Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le plaignant a déposé trois plaintes dans lesquelles il a allégué que son agent négociateur ne l’avait pas représenté équitablement pendant trois ans à l’égard de son absence du travail, et qu’il ne l’avait pas informé du processus de ratification de sa convention collective – l’agent négociateur a soulevé une objection quant au respect du délai de présentation des plaintes et a demandé qu’elles soient rejetées de façon sommaire – la Commission a conclu que la date de présentation d’une plainte par courriel était valable dans la mesure où la plainte initiale est déposée par la suite par courrier ordinaire – la Commission a conclu que les trois plaintes alléguaient en partie des faits qui se sont produits dans le délai de 90 jours prévu par la loi – elle a également conclu que, même si le plaignant désapprouvait clairement la stratégie recommandée par son agent négociateur à l’égard de son absence du travail, il n’avait pas présenté d’argument défendable voulant que son agent négociateur n’avait pas respecté son devoir de représentation équitable – la Commission a réitéré que les votes de ratification sont des questions syndicales internes qui n’engagent pas un devoir de représentation équitable.


Objections relatives au respect des délais rejetées.
Demandes de rejeter de façon sommaire accueillies.
Plaintes rejetées.

Contenu de la décision

Date : 20201221

Dossiers : 561-02-840, 38681 et 39691

 

Référence : 2020 CRTESPF 119

 

Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral et

Loi sur les relations de travail

dans le secteur public fédéral

Coat of Arms

Devant une formation de la

Commission des relations

de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral

ENTRE

 

John Burns

plaignant

 

et

 

SECTION LOCALE NO 2182 D’UNIFOR

 

défenderesse

Répertorié

Burns c. Section locale no 2182 d’Unifor

Affaire concernant des plaintes visées à l’article 190 de la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral

Devant : David Orfald, une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

Pour le plaignant : Lui-même

Pour la défenderesse : Michelle Arruda, section locale no 2182 d’Unifor

Décision rendue sur la base d’arguments écrits
déposés le 25 octobre et le 22 novembre 2019,

et le 6 janvier, le 11 février et le 30 juin 2020.

(Traduction de la CRTESPF)


MOTIFS DE DÉCISION

(TRADUCTION DE LA CRTESPF)

I. Introduction

[1] John Burns occupe un poste d’attache à titre de formateur d’officiers des Services de communications et de trafic maritimes de la Garde côtière canadienne. Par conséquent, il est un employé du Conseil du Trésor (l’« employeur »). Son poste est classifié dans l’unité de négociation du groupe Radiotélégraphie (l’« unité de négociation du groupe RO »).

[2] Je suis saisi de trois plaintes portant sur le devoir de représentation équitable que M. Burns a déposées contre la section locale no 2182 d’Unifor (le « syndicat », Unifor ou la « défenderesse »). Il s’agit de l’agent négociateur accrédité pour représenter les employés de l’unité de négociation du groupe RO. La première des trois plaintes a été déposée en mai 2017.

[3] Le 19 juin 2017, la Loi modifiant la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique et d’autres lois et comportant d’autres mesures (L.C. 2017, ch. 9) a reçu la sanction royale et a modifié le nom de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique et le titre de la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique, de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique et du Règlement sur les relations de travail dans la fonction publique pour qu’ils deviennent respectivement la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (la « Commission »), la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral, la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral (la « Loi ») et le Règlement sur les relations de travail dans le secteur public fédéral (le « Règlement »).

[4] Les plaintes les plus substantielles sont les première et troisième plaintes déposées par M. Burns. Elles portent sur les mêmes questions et préoccupations, mais visent des périodes différentes. La question sous-jacente à ces plaintes concerne l’absence de M. Burns du lieu de travail à compter du milieu de 2015. Il a demandé et reçu l’aide de son syndicat pour régler cette question. Dans ces plaintes, M. Burns décrit des douzaines d’appels téléphoniques, d’échanges de correspondance et de réunions qu’il a eues avec des agents et des employés d’Unifor pendant plus de trois ans (de novembre 2015 à décembre 2018).

[5] Il est évident que M. Burns a été très frustré par l’aide fournie par son syndicat. Il a cité des difficultés et des manquements dans la communication. Il n’était pas d’accord avec bon nombre des recommandations du syndicat au sujet de la stratégie à adopter pour régler sa situation. Les désaccords comprenaient les demandes de prestations d’invalidité de longue durée (ILD) et d’indemnités pour accident de travail, l’accès aux services médicaux et l’accès à un logement d’urgence et de longue durée. Ses plaintes alléguaient qu’Unifor avait manqué à son devoir de représentation équitable en agissant de manière arbitraire, discriminatoire ou de mauvaise foi.

[6] Dans la deuxième plainte, M. Burns a allégué qu’Unifor avait manqué à son devoir de représentation équitable en ne l’avisant pas du processus de ratification d’une convention collective.

[7] Pour sa part, Unifor a soutenu que les plaintes de M. Burns étaient hors délai, car elles ont été déposées en dehors du délai de 90 jours prévu par la Loi.

[8] Dans la mesure où la Commission conclut qu’une partie des plaintes de M. Burns est dans les délais, Unifor a soutenu que ses plaintes n’établissent pas une preuve à première vue selon laquelle elle a contrevenu à la Loi. La défenderesse a demandé à la Commission de se prononcer sur ces objections préliminaires sur la base d’arguments écrits et de rejeter les plaintes de M. Burns sans audience.

[9] J’appliquerai l’« analyse de la cause défendable » souvent appliquée par la Commission lorsqu’elle est confrontée à une objection comme celle-ci. En d’autres termes, même si toutes les allégations de M. Burns ont été acceptées comme étant véridiques aux fins de cette analyse, je déterminerai s’il a établi une cause défendable selon laquelle Unifor a contrevenu à la Loi en fournissant une représentation qui était arbitraire, discriminatoire ou de mauvaise foi.

[10] J’ai d’abord demandé et reçu les arguments écrits des parties sur la question des délais. Après la tenue d’une téléconférence de gestion de cas avec M. Burns et Unifor, j’ai demandé à M. Burns de présenter des arguments écrits sur la façon dont ses plaintes établiraient une violation défendable de la Loi. Avant de présenter ces arguments, M. Burns a été informé de certaines décisions importantes portant sur le devoir de représentation équitable.

[11] J’ai décidé de rejeter les trois plaintes sans audience. Je fournirai les motifs détaillés de cette décision dans les pages qui suivent, mais je commencerai par présenter brièvement les plaintes.

[12] Il deviendra clair dans l’analyse qui suit que la grande majorité des événements particuliers dont s’est plaint M. Burns ont eu lieu bien avant le délai de 90 jours prévu par la Loi. Sa première plainte a été déposée en mai 2017, mais bon nombre des principaux événements dont il s’est plaint ont eu lieu beaucoup plus tôt, soit en 2015 et en 2016. Seuls quelques événements énumérés dans ses plaintes ont eu lieu dans le délai de 90 jours prévu par la Loi.

[13] Le problème le plus important que soulèvent ses plaintes est qu’il ne formule nulle part une allégation particulière selon laquelle le syndicat l’a mal représenté dans le traitement des questions soulevées par son absence du lieu de travail. Toutes ses allégations concernent une divergence d’opinions quant à la stratégie à adopter, des conflits dans les communications entre lui et ses représentants syndicaux, ou des retards pour revenir vers lui alors qu’on lui avait promis une réponse.

[14] Plus précisément, M. Burns n’a allégué nulle part dans ses plaintes qu’Unifor avait refusé de le représenter à l’égard de son absence du lieu de travail. Il n’a allégué nulle part que la défenderesse avait refusé de le représenter pendant le processus de règlement d’un grief. Il n’a pas prétendu n’avoir jamais demandé le dépôt d’un grief. Il n’a pas allégué qu’Unifor aurait dû lui conseiller d’en déposer un.

[15] Je reconnais que le devoir de représentation équitable prévu par la Loi ne se limite pas nécessairement à la représentation pendant le processus de règlement des griefs, bien qu’il s’agisse du contexte le plus courant où des plaintes portant sur le devoir de représentation équitable sont déposées. Cependant, je n’ai rien trouvé dans les allégations de M. Burns qui indique clairement de quel autre processus de représentation il se plaignait, qui engagerait le devoir de représentation équitable prévu par la Loi.

[16] En ce qui concerne la réparation, M. Burns a cité l’alinéa 192(1)d) de la Loi, qui indique que la Commission peut ordonner à une organisation syndicale « [...] d’exercer, au nom du fonctionnaire, les droits et recours que, selon elle, il aurait dû exercer [...] ». Par contre, M. Burns n’a présenté aucune proposition particulière de réparation qui pourrait m’aider à comprendre dans le cadre de quelle procédure, selon lui, Unifor aurait dû le représenter de manière équitable, sauf à un endroit où il a soutenu qu’elle devrait demander un avis juridique indépendant pour l’aider.

[17] Les documents relatifs aux plaintes montrent que, pendant presque toute la période visée par ses trois plaintes, M. Burns était en congé payé durant son absence du lieu de travail. Ses arguments indiquaient que le syndicat l’avait aidé à obtenir ce congé. Il a déclaré qu’Unifor avait convenu avec son employeur qu’il demeurerait en congé payé pendant qu’il présenterait une demande de prestations d’ILD.

[18] En fin de compte, compte tenu des événements décrits par M. Burns, je ne peux pas conclure que, si j’acceptais toutes ses allégations comme étant véridiques aux fins de la présente discussion, Unifor se serait livré à une pratique déloyale de travail, conformément à la Loi.

[19] Je conçois que M. Burns se sente profondément frustré par ses relations de travail avec ses représentants syndicaux. Je comprends qu’il se soit plaint de la qualité et de la rapidité du service et des communications. Je comprends qu’il estime que leurs conseils étaient déroutants, incohérents ou tardifs. Il veut que la Commission tienne une audience complète sur ses plaintes, dans l’espoir que celle-ci puisse régler ces problèmes.

[20] Cependant, sans une cause défendable de violation de la Loi présentée dans les délais prescrits, la Commission ne peut justifier un investissement de ses ressources limitées dans la tenue d’audiences complètes sur des plaintes comme celles de M. Burns. La Commission n’est pas un ombudsman habilité à traiter les plaintes d’insatisfaction générale à l’égard d’un syndicat.

[21] Par conséquent, je ne tire aucune conclusion concernant la question de savoir si les allégations particulières de M. Burns contre Unifor sont fondées. Dans les pages qui suivent, je tenterai d’expliquer les motifs justifiant le rejet de ses plaintes sans audience. Je renverrai à la Loi et à la jurisprudence de la Commission et d’autres commissions des relations de travail se rapportant aux plaintes portant sur le devoir de représentation équitable.

[22] Je ferai également remarquer qu’en juin 2019, quelques mois après le dépôt de sa troisième plainte, l’employeur de M. Burns a changé son statut d’emploi, passant d’un congé payé à un congé non payé. Les arguments dont je suis saisi montrent qu’il a déposé un grief au sujet de ce changement. Les arguments dont je suis saisi montrent également qu’Unifor lui fournit une représentation dans le cadre du processus de règlement de ce grief.

[23] Cependant, ni ce grief ni la représentation fournie par Unifor pendant le processus de règlement de ce grief ne sont des questions dont je suis saisi. Je suis conscient qu’il peut y avoir un certain chevauchement des questions ou des événements entre ces plaintes et ce grief. Par conséquent, je me suis efforcé de maintenir au minimum les déclarations sur sa situation de travail pour expliquer ma décision concernant la question de savoir s’il existe une cause défendable pour ces trois plaintes.

II. Contexte des plaintes

A. Les trois plaintes devant la Commission

[24] Cette section fournit des renseignements généraux sur les trois plaintes de M. Burns, ainsi qu’une chronologie des événements, notamment leur dépôt, les réponses d’Unifor à ces plaintes et les mesures prises par la Commission.

1. La première plainte

[25] M. Burns a envoyé sa première plainte par courriel au greffe de la Commission le 4 mai 2017 (numéro de dossier de la Commission 561-02-840; la « plainte no 1 »). Le formulaire de plainte nommait Michelle Arruda à titre de défenderesse. Mme Arruda est une représentante du personnel d’Unifor. La Commission a toujours considéré cette plainte (et les trois plaintes dans leur ensemble) comme étant contre son agent négociateur, à savoir la section locale no 2182 d’Unifor.

[26] Cependant, le greffe de la Commission a enregistré la plainte comme ayant été déposée le 15 mai 2017, soit la date à laquelle il a reçu les copies originales de M. Burns. Au moment du dépôt de la plainte, le Règlement prévoyait qu’une plainte était reçue lorsque la Commission en avait reçu une copie, ou que, si la plainte était télécopiée, elle était réputée reçue à la date de son envoi si la télécopie était suivie de la plainte originale et d’une copie de la plainte envoyée à la Commission.

[27] La plainte de M. Burns a été déposée au moyen de la formule 16, qui faisait alors partie du Règlement. Elle a été utilisée pour déposer une plainte de pratique déloyale de travail en vertu de l’article 190 de la Loi. À la section 5 de cette formule, M. Burns a déclaré que la date à laquelle il « [...] a pris connaissance de l’action, de l’omission ou de la situation ayant donné lieu à la plainte [...] » était le 3 février 2017. La section 9 de cette formule demandait la mesure corrective recherchée par le plaignant, et M. Burns a cité textuellement l’alinéa 192(1)d) de la Loi. Pendant toute la durée de la période pertinente, l’alinéa 192(1)d) prévoyait ce qui suit :

[…]

[…]

[28] Pendant le processus de présentation des arguments écrits, M. Burns a soutenu qu’il avait envoyé sa plainte par courriel à la Commission le 4 mai 2017 et qu’au départ, une agente du greffe de la Commission l’avait informé que cette date serait reconnue comme étant la date de dépôt. Elle a par la suite indiqué à M. Burns qu’elle l’avait mal informé, mais que les documents qu’il avait envoyés par courriel feraient néanmoins partie du dossier.

[29] La plainte no 1 consistait en une liste de sept pages des événements qui ont eu lieu du 10 novembre 2015 au 3 février 2017. Dans ce document, M. Burns fait état d’appels téléphoniques, de réunions en personne ou de discussions par courriel avec des représentants et des employés d’Unifor. Pour chaque événement, il a expliqué ce que, selon lui, la défenderesse avait fait de mal.

[30] Unifor a répondu à la plainte no 1 le 16 juin 2017. Elle a soutenu qu’elle avait aidé M. Burns à présenter une demande de prestations d’ILD, qu’elle avait été très active dans son dossier et qu’elle continuerait à l’aider dans la mesure du possible. Elle a également soutenu que la plainte n’étayait pas une cause défendable de violation de la Loi.

[31] M. Burns a répondu le 22 juin 2017. Il a affirmé qu’il avait accepté l’aide d’Unifor à l’égard de la demande de prestations d’ILD, mais qu’il voulait aborder les préoccupations relatives au harcèlement, à l’intimidation, à la violence en milieu de travail et à la diffamation de la part de son employeur qui ont été soulevées dans les réponses au grief et les communications avec la Worker’s Compensation Board of Nova Scotia. Il a affirmé que [traduction] « [...] un avis juridique indépendant est nécessaire et demande à la défenderesse de le lui fournir ». Il a également précisé que sa plainte avait été déposée en vertu de l’article 187 de la Loi, qui se lisait comme suit pendant toute la durée de la période pertinente :

Il est interdit à l’organisation syndicale, ainsi qu’à ses dirigeants et représentants, d’agir de manière arbitraire ou discriminatoire ou de mauvaise foi en matière de représentation de tout fonctionnaire qui fait partie de l’unité dont elle est l’agent négociateur.

 

[32] Après le dépôt de la plainte no 1, les parties ont convenu d’avoir recours aux Services de médiation et de règlement des différends de la Commission. Une séance de médiation a eu lieu à l’automne 2017. Cependant, aucun règlement n’a été conclu.

[33] Le 14 septembre 2018, la défenderesse a soulevé une objection à l’égard de la plainte no 1. Elle a fait valoir que la plainte était hors délai, puisque tous les événements énumérés dans celle-ci avaient eu lieu plus de 90 jours avant son dépôt.

2. La deuxième plainte

[34] M. Burns a déposé sa deuxième plainte le 12 juin 2018 (numéro de dossier de la Commission 561‑02-38681; la « plainte no 2 »). Il a allégué qu’Unifor avait contrevenu à l’article 187 en ne l’avisant pas qu’un vote de ratification d’une convention collective avait eu lieu. Dans son formulaire de plainte, M. Burns a déclaré qu’il avait pris connaissance de la violation par la défenderesse le 26 mars 2018.

[35] Dans la plainte no 2, M. Burns a également déclaré qu’il n’avait pas encore reçu de prime de signature ou de rémunération rétroactive en lien avec la nouvelle convention collective. En ce qui concerne la mesure corrective, il cite de nouveau l’alinéa 192(1)d) de la Loi.

[36] La réponse de la défenderesse à la plainte no 2 était datée du 3 juillet 2018. Elle a déclaré que M. Burns avait accès à son site Web, y compris à sa section réservée aux membres, où des instructions concernant le vote avaient été publiées. La défenderesse a affirmé qu’en tant qu’ancien vice-président de la section locale, M. Burns savait que le syndicat publiait des mises à jour sur la négociation collective sur son site Web. Elle a affirmé qu’il avait demandé à être retiré de la liste d’envoi par courriel des mises à jour du syndicat.

[37] La défenderesse a également déclaré que M. Burns avait été en congé payé de son poste au sein de la Garde côtière canadienne depuis le 8 juin 2015. Elle a expliqué que la convention collective qu’elle avait conclue ne contenait aucune prime de signature, mais qu’elle prévoyait des augmentations de salaire rétroactives. La défenderesse a reconnu que l’employeur éprouvait des difficultés importantes à traiter la rémunération rétroactive en raison de problèmes liés au système de paye Phénix. Elle a affirmé qu’elle avait déposé un grief de principe à ce sujet et qu’elle demandait des dommages pour ses membres. Enfin, elle a affirmé que M. Burns n’avait jamais signalé de problèmes de paye, mais qu’il avait toujours la capacité de déposer un grief. La défenderesse a demandé que la plainte no 2 soit rejetée sans audience.

[38] Le 25 février 2019, Unifor a soutenu que la plainte no 2 était également hors délai dans son intégralité. Elle comprenait des documents montrant qu’une entente provisoire avait été conclue en janvier 2017, que le processus de ratification avait eu lieu entre février et mars 2017 et qu’une nouvelle convention collective avait été signée le 23 mai 2017, plus d’un an avant le 12 juin 2018, date à laquelle M. Burns a déposé la plainte no 2.

3. Audience prévue pour les plaintes no 1 et no 2

[39] La Commission a prévu une audience sur les plaintes no 1 et no 2 du 18 au 20 septembre 2018 à Thunder Bay, en Ontario, soit la ville la plus proche de l’emplacement de M. Burns. La défenderesse a demandé de reporter l’audience en raison d’un conflit d’horaire, ce que M. Burns a accepté. La formation de la Commission précédemment affectée à cette audience a rejeté la demande. M. Burns a alors demandé de changer le lieu de l’audience pour Ottawa, en Ontario. La même formation de la Commission a également rejeté cette demande. M. Burns a alors demandé de reporter l’audience en raison d’un décès dans sa famille.

[40] Une conférence de gestion de cas a eu lieu le 13 septembre 2018, au cours de laquelle la formation précédente de la Commission a accepté de reporter l’audience.

4. La troisième plainte

[41] La troisième plainte de M. Burns a été déposée le 22 janvier 2019 (numéro de dossier de la Commission 561-02-39691; la « plainte no 3 »). La plainte contient ce qu’il a décrit comme [traduction] « [...] une simple liste chronologique des manquements auxquels M. Burns a été confronté de la part de son syndicat, soit la section locale no 2182 d’Unifor, alors qu’il tentait de régler les problèmes liés au travail, ce qui a poussé M. Burns à refuser de travailler le 2015-06-08 ». Sur plus de 30 pages, M. Burns énumère 41 événements de communication distincts avec son syndicat.

[42] Les 27 premiers de ces événements de communication, qui ont eu lieu du 10 novembre 2015 au 3 février 2017, reprennent les événements visés dans la plainte no 1. Pour chaque événement, M. Burns a ajouté une explication de la raison pour laquelle il considérait les actions de la défenderesse comme arbitraires, discriminatoires ou de mauvaise foi.

[43] Les nouvelles allégations, qui sont numérotées de 28 à 41, ont commencé le 1er novembre 2017, soit peu après la médiation tenue à l’égard de la plainte no 1. La dernière date indiquée dans la chronologie est le 11 décembre 2018.

[44] La défenderesse a répondu à la plainte no 3 le 22 février 2019. Elle a fait valoir que la plainte était hors délai ou que, à tout le moins, tous les événements survenus 90 jours avant la date de dépôt étaient hors délai et devraient être rejetés. Elle a soutenu que seuls les événements 39 à 41 étaient survenus pendant la période de 90 jours, et elle a formulé d’autres objections à l’égard de ces trois événements, que j’aborderai plus loin dans mes motifs.

5. Arguments écrits et conférence de gestion de cas

[45] J’ai été saisi des trois plaintes de M. Burns en septembre 2019.

[46] J’ai ensuite demandé aux parties de présenter des arguments écrits sur les objections de la défenderesse concernant le respect des délais. Les arguments écrits d’Unifor ont été reçus le 25 octobre 2019; la réponse de M. Burns a été reçue le 22 novembre 2019.

[47] Après un examen de ces arguments écrits, j’ai décidé que je voulais entendre d’autres arguments du plaignant concernant la façon dont ses allégations montraient une cause défendable selon laquelle Unifor avait contrevenu à la Loi. Le 13 décembre 2019, j’ai demandé au greffe de la Commission d’écrire aux parties et de leur expliquer que j’envisageais de demander des arguments écrits ou de tenir une audience d’une journée. On a demandé aux parties de fournir leur disponibilité en vue d’une téléconférence de gestion de cas pour discuter de l’affaire.

[48] M. Burns a présenté quelques arguments écrits initiaux le 6 janvier 2020. La conférence de gestion des cas a eu lieu le 29 janvier 2020.

[49] Pendant la conférence de gestion de cas, M. Burns a indiqué qu’il préférait présenter des arguments supplémentaires par écrit. La date limite a initialement été fixée au 28 février 2020.

[50] M. Burns a ensuite demandé plus de temps pour compléter ses arguments. En réponse à sa demande de prorogation, j’ai demandé au greffe de la Commission de répondre à une autre question de la part de M. Burns concernant ce qu’on lui demandait de faire. Il a été invité à répondre à la question suivante : [traduction] « [...] si nous acceptons sa version des événements, comment la Loi aurait-elle été enfreinte? » Il lui a été dit que la Commission ne s’attendait pas à ce qu’il produise des éléments de preuve qui seraient normalement présentés à l’audience, mais qu’il lui était loisible de joindre tous les documents justificatifs pertinents qu’il souhaitait fournir avec ses arguments.

[51] Le 11 février 2020, la défenderesse a fourni des précisions concernant ses objections à l’égard de la plainte no 3.

[52] M. Burns a obtenu une prorogation jusqu’au 30 juin 2020. Il a présenté ses derniers arguments écrits ce jour-là.

[53] Dans la partie « Analyse » de la présente décision, j’examine le contenu des plaintes de M. Burns, les réponses d’Unifor à ces plaintes et les arguments écrits des parties.

B. Plaintes concernant l’employeur de M. Burns

[54] Avant d’examiner les plaintes no 1, no 2 et no 3, j’aimerais répondre à une question que M. Burns a posée, à savoir si ses plaintes visent également son employeur.

[55] Lorsque M. Burns a présenté ses arguments sur le respect des délais de ses plaintes le 22 novembre 2019, il a envoyé un deuxième courriel à la Commission. Il y explique que la Commission canadienne des droits de la personne (CCDP) a récemment informé son employeur de son intention de présenter des allégations de discrimination. Il a ensuite posé la question suivante :

[Traduction]

Je ne connais pas bien le processus, mais la CCDP a demandé si ma plainte à la CRTESPF portait sur l’aspect « employeur » de la discrimination. Je crois que les énoncés des allégations 18 et 29 de [la plainte no 3] démontrent la participation de l’employeur. Ma question est donc la suivante : Afin de satisfaire à la demande de la CCDP d’intenter toutes les procédures à ma disposition, les plaintes actuellement présentées couvriraient-elles le processus de règlement des griefs de la CRTESPF, qui est nécessaire dans mon cas (en d’autres termes, s’agit-il simplement d’une question d’ajout de l’employeur en tant que défendeur?) ou exigeriez-vous que je dépose un nouveau grief pour traiter l’aspect « employeur » de la discrimination que je subis?

 

[56] En réponse, j’ai demandé au greffe de la Commission d’écrire à M. Burns ce qui suit : [traduction] « [l]es plaintes que vous avez déposées auprès de la Commission sont dirigées contre votre agent négociateur, soit la section locale no 2182 d’Unifor. Il ne s’agit pas de griefs contre votre employeur. La procédure de dépôt de griefs est décrite dans votre convention collective. »

[57] J’ai estimé qu’il était important d’informer M. Burns que ses plaintes portant sur le devoir de représentation équitable dirigée contre Unifor ne constituaient pas un grief contre son employeur. Ce point sera confirmé lors de mon examen de la jurisprudence pertinente sur les plaintes portant sur le devoir de représentation équitable.

C. Plaintes concernant la Commission

[58] Dans cet autre courriel du 22 novembre 2019, M. Burns a également expliqué qu’il avait tenté de déposer une plainte auprès du ministre fédéral [traduction] « [...] responsable du traitement des plaintes concernant les processus des tribunaux fédéraux appuyés par le [Service canadien d’appui aux tribunaux administratifs] » (cette partie de la fonction publique fédérale fournit des services d’appui à la Commission et à 10 autres tribunaux administratifs). Il a expliqué qu’en novembre et en décembre 2018, il avait envoyé des courriels et des lettres à l’honorable Dominic Leblanc, étant entendu qu’il était le ministre approprié, mais qu’il n’avait reçu aucune réponse. Il a demandé si la Commission pourrait fournir des renseignements [traduction] « [...] sur le ministère maintenant responsable du traitement des plaintes concernant les processus des tribunaux fédéraux appuyés par le [Service canadien d’appui aux tribunaux administratifs] ».

[59] En réponse, j’ai demandé au greffe de la Commission qu’il informe M. Burns que l’honorable Anita Anand était la ministre responsable de la Loi et de la Loi sur la Commission. Cependant, cette réponse indiquait également ce qui suit :

[Traduction]

La Commission aimerait ajouter que, si vous avez des préoccupations concernant la façon dont la Commission a traité vos trois plaintes [...], nous vous encourageons à faire part de ces préoccupations directement à la Commission. Si vous souhaitez le faire, avant que la Commission n’examine vos arguments écrits sur ces plaintes, nous vous demandons de le faire au plus tard le 11 décembre 2019. Une copie des arguments supplémentaires doit être envoyée à la défenderesse et aux autres parties.

 

[60] Le 11 décembre 2019, M. Burns a fourni à la Commission la correspondance qu’il avait adressée à Mme Anand. Après examen, il est devenu évident que sa correspondance concernait des événements liés à la tenue de son audience en septembre 2018 et à la nature de sa discussion avec la formation précédente de la Commission lors de la conférence de gestion de cas du 13 septembre 2018. Dans sa correspondance, il a remis en question l’impartialité de cette formation.

[61] À ma demande, le 13 décembre 2019, le greffe de la Commission a écrit à M. Burns pour l’informer que j’avais été nommé en tant que nouvelle formation de la Commission pour statuer sur les plaintes no 1, no 2 et no 3. Ce même courriel indiquait que d’autres arguments sur les trois plaintes étaient demandés, tout comme la disponibilité des parties pour une téléconférence de gestion de cas (qui a finalement eu lieu le 29 janvier 2020).

[62] De plus, le 1er avril 2020, la présidente de la Commission a écrit à M. Burns en réponse à la correspondance qu’il avait envoyée aux ministres Leblanc et Anand. Elle lui a rappelé que la formation précédente de la Commission affectée à ses plaintes était décédée en 2019 et que j’avais été nommé à titre de nouvelle formation de la Commission. Elle a invité M. Burns à me faire part de toute question qu’il pourrait avoir sur le traitement de son affaire.

[63] La présidente a également informé M. Burns que, s’il n’était pas satisfait d’une décision rendue par la Commission, le recours approprié serait de présenter une demande de contrôle judiciaire de la décision à la Cour d’appel fédérale.

[64] À la suite de cette correspondance, je n’ai reçu aucun autre argument de la part de M. Burns concernant le traitement des plaintes no 1, no 2 et no 3 par la Commission.

III. Analyse

A. Questions devant la Commission

[65] Voici les questions que je vais examiner à l’égard des trois plaintes de M. Burns :

  • Les plaintes de M. Burns sont-elles dans les délais, en tout ou en partie?
  • Dans la mesure où ses plaintes, en tout ou en partie, sont dans les délais, a-t-il démontré qu’il y existe une cause défendable de violation de la Loi?

[66] Avant d’examiner ces questions, j’examinerai les dispositions de la Loi applicables aux plaintes de M. Burns, ainsi que la jurisprudence pertinente. Ce contexte juridique doit éclairer mon analyse des plaintes dont je suis saisi.

B. Plaintes portant sur le devoir de représentation équitable prévu par la Loi

[67] Les plaintes portant sur le devoir de représentation équitable sont déposées en vertu de l’alinéa 190(1)g) de la Loi, dont les parties pertinentes sont rédigées comme suit à tous les moments pertinents :

190 (1) La Commission instruit toute plainte dont elle est saisie et selon laquelle :

[…]

g) l’employeur, l’organisation syndicale ou toute personne s’est livré à une pratique déloyale au sens de l’article 185.

(2) [...] les plaintes prévues au paragraphe (1) doivent être présentées dans les quatre-vingt-dix jours qui suivent la date à laquelle le plaignant a eu — ou, selon la Commission, aurait dû avoir — connaissance des mesures ou des circonstances y ayant donné lieu.

 

[68] L’article 185 de la Loi énumère plusieurs pratiques déloyales de travail, y compris celles qui sont interdites par l’article 187, qui sont rédigées comme suit à tous les moments pertinents :

187 Il est interdit à l’organisation syndicale, ainsi qu’à ses dirigeants et représentants, d’agir de manière arbitraire ou discriminatoire ou de mauvaise foi en matière de représentation de tout fonctionnaire qui fait partie de l’unité dont elle est l’agent négociateur.

 

[69] Des dispositions similaires à celle de l’article 187 de la Loi se trouvent dans de nombreux autres textes législatifs, qui sont en vigueur au niveau fédéral ou provincial au Canada, y compris, par exemple, la partie I du Code canadien du travail (L.R.C. (1985), ch. L-2; le « Code »), qui est administré par le Conseil canadien des relations industrielles (CCRI). L’article 37 du Code définit le devoir de représentation équitable comme suit :

37 Il est interdit au syndicat, ainsi qu’à ses représentants, d’agir de manière arbitraire ou discriminatoire ou de mauvaise foi à l’égard des employés de l’unité de négociation dans l’exercice des droits reconnus à ceux-ci par la convention collective.

 

[70] Bien qu’il y ait des différences entre le libellé de l’article 187 de la Loi et celui de l’article 37 du Code, les dispositions sont suffisamment semblables aux fins de la présente discussion. Tout comme la Loi, le Code prévoit également un délai de 90 jours pour déposer des plaintes portant sur le devoir de représentation équitable. Cependant, contrairement au CCRI, la Commission n’a pas le pouvoir de proroger ce délai : voir Roberts c. Syndicat des agents correctionnels du Canada, 2014 CAF 42.

[71] En 2004, dans McRaeJackson c. Syndicat national de l’automobile, de l’aérospatial, du transport et des autres travailleurs et travailleuses du Canada (TCA‑Canada), 2004 CCRI 290, le CCRI a établi les principes en vertu desquels il statue sur les plaintes portant sur le devoir de représentation équitable. J’estime que de nombreux commentaires exprimés dans cette décision sont utiles pour aider à se concentrer sur l’objectif du devoir de représentation équitable.

[72] Je vais brièvement examiner ce que je considère comme étant certains des éléments les plus utiles de McRaeJackson. Le CCRI fait remarquer que le devoir de représentation équitable est prévu dans la plupart des lois canadiennes sur le travail.

[73] La Cour suprême du Canada a énoncé cinq principes sous-tendant le devoir de représentation équitable de tout syndicat dans Guilde de la marine marchande du Canada c. Gagnon, [1984] 1 R.C.S. 509. Bien que le deuxième principe ne soit pas directement applicable en vertu du cadre des griefs individuels prévu par la Loi, la Commission s’est souvent servie des quatre autres principes suivants pour définir la portée du devoir de représentation équitable prévu par la Loi :

1. Le pouvoir exclusif reconnu à un syndicat d’agir à titre de porte‑parole des employés faisant partie d’une unité de négociation comporte en contrepartie l’obligation de la part du syndicat d’une juste représentation de tous les salariés compris dans l’unité.

2. Lorsque, comme en l’espèce et comme c’est généralement le cas, le droit de porter un grief à l’arbitrage est réservé au syndicat, le salarié n’a pas un droit absolu à l’arbitrage et le syndicat jouit d’une discrétion appréciable.

3. Cette discrétion doit être exercée de bonne foi, de façon objective et honnête, après une étude sérieuse du grief et du dossier, tout en tenant compte de l’importance du grief et des conséquences pour le salarié, d’une part, et des intérêts légitimes du syndicat d’autre part.

4. La décision du syndicat ne doit pas être arbitraire, capricieuse, discriminatoire, ni abusive.

5. La représentation par le syndicat doit être juste, réelle et non pas seulement apparente, faite avec intégrité et compétence, sans négligence grave ou majeure, et sans hostilité envers le salarié.

 

[74] Bien que l’analyse du CCRI de ce qui est nécessaire pour établir qu’une affaire de devoir de représentation équitable porte entièrement sur des griefs, les commentaires suivants formulés au paragraphe 33 s’appliquent également aux plaintes déposées en vertu de la Loi :

[33] Le syndicat peut s’acquitter de son devoir de représentation juste en abordant le grief de façon raisonnable, en tenant compte de tous les faits qui l’entourent, en enquêtant sur la situation, en pesant les intérêts contradictoires de l’employé compte tenu des siens, puis en concluant après mûre réflexion qu’il vaut la peine de donner suite au grief ou pas. C’est ce qu’on entend par peser les circonstances d’une affaire en fonction de la décision à prendre. Par exemple, le syndicat peut tenir compte à juste titre du libellé de la convention collective et des pratiques dans le secteur d’activité ou le milieu de travail, ou encore des décisions rendues sur des questions analogues. Il est aussi légitime qu’il tienne compte de la crédibilité de l’employé en cause, de la présence – ou de l’absence – de témoins pouvant confirmer sa version des événements, du fait que la sanction disciplinaire est raisonnable ou non, ainsi que des décisions arbitrales en pareilles circonstances.

 

[75] Il pourrait être soutenu que l’accent particulier que met le CCRI sur les griefs est lié au libellé précis de l’article 37 du Code, qui impose aux syndicats un devoir envers les employés « [...] dans l’exercice des droits reconnus à ceux-ci par la convention collective ».

[76] En vertu de la Loi, l’article 187 impose aux syndicats un devoir de représentation équitable « [...] en matière de représentation de tout fonctionnaire qui fait partie de l’unité dont [ils sont] l’agent négociateur ». Autrement dit, le devoir de représentation équitable prévu par la Loi ne se limite pas aux questions relevant d’une convention collective.

[77] Dans McRaeJackson, au paragraphe 53, le CCRI a conclu que la capacité d’un plaignant de demander un recours « est [...] un bon indicateur de la compréhension qu’a l’employé de la procédure de plainte ». Je crois que les commentaires du CCRI peuvent être utiles, lorsqu’ils sont appliqués avec soin aux plaintes portant sur le devoir de représentation équitable prévu par la Loi. Autrement dit, la façon dont un plaignant décrit le recours qu’il demande à la Commission peut aider à déterminer si la plainte porte sur le devoir législatif de représentation équitable d’un syndicat envers le plaignant. Une plainte ne peut pas être simplement liée à des désaccords quant à la stratégie à adopter ou à une insatisfaction à l’égard de la communication entre le plaignant et le syndicat; une plainte doit porter sur le manquement au devoir de représentation équitable prévu à l’article 187 de la Loi.

[78] Dans McRaeJackson, au paragraphe 49, le CCRI a limité son rôle comme suit :

[49] Le Conseil est un organisme indépendant, doté d’un pouvoir décisionnel et dont le rôle est de déterminer si l’on a enfreint le Code. Ce n’est pas un organisme d’enquête, même si le Code l’investit de grands pouvoirs d’instruction de toutes les affaires dont il est saisi. Il n’a donc pas le mandat de se lancer à la recherche des faits pour le plaignant, d’entendre des plaintes dénonçant un mauvais service du syndicat, d’enquêter sur la direction du syndicat ou sur des plaintes contre l’employeur parce qu’on aurait été victime de fautes qui lui seraient imputables en milieu de travail. Les employés qui allèguent que leur syndicat a enfreint le Code et veulent obtenir un redressement en conséquence doivent présenter de solides arguments convaincants pour étayer leurs plaintes.

 

[79] Dans toutes les plaintes portant sur le devoir de représentation équitable, la question dont la Commission est saisie est exprimée dans les questions suivantes : Le syndicat a-t-il contrevenu à la Loi? Le syndicat a-t-il exercé son rôle législatif en matière représentation de manière arbitraire, discriminatoire ou de mauvaise foi? Y a-t-il, par exemple, une procédure que le syndicat n’a pas menée, et qu’elle aurait dû mener, dans le cadre de sa représentation d’un employé dont elle est l’agent négociateur?

[80] Dans McRaeJackson, au paragraphe 54, le CCRI énonce la conclusion suivante concernant la raison pour laquelle la plupart des affaires de devoir de représentation équitable ne sont pas fondées :

[54] En définitive, si le syndicat s’est penché sur la plainte de l’employé, s’il a recueilli les renseignements pertinents avant de prendre sa décision, s’il a tenté de régler le problème et s’il s’est prévalu raisonnablement de son pouvoir discrétionnaire de ne pas présenter un grief ou de ne pas le porter à l’arbitrage, conformément aux critères décrits dans les pages qui précèdent, et s’il a informé l’employé des raisons de sa décision, ce dernier n’a guère de raisons de porter plainte.

 

[81] Au paragraphe 47, le CCRI s’est également efforcé d’expliquer qu’une plainte portant sur le devoir de représentation équitable ne constitue pas un substitut à un grief contre un employeur :

[47] L’employeur n’est pas une partie principale dans les procédures fondées sur l’article 37. Ses actions ne sont pas en cause, et il n’a rien à défendre. Dans la pratique, on l’ajoute à la liste des parties comme partie visée, puisque le résultat de la plainte [...] peut avoir des répercussions sur ses intérêts. [...]

 

[82] Dans l’affaire dont je suis saisi, Unifor a demandé que les plaintes soient rejetées sans audience. Unifor demande que la Commission exerce son pouvoir discrétionnaire de ne pas entendre la preuve de M. Burns. La question dont je suis saisi, à cette étape, n’est donc pas de décider si les plaintes no 1, no 2 et no 3 sont étayées par des éléments de preuve démontrant, selon la prépondérance des probabilités, qu’Unifor a manqué à son devoir de représentation équitable envers M. Burns. La Commission est plutôt chargée d’évaluer, sur la base des seules allégations à l’appui des plaintes, si M. Burns a une cause défendable qui mérite d’être entendue.

[83] Au fil des années, la Commission a appliqué maintes fois une analyse de la cause défendable dans des circonstances similaires. Il est vrai que la Commission n’a pas toujours employé les mêmes mots pour exprimer le critère qu’elle appliquait, mais l’analyse de la Commission était généralement uniforme et cohérente. Je conclus que Hughes c. ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences, 2012 CRTFP 2, représente bien l’analyse de la cause défendable appliquée par la Commission. Le paragraphe 86 de cette décision énonce le critère comme suit : « [...] supposant que la Commission établisse que toutes les allégations mises de l’avant soient fondées, les plaintes constituaient un cas défendable de violation par le défendeur des dispositions de la [Loi] sur les pratiques déloyales de travail ».

[84] Au paragraphe 105, Hughes formule également la mise en garde suivante :

105 Je suis d’accord avec [Quadrini c. Agence du revenu du Canada et Hillier, 2008 CRTFP 37] que, en effectuant l’évaluation requise, je dois reconnaître que si j’ai quelque doute que ce soit sur ce que les faits révèlent – présumant que les faits sont véridiques – je dois opter pour une conclusion de cas défendable pour ce qui est du lien devant être établi relativement à la violation présumée du défendeur de l’alinéa 186(2)a) de la [Loi]. [...]

 

[85] Enfin, en vertu de la Loi, la Commission et ses prédécesseurs ont interprété le délai de 90 jours pour déposer une plainte et le devoir de représentation équitable comme étant obligatoires. Unifor a cité un certain nombre d’affaires où la Commission a strictement respecté ce délai, notamment Castonguay c. Alliance de la Fonction publique du Canada, 2007 CRTFP 78, au paragraphe 55, où elle a statué qu’il n’existait aucune disposition lui permettant de proroger le délai de 90 jours prescrit par la Loi. Même si une plainte est déposée au jour 92, la Commission a statué qu’elle serait hors délai (voir Nemish c. King, Walker et Syndicat des employées et employés nationaux (Alliance de la Fonction publique du Canada), 2020 CRTESPF 76).

[86] Dans Éthier c. Service correctionnel du Canada et Union of Canadian Correctional Officers – Syndicat des agents correctionnels du Canada – CSN, 2010 CRTFP 7, la Commission a confirmé au paragraphe 18 qu’elle ne pouvait pas proroger le délai de 90 jours, mais qu’elle pouvait examiner si le plaignant avait connaissance de la violation alléguée ou s’il l’ignorait :

18 Le délai de 90 jours est celui que le législateur a choisi d’imposer à toute partie qui désire porter plainte en vertu de l’article 190 de la LRTFP. À cet égard, la Commission n’est pas habilitée à changer cette disposition, mais fait l’examen des circonstances qui doivent servir à déterminer la date à laquelle le délai de 90 jours commence à s’écouler. Le paragraphe 190(2) de la LRTFP stipule que le délai commence à s’écouler au moment où le plaignant a eu ou aurait dû avoir connaissance des mesures ou des circonstances ayant donné lieu à sa plainte. Il s’agit d’une question de fait.

 

[87] La décision de la Commission dans Boshra c. Association canadienne des employés professionnels, 2009 CRTFP 100, est pertinente à la situation soulevée dans les plaintes de M. Burns. Dans Boshra, la Commission a reconnu qu’une plainte qui formule de nombreuses allégations sur une période prolongée peut comprendre des « [...] éléments d’un problème plus vaste ou sous-jacent concernant la représentation offerte par la défenderesse », même si certains des événements sont antérieurs au délai de 90 jours. Dans un tel cas, une « [...] plainte est recevable si la preuve montrait qu’il n’a pu se rendre compte de l’existence d’une tendance enfreignant l’article 187 qu’à une date comprise dans la période de 90 jours visée, peut-être à la suite d’un événement catalyseur » (au paragraphe 22). Cette situation exige que la Commission examine la nature essentielle de la plainte.

[88] Dans Boshra, la Commission a conclu que la nature essentielle de la plainte était claire bien avant le délai de 90 jours prévu par la Loi, et elle a rejeté la plainte.

[89] M. Burns a fait valoir que la Commission avait appliqué une approche similaire dans Jutras Otto c. Brossard et Kozubal, 2011 CRTFP 107. Dans cette affaire, une plainte a été déposée après plusieurs mois de discussion et de correspondance entre la plaignante et ses représentants syndicaux. Les défendeurs avaient fait valoir que la plainte était hors délai. La Commission a statué, au paragraphe 58, contre l’objection des défendeurs concernant les délais sur la base de l’analyse suivante :

58 Je suis par conséquent convaincu, selon la preuve devant moi, que c’est peu après le 10 mars 2010 que la plaignante a eu, ou aurait dû avoir, connaissance des actions, des omissions ou de quelque autre circonstance sur laquelle sa plainte est fondée, ce qui signifie que la plainte du 23 mars 2010 a été présentée dans les délais impartis. En outre, le courriel de la plaignante en date du 10 mars 2010 confirme le fait qu’elle ne reçoit pas les services de représentation qu’on lui avait promis. Jusqu’alors, la plaignante semblait avoir l’impression qu’elle bénéficierait éventuellement d’une représentation sous une forme ou une autre. Le témoignage de la plaignante à cet égard est à la fois crédible et convaincant.

 

[90] En conclusion, la Commission n’a pas prorogé le délai de 90 jours pour déposer une plainte, mais elle s’est renseignée sur la nature d’une plainte et a examiné la question de savoir si un événement déclencheur ou précipitant s’est produit dans le délai de 90 jours.

[91] Dans le reste de la présente décision, j’appliquerai les principes susmentionnés aux questions à examiner en ce qui a trait aux trois plaintes de M. Burns. Compte tenu de leurs similitudes, j’analyserai les plaintes no 1 et no 3 dans l’ordre, puis la plainte no 2.

C. Plainte no 1

[92] La plainte no 1 a été envoyée par courriel à la Commission le 4 mai 2017. M. Burns indique sur le formulaire de plainte que la date à laquelle il [traduction] « [...] a pris connaissance de l’action, de l’omission ou de la situation ayant donné lieu à la plainte [...] » était le 3 février 2017. Le formulaire original de plainte a été reçu par la poste le 15 mai 2017. La plainte serait dans les délais si je considère le 4 mai 2017 comme la date de dépôt, car la plainte aurait été déposée le 90e jour du délai de 90 jours prévu par la Loi. Cependant, la plainte serait jugée hors délai si je considère le 15 mai 2017 comme la date de dépôt, car elle aurait été déposée le 101e jour. C’est en partie sur cette dernière base qu’Unifor a fait valoir que l’ensemble de la plainte devrait être rejeté.

[93] Dans sa réponse écrite à cette objection concernant les délais, M. Burns a soutenu que sa plainte avait été déposée par courriel le 4 mai 2017, soit exactement le 90e jour suivant le 3 février 2017. Il a allégué que, le 5 mai 2017, une employée du greffe de la Commission lui avait envoyé un courriel et avait affirmé que sa plainte serait enregistrée comme ayant été reçue le 4 mai 2017, si elle était suivie des originaux. Le 10 mai 2017, la même employée du greffe de la Commission aurait affirmé qu’elle l’avait mal informé et que la plainte serait marquée comme ayant été déposée à la date à laquelle elle a été reçue par la poste.

[94] Au moment où M. Burns a déposé la plainte no 1, le Règlement prévoyait que la date d’origine d’une plainte était soit la date à laquelle elle était reçue en double exemplaire à la Commission, soit la date à laquelle elle était télécopiée à la Commission, si la télécopie était suivie de l’original de la plainte et d’une copie. La Commission a déjà accepté un dépôt par courriel comme s’il s’agissait d’un dépôt par télécopieur aux fins du paragraphe 3(2) du Règlement (voir Hughes, au paragraphe 66).

[95] Je suis conscient que, depuis le 18 mars 2020, la version révisée du Règlement prévoit maintenant le dépôt électronique des documents originaux.

[96] Je suivrai Hughes et me fonderai sur le fait que la plainte no 1 a été déposée le 4 mai 2017. Cela fait en sorte que la plainte est dans les délais en ce qui a trait aux événements du 3 février 2017. La question que je dois donc examiner est celle de savoir si les allégations de M. Burn concernant les événements de cette date démontrent une cause défendable selon laquelle Unifor a manqué à son devoir de représentation équitable.

[97] En ce qui concerne les événements antérieurs à cette date, je pourrais conclure que la plainte est dans les délais si j’étais convaincu que quelque chose s’était concrétisé le 3 février 2017, ce qui équivaudrait à une cause défendable de manquement au devoir de représentation équitable.

[98] M. Burns a décrit les événements du 3 février comme un [traduction] « [...] échange long, déroutant et révélateur ». Il a déclaré que lui et Mme Arruda avaient discuté du traitement de son problème de santé mentale, de l’état de sa demande de prestations d’ILD et de la recommandation du syndicat selon laquelle il devrait être en mesure de démontrer sa capacité de retourner au travail. Il a déclaré qu’il voyait un psychologue seulement parce que le syndicat l’avait demandé, que son médecin ne pouvait pas obliger son employeur, son syndicat ou son assureur à lui parler, et que ses circonstances n’étaient pas conformes à une ILD; c’est pourquoi il avait voulu présenter une demande d’indemnité pour accident de travail. Il a également déclaré qu’il avait demandé à Mme Arruda d’être plus claire ou plus précise au sujet de ses recommandations concernant le traitement médical.

[99] Je ne suis pas convaincu que les événements du 3 février 2017, tels que décrits par M. Burns, démontrent un manquement défendable au devoir de représentation équitable.

[100] Le récit de M. Burns des événements du 3 février 2017 ne fait aucune mention du dépôt d’un grief. Il n’est fait mention d’aucune demande de représentation, quelle qu’elle soit, qui lui aurait été refusée par Unifor. Mme Arruda ne refuse pas de continuer à le représenter.

[101] Dans ses arguments écrits finaux, M. Burns a affirmé que Mme Arruda avait mis fin à leur échange du 3 février avec un texto déclarant [traduction] « John, je dois partir pour une réunion maintenant, je vous parlerai plus tard ». Il a affirmé qu’à une date ultérieure (après le 3 février et avant le dépôt de la plainte no 1), il a conclu qu’elle n’avait pas l’intention de le recontacter.

[102] Je comprends l’allégation de M. Burns selon laquelle Mme Arruda n’a pas répondu à son appel. Cependant, l’absence d’un retour d’appel téléphonique ne constitue pas en soi une cause défendable de manquement au devoir de représentation équitable. Le problème peut-être le plus important que pose cet argument est que la plainte no 3 de M. Burns indique clairement que Mme Arruda n’a pas abandonné son dossier.

[103] En ce qui concerne les événements qui précèdent cette date, M. Burns a fait valoir que la discussion du 3 février 2017 avec Mme Arruda était un [traduction] « événement déclencheur » de sa plainte. Il a fait valoir que la chronologie des événements énumérés dans sa plainte, qui a commencé le 10 novembre 2015 et s’est terminée le 3 février 2017, est la [traduction] « [...] question pertinente qui est discutée [...] », et non pas l’événement déclencheur. Il a fait valoir que, selon l’analyse de la Commission dans Jutras Otto, l’ensemble de sa plainte devrait être jugée dans les délais et entendue intégralement lors d’une audience.

[104] Le résumé des événements de M. Burns dans la plainte no 1 énumèrent pas moins de 35 contacts entre lui et des représentants syndicaux répartis sur une période qui a commencé le 10 novembre 2015 et s’est terminée le 3 février 2017, soit une période d’environ 15 mois. Autrement dit, ils communiquaient plus de deux fois par mois, en moyenne.

[105] Rien qu’en janvier 2017, M. Burns et Mme Arruda se sont parlé ou se sont envoyé un courriel à au moins quatre reprises. Dans son rapport sur ces échanges, M. Burns a déclaré qu’Unifor avait recommandé qu’il subisse un examen médical indépendant avant de proposer un retour au travail et qu’il poursuive un traitement médical, et qu’Unifor avait continué de l’encourager à demander l’approbation des prestations d’ILD.

[106] Encore une fois, il n’est pas fait mention d’un besoin particulier de représentation, et rien n’indique qu’une action ou une décision particulière a été prise par l’employeur, laquelle aurait exigé une action de la part d’Unifor.

[107] En examinant de façon approfondie la plainte de M. Burns et ses arguments écrits subséquents, il a déclaré que, en mars 2015, il avait déposé une plainte concernant de l’intimidation et du harcèlement, et qu’il [traduction] « [...] devait mener des activités professionnelles en dehors des heures de travail sans avoir le droit de déclarer ces heures ». En date du 8 juin 2015, il a refusé de travailler pour des motifs de santé et de sécurité, conformément à la partie II du Code. Il a affirmé qu’il avait été réintégré dans la masse salariale en décembre 2015. Il a décrit avoir travaillé avec son syndicat à ce sujet et a reconnu que le syndicat l’avait aidé à réintégrer la masse salariale et à obtenir un congé payé.

[108] Il ressort clairement du récit de M. Burns qu’il n’avait pas l’impression que son syndicat comprenait ses problèmes au travail ou son état de santé. Cependant, j’ai longuement examiné le contenu de ces arguments à la recherche d’une cause défendable selon laquelle Unifor avait enfreint la Loi en tentant de l’aider à régler ses problèmes.

[109] Il n’y a eu que deux mentions d’événements particuliers où le syndicat a pris des décisions stratégiques qui, sans doute, auraient pu engager le devoir de représentation équitable.

[110] En ce qui concerne le 16 et le 17 février 2016, M. Burns a affirmé qu’Unifor n’était pas prête pour une audience de grief au deuxième palier par le Conseil national mixte (CNM) sur des questions liées à la réinstallation. Unifor n’a présenté aucun argument sur la façon dont ce grief a été réglé ou la question de savoir s’il n’était toujours pas réglé. Cependant, même si sa plainte concernant ces événements était fondée, ceux-ci ont eu lieu plus d’un an avant que la plainte no 1 ait été déposée, ou bien en dehors du délai de 90 jours. Je ne vois aucune explication plausible quant à la raison pour laquelle M. Burns n’aurait pu être au courant de ces événements avant le 3 février 2017.

[111] En ce qui concerne le 8 septembre 2016, M. Burns a allégué que [traduction] « l’employeur et la défenderesse avaient ordonné au plaignant de demander des prestations d’ILD, et son salaire dépendait du respect de cette orientation ». Considérant cette affirmation comme véridique aux fins d’une analyse de la cause défendable, elle pourrait fournir à la Commission une justification à la tenue d’une audience afin de vérifier si le syndicat ne l’a pas représenté équitablement dans le processus de travail avec l’employeur lorsqu’il a fourni cette orientation, si elle avait été présentée dans les délais. Cependant, étant donné que cet événement s’est produit plus de six mois avant que la plainte no 1 ait été déposée, il dépasse également largement le délai de 90 jours. Encore une fois, je ne vois aucune explication plausible quant à la raison pour laquelle M. Burns n’aurait pu être au courant de ces événements avant le 3 février 2017.

[112] Même si cette allégation avait été formulée dans les délais, je ne peux pas concilier l’allégation de M. Burns selon laquelle Unifor a collaboré avec l’employeur pour lui imposer des prestations d’ILD avec sa déclaration qu’il a faite à ce sujet au cours du même mois (septembre 2016), selon laquelle Mme Arruda [traduction] « [...] a pris des dispositions avec [son] employeur pour qu’il continue de le payer jusqu’à ce qu’il reçoive l’approbation de sa réclamation à la Sun Life ». En outre, les documents joints à ses arguments écrits laissent entendre que son congé payé s’est poursuivi en 2017 et en 2018, jusqu’en juin 2019, date à laquelle l’employeur a changé son congé payé pour un congé non payé.

[113] Si les événements antérieurs énumérés dans la plainte no 1 doivent être considérés comme étant dans les délais, je devrais être en mesure de conclure que les événements du 3 février 2017, ou le défaut allégué de Mme Arruda de communiquer avec M. Burns entre le 3 février et le 15 mai 2017, représentaient des événements déclencheurs ou déterminants qui lui ont fait prendre conscience qu’Unifor traitait son dossier d’une façon sans doute arbitraire, discriminatoire ou de mauvaise foi.

[114] Je ne suis pas convaincu que ce soit le cas. La question sous-jacente dans les allégations de M. Burns concerne le traitement de son absence du lieu de travail à compter de juin 2015. Ses arguments laissent entendre qu’Unifor a travaillé sur son dossier au moins deux fois par mois, en moyenne, de 2015 à février 2017. Dans la mesure où l’une de ses allégations appuie une cause défendable de manquement au devoir de représentation équitable, les événements allégués ont eu lieu plusieurs mois avant le délai de 90 jours. Ses arguments laissent entendre que non seulement Unifor l’a aidé à demander des prestations d’ILD, mais elle l’a également aidé à obtenir un congé payé prolongé. Cette stratégie a été bien établie à l’automne 2016 et M. Burns aurait dû en avoir connaissance à ce moment-là.

[115] Je conclus que M. Burns n’a pas établi une cause défendable selon laquelle les événements qu’il a allégués dans la plainte no 1 constituent un manquement au devoir de représentation équitable qu’Unifor avait envers lui.

D. Plainte no 3

[116] Étant donné que la plainte no 3 chevauche en grande partie la plainte no 1, je l’examinerai maintenant.

[117] La plainte no 3 a été déposée le 22 janvier 2019. Les détails fournis par M. Burns couvrent 41 allégations différentes. Les allégations 1 à 27 reprennent les allégations formulées dans la plainte no 1. Les allégations 28 à 41 couvrent la période du 1er novembre 2017 au 11 décembre 2018.

[118] La défenderesse a fait valoir que la plainte no 3 était également hors délai. Subsidiairement, elle a estimé que les allégations 1 à 38 étaient hors délai, car elles se sont produites avant la période de 90 jours prévue par la Loi, et elle a présenté d’autres arguments concernant les allégations 39 à 41.

[119] Le calcul d’Unifor de la période de 90 jours était erroné, car elle indiquait que la plainte no 3 avait été déposée le 12 février 2019. Il ne s’agit pas de la date à laquelle elle a été déposée; il s’agit de la date à laquelle la Commission a envoyé la plainte à la défenderesse, lui demandant une réponse à la plainte.

[120] La plainte no 3 a été déposée le 22 janvier 2019 et la période de 90 jours qui la précède a commencé le 24 octobre 2018. Cela signifie qu’un total de cinq événements énumérés dans la plainte no 3 (allégations 37 à 41) ont eu lieu pendant la période de 90 jours.

[121] L’autre position d’Unifor sur les allégations 39 à 41 qui entraient dans la période de 90 jours est formulée comme suit :

[Traduction]

La défenderesse s’oppose à la plainte en vertu [du paragraphe 190(3) de la Loi] : « Sous réserve du paragraphe (4), la plainte reprochant à l’organisation syndicale ou à toute personne agissant pour son compte d’avoir contrevenu aux alinéas 188b) ou c) ne peut être présentée […] ».

 

[122] Lorsqu’il a adopté cette position pour la première fois le 22 février 2019, M. Burns n’avait pas précisé que ses allégations étaient liées à l’article 187. Cependant, il l’a fait peu après. Néanmoins, lorsqu’Unifor a présenté ses arguments écrits finaux concernant les délais, le 25 octobre 2019, elle a réitéré son objection aux allégations 39 à 41 en renvoyant au paragraphe 190(4) de la Loi.

[123] Le paragraphe 190(4) énonce les circonstances dans lesquelles la Commission peut statuer sur une plainte déposée en vertu de l’article 188. L’alinéa 188b) interdit aux organisations syndicales d’expulser ou de suspendre l’adhésion d’un employé de manière discriminatoire. L’alinéa 188c) interdit aux organisations syndicales de prendre des mesures disciplinaires ou d’imposer une sanction de manière discriminatoire.

[124] L’objection d’Unifor ne me semblait pas logique. Peut-être voulait-elle laisser entendre que M. Burns n’avait pas épuisé ses processus internes pour traiter ses plaintes. Cependant, aucun des arguments ou aucune des allégations de M. Burns n’a prétendu qu’il avait été exclu ou suspendu d’Unifor. Aucun n’a prétendu avoir fait l’objet d’une mesure disciplinaire ou d’une sanction de la part d’Unifor. C’était là la seule base qui aurait pu appuyer une objection aux allégations 39 à 41, en se référant à l’article 188 et au paragraphe 190(4).

[125] Lorsque j’ai demandé à Unifor si elle voulait préciser sa position concernant les allégations 39 à 41, elle a soutenu que les allégations n’avaient pas été formulées conformément au paragraphe 190(2), qui fixe le délai de 90 jours pour déposer une telle plainte. Je n’ai pas trouvé cette précision utile, car il s’agissait simplement d’une réaffirmation de sa position selon laquelle la plainte dans son ensemble était hors délai.

[126] Cependant, Unifor a également soutenu que les allégations formulées par M. Burns dans la plainte no 3 n’ont pas établi une cause défendable de manquement à son devoir de représentation équitable prévu à l’article 187.

[127] J’ai déterminé que les allégations 37 à 41 ont eu lieu dans les 90 jours précédant le dépôt de la plainte no 3; par conséquent, ils sont dans les délais. La question qui reste à trancher est celle de savoir si M. Burns a établi une cause défendable de violation de la Loi.

[128] Dans les allégations 37 à 41, M. Burns fait état de ses discussions avec Mme Arruda, qui ont porté sur la correspondance avec la Sun Life concernant ses demandes de prestations d’ILD et sur la question du CNM. Ils ont eu cinq discussions sur une période d’environ deux mois. M. Burns a fait valoir que Mme Arruda avait agi de manière arbitraire en le traitant de façon indifférente et superficielle. Il a fait valoir qu’elle avait fait preuve de mauvaise foi en ne le recontactant pas alors qu’elle l’avait promis. Dans ces cinq allégations, il mentionne également des événements antérieurs, y compris ceux énumérés dans la plainte no 1. Par conséquent, j’examinerai la question de savoir si ces cinq allégations établissent une cause défendable de manquement au devoir de représentation équitable ou s’il s’agit d’un événement déterminant qui établit une cause défendable à l’égard des événements antérieurs.

[129] En ce qui concerne le critère énoncé dans Guilde de la marine marchande du Canada, M. Burns a déclaré qu’Unifor ne l’avait pas représenté équitablement, qu’elle n’avait pas étudié son dossier en profondeur et qu’elle ne l’avait pas représenté avec intégrité et compétence, sans négligence grave ou majeure, et sans hostilité envers lui.

[130] M. Burns a soutenu que le fait que l’employeur a insisté en 2015 pour qu’il épuise son congé de maladie pour ensuite prendre un congé de maladie non payé constituait une mesure disciplinaire.

[131] En ce qui concerne le paragraphe 27 de McRaeJackson, qui fournit des exemples d’actions de mauvaise foi de la part d’un syndicat, M. Burns soutient que la défenderesse a comploté avec l’employeur pour qu’il demande des prestations d’ILD comme moyen de régler son refus de travailler.

[132] En ce qui concerne le paragraphe 29 de McRaeJackson, qui fournit des exemples de comportement arbitraire de la part d’un syndicat, M. Burns soutient qu’Unifor a agi de manière arbitraire en lui demandant de continuer à utiliser le Système de gestion informelle des conflits qui est en place à la Garde côtière canadienne.

[133] En ce qui concerne le paragraphe 30 de McRaeJackson, qui affirmait qu’« [i]l est arbitraire aussi de ne tenir compte que superficiellement des faits ou du bienfondé dune affaire » et de « [n]e pas enquêter pour savoir quelles étaient les circonstances entourant le grief », M. Burns a soutenu qu’Unifor n’avait pas effectué une évaluation raisonnable de son dossier et que son attitude semblait indiquer qu’elle ne se souciait pas de ses intérêts.

[134] Cependant, aucun de ces arguments ne m’a convaincu que M. Burns a établi une cause défendable selon laquelle Unifor avait enfreint la Loi.

[135] Il ne fait aucun doute que M. Burns a été en conflit avec ses représentants syndicaux. Il ne fait aucun doute qu’il n’était pas d’accord avec certaines des stratégies qu’ils ont recommandées. Il estimait qu’ils l’encourageaient à continuer d’utiliser le Système de gestion informelle des conflits, même s’il voulait mener une enquête sur le harcèlement en milieu de travail. Il n’a pas compris pourquoi la défenderesse a continué de recommander de faire une demande de prestations d’ILD au lieu d’une demande d’indemnité pour accident de travail pour régler ses problèmes au travail.

[136] Cependant, ses allégations indiquent clairement qu’en dépit de son conflit évident avec Mme Arruda sur une période de plusieurs années, Unifor n’a jamais cessé de traiter son dossier. La plainte no 3 décrit près de 50 interactions survenues sur une période d’environ trois ans et demi. Bien qu’il s’oppose à certaines des stratégies recommandées par Unifor et affirme que certaines communications n’ont fait l’objet d’aucun suivi, il n’a aucunement prétendu ou démontré qu’Unifor avait cessé de l’aider à régler ses problèmes. Rien dans la plainte n’indiquait une négligence ou une hostilité envers sa situation.

[137] Par exemple, il n’y a aucune allégation selon laquelle il aurait demandé une représentation particulière en vertu de la Loi, aucune mention d’un refus de la part d’Unifor de le représenter en vertu de la Loi, et aucune allégation selon laquelle Unifor aurait dû lui conseiller de faire valoir des droits particuliers pendant une période quelconque visée par la plainte ou à l’égard des allégations 37 à 41.

[138] Comme pour sa plainte précédente, M. Burns n’a fourni aucune indication claire dans la plainte no 3 de la mesure corrective qu’il demande. Cette indication claire aurait pu aider à déterminer si ses allégations, considérées comme véridiques aux fins de la présente analyse, révèlent une cause défendable de manquement au devoir de représentation équitable de la part d’Unifor.

[139] M. Burns a soutenu à juste titre que la représentation prévue par la Loi ne se limite pas aux questions liées à la convention collective. Cependant, la représentation doit toujours être liée aux conditions de travail à l’égard desquelles le syndicat a joué un rôle de représentant.

[140] Le contenu de la plainte de M. Burns indique clairement qu’il n’était pas d’accord avec les recommandations d’Unifor concernant l’importance de présenter une demande de prestations d’ILD. Cependant, la recommandation du syndicat d’une stratégie particulière ne le rend pas arbitraire, discriminatoire ou de mauvaise foi. En se fondant sur les principes énoncés dans Guilde de la marine marchande du Canada, les allégations de M. Burns n’établissent pas une cause défendable selon laquelle la recommandation d’Unifor de cette stratégie a été faite sans un examen approfondi de son dossier, ou pourrait être jugée négligente ou hostile. En outre, ses propres allégations indiquent clairement qu’il ne s’agissait pas de la seule stratégie de représentation adoptée par Unifor.

[141] M. Burns a allégué que la recommandation d’Unifor de travailler avec un médecin pour élaborer un plan de traitement engageait le devoir de représentation équitable prévu à l’article 187. Son rapport sur ces discussions laisse entendre qu’Unifor a recommandé cette stratégie afin qu’il puisse reprendre le travail. Je ne vois rien d’arbitraire, de discriminatoire ou de mauvaise foi dans cette recommandation. Considérant que les allégations sont véridiques aux fins de la présente analyse, je ne peux pas conclure qu’elles appuient une cause défendable de manquement au devoir de représentation équitable de la part d’Unifor. M. Burns n’a peut-être pas aimé la stratégie que recommandait Unifor, mais il ressort clairement de ses propres allégations qu’Unifor a continué à travailler avec lui et qu’elle n’a pas cessé ses efforts pour le représenter.

[142] En ce qui concerne une action qui engage clairement le devoir de représentation équitable prévu par la Loi, il n’en reste pas moins qu’en septembre 2016, Unifor a aidé M. Burns en demandant à son employeur de le placer en congé payé pendant son absence du lieu de travail. Ce congé payé s’est poursuivi tout le reste de la période visée par la plainte et s’est terminé seulement en juin 2019, lorsque l’employeur l’a mis en congé non payé. Les allégations de M. Burns indiquent également qu’il a déposé un grief contre l’employeur lorsqu’il l’a mis en congé non payé et qu’Unifor le représente à l’égard de ce grief.

[143] Je ne suis pas saisi de ce grief; je ne suis pas non plus saisi d’une plainte de M. Burns au sujet de la façon dont Unifor le représente. Comme il a été mentionné, j’ai tenté d’inclure dans la présente décision le moins de détails possible sur les événements qui peuvent se rapporter à la question soulevée dans ce grief. Je l’ai fait dans le but de minimiser l’incidence que la présente décision pourrait avoir sur cette procédure, tout en étant obligé d’inclure un certain nombre de détails afin de rendre une décision claire à l’égard de ces plaintes.

[144] Comme pour la plainte no 1, les seuls autres événements qui pourraient engager le devoir de représentation équitable datent de 2015 et de 2016, comme son allégation selon laquelle il a dû utiliser ses crédits de congé de maladie et que l’imposition d’un congé non payé pour maladie constituait une mesure disciplinaire. Il n’a cependant fourni aucun argument quant à la raison pour laquelle les allégations 37 à 41 de la plainte no 3 représenteraient un événement déclencheur de ces questions.

[145] Les arguments écrits de M. Burns au sujet de la plainte no 3 démontrent une confusion de sa part quant à la nature de sa plainte portant sur le devoir de représentation équitable. Il y fait un certain nombre d’allégations concernant les décisions de son employeur prises en 2015 et en 2016, quand il a commencé à s’absenter du travail. Comme il l’a décrit dans sa correspondance avec la Commission, il a demandé si sa plainte permettrait d’atteindre le but requis par la CCDP, qui est d’épuiser le processus de règlement des griefs avant de traiter une plainte déposée en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne (L.R.C. (1985), ch. H-6).

[146] En conclusion, même si j’ai conclu que certaines parties de la plainte no 3 ont été présentées conformément au délai de 90 jours prévu au paragraphe 190(2) de la Loi, je ne conclus pas que les allégations de M. Burns laissent entendre qu’il y existe une cause défendable de violation de la Loi.

E. Plainte no 2

[147] Dans la plainte no 2, M. Burns a allégué qu’Unifor avait manqué à son devoir de représentation équitable en ne l’informant pas de la ratification d’une convention collective pour l’unité de négociation du groupe RO.

[148] Dans sa plainte, M. Burns a déclaré qu’il avait été informé de l’action ou de l’omission le 26 mars 2018. Dans des arguments ultérieurs, il a expliqué qu’il s’agissait du jour où un employé d’Unifor lui a appris qu’une nouvelle convention collective avait été conclue. La plainte a été déposée le 12 juin 2018.

[149] Dans sa réponse, Unifor a joint des documents provenant de son site Web qui montraient que, le 20 janvier 2017, elle avait conclu une entente provisoire avec le Conseil du Trésor pour l’unité de négociation du groupe RO. Elle a annoncé le déroulement du processus de ratification électronique dans un bulletin daté du 13 février 2017. Le 6 mars 2017, elle a publié un bulletin déclarant que l’entente provisoire avait été ratifiée. Le 24 mai 2017, elle a publié un bulletin indiquant que la nouvelle convention collective avait été signée.

[150] Unifor a soutenu que M. Burns avait accès au site Web de la section locale no 2182 et à la section réservée à ses membres, où des instructions concernant le vote étaient disponibles, et qu’en tant qu’ancien vice-président de la section locale, il savait que les instructions concernant le vote y étaient publiées. Elle a aussi signalé qu’il avait demandé à être retiré de la liste d’envoi par courriel des mises à jour du syndicat.

[151] En réponse à la plainte de M. Burns selon laquelle il n’avait pas reçu de prime de signature ou de rémunération rétroactive, elle a indiqué que l’entente provisoire ne prévoyait aucune prime de signature. Elle a reconnu qu’il y avait des retards dans le traitement de la rémunération rétroactive en raison du système de paye Phénix, qu’elle avait déposé un grief de principe à ce sujet et qu’elle demandait des dommages. Elle a indiqué que, si M. Burns avait des problèmes liés à sa rémunération rétroactive, il avait le droit de déposer un grief.

[152] Plus tard, soit le 25 février 2019, Unifor a soutenu que la plainte no 2 était hors délai. Il n’a pas jugé crédible que M. Burns n’ait pris connaissance de la nouvelle convention collective que le 26 mars 2018, puisqu’elle avait été conclue, ratifiée et signée entre janvier et mai 2017.

[153] En ce qui concerne l’objection portant sur les délais, j’aurais pu demander à M. Burns d’expliquer pourquoi il n’a pris connaissance de l’entente provisoire de 2017 qu’un an plus tard.

[154] Cependant, je statuerai sur cette plainte au motif que M. Burns n’a pas démontré une cause défendable selon laquelle Unifor avait manqué à son devoir de représentation équitable. Il a d’abord allégué qu’il n’avait reçu aucune prime de signature. Unifor a répondu que la convention collective provisoire ne prévoyait aucune prime de signature, ce que M. Burns n’a pas réfuté. M. Burns a allégué qu’il n’avait pas reçu de rajustement salarial rétroactif, mais il n’a pas répondu à la position d’Unifor selon laquelle le problème de rémunération rétroactive lié à Phénix avait retardé les paiements rétroactifs pour tous ses membres et qu’il pouvait toujours déposer un grief individuel s’il le souhaitait.

[155] Enfin, la jurisprudence de la Commission à l’égard des votes de ratification établit qu’il s’agit d’une question syndicale interne qui ne concerne pas le devoir de représentation équitable (voir Bernard c. Institut professionnel de la fonction publique du Canada, 2020 CRTESPF 11 et Sturkenboom c. Institut professionnel de la fonction publique du Canada, Gauvreau et Dunn, 2012 CRTEFP 81).

[156] Par conséquent, je conclus que, compte tenu de Bernard et de Sturkenboom, M. Burns n’a pas établi une cause défendable selon laquelle les événements visés par la plainte no 2 constituent un manquement au devoir de représentation équitable de la part d’Unifor.

IV. Observations finales

[157] Il est très clair que M. Burns n’était pas satisfait de l’aide que lui a fournie son syndicat depuis qu’il a quitté son lieu de travail en juin 2015. Il a déclaré qu’il avait éprouvé de nombreuses difficultés de communication avec Unifor et ses représentants. Il n’est pas d’accord avec plusieurs de leurs recommandations en ce qui concerne la stratégie à adopter à l’égard du traitement médical et des demandes de prestations d’ILD et d’indemnité pour accident de travail.

[158] Cependant, dans aucune de ses plaintes, je n’ai trouvé d’explication claire concernant la façon dont les actions d’Unifor peuvent constituer une violation de la Loi. Il n’a pas pu indiquer un moment clair où la défenderesse a refusé de le représenter dans ses relations avec son employeur.

[159] Les seuls cas particuliers qui auraient pu être visés par l’article 187 ont eu lieu en 2015 et en 2016, ce qui dépasse largement le délai de 90 jours pour déposer ses plaintes en vertu de l’article 190 de la Loi.

[160] Je crois qu’il est important que M. Burns sache que le rôle de la Commission à l’égard des plaintes portant sur le devoir de représentation équitable est très limité. La Commission ne dispose pas de pouvoirs généraux d’enquête qui pourraient aider un plaignant qui a des problèmes avec un syndicat. Elle n’est pas un ombudsman chargé d’enquêter sur la question de savoir si un syndicat offre les meilleurs conseils ou services possibles.

[161] Unifor a commis quelques erreurs techniques dans ses réponses à la plainte no 3, que j’ai déjà signalées afin qu’elle comprenne mieux la Loi. Cependant, ses erreurs ne modifient pas mes conclusions de base.

[162] J’ai conclu que, sur la base des arguments écrits des parties, la plupart des aspects des plaintes de M. Burns sont hors délai et que, dans la mesure où certaines parties sont dans les délais, elles ne présentent pas une cause défendable de manquement au devoir de représentation équitable prévue à l’article 187 de la Loi. Compte tenu de ces conclusions, je ne crois pas que la présente affaire justifie un investissement des ressources limitées de la Commission pour tenir une audience complète sur le bien-fondé des plaintes.

[163] Le mieux que la Commission peut offrir dans une situation comme celle en l’espèce est la médiation, pour aider les parties à trouver une solution qui leur permettrait d’établir de meilleures relations de travail. La médiation a été tentée pour statuer sur la plainte no 1, mais sans succès. Les parties n’ont pas accepté de tenter la médiation lorsque la Commission leur a proposé une deuxième fois.

[164] En fin de compte, bon nombre des arguments de M. Burns ne concernent pas les décisions prises par Unifor; ils contestent les décisions prises par son employeur. J’ai signalé pourquoi une plainte portant sur le devoir de représentation équitable n’est pas le processus approprié pour présenter une telle plainte. Le processus approprié est habituellement le processus de règlement des griefs, et j’ai remarqué que M. Burns a un grief en suspens qu’Unifor a appuyé.

[165] Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

(L’ordonnance apparaît à la page suivante)


V. Ordonnance

[166] La demande de rejet des plaintes sans audience est accordée.

[167] J’ordonne la fermeture de ces dossiers.

Le 21 décembre 2020.

Traduction de la CRTESPF

David Orfald,

une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

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