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Date: 590-18-41276

Dossier: 20200805

 

 

 

 

 

 

DANS L’AFFAIRE DE LA

Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral

et une demande d’établissement d’une commission de l’intérêt public entre

l’Alliance de la Fonction publique, l’agent négociateur,

et le Personnel des Fonds Non-Publics, Région de Montréal et St-Jean, l’employeur,

 

Répertorié

Alliance de la Fonction publique du Canada c. Personnel des Fonds Non-Publics, Région de Montréal et St-Jean

Commission de l’intérêt public :  Michelle Flaherty, président; Céline Delorme et Jérôme Turcq, membres

Pour l’agent négociateur :  Natalie Rainville, négociatrice et Omar Burgan, agent de recherche

Pour l'employeur :  Amy Lecompte, agente des relations de travail

 


Commission de l’intérêt public

 

[1]  La convention collective entre les parties a expiré 31 octobre 2019. L’Employeur et le Syndicat se sont rencontrés à plusieurs reprises pour tenter de s’entendre sur les dispositions d’une nouvelle convention collective. Les parties ont convenu de certaines, mais pas toutes les dispositions de la convention collective.

[2]  Cette commission d’intérêt public (« CIP ») a été nommée en vertu de la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral (L.C. 2003, ch. 22, art. 2) (la « Loi ») pour traiter des dispositions de la convention collective qui n’ont pas été convenues par les parties.

[3]  Selon l’article 172 de la Loi une CIP « […] s’efforce […] d’aider les parties au différend à conclure ou à réviser la convention collective ». Toutefois, si une commission d’intérêt public ne règle pas les questions qui divisent les parties, son rôle consiste alors à préparer un rapport accompagné de recommandations visant à trancher le différend entre les parties.

[4]  La CIP a tenu une audience par visioconférence le 5 juin 2020 et les parties ont présenté leurs représentations orales et écrites. La CIP a ensuite tenu ses sessions exécutives les 18 et 24 juin et les 2, 9, 17 et 27 juillet 2020.

I.  INTRODUCTION

[5]  Le Personnel des fonds non publics (« FNP ») est un employeur distinct au sein de la fonction publique. Il a été établi pour fournir certains programmes, services et activités liés au bien-être et au maintien du moral des membres des Forces canadiennes et de leurs familles.

[6]  En bref, le FNP est financé à partir des « fonds de la base », une enveloppe établie par le commandant de la base pour administrer certains biens non publics. Les activités des FNP génèrent des revenus et ceux-ci sont réinvestis dans les fonds de la base. Le FNP peut aussi bénéficier d’un appui public, notamment sous la forme de fonds publics payés en lien avec certains postes et certaines activités.

[7]  Le FNP compte environ 4500 employés et il y a 22 différentes unités de négociation à travers le Canada.  L’unité de négociation dans la région de Montréal et St-Jean comprend environ 82 employés, dont 49 à temps plein et 33 à temps partiel. Les membres de l’unité de négociation de FNP dans la région de Montréal et St-Jean occupent des emplois variés de nature opérationnelle et administrative. 

[8]  Le FNP compte trois sphères d’activités, soit : CANEX (des points de vente au détail); la Financière SISIP (services financiers, y compris la planification financière et les assurances vie et les assurances d’invalidité); et les programmes de soutien (y compris les mess ainsi que des programmes de services communautaires, de conditionnement physique et de loisirs).

II.  LE CADRE LÉGISLATIF

[9]  Le rapport de la CIP est circonscrit par les paragraphes 177(1) et (2) de la Loi, qui prévoient ce qui suit :

177 (1) Le rapport ne peut directement ou indirectement recommander la modification, la suppression ou l’établissement d’une condition d’emploi :

a) soit de manière à nécessiter ou entraîner l’adoption ou la modification d’une loi fédérale, exception faite des lois affectant les crédits nécessaires à son application;

b) soit qui a été ou pourrait être établie sous le régime de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique, la Loi sur la pension de la fonction publique ou la Loi sur l’indemnisation des agents de l’État;

c) soit qui porte sur des normes, règles ou méthodes régissant la nomination, l’évaluation, l’avancement, la mutation, le renvoi en cours de stage ou la mise en disponibilité des fonctionnaires;

d) soit, dans le cas d’un organisme distinct, qui porte sur le licenciement, sauf le licenciement imposé pour manquement à la discipline ou inconduite.

177 (2) Sont exclues du champ du rapport les conditions d’emploi n’ayant pas fait l’objet de négociations entre les parties avant que ne soit demandée la conciliation.

 

[10]  Selon l’article 175 de la Loi, en rendant ses recommandations la CIP prend en considération les facteurs qui, à son avis, sont pertinents et notamment :

a) la nécessité d’attirer au sein de la fonction publique des personnes ayant les compétences voulues et de les y maintenir afin de répondre aux besoins des Canadiens;

b) la nécessité d’offrir au sein de la fonction publique une rémunération et d’autres conditions d’emploi comparables à celles des personnes qui occupent des postes analogues dans les secteurs privé et public, notamment les différences d’ordre géographique, industriel et autre qu’elle juge importantes;

c) la nécessité de maintenir des rapports convenables, quant à la rémunération et aux autres conditions d’emploi, entre les divers échelons au sein d’une même profession et entre les diverses professions au sein de la fonction publique;

d) la nécessité d’établir une rémunération et d’autres conditions d’emploi justes et raisonnables, compte tenu des qualifications requises, du travail accompli, de la responsabilité assumée et de la nature des services rendus;

e) l’état de l’économie canadienne et la situation fiscale de l’État fédéral.

 

III.  ANALYSE

[11]  En rendant cette recommandation, nous avons tenu compte des critères établis par la Loi ainsi que les représentations et la jurisprudence présentées par les parties.

[12]  Selon l’article 175 de la Loi, notre recommandation doit considérer l'état de l'économie canadienne et la situation fiscale de l’état fédéral. En raison de la pandémie, notre pays connaît actuellement une période d'incertitude économique. L’Employeur a expliqué qu’il a dû temporairement suspendre les opérations de morale et de bien-être et que les sources de revenus de l’Employeur ont été affectées par la pandémie. À ce stade, la CIP ne peut prévoir quel sera l'impact économique éventuel. En rendant notre recommandation, nous avons examiné les représentations des deux parties et avons pris en considération l'incertitude actuelle et l'impact possible de la pandémie. 

[13]  Les parties ont invoqué différents points de repère quant au groupe de comparaison approprié. L’Employeur explique que même si ses employés sont des fonctionnaires selon la loi, le FNP ne reçoit aucun fonds directement du Conseil du Trésor. Le FNP est principalement financé par les fonds de la base et les revenus qui découlent de leurs propres activités. Bref, selon l’Employeur, il n'est donc pas approprié de comparer le FNP à d'autres employeurs au sein de la fonction publique et il est plutôt important de tenir compte des conditions d’emploi au sein d’entreprises qui offrent des services similaires dans le secteur privé.

[14]  Pour sa part, le Syndicat réclame la parité avec certains employés de la fonction publique. Même si les fonds publics ne sont pas alloués au FNP par le Conseil du Trésor, une partie de son financement provient du Conseil du Trésor originalement. Rien n’empêche le FNP de chercher à obtenir des fonds publics supplémentaires. Par ailleurs, certains cadres des FNP sont comparés à leurs homologues à la Défense nationale. Selon le Syndicat, il n'y a aucune raison de traiter les employés des catégories les moins bien rémunérées différemment ou de leur refuser la parité salariale avec la fonction publique qui est offerte aux gestionnaires.

[15]  À notre avis, compte tenu de ces facteurs ainsi que le libellé du paragraphe 175(b) de la Loi, il y a lieu de considérer comme groupes comparateurs les postes analogues dans les secteurs privé et public.

[16]  En conséquence, la CIP fait les recommandations suivantes :

A.  Durée de la convention collective

[17]  La convention collective est d’une durée de trois ans, soit du 1er novembre 2019 au 31 octobre 2022.

B.  Congé de maladie pour les employés à temps partiel

[18]  L’employé à temps partiel qui a terminé son stage probatoire peut obtenir un maximum de trois (3) jours de congé de maladie payés par année financière.

C.  Augmentations

[19]  À notre avis, il y a lieu d’accorder les augmentations économiques suivantes :

  1er novembre 2019: 2%

 

  1er  novembre 2020 : 2%

 

  1er  novembre 2021 : 1,5%

 

 

[20]  La CIP recommande que la grille salariale soit restructurée pour compter six échelons s’étalant sur une période de 60 mois, avec des augmentations standardisées et linéaires à tous les 12 mois.

[21]  La CIP est également d’avis qu’il y a lieu d’accorder certains ajustements du marché. Le tableau ci-dessous reflète une restructuration de la grille selon le paragraphe 20. Ce tableau comprend aussi les ajustements économiques prévus au paragraphe 19 à partir du 1er novembre 2019 ainsi que les ajustements du marché que la CIP juge appropriés :

01-Nov-19

Début

12 mois

24 mois

36 mois

48 mois

60 mois

1

12.50

12.62

12.74

12.86

12.98

13.10

2

12.57

12.69

12.81

12.93

13.05

13.17

3

12.66

13.04

13.43

13.83

14.25

14.68

4

12.79

13.38

13.99

14.63

15.30

16.01

5

12.93

13.92

14.98

16.12

17.35

18.67

6

15.11

16.39

17.77

19.27

20.90

22.67

7

15.95

17.74

19.73

21.94

24.40

27.13

8

19.15

20.85

22.71

24.73

26.93

29.33

 

[22]  Les parties ont convenu d’un nombre important de modalités de la convention collective et celles-ci sont incorporées dans ce rapport. Toute proposition qui n’est pas abordée dans ce rapport et qui n’a pas été convenue entre les parties est réputée rejetée.

[23]  Ce rapport constitue les recommandations unanimes de la CIP.

Le 5 août 2020.

Michelle Flaherty,

Au nom de la commission de l’intérêt public


 

Observations de la représentante patronale

 

Ce rapport est produit dans des circonstances très différentes que lors des négociations entre les parties. En raison de la pandémie de la COVID-19, le Canada connaît une détérioration des conditions économiques. Comme le mentionne le rapport, l’Employeur a dû suspendre certaines opérations affectant ainsi son revenu. L’Employeur a dû également réduire le nombre d’employés occasionnels et effectuer des mises à pied temporaires. Il existe ainsi une incertitude en ce qui concerne les perspectives économiques. Les parties devront prendre en considération cette nouvelle réalité lorsqu’elles retourneront à la table de négociation de manière à tenir compte de la contribution des membres de l’AFPC aux services de la population militaires canadienne, tout en reconnaissant l’impact des développements récents.

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