Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le plaignant a déposé une plainte alléguant que son agent négociateur avait failli à son devoir de représentation équitable dans le cadre de la contestation de la décision de son employeur de ne pas lui divulguer de l’information possiblement utile à la contestation de son licenciement – le plaignant a reproché à l’agent négociateur le choix de la stratégie juridique poursuivie à cet égard – la défenderesse a demandé à la Commission de rejeter la plainte sans audience – la Commission a conclu que le plaignant n’avait présenté aucune allégation pouvant donner lieu à un argument défendable à savoir que l’agent négociateur aurait agi de manière arbitraire ou discriminatoire ou de mauvaise foi dans sa représentation du plaignant.

Plainte rejetée.

Contenu de la décision

Date: 20200326

Dossier: 561-02-40349

 

Référence: 2020 CRTESPF 32

Loi sur la Commission

des relations de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral et

Loi sur les relations de travail

dans le secteur public fédéral

Armoiries

Devant une formation de la

Commission des relations

de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral

ENTRE

 

Régis Beniey

plaignant

 

et

 

Alliance de la fonction publique du Canada

 

défenderesse

Répertorié

Beniey c. Alliance de la Fonction publique du Canada

Affaire concernant une plainte visée à l’article 190 de la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral

Devant :  Marie-Claire Perrault, une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

Pour le plaignant : Lui-même

Pour la défenderesse :  Daria Strachan, avocate

Décision rendue sur la base d’arguments écrits
déposés
le 29 avril, le 21 juin, le 21 juillet, le 29 novembre et le 13 décembre 2019.


MOTIFS DE DÉCISION

I.  Plainte devant la Commission

[1]  Régis Beniey, le plaignant, a déposé une plainte auprès de la Commission des relations de travail dans le secteur public fédéral (la « Commission ») en vertu de l’alinéa 190(1)g) de la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral (L.C. 2003, ch. 22, art. 2, la « Loi »), qui prévoit la possibilité pour un fonctionnaire de déposer une plainte pour pratique déloyale de travail. L’alinéa 190(1)g) renvoie à l’article 185, qui couvre divers types de pratique déloyale de travail. Celle qui nous concerne en l’espèce est visée à l’article 187 de la Loi, qui se lit comme suit :

 Il est interdit à l’organisation syndicale, ainsi qu’à ses dirigeants et représentants, d’agir de manière arbitraire ou discriminatoire ou de mauvaise foi en matière de représentation de tout fonctionnaire qui fait partie de l’unité dont elle est l’agent négociateur.

[2]  Le plaignant fait partie d’une unité de négociation représentée par l’Alliance de la Fonction publique du Canada (l’« AFPC » ou la « défenderesse »). Le plaignant reproche à la défenderesse de ne pas l’avoir aidé à exercer le recours auquel il avait droit auprès de la Cour fédérale, soit le contrôle judiciaire du traitement que l’Agence des services frontaliers du Canada (l’« Agence ») a donné à sa demande d’accès à l’information. Il demande à la Commission d’ordonner à la défenderesse de l’aider à exercer ce recours.

[3]  La défenderesse soutient que le plaignant n’a pas présenté d’allégation qui, si elle était avérée, mènerait à une conclusion de la violation de l’article 187 de la Loi. Par conséquent, elle demande à la Commission de rejeter la plainte sans audience.

[4]  Pour les motifs qui suivent, la demande de la défenderesse est accordée, et la plainte est rejetée.

II.  Procédure écrite

[5]  Puisqu’il n’y a pas eu d’audience, aucune preuve ne figure au dossier. Toutefois, pour traiter de la demande de rejet présentée par la défenderesse, je dois décider si, en prenant les faits allégués par le plaignant comme avérés, il existe un argument défendable à l’effet que la défenderesse aurait contrevenu à son devoir de représentation équitable du plaignant.

A.  Plainte

[6]  Le plaignant travaillait à l’Agence depuis janvier 2014. D’abord assujetti à une période de stage, il a obtenu un statut d’emploi indéterminé (groupe et niveau FB-03) à partir du 4 août 2015. Le plaignant soutient que le milieu de travail était toxique, situation qu’il a dénoncée à maintes reprises. Il a fini par déposer un grief pour harcèlement et discrimination en septembre 2016. À partir de ce moment, toujours selon lui, la situation n’a fait que s’envenimer.

[7]  Le 3 juillet 2017, selon le plaignant, la plupart des employés dont le quart de travail finissait à minuit ont reçu la permission de quitter à 23 h 45. Toutefois, on a ordonné au plaignant de rester jusqu’à la fin de son quart. Le fonctionnaire a dénoncé cette injustice, et a déposé un grief à cet égard. De son côté, la gestion a exigé, le 15 juillet 2017, que le plaignant remette ses outils de travail, dont son arme à feu. Le plaignant a réclamé à la gestion les enregistrements vidéo des lieux de travail le 3 juillet 2017 pour prouver qu’il s’agissait d’un traitement abusif et d’un acte de discrimination. La gestion a répondu qu’il devait faire une demande d’accès à l’information.

[8]  Le plaignant a donc fait une demande d’accès à l’information. L’Agence a demandé un délai supplémentaire pour répondre à la demande.

[9]  Le 24 octobre 2017, l’Agence a licencié le plaignant. Selon ce dernier, la raison du licenciement est l’incident du 3 juillet 2017.

[10]  D’après le document intitulé [traduction] « Recommandation pour mettre fin à l’emploi », la perspective de l’Agence est un peu différente. Selon l’Agence, depuis le début de son emploi, le plaignant éprouvait des difficultés dans ses interactions avec les clients, ses collègues et la gestion. Il devenait hostile lorsqu’il n’était pas d’accord avec ce qu’on lui communiquait, que cela vienne de la gestion ou de ses collègues.

[11]  Le 3 juillet 2017, le plaignant s’est effectivement fait dire qu’il devait travailler jusqu’à la fin de son quart, mais selon l’Agence, il n’était pas le seul dans cette situation. Son attitude belliqueuse était telle que tant ses collègues que ses superviseurs ont manifesté une certaine inquiétude à le voir continuer de porter son équipement de défense, y compris l’arme à feu. Pour cette raison, on lui a enlevé son équipement de défense le 15 juillet 2017.

[12]  L’Agence lui a alors laissé savoir qu’il devrait passer une évaluation d’aptitude à porter de l’équipement défensif, pour laquelle l’Agence devait communiquer avec son médecin. Le plaignant a d’abord donné son consentement à l’évaluation, puis l’a retiré. Le port d’équipement défensif était une des conditions d’emploi du plaignant et il ne rencontrait plus cette condition. De plus, le plaignant refusait l’évaluation d’aptitude à porter de l’équipement défensif; l’Agence a conclu qu’elle ne pouvait plus l’employer, d’où le licenciement.

[13]  Entre-temps, le plaignant poursuivait sa démarche d’accès à l’information pour obtenir les enregistrements vidéo du 3 juillet 2017. Il a finalement reçu les enregistrements vidéo, mais selon lui, ils étaient modifiés et partiels. Il a porté plainte en vertu de la Loi sur l’accès à l’information (L.R.C. (1985), ch. A-1). À la suite de cette plainte, l’Agence a envoyé une deuxième série de vidéos, encore insatisfaisants selon le plaignant. Certains enregistrements vidéo demandés qui montraient le départ de ses collègues n’ont pas été fournis au motif que le plaignant n’avait droit qu’aux enregistrements où il apparaissait, sinon, l’employeur avait le devoir de protéger la vie privée des autres personnes. En outre, en vertu de la politique de conservation des enregistrements, certains enregistrements vidéo avaient été effacés après 30 jours, malgré le fait que le plaignant les avait demandés dans les 30 jours suivant l’incident.

[14]  La Commissaire à l’information a répondu à la plainte en décembre 2018. Sa conclusion était qu’il n’y avait pas eu de défaut dans la communication des enregistrements vidéo. La Commissaire à l’information indiquait qu’il n’y avait pas possibilité de recours contre sa décision, mais qu’un contrôle judiciaire de la décision de communication de l’Agence était possible, et devait se faire dans les 45 jours de la réponse de la Commissaire à l’information. L’échéance était donc le 28 janvier 2019.

[15]  En décembre 2018, le plaignant a communiqué avec la défenderesse pour demander son aide pour le contrôle judiciaire de la décision de communication de l’Agence, puisqu’il estimait essentiels les enregistrements vidéo pour prouver le caractère abusif de son licenciement.

[16]  Il y a eu toute une série d’échanges entre le plaignant et la défenderesse au sujet de la demande de contrôle judiciaire, et en particulier entre le plaignant et le représentant de la défenderesse qui était chargé du dossier. Ne recevant pas de réponse de la défenderesse, et voyant l’échéance arriver, le plaignant a engagé à ses frais une avocate pour déposer une demande de contrôle judiciaire auprès de la Cour fédérale. En même temps, la défenderesse a décidé elle aussi de retenir les services d’une avocate, qui a déposé une demande de contrôle judiciaire auprès de la Cour fédérale au nom du plaignant, sans en informer ce dernier.

[17]  Selon le plaignant, il y avait une erreur de droit dans la demande de contrôle judiciaire déposée par l’avocate retenue par la défenderesse. Par conséquent, cette demande était vouée à l’échec. Le plaignant voulait que la défenderesse retire la demande déposée par l’avocate qu’elle avait retenue, et appuie la démarche et la demande du plaignant, en payant l’avocate qu’il avait lui-même engagée. À la demande du plaignant, la défenderesse a instruit l’avocate qu’elle avait retenue de se désister de la demande de contrôle judiciaire qu’elle avait présentée.

[18]  Je note que l’avocate retenue par la défenderesse fait partie du cabinet que le plaignant avait mentionné à plusieurs reprises à la défenderesse comme étant tout indiqué pour sa demande de contrôle judiciaire.

[19]  Le plaignant demande que la défenderesse lui rembourse les frais juridiques liés à sa propre demande de contrôle judiciaire, toujours en instance, et paie les honoraires d’un représentant de son choix pour l’arbitrage du grief qu’il a déposé à l’encontre de son licenciement.

B.  Réponse de la défenderesse

[20]  La défenderesse soutient qu’elle a rempli en tout temps son devoir de représentation équitable à l’égard du plaignant. Elle n’a pas agi de manière arbitraire ou discriminatoire ou de mauvaise foi. Par conséquent, on ne pourrait conclure à une violation de la Loi.

[21]  L’échange de courriels avec le plaignant et entre les représentants de la défenderesse montre bien que ces derniers étaient au courant des préoccupations du plaignant au sujet des enregistrements vidéo et de leur communication partielle par l’Agence. Il est également clair que les représentants de la défenderesse ont étudié avec soin la possibilité d’un contrôle judiciaire visant la communication de renseignements par l’Agence, compte tenu du refus de la Commissaire à l’information de donner suite à la plainte.

[22]  Dès le 9 janvier 2019, la défenderesse a demandé une opinion juridique sur les chances de succès d’une demande de contrôle judiciaire.

[23]  Le 23 janvier 2019, l’avocate retenue par la défenderesse a émis l’opinion que la demande avait peu de chance de succès, parce qu’il pouvait être difficile de démontrer que l’Agence était en contravention de la Loi sur l’accès à l’information dans son traitement des enregistrements vidéo. Il est clair que l’avocate a bien saisi que c’était l’action de l’Agence, et non la décision de la Commissaire à l’information, qui devait être contestée par la demande de contrôle judiciaire. L’avocate était également bien consciente de la date limite pour le dépôt de la demande de contrôle judiciaire, soit le 28 janvier 2019.

[24]  Le 25 janvier 2019, la défenderesse a décidé de faire déposer une demande de contrôle judiciaire au nom du plaignant, mais entre-temps, le plaignant a lui-même fait déposer une demande de contrôle judiciaire auprès de la Cour fédérale par l’entremise d’une avocate qu’il avait engagée à son propre compte.

[25]  À la demande du plaignant, l’avocate retenue par la défenderesse a retiré le 30 janvier 2019 la demande de contrôle judiciaire qu’elle avait déposée auprès de la Cour fédérale.

[26]  La correspondance entre les parties à ce moment-là illustre les échanges qui ont eu cours. Après avoir été pressé pendant tout le mois de janvier par le plaignant pour que la défenderesse retienne un avocat pour déposer une demande de contrôle judiciaire auprès de la Cour fédérale, et avoir procédé en ce sens, le représentant chargé du dossier a envoyé à quelques membres de l’exécutif de la défenderesse le courriel suivant. Il y fait allusion à la représentante locale de la défenderesse, qui a renvoyé l’affaire à l’administration centrale de la défenderesse en décembre. Le représentant chargé du dossier écrit ce qui suit :

[Traduction]

[…] J’ai parlé avec [la représentante locale de la défenderesse, qui] est d’accord avec ma façon de faire (voir pièce jointe). Elle dit que ce membre est TRÈS difficile et qu’il change constamment d’idée sur ce qu’il faut faire. […]

[27]  La pièce jointe est une ébauche de courriel adressé au plaignant le 30 janvier 2019, dont le texte est le suivant :

M. Beniey,

Suite à votre demande initiale de poursuite légale par l’AFPC, nous avons examiné votre dossier. Je me suis entretenue avec vous et Chris Shuurman, président de la section locale 16, le 18 janvier 2019, où j’ai décrit les étapes que l’AFPC entreprendrait. Celles-ci comprenaient l’évaluation des avantages juridiques de la contestation de la décision du Commissaire à l’information. J’ai expliqué, indépendamment du mérite de la contestation, que l’AFPC déposerait les documents nécessaires pour protéger le délai afin de contester la décision du Commissaire à l’information.

La date limite étant proche, l’AFPC a donné pour instructions à son avocat de déposer un avis de contestation de la décision du Commissaire à l’information (ci-joint). Après avoir examiné la jurisprudence, l’AFPC est d’avis que nous pourrions ne pas réussir à contester la décision du Commissaire à l’information en vertu de l’al. 41 de la Loi, mais néanmoins, l’AFPC croit que nous devrions aller de l’avant car cela peut contribuer positivement au grief contestant votre licenciement lorsqu’il est entendu par la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (CRTESPF). Au minimum, nous estimons que même une contestation infructueuse de la décision du Commissaire à l’information peut aider l’AFPC à convaincre l’arbitre de la CRTESPF que l’ASFC a agi de mauvaise foi en détruisant les enregistrements vidéo en question.

Le 25 janvier 2019, vous m’avez informé que vous aviez retenu les services de votre propre avocat et que vous souhaitiez procéder par vous-même. Compte tenu de la proximité de la date limite pour le dépôt de la contestation de la décision du Commissaire à l’information, l’AFPC a déposé un avis de demande contestant les conclusions du Commissaire à l’information.

Le 25 janvier 2019, vous m’aviez également informé que vous pensiez que l’AFPC procédait incorrectement pour « obtenir l’accès aux documents il faut réviser la décision de l’Agence des rapports non-rendus du commissaire ». L’AFPC croit que cette position est incorrecte en droit.

Néanmoins, la décision de contester la décision du Commissaire à l’information vous appartient. Si vous le souhaitez, l’AFPC peut retirer son avis de demande ou informer la Cour fédérale que votre avocat se chargera de l’affaire. Veuillez noter que l’AFPC ne vous remboursera aucune dépense liée aux avocats externes que vous avez engagés.

En résumé, voici vos options qui sont les suivantes :

1) Donnez à l’AFPC la permission de poursuivre en son nom la décision judiciaire de la Commissaire à l’information;

2) Demandez à l’AFPC de retirer le contrôle juridictionnel de la décision du Commissaire à l’information;

3) Demandez à l’AFPC d’informer la Cour fédérale que votre avocat se chargera de l’affaire (la contestation de la décision du Commissaire à l’information en vertu de l’al. 41 de la Loi).

S’il vous plaît, veuillez m’aviser de votre décision avant le 1 février 2019.

[Caractères gras dans l’original]

[Sic pour l’ensemble de la citation]

[28]  La demande de contrôle judiciaire déposée par l’avocate retenue par la défenderesse ne contestait pas la décision de la Commissaire à l’information mais bien la décision de l’Agence de remettre des copies partielles des enregistrements vidéo et de détruire certains enregistrements.

[29]  Comme le confirme la jurisprudence de la Commission, un agent négociateur remplit son obligation de représentation équitable s’il étudie avec soin le cas d’un employé dans l’unité de négociation qu’il représente et prend une décision motivée, sans discrimination et sans caractère arbitraire. C’est effectivement ce que l’on constate dans le présent dossier. Tout indique que la défenderesse a étudié avec soin le dossier du plaignant, a demandé un avis juridique, et a assuré le respect des délais en déposant à temps une demande de contrôle judiciaire. On ne pourrait donc conclure que la défenderesse a agi de façon discriminatoire ou arbitraire, ou de mauvaise foi.

[30]  La défenderesse a cité nombre de décisions de la Commission pour étayer ses arguments; j’y reviendrai dans mon analyse.

[31]  La défenderesse soutient que puisque les faits allégués par le plaignant ne pourraient établir une violation de l’article 187 de la Loi, la plainte devrait être rejetée sans audience.

C.  Réplique du plaignant

[32]  Le plaignant s’oppose vivement au rejet de la plainte sans audience. Selon lui, les faits établissent clairement les agissements arbitraires et malhonnêtes de la défenderesse et de ses représentants.

[33]  Selon le plaignant, la demande de contrôle judiciaire déposée par l’avocate retenue par la défenderesse démontre clairement que la défenderesse a agi de mauvaise foi.

[34]  En déposant une demande de contrôle judiciaire le 28 janvier 2019, alors que le plaignant avait lui-même déposé une demande de contrôle judiciaire le 25 janvier 2019, la défenderesse agissait contre les intérêts du plaignant.

[35]  Le plaignant est en désaccord avec la stratégie adoptée dans la demande de contrôle judiciaire présentée par l’avocate retenue par la défenderesse, car elle ne mentionne pas l’exception à l’obligation de divulgation concernant la protection de la vie privée au paragraphe 19(1) de la Loi sur l’accès à l’information. En effet, l’Agence a utilisé comme motif pour refuser la divulgation de certains enregistrements vidéo que le plaignant n’y figure pas, et que par conséquent il n’y a pas droit, puisqu’il faut tenir compte des intérêts de la vie privée des personnes qui paraissent dans ces enregistrements vidéo. Le plaignant veut ces vidéos puisqu’ils démontrent un traitement différentiel – les employés qui quittent le travail à 23 h 45 le 3 juillet 2017, sans être ennuyés, et son traitement, où l’employeur le retient au travail.

[36]  Le plaignant soutient que l’Agence pouvait brouiller les visages des autres personnes apparaissant dans les enregistrements vidéo s’il y avait une question de vie privée. Le défaut de la défenderesse de l’appuyer dans sa démarche pour poursuivre cet argument devant la Cour fédérale constitue une violation de ses droits à une représentation équitable.

III.  Arguments subséquents

[37]  Une fois la réplique du plaignant reçue, j’ai décidé de procéder par voie d’arguments écrits pour déterminer la demande en rejet sommaire. J’ai tenu une conférence téléphonique avec les parties pour en discuter. Le plaignant a demandé d’avoir la possibilité de poser des questions par écrit au représentant chargé du dossier, demande que j’ai accordée.

A.  Questions du plaignant

[38]  Les questions ont trait à la décision du représentant chargé du dossier de demander à l’avocate retenue par la défenderesse de déposer une demande de contrôle judiciaire auprès de la Cour fédérale, sans en demander expressément l’autorisation au plaignant. En voici deux exemples :

10. […]  le 25 janvier 2019 à 14:12 vous donnez l’ordre à l’avocate de l’AFPC […] d’agir à mon insu, veuillez indiquer pourquoi vous ne m’avez pas fait parvenir les documents nécessaires tels que, le mandat de représentation légal, l’entente de service et l’autorisation légale d’utiliser et de distribuer mes informations personnelles?

[…]

12. […] avez-vous (ou toute autre personne à l’AFPC) indiqué à [l’avocate retenue par la défenderesse] ma décision contenue dans mon courriel du 25 janvier 2019 à 12:33? [où le plaignant informe la défenderesse qu’il a demandé à sa propre avocate de déposer une demande de contrôle judiciaire auprès de la Cour fédérale] Si oui, veuillez indiquer exactement à quelle date, à quelle heure et comment vous lui avez-vous fait parvenir ce que je décrétais dans mon courriel du 25 janvier 2019 à 12:33.

[Les passages en caractères gras le sont dans l’original]

 

[39]  Les questions entrent dans le menu détail des échanges entre les parties. Le plaignant revient sur le commentaire qui avait été fait à son égard, à savoir qu’il est très difficile, et il pose la question suivante au représentant chargé du dossier :

15. […] dans votre courriel du 29 janvier 2019 à 21:41, vous affirmez que [la représentante locale de la défenderesse] m’a catalogué comme étant un membre TRÈS difficile qui change constamment d’idée, veuillez indiquer pourquoi vous avez relayé cette allégation à la gestion de l’AFPC? Qu’est-ce que cette allégation vous permettait de soutenir et de prouver au moment où vous l’avez envoyé? Sur quelles preuves [la représentante locale de la défenderesse] se basait-elle pour supporter ses propos? Considériez-vous cette allégation comme véridique au moment de la relayer? Considérez-vous cette allégation comme véridique en ce jour?

[Le passage en caractères gras l’est dans l’original]

B.  Réponse de la défenderesse

[40]  La défenderesse a présenté comme suit sa position face aux allégations et questions du plaignant :

3. La position de l’AFPC est entièrement articulée dans leurs soumissions [sic] du 21 juin 2019. De plus, la documentation produite avec leurs soumissions [sic] montre clairement que le syndicat est resté en contact régulier avec le plaignant, a analysé en détail l’affaire, et a obtenu un avis juridique sur la manière de procéder. Lorsque le plaignant a décidé qu’il voulait que l’AFPC retire la demande de contrôle judiciaire parce qu’il voulait engager son propre conseiller juridique, l’AFPC a respecté sa décision.

[…]

16. Dans le cas en l’espèce, la preuve établit clairement que des communications fréquentes ont eu lieu avec le plaignant, qu’un examen approfondi des faits et de la jurisprudence pertinente a été mené, qu’une opinion juridique a été obtenue, que les lois et politiques applicables ont été examinées et que la réponse donnée était opportune, logique et raisonnée.

[41]  La défenderesse a ensuite repris certains points soulevés par les questions du plaignant, et s’est appuyée sur la jurisprudence pour montrer que les faits allégués par le plaignant ne pouvaient soutenir un argument défendable qu’elle avait agi en contravention de la Loi.

[42]  D’après la défenderesse, les syndicats ont un pouvoir discrétionnaire considérable pour décider quand et comment ils offriront un appui à la représentation dans les griefs et poursuites judiciaires. En particulier, le devoir de représentation équitable n’entraîne pas l’obligation de suivre les instructions de l’employé représenté dans la façon de procéder. Le syndicat et l’employé peuvent être en désaccord, cela ne constitue pas un défaut de représentation. Le syndicat a le droit de décider de l’allocation de ses ressources, pourvu qu’il agisse de manière équitable.

[43]  Je reviendrai à la jurisprudence à l’appui de ces principes dans mon analyse.

[44]  La défenderesse a soutenu qu’elle avait protégé les droits du plaignant en déposant la demande de contrôle judiciaire dans le délai requis. Le plaignant préférait procéder avec la demande qu’il avait lui-même fait déposer par une autre avocate, et il a insisté pour que la défenderesse retire la demande qu’elle avait fait déposer, ce qu’elle a fait. On ne peut voir de mauvaise foi dans ces actions.

C.  Réplique du plaignant

[45]  Le plaignant a soutenu qu’il y a eu mauvaise foi, un comportement arbitraire et des actes discriminatoires de la part du représentant chargé du dossier. Il a aussi soutenu qu’une audience est nécessaire pour décider du bien-fondé de sa plainte contre la défenderesse.

[46]  Dans sa réplique, le plaignant a répété les faits allégués dans sa plainte. Le cœur de sa plainte est le fait qu’après de nombreux échanges avec la défenderesse, et ne sachant toujours pas si la défenderesse allait déposer une demande de contrôle judiciaire auprès de la Cour fédérale, il a lui-même dû déposer une telle demande, pour découvrir quelques jours plus tard que la défenderesse avait fait de même, en son nom et sans l’en informer. Il a ensuite reçu une explication du représentant chargé du dossier qui montrait que celui-ci ne comprenait pas l’enjeu du contrôle judiciaire.

[47]  La demande de contrôle judiciaire déposée par l’avocate retenue par la défenderesse montre clairement, selon le plaignant, que la défenderesse a agi de mauvaise foi et fait preuve d’un comportement arbitraire.

[48]  Selon le plaignant, les questions en litige sont les suivantes :

1) Est-ce que le représentant chargé du dossier et la défenderesse ont agi de mauvaise foi et ont fait preuve d’un comportement discriminatoire?

2) Est-ce que le représentant chargé du dossier, la défenderesse et l’avocate que la défenderesse a retenue ont agi de manière arbitraire et ont fait preuve de négligence grave en raison des actions suivantes :

a)  En omettant d’analyser et d’obtenir une opinion juridique sur l’application du paragraphe 19(1) de la Loi sur l’accès à l’information par l’Agence pour refuser au plaignant l’accès aux enregistrements vidéo utilisés pour procéder au retrait de son équipement de défense puis à son congédiement.

b)  En limitant leur analyse du dossier à la possibilité d’effectuer un contrôle judiciaire du rapport d’enquête de la Commissaire à l’information alors que la Loi sur l’accès à l’information ne le permet pas. Surtout, ont-ils fait preuve d’un comportement arbitraire et de négligence grave en déposant une demande de contrôle judiciaire en vertu de l’article 41 de la Loi sur l’accès à l’information pour pallier la destruction d’une partie des enregistrements vidéo par l’Agence?

[49]  L’argumentaire procède ensuite pour démontrer que la défenderesse, à la lumière de ces questions, a fait preuve de mauvaise foi, de malhonnêteté et d’un comportement discriminatoire, contrevenant ainsi à l’article 187 de la Loi.

[50]  La défenderesse et ses représentants n’ont pas communiqué suffisamment avec le plaignant. Ils ont passé outre son courriel les informant qu’il déposait sa propre demande auprès de la Cour fédérale. La demande de contrôle judiciaire déposée par l’avocate retenue par la défenderesse était contraire aux intérêts du plaignant. Le plaignant allègue que tout ceci démontre leur mauvaise foi.

[51]  La défenderesse aurait pu faire en son propre nom une demande de contrôle judiciaire auprès de la Cour fédérale; elle a plutôt choisi de faire cette demande au nom du plaignant, sans l’en informer. Le plaignant n’a jamais donné de mandat à l’avocate retenue par la défenderesse, ni donné l’autorisation qu’on utilise ses renseignements personnels pour déposer la demande de contrôle judiciaire.

[52]  La défenderesse n’a pas donné suite aux nombreuses demandes du plaignant d’obtenir des explications sur la procédure qu’elle entendait suivre en ce qui concerne la demande de contrôle judiciaire.

[53]  La défenderesse a fait preuve de négligence grave en ne motivant pas correctement la demande de contrôle judiciaire, et en omettant de faire référence au paragraphe 19(1) de la Loi sur l’accès à l’information.

[54]  Il est essentiel que le contrôle judiciaire soit adéquat afin de permettre au plaignant de prouver le caractère abusif de son licenciement. Le plaignant écrit notamment ce qui suit :

[…]

90. Puisque les enregistrements que je cherche portent sur l’exécution de tâches par des employés de l’ASFC, il est évident qu’il m’est possible de faire un argument dans le cadre d’une demande de contrôle judiciaire en vertu de l’art. 41 de la Loi sur l’Accès, à l’effet que l’exception créée par l’art. 3(j) de la Loi sur les renseignements personnels s’applique en l’espèce. Je suis donc en droit d’obtenir les versions non caviardées et non modifiées des enregistrements qui existent toujours. Et de pouvoir les utiliser dans le cadre de mes griefs.

91. L’importance d’une mesure telle que la fin abusive de mon emploi, le caviardage, le troncage, la destruction de vidéos et le fait que j’étais un employé du gouvernement du Canada depuis Octobre 2012 constituent des éléments qui auraient dû inciter l’AFPC à agir avec plus de sérieux mais aussi de prudence, et ce, d’autant plus qu’il s’agit de mes droits fondamentaux, qui sont attaqués par les agissements de certains gestionnaires.

[…]

 

[55]  Le plaignant a réitéré qu’il fallait soulever dans la demande de contrôle judiciaire le fait que l’Agence utilise le paragraphe 19(1) de la Loi sur l’accès à l’information pour refuser de fournir des renseignements sous prétexte de protéger la vie privée de tiers.

[56]  En ne portant pas attention aux arguments et préoccupations du plaignant, la défenderesse a failli à son obligation de représentation juste et équitable.

IV.  Analyse

[57]  La question devant moi concerne la demande présentée par la défenderesse pour rejeter la plainte sans audience. Je dois donc déterminer si, en prenant les faits allégués par le plaignant comme avérés, il existe un argument défendable à l’effet que la défenderesse aurait contrevenu à son devoir de représentation équitable. Tenant tous les faits allégués par le plaignant comme avérés (je parle des faits, et non des arguments), je conclus que le plaignant ne dispose d’aucun argument défendable voulant que la défenderesse ait contrevenu au devoir de représentation équitable qui lui incombait à l’égard du plaignant.

[58]  Le plaignant a soumis beaucoup de jurisprudence pour appuyer ses prétentions que la demande de contrôle judiciaire présentée par l’avocate retenue par la défenderesse était mal fondée. Cette jurisprudence ne m’est toutefois d’aucune utilité pour décider la question dont je suis saisie.

[59]  L’envergure du devoir de représentation équitable est étudiée dans la décision Mangat c. Alliance de la Fonction publique du Canada, 2010 CRTFP 52, dont je cite les extraits suivants :

[43] Lorsqu’il s’agit d’une plainte portant sur le devoir de représentation équitable, le rôle de la Commission consiste à déterminer si l’agent négociateur a agi de mauvaise foi ou de manière arbitraire ou discriminatoire en matière de représentation du plaignant. La Commission ne détermine pas si l’agent négociateur a pris de bonnes décisions concernant son choix de représenter ou non le plaignant ou concernant la façon de le représenter. L’agent négociateur dispose d’un pouvoir discrétionnaire considérable pour ce qui est de décider s’il va représenter un fonctionnaire au sujet d’un grief et d’établir la façon dont il va traiter un grief. La portée du pouvoir discrétionnaire d’un agent négociateur a été fixée par la Cour suprême du Canada (la « CSC »), dans Guilde de la marine marchande du Canada c. Gagnon et al., [1984] 1 R.C.S. 509, page 527. La CSC a décrit l’exercice de ce pouvoir discrétionnaire par l’agent négociateur lorsque celui-ci décide de renvoyer ou non un grief à l’arbitrage, mais les principes énoncés s’appliquent de la même façon à la décision de représenter ou de ne pas représenter un fonctionnaire relativement à un grief :

[…]

3. Cette discrétion doit être exercée de bonne foi, de façon objective et honnête, après une étude sérieuse du grief et du dossier, tout en tenant compte de l’importance du grief et des conséquences pour le salarié, d’une part, et des intérêts légitimes du syndicat d’autre part.

4. La décision du syndicat ne doit pas être arbitraire, capricieuse, discriminatoire, ni abusive.

5. La représentation par le syndicat doit être juste, réelle et non pas seulement apparente, faite avec intégrité et compétence, sans négligence grave ou majeure, et sans hostilité envers le salarié.

[…]

[44] La Cour d’appel fédérale a conclu que, pour prouver qu’il y a eu manquement au devoir de représentation équitable, le plaignant doit convaincre la Commission que les investigations menées par l’agent négociateur au sujet du grief « étaient juste pour la forme » (International Longshore and Warehouse Union c. Empire International Stevedores Ltd., 2000 CanLII 16578 (C.A.F.)). Il revient à l’agent négociateur de décider des griefs qu’il traite et de ceux qu’il ne traite pas. […]

[60]  Il est bien établi dans la jurisprudence en relations de travail dans le secteur public fédéral qu’un simple désaccord sur la façon de procéder ne rend pas nécessairement suspecte la façon dont un agent négociateur choisit de représenter un employé dans l’unité de négociation. Bahniuk c. Alliance de la Fonction publique du Canada, 2007 CRTFP 13, traite de ce point au paragraphe 67 :

[67] […] Je conviens aussi avec l’agent négociateur que le devoir de représentation équitable n’exige pas que l’agent accède aux demandes du plaignant. Le devoir de représentation équitable reconnaît qu’un agent négociateur a des ressources limitées et énormément de latitude pour prendre des décisions réfléchies sur la manière de distribuer ces ressources. […]

[61]  Il s’agit de déterminer si les faits allégués par le plaignant pourraient démontrer que l’action de la défenderesse était arbitraire, discriminatoire ou faite de mauvaise foi. La décision arbitraire est définie dans Cousineau c. Walker et Alliance de la Fonction publique du Canada, 2013 CRTFP 68 comme étant une décision prise de façon superficielle, sans véritable examen des faits.

[62]  Les faits allégués en l’espèce par le plaignant n’appuient pas un argument défendable de traitement arbitraire par la défenderesse. Il reconnaît que la défenderesse a pris connaissance du dossier, a retenu les services d’une avocate, et a déposé une demande de contrôle judiciaire auprès de la Cour fédérale, dans le délai requis. On ne peut donc parler d’un traitement arbitraire.

[63]  Les faits sur lesquels le plaignant s‘appuie suggèrent que le représentant chargé du dossier a répondu aux courriels du plaignant, et a assuré le suivi pour faire en sorte que le délai pour le contrôle judiciaire soit respecté. Il est clair qu’il y aurait eu défaut de communication au moment du dépôt simultané des deux demandes de contrôle judiciaire. Le représentant chargé du dossier semblerait avoir méconnu la nature du contrôle judiciaire, puisqu’il croyait que la demande de contrôle judiciaire visait la décision de la Commissaire à l’information.

[64]  Le plaignant a vu le libellé de la demande de contrôle judiciaire déposée auprès de la Cour fédérale. Il n’était pas d’accord avec cette demande. Selon lui, ses droits n’étaient pas adéquatement protégés. Selon lui, il y avait une autre façon de traiter le refus de l’Agence.

[65]  On ne peut demander à un agent négociateur de ne jamais commettre d’erreur dans le cadre de la représentation qu’il offre à un employé dans l’unité de négociation, et on ne peut lui reprocher de se tromper sur un point précis d’une loi. Le plaignant n’a pas fait confiance à la démarche entreprise en son nom, et a choisi de procéder lui-même devant la Cour fédérale. Un simple désaccord avec une stratégie juridique ne peut être un argument défendable à l’effet que la défenderesse a agi de manière arbitraire ou discriminatoire ou de mauvaise foi dans la cadre de sa représentation du plaignant. Le commentaire suivant, tiré de la décision Boshra c. Association canadienne des employés professionnels, 2009 CRTFP 100, traduit bien la façon d’envisager les arguments juridiques d’un dossier :

[…]

[60] Dans la toute récente décision Martel et al. c. Alliance de la Fonction publique du Canada, 2009 CRTFP 16, la Commission a débouté les plaignants, car elle a décidé notamment qu’un différend au sujet de la jurisprudence s’appliquant au fond de l’affaire ne permettait pas de conclure à un manquement au devoir de représentation juste. De façon similaire, dans Cyr c. Alliance de la Fonction publique du Canada, 2006 CRTFP 57, la Commission a conclu que la défenderesse n’avait pas agi de mauvaise foi ou de façon arbitraire ou discriminatoire lorsque, en se fondant sur son analyse des circonstances de l’affaire, elle a choisi de ne pas inclure dans sa représentation des arguments qui auraient dû être utilisés selon le plaignant.

[61] Si l’on applique les principes établis dans les affaires susmentionnées et dans d’autres décisions de la Commission, il devient difficile, selon moi, de conclure que les arguments du plaignant établissent la preuve d’une conduite arbitraire, d’un traitement discriminatoire ou de décisions prises de mauvaise foi de la part de la défenderesse, et donc une preuve suffisante qu’il y a eu violation de l’article 187 de la Loi, selon la prépondérance des probabilités. Beaucoup d’éléments dans les arguments du plaignant suggèrent fortement l’existence d’un différend important l’opposant à la défenderesse au sujet des motifs sur lesquels devait être fondé le grief, et peut-être aussi au sujet des représentations particulières qui auraient dû être faites à différentes étapes de la procédure de règlement du grief. Cependant, un désaccord ne peut constituer le fondement d’une plainte. Pour être tout à fait clair, il se peut que la défenderesse ait pris des décisions « non judicieuses » concernant le fond du grief du plaignant, et peut-être même qu’elle ait fait des choix stratégiques et tactiques discutables durant la procédure. Cependant, le fait de commettre des erreurs ou de prendre des décisions discutables relativement à ce qu’il convient de faire dans le cadre d’une procédure de règlement d’un grief ne constitue pas en soi une preuve de mauvaise foi ou de comportement arbitraire ou discriminatoire.

[…]

 

[66]  L’agent négociateur qui engage ses propres fonds pour retenir les services d’un avocat dans le cadre de la représentation d’un employé de l’unité de négociation est en droit de donner à cet avocat le mandat qu’il estime approprié. Il peut certainement tenir compte des intérêts privés de l’employé, de l’intérêt collectif plus large de tous les employés dans l’unité de négociation et même de l’intérêt de l’agent négociateur lui-même.

[67]  L’action faite de mauvaise foi est notamment celle marquée par une telle hostilité qu’il n’est pas possible pour l’agent négociateur de bien représenter les intérêts de l’employé dans l’unité de négociation (voir par exemple Benoit c. Trimble, 2014 CRTFP 46).

[68]  Le plaignant soutient que la remarque négative à son endroit, qu’il est très difficile, montre la mauvaise foi de la défenderesse. Le plaignant n’allègue cependant pas que cette remarque aurait empêché la défenderesse d’obtenir un avis juridique et de déposer une demande de contrôle judiciaire. La remarque aurait plutôt été présentée dans le cadre d’une vérification qu’aurait faite le représentant chargé du dossier pour déterminer si la lettre qu’il entendait envoyer au plaignant convenait à la situation.

[69]  Enfin, pour conclure au caractère discriminatoire des actions de la défenderesse, il faudrait trouver des indications d’un traitement différentiel fondé sur une caractéristique inhérente au plaignant (voir, par exemple, Gilkinson c. Institut professionnel de la fonction publique du Canada, 2018 CRTESPF 62; et Myles c. Institut professionnel de la fonction publique du Canada, 2017 CRTESPF 30). Le plaignant n’a allégué aucun fait pouvant suggérer un comportement discriminatoire de la part de la défenderesse ou de ses représentants.

[70]  Je conclus que le plaignant n’a pas présenté d’allégation pouvant donner lieu à un argument défendable que la défenderesse ait agi de manière arbitraire ou discriminatoire ou de mauvaise foi dans sa représentation du plaignant.

[71]  Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

(L’ordonnance apparaît à la page suivante)


V.  Ordonnance

[72]  La demande de rejeter la plainte sans audience est accordée

[73]  La plainte est rejetée.

Le 26 mars 2020.

Marie-Claire Perrault,

une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

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