 14 h 26, se lit comme suit : « [v]eux-tu encore des exemples? » La réponse de Mme Lehouillier, à 14 h 30, consistait en un seul mot en lettres majuscules: « OUI! » À 14 h 37, Mme Coghlan a fait parvenir à Mme Lehouillier un courriel que la fonctionnaire lui avait adressé le même jour, à 13 h 30, ayant trait à une comparaison entre le nombre de questions figurant dans les sondages de 2011 et de 2014.

[458]  Mme Lehouillier avait demandé à Mme Kovacs de fournir ses commentaires concernant ses expériences avec la fonctionnaire. Dans sa réponse du 14 janvier 2013 (pièce E-1, onglet 11), Mme Kovacs a fait un commentaire négatif concernant le projet du tableau de bord et le fait que la fonctionnaire avait donné un mauvais renseignement lors d’une rencontre avec le directeur général. Dans le plan de travail du 16 janvier 2013, pour l’objectif « améliorer jugement, compréhension », la colonne des résultats obtenus indique que la fonctionnaire a donné un mauvais renseignement lors d’une rencontre de consultation et qu’il y a eu une rétroaction négative concernant le tableau de bord. De même, dans la colonne des résultats obtenus pour l’objectif « devenir agile et plus rapide dans sa capacité à comprendre les éléments reliés au travail », Mme Lehouillier mentionne aussi qu’il y a eu une rétroaction négative concernant le tableau de bord. Ce même commentaire se trouve aussi dans la colonne des résultats obtenus pour l’objectif « améliorer son style et approche de gestion (focus sur la communication) » pour la période du 8 décembre 2012 au 16 janvier 2013. Concernant ce dernier objectif, le seul autre commentaire noté par Mme Lehouillier était dans le plan de travail du 8 mars 2013, où elle a indiqué que des employés lui avaient rapporté qu’ils devaient écouter des « sermons » de la fonctionnaire. Pour les autres périodes des plans de travail, Mme Lehouillier a indiqué qu’il n’y avait rien de spécial à signaler concernant cet objectif.

[459]  Mme Kovacs a supervisé la fonctionnaire du 22 avril au 10 juin 2013, alors qu’elle était directrice par intérim dans le poste qu’occupait auparavant Mme Lehouillier. Elle a témoigné à l’effet que, lors de sa rencontre avec la fonctionnaire le 22 avril 2013, elle l’a informé qu’elle continuerait à appliquer le plan de travail établi par Mme Lehouillier. Le 15 mai 2013, elle a remis à la fonctionnaire un plan de travail pour la période du 22 avril au 14 mai 2013. Il s’agissait du premier plan de travail remis à la fonctionnaire depuis celui se terminant le 8 mars 2013. Ce plan de travail reprenait textuellement celui établi par Mme Lehouillier, avec les mêmes objectifs et les mêmes indicateurs de rendement à l’égard des trois lacunes mentionnées dans la lettre de licenciement. Pendant la période visée par ce plan de travail, en raison des congés respectifs de la fonctionnaire et de Mme Kovacs, il n’y avait que huit jours ouvrables où Mme Kovacs aurait pu elle-même observer le rendement de la fonctionnaire.

[460]  En ce qui concerne le premier objectif (« améliorer le jugement et la compréhension »), Mme Kovacs a noté qu’elle avait été informée par le personnel que la fonctionnaire leur avait donné une directive erronée. L’exemple donné concerne une note d’information à l’intention du président du Conseil du Trésor, dont le but était d’obtenir l’autorisation d’exécuter le sondage de 2014 auprès des fonctionnaires fédéraux. La fonctionnaire était d’avis que l’intitulé de la note d’information devait demeurer [traduction] « à titre d’information » au lieu de [traduction] « pour approbation ». Le directeur général a constaté l’erreur en fin de journée et a renvoyé la note d’information à Mme Kovacs. Ceci exigeait une correction de la note d’information et de multiples copies aux fins de signature. Selon Mme Kovacs, il s’agissait d’un exemple du manque de compréhension de la nature des documents d’information.

[461]  L’exemple fourni à l’égard du deuxième objectif (« devenir agile et comprendre plus rapidement les éléments en lien avec le travail ») a été mentionné antérieurement dans la présente décision lorsqu’il a été question de la réunion avec un directeur général des Services des ressources humaines du Secrétariat du Conseil du Trésor. Mme Kovacs a noté sur le plan de travail qu’elle croyait que la fonctionnaire avait passé trop de temps à expliquer ce qui était requis pour le plan en question, soit verbalement et en utilisant un tableau blanc.

[462]  En ce qui a trait à l’objectif « améliorer son style et son approche de gestion », Mme Kovacs a noté deux choses sur le plan de travail : une employée lui a rapporté avoir été frustrée par le ton de la fonctionnaire, lorsque cette dernière lui a demandé de quitter son bureau lors d’une demande d’aide immédiate; et lors d’une discussion avec Mme Kovacs, la fonctionnaire lui a répondu « vous êtes la patronne ».

[463]  Pour les objectifs du plan de travail à l’égard desquels les observations de Mmes Lehouillier et Kovacs constituaient le seul indicateur de rendement fixés à la fonctionnaire, les lacunes de la fonctionnaire devaient nécessairement être portées à son l’attention de façon rétroactive, soit une fois le geste posé. En d’autres mots, ce n’est que si la fonctionnaire posait un geste qui, selon ses superviseures, constituait une lacune, qu’elles devaient en aviser la fonctionnaire sous forme de rétroaction qui, selon les modalités du plan de travail, devait avoir lieu toutes les deux semaines. Il n’y a pas de preuve selon laquelle, pour les objectifs en question, Mme Lehouillier avait fixé des indicateurs de rendement clairs et les avaient clairement communiqué à la fonctionnaire pour que celle-ci sache exactement quel rendement l’employeur attendait d’elle. J’en conclus que, dans de telles circonstances, la fonctionnaire ne pouvait pas savoir à l’avance comment elle allait être évaluée pour les objectifs « améliorer jugement, compréhension » et « devenir agile et plus rapide dans sa capacité à comprendre les éléments reliés au travail ». Je conclus que l’employeur n’a pas fixé à la fonctionnaire des indicateurs de rendement raisonnables à l’égard de ces objectifs et qu’il ne les lui a pas clairement communiqués à l’avance.

[464]  De plus, j’estime qu’en se fiant en partie aux commentaires ou aux observations d’autres employés afin d’évaluer le rendement de la fonctionnaire, Mmes Lehouillier et Kovacs n’ont pas pu évaluer le rendement de la fonctionnaire entièrement en fonction de leurs observations directes, contrairement aux indicateurs de rendement fixés par Mme Lehouillier et maintenus par Mme Kovacs. Mmes Lehouillier et Kovacs ont, de fait, modifié ces indicateurs de rendement, sans le communiquer clairement à l’avance à la fonctionnaire.

[465]  Je traiterai maintenant des questions de savoir si, pendant qu’elle était sous la supervision de Mmes Lehouillier et Kovacs, l’employeur a accordé à la fonctionnaire un délai raisonnable pour lui permettre de rencontrer les objectifs de travail et les indicateurs de rendement qu’il lui avait fixés et s’il lui a fourni tout l’appui dont elle avait besoin pour lui permettre de rencontrer les objectifs de travail et les indicateurs de rendement qu’il lui avait fixés dans le délai qu’il lui a accordé.

[466]  Quant au délai accordé à la fonctionnaire pour atteindre les objectifs que l’employeur lui avait fixés, le calcul doit débuter au moment où la fonctionnaire a été avisée de la mise en place du plan de gestion de son rendement, du plan de travail et de l’avertissement qu’à défaut d’amélioration, elle serait rétrogradée ou licenciée. Comme la fonctionnaire en a été avisée en fin de journée, le vendredi 2 novembre 2012, la période a effectivement commencé le lundi 5 novembre 2012 et a duré six mois, soit jusqu’à son affectation à un autre poste au sein de l’équipe de Mme Tattrie, à compter du 10 juin 2013 (bien que sept mois se soient écoulés entre ces deux dates, la fonctionnaire a néanmoins été en congé de maladie pendant un mois). Dans des circonstances normales, j’aurais conclu qu’une période de six mois constituait un délai raisonnable afin de permettre à la fonctionnaire d’atteindre des objectifs et des indicateurs de rendement raisonnables clairement communiqués à l’avance, puisqu’elle occupait son poste depuis décembre 2011. Cependant, vu mes conclusions à l’effet que l’employeur n’a pas fixé à la fonctionnaire des objectifs de travail et des indicateurs de rendement raisonnables, qu’il aurait dû clairement lui communiquer à l’avance, j’estime que la fonctionnaire ne pouvait pas atteindre les objectifs et indicateurs que l’employeur lui a fixés, peu importe la période allouée pour ce faire.

[467]  L’employeur a fait valoir qu’il avait fourni amplement de formation à la fonctionnaire. Les mesures mises en place par la gestion pour améliorer le rendement de la fonctionnaire consistaient en des séances de coaching à l’École de la fonction publique, le programme du Secrétariat du Conseil du Trésor en développement du leadership (voir pièce E-10), et la participation au Forum de développement professionnel de la Communauté nationale des gestionnaires, dont le thème était le leadership (voir pièce E-11).

[468]  La fonctionnaire a participé au Forum de développement professionnel de la Communauté nationale des gestionnaires en mai 2012, donc bien avant que Mme Lehouillier instaure le plan de gestion du rendement de la fonctionnaire. De plus, aucune preuve n’a été présentée concernant les conférences ou ateliers de travail auxquels la fonctionnaire a assisté ni s’ils étaient pertinents aux objectifs visant à « améliorer le jugement, compréhension », à « devenir agile et plus rapide dans sa capacité à comprendre les éléments liés au travail » et à « améliorer son style et approche de gestion (focus sur la communication) ». Par conséquent, je n’en tiens pas compte comme exemple de formation offerte à la fonctionnaire pour l’aider à améliorer son rendement.

[469]  L’employeur a mis de l’avant d’autres exemples de formation offerte à la fonctionnaire.

[470]  En novembre 2012, la fonctionnaire a assisté au programme du Secrétariat du Conseil du Trésor en développement du leadership, qui comprenait 10 à 12 heures de suivi sous forme de coaching.

[471]  Comme autre exemple d’appui, lors de leur rencontre du 16 janvier 2013, Mme Lehouillier a informé la fonctionnaire que l’employé assujetti à un plan de suivi de la gestion du rendement avait été placé sous la supervision de Mme Chatterton pour donner à cette dernière de l’expérience en supervision. Par conséquent, la fonctionnaire aurait plus de temps pour travailler sur ses projets et respecter les délais.

[472]  De plus, pendant leur rencontre du 18 février 2013, lorsque la fonctionnaire a dit qu’elle avait besoin de plus de temps pour se concentrer, Mme Lehouillier lui a offert de travailler à la maison et lui a demandé ce qu’elle pouvait faire pour l’aider avec du travail semblable à l’avenir.

[473]  Bien que ces exemples démontrent que l’employeur tentait de trouver des moyens d’appuyer la fonctionnaire, ils ne ciblent pas l’amélioration des objectifs visant à « améliorer le jugement, compréhension », à « devenir agile et plus rapide dans sa capacité à comprendre les éléments liés au travail » et à « améliorer son style et approche de gestion (focus sur la communication) ».

[474]  L’employeur a soutenu que la rétroaction verbale et écrite qui lui a été fournie par ses superviseures était une partie importante de la formation et de l’encadrement de la fonctionnaire. Mme Lehouillier a formulé des commentaires écrits sur les plans de travail de la fonctionnaire et a tenu des rencontres avec elle concernant son travail. Dans le cas de Mme Kovacs, des réunions bilatérales avec la fonctionnaire avaient lieu toutes les semaines ou toutes les deux semaines, et des rencontres informelles et quotidiennes avaient lieu au sujet des problèmes liés aux dossiers, pour clarifier les éléments dont elle devait assurer le suivi et pour déterminer les priorités. Cela est vrai. Toutefois, tel que je l’ai expliqué plus tôt dans cette décision, cette rétroaction était à caractère rétroactif, puisqu’aucun indicateur de rendement n’a été clairement communiqué à l’avance à la fonctionnaire. J’en conclus que l’employeur n’a pas fourni à la fonctionnaire tout l’appui dont elle avait besoin pour lui permettre de rencontrer les objectifs de travail et les indicateurs de rendement qu’il lui avait fixés dans le délai qu’il lui a accordé. En d’autres mots, l’employeur n’a pas offert tout l’appui dont la fonctionnaire avait besoin pour « améliorer le jugement, compréhension », « devenir agile et plus rapide dans sa capacité à comprendre les éléments liés au travail » et « améliorer son style et approche de gestion (focus sur la communication) ».

[475]  À la lumière de la preuve et des critères applicables, je conclus qu’il n’était pas raisonnable que l’employeur estime que le rendement de la fonctionnaire était insuffisant pendant la période où elle était assujettie à un plan de gestion de rendement dans l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux.

B.  La période sous la supervision de Mme Tattrie

[476]  La fonctionnaire a été sous la supervision de Mme Tattrie pendant son affectation à la division de la gestion du rendement, soit du 10 juin au 10 décembre 2013. Les objectifs de la fonctionnaire pendant cette période, tels que fixés dans ses plans de travail, étaient les suivants : (1) terminer les dossiers de son ancien travail lié au sondage auprès des fonctionnaires fédéraux; (2) sa transition à la division de la gestion du rendement; (3) l’évaluation de soumissions relatives à un contrat portant sur la gestion du changement; et (4) diriger l’élaboration et la gestion continue des questions et réponses liées à la gestion du rendement.

[477]  Toutefois, dans la lettre de licenciement, l’employeur a mentionné les trois lacunes suivantes au sujet du rendement de la fonctionnaire : le jugement et la compréhension, la capacité à comprendre les éléments liés au travail et la communication. La preuve ne démontre aucun lien entre ces motifs de licenciement et les trois premiers objectifs fixés dans les plans de travail de la fonctionnaire pendant la période où elle était sous la supervision de Mme Tattrie. Par conséquent, l’employeur ne peut se servir des trois premiers objectifs fixés dans les plans de travail pour appuyer le licenciement de la fonctionnaire pour rendement insuffisant.

[478]   Le seul objectif fixé dans les plans de travail, dont l’employeur peut se servir, est le quatrième objectif, soit « diriger l’élaboration et la gestion continue des questions et réponses liées à la gestion du rendement ». Le témoignage de Mme Tattrie a clairement établi que cet objectif représentait l’essentiel des fonctions de la fonctionnaire. J’estime que cet objectif est le seul qui pourrait être lié aux « mêmes lacunes perdurant », auxquelles l’employeur faisait allusion dans la lettre de licenciement, à l’égard du jugement et de la compréhension, ainsi que de la capacité de comprendre les éléments liés au travail.

[479]  Dans son témoignage ainsi que dans ses observations sur les plans de travail, Mme Tattrie a indiqué que le manque de jugement et les lacunes en ce qui concerne la capacité de réflexion de la fonctionnaire étaient attribuables principalement au fait qu’elle rédigeait elle-même les réponses liées à la gestion du rendement avant de les faire parvenir aux experts et qu’elle n’avait pas ou peu recours à ces derniers pour préparer les questions et réponses.

[480]  La fonctionnaire a fourni ses commentaires, en réponse à ceux de Mme Tattrie concernant les documents liés au plan de travail pour chaque période du 10 juin au 30 septembre 2013, dans les plans de travail annotés qu’elle a remis à Mme Tattrie le 14 novembre 2013 (pièce E‑5) et déposé en preuve par l’employeur lors de l’audience. Selon les commentaires de la fonctionnaire, une fois que Mme Tattrie lui a clarifié qu’elle devait demander aux experts de rédiger les réponses aux questions liées à a gestion du rendement, la fonctionnaire s’y est conformée. Mme Tattrie a témoigné à l’effet qu’elle n’a pas répondu aux commentaires de la fonctionnaire et n’a pas discuté de ses commentaires avec elle, et l’employeur n’a pas contredit la preuve de la fonctionnaire.

[481]  J’estime que, selon la prépondérance des probabilités, la preuve voulant que la fonctionnaire se soit conformée aux directives de Mme Tattrie concernant le recours aux experts pour la rédaction des réponses aux questions liées à la gestion du rendement l’emporte sur le témoignage de Mme Tattrie à cet égard. De plus, Mme Tattrie n’a pas répondu à la lettre que la fonctionnaire lui a remise le 14 novembre 2013 (pièce S-26), dans laquelle la fonctionnaire a aussi fait référence à ses interactions avec les experts.

[482]  Puisque la preuve de la fonctionnaire indique qu’elle s’est conformée aux instructions de Mme Tattrie concernant le seul objectif de travail auquel l’employeur puisse faire allusion dans la lettre de licenciement, et que cette preuve n’a pas été contredite par l’employeur, je conclus que je n’ai pas besoin de procéder à l’analyse des critères applicables pour la période durant laquelle la fonctionnaire était supervisée par Mme Tattrie. La fonctionnaire ayant rencontré le seul objectif pertinent que l’employeur lui avait fixé, je conclus qu’il n’était pas raisonnable que l’employeur estime que le rendement de celle-ci était insuffisant pendant la période où elle était assujettie à un plan de gestion de rendement dans la division de la gestion du rendement, soit pendant son affectation sous la supervision de Mme Tattrie.

C.  Mesures de réparation

[483]  Vu mes conclusions à l’effet qu’il n’était pas raisonnable que l’employeur estime le rendement de la fonctionnaire insuffisant, j’accueille le grief.

[484]  La fonctionnaire a fait valoir qu’elle ne pouvait pas être licenciée alors qu’elle était en affectation sous la supervision de Mme Tattrie et qu’elle aurait dû être réintégrée dans son poste substantif de gestionnaire de l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux. Comme son grief est accueilli, je n’ai pas à traiter cet argument.

[485]  Comme mesure corrective, la fonctionnaire a demandé d’être réintégrée dans son poste de gestionnaire de l’équipe du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux ou dans un poste équivalent au groupe et au niveau EC-07, avec rémunération, avantages sociaux et intérêts au taux prescrit par la Banque du Canada, rétroactivement à la date de son licenciement. L’employeur ne m’a fait aucune représentation à cet égard. De plus, je n’ai devant moi aucune preuve à l’effet que le poste de gestionnaire, Sondage auprès des fonctionnaires fédéraux, Secteur de la gouvernance, de la planification et des politiques, Bureau du dirigeant principal des ressources humaines, Conseil du Trésor, soit vacant.

[486]  La fonctionnaire a aussi demandé l’octroi de dommages psychologiques de 300 000 $, alléguant les effets du processus de la gestion de rendement sur sa santé et le fait que se rendre au travail et se faire critiquer était devenu humiliant. En l’espèce, aucune preuve indépendante n’a été présentée pour établir un lien de causalité entre la gestion du rendement de la fonctionnaire et son état de sa santé ni son allégation d’humiliation. Je ne peux donc accorder cette demande de la fonctionnaire.

[487]  De plus, la fonctionnaire a demandé l’octroi de dommages punitifs de 150 000 $ en raison des agissements de l’employeur à son égard. En l’espèce, je crois que la réintégration de la fonctionnaire constitue une mesure suffisante pour dissuader l’employeur de gérer à l’avenir, de la façon dont il l’a fait dans cette affaire, ce qu’il perçoit être un problème de rendement chez un employé.

[488]  Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

(L’ordonnance apparaît à la page suivante)


V. Ordonnance

[489]  Le grief est accueilli.

[490]  J’ordonne ce qui suit :

a)   la fonctionnaire est réintégrée au groupe et au niveau EC-07, avec solde et sans perte d’avantages sociaux, à compter du 6 janvier 2014;

b)  dans les soixante (60) jours de cette décision, le dirigeant principal des ressources humaines remboursera à la fonctionnaire sa solde au groupe et au niveau EC‑07 à compter du 6 janvier 2014, avec intérêts annuels aux taux prescrits par la Banque du Canada, le tout compte tenu des déductions d’usage;

c)  dans les soixante (60) jours de cette décision, le dirigeant principal des ressources humaines rétablira la solde de la fonctionnaire au groupe et au niveau EC-07, avec protection salariale, et ses avantages sociaux, à compter de la date du remboursement prévu au paragraphe 490b) de cette décision;

d)  dans les quatre-vingt-dix (90) jours de cette décision, le dirigeant principal des ressources humaines réintégrera la fonctionnaire au travail dans un poste, de groupe et niveau équivalent au groupe et au niveau EC-07, pour lequel elle est qualifiée.

[491]  Je demeure saisi de toute question liée au calcul des sommes dues au titre du paragraphe 490 de cette décision, pendant quatre-vingt-dix (90) jours suivant la date de cette décision.

Le 19 février 2020

Steven B. Katkin,

 une formation de la Commission des relations de travail

et de l’emploi dans le secteur public fédéral

 

 

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