Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

(La version intégrale de la décision sera publiée lorsqu’elle sera disponible dans les deux langues officielles.)

La fonctionnaire s'estimant lésée a déposé un grief contestant son licenciement disciplinaire – elle était une conseillère en technologie industrielle pour le Programme d’aide à la recherche industrielle du Conseil national de recherches du Canada (l’« employeur ») – la fonctionnaire s’estimant lésée a allégué que la décision de mettre fin à son emploi était fondée sur de faux renseignements obtenus au cours d’une enquête mal menée, que cette décision constituait un abus de pouvoir et qu’elle contrevenait à sa convention collective – elle a été licenciée parce qu’elle aurait conseillé à un demandeur de falsifier ou de donner de fausses déclarations à l’appui de sa proposition visant à obtenir un financement du programme après qu’une société a déposé une plainte interne – la société a soutenu que la fonctionnaire s'estimant lésée avait fourni de faux renseignements, ce qui l’avait empêchée d’obtenir la subvention – la Commission a conclu que le licenciement était sans motif valable – l’employeur n’a pas établi qu’il a subi un préjudice en raison de la gestion du dossier par la fonctionnaire s'estimant lésée ou comment cette dernière a nui à la réputation de l’employeur– la Commission a également conclu que l’employeur n’avait pas établi la faute de conduite de la fonctionnaire s'estimant lésée – la preuve documentaire était insuffisante pour établir les allégations – au contraire, la preuve équivalait potentiellement à un manque de communication adéquate et à une omission de veiller à ce que la cliente de la fonctionnaire s'estimant lésée comprenne clairement ce qui devait être fait – ces lacunes n’équivalent pas à des motifs de discipline, mais constituent plutôt des problèmes de gestion du rendement – le seul élément de preuve déposé était un rapport d’enquête incomplet et non fiable qui était fondé sur des documents incomplets – la Commission a également conclu que la décision disciplinaire était largement disproportionnée – la fonctionnaire s'estimant lésée n’avait fait l’objet d’aucune mesure disciplinaire auparavant et ses évaluations du rendement étaient très satisfaisantes, et l’employeur n’a pas appliqué des mesures disciplinaires progressives – la fonctionnaire s'estimant lésée n’a reçu aucun avertissement, commentaire ou communication à propos de la plainte avant d’être licenciée.

Grief accueilli.

Contenu de la décision

Date: 20201230

Dossier: 566‑02‑11426

 

Référence: 2020 CRTESPF 121

Loi sur la Commission

des relations de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral et

Loi sur les relations de travail

dans le secteur public fédéral

Armoiries

Devant une formation de la

Commission des relations

de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral

Entre

 

LIZA MEDEK

fonctionnaire s’estimant lésée

 

et

 

CONSEIL NATIONAL DE RECHERCHES DU CANADA

 

employeur

Répertorié

Medek c. Conseil national de recherches du Canada

Affaire concernant un grief individuel renvoyé à l’arbitrage

Devant : Chantal Homier‑Nehmé, une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

Pour la fonctionnaire s’estimant lésée : Christine Poirier et Tia Hazra,

Institut professionnel de la fonction publique du Canada

Pour l’employeur : Richard Fader, avocat

Affaire entendue à Ottawa (Ontario),

du 15 au 17 mai et les 23 et 24 octobre 2018.

(Arguments écrits déposés les 5 et 7 décembre 2018.)

(Traduction de la CRTESPF)


MOTIFS DE DÉCISION

(TRADUCTION DE LA CRTESPF)

I. Grief individuel renvoyé à l’arbitrage

[1] Liza Medeck, la fonctionnaire s’estimant lésée (la « fonctionnaire ») a obtenu une maîtrise post‑professionnelle en architecture de l’Université McGill en 1994. Elle est architecte praticienne depuis 1990 et membre associée de l’Institut royal d’architecture du Canada. Son curriculum vitae indique qu’elle a été conseillère en technologie industrielle (CTI) du Programme d’aide à la recherche industrielle (PARI) auprès du Conseil national de recherches du Canada (CNRC ou l’« employeur ») de 1993 à 2015.

[2] L’employeur a soutenu qu’elle était une CTI depuis 2003. Avant cette date, elle était une CTI de réseau à l'université Carleton, à Ottawa, en Ontario. Le 10 mars 2015, elle a été licenciée de son emploi à titre de CTI au PARI-CNRC pour avoir supposément conseillé à un demandeur de falsifier ou de donner de fausses déclarations à l’appui de sa proposition de financement du PARI-CNRC. Dans le cadre de l’enquête sur l’inconduite présumée, l’employeur a déterminé qu’il avait également des préoccupations au sujet de la gestion de plusieurs de ses autres dossiers.

[3] Le 16 mars 2015, la fonctionnaire a déposé un grief affirmant que son licenciement était fondé sur de faux renseignements obtenus au cours d’une enquête erronée et qu’il constituait un abus de pouvoir. Son licenciement contrevenait à sa convention collective et aux politiques applicables du CNRC, y compris la politique sur les mesures disciplinaires.

[4] À titre de mesure corrective, elle a demandé sa réintégration rétroactive à la date de son licenciement; aucune perte de salaire ou d’avantages sociaux; une indemnisation pour préjudice moral; la destruction de la lettre de licenciement et de tous les documents relatifs à l’enquête disciplinaire, en sa présence; toute autre mesure visant à remédier pleinement à la situation; et une mesure corrective intégrale.

[5] Dans sa réponse finale, l’employeur a rejeté le grief en déclarant qu’aucun nouveau renseignement ou élément de preuve n’avait été déposé pour modifier sa décision initiale de licencier la fonctionnaire, conformément à ce qui est décrit dans la lettre de licenciement.

[6] Pour les motifs qui suivent, je conclus que le licenciement n’était pas justifié par un motif valable. À la demande des parties, j’ai accepté de scinder l’audience. Par conséquent, la présente décision ne porte que sur la responsabilité. Il revient aux parties de négocier les recours découlant du licenciement illégal, avec ou sans l’aide des Services de règlement des différends (SRD) de la Commission. Dans l’éventualité où la question du redressement ne soit pas réglée, je demeurerai saisie de la question.

II. Questions préliminaires

A. Demande de l’employeur concernant une ordonnance de mise sous scellés

[7] Comme il deviendra clair au fur et à mesure que les faits en l’espèce seront révélés, trois sociétés ont déposé des plaintes contre la fonctionnaire. À la fin de l’audience, une fois tous les éléments de preuve déposés, l’employeur a demandé que les noms des trois sociétés et celui de leurs dirigeants, soient anonymisés dans ma décision. L’employeur a également demandé que plusieurs documents déposés en preuve devant la Commission soient caviardés. Il serait négligent de ma part de ne pas formuler un commentaire sur le choix du moment de cette demande. En tant qu’avocat principal qui a comparu devant la Commission dans de nombreux cas, je me serais attendu à ce que l’avocat de l’employeur veille à ce que sa demande soit présentée au début de l’audience. Si elle avait été faite en temps opportun, je n’aurais pas eu à inviter les parties à présenter des observations écrites sur la demande de l’employeur à la fin de l’audience. En outre, les problèmes logistiques découlant de cette demande tardive auraient pu être évités. À l’avenir, je m’attends à ce que l’avocat présente de telles demandes dès que possible.

[8] L’avocat de l’employeur a présenté des observations écrites sur la question le 8 décembre 2018. Il a inclus un tableau de 14 pages classifié par couleurs, qui énumère les documents qui, à son avis, devraient être caviardés. Les parties ont été en mesure de s’entendre relativement au caviardage d’un certain nombre de pièces. Le tableau présente tous les caviardages qui ont été convenus. Les demandes de caviardage qui pour lesquelles il n’y a pas eu d’entente sont indiquées en rouge, en jaune ou en turquoise dans le tableau.

[9] L’employeur a soutenu que ces documents contiennent des renseignements commerciaux et personnels confidentiels. Il a fait valoir que le caviardage ou une ordonnance de mise sous scellés étaient nécessaires pour prévenir un risque grave pour les sociétés concernées.

[10] L’employeur a soutenu que les caviardages proposés n’occasionnaient qu’une compromission minimale et qu’ils visaient particulièrement les renseignements contestés. De plus, les renseignements caviardés ne susciteraient qu’un intérêt public minimal dans le contexte de la question dont est saisie la Commission. Par conséquent, le caviardage ne portera pas atteinte au principe de transparence judiciaire. La divulgation ou la publication de ces renseignements serait hautement préjudiciable aux sociétés et aux personnes concernées. En tant que tiers à l’arbitrage, ces entités et personnes ne pouvaient pas défendre leurs intérêts ou leurs renseignements. En outre, la protection des renseignements personnels devrait être maintenue afin de préserver l’intégrité du processus disciplinaire et le processus devant la Commission. L’intégrité du processus l’emporte sur l’intérêt public à avoir accès aux renseignements visés par la demande de caviardage dans les pièces.

[11] De plus, l’employeur a soutenu qu’une ordonnance de mise sous scellés constitue la seule façon pratique d’assurer la confidentialité des renseignements étant donné la nature détaillée des documents. À l’inverse, les effets préjudiciables d’une ordonnance de mise sous scellés sont minimes, étant donné que le grief dont est saisi le Commission peut être compris sans avoir accès aux parties indiquées de ces pièces, ce qui préserve ainsi le principe de transparence judiciaire.

[12] Selon la fonctionnaire, la demande aurait dû être présentée avant le début de l’audience. Comme je l’ai souligné ci‑dessus, je souscris à cet argument. Comme je l’ai demandé, après des semaines de négociations, les parties ont réussi à parvenir à une entente sur les documents qui devraient être caviardés. Ces renseignements comprennent les adresses électroniques personnelles, les renseignements financiers et les identités des sociétés qui n’étaient ni une partie ni pertinente au présent litige. Les parties ont produit un tableau sur le consentement de l’employeur et de la fonctionnaire. Toutefois, la fonctionnaire a soutenu que les autres documents et parties de ces documents ne devraient pas être caviardés.

[13] La fonctionnaire a fait valoir qu’il incombait à l’employeur d’établir que sa demande satisfaisait au critère juridique requis. Il est dans l’intérêt public que tous les renseignements essentiels demeurent au dossier, surtout les renseignements non confidentiels, étant donné qu’il n’y a aucun préjudice pour autrui. Cela est conforme à la conclusion de la Cour suprême du Canada selon laquelle l’ampleur de tout caviardage doit être minimal; il suffit de préserver les intérêts d’une partie sans toutefois empêcher le public de comprendre la question qui est tranchée.

[14] L’employeur a demandé que le nom des clientes (sociétés) qui ont présenté une plainte ne soit pas mentionné. La fonctionnaire a soutenu que les trois clientes et leurs plaintes avaient mené à son licenciement. Par conséquent, elles font partie intégrante de cette procédure et devraient faire partie du dossier public. Les documents et les extraits à caviarder sur lesquels les parties ne se sont pas entendues ne contiennent aucun renseignement de nature confidentielle. Tous les renseignements non confidentiels ayant trait à ces entités devraient, à bon droit, faire partie du dossier public. Ce raisonnement a été suivi dans Bétournay c. Agence du revenu du Canada, 2017 CRTESPF 37.

[15] Dans Bétournay, l’employeur a remis une version caviardée d’un rapport d’enquête et a demandé que cette version remplace la version non caviardée dans le dossier de la Commission. Tous les renseignements caviardés étaient d’ordre public : le nom de la compagnie qui vendait la maison; les actionnaires de la compagnie; l’adresse de la maison. Ces renseignements sont tous accessibles sur le Web.

[16] Dans Bétournay, la Commission a conclu qu’elle ne voyait pas l’utilité de caviarder le document en litige parce que la plainte ayant donné lieu au congédiement de la fonctionnaire a enfin été examinée dans le cadre de sa décision et qu’il y avait eu un témoignage devant elle portant sur les éléments visés par la demande de caviardage. L’employeur a demandé en outre que la partie du rapport de l’enquêteur qui montre directement sa piste de vérification soit scellée. Le document contenait une liste de numéros de compte, auxquels sont associés parfois des noms de compagnies et, à quelques reprises, des noms de personnes physiques. La Commission a conclu que le document ne révélait strictement rien de confidentiel outre qu’une recherche avait été faite dans la banque de données. Étant donné qu’il n’y avait aucun renseignement de nature confidentielle, la Commission n’a pas vu la nécessité de sceller ce document. Pour tous ces motifs, la fonctionnaire a soutenu en l’espèce que les autres documents devraient faire partie du dossier public.

[17] Le critère à appliquer relativement aux ordonnances de mise sous scellés dans le cadre de décisions administratives est énoncé dans Sierra Club du Canada c. Canada (Ministre des Finances), 2002 CSC 41, aux paragraphes 48 et 53 (« Sierra Club »). Dans cet arrêt, la Cour suprême du Canada a examiné sa jurisprudence relative aux interdictions de publication dans le contexte criminelle, surtout dans des affaires comme Dagenais c. Société Radio‑Canada, [1994] 3 R.C.S. 835 et R. c. Mentuck, 2001 CSC 76. Dans ces arrêts, la Cour a conclu que lorsqu’une restriction à la liberté d’expression est demandée afin de préserver ou de promouvoir un intérêt engagé par une procédure judiciaire, la question fondamentale à trancher est cette de savoir si, dans les circonstances, le droit à la liberté d’expression doit être compromis. Cela exige que les tribunaux établissent un équilibre entre, d’une part, la liberté d’expression et, d’autre part, le droit à un procès équitable de l’accusé.

[18] La Cour suprême du Canada a depuis conclu que la grille d’analyse établie dans les arrêts Dagenais et Mentuck s’applique à toutes les décisions discrétionnaires touchant la publicité des débats juridiques; voir Société Radio‑Canada c. La Reine, 2011 CSC 3, au par. 13. Cela dit, Dagenais et Mentuck étaient des affaires criminelles, tandis que Sierra Club concernait une demande d’ordonnance de confidentialité dans le cadre d’une procédure de droit administratif. La Cour a conclu que dans de telles affaires, des ordonnances de confidentialité ne devraient être rendues que si elle sont nécessaires pour écarter un risque grave pour un intérêt important dans le contexte d’un litige, en l’absence d’autres options raisonnables pour écarter ce risque.

[19] La Cour a conclu en outre dans Sierra Club que le risque en cause doit être « réel et important »; c’est‑à‑dire un risque qui est bien étayé par la preuve et qui menace gravement l’intérêt en question. En outre, ses effets bénéfiques, y compris ses effets sur le droit des justiciables civils à un procès équitable, doivent l’emporter sur ses effets préjudiciables, y compris ses effets sur la liberté d’expression; voir Sierra Club, aux par. 53 et 54. Ces principes ont été récemment suivis dans Canada (Procureur général) c. Philps, 2019 CAF 240, au par. 23 et dans Malik c. Administrateur général (Agence des services frontaliers du Canada), 2020 CRTESPF 64, aux par. 6 à 9.

[20] Ayant exposé les principes juridiques pertinents, je passe aux diverses demandes. En premier lieu, l’employeur demande l’anonymisation du nom des trois sociétés (clientes) qui ont déposé des plaintes contre la fonctionnaire. Afin de parvenir à ma décision sur la demande d’anonymisation, je suis très consciente des lignes directrices de la CAF dans Philps, au par. 28, selon lesquelles je dois évaluer les intérêts commerciaux et en matière de protection des renseignements personnels des sociétés et des dirigeants concernés par rapport à la nécessité possible de publier leur nom. Dans les circonstances en l’espèce, j’ai déterminé que les trois sociétés (clientes) devraient être anonymisées dans ma décision en tant que « société P », « société M » et « société I », respectivement. À mon avis, les intérêts commerciaux et en matière de protection des renseignements personnels de ces entreprises l’emportent sur toute nécessité possible de publier leur nom. En plus, la connaissance du public de leur nom n’est pas pertinente au licenciement de la fonctionnaire.

[21] Il faut ensuite déterminer si les noms des dirigeants des sociétés respectives doivent être anonymisé dans la décision. En ce qui a trait aux deux dernières sociétés, aucun des dirigeants n’a été cité à témoigner devant moi et ils ne sont pas nommés ailleurs dans ma décision. Par conséquent, il n’est pas nécessaire d’ordonner que leur nom soit anonymisé dans la décision. Toutefois, l’avocat de l’employeur a indiqué des parties dans les pièces (en turquoise dans le tableau) où figurent le nom complet des sociétés M. et I, ainsi que les noms des dirigeants figurent dans les pièces. Pour les mêmes motifs que ci‑dessus, j’accueillerai la demande de l’employeur de caviarder ces parties des pièces à l’égard de ces renseignements seulement.

[22] La demande d’anonymiser le nom des dirigeants de la société P est une tout autre affaire. En premier lieu, ils ont été cités à témoigner à l’audience pour le compte de l’employeur. En deuxième lieu, leur plainte contre la fonctionnaire est la principale plainte qui a mené à la décision de l’employeur de licencier cette dernière. En réalité, comme on le verra plus loin dans ma décision, l’employeur a conclu que la plainte de la société P était suffisante en soi pour justifier le licenciement de la fonctionnaire. Enfin, le témoignage des dirigeants de la société P différait nettement de celui de la fonctionnaire à des égards clés. Par conséquent, j’ai dû procéder à une analyse de la crédibilité des témoignages respectifs. Dans ce contexte, et compte tenu des intérêts en matière de protection des renseignements personnels des directeurs de la société P par rapport à la nécessité de publier leur nom, je n’ai aucune hésitation. La demande d’anonymiser le nom des dirigeants de la société P est rejetée et leur nom figurera dans l’ensemble de la décision.

[23] J’examine maintenant les demandes de caviardage de l’employeur qui figurent en rouge et en jaune dans le tableau mentionné antérieurement. Il incombe à une partie qui demande une ordonnance de mise sous scellés de justifier sa délivrance en se fondant sur une preuve suffisante selon laquelle la publication de ces renseignements causerait un préjudice réel et important. Une assertion générale de préjudice n’est pas suffisante. L’employeur doit établir un préjudice réel et important pour écarter le principe de transparence judiciaire. Il doit établir que la limite est nécessaire pour écarter un risque sérieux pour un intérêt important, qu’il n’existe aucune autre option et que l’ordonnance proposée constitue la façon la moins envahissante sur le droit du public aux renseignements sur lesquels est fondée la décision de la Commission.

[24] Étant donné la nature de l’inconduite alléguée en l’espèce, certains des éléments de preuve présentés à l’audience contenaient des renseignements financiers des sociétés et des renseignements personnels au sujet de leurs propriétaires. Sur ce fondement, les parties se sont déjà entendues sur les parties de pièces à caviarder, et je suis d’accord avec elles. Toutefois, l’employeur affirme que les caviardages supplémentaires demandés (en rouge) contiennent d’autres renseignements commerciaux confidentiels sur la société P, ainsi que des commentaires (en jaune) formulés par des personnes au sein du CNRC sur la situation financière de la société P.

[25] Après avoir examiné les parties des documents visées par la demande de caviardage, je suis d’accord avec l’employeur qu’il y a d’autres références aux finances de la société P, ainsi que des commentaires et des conseils commerciaux à l’intention des propriétaires de la société P ou formulés par ceux‑ci. À mon avis, ces renseignements ne sont pas pertinents à la question dont est saisie la Commission. En outre, contrairement à Bétournay, selon toute vraisemblance, la grande partie des renseignements visés par la demande de caviardage ne sont pas déjà disponibles sur le Web. Par conséquent, j’accueille la demande de caviardage présentée par l’employeur concernant toutes les parties en rouge et en jaune figurant dans le tableau susmentionné.

[26] Par conséquent, je conclus que le caviardage des renseignements indiqués dans l’entente des deux parties, ainsi que le caviardage des pièces demandées en rouge et en jaune et les parties en turquoise indiquées ci‑dessus, sont nécessaires pour prévenir un risque grave pour les intérêts financiers des sociétés et que les effets bénéfiques du caviardage sur l’efficacité de l’administration de la justice l’emportent sur les effets préjudiciables sur le doit à la liberté d’expression, y compris l’intérêt public dans la publicité des débats judiciaires. En outre, le fait de ne pas les caviarder ne bénéficierait aucunement au bien‑fondé de la présente décision. J’en aurai plus à dire dans mon ordonnance à la fin de la décision concernant la logistique du caviardage des pièces.

III. Résumé de la preuve

A. Le PARI au CNRC

[27] L’employeur a cité à témoigner David Lisk, vice‑président, PARI-CNRC. À la date du licenciement de la fonctionnaire, il était le directeur exécutif du PARI pour la région de l’Ontario du CNRC. Dans l’ensemble, il a dirigé tous les aspects du programme dans la région. Il était chargé de l’embauche de nouveaux employés et du traitement des plaintes déposées par les clients. Il gérait directement cinq directeurs, qui à leur tour géraient cinq équipes. L’ensemble de la division comptait environ 85 personnes. Le Dr Bill Dobson était le superviseur direct de la fonctionnaire.

[28] M. Lisk a expliqué que le PARI avait pour objet de stimuler l’innovation dans les organisations qui répondent aux critères du PARI-CNRC. Pour ce faire, un financement et une aide technologique sont offerts à toutes les étapes du processus d’innovation, afin de renforcer leur capacité d’innovation et de mettre leurs idées sur le marché.

[29] Les CTI du PARI-CNRC aident les demandeurs à cerner et à comprendre les enjeux et les possibilités technologiques, et à établir des liens avec les meilleurs experts en affaires, en recherche et en développement au Canada. La mission du programme est d’accélérer la croissance des organisations demanderesses en leur donnant un ensemble complet de services et de financement en matière d’innovation. L’un des nombreux avantages d’un CTI est le contact direct avec une personne du gouvernement qui s’occupe d’une grande partie de la bureaucratie au nom d’un client.

[30] Selon le point de vue du PARI, il faut examiner l’ensemble des travaux, c’est‑à‑dire l’ensemble du projet, mais en financer seulement une partie. Une fois que le demandeur a déterminé son projet et que le CIT a déterminé le secteur à financer par le PARI, les formulaires sont remplis, évalués et recommandés au directeur. Une fois approuvée par le directeur, l’entente de contribution est envoyée à l’organisation afin qu’elle puisse amorcer le travail. Le CTI n’a pas le pouvoir d’approuver le financement. Seul le directeur a ce pouvoir, soit le Dr Dobson dans ce cas-ci.

[31] La fonctionnaire a cité Stephen Palmer à témoigner. M. Palmer travaillait comme CTI principal et était le directeur des initiatives nationales au PARI-CNRC du milieu à la fin des années 1990. Il a travaillé au PARI-CNRC de 1984 à 2013. Il relevait directement du vice‑président du PARI. À titre de directeur des initiatives nationales, il était chargé de la planification stratégique et de l’élaboration de politiques et de pratiques pour les grands programmes. Il était chargé des questions liées au personnel et du perfectionnement du personnel qui travaillait avec lui, ainsi que de l’examen du rendement et de la responsabilité financière des programmes relevant de son pouvoir. Il était le détenteur du pouvoir de signature des ententes de contribution. À titre de directeur, il devait déterminer si des fonds étaient disponibles, si un projet répondait aux exigences du programme, si les coûts du projet étaient proportionnels au gain et si les examens appropriés du projet avaient été effectués. Si un demandeur contrevenait à une clause de l’entente de contribution, cette contravention était portée à l’attention du directeur général et à la Direction générale des Finances.

[32] M. Lisk a expliqué qu’une fois qu’une entente de contribution est en vigueur, l’entreprise peut réclamer des dépenses en vertu de celle‑ci. La grande partie du financement du PARI est consacrée à la recherche et au développement. Même s’il existe une certaine flexibilité dans le cadre du programme, le Manuel de service du PARI indique que la date de début du projet financé doit être aussi proche que possible de la date de signature de l’entente de contribution. Selon le [traduction] « Guide de service » du CTI, une entente de contribution est en vigueur à compter du premier jour de l’étape du projet à la fin de l’étape post-projet. Il indique la date à laquelle l’organisation peut commencer à assumer des coûts admissibles à un soutien, soit la date de début du projet, la date à laquelle l’organisation ne peut plus engager des coûts admissibles à un soutien, soit la date d’achèvement du projet, et la date à laquelle l’entente de contribution prend fin. Les coûts engagés avant ou après l’étape de projet ne sont pas admissibles à un soutien.

[33] Les lignes directrices que les CTI utilisent prévoient qu’une entente de contribution est un engagement juridique auprès de l’État et que toute fausse déclaration ou renseignements trompeurs fournit par un demandeur constitue un motif de résiliation de l’entente de contribution. Le guide de service indique que les demandeurs doivent démontrer leur volonté d’établir et de maintenir une relation de confiance avec le PARI-CNRC. Cela exige une volonté de partager des renseignements exacts sur les plans actuels et futurs. Les renseignements doivent être exacts, fiables et opportuns. Tous les renseignements de nature délicate communiqués au CTI sont stockés dans SONAR, le système informatique du CNRC. Si une relation de confiance n’est pas établie, le PARI-CNRC peut décider de mettre fin aux activités avec l’organisation.

[34] Un profil commun pour un CTI consiste à posséder 25 ans ou plus de connaissances et de compétences pour gérer toutes les situations dans le domaine. Les CTI ne travaillent pas dans des bureaux; ils travaillent sur le terrain. Ils ont des bureaux près des clients plutôt qu’un contact direct avec leurs gestionnaires. Ils doivent se comporter d’une manière qui est au‑delà de tout reproche parce qu’ils représentent le gouvernement du Canada au sein de leurs collectivités.

[35] Le guide de service du CTI aide les CTI à comprendre les différents aspects de leurs relations avec leurs clients. Une interprétation est nécessaire dans le cadre de la relation avec chaque organisation parce celles-ci exercent leurs activités de manière différente. Lors de l’embauche, les CTI suivent une formation donnée par des CTI plus chevronnés. La description du poste de CTI prévoit que la prise de décision en fait partie intégrante. Il est essentiel d’établir une relation de confiance et de crédibilité auprès d’un demandeur, tout en préservant l’intégrité du PARI. Les demandeurs peuvent trouver des CTI par l’intermédiaire de leurs réseaux ou ils peuvent demander au gouvernement d’affecter un CTI à leur dossier, mais on s’attend également à ce que les CTI trouvent des demandeurs.

[36] En tant que CTI du PARI-CNRC, la fonctionnaire a expliqué qu’elle avait travaillé avec des petites et moyennes entreprises constituées en personne morale au Canada à but lucratif, et qu’elle les a aidés relativement aux services commerciaux, à la commercialisation et aux conseils techniques en vue de les aider à améliorer leur organisation. Elle les aide à obtenir un financement. Son expérience en tant qu’architecte dans le secteur de la construction au fil des ans au PARI s’est transformée en un travail dans les secteurs de haute technologie, des logiciels et de la biophotonique.

[37] La fonctionnaire a cité à témoigner Patricia Lowder, une CTI du PARI-CNRC dans la région de l’Atlantique et du Nunavut du CNRC. Elle s’est jointe au CNRC en 1990 à titre de membre du réseau et est devenue une CTI en 2003 lorsque le CNRC a créé le PARI. Elle connaît la fonctionnaire depuis environ six ans. Mme Lowder a expliqué que le réseautage est extrêmement important pour les CTI. Ils ont tous une expérience technique. La fonctionnaire est une architecte et une biologiste. Elles ne se connaissaient pas avant le licenciement de la fonctionnaire. Mme Lowder a expliqué qu’elle était la déléguée syndicale principale de l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada et qu’elle a donc participé au dossier de la fonctionnaire à la suite du licenciement de cette dernière. Mme Lowder a déclaré qu’elle était très active au sein du syndicat et qu’elle représentait les quatre groupes du syndicat au CNRC.

[38] Mme Lowder a expliqué que le processus du PARI commence de manière officieuse. Les CTI rencontrent les demandeurs et leur indiquent clairement qu’aucune somme ne sera versée si le projet est déjà en cours. Il y a une discussion sur la confidentialité et la protection de la propriété intellectuelle de la société. Les CTI s’engagent auprès des demandeurs qu’ils ne divulgueront pas la propriété intellectuelle de la société à d’autres demandeurs.

[39] Elle a déclaré que si un client ne fournit pas ses renseignements financiers, le CTI doit insister pour les avoir. La plupart des clients sont tenaces; il s’agit de leur technologie et ils ont consacré des heures et des efforts considérables à leurs entreprises, qui sont leurs bébés. Toutefois, une demande ne peut être traitée sans les documents financiers. Elle a expliqué que les CTI sont des technologues et, en même temps, des conseillers. Si les demandeurs ne collaborent pas à l’échange de renseignements, y compris la fourniture de renseignements financiers, il n’existe donc aucune relation de confiance et le directeur doit participer au dossier.

[40] Les CTI travaillent de manière autonome, mais ils peuvent consulter leurs directeurs s’ils éprouvent des difficultés à l’égard de leurs clients ou pour obtenir des conseils. Mme Lowder a expliqué qu’en tant que CTI, des plaintes sont toujours déposées contre elle. Un CTI à l’égard de qui aucune plainte n’est déposée ou dont les clients ne se plaignent pas n’effectue pas son travail. Par exemple, de nombreux clients s’attendent à pouvoir faire une proposition aujourd’hui et à amorcer les travaux dans quelques jours. Ce n’est toutefois pas la façon dont fonctionne le PARI.

[41] Lorsqu’il reçoit une plainte d’un client, selon son type, M. Palmer a déclaré que son approche consistait à en discuter avec le CTI. Au cours de son emploi auprès du PARI, il n’était au courant que d’une seule violation financière grave qui a été transmise au directeur général et à la Direction des finances.

[42] M. Palmer a déclaré qu’il était important pour lui, en tant que directeur, de rencontrer régulièrement les CTI pour déterminer ce qui fonctonnait bien, quels projets engendraient des défis ou de quels clients ils seraient particulièrement fiers. En tant que directeur, son rôle consistait à aider les CTI à déterminer ce dont ils avaient besoin pour réaliser des progrès. Il était également chargé de l’encadrement des CTI et de discuter des projets avec eux. Au cours du processus d’entente de contribution, il discutait avec les CTI avant de mettre au point les propositions aux fins d’approbation.

[43] M. Palmer a expliqué que les projets ont des dates de début générales. Les CTI peuvent discuter de la date de début d’un projet en fonction de ses jalons. S’il est déjà bien entamé et que le risque est en partie en cours, le CTI et le directeur doivent consulter le client pour déterminer s’il reste quelque chose à appuyer. En ce qui concerne l’antidatation d’une date de début, il a déclaré que c’est inhabituel, mais que c’est possible dans des circonstances concernant moins d’une semaine. Mme Lowder a déclaré qu’en ce qui concerne la modification des dates, une fois la proposition remplie, le CTI peut recommander une date de début. La proposition est ensuite transmise à la personne détenant le pouvoir de signature.

[44] Mme Lowder a expliqué que la trousse préparée pour la personne détenant le pouvoir de signature doit être une proposition complète. Si les activités et les objectifs ne sont pas indiqués ou répertoriés, il y a une discussion avec d’autres CTI. S’il s’agit d’un processus accéléré, le CTI responsable est parfois le seul à communiquer avec le client jusqu’à ce que la proposition soit complète. S’il s’agit d’une nouvelle société, celle‑ci doit être en mesure de financer le reste du projet et il doit y avoir une confirmation qu’elle est en mesure de financer le projet. Si la société est établie, le PARI demande ensuite les renseignements financiers des trois dernières années; si elle est nouvelle, le PARI en exige donc trois mois. Parfois, les projets sont conçus de façon à pouvoir être appuyés et à satisfaire aux exigences du PARI. Les CTI suivent le Guide de service et les critères énumérés pour assurer le respect de la diligence raisonnable avant de recommander un projet aux fins de financement. Le CTI responsable effectue une vérification auprès d’autres CTI avant de recommander un financement. Les CTI peuvent modifier le montant recommandé demandé par un client en fonction des renseignements figurant dans la demande. Toutefois, le pouvoir de signature final est conféré au directeur, qui dispose d’un pouvoir discrétionnaire absolu quant au montant.

[45] Il est possible de dépenser quatre salaires de CTI pour préparer une proposition et celle-ci pourrait quand même être refusée. Les CTI ne subissent aucune répercussion négative si une demande est refusée. Les ententes de rendement des CIT exigent qu’ils réalisent certains objectifs financiers relativement aux projets. Les CTI ne reçoivent de crédit que lorsqu’un projet est approuvé.

B. Les interactions de la fonctionnaire s’estimant lésée avec la société P

[46] L’employeur a cité à témoigner Karen McArthur et Paul McArthur, les dirigeants de la société P. Ce sont des conjoints. Mme McArthur est la présidente et première dirigeante. Elle a expliqué que le PARI leur avait été présenté par des contacts qui connaissaient ce programme en juin 2013. Ils ont envoyé une lettre à la fonctionnaire pour lui présenter leur société. La fonctionnaire les a rencontrés pour leur présenter le PARI et en apprendre davantage sur leur société.

[47] Avant la première réunion, la fonctionnaire a témoigné qu’elle ne connaissait pas M. et Mme McArthur. Ils n’étaient pas ses amis. En dehors de sa relation de CTI, elle n’avait aucune relation avec eux. Elle a expliqué que leur produit était une plateforme de collecte de données sur les enfants autistes. Elle n’avait rien à gagner d’une entente de contribution approuvée et aucun intérêt personnel. Elle avait dépassé de beaucoup son objectif pour cette année‑là et n’avait pas besoin qu’ils obtiennent un financement pour maintenir son nombre à niveau.

[48] Le Dr Dobson a pris connaissance des interactions de la fonctionnaire avec la société P au cours d’une discussion avec elle au milieu de 2014. Elle a indiqué qu’ils demandaient un financement de 50 000 $ pour soutenir leur projet. Elle lui a dit qu’elle travaillait en fonction de ce montant et elle l’a averti au préalable.

[49] L’employeur et la fonctionnaire ont présenté une série de courriels qui ont permis de saisir plusieurs interactions entre elle et les dirigeants de la société P dans les moments précédant leurs allégations de falsification de la date de début. Les courriels indiquent que le 15 août 2013, les dirigeants étaient impatients à amorcer le processus de demande. Le 17 août 2013, la fonctionnaire leur a envoyé les formulaires pertinents. Le 20 novembre 2013, les dirigeants ont soumis leur proposition pour obtenir une petite subvention dans le cadre du PARI. À la même date, la fonctionnaire a répondu qu’il était possible que le PARI ne dispose pas des fonds pour l’exercice en question, de sorte que le projet pourrait devoir attendre à l’exercice suivant. Le 22 novembre 2013, Mme McArthur a envoyé sa demande à la fonctionnaire pour l’année suivante. Le même jour, la fonctionnaire les a informés que la PARI ne disposait d’aucun fonds pour l’exercice 2013 et que la demande s’appliquerait à une date de début du 1er avril 2014.

[50] Dans le cadre de ses interactions avec M. et Mme McArthur et du processus de demande de la société P, la fonctionnaire a témoigné qu’elle avait suivi toutes les lignes directrices du PARI, utilisé toutes les options de la trousse d’outils des CTI et qu’elle s’éétait assurée de leur transmettre ces renseignements. Elle a fait tout ce qu’elle pouvait pour présenter la société P au financement possible du Québec ou d’autres liens provinciaux et aux services de la Banque de développement du Canada, ainsi que pour communiquer avec les autres CTI pour obtenir leur expertise. La fonctionnaire a affirmé qu’elle avait fait beaucoup plus que d’offrir les services de base d’une CTI. Elle a suivi toutes les étapes énumérées dans le Guide de service.

[51] Elle a veillé à ce que tous les critères énoncés à l’article 1.2 du formulaire de relation avec les clients soient respectés. Elle a examiné en détail leur proposition de projet. Elle les a aidés à remplir le formulaire, leur a expliqué la raison pour laquelle il devait comporter des verbes d’action. Elle les a également aidés à améliorer le document afin qu’il atteigne un niveau auquel le Dr Dobson pourrait l’examiner et exercer sa diligence raisonnable. Elle leur a expliqué en détail les modalités d’une entente de contribution. Son travail consistait à vérifier le client et à transmettre les renseignements au directeur signataire au niveau auquel il pouvait déterminer s’il devait acheminer le projet afin de conclure une entente de contribution. Pendant la réunion préparatoire avec M. et Mme McArthur, elle a traité de tous les aspects liés aux répercussions découlant d’une violation de l’entente de contribution et des conditions à satisfaire pour obtenir un financement du PARI. Elle les a informés, à plusieurs reprises, en personne et par écrit, qu’ils ne pouvaient pas amorcer les travaux avant la signature de l’entente de contribution.

[52] La fonctionnaire a témoigné qu’entre novembre 2013 et janvier 2014, elle a attendu que Mme McArthur lui fournisse les documents manquants. En janvier 2014, la fonctionnaire a communiqué avec les dirigeants et leur a demandé s’ils souhaitaient toujours poursuivre leur demande pour avril 2014. Ils ont répondu par l’affirmative. Du 11 au 21 mars 2014, la fonctionnaire a demandé à maintes reprises qu’ils fournissent les états financiers de la société.

[53] Le 11 mars 2014, la fonctionnaire a informé Mme McArthur qu’ils n’avaient pas suffisamment de revenus dans leur compte bancaire pour financer le projet et que ce montant ne suffisait pas non plus pour qu’une entreprise viable qui compte trois employés puisse exercer ses activités pendant six mois. Mme McArthur a répondu qu’ils disposaient de suffisamment de revenus pour financer leurs coûts, mais que cela était normal pour les entreprises en démarrage, car elles ont des taux d’épuisement des fonds qui dépassent de loin leurs taux de revenus. La fonctionnaire a répondu que le PARI n’était pas une banque et que s’ils avaient besoin de fonds de démarrage d’entreprise, ils devraient présenter une demande à la Banque de développement du Canada (BDC). La fonctionnaire a écrit que : [traduction] « Le PARI doit voir des revenus ou de l’argent dans la banque. »

[54] La fonctionnaire a témoigné que tous les CTI travaillent différemment et qu’ils disposent tous d’une vaste trousse d’outils de ressources à offrir à leurs clients, dont la BDC. La plupart des CTI demanderaient à un client de consulter la BDC pour obtenir des fonds. Il s’agissait d’une proposition qu’elle faisait de manière habituelle. Elle a expliqué son énoncé selon lequel le PARI n’est pas une banque. Il est différent d’une banque. Il n’offre pas de prêts remboursables. Il s’agit d’une entente de contribution. Le PARI examine différents aspects d’une société. Les sociétés doivent être en mesure de démontrer qu’elles sont viables pendant au moins six mois à un an. Les banques cherchent des garanties; le PARI cherche la viabilité.

[55] Le 21 mars 2014, Mme McArthur a envoyé à la fonctionnaire les documents révisés et une explication qu’ils disposaient des montants requis dans leur compte bancaire. La fonctionnaire a témoigné les dirigeants ne lui avaient toujours pas fourni les états financiers démontrant que la société P était viable.

[56] La fonctionnaire a discuté d’une série de courriels du 24 janvier 2014 à octobre 2014, dans lesquels elle a tenté à maintes reprises d’aider M. et Mme McArthur à l’égard de différentes options et pour l’élaboration d’une entente de contribution. Elle a expliqué que la société avait commencé sous un autre nom et était ensuite devenue la société P. Ils changeaient continuellement le nom de leur société, ce qui a rendu difficile et déroutante la détermination de la propriété intellectuelle concernant le produit qu’ils développaient. Au 1er avril 2014, la société P avait quelques milliers de dollars dans son compte bancaire et des employés tirant un salaire de six chiffres par année. Le PARI exigeait que les employés soient salariés selon le feuillet T4. Cela n’était pas logique pour la fonctionnaire et ne satisfaisait pas aux exigences du PARI, ce qu’elle leur a dit. Elle a demandé qu’ils confirment le nom de la société demanderesse. Le 8 avril 2014, la fonctionnaire a effectué de nouveau un suivi auprès de Mme McArthur pour obtenir les renseignements requis. Elle n’a jamais reçu de réponse de Mme McArthur.

[57] Le 23 avril 2014, la fonctionnaire a effectué un nouveau suivi auprès de Mme McArthur afin de lui demander si elle prévoyait poursuivre la demande. Mme McArthur a répondu qu’elle estimait qu’il serait préférable de la mettre en suspens pour le moment, qu’elle ne savait pas comment remplir correctement la demande, et que lorsqu’elle aurait quelqu’un pour l’aider, elle recommencerait. La fonctionnaire l’a informée qu’elle pouvait l’aider à présenter sa demande et a proposé qu’elles se rencontrent en personne le 6 mai 2014. La fonctionnaire a expliqué qu’elle a toujours accordé au client le bénéfice du doute et qu’elle a toujours laissé la porte ouverte. Elle était toujours prête à aider dans le processus de demande.

[58] Le 9 juin 2014, Mme McArthur a répondu au courriel de la fonctionnaire du 23 avril 2014. Mme McArthur a demandé si des fonds étaient encore disponibles pour 2014 et si la fonctionnaire pouvait la rencontrer. Le 16 juin 2014, Mme McArthur a envoyé des documents aux fins d’examen par la fonctionnaire. La fonctionnaire a répondu le même jour et l’a informée de supprimer le financement du PARI de la section du financement du projet et d’ajouter au moins un employé salarié à la section des coûts salariaux. Ce jour‑là, la fonctionnaire a témoigné qu’elle avait rencontré M. et Mme McArthur pendant deux heures et qu’elle leur avait expliqué en détail le document de demande. Elle les a aidés à remplir la demande, de manière très détaillées. Le document de demande comportait beaucoup de notes manuscrites. Les clients ont demandé s’ils pouvaient conserver le document. Ils l’ont imploré et ils l’ont conservé, même s’il était en désordre.

[59] Le 17 juin 2014, la fonctionnaire a fait un suivi auprès de Mme McArthur par courriel en vue d’obtenir la proposition du sous‑traitant. Dans ce courriel, elle a dû répéter les directives qu’elle avait données à M. et à Mme McArthur la veille. Elle a dit à Mme McArthur d’apporter des modifications précises à sa demande. Elle ne pouvait pas envoyer une demande incomplète au Dr Dobson. Elle devait faire l’objet d’une vérification approfondie; autrement, il ne l’examinerait pas. La fonctionnaire a demandé à Mme McArthur de modifier la date de début au 1er juillet 2014, parce que le Dr Dobson voyageait souvent. Au moment de son retour, il aurait eu au moins 12 demandes présentées par des CTI à examiner, ce qui aurait pris du temps. La date de début devra être repoussée pour en tenir compte. À la connaissance de la fonctionnaire, les travaux n’avaient pas encore commencé.

[60] Mme McArthur a déclaré qu’à un moment donné en juin 2014, la fonctionnaire leur avait dit, à elle et son conjoint, que le PARI avait réservé une somme de 50 000 $ pour son projet et que [traduction] « la somme avait été réservée » pour eux. Le 17 juin 2014, la fonctionnaire a écrit à Mme McArthur pour l’informer qu’une fois qu’elle aurait reçu la proposition du sous‑traitant, elle examinerait de nouveau le projet. La fonctionnaire a demandé à Mme McArthur de modifier la date de début au 1er juillet 2014 et d’ajouter des détails précis à la proposition.

[61] Au 25 juin 2014, la fonctionnaire n’avait toujours pas reçu les documents pour la proposition de petit projet. Le 26 juin 2014, M. McArthur a envoyé un courriel à la fonctionnaire auquel étaient joints deux documents du PSRI, mis à jour conformément à la demande et le prix de Oak Computing pour effectuer les travaux d’ingénierie aux fins du projet. Le 30 juin 2014, Mme McArthur a envoyé les documents demandés par le PARI. L’un était le modèle pour les petits projets et l’autre était le plan d’innovation décrivant l’entreprise et les plans. La fonctionnaire estime que le document intitulé « Oak Software Development Agreement, Company P. and Web and Mobile Design and Development » et daté du 2 juillet 2014, était le document que Mme McArthur avait joint à son courriel. Ce jour‑là, elle ne savait pas que M. et Mme McArthur amorceraient les travaux le 2 juillet 2014.

[62] Le 30 juin, la fonctionnaire a consulté un autre CTI pour obtenir un deuxième avis quant à leurs objectifs techniques. Le 4 juillet 2014, elle a consulté un autre CTI. Le 7 juillet 2014, elle a eu une conversation téléphonique avec le premier CTI. Elle a témoigné que ce projet n’était pas dans son domaine d’expertise, puisqu’elle est architecte. Elle a discuté avec un autre CTI possédant une expérience dans ce domaine et lui a demandé une évaluation de la question de savoir si le projet était admissible au PARI, conformément aux critères de recherche et de développement du PARI. La fonctionnaire a expliqué que le traitement d’un projet consiste en un effort d’équipe. Le document préparé par le deuxième CTI a été enlevé de la fonctionnaire au cours de l’audience disciplinaire. Le CTI a accepté le risque technique, mais s’est dit préoccupé par le fait que le projet était exécuté avec un sous‑traitant.

[63] À la suite de la conversation téléphonique avec le CTI consulté, la fonctionnaire a envoyé à Mme McArthur un courriel pour l’informer que sa demande ne pouvait pas être recommandée aux fins de financement. Il a été écrit que le développement logiciel consistait en leur pratique actuelle. Il n’y a eu aucune mention de la recherche et du développement ni du risque technique, ce qui est fondamental pour les projets du PARI. La fonctionnaire a invité Mme McArthur à examiner de nouveau sa demande et l’a informé qu’il lui ferait un plaisir de l’examiner de nouveau. La fonctionnaire a expliqué qu’elle avait toujours laissé la possibilité au client d’examiner de nouveau le projet. Elle n’a pas discuté avec M. et Mme McArthur après ce courriel. Le 21 juillet 2014, la fonctionnaire a fait un suivi auprès de M. et Mme McArthur afin de savoir s’ils souhaitaient examiner de nouveau leur demande.

[64] Le 7 août 2014, Mme McArthur a envoyé un courriel à la fonctionnaire auquel était jointe une demande révisée dans laquelle certains des éléments de leur proposition étaient modifiés. Elle a demandé à la fonctionnaire de lui faire part de ces idées à ce sujet. La fonctionnaire a répondu en déclarant de ne pas envoyer de pièces jointes au PARI parce que le CNRC avait fait l’objet d’une cyberattaque. Elle lui a envoyé un courriel l’informant qu’elle communiquerait avec eux une fois qu’elle aurait plus de renseignements.

[65] Le 11 août 2014, Mme McArthur a envoyé un courriel à la fonctionnaire aux fins de suivi. Après le courriel du 26 août 2014, la prochaine communication entre la fonctionnaire et les dirigeants a commencé par un courriel en date du 15 septembre 2014, à 11 h 15. Dans le courriel, la fonctionnaire a communiqué avec les dirigeants de la société P pour les informer qu’elle avait laissé une messagerie vocale et leur avait demandé de la rappeler. À 12 h 11, elle a envoyé un courriel aux dirigeants et les a informés qu’ils n’avaient rien à changer dans leur présentation. La proposition mentionnée dans le courriel n’a pas été déposée en preuve.

[66] La fonctionnaire a demandé de nouveau que M. et Mme McArthur lui envoient leur relevé bancaire par télécopieur. À 12 h 33, Mme McArthur a demandé à la fonctionnaire de confirmer que le seul document dont elle avait besoin était un relevé bancaire. À 12 h 41, la fonctionnaire a répondu, affirmant qu’elle avait besoin du relevé bancaire et de la proposition du sous‑traitant comportant le prix, conformément à la demande de financement du PARI. La fonctionnaire a informé Mme McArthur qu’elle lui enverrait son numéro et que Mme McArthur devait être physiquement présente lorsque la fonctionnaire le lui a envoyé par télécopieur. À 16 h 04, Mme McArthur a répondu que la fonctionnaire pouvait lui envoyer la télécopie à tout moment après 17 h 45. À 16 h 42, la fonctionnaire a répondu qu’elle venait de recevoir le message de Mme McArthur, qu’elle serait au bureau vers 9 h le lendemain et qu’elle enverrait un courriel à Mme McArthur, une fois au bureau. Mme McArthur a répondu qu’ils étaient en Floride, qu’ils atterriraient et monteraient à bord d’un autre vol à Philadelphie vers 8 h, comportant une escale d’une heure et demie et qu’elle vérifierait son courriel dès qu’elle serait débarquée de l’avion.

[67] La fonctionnaire a affirmé dans son témoignage que le courriel comportait des pièces jointes au sujet de leur plan d’innovation et un modèle pour les petits projets. M. et Mme McArthur l’appelaient toujours un autre nom, même s’ils avaient légalement changé le nom de la société à Société P. La fonctionnaire a témoigné que le 11 août 2014, elle ne savait pas qu’ils avaient amorcé les travaux. Elle a répondu par courriel et a déclaré que le CNRC venait d’être victime d’une cyberattaque et qu’elle communiquerait avec eux lorsqu’elle aurait d’autres renseignements.

[68] Le 26 août 2014, la fonctionnaire a répondu que le CNRC n’était pas en mesure de traiter les projets, mais qu’elle souhaitait le mettre en place de manière à ce qu’ils puissent présenter leur demander dès que le feu vert serait activé. Elle a répété ses premières directives sur les exigences pour faire approuver leur demande. Elle les a également informés que le PARI ne visait que les projets qui n’avaient pas été amorcés. Elle a témoigné qu’elle les avait également informés de ce fait lors de leur première réunion. M. et Mme McArthur n’ont pas répondu à ce courriel et n’ont pas informé la fonctionnaire que le projet avait été amorcé.

[69] La fonctionnaire s’est rappelée qu’en septembre 2014, le CNRC avait reçu de ses bureaux à Toronto, en Ontario, une indication de la façon dont ils pouvaient poursuivre provisoirement des projets à la suite de la cyberattaque. Ils ne pouvaient fonctionner que par télécopieur. On n’avait pas accès à SONAR. La direction y avait accès, mais elle n’y avait pas accès. Elle a demandé à M. et à Mme McArthur de l’appeler.

[70] L’avocat de l’employeur a demandé à Mme McArthur de se concentrer sur le 15 septembre 2014, soit le jour où la fonctionnaire aurait demandé à M. McArthur de falsifier la date de début de leur projet. Mme McArthur a déclaré qu’elle et M. McArthur étaient en Floride pour exposer un produit lors d’une conférence. Ils étaient dans leur chambre d’hôtel lorsqu’elle a entendu une conversation téléphonique entre M. McArthur et la fonctionnaire. Elle a affirmé qu’il semblait que des fonds du PARI étaient disponibles et que tout semblait bon. M. McArthur semblait perplexe et a dit : [traduction] « Quoi? ». Mme McArthur l’a entendu dire : [traduction] « Nous avons déjà commencé le 1er juillet. » Mme McArthur a fait remarquer qu’il semblait troublé par ce que la fonctionnaire leur demandait de faire. Après avoir raccroché, M. McArthur lui a dit que la fonctionnaire leur avait demandé de remonter la date et de la modifier aux fins de l’entente d’Oak Computing. Mme McArthur ne se sentait pas à l’aise de le faire. Toutefois, la fonctionnaire leur avait demandé de le faire et ils avaient besoin des fonds. Ils ont donc modifié la date de début.

[71] L’employeur a cité M. McArthur à témoigner. Son souvenir de ses interactions avec la fonctionnaire avant que lui et Mme McArthur ne déposent leur plainte est semblable à celui de Mme McArthur. Il s’est rappelé qu’entre le 1er juillet 2014 et août 2014, on leur avait dit qu’ils n’étaient pas admissibles au financement. Ils ont apporté les modifications et ont présenté à nouveau leur demande. M. McArthur s’est rappelé que le 15 septembre 2014, lui et Mme McArthur étaient en Floride. Il a déclaré que la fonctionnaire lui avait dit qu’une somme de 50 000 $ pourrait être dans leur compte bancaire dans quelques jours. Elle lui a demandé si le projet avait été amorcé. Il a dit : [traduction] « Oui, il a commencé en juillet. » M. McArthur s’est rappelé qu’elle a dit : [traduction] « Le projet n’a pas été commencé, n’est‑ce pas? » La façon dont la fonctionnaire a posé la question l’a amené à conclure qu’elle lui demandait de modifier la date de début du projet au mois d’octobre. M. et Mme McArthur ont modifié la date de début et, le 18 septembre 2014, ils ont envoyé les renseignements par télécopieur au bureau du CNRC situé à Toronto. M. McArthur a confirmé que l’entente de développement de logiciels concernant Oak Computing en date du 2 juillet 2014 et celle du 15 septembre 2014, sont identiques, à l’exception des dates, comme l’a demandé la fonctionnaire.

[72] La fonctionnaire s’est rappelé que M. McArthur l’avait appelé sur son téléphone cellulaire. Il l’appelait de son téléphone cellulaire en Floride et a dit qu’ils avaient commencé le projet. Elle a témoigné qu’elle avait besoin d’éclaircissements sur ce qui s’était passé. Elle était dans son bureau situé sur la promenade Sussex, à Ottawa, et la réception était faible. Elle est sortie de son bureau afin de mieux comprendre. Elle voulait qu’il lui donne des précisions et lui a demandé à nouveau : [traduction] « Vous n’avez pas commencé le projet, n’est‑ce pas? » Il a répondu : [traduction] « Non, nous ne l’avons pas commencé. » La fonctionnaire a dit à M. McArthur qu’il devait envoyer les documents par télécopieur au bureau du CNRC de Toronto. Elle n’a pas vu la deuxième entente sur le développement de logiciels d’Oak Computing, datée du 15 septembre 2014.

[73] Après cette conversation, la fonctionnaire a attendu de recevoir les renseignements financiers manquants de M. et Mme McArthur. La proposition de sous‑traitant et le modèle de petit projet comportent une section particulière où il faut inclure l’estimation du sous‑traitant. Les chiffres ne correspondaient pas. L’estimation du sous‑traitant devait correspondre au modèle de proposition pour les petits projets. Il fallait le corriger avant de l’envoyer au bureau de Toronto pour approbation. Elle n’a pas demandé à Mme McArthur ni à M. McArthur de modifier la date avec Oak Computing. Elle ne leur a pas conseillé de modifier leur date de début. Elle n’a pas promis de réserver une somme de 50 000 $. Elle a déclaré que l’allégation selon laquelle elle avait promis une somme de 50 000 $ n’avait aucun sens. Même un CTI néophyte ne ferait pas cette promesse.

[74] Le 16 septembre 2014, à 10 h 48, la fonctionnaire a envoyé un courriel à Mme McArthur pour lui dire quand elle serait prête à l’envoyer par télécopieur. Mme McArthur n’a pas répondu. Le prochain courriel a été envoyé par la fonctionnaire à 18 h 28, à Mme McArthur, en vue de l’informer que le document qu’elle avait envoyé devait être plus précis et qu’il y avait des renseignements manquants. Elle a informé Mme McArthur qu’elle pouvait recevoir sa télécopie à 14 h, le 17 septembre 2014. Mme McArthur a déclaré qu’à 18 h 59, elle ne lui avait encore rien envoyé par télécopieur et lui a demandé son numéro de télécopieur. Mme McArthur a indiqué qu’elle l’enverrait par télécopieur à la fonctionnaire à 14 h, le lendemain.

[75] Le 18 septembre 2014, le Dr Dobson a envoyé un courriel à la fonctionnaire l’informant qu’il avait besoin d’un relevé bancaire plus récent que septembre de la société P avant de poursuivre son examen. La fonctionnaire a expliqué qu’elle avait travaillé avec le client pour obtenir ces renseignements et qu’elle les demanderait de nouveau. Le même jour, Mme McArthur a écrit à la fonctionnaire et a déclaré qu’elle craignait qu’ils n’obtiennent pas le financement du PARI.

[76] Le 23 septembre 2014, le Dr Dobson s’est dit préoccupé de la capacité de M. et Mme McArthur d’établir qu’ils disposaient des fonds nécessaires pour soutenir leur part du projet. Ils ont affiché un déficit important. Il a déclaré qu’une fois qu’ils auraient fourni des preuves claires de ressources financières suffisantes, il examinerait de nouveau leur demande de financement du PARI.

[77] Plusieurs jours plus tard, Mme McArthur a communiqué avec son mentor, Claude Haw, pour lui raconter ce qui s’était passé. M. McArthur a confirmé que lui et Mme McArthur [traduction] « n’étaient pas confiants » quant à leur demande. À ce moment‑là, plus de la moitié des travaux étaient terminés et M. McArthur savait donc qu’ils ne seraient pas admissibles au financement.

[78] Mme McArthur a dit que M. Haw lui a dit qu’elle avait raison et qu’elle n’aurait pas dû modifier la date. Il lui a dit qu’elle devrait retirer sa demande. Le 23 septembre 2014, elle a envoyé un courriel à la fonctionnaire, déclarant qu’il était possible qu’ils ne puissent pas poursuivre leur proposition auprès du PARI. Mme McArthur a écrit qu’ils avaient vraiment besoin du PARI pour financer leur part du projet, sinon ils [traduction] « perdraient tout ». Afin de ne pas manquer leur marché et de ne pas perdre l’élan de leurs concepteurs, ils ont utilisé leurs propres ressources financières pour financer leur engagement dans le développement du produit, mais n’ont pas achevé le projet. Ils ne l’avaient que commencé, car ils avaient l’impression que le PARI en financerait une partie. Mme McArthur a déclaré que le projet avait commencé en juillet et qu’ils avaient fait des paiements aux concepteurs en juillet et en août. Mme McArthur a demandé : [traduction] « Cela suffira‑t‑il pour le PARI? » Elle a ensuite indiqué : [traduction] « Je l’espère vraiment, car nous ne l’aurions pas commencé, nous avions l’impression d’avoir été retardés en raison de la cyberattaque, mais que les fonds seraient disponibles lorsque le CNRC serait opérationnel. Si cela ne fonctionne pas, nous pourrions être obligés de retirer notre demande. » Le 24 septembre 2014, la fonctionnaire a répondu que le Dr Dobson était le directeur chargé de l’examen et qu’il souhaitait voir une copie de leur relevé bancaire du 24 septembre 2014 pour poursuivre son examen.

[79] La fonctionnaire a témoigné qu’elle ne savait pas que M. et Mme McArthur avaient commencé les travaux avant le 23 septembre 2014. En fait, elle a envoyé un courriel à Mme McArthur rejetant la proposition le 7 juillet 2014, à 14 h 39. En août, ils ne lui ont pas dit que le projet avait commencé. Avant ce courriel, ils ne lui avaient jamais dit qu’ils avaient fait une contribution au sous‑traitant, Oak Computing. Après le courriel de Mme McArthur du 24 septembre 2014, informant la fonctionnaire que le projet avait commencé, elle était d’avis qu’elle ne pouvait plus l’aider, car la proposition était complète. La cliente a dit que le projet avait commencé et, selon elle, cela signifiait que la direction devait leur dire [traduction] « non ».

[80] Plus tard, le 24 septembre 2014, le Dr Dobson a demandé que la fonctionnaire lui envoie tous ses courriels concernant ses communications avec la société P. Elle les lui a tous envoyés, conformément à sa demande.

[81] M. McArthur s’est rappelé que ces échanges de courriels entre la fonctionnaire et Mme McArthur visaient à informer la fonctionnaire qu’ils manquaient d’argent et qu’ils n’étaient pas en mesure de respecter le contrat de sous‑traitance. Ils avaient l’impression que la somme de 50 000 $ avait été réservée pour eux, conformément à ce qu’avait dit la fonctionnaire le 16 juin 2014. Essentiellement, il a déclaré qu’il savait qu’ils recevraient les fonds et qu’ils avaient déjà dépensé une somme importante. Il ne s’agissait pas de savoir si le CNRC les aiderait, mais quand ils recevraient les fonds.

[82] Mme McArthur a expliqué qu’à un moment donné en septembre, elle avait eu une autre conversation avec M. Haw afin de déterminer ce qu’ils pouvaient faire pour recevoir les fonds. M. Haw a ensuite communiqué avec M. Lisk. Elle a déclaré qu’elle n’était pas certaine du moment auquel cela s’est produit. Elle croit qu’il y a eu un échange de courriels entre M. Haw et M. Lisk. M. Haw a ensuite communiqué avec le Dr Dobson.

[83] Le 3 octobre 2014, le Dr Dobson a discuté avec la fonctionnaire. Elle a témoigné qu’ils avaient discuté des activités de recherche et de développement techniques que le sous‑traitant avait effectuées en vertu du contrat. À 10 h 47, la fonctionnaire a appelé Mme McArthur pour obtenir des renseignements détaillés sur les travaux déjà exécutés par le sous‑traitant. Le 7 octobre 2014, Mme McArthur a fourni ces renseignements à la fonctionnaire qui les a transmis au Dr Dobson.

[84] Le 10 octobre 2014, la fonctionnaire a eu une discussion avec le Dr Dobson. Selon elle, il semble qu’il y avait une demande révisée pour le projet. Mme McArthur demandait continuellement des mises à jour, ce qui s’est poursuivi pendant un certain temps. Du 21 au 24 octobre 2014, il y a eu de multiples échanges entre elle, Mme McArthur et le Dr Dobson pour conclure l’entente de contribution. Pendant toute cette période, elle n’a jamais été informée que M. et Mme McArthur avaient déposé une plainte contre elle.

[85] Le 7 novembre 2014, la fonctionnaire a envoyé un courriel à M. Lisk, le remerciant de l’appel téléphonique ce jour‑là. Elle a confirmé par écrit que les principales raisons du retard dans l’échéancier du projet étaient la cyberattaque et le fait que M. et Mme McArthur n’avaient pas d’argent et ne fournissaient pas les renseignements nécessaires, même après des demandes répétées.

[86] Le 18 novembre 2014, un courriel a été envoyé à M. Lisk. Le nom de l’auteur a été caviardé. Le courriel fait état d’une frustration quant au fait de ne pas avoir la date de début du 1er juillet 2014 pour l’entente de contribution. On y mentionne que la fonctionnaire leur avait promis une somme de 50 000 $ et une date de début du 1er juillet 2014. L’auteur demande d’être réaffecté à un autre CTI, d’avoir la date de début du 1er juillet pour l’entente de contribution et que la somme de 50 000 $ soit versée dans le cadre du PARI. M. Lisk a répondu qu’il aborderait cette question avec le Dr Dobson, qui était le détenteur du pouvoir de signature.

[87] Le 26 novembre 2014, la fonctionnaire a fait un suivi auprès du siège social à Toronto au sujet de l’entente de contribution. Elle a indiqué que M. et Mme McArthur avaient déposé une plainte selon laquelle le PARI prenait trop de temps. La fonctionnaire a témoigné qu’il s’agissait de la première fois qu’elle constatait qu’un client était mécontent en ce qui concerne une entente de contribution. Ce n’était pas habituel. Qu’il s’agisse d’un montant faible ou important, les fonds ne sont pas remboursables et tout montant de financement est habituellement bien accueilli. Les clients sont heureux de signer une entente de contribution. La fonctionnaire n’était pas certaine de la date exacte à laquelle elle a été retirée du dossier, mais à ce moment‑là, elle était encore la CTI de M. et Mme McArthur.

[88] La fonctionnaire ne se souvenait pas d’avoir vu une copie de l’entente de contribution finale. M. Lisk et le Dr Dobson ne l’ont pas consultée au sujet de l’antidatage de l’entente de contribution ou du montant de subvention. La fonctionnaire a déclaré qu’en tant que CTI, elle ne pouvait pas recommander d’antidater un projet. Elle n’avait pas son mot à dire en ce qui concerne l’approbation du modèle de proposition pour les petits projets.

[89] Dans un courriel en date du 4 décembre 2014 adressé à Kerri Pereira, généraliste en ressources humaines du PARI, la fonctionnaire a déclaré qu’elle n’aurait pas informé le client d’une date de début. Les dates sont souvent modifiées en raison du retard de traitement au bureau de Toronto. Dans son témoignage, elle a ajouté qu’en raison de la cyberattaque, elle n’estimait pas qu’il était nécessaire de déterminer une date de début. Elle a laissé au Dr Dobson le soin de déterminer la date. La cyberattaque a été très perturbatrice pour tout le monde.

[90] En contre‑interrogatoire, Mme McArthur a expliqué que lors de sa première communication avec la fonctionnaire en juin 2013, elle a présenté la fonctionnaire à M. Haw. Elle a convenu que toutes ses communications avec la fonctionnaire étaient principalement par courriel. Elle savait qu’il devait y avoir des fonds dans les comptes bancaires de l’entreprise pour recevoir un financement dans le cadre du PARI. En avril 2014, la fonctionnaire a éprouvé des difficultés à obtenir des renseignements financiers de la société P. Elle a convenu que la fonctionnaire attendait toujours qu’elle obtienne les relevés bancaires. Au 25 juin 2014, la fonctionnaire attendait toujours qu’elle fournisse les renseignements financiers nécessaires pour achever le processus de demande.

[91] De nouveau en contre‑interrogatoire, Mme McArthur a convenu que le 7 juillet, à 14 h 39, la fonctionnaire l’avait informée que [traduction] « la demande ne pouvait être recommandée aux fins du financement », au motif qu’il n’y avait aucune mention de la recherche et du développement démontrés, un élémental fondamental pour les projets du PARI. La fonctionnaire a invité les dirigeants à examiner de nouveau leur demande et a déclaré qu’il lui ferait un plaisir d’examiner la révision. Mme McArthur a nié savoir que la fonctionnaire ne pouvait pas approuver le financement.

[92] Mme McArthur était d’accord avec la représentante de la fonctionnaire pour dire que le 21 juillet 2014, la fonctionnaire lui a écrit pour les informer que leur demande avait été refusée. Elle a convenu que la fonctionnaire l’avait invitée à présenter de nouveau sa demande. Le 7 août 2014, Mme McArthur savait que sa demande avait été refusée et elle a présenté une nouvelle demande, tel qu’il était mentionné dans son courriel à la fonctionnaire à 12 h 42. Mme McArthur savait également qu’en raison de la cyberattaque, elle ne pouvait rien envoyer par courriel. Elle savait que la capacité du CNRC de recevoir des documents et de traiter les demandes avait été touché.

[93] En contre‑interrogatoire, Mme McArthur a convenu qu’ils avaient déjà commencé les travaux en juillet 2014, qu’elle savait que sa demande ne serait pas recommandée aux fins d’un financement et qu’ils présenteraient une nouvelle demande le 7 août 2014. Mme McArthur a reconnu que la fonctionnaire lui avait dit que seuls les projets qui n’étaient pas encore commencés étaient admissibles au financement du PARI.

[94] De nouveau en contre‑interrogatoire, Mme McArthur a reconnu que le 26 août 2014, la fonctionnaire lui avait envoyé un courriel pour l’informer des renseignements à inclure dans sa demande et qu’elle avait dit : [traduction] « Le PARI ne vise que des projets qui n’ont pas été commencés. Chaque verbe d’action doit avoir une clarification ou une définition quantifiable précise. Pour une demande de 50 000 $, nous cherchons un coût de projet total d’environ 120 000 $. »

[95] De nouveau en contre‑interrogatoire, Mme McArthur a convenu qu’elle avait écrit à la fonctionnaire le 15 septembre 2014, à 12 h 33, pour confirmer les documents manquants. Mme McArthur a convenu que les courriels indiquent que le 18 septembre 2014, elle a soumis sa demande au bureau de Toronto. Mme McArthur a déclaré qu’elle n’avait aucune idée que sa demande n’était pas évaluée par la fonctionnaire parce que c’était produit quatre ans avant l’audience. Elle ne pouvait pas se rappeler si elle avait choisi d’envoyer à la fonctionnaire l’état financier de juin au lieu de l’état de juillet ou d’août. La représentante de la fonctionnaire a renvoyé Mme McArthur à un échange de courriels en date du 18 septembre 2014, dans lequel la fonctionnaire l’a informée que l’état financier de juin n’était pas suffisant et qu’un état financier de septembre était nécessaire.

[96] En contre‑interrogatoire, Mme McArthur a reconnu son échange de courriels avec la fonctionnaire le 18 septembre 2014 au sujet du retard de leur demande parce qu’ils ne pouvaient pas fournir un état financier pour septembre. Mme McArthur a également reconnu que c’est lors de cet échange de courriels entre elle et la fonctionnaire en date du 24 septembre 2014 que la fonctionnaire a été informée pour la première fois que le projet avait commencé en juillet 2014.

[97] De nouveau en contre‑interrogatoire, Mme McArthur ne pouvait pas contester le fait qu’un courriel provenant de la fonctionnaire, dont une copie conforme avait été envoyée au Dr Dobson le 24 septembre 2014, indiquait que le Dr Dobson était le directeur chargé de l’examen de leur projet et qu’il avait besoin d’une copie de leur état financier de septembre pour poursuivre son examen. Mme McArthur a reconnu que le courriel du 25 octobre 2014 à M. Lisk, contenant sa plainte et les documents connexes, avait été soumis après l’approbation de leur demande. La demande approuvée à l’origine par le Dr Dobson indiquait une date de début en septembre, pour un financement de 40 000 $ dans le cade du PARI. En fin de compte, l’entente de contribution approuvée indiquait une date de début du 1er août 2014. Mme McArthur a convenu que leur projet comptait différentes étapes et que même s’ils espéraient une date de début en juillet, ils étaient à l’aise avec une date de début en août 2014. Elle a indiqué que si le PARI avait accepté une date de début en juillet, la totalité de la somme de 50 000 $ aurait été approuvée. Elle ne pouvait pas se rappeler si ce montant devait couvrir une partie de son salaire.

[98] Encore une fois, en contre‑interrogatoire, Mme McArthur a reconnu que la plainte déposée contre la fonctionnaire, datée du 25 octobre 2014, avait été déposée après leur acceptation de l’entente de contribution. Mme McArthur a déclaré que la plainte avait été déposée peu après leur retour de la Floride et qu’elle découlait de la communication entre M. Haw et M. Lisk, qui le connaissait sur le plan professionnel. Elle n’avait déposé aucune plainte contre la fonctionnaire antérieurement.

[99] Au cours du réinterrogatoire, on a demandé à Mme McArthur comment elle pouvait concilier les courriels du 16 juin 2014, l’informant que sa demande avait été refusée, avec la conversation avec la fonctionnaire le 15 septembre 2014. Elle a déclaré qu’elle estimait que leur demande était complète et qu’une somme de 50 000 $ avait été réservée aux fins de leur projet. Mme McArthur a déclaré qu’elle avait été confuse plus tard lorsqu’on lui a dit que cela ne fonctionnerait pas. Le courriel qu’elle a envoyé le 26 juin 2014 au sujet du document d’Oak Computing est le même que le document du 2 juillet 2014, dans lequel la fonctionnaire lui a demandé de modifier la date de début.

C. La plainte déposée par M. et Mme McArthur en octobre 2014

[100] En octobre 2014, le Dr Dobson a découvert le mécontentement de M. et Mme McArthur de ne pas recevoir ce qui, selon eux, leur avait été promis par la fonctionnaire.

[101] M. Lisk a expliqué que le licenciement de la fonctionnaire avait été motivé par une plainte déposée par les dirigeants de la société P le 25 octobre 2014. Ils ont allégué que la fonctionnaire les avait encouragés à faire une fausse déclaration, ce qui serait contraire aux modalités de l’entente de contribution. Il s’est souvenu d’avoir rencontré M. et Mme McArthur deux fois, mais il ne se souvenait pas des dates exactes. Il a expliqué que la relation entre le CTI et un demandeur est primordiale. Si la relation ne fonctionne pas et n’est pas irréprochable, elle peut avoir des répercussions négatives sur le programme et nuire aux activités du demandeur. Pour cette raison, il a demandé au Dr Dobson de retirer la fonctionnaire en tant que CTI du projet de la société P. Il n’a pas mentionné avoir communiqué avec M. Haw, qui n’a pas été cité à témoigner.

[102] Lors de la réunion entre M. Lisk et M. et Mme McArthur, ils ont discuté des détails de l’engagement de la fonctionnaire à leur égard. M. et Mme McArthur ont expliqué qu’ils travaillaient avec la fonctionnaire depuis l’été 2013 pour élaborer une proposition de projet. Ce n’est qu’en juillet 2014 qu’il y a eu une proposition solide pour un travail que la fonctionnaire était prête à recommander à son directeur. Malheureusement, la cyberattaque a eu lieu, ce qui a suspendu le financement. M. et Mme McArthur allèguent qu’après cette attaque, le 15 septembre 2014, la fonctionnaire leur a demandé de falsifier la date de début de leur projet.

[103] M. McArthur s’est souvenu d’avoir rencontré M. Lisk à la fin de septembre ou au début d’octobre pour expliquer ce qui s’était passé. À la suite de cette réunion, ils ont été informés qu’un certain niveau d’appui leur serait accordé et qu’un autre conseiller spécialisé serait affecté à leur dossier. M. McArthur a déclaré que M. Lisk lui avait demandé de rédiger une lettre comportant les détails de sa conversation avec la fonctionnaire. M. McArthur a déclaré qu’il avait remis la lettre dans la semaine qui a suivi la réunion.

[104] Sur la page couverture de la plainte non datée déposée par M. et Mme McArthur, M. McArthur a écrit ce qui suit :

[Traduction]

[…] sa participation au PARI a été traitée de manière qui va bien au‑delà de la simple négligence, peut‑être dans un domaine où ils ne souhaitaient pas que leur entreprise participe. Notre CTI, Liza Medek, a été notre seul contact avec le programme depuis le début et nous avons reçu des conseils limités, déroutants et, à une occasion, des conseils très médiocres sur la façon de satisfaire aux exigences de la demande. Le conseil en question consistait à me demander directement de soumettre à nouveau les dates de mon projet pour un projet déjà soumis et commencé. Ces conseils ne me semblent pas être des conseils judicieux et même si j’ai effectivement soumis de nouveau le projet, la demande a été suivie dans un court délai par un courriel à Liza décrivant davantage que notre projet est déjà en cours et que si ce fait rend notre demande inadmissible, nous serions heureux de la retirer. Veuillez considérer la présente comme une plainte officielle.

[105] Dans un document dactylographié joint à la lettre d’accompagnement, M. McArthur a indiqué ce qui suit :

[Traduction]

Le 15 septembre, à un moment donné après 11 h 15, j’ai reçu un courriel de Liza Medek, notre CTI qui traite notre demande au PARI. Le courriel consistait en une demande de l’appeler. À un moment donné entre 11 h 15 et 12 h 11, j’ai discuté avec Liza au sujet de notre demande au PARI. À ce moment‑là, on m’a informé qu’une somme de 50 000 $ avait été réservée pour notre projet, qu’il faudrait deux jours pour le traiter et qu’il n’était pas nécessaire de modifier les aspects techniques de la demande. J’ai demandé à Liza à ce moment‑là de faire un suivi par écrit selon lequel nous n’avions pas besoin de modifier quoi que ce soit, ce qu’elle la fait à 12 h 11, le même jour.

À ce moment‑là, Liza m’a demandé si notre projet avait commencé, car notre date de début initial était dans le passé. J’ai répondu par l’affirmative, il avait effectivement été commencé. À ce moment‑là, elle m’a encore posé la question, mais formulé légèrement différemment […] « Vous n’avez pas encore commencé, n’est‑ce pas? » J’ai trouvé cela un peu déroutant, mais je m’y suis conformé. Elle m’a alors demandé de modifier les dates figurant dans ma demande afin d’indiquer une date future du 1er octobre comme ma date de début. J’ai dit que je pourrais lui donner cela, mais le projet est en cours et a déjà consommé des fonds. Après avoir soumis les documents comportant la date révisée, nous avons fait un suivi avec une explication écrite à Liza selon laquelle le projet était déjà en cours et que si ce fait rendait le projet inadmissible, nous serions heureux de retirer la demande. Aucune confirmation de réception de notre offre de retirer la demande n’a été envoyée.

[106] M. McArthur a signé le document, mais n’y a apposé aucune date. Il s’est souvenu d’avoir rédigé la lettre lorsque les événements étaient bien présents dans son esprit. La chronologie et les courriels joints à la plainte provenaient surtout de Mme McArthur. M. McArthur a expliqué que la chronologie indique que le 16 juin 2014, la fonctionnaire leur a dit qu’elle avait réservé une somme de 50 000 $ pour leur projet. M. Lisk a témoigné avoir reçu cette lettre numérisée sous forme de PDF et jointe à un courriel qui lui avait été envoyé le 25 octobre 2014. Je souligne qu’il s’agissait du lendemain de la signature de l’entente de contribution.

[107] Mme McArthur a témoigné qu’elle [traduction] « avait également participé à la rédaction des deux lettres et qu’elles avaient pour but d’obtenir l’argent d’une façon ou d’une autre ». M. McArthur l’a rédigée et lui a demandé si elle était convenable. Mme McArthur n’a pas modifié le contenu des lettres. Elle a déclaré que, à ce moment‑là, ils n’avaient reçu aucune somme du PARI. En quelques semaines, le PARI a répondu qu’ils ne recevraient pas la somme de 50 000 $ mais 40 000 $, et seulement après le règlement de la plainte.

[108] Mme McArthur a expliqué qu’elle avait rédigé une chronologie qui accompagnait ces lettres. La chronologie combinait certains échanges de courriels entre M. et Mme McArthur avec la fonctionnaire. Selon les notes de Mme McArthur, qui ont été déposées en preuve, la fonctionnaire a téléphoné le 15 septembre 2014 et a indiqué que leur entreprise recevrait les fonds dans deux jours ouvrables. La fonctionnaire a demandé à M. McArthur si le projet avait commencé, et il a dit : [traduction] « Oui. » La fonctionnaire a dit : [traduction] « Permettez‑moi de vous demander encore une fois. Le projet a‑t‑il commencé? » M. McArthur a dit [traduction] « Non? » La fonctionnaire a dit : [traduction] « Bien, les fonds seront dans votre compte dans deux jours ouvrables » et a ajouté qu’elle n’avait pas besoin d’autre chose. Elle leur a ensuite envoyé un courriel demandant le contrat révisé du sous‑traitant.

[109] En contre‑interrogatoire, M. McArthur a reconnu que M. Lisk lui avait demandé de lui envoyer une lettre comportant un récit et de rédiger une plainte contre la fonctionnaire. Il a expliqué que les deux contenaient des renseignements semblables et qu’elles avaient été rédigées dans un délai de deux jours, une après l’autre.

[110] En contre‑interrogatoire, M. Lisk a été interrogé au sujet de ses notes sur sa téléconférence avec M. McArthur. Même s’il a convenu que rien dans ses notes ne faisait référence à un appel téléphonique entre la fonctionnaire et M. McArthur le 15 septembre 2014, et qu’il n’y avait aucune note concernant les allégations de falsification de dates, il s’est rappelé que M. McArthur était mécontent de la date de début du projet. Il a convenu que, au départ, le demandeur souhaitait obtenir une somme de 200 000 $ à 250 000 $. Toutefois, la fonctionnaire a proposé la somme de 50 000 $ et la somme approuvée était de 40 000 $.

[111] De nouveau en contre‑interrogatoire, la représentante de la fonctionnaire a suggéré à M. Lisk que M. et Mme McArthur étaient mécontents de la date de début du 1er septembre 2014 de l’entente de contribution parce qu’ils avaient commencé le projet en juillet 2014 ou même plus tôt, mais que le Dr Dobson était prêt à appuyer les travaux à exécuter uniquement à compter d’août 2014. C’est la raison pour laquelle la date de l’entente de contribution a été modifiée du 1er septembre 2014 au 1er août 2014 et n’a pas été signée par les demandeurs avant décembre 2014. M. Lisk a déclaré qu’il ne pouvait formuler aucun commentaire à ce sujet, car il n’était pas dans [traduction] « leurs têtes ».

[112] La représentante de la fonctionnaire a renvoyé M. Lisk à un courriel provenant de M. et Mme McArthur en date du 18 novembre 2014, dans lequel ils ont demandé que leur dossier soit affecté de nouveau à un autre CTI. Ils ont demandé que la date d’entrée en vigueur du contrat soit le 1er juillet 2014 afin qu’ils puissent utiliser la totalité des fonds de 50 000 $ du PARI. M. Lisk a convenu qu’ils voulaient un montant supérieur.

[113] En ce qui concerne la modification de la date de l’entente de contribution, passant du 1er septembre 2014 au 1er août 2014, M. Lisk ne pouvait pas expliquer comment la fonctionnaire aurait bénéficié de la modification de la date. De nouveau en contre‑interrogatoire, M. Lisk s’est souvenu du courriel que la fonctionnaire a envoyé au Dr Dobson le 24 octobre 2014, qui contenait les jalons de ses interactions avec M. et Mme McArthur et les principales raisons justifiant le retard de l’échéancier du projet. La fonctionnaire a indiqué qu’ils n’avaient pas d’argent et qu’ils n’avaient pas fourni les renseignements, même après des demandes répétées et la cyberattaque. M. Lisk a convenu qu’il s’agissait toutes de raisons valables qui pourraient retarder l’échéancier du projet.

[114] En contre‑interrogatoire, M. McArthur a reconnu que la proposition du sous‑traitant datée du 2 juillet 2014 avait été jointe à leur demande de juin 2014 et que la proposition du sous‑traitant du 15 septembre 2014 avait été jointe à la demande d’octobre 2014. Il n’était pas d’accord avec la proposition que la fonctionnaire ne lui avait pas demandé de modifier la date de début. Il était sûr qu’elle lui avait demandé de la modifier, ainsi qu’une partie de sa demande.

[115] De nouveau en contre‑interrogatoire, M. McArthur a reconnu que le 7 juillet 2014, à 14 h 39, il avait été informé que sa demande datée de juin 2014 comportant une date de début de juillet 2014 avait été refusée. M. McArthur a aussi reconnu que le 26 août 2014, à 9 h 16, il avait été informé de nouveau que le PARI ne couvrait que les projets qui n’étaient sont pas encore commencés.

[116] En réinterrogatoire, l’avocat de l’employeur a demandé à M. McArthur comment il avait pu concilier le courriel du 16 juin 2014, dans lequel on lui a dit qu’une somme de 50 000 $ avait été réservée, avec le courriel du 7 juillet 2014 dans lequel la fonctionnaire les informait qu’elle ne pouvait pas recommander leur demande aux fins d’approbation. M. McArthur n’était pas certain de la raison pour laquelle la fonctionnaire leur a dit que la somme avait été réservée pour eux.

[117] La veille du dépôt de la plainte, soit le 24 octobre 2014, la fonctionnaire a envoyé par courriel au Dr Dobson un résumé des mesures qu’elle avait prises relativement au dossier depuis son premier contact avec le demandeur. Elle lui a dit que les demandeurs déposeraient une plainte. Il lui a demandé de produire une chronologie de toutes ses interactions depuis 2013. M. Lisk a expliqué que cela avait pour but d’obtenir le point de vue de la fonctionnaire quant à ce qui s’était réellement produit.

[118] Le Dr Dobson détenait le pouvoir délégué d’approuver le financement. M. et Mme McArthur étaient à court d’argent. Selon sa compréhension, ils n’avaient pas d’argent parce qu’ils avaient dépensé tout leur argent sur le projet, ce qui est devenu un problème lorsque le projet a commencé. Les 10 000 $ restants étaient destinés à appuyer le salaire de Mme McArthur. Le PARI ne couvrirait pas cette dépense. Le PARI a pour but de promouvoir l’expertise et l’innovation, ce qui constitue la raison d’être principale du soutien. M. et Mme McArthur ont supposé que si le PARI offrait un soutien de 40 000 $, pourquoi déposer une demande de 50 000 $? Le Dr Dobson a compris que M. et Mme McArthur étaient frustrés du fait qu’on leur avait dit que la somme de 50 000 $ avait été approuvée et qu’ils ne la recevraient pas.

[119] Selon un examen des documents déposés en preuve, le modèle de proposition pour les petits projets était daté du 26 juin 2014. La date de début du projet indiquée était le 2 juillet 2014, avec une durée prévue de quatre mois. L’entente de contribution initiale indiquait qu’elle était entrée en vigueur le 1er septembre 2014 et qu’elle prenait fin le 31 décembre 2014. Le Dr Dobson a signé cette entente le 20 octobre 2014. Je souligne qu’il s’agissait de quatre jours avant la réception de la plainte. Il a expliqué que la date du 1er septembre 2014 avait été choisie afin de tenir compte des travaux à exécuter, mais qui n’avaient pas encore été effectués par les entrepreneurs.

[120] Selon les renseignements fournis par la fonctionnaire et M. et Mme McArthur, il était devenu clair qu’ils n’étaient pas satisfaits de la somme de 40 000 $. M. et Mme McArthur l’ont informé qu’ils avaient commencé les travaux à la fin de juin ou au début de juillet et qu’ils s’attendaient à recevoir la somme de 50 000 $ lorsque SONAR serait nouveau opérationnel. Ils cherchaient à obtenir une somme importante pour payer une partie de l’enveloppe salariale. Le Dr Dobson a expliqué que le PARI ne ferait jamais cela.

[121] M. Lisk s’est rappelé que la cyberattaque avait interrompu le système informatique du CNRC, soit SONAR. En raison de la cyberattaque, le CNRC a dû exercer ses activités sans ordinateur ni courriel pendant plusieurs semaines. Certains projets ont été mis en suspens parce que le PARI avait dû se convertir à un processus sur papier. En raison de cette période d’interruption, les demandeurs qui avaient présenté une proposition acceptable ont été autorisés à choisir une date de début qui leur était acceptable, quelle que soit la date de début réelle du projet. Il a fallu six semaines avant que le PARI puisse traiter normalement les demandes d’ententes de contribution.

[122] En raison du retard causé par la cyberattaque, le Dr Dobson ne souhaitait pas pénaliser M. et Mme McArthur. Il a accepté de modifier la date de début du projet au 1er août 2014, afin qu’ils aient suffisamment de travail contractuel pour appuyer une entente de contribution de 40 000 $. À l’insu du Dr Dobson, M. et Mme McArthur ont eu une discussion avec M. Lisk. Ils avaient 45 jours pour signer l’entente de contribution. L’entente de contribution finale a été signée par le Dr Dobson le 21 octobre 2014, mais M. et Mme McArthur ne l’ont signé que le 12 décembre 2014. En fin de compte, la date du 1er août 2014 a été choisie pour tenir compte du travail qui n’avait pas été exécuté.

[123] Mme Lowder a expliqué que la cyberattaque avait eu des conséquences chaotiques. La haute direction ne savait pas comment gérer au mieux la situation. Les CTI ont dû communiquer avec leurs clients et les conseiller en vue d’essayer de réduire leurs dépenses. Ils ne pouvaient pas avoir accès à leurs dossiers et ne disposaient d’aucun moyen de faire preuve de diligence raisonnable. Certains clients ont dû assumer des coûts importants en juillet et n’avaient aucun moyen d’avoir accès à leurs subventions. Même si c’était possible, elle n’était au courant d’aucun projet ayant fait l’objet d’un antidatage en raison de la cyberattaque.

[124] En contre‑interrogatoire, Mme Lowder a déclaré qu’en tant que personne détenant le pouvoir de signature, la direction aurait pu faire ce qu’elle voulait conformément à son pouvoir financier. En contre‑interrogatoire, le Dr Dobson a convenu qu’il détenait le plein pouvoir de signature des ententes de contribution. Il avait le pouvoir de déterminer une date de début en fonction de sa diligence raisonnable et de s’assurer qu’un projet satisfaisait à tous les critères. Lors de l’examen des documents, il pourrait retourner au CTI et demander plus de renseignements ou il pourrait simplement refuser la demande.

[125] Même si un projet est recommandé par un CTI, le Dr Dobson pourrait refuser une entente de contribution. Il pourrait également antidater la date de début d’un projet pour les retards causés par le CNRC. Il a expliqué que, pour la région de l’Ontario, le CNRC avait envisagé l’antidatage dans certains cas pour tenir compte des retards causés par la cyberattaque. Dans le cas de la société P, il était convaincu qu’il y avait suffisamment de travail pour utiliser la somme de 40 000 $.

[126] De nouveau en contre‑interrogatoire, le Dr Dobson a convenu que s’il y avait des renseignements manquants, l’entente de contribution ne pourrait pas être approuvée. Les courriels déposés en preuve ont démontré que M. et Mme McArthur ne fournissaient pas les renseignements financiers nécessaires, ce qui expliquait en partie le retard dans l’approbation de l’entente de contribution. L’entente de contribution ne pouvait pas être approuvée sans des renseignements exacts.

[127] En contre‑interrogatoire, le Dr Dobson a convenu que la fonctionnaire avait informé M. et Mme McArthur en mars 2014 que le PARI ne couvrait que les projets qui n’avaient pas été commencés. Il était également d’accord avec sa déclaration selon laquelle [traduction] « Le PARI n’est pas une banque et que s’ils avaient besoin d’argent de démarrage, ils devraient communiquer avec la BDC et que le PARI doit voir des revenus ou de l’argent dans la banque. » Il n’a pas mentionné que le libellé qu’elle avait utilisé était inapproprié.

[128] Pour la période de mars 2014 à avril 2014, les échanges de courriels entre M. et Mme McArthur et la fonctionnaire démontrent que la fonctionnaire a insisté sur l’obtention des états financiers de la société P. Ce n’est que le 9 juin 2014 qu’ils lui ont répondu pour lui demander s’il y avait encore des fonds disponibles pour 2014 et si elle pouvait les rencontrer.

[129] En contre‑interrogatoire, le Dr Dobson a déclaré que la frustration de M. et Mme McArthur concernaient principalement le fait qu’on leur avait promis la somme de 50 000 $. Ils avaient l’impression que ce n’était qu’une question de temps et qu’ils le recevraient. Dans l’ensemble, la direction a été préoccupée par le fait que l’entreprise s’attendait à recevoir les fonds. Même si M. et Mme McArthur n’avaient pas fourni des renseignements supplémentaires à l’appui de leur allégation, le Dr Dobson a déclaré qu’il n’avait aucune raison de les douter. Il n’a jamais vu les documents de la fonctionnaire à l’intention de M. et Mme McArthur leur promettant la somme de 50 000 $, sauf un courriel qu’elle avait envoyé en janvier 2014 déclarant que le PARI avait réservé une somme de 50 000 $ aux fins de leur projet.

[130] La représentante de la fonctionnaire a informé le Dr Dobson que la fonctionnaire témoignerait qu’elle n’avait jamais promis la somme de 50 000 $ à M. et Mme McArthur. Elle n’a pas été interrogée à l’égard de cette allégation lors de son audience disciplinaire. Le Dr Dobson n’a pas pu le nier ni le confirmer.

D. Audience disciplinaire et de recherche des faits, décembre 2014

[131] Le 1er décembre 2014, M. Lisk a écrit à la fonctionnaire, l’invitant à participer à une entrevue obligatoire. La ligne d’objet indiquait que l’entrevue concernait une audience disciplinaire. Dans cette lettre, il mentionne qu’il a reçu une plainte alléguant qu’elle avait mal traité et fourni des renseignements inappropriés à un client dans le cadre de la préparation de sa proposition de projet. L’audience disciplinaire avait pour but de recueillir les faits et de donner à la fonctionnaire la possibilité d’entendre et de comprendre la plainte, ainsi que d’y répondre. Mme Pereira l’a accompagné à cette réunion. La lettre comportait un avertissement selon lequel une mesure disciplinaire pourrait être prise, selon les résultats de l’enquête. Pendant cette période, la fonctionnaire n’a pas été suspendue de son travail. Elle a seulement été retirée du traitement du dossier de la société P. Elle a continué d’exercer ses fonctions habituelles de CTI. Elle a témoigné qu’il s’agissait de la première fois qu’elle était informée officiellement que la plainte de M. et Mme McArthur avait été déposée contre elle, personnellement.

[132] Le 4 décembre 2014, M. Lisk a rencontré la fonctionnaire, sa représentante syndicale et Mme Pereira, qui prenait des notes. M. Lisk a déclaré qu’il avait présenté à la fonctionnaire les événements, tels qu’ils ont été présentés par M. et Mme McArthur, ainsi que les allégations écrites. M. et Mme McArthur ont particulièrement allégué qu’on leur avait demandé de modifier la date de leur projet de la fin de juillet au début d’octobre et d’affirmer qu’aucun travail n’avait été exécuté relativement à la partie qui serait financée par le PARI.

[133] La fonctionnaire s’est souvenue d’avoir vu la plainte signée par M. McArthur à la fin de l’audience disciplinaire. Ni la chronologie qu’il avait signé ni les courriels et la chronologie jointe à la plainte ne lui ont été présentés. Elle n’a pas été informée des écarts entre ce qu’elle avait dit et les allégations contre elle. Le document d’Oak Computing du 15 septembre 2014 ne lui a pas été présenté; elle a vu le document pour la première fois à l’audience devant la Commission.

[134] Mme Pereira a déclaré que sa participation à cette affaire avait commencé à la demande de M. Lisk. Il lui a dit qu’il avait reçu une plainte et lui avait demandé de formuler des questions et de fixer une réunion de recherche des faits avec la fonctionnaire. Elle a affirmé que les événements étaient survenus quatre ans avant l’arbitrage et qu’elle se souvenait de la cyberattaque. Elle se souvenait avoir envoyé un courriel à la fonctionnaire pour fixer une audience disciplinaire et de recherche des faits. À son avis, une audience disciplinaire et une audience de recherche des faits sont la même chose. La lettre à la fonctionnaire était intitulée [traduction] « Audience disciplinaire » afin de s’assurer que la fonctionnaire savait qu’elle pourrait faire l’objet d’une mesure disciplinaire. La version écrite de la plainte de M. et Mme McArthur n’a pas été communiquée à la fonctionnaire, ni avant ni pendant la réunion disciplinaire et de recherche des faits.

[135] Mme Pereira a déclaré qu’elle se rappelait que la fonctionnaire avait demandé une copie de la plainte avant la réunion. Elle a affirmé que, selon la pratique, la plainte n’était pas communiquée avant la réunion, qui était tenue pour obtenir la version de la fonctionnaire de la situation. Mme Pereira a informé la fonctionnaire que le contenu de la plainte lui serait communiqué à l’audience disciplinaire ou de recherche des faits et qu’elle aurait l’occasion d’y répondre.

[136] Elle s’est rappelée que la fonctionnaire avait éprouvé des difficultés à obtenir des copies de ses courriels en raison de la cyberattaque. On a dit à la fonctionnaire de se familiariser avec le dossier de la société P afin de pouvoir répondre aux questions. La fonctionnaire l’a informée qu’elle ne pouvait pas avoir accès à ses dossiers. Mme Pereira a déclaré qu’elle avait communiqué avec la Direction de la technologie de l’information pour savoir s’il y avait un moyen d’aider la fonctionnaire à obtenir les courriels qui feraient l’objet de discussions pendant l’audience disciplinaire. Un rapport résumant les dossiers a été obtenu mais, en fin de compte, il n’a pas été utile pour la fonctionnaire.

[137] Une liste des questions qu’elle et M. Lisk avaient formulées a été déposée en preuve. M. Lisk a posé les questions, mais pas toutes, et Mme Pereira a consigné les réponses de la fonctionnaire au fur et à mesure qu’elle répondait aux questions.

[138] Les notes de son audience disciplinaire et de recherche des faits datées du 4 décembre 2014 ont été prises mot pour mot pendant la réunion. Elle les a examinées avant de témoigner. Son rôle consistait uniquement à prendre des notes. Si elle a pris une question en note, c’était parce que direction l’avait répétée. Il est possible qu’elle n’ait pas reçu une réponse, qu’elle ait dévié de ses objectifs ou qu’elle ait paraphrasé une question. Habituellement, elle ne consignait pas les questions; elle ne consignait que les réponses des employés à mesure qu’ils parlaient.

[139] Mme Pereira a déclaré que la fonctionnaire était accompagnée par Nancy Stonelake, sa représentante syndicale locale. Les questions ont été posées de manière à assurer la fluidité. M. Lisk a demandé à la fonctionnaire si elle savait à quelle date le projet de la société P avait commencé. Selon les notes de Mme Pereira, la fonctionnaire a déclaré que le projet avait été soumis le 15 septembre 2014, qu’elle savait que le projet avait été commencé et qu’elle avait eu une discussion avec M. McArthur au cours de laquelle il lui avait dit qu’ils avaient commencé et qu’elle aurait répondu [traduction] « Vous ne pouvez pas avoir commencé le projet parce que le PARI ne le couvrira pas. Vous n’avez donc pas commencé le projet, n’est‑ce pas? » M. McArthur a dit : [traduction] « D’accord. » La fonctionnaire a demandé si cet énoncé lui attirerait des ennuis. M. Lisk a dit : [traduction] « Il s’agit d’une conversation malheureuse. » À ce moment‑là, la fonctionnaire a demandé de prendre une pause avec sa représentante syndicale. La pause a duré environ 15 minutes. Mme Pereira a déclaré qu’elle avait examiné les questions et ses notes pendant la pause.

[140] M. Lisk s’est rappelé que la fonctionnaire n’était pas claire en ce qui concerne ses énoncés au client. Au début, elle les a admis, mais à son retour de la pause avec sa représentante syndicale, elle s’est rétractée et a plutôt accusé le client d’avoir menti. Elle tentait d’obscurcir le fait qu’elle avait demandé au client de modifier la date de début de son projet, même si elle savait que le projet était déjà commencé. Elle a admis l’avoir fait, mais s’est ensuite rétractée et a accusé le client d’avoir menti. Il s’est senti très insulté par cela.

[141] En raison des difficultés que la fonctionnaire a éprouvées à obtenir ses courriels à cause de la cyberattaque, M. Lisk l’a autorisé à présenter des documents à l’appui de ses réponses par courrier électronique. La fonctionnaire a envoyé ses explications le 4 décembre 2014, à 18 h 3. Elle a envoyé à Mme Pereira et à M. Lisk un courriel indiquant qu’après avoir réfléchi davantage à la séquence des événements, ainsi qu’après avoir lu la lettre du demandeur, elle constatait maintenant ce qui aurait pu avoir contribué au malentendu. Elle a rédigé ce qui suit :

[Traduction]

Surtout après avoir eu l’occasion d’assimiler la lettre non datée du demandeur, elle a conclu que puisque l’entente de contribution avait été antidatée, cela prouvait au demandeur qu’en fait, les projets du PARI peuvent commencer avant la signature de l’entente de contribution, ce qui a fait en sorte que son énoncé initial, selon lequel le temps commence uniquement après la signature de l’entente de contribution, est une désinformation.

[142] Dans son courriel, la fonctionnaire a déclaré qu’on n’avait jamais expliqué au demandeur qu’il s’agissait d’une anomalie en raison de la cyberattaque et non d’une pratique normale, comme elle lui avait expliqué à l’origine. Elle a indiqué qu’il fallait l’expliquer au demandeur. Le 5 décembre 2014, elle a fait suivre un courriel daté du 26 août 2014, dans lequel elle a informé le demandeur que le PARI ne couvrait que les projets qui n’étaient pas commencés.

[143] La fonctionnaire a témoigné que, à l’époque, ni la plainte ni les détails relatifs à la présumée confusion concernant la date ne lui ont été communiqués. En outre, elle ne pouvait pas avoir accès à ses dossiers. Mme Pereira a offert de lui fournir les premières lignes de ses courriels au cas où elles pourraient l’aider à répondre aux questions de M. Lisk, mais cela n’était pas utile, car la plupart des renseignements avaient été supprimés par la cyberattaque. Tous les renseignements étaient tronqués.

[144] M. Lisk croyait que les échanges de courriels avec la fonctionnaire et la chronologie présentés par M. et Mme McArthur appuyaient leurs allégations. À son avis, la fonctionnaire aurait dû avoir constaté que les travaux avaient été commencés avant le retard occasionné par la cyberattaque. Elle connaissait les règles et comprenait comment le programme fonctionnait. Il était abasourdi quant à la raison pour laquelle elle conseillerait à un demandeur de modifier la date de début de son projet.

[145] M. Lisk a affirmé que la fonctionnaire aurait dû communiquer avec le Dr Dobson pour trouver une solution. Elle aurait dû s’assurer que la proposition était sur la bonne voie et saisir l’occasion de signer l’entente de contribution un jour comportant une autre date de début en août, lorsque M. et Mme McArthur avaient réellement commencé le projet. Cela ne s’est pas produit. La fonctionnaire n’a pas demandé le soutien de son directeur et a plutôt proposé que le demandeur modifie la date de début du projet ou, essentiellement, qu’il falsifie la proposition.

[146] En contre‑interrogatoire, M. Lisk a convenu que la fonctionnaire avait collaboré pendant la réunion de recherche des faits. La fonctionnaire n’a pas été suspendue pendant l’enquête et elle a exercé ses fonctions de CTI pendant plusieurs mois avant d’être licenciée. M. Lisk a préféré accorder le bénéfice du doute à M. et à Mme McArthur parce qu’il estimait qu’ils ne pouvaient pas savoir qu’il était possible de modifier la date d’entrée en vigueur d’une entente de contribution, à moins que la fonctionnaire ne leur eût dit.

[147] La représentante de la fonctionnaire a indiqué à M. Lisk que la fonctionnaire témoignerait qu’elle n’avait pas rétracté son énoncé à la réunion de recherche des faits. Il a indiqué qu’il confirmait son témoignage selon lequel elle l’avait en fait rétracté.

[148] En raison de cette plainte, le 15 décembre 2014, M. Lisk a envoyé une autre lettre à la fonctionnaire dont la ligne d’objet mentionnait [traduction] « Enquête administrative ». Dans cette lettre, il a indiqué que pour faire suite à sa lettre du 1er décembre 2014 et à ses réunions subséquentes avec elle, une autre enquête sur ses dossiers de clients du PARI antérieurs et actuels serait effectuée. Il a indiqué qu’on communiquerait avec elle et qu’elle aurait la possibilité de participer à l’enquête. Il lui a également rappelé qu’elle avait le droit d’être représentée au cours de l’enquête. La fonctionnaire s’est souvenue de la lettre. Elle avait informé M. Lisk qu’elle ferait tout pour aider l’enquête.

E. La plainte reçue en décembre 2014

[149] Selon le rapport d’enquête préparé par Mme Pereira, en décembre 2014, la direction a été informée d’une plainte d’une cliente contre la fonctionnaire. La société M, soit la cliente, a soutenu que la fonctionnaire n’avait jamais communiqué avec elle après leurs premières réunions et qu’elle se sentait ignorée par elle. Elle a déclaré que la fonctionnaire et la société M s’étaient rencontrées le 17 septembre 2014 pour discuter de la proposition de projet. La fonctionnaire a dit à la cliente que le concept n’était pas attrayant, qu’il était en fait horrible, et qu’il ne s’agissait pas de son domaine d’expertise. Elle a dit que, potentiellement, le projet pourrait générer des revenus, mais qu’elle ne pouvait pas le savoir parce qu’elle ne savait pas ce que font maintenant les jeunes. Selon le rapport d’enquête, la fonctionnaire a dit à la société M que si un compte bancaire était ouvert et que des fonds y étaient déposés, elle était disposée à appuyer le projet à l’intérieur des limites prévues de 50 000 $, en plus d’appuyer jusqu’à 80 % des salaires.

[150] Toujours selon le rapport, la fonctionnaire a dit que la société M pourrait être admissible à des sommes du Québec si elle s’y réinstallait et qu’elle communiquerait avec un CTI au Québec. Au cours d’une réunion téléphonique, la fonctionnaire a déclaré que le CTI avait dit à la société M qu’elle ne souscrivait pas à cette idée et que le PARI ne pouvait pas travailler avec la cliente en fonction d’optiques ou de perception. On mentionne dans le rapport que la fonctionnaire a déclaré qu’elle avait eu un appel téléphonique avec la société M. Dans son témoignage, la fonctionnaire a indiqué qu’elle ne se souvenait pas des détails, uniquement que la société n’était pas prête aux fins du PARI.

[151] À la page 204 du rapport, on mentionne que le 19 septembre 2014, la société M a envoyé un courriel et a remercié la fonctionnaire pour l’orientation. Elle a indiqué qu’elle souhaitait commencer à remplir la demande. La fonctionnaire a répondu qu’elle devait encore effectuer des recherches afin de cerner le risque technique et examiner le plan d’affaires. La société M a déclaré qu’elle avait effectué une recherche de succès semblables avec le PARI et de projets comportant des risques semblables et elle a fourni à la fonctionnaire les noms des entreprises. La fonctionnaire a envoyé un courriel indiquant que chaque situation, chaque client et chaque projet était différent. Elle a demandé à la société M de lui fournir son plan d’affaires, son relevé bancaire et un aperçu des difficultés techniques du projet. La fonctionnaire a déclaré que le 14 octobre 2014, la société M lui avait dit qu’elle mettait au point son plan d’affaires et demandé de la rencontrer. Elle a affirmé qu’elle avait proposé le 30 novembre. Elle a déclaré que le 15 octobre, le client a dit « OK ». Elle a également affirmé qu’elle avait demandé à la cliente de lui donner une description de haut niveau du projet. Le 6 décembre 2014, la société M lui a envoyé un courriel indiquant les mesures qu’elle avait prises, y compris l’élaboration d’un plan d’affaires et l’ouverture d’un compte bancaire.

[152] La cliente a déclaré qu’elle aurait un certain nombre de possibilités d’emploi pour les nouveaux diplômés dans un avenir rapproché et qu’elle avait hâte d’effectuer une recherche de brevets afin d’obtenir un financement. Elle a demandé des renseignements sur la date à laquelle elles se rencontreraient pour discuter des prochaines étapes. Le 8 décembre, la fonctionnaire a répondu comme suit : [traduction] « Je vous ai demandé ce qui suit à maintes reprises : je voudrais avoir un paragraphe qui donne un aperçu de haut niveau de l’entreprise et du projet. » La société M a présenté ses excuses et a envoyé un paragraphe qui donne un aperçu de haut niveau de l’entreprise et du projet. La fonctionnaire a répondu le 9 décembre, en affirmant que le paragraphe ne définissait pas une activité commerciale. Elle a proposé que la société M se charge d’effectuer une [traduction] « Étude du modèle d’entreprise » à l’aide d’un exemple de Wikipédia quant à la façon de mettre sur pied une entreprise. La fonctionnaire a indiqué que l’entreprise n’était pas assez avancée dans son projet.

[153] Selon le rapport, la cliente a envoyé un courriel à la fonctionnaire le 9 décembre. Le courriel indiquait que la cliente était confuse à savoir comment elles en étaient arrivées là depuis leur première conversation. La cliente a affirmé qu’à la fin de leur première réunion, elle avait exprimé qu’elle constatait clairement le potentiel de gains relativement à l’application mobile et que si la cliente ouvrait un compte bancaire et y déposait des fonds, elle l’appuierait à hauteur de la limite de 50 000 $, en plus de fournir 80 % des salaires. Le rapport indiquait que la société M avait ouvert un compte commercial et avait pris plusieurs mesures pour démarrer son entreprise.

[154] Selon le rapport, la société M a affirmé que ces mesures dépassaient de beaucoup ce que la fonctionnaire lui avait demandé d’accomplir depuis leur première réunion, mais qu’elle n’était pas assez avancée et de faire une recherche dans Wikipédia pour obtenir de l’aide. La société M a ensuite énoncé que, selon le courriel de la fonctionnaire du 19 septembre, elle avait l’impression qu’elle devait lui envoyer par télécopieur, à une ligne confidentielle, son plan d’affaires, ses relevés bancaires et un aperçu des difficultés techniques du projet. La cliente a déclaré qu’elle n’avait toujours pas le numéro de télécopieur. La société M a soutenu que la fonctionnaire avait indiqué clairement qu’elle ne devrait pas envoyer de renseignements confidentiels par courrier électronique en raison de la cyberattaque. La société M a déclaré que son plan d’affaires était exhaustif et qu’elle avait défini les activités commerciales et le projet, mais qu’elle avait besoin d’une occasion de le présenter, car il ne pouvait être envoyé par courrier électronique. La société M a convenu que le paragraphe n’énonçait pas une explication détaillée de ses activités commerciales; elle a affirmé qu’il s’agissait d’un aperçu de haut niveau qui ne comprenait pas les renseignements confidentiels. Selon le rapport, la société M a soutenu qu’elle avait prise des notes complètes pendant la première discussion avec la fonctionnaire, puisqu’elle appréciait tout ce qu’elle avait à dire et qu’elle avait examiné toutes les communications entre eux et n’avait pas vu qu’elle lui avait demandé d’envoyer un paragraphe, même une fois, encore moins à maintes reprises. Le lien vers Wikipédia que la fonctionnaire a envoyé pourrait être utile pour certaines entreprises, mais la société M estimait qu’elle était bien au‑delà ce stade et n’était pas d’accord que le projet n’était pas assez avancé pour obtenir un financement dans le cadre du PARI. Elle a soutenu qu’il s’agissait du meilleur moment, car elle avait payé la version bêta, était sur le point de mettre l’application sur le marché public et avait besoin d’un financement pour élargir la portée à différentes plateformes mobiles. La société M estimait qu’elle avait fait preuve de transparence, de franchise et d’une grande ouverture et qu’elle était très reconnaissante des conseils et des questions de la fonctionnaire depuis le début. Le rapport mentionne ensuite que la société M estimait qu’un élément considérable avait été modifié du côté de la fonctionnaire et que ce changement et la raison de ce changement n’étaient pas clairs.

[155] Selon le rapport, la fonctionnaire a consulté un autre CTI avec une expertise dans le domaine, qui a proposé qu’elle appelle un autre CTI. La fonctionnaire a discuté avec la société M, a dit que la lettre était inexacte et désagréable et qu’elle estimait que des excuses écrites étaient nécessaires. Une réunion avec la société M a été fixée le 12 décembre 2014. La fonctionnaire a dit que le 11 décembre, elle a discuté de nouveau avec la cliente, qui a convenu que lors de la première réunion, la fonctionnaire lui avait dit qu’il ne s’agissait pas de son domaine d’expertise. Toutefois, la société M a soutenu qu’elle avait dit qu’elle voyait [traduction] « clairement » la possibilité de tirer des gains de son produit. La fonctionnaire a également dit que la société M avait indiqué qu’elle avait été insultée par son renvoi à l’étude du modèle d’entreprise, qu’elle ne lui a jamais fait parvenir le numéro de télécopieur et qu’elle n’avait jamais reçu une demande de paragraphe. La fonctionnaire a dit à la société M que la lettre était menaçante, que le dirigeant lui avait répondu qu’elle le menaçait et que s’il ne lui présentait pas des excuses écrites, la réunion n’aurait pas lieu. Selon le rapport, elle a précisé qu’elle ne lui avait jamais adressé un ultimatum. La fonctionnaire a envoyé un courriel à son superviseur, soit le Dr Dobson, pour lui demander de lui parler et une réunion a été prévue avec la société M. La date de la réunion a été modifiée au 17 décembre. L’objectif de la fonctionnaire en ce qui concerne la réunion était, en ses mots, [traduction] « de calmer le client et de se rétablir sans escalade » avec des commentaires concernant ses excuses pour sa part du malentendu. L’employeur n’a pas déposé en preuve les courriels ou les documents sur lesquels le rapport était fondé.

[156] Mme Pereira a examiné ses notes de la réunion disciplinaire et de recherche des faits qui étaient datées du 13 février 2015. Elle a souligné que M. Lisk avait interrogé la fonctionnaire au sujet de ses interactions avec la société M. La fonctionnaire a déclaré que la cliente avait copié son plan d’affaires d’un article dans Internet. Elle demandait un financement dans le cadre du PARI pour une application. Étant donné qu’elle n’était pas une spécialiste en application, elle a demandé à un de ses collègues de l’aider. L’application évaluait la beauté d’une personne. Selon les notes de Mme Pereira, la fonctionnaire aurait affirmé que le CNRC ne devrait pas être lié à l’évaluation de la beauté.

[157] Toujours selon les notes de Mme Pereira, M. Lisk aurait demandé à la fonctionnaire de lui dire pourquoi elle avait poursuivi le projet si elle se sentait ainsi en ce qui concerne le CNRC et l’évaluation de la beauté. Elle a déclaré que le dirigeant de la société M était le fils d’un brillant scientifique et que ça en valait la peine pour le rencontrer. Elle lui a accordé le bénéfice du doute. Elle a proposé de tente d’obtenir un financement auprès de la BDC. Elle a demandé à la société M de lui fournir une brève description de haut niveau de son produit afin qu’elle puisse la donner au Dr Dobson. L’idée était horrible et elle avait des doutes au sujet de l’entreprise. Il y a eu un retard de sa part parce qu’il ne s’agissait pas de son domaine d’expertise et elle a donc demandé l’aide d’un collègue, qui était un conseiller en technologie. Elle a soutenu que la cliente avait envoyé une description de haut niveau du projet, comme elle l’avait demandé.

[158] M. Lisk lui a demandé pourquoi la société M croyait qu’elle recevrait une somme de 50 000 $. La fonctionnaire a répondu que les personnes‑ressources de la société M possédaient une expérience du PARI et qu’elles avaient dit à la cliente qu’il s’agissait de ce à quoi elle pouvait s’attendre. Elle l’a aidé en lui fournissant les ressources nécessaires pour élaborer un plan d’affaires. M. Lisk lui a demandé si elle se sentait intimidée par la cliente et s’il était difficile de lui dire que son projet ne convenait pas au financement. La fonctionnaire a répondu [traduction] « Non. » M. Lisk lui a demandé si elle avait des préoccupations selon lesquelles la société M déposerait une plainte contre elle si elle ne poursuivait pas la proposition. Elle a répondu [traduction] « Non. » Les notes de Mme Pereira indiquent qu’elle n’avait aucune préoccupation selon laquelle la société M déposerait une plainte jusqu’à ce qu’elle reçoive un courriel du dirigeant qui indiquait qu’il avait mal compris et qu’il s’agissait de son erreur. Mme Pereira ne pouvait pas préciser de quoi il s’agissait. Les notes de Mme Pereira indiquent que M. Lisk a ensuite demandé à la fonctionnaire si elle avait menacé la société M en ce qui concerne la présentation d’excuses et si elle avait dit à la société M qu’elle ne travaillerait pas avec elle. Elle a déclaré : « Non. »

[159] En contre‑interrogatoire, on a attiré l’attention de M. Lisk à la page 204 du rapport d’enquête de mars 2015, qui fait référence à la plainte déposée par la société M en décembre 2014. Selon le rapport, la société M estimait que la fonctionnaire l’ignorait. M. Lisk ne pouvait pas se rappeler si la fonctionnaire avait soulevé cette question auprès de la direction. Il ne se rappelait pas non plus si elle avait été portée à l’attention de la fonctionnaire lors de la deuxième réunion de recherche des faits en février 2015. La représentante de la fonctionnaire a indiqué que les témoins de la fonctionnaire témoigneraient qu’elle n’avait pas été portée à son attention lors de la réunion de recherche des faits de février 2015.

[160] La fonctionnaire a témoigné qu’elle n’avait jamais reçu une plainte officielle de la part de la société M. Elle a déclaré qu’il s’agissait d’une jeune cliente et qu’elle demandait un financement dans le cadre du PARI afin de conclure une entente de contribution. Elle se souvenait d’une conversation avec l’un des deux associés et qu’un désaccord est survenu lorsqu’il l’a comparé à son père. Elle a dit à la cliente qu’elle mettrait fin à la conversation et qu’ils pourraient avoir une discussion le lendemain. Elle a informé immédiatement le Dr Dobson de cette conversation. Aucune plainte ne lui a été communiquée.

[161] Le Dr Dobson a témoigné que la fonctionnaire l’avait averti du fait que la société M présenterait une plainte. Elle souhaitait s’assurer que lorsque la plainte était déposée, il serait au courant de tout. Cela n’avait rien à voir avec la plainte déposée par M. et Mme McArthur et la société P, mais il s’agissait d’un signe qu’il y avait peut‑être quelque chose d’autre qui se passait.

[162] En contre‑interrogatoire, le Dr Dobson a convenu que la fonctionnaire avait porté la plainte à son attention, moment auquel il en a pris connaissance. Il a convenu qu’elle avait demandé son avis quant à la façon de traiter le client et les difficultés qui étaient survenues vers les 9, 10 et 11 décembre. Il n’était pas d’accord que son rôle en tant que directeur consistait à conseiller les CTI sur la meilleure façon de traiter les clients difficiles. Il s’attendait à ce que les CTI soient en mesure de traiter avec les entreprises.

[163] En contre‑interrogatoire, M. Lisk a reconnu que le Dr Dobson avait communiqué avec la société M en décembre 2014. Il ne se rappelait pas s’il l’avait rencontré en personne ou par téléphone. Un courriel daté du 23 décembre 2014, dont la ligne d’objet contenait la mention [traduction] « Interactions récentes avec le PARI », semble indiquer qu’il s’agissait d’un appel téléphonique. Il a déclaré que la cliente avait fait part de ses frustrations à l’égard de la fonctionnaire et que cette plainte faisait partie des raisons de son licenciement. Il y a eu un malentendu entre la fonctionnaire et la cliente. Elle lui avait fourni des renseignements erronés et avait mal géré son dossier. M. Lisk a expliqué que la fonctionnaire était une CTI chevronnée et que, l’entreprise étant très jeune, la fonctionnaire avait laissé les attentes prendre de l’ampleur.

F. La plainte reçue en avril 2013

[164] Selon les notes de Mme Pereira, datées du 13 février 2015, M. Lisk a ensuite interrogé la fonctionnaire au sujet de la société I. Le rapport d’enquête indique qu’une plainte a été reçue le 10 avril 2013. La société I a indiqué qu’elle ne pouvait pas avoir accès à la fonctionnaire, que cette dernière ne lui avait offert aucune aide, qu’elle communiquait mal, qu’elle ne possédait pas l’expertise pertinente et qu’elle n’avait fourni aucune valeur à la société. Le dirigeant de la société I a trouvé la fonctionnaire frustrante et difficile. Ses questions simples, qui auraient pu être clarifiées par une explication au téléphone ont plutôt suscité des échanges de courriels frustrants et sans fin. Selon le rapport d’enquête, la société I a soutenu que la fonctionnaire ne comprenait pas les exigences en matière de documents et que, en conséquence, la société I n’avait pas reçu d’aide puisqu’elle n’avait pas reçu toute l’information dès le départ. On mentionne également que la société I avait reçu un appel urgent de la fonctionnaire lui demandant de réviser les renseignements parce que ses demandes étaient considérées comme incomplètes et que plusieurs possibilités avaient été perdues en raison des piètres habitudes de travail de la fonctionnaire. Le rapport d’enquête ajoute ensuite que lorsque la fonctionnaire a changé de bureau, la société I n’a pas été informée de la nouvelle adresse. Elle a été confrontée à d’énormes défis pour trouver les premiers adeptes dans le secteur des hôpitaux et souhaitait que le PARI puisse l’aider à relever ce défi. Des demandes de rencontres multiples ont été reportées pendant des mois et celles-ci n’ont jamais eu lieu.

[165] Selon le rapport d’enquête, la société I estimait que la fonctionnaire ne l’avait mise en communications qu’avec les ressources de son réseau immédiat de personnes‑ressources personnelles. Le dirigeant a trouvé qu’elle n’ajoutait aucune valeur autre que les fonds du PARI. La société I hésitait à présenter une plainte parce qu’elle craignait nuire aux possibilités de financement futur du projet. Par l’entremise de ses collègues, le dirigeant a été informé que les CTI étaient beaucoup plus utiles. Il souhaitait avoir un nouveau CTI, mais ne disposait d’aucun mécanisme pour en demander un nouveau. Étant donné que la fonctionnaire était si insatisfaisante, il a cessé de demander un soutien du PARI à l’automne 2013. La plainte officielle de cette cliente n’a pas été déposée en preuve.

[166] M. Lisk a interrogé la fonctionnaire au sujet de ce qu’elle se souvenait de son expérience avec la société I et si elle avait consacré du temps à discuter de la demande avec le dirigeant. Elle a dit qu’elle avait consacré le plus de temps à ce client parce qu’il avait soumis de 9 à 10 projets, totalisant plus de 200 millions de dollars. Selon les notes de Mme Pereira, la fonctionnaire a déclaré qu’elle faisait confiance à ce client et qu’elle avait assuré la communication entre la cliente et d’autres spécialistes. Elle avait discuté avec le dirigeant de la société I au sujet de la façon dont il faisait affaires. Il a modifié la portée du projet. Elle devait lui demander à maintes reprises de fournir des factures. Il ne fournissait pas de factures à l’égard de ses demandes de remboursement; il a mis à pied un certain nombre de personnes et ensuite un grand nombre de personnes. La fonctionnaire a soutenu que la société I avait tendance à congédier ses employés. Parfois, lorsque l’entreprise envoyait des factures, elle le faisait à la dernière minute. La société I a présenté une demande pour un autre projet, mais les renseignements financiers n’étaient pas à la hauteur et, ensuite, elle a changé de bureau. En ce qui concerne ce projet, même si la société I semblait savoir davantage où elle s’en allait et collaborait avec des partenaires, le dirigeant est devenu très contrarié lorsque l’appui au financement du projet a été refusé. Le dirigeant l’avait invité à deux galas. Elle y a assisté et s’est assise avec lui. La fonctionnaire a souligné que les états financiers de la société I n’étaient pas bons. Les ventes étaient à la baisse. Elle avait fait neuf projets avec lui avant celui-ci. Elle ne pouvait pas confirmer le montant total de financement qui a été versé aux projets dans le cadre du PARI.

[167] En contre‑interrogatoire, M. Lisk a été interrogé au sujet du document de post-évaluation [traduction] « Procédures de rétroaction et de plaintes » du PARI-CNRC. Il ne savait pas si la plainte d’avril 2013 avait été reçue en vertu de la procédure de rétroaction et de post‑évaluation. Il ne savait pas si elle avait été réglée. Il ne pouvait pas confirmer qu’aucune autre mesure n’avait été prise au 22 avril 2013. Il a convenu que, sur papier, il semblait que la fonctionnaire avait été informée de cette plainte lors de la réunion de recherche des faits de février 2015 seulement. Lors de cette réunion, le document qui lui a été communiqué au sujet de la plainte différait du courriel reçu par le Dr Dobson le 18 décembre 2014. M. Lisk a convenu que le texte était semblable, mais que la communication de décembre 2014 était nouvelle. Le courriel comportant la plainte envoyée au Dr Dobson le 18 décembre 2014 n’a pas été communiqué à la fonctionnaire lors de l’audience disciplinaire de février 2015. En fin de compte, M. Lisk a convenu que la réunion de recherche des faits avait permis de conclure qu’elle n’avait pas induit la cliente en erreur.

[168] En contre‑interrogatoire, le Dr Dobson a déclaré que la plainte reçue en avril 2013 découlait d’un rapport d’évaluation postérieur au projet. La société I a fourni son évaluation, qui a ensuite été acheminée au bureau national. La cliente a confirmé que la fonctionnaire avait dit que le dirigeant était [traduction] « cupide ». Le Dr Dobson a confirmé qu’il avait fait un suivi à l’égard de cette plainte le 22 avril 2013 et que la fonctionnaire n’avait fait l’objet d’aucune mesure disciplinaire à son égard.

[169] La fonctionnaire a cité Glen McDougall à témoigner pour son compte. À la date de son témoignage, il était l’associé directeur de Doyle Tech Corporation. Il s’agit d’une entreprise de consultations en matière de technologie de pointe qui offre différents services et qui a un bon nombre d’interactions avec plusieurs ministères du gouvernement du Canada. L’entreprise offre des services de consultation et de mentorat, des conseils et de l’orientation et communique avec le PARI pour offrir de l’appui. M. McDougall a expliqué qu’au cours des 20 dernières années, Doyle Tech a eu un nombre considérable d’interactions avec les CTI au CNRC. Il a travaillé étroitement avec plusieurs CTI et mis en oeuvre un grand nombre de plans stratégiques. L’entreprise bénéficiait d’une extrêmement bonne réputation auprès du gouvernement fédéral. Les cadres de l’entreprise participaient activement au conseil d’administration du CNRC. En raison de cette situation, le CNRC a une excellente réputation après de l’entreprise.

[170] M. McDougall a rencontré la fonctionnaire à un événement de l’industrie auquel son entreprise participait. Lorsqu’il a discuté avec la fonctionnaire, il a constaté qu’ils avaient de nombreuses choses en commun. À ce moment‑là, il a amorcé des discussions avec elle et a établi une relation professionnelle avec elle. À la date de son témoignage, il communiquait toujours avec elle sur le plan professionnel.

[171] M. McDougall a discuté de la plainte d’avril 2013 avec M. Lisk. Il connaissait bien le dirigeant de la société I. Il avait rencontré le plaignant à un événement de l’industrie. La fonctionnaire l’a présenté à la société I. Il a expliqué que Doyle Tech est devenu un conseiller de la société I et, pendant plusieurs années, un membre du conseil. M. McDougall a proposé au dirigeant de la société I qu’il devait effectuer une introspection et l’a encouragé à examiner les choses selon un autre point de vue. À la suite des critiques de M. McDougall à son égard, le dirigeant a décidé que M. McDougall ne convenait plus à titre de conseiller. Pendant la période où il a interagi avec la société I, la fonctionnaire s’est efforcée de faire tout ce qu’elle pouvait pour l’aider, mais ça n’était jamais suffisant. La société I était axée exclusivement sur l’obtention de fonds du PARI et non sur son entreprise, pas autant qu’il aurait dû l’être.

[172] Mme Lowder a expliqué que le PARI-CNRC comporte des procédures de rétroaction et de plainte datées de décembre 2012, qui sont intégrées dans le Guide de service des CTI. Bon nombre de CTI n’étaient même pas au courant de l’existence de ces procédures. Il s’agit d’un processus destiné aux clients dans le cadre duquel les clients peuvent déposer une plainte auprès du président du CNRC. La plainte est ensuite acheminée au directeur aux fins de traitement. Le CTI qui fait l’objet de la plainte achemine ensuite tous les courriels et les renseignements pour justifier ses actes dans la demande. Habituellement, le directeur appuie le CTI relativement à sa décision et celle de l’équipe de ne pas recommander un projet aux fins de financement. Elle a expliqué que, à l’heure actuelle, ce processus est utilisé comme un bâton contre les collègues des CTI, afin de permettre aux demandeurs de choisir un CTI. Parfois, les demandeurs entendent ce qu’ils souhaitent entendre et ils ne comprennent pas pourquoi leur demande n’est pas approuvée aux fins de financement. Parfois, les demandeurs ne comprennent tout simplement pas le processus et ils déposent alors des plaintes. Le directeur participe habituellement au processus et communique avec le client pour discuter du problème et pour obtenir de plus amples renseignements. Mme Lowder a déclaré que la plupart des CTI ne sont pas au courant de ce processus et que, selon son expérience, le CNRC n’a commencé à former le personnel de CTI à l’égard de ce processus que plus de sept ans après son adoption.

[173] M. Lisk a mentionné qu’une autre entreprise avec laquelle la fonctionnaire avait travaillé pendant plusieurs années consécutives sur plusieurs projets avait déposé une plainte contre elle. Dans cette affaire, la fonctionnaire avait conclu que l’entreprise ne réalisait pas de résultats commerciaux grâce au financement. En fin de compte, on lui a demandé de continuer de manière indépendante. Une décision a été prise en fonction de la recommandation de la fonctionnaire selon laquelle le PARI ne fournirait plus de fonds à l’entreprise. M. Lisk a convenu qu’il est juste qu’un CTI ait de telles discussions avec une entreprise et de déterminer qu’elle n’a réalisé aucun progrès dans le cadre de ses plans. Toutefois, une bonne pratique aurait été de communiquer ces renseignements au directeur avant d’informer l’entreprise de la décision du PARI de mettre fin à sa collaboration. Il s’agissait d’un mauvais traitement d’un dossier et non d’induire l’entreprise en erreur.

[174] En contre‑interrogatoire, M. Lisk a confirmé qu’il n’avait pris aucune note pendant les entrevues disciplinaires et qu’il s’était fié à ce que Mme Pereira les prenne.

G. Réunion disciplinaire et de recherche des faits du 13 février 2015

[175] Le 6 février 2015, M. Lisk a rédigé une autre lettre à l’intention de la fonctionnaire intitulée [traduction] « Audience disciplinaire ». Il l’a informé que la réunion avait pour but de discuter de la gestion de certains de ses anciens dossiers, à l’égard desquels les demandeurs avaient déposé des plaintes. Les clients alléguaient qu’elle avait fourni des renseignements déroutants et contradictoires et qu’elle n’avait pas fourni les conseils requis. La réunion avait pour but de lui donner l’occasion d’entendre et de comprendre les plaintes déposées contre elle et d’y répondre, ainsi que de recueillir des renseignements qui permettraient de déterminer si les allégations d’inconduite étaient justifiées. En raison de l’enquête découlant de la société P, et selon les faits, la lettre mentionnait qu’une mesure disciplinaire pouvait être prise. Mme Pereira serait présente.

[176] M. Lisk a expliqué que la réunion disciplinaire du 13 février 2015 avait commencé par la remise en question de l’enquête par la représentante de la fonctionnaire. Au début, la fonctionnaire a présenté des renseignements concernant la plainte initiale, plus précisément au sujet du comportement de M. et Mme McArthur pendant le processus de demande. Elle a indiqué que le nouveau CTI éprouvait des difficultés à leur faire remplir l’entente de contribution et que c’est la raison pour laquelle celle-ci n’a été approuvée qu’en décembre 2014. Encore une fois, la fonctionnaire a répété qu’il était difficile de traiter avec M. et Mme McArthur et qu’ils ne fournissaient pas les renseignements requis pour remplir l’entente de contribution. La fonctionnaire a soutenu que les chèques fournis par M. et Mme McArthur ne correspondaient pas aux factures et aux demandes de remboursement. La conversation ne s’est pas bien déroulée entre M. et Mme McArthur et leur nouveau CTI. Le nouveau CTI ne voulait plus travailler avec eux, parce qu’ils étaient des menteurs. Le nouveau CTI a signé la demande de remboursement, mais le Dr Dobson a envoyé un courriel indiquant que si la société P faisait l’objet d’un audit, le PARI n’assumerait pas la responsabilité de la demande de remboursement.

[177] Mme Pereira a témoigné que le même processus avait été suivi lors de cette réunion et lors de la réunion disciplinaire qui a eu lieu auparavant. Les questions ont été élaborées au préalable avec M. Lisk. Il posait une question et elle consignait les réponses de la fonctionnaire. Elle ne consignait pas la question avant de consigner les réponses. Si elle consignait une question dans ses notes, c’était parce que M. Lisk l’avait répété ou avait posé une question de suivi. La fonctionnaire et Chloe Charbonneau‑Jobin, sa représentante syndicale, étaient présentes. La représentante syndicale avait des questions au sujet du processus parce que la fonctionnaire n’avait pas accès à ses documents. Elle a demandé si la fonctionnaire serait autorisée à présenter des renseignements après la réunion si elle n’était pas en mesure de répondre à une question. Elle a déclaré qu’une audience disciplinaire était tenue pour imposer une mesure disciplinaire. Dans cette affaire, aucune enquête sur une inconduite n’avait été effectuée. Elle a soutenu que l’employeur ne pouvait imposer aucune mesure disciplinaire à un employé des années après l’événement. Elle a également fait valoir que les questions soulevées par l’employeur étaient liées au rendement et non à la discipline.

[178] La fonctionnaire a témoigné que la plainte déposée par la société M en décembre 2014 ne lui avait jamais été présentée. La plainte déposée par la société I en avril 2013 ne lui a jamais été montrée non plus, ni le document figurant aux pages 195 et 196 du recueil de pièces de l’employeur. Après l’audience disciplinaire, elle a reçu un courriel de Mme Pereira daté du 9 février 2015, qui contenait ce qui semblait être une plainte de la société I de 2013. Elle a expliqué que, d’une part, M. Lisk tenait un dossier de promotion qu’elle avait préparée et, d’autre part, un courriel de la société I. M. Lisk a refusé sa demande de promotion antérieure. Les pages 197 et 198 du recueil de pièces de l’employeur ne lui ont pas été présentées. Elle n’a jamais fait l’objet d’une mesure disciplinaire relativement à cette plainte et elle n’a jamais reçu une rétroaction négative.

H. Le rapport d’enquête découlant de la plainte déposée par la société P

  • [179] Mme Pereira a témoigné qu’elle avait produit le rapport d’enquête à la suite de discussions avec la fonctionnaire et après avoir reçu les échéanciers des clients qui se sont plaints. Une liste des personnes et des documents qui ont été utilisés pour rédiger le rapport figure à la page 200 du rapport d’enquête. Mme Pereira a déclaré que ces personnes n’avaient pas été interrogées séparément. Il s’agit d’un résumé du dossier. Il a été élaboré à la suite de la première audience disciplinaire et de recherche des faits tenue avec la fonctionnaire. Les commentaires de la fonctionnaire sur les documents joints et les courriels ont été obtenus lors des réunions de recherche des faits.

[180] La fonctionnaire a témoigné que, avant son licenciement, aucune copie du rapport ne lui a été donnée et elle n’a pas non plus eu l’occasion de fournir ses commentaires à son sujet.

[181] En contre‑interrogatoire, Mme Pereira a affirmé qu’elle était la responsable des Ressources humaines chargée du dossier. Il ne comportait aucun enregistrement vocal et M. Lisk n’a pris aucune note. Il se peut qu’il ait griffonné des questions, mais rien de plus. Elle a rédigé le rapport d’enquête. On devait offrir à la fonctionnaire la possibilité de fournir des commentaires sur le rapport, ce qui ne lui a pas été communiqué. Seuls les renseignements qui en faisaient partie lui ont été communiqués, mais pas le rapport en soi. Selon le souvenir de Mme Pereira, il s’agissait de documents que la fonctionnaire avait apportés aux réunions ou des éléments qui ont été portés à son attention.

[182] De nouveau en contre‑interrogatoire, Mme Pereira a déclaré qu’elle n’avait pas participé aux entrevues avec les clients qui avaient déposé les plaintes contre la fonctionnaire. Par conséquent, elle n’avait pas de notes. Le contenu de ces conversations ne figure que dans le rapport. Elle ne se souvenait pas quels documents avaient été présentés à la fonctionnaire lors des réunions disciplinaires et de recherche des faits. Elle ne savait pas si le contenu de ces entrevues avait été communiqué à la fonctionnaire ou si M. Lisk avait simplement posé des questions.

[183] Encore une fois, en contre‑interrogatoire, Mme Pereira a été renvoyée à la page 200 du rapport d’enquête, qui fait référence à la plainte de la société M en décembre 2014. Elle a affirmé qu’il y avait une plainte, sous forme d’un courriel ou d’une lettre adressée à M. Lisk ou qui aurait pu être présentée au moyen du numéro 1-800 du CNRC. Il s’agit des deux façons dont le Dr Dobson aurait pris connaissance de la plainte. La représentante de la fonctionnaire a déclaré que la fonctionnaire témoignerait qu’aucune plainte, autre qu’une plainte concernant des problèmes de communication qu’elle avait portée à l’attention du directeur, ne lui avait été montrée.

[184] De nouveau en contre‑interrogatoire, Mme Pereira a déclaré que le rapport sur la recherche des faits était composé d’une analyse des renseignements qui figuraient dans les dossiers du CNRC et de M. Lisk et ne consistaient qu’en ce qu’ils avaient recueilli. Le rapport faisait partie des documents qui constituaient le fondement de la trousse du décideur. Elle ne pouvait pas confirmer si la plainte déposée par la société P avait été présentée à la fonctionnaire. Elle ne pouvait pas confirmer si la chronologie de Mme McArthur avait été communiquée à la fonctionnaire. Elle a rédigé le rapport d’enquête à l’aide des notes que M. Lisk avait pris lors de ses discussions avec les clients. M. Lisk tentait de déterminer s’il devrait enquêter en raison du commentaire inflammatoire selon lequel le [traduction] « PARI n’est pas une banque ». M. Lisk lui aurait fait part de ses notes. Ces notes n’ont pas été communiquées à la fonctionnaire; Mme Pereira ne les a ni conservées ni détruites.

[185] De nouveau en contre‑interrogatoire, on a renvoyé Mme Pereira au paragraphe 1 de la page 202 du rapport, plus particulièrement à la phrase : [traduction] « Selon la cliente, la CTI l’a informé lors de la réunion qu’une somme de 50 000 $ avait été réservée aux fins du projet, la cliente n’a qu’à apporter quelques modifications à la demande, un plus grand nombre de verbes d’action est nécessaire. » Elle a déclaré qu’elle n’était pas présente à cette entrevue. Elle a été tirée de quelque part, de certaines notes ou d’un courriel qu’elle avait vu.

[186] La représentante de la fonctionnaire a renvoyé Mme Pereira à la page 163 de ses notes de la réunion disciplinaire et de recherche des faits du 4 décembre 2014. Elle a déclaré qu’elles n’indiquent nulle part que Mme Pereira avait informé la fonctionnaire qu’elle aurait informé la cliente qu’elle avait réservé la somme de 50 000 $ aux fins du projet. Mme Pereira a convenu que ce fait ne figurait pas dans ses notes, mais elle a affirmé qu’elle croyait qu’une question avait été posée au sujet d’une somme de 50 000 $. Cette information a été tirée de quelque part, mais elle ne savait pas d’où. Aucune question de suivi à l’égard de l’énoncé que la cliente aurait fait ne figure dans ses notes.

[187] La représentante de la fonctionnaire a renvoyé Mme Pereira au paragraphe 4 de la page 202 du rapport d’enquête, qui fait référence à la discussion que la fonctionnaire avait eue avec un autre CTI au sujet de la société P. Mme Pereira a convenu qu’il n’en avait pas été question lors de la réunion de recherche des faits et qu’aucune question n’avait été posée à cet égard.

[188] Mme Pereira était d’accord avec la représentante de la fonctionnaire que le rapport sur la recherche des faits n’avait pas été communiqué à la fonctionnaire et qu’elle n’avait pas eu la possibilité de formuler des commentaires à son égard. Selon sa compréhension, la fonctionnaire avait vu tous les documents sur lesquels le rapport était fondé. Le rapport a enfin été fourni à Bogdan Ciobanu, le vice‑président du PARI et décideur, et à M. Lisk. Elle a également convenu que les sommes des ententes de contribution n’avaient pas fait l’objet de discussions précises avec la fonctionnaire. Des questions ont été posées, mais il n’y avait aucune note sur les réponses. Les questions ont été préparées avant la réunion, mais elles n’ont pas toutes été posées. M. Lisk choisissait parfois d’ignorer une question et de passer à une autre parce que la fonctionnaire y avait déjà répondu ou parce qu’il existait déjà une quantité suffisante de renseignements.

[189] La représentante de la fonctionnaire a renvoyé Mme Pereira à la page 204 du rapport d’enquête. Mme Pereira a convenu qu’il n’était pas indiqué que la fonctionnaire avait averti la direction qu’une plainte serait déposée contre elle en décembre 2014. La représentante de la fonctionnaire a laissé entendre que cela était trompeur. Mme Pereira n’a pas répondu.

[190] De nouveau en contre‑interrogatoire, Mme Pereira a convenu qu’à la page 206 du rapport, il n’était pas indiqué que le Dr Dobson avait traité la plainte en avril 2013 et qu’aucune autre mesure n’était nécessaire de la part du CNRC. Elle a convenu que la représentante syndicale à l’époque avait allégué que la plainte d’avril 2013 avait été manipulée en raison du fait qu’elle avait été tirée de SONAR. Son courriel daté du 9 février 2015, à 15 h 41, à l’intention de Mme Charbonneau‑Jobin contenait l’originale de la plainte du mois de décembre 2014 reçue le 10 avril 2013. Elle a convenu qu’il s’agissait de différentes plaintes.

[191] En contre‑interrogatoire, M. Lisk a reconnu que les pages manquantes du rapport d’enquêtes étaient ses notes et qu’elles constituaient ses modifications au rapport. Ces pages ont été retenues de la divulgation en vertu du par. 12(1) de la Loi sur la protection des renseignements personnels (L.R.C. (1985), ch. P‑21). Il a reconnu que la fonctionnaire avait été licenciée suivant sa recommandation. Le rapport d’enquête appuyait sa recommandation de licencier la fonctionnaire. Mme Pereira a convenu que la plainte présentée à la fonctionnaire n’était pas celle mentionnée dans le rapport d’enquête.

[192] M. Lisk ne savait pas si la fonctionnaire avait eu la possibilité de formuler des commentaires sur le rapport d’enquête avant son licenciement. En contre‑interrogatoire, le Dr Dobson a déclaré qu’il ne connaissait ni le [traduction] « Manuel des ressources humaines » ni les politiques du CNRC sur les mesures disciplinaires.

I. La décision de licencier la fonctionnaire s’estimant lésée

[193] M. Lisk a témoigné que le fait qu’un employé du PARI demande à un demandeur de présenter quelque chose par écrit qui n’est pas vrai afin d’obtenir un financement constitue une faute grave. Qui plus est, il s’agit d’une inconduite grave lorsque l’employé tient des propos contradictoires et affirme l’avoir fait pour ensuite le nier et blâmer le demandeur. Étant donné qu’il n’y a aucune indication de l’acceptation de sa responsabilité et que la fonctionnaire a blâmé le demandeur, celui-ci a perdu confiance dans la capacité de la fonctionnaire d’interagir de manière appropriée avec les demandeurs. Dans l’ensemble, il a conclu que les clients étaient plus crédibles que la fonctionnaire. Après avoir tenu compte de tous les renseignements, il n’avait d’autre choix que de recommander son licenciement.

[194] L’employeur a cité à témoigner M. Ciobanu. M. Ciobanu a signé la lettre de licenciement. Il était chargé de l’ensemble du PARI. Il connaissait la fonctionnaire avant sa participation à cette affaire. Il avait eu un contact avec elle pendant les réunions régionales. Il y avait environ 400 employés à ce moment‑là. Il a pris sa retraite en décembre 2016. Il a lu le dossier et a rencontré les représentants des Ressources humaines et l’équipe de direction à maintes reprises. Selon les éléments de preuve et les recommandations de la direction, sa compréhension et l’analyse du dossier, il a pris la décision de licencier la fonctionnaire.

[195] M. Ciobanu a témoigné qu’il ne pouvait pas envisager une mesure disciplinaire moins sévère en raison de la gravité des actes de la fonctionnaire indiqués dans la première plainte qui a été déposée en octobre 2014. Le fait qu’elle ait conseillé à un client de mentir et, essentiellement, de frauder le gouvernement en facturant un montant supérieur pour un projet par rapport au montant que le client devait recevoir constitue une inconduite grave et un comportement inacceptable de la part d’un CTI.

[196] À l’époque, le PARI était un programme d’une valeur de 350 millions de dollars. Les CTI avaient une responsabilité importante d’investir dans les entreprises les plus prometteuses au pays, de trouver les meilleures possibilités d’investir et de déterminer le bon montant à investir. Son comportement était inacceptable et, en outre, la fonctionnaire n’a montré aucun remords. Le lien de confiance a été rompu de façon permanente et ne pouvait être rétabli.

[197] M. Ciobanu a ensuite expliqué qu’en plus de cette inconduite grave, il existait d’autres préoccupations concernant la gestion d’autres dossiers. Des plaintes avaient été déposées par d’autres clients. Ces plaintes ont été analysées et ont fait l’objet d’une enquête par la direction régionale. Elles ont démontré des lacunes dans les dossiers, que les clients étaient insatisfaits et que l’image et la réputation du programme étaient ternies. À son avis, la plainte d’octobre 2014 déposée par la société P constituait un motif suffisant pour mettre fin à l’emploi de la fonctionnaire. Elle a été licenciée pour avoir violé le Code de conduite du CNRC.

[198] M. Lisk a expliqué que tous les membres du personnel avaient suivi une formation obligatoire sur le nouveau « Code de conduite » (le « Code ») du PARI-CNRC. La formation avait pour but de rappeler aux employés et aux CTI de tenir compte de leurs obligations et de leurs responsabilités en vertu du Code dans la recommandation d’ententes de contribution, en vertu desquelles des montants sont versés directement à une entreprise. La formation portait également sur les processus d’accès à l’information et de protection des renseignements personnels (AIPRP) et sur la façon de traiter avec les entrepreneurs, ainsi que sur la rédaction de propositions pour les clients. La fonctionnaire a suivi cette formation le 6 mars 2014.

[199] En contre‑interrogatoire, M. Ciobanu a déclaré qu’il savait que la fonctionnaire n’avait fait l’objet d’aucune mesure disciplinaire antérieure. Il avait examiné plusieurs documents, le rapport sur la recherche des faits et les notes des réunions avec les Ressources humaines et la direction. Il ne savait pas que la fonctionnaire n’avait pas été autorisée à examiner le rapport sur la recherche des faits, mais il était certain que la procédure du CNRC avait été suivie. La représentante de la fonctionnaire a déclaré que la fonctionnaire témoignerait qu’elle n’avait pas été autorisée à répondre à tous les renseignements figurant dans le rapport. M. Ciobanu n’a pas répondu.

[200] De nouveau en contre‑interrogatoire, M. Ciobanu a convenu que les plaintes mentionnées dans la lettre de licenciement concernant les lacunes dans sa gestion de ces dossiers avaient été traitées avec la fonctionnaire. Il ne savait pas que ces plaintes remontaient à plus de deux ans et qu’elles n’avaient pas été traitées avec elle en temps opportun. La plainte d’avril 2013 n’a pas été communiquée à la fonctionnaire lors de la réunion de recherche des faits en février 2015. Il ne savait pas comment ces plaintes avaient été traitées par la direction. Il savait que lorsque l’on traite d’allégations graves, comme celles concernant la plainte d’octobre 2014, la direction examine une vaste gamme d’activités. Il ne savait pas quelles mesures la direction avait prises relativement à la politique du CNRC sur les principes de discipline en ce qui a trait à la plainte d’avril 2013.

[201] En contre‑interrogatoire, M. Lisk a reconnu que la fonctionnaire n’avait aucun dossier disciplinaire antérieur. Il s’est également rappelé que son rendement, sur la recommandation du Dr Dobson, répondait aux critères de l’Engagement envers l’excellence (EEE). Il était chargé de tous les EEE des membres du personnel qui relevaient de lui, conformément aux recommandations des directeurs qui relevaient de lui.

[202] M. Lisk ne pouvait pas nier que la fonctionnaire avait obtenu une cote de [traduction] « dépasse les attentes » pour son engagement à contribuer à la mission et aux priorités opérationnelles du CNRC lors de son évaluation du rendement pour la période du 1er avril 2012 au 31 mars 2013. Il a également reconnu qu’elle dépassait les attentes en traitant un nombre plus élevé de projets que ce qui était attendu d’elle. L’EEE de cette année‑là mentionne, [traduction] « Il s’agit de la preuve de la carrière reconnue et distinguée de Liza, ce qui a une incidence admirable sur les principaux talents du CNRC. » Elle a obtenu le titre de membre associé de l’Institut royal d’architecture du Canada, soit un prix pour l’ensemble de ses réalisations. Cet honneur lui a été donné en reconnaissance de ses activités bénévoles constantes, de son travail en tant qu’architecte praticienne et, plus important encore, sa carrière remarquable au PARI au cours des 20 années précédentes.

[203] Dans l’entente de rendement concernant l’EEE pour l’exercice d’avril 2013 à avril 2014, ses superviseurs lui ont accordé la cote de [traduction] « dépasse les attentes » pour son engagement à contribuer à la mission et aux priorités opérationnelles du CNRC. Il n’y avait aucune mention de lacunes concernant la gestion de ses dossiers. Elle ne comportait aucune rétroaction négative ni aucune mention de la plainte déposée par la société I. Elle ne mentionnait pas non plus la nécessité d’améliorer les relations avec la clientèle.

[204] De nouveau en contre‑interrogatoire, M. Lisk a reconnu avoir reçu les lettres de remerciements de différents clients en 2013 et en 2015 concernant le traitement de leurs projets par la fonctionnaire. Il ne pouvait pas nier que les lettres témoignent de l’aide précieuse qu’elle offrait dans le cadre du processus de demande et d’établissement de rapports, ainsi que son attention et son dévouement. Dans sa réponse, M. Lisk s’est assuré de souligner le fait que le Dr Dobson n’avait formulé aucun commentaire sur l’EEE de la fonctionnaire.

[205] En réinterrogatoire, M. Lisk a indiqué qu’une situation où l’on demande à un client de falsifier des renseignements est troublante. La fonctionnaire a toujours répondu aux attentes et, dans certains cas, elle les a dépassés. Cela l’a surpris. Les lettres de remerciements qui ont été reçues après la plainte n’ont pas été prises en compte dans le cadre du processus parce qu’elles ne témoignaient pas des questions dont il était saisi.

[206] M. McDougall a estimé que la fonctionnaire avait des connaissances approfondies. Son incidence sur sa société était inestimable; elle était une très bonne personne‑ressource et elle a fourni des conseils essentiels à la société et à ses clients. Dans le cadre de toutes ses interactions commerciales, il a estimé qu’elle avait une excellente éthique de travail. Il traite avec un grand nombre de CTI e, selon lui, elle était l’une des meilleures CTI du PARI. Il n’a jamais pensé de remettre en question son intégrité; son comportement était toujours irréprochable. Elle a toujours fait un effort supplémentaire, peu importe si elle travaillait directement ou indirectement aux fins du PARI.

[207] Il a discuté avec M. Lisk du licenciement de la fonctionnaire. Il était bouleversé et abasourdi. Il a dit à la fonctionnaire de lui faire signe s’il pouvait l’aider, parce que c’était la bonne chose à faire. Il a déclaré qu’il avait dit les mêmes choses à M. Lisk qu’il a dit dans son témoignage à l’égard de la fonctionnaire. M. Lisk a discuté de la fonctionnaire et de son travail avec lui. M. McDougall a informé M. Lisk que la conduite de la fonctionnaire était irréprochable et qu’elle était l’une des meilleurs CTI avec lesquels il avait travaillé. À son avis, son licenciement n’était pas logique.

[208] M. Palmer a témoigné qu’il était membre du groupe d’experts qui avait embauché la fonctionnaire et qu’il la connaissait depuis de 20 à 25 ans. Il la connaissait lorsqu’il l’a interviewé. À titre de superviseur principal des CTI et de mentor, et ensuite de directeur de la fonctionnaire, il transférait souvent à cette dernière des clients parce qu’il aimait son approche et la façon dont elle établissait des relations avec les clients et sa capacité de gérer une charge importante de clients était impressionnante. Il avait une impression positive à son égard et il était impressionné par la façon dont elle gérait les clients.

[209] La fonctionnaire a témoigné qu’elle s’était reportée au Dr Dobson pendant environ six ou sept ans. Sa relation avec le Dr Dobson était, en général, bonne. Il était parfois difficile de le joindre parce qu’il était occupé. Il était responsable du développement international, en plus de la région de l’Ontario du CNRC. Il voyageait souvent et il était difficile d’avoir des retours d’appel de sa part, ce qui était un peu frustrant. Autrement, ils s’entendaient.

[210] La fonctionnaire a passé en revue ses évaluations du rendement d’avril 2010 à 2011 et de 2012 à 2013. En général, ses évaluations du rendement étaient entièrement satisfaisantes. Au cours de certaines années, elle a doublé le nombre de projets sur lesquels elle a travaillé. Dans l’évaluation du rendement de 2012 à 2013, elle avait dépassé considérablement les attentes. Elle a été honorée cette année‑là et est devenue membre associée de l’Institut royal d’architecture du Canada. Elle a reçu un prix pour l’ensemble de ses réalisations et un livre a été rédigé. Selon la fonctionnaire, elle était parmi les premiers 10 % des talents au CNRC.

[211] Dans l’évaluation du rendement d’avril 2013 à avril 2014, elle atteint toutes les attentes. Elle avait dépassé ses produits livrables au titre de projets, étant donné qu’elle avait trouvé environ 30 nouveaux clients pour cette année‑là. Aucune plainte officielle n’avait été déposée contre elle cette année‑là. Elle a reçu plusieurs lettres de remerciements et des commentaires positifs de la part des clients. Elle a également reçu de telles lettres en 2014. Avant son licenciement, elle n’avait jamais fait l’objet d’une mesure disciplinaire de la part de son employeur.

[212] Même si elle a été retirée du dossier de demande au PARI de la société P en novembre 2014, elle est demeurée une CTI et a continué à travailler avec d’autres clients jusqu’à son licenciement en mars 2015. La fonctionnaire a témoigné qu’aucune condition ne lui avait été imposée entre la date de la plainte et son licenciement.

[213] La fonctionnaire a témoigné qu’elle convenait qu’elle aurait pu faire preuve d’une meilleure communication avec ces clients et qu’elle a tiré la leçon de ses erreurs. Elle a reconnu que la communication constituait un problème et qu’elle aurait pu mieux communiquer avec M. et Mme McArthur afin de faire approuver le projet. Elle a reconnu qu’elle aurait pu s’asseoir avec eux et les aider à rédiger la proposition et qu’elle aurait dû faire un suivi à l’aide de courriels plus longs, de détails plus succincts et des listes de tâches, et qu’elle aurait pu les rencontrer plus souvent. En outre, il aurait été préférable qu’elle insiste sur un seul point de contact, afin d’éviter la confusion. Cela aurait permis plus de clarté. Elle a reconnu que ses communications avec M. et Mme McArthur comportaient un manque considérable de clarté et que la communication est essentielle dans l’élaboration d’une entente de contribution et dans la gestion des attentes d’un client.

IV. Résumé de l’argumentation

[214] Les parties ont fourni leur plaidoirie finale au moyen d’arguments écrits. Voici un résumé de ces arguments.

A. Pour l’employeur

[215] L’employeur a soutenu que la fonctionnaire avait eu l’occasion de dire la vérité et de rétablir les faits, mais elle ne s’est pas prévalue de cette occasion. Elle a menti et a n’a manifesté aucun remords pendant l’enquête, ce qui constituait en soi un motif de licenciement.

[216] M. Lisk a témoigné que les CTI doivent être [traduction] « irréprochables », car ils sont les représentants du gouvernement du Canada dans la collectivité; ils suivent un encadrement, un perfectionnement et ils exercent ensuite leurs fonctions de façon autonome; ils ne voient pas nécessairement leurs directeurs chaque semaine. Il a témoigné que le Guide de service est fourni à tous les CTI au cours de leur première semaine d’emploi, ce qui est central à leur travail. Mme Lowder, qui a témoigné pour la fonctionnaire, a indiqué que le Guide de service des CTI est comme leur bible.

[217] Le document de formulaire de proposition normalisé créé par le PARI-CNRC comprend l’énoncé suivant : [traduction] « La présentation de renseignements faux ou trompeurs constitue un motif de résiliation immédiate de la présente proposition. » Le Guide de service établit les points suivants :

[Traduction]

  • La relation avec le client est gérée par le CTI.
  • La clé du succès est l’intégrité et la transparence et, conformément au Code, un CTI doit être prêt à dire « Non ».
  • Toute incertitude quant à l’admissibilité à une contribution ou à un soutien devrait être discutée avec le directeur du CTI et, le cas échéant, renvoyée au directeur exécutif.
  • L’entente de contribution constitue un document juridique entre le CNRC et l’entreprise qui décrit les obligations de chaque partie et la condition de paiement dans le contexte d’un projet approuvé particulier.
  • Aux dates clés prévues dans l’entente de contribution : une entente de contribution est en vigueur à compter du premier jour de l’étape de projet jusqu’à la fin de l’étape postérieure au projet. Les dates clés prévues dans l’entente de contribution précisent la date à laquelle l’entreprise peut commencer à engager des coûts admissibles au soutien et la date de début du projet (début de l’étape du projet). Les coûts engagés avant ou après l’étape de projet ne sont pas admissibles au soutien.
  • Il faut rappeler à l’entreprise qu’elle doit assumer la responsabilité de tous les coûts engagés avant la signature de l’entente dans l’éventualité où la proposition ou la dépense soit rejetée ou annulée, même si ces coûts ont été engagés entre les dates de l’étape du projet proposé.
  • Même si l’approbation est accordée au niveau du directeur, la recommandation du CTI responsable découle du processus de diligence raisonnable et tient compte de tous les renseignements accumulés et évalués avant la présentation de l’entente de contribution aux fins d’approbation. Le CTI responsable doit formuler une recommandation explicite et franche quant à la raison pour laquelle, selon le meilleur avis professionnel du CTI, un soutien financier par le PARI CNRC est justifié.
  • Le CTI responsable doit veiller à ce que tous les critères liés à l’admissibilité d’une entreprise à une contribution financière soient satisfaits. Si une entreprise ne satisfait pas aux critères d’admissibilité, ce fait doit être énoncé expressément et une justification d’un soutien doit être fournie.

[218] Le Code déclare que les employés doivent, en tout temps, agir de manière qui préserve la bonne réputation du PARI-CNRC et exercer les activités du CNRC d’une manière irréprochable, éthique et avec intégrité.

[219] M. Lisk a témoigné que même si une société peut avoir un projet important en cours, des parties de ce projet sont discrètes et peuvent faire l’objet d’un soutien indépendant en tant que projet du PARI.

[220] M. et Mme McArthur ont témoigné qu’ils avaient communiqué avec la fonctionnaire pour la première fois en juin 2013, en vue d’examiner une entente de contribution avec le PARI.

[221] À la fin de 2013, des efforts ont été déployés pour soumettre une proposition. La première demande a été envoyée le 22 novembre 2013. En fin de compte, le programme n’avait plus de fonds et le programme et la proposition ont dû attendre l’année suivante.

[222] Les communications entre la société P et la fonctionnaire ont repris en janvier 2014. Des documents ont été présentés et la fonctionnaire a fourni une orientation, y compris l’indication d’une date de début tardive du 1er juillet 2014.

[223] M. et Mme McArthur ont témoigné que le 16 juin 2014, la fonctionnaire leur a dit qu’une somme de 50 000 $ avait été réservée pour leur projet. Dans un document intitulé [traduction] « Modèle de proposition pour les petits projets », daté du 26 juin 2014, la date de début prévue du projet était le 2 juillet 2014.

[224] M. Lisk a témoigné au sujet de la cyberattaque des réseaux du CNRC le 28 ou le 30 juillet 2014. Les documents déposés à l’audience indiquent le 7 août 2014. Au 26 août 2014, la fonctionnaire fournissait de nouveau des conseils à la société P au sujet de sa proposition. M. McArthur a témoigné que la cyberattaque n’avait eu aucune incidence sur le début du projet.

[225] Dans un courriel en date du 26 août 2014, la fonctionnaire a confirmé sa compréhension que le PARI ne couvrait que les projets qui n’étaient pas commencés. M. Lisk a témoigné qu’il s’agissait d’une confirmation qu’elle comprenait les règles. Il a ajouté qu’il était déconcertant qu’elle ait ensuite pu demander au client de préciser une autre date de début.

[226] M. et Mme McArthur ont témoigné que la fonctionnaire avait discuté avec M. McArthur le 15 septembre 2014, et qu’elle avait demandé à la société P de modifier la date de début dans sa demande, passant du 1er juillet au 1er octobre, ce que la société a fait. M. et Mme McArthur ont témoigné clairement et de manière convaincante au sujet de la conversation qui a eu lieu le 15 octobre, et les deux étaient convaincus en contre‑interrogatoire que cette conversation avait eu lieu.

[227] Aucun des témoins n’avait un motif évident à mentir. En témoignant honnêtement, ils devaient divulguer le fait indésirable qu’ils ont présenté un document falsifié à un tribunal qui publiera une décision qui sera à la disposition du public.

[228] Dans leur témoignage, M. et Mme McArthur ont mentionné une entente initiale conclue avec un entrepreneur, dont la date de début était le 2 juillet 2014 et la date de fin le 17 octobre 2014. Ils ont également mentionné la même entente, conformément à la demande de la fonctionnaire, dont la date de début était le 1er octobre 2014 et la date de fin le 31 janvier 2015.

[229] M. et Mme McArthur ont témoigné que peu de temps après avoir soumis les documents modifiés, ils ont eu une remise en question. Ils ont écrit à la fonctionnaire le 23 septembre 2014, indiquant qu’ils étaient en mode de crise, que le projet avait en fait commencé en juillet, et que si ce fait les rendait inadmissibles au financement, cela serait correct.

[230] Dans l’entente de contribution, dont la valeur était de 40 000 $ et qui a été signée par le CNRC le 20 octobre 2014, la date de début du projet indiqué est le 1er septembre 2014.

[231] Une deuxième version de ce document a été signée par le CNRC le 21 octobre 2014, dont la date de début du projet est indiquée être le 1er août 2014.

[232] M. Lisk a témoigné qu’une date de début de projet peut être la date à laquelle un projet acceptable est présenté dans des circonstances comme la cyberattaque, en raison de laquelle le CNRC a dû éteindre tous ses ordinateurs pendant des semaines. Le projet est resté dans les limbes afin que la société ne subisse pas un désavantage.

[233] M. Lisk a témoigné que ce que la fonctionnaire a fait, cependant, consistait à demander à la société de modifier la date de début sur les documents. Il a déclaré qu’un tel énoncé falsifié n’était pas approprié et qu’un CTI qui encourage une société à agir ainsi constituait une erreur grave. À la question de savoir ce que la fonctionnaire aurait dû faire dans le contexte de la cyberattaque, M. Lisk a témoigné que [traduction] « Mme Medek aurait dû communiquer la situation à son directeur afin de trouver une solution et non dire à la société de présenter un faux document. »

[234] À la question de savoir pourquoi le PARI avait enfin signé l’entente de contribution comportant une date de début du 1er août 2014, M. Lisk a témoigné que le CNRC avait tardé à signer l’entente et qu’il ne souhaitait pas pénaliser la société pour les défis découlant de la cyberattaque. La partie du projet que le PARI appuierait avait commencé le 1er août 2014.

[235] Le Dr Dobson a témoigné avoir examiné les documents de la société P et que les travaux qui avaient commencé en juin ou en juillet 2014 étaient des travaux de consultation et le soutien au salaire de Mme McArthur. Il a témoigné qu’il avait constaté que des travaux avaient été exécutés sur le projet lorsque la société a dit qu’il n’existait pas assez de travaux de sous‑traitance pour utiliser la somme de 40 000 $ et [traduction] « qu’il existait une question au sujet de la date à laquelle ils seraient amorcés ».

[236] Le Dr Dobson a témoigné que l’entente de contribution comportant la date de début du 1er septembre était fondée sur des renseignements provenant de la fonctionnaire, selon lesquels cette date tenait compte des travaux qui devaient être exécutés, mais qui n’avaient pas été exécutés à ce stade. La deuxième entente de contribution a été signée et elle comportait une date de début du 1er août 2014 découlant des discussions avec le client et, en ses mots, [traduction] « pour tenir compte, dans la mesure dont j’étais disposé, des travaux à exécuter et non les travaux qui avaient été exécutés à ce stade. » En contre‑interrogatoire à ce sujet, il a indiqué : [traduction] « Il était difficile de l’abandonner en raison de tout ce qui s’était passé – n’importe quoi découlant de la cyberattaque qui nous permettrait de faire quelque chose en vue de régler au moins en partie l’insatisfaction de l’entreprise. »

[237] Lorsqu’elle a été contre‑interrogée au sujet des ententes de contribution et des deux dates de début, Mme McArthur a témoigné que le projet de la société P [traduction] « comptait différentes étapes que nous pouvions répartir; nous espérions que le PARI pourrait reculer davantage, mais le projet était effectué en étapes. Si nous remontions à juillet, nous aurions été admissibles à la totalité de la somme de 50 000 $. »

[238] Mme Lowder, qui a témoigné pour la fonctionnaire, a mentionné que [traduction] « nous déterminons ce que nous pouvons appuyer et ce que nous ne pouvons pas appuyer ».

[239] Le 23 octobre 2014, M. Lisk a reçu un appel téléphonique de la société P qui souhaitait se plaindre des conseils que la fonctionnaire lui avait donnés à cet égard.

[240] À la suite d’une demande du Dr Dobson, la fonctionnaire a fourni une chronologie de sa participation à ce dossier. Dans la partie concernant le 15 septembre, il n’y avait aucune mention des conseils concernant la modification de la date de début du projet. En réalité, le 26 août 2014, l’entrée donne à penser qu’elle a fourni des conseils contraires.

[241] Le 25 octobre 2014, la société P a déposé une plainte écrite auprès de M. Lisk. Le 1er décembre 2014, on a demandé à la fonctionnaire d’assister à la première réunion disciplinaire et de recherche des faits qui a eu lieu le 4 décembre 2014.

[242] La fonctionnaire a assisté à la réunion avec sa représentante syndicale. Au début, lorsqu’elle a fait part de sa version des événements et avant qu’elle n’ait vu la plainte écrite, on lui a demandé : [traduction] « Saviez‑vous quand le projet a commencé? » Elle a répondu : [traduction] « Le 15 septembre, le projet a été soumis, je savais que le projet avait commencé, elle avait eu une conversation avec Paul dans le cadre de laquelle il a dit qu’ils avaient commencé et elle lui a dit qu’ils ne pouvaient pas avoir commencé le projet parce qu’il ne serait pas visé par le PARI […] vous n’avez donc pas commencé le projet, n’est‑ce pas? » M. McArthur a dit : [traduction] « D’accord. » À ce stade, selon les témoignages de Mme Pereira et de M. Lisk, la fonctionnaire a regardé M. Lisk et a déclaré : [traduction] « cet énoncé m’attirera‑t‑il des ennuis? » Il a répondu : [traduction] « Il s’agit d’une conversation malheureuse ». À ce stade, la fonctionnaire et sa représentante syndicale ont pris une pause de 15 minutes. À la suite de la pause, la fonctionnaire a répondu à la question suivante : [traduction] « Le client a fait un énoncé selon lequel vous leur avez laissé entendre qu’ils devaient mentir quant à savoir s’ils avaient commencé leur projet et qu’ils devaient modifier la date de début à une date future du 1er octobre dans leur demande afin d’obtenir un financement. Est‑ce vrai? » Malgré ce que la fonctionnaire avait affirmé avant la pause, elle a répondu ce qui suit : [traduction] « Le client a menti. Je ne lui ai pas dit de falsifier la date de début […] Je ne dirais jamais à une personne de mentir; l’énoncé du client est un mensonge. » À la fin de la réunion, la fonctionnaire a indiqué, [traduction] « J’estime que les conseils que j’ai donnés étaient de bons conseils. »

[243] Il convient de souligner que Mme Pereira n’a pas été contre‑interrogée au sujet de l’exactitude de ses notes de la réunion selon lesquelles la représentante de la fonctionnaire à la réunion n’a pas été citée à témoigner et que dans son témoignage devant le présent tribunal, la fonctionnaire n’a pas contesté l’exactitude de ces notes. Dans la mesure où la fonctionnaire a contesté leur exactitude dans son argumentation, une conclusion négative devrait être tirée de son omission de citer à témoigner sa représentante. Voir Ayangma c. Conseil du Trésor (ministère de la Santé), 2006 CRTFP 64, au par. 62. Il convient de noter que le témoignage de M. Lisk portant sur la réunion était conforme à celui de Mme Pereira.

[244] Il va sans dire que le souvenir de la fonctionnaire des événements aurait été meilleur en décembre 2014 par rapport à aujourd’hui. Elle a eu amplement l’occasion dans le cadre de communications écrites subséquentes avec la direction de s’éloigner de sa déclaration et d’admettre qu’elle a dit au client de modifier la date de début, ce qu’elle a omis de faire.

[245] Le 15 décembre 2014, la fonctionnaire a été informée que le CNRC menait une enquête sur ses dossiers antérieurs et actuels. M. Lisk a témoigné que cette enquête visait à traiter deux autres plaintes qui avaient été reçues à son sujet. Le 6 février 2015, des détails ont été fournis à la fonctionnaire et on lui a demandé d’assister à une audience disciplinaire concernant les dossiers de la société M et de la société I.

[246] En ce qui concerne la plainte déposée par la société M, M. Lisk a témoigné que l’entreprise estimait que la fonctionnaire avait promis un projet qui ne pouvait aller de l’avant et que ce malentendu a fait en sorte qu’elle devienne frustrée à l’égard du PARI. En contre‑interrogatoire, il a déclaré que la fonctionnaire était une CTI chevronnée et qu’elle avait mené le client à tirer de fausses conclusions, il s’agissait donc d’une mauvaise gestion du dossier.

[247] En ce qui concerne la plainte déposée par la société I, le Dr Dobson, en contre‑interrogatoire, a confirmé dans son examen du dossier que la fonctionnaire avait fourni des renseignements sur la façon dont le dossier avait traité qui étaient contraires à la version de la société, dont la version de celle‑ci était plus exacte.

[248] La lettre de licenciement était fondée sur l’incident concernant la société P. La lettre mentionne plusieurs autres dossiers qui faisaient état de lacunes.

[249] Le décideur, M. Ciobanu, a témoigné que le licenciement était justifié par les actes de la fonctionnaire à l’égard du dossier de la société P. Lorsqu'on a insisté en contre‑interrogatoire, il a témoigné comme suit : [traduction] « La société P aurait à mon avis été suffisante pour justifier le licenciement; les plaintes déposées par les sociétés I et M n’étaient pas essentielles au licenciement. »

[250] Subsidiairement, il est bien établi que même dans les cas où tous les motifs cités dans la lettre de licenciement n’étaient pas établis, le rôle de la Commission consiste à évaluer la gravité des motifs qui ont été établis dans la détermination du motif de licenciement. Voir Dearnaley c. Conseil du Trésor (Défense nationale), dossiers de la CRTFP 166‑02‑15008, 15009, 15154 et 15155 (19851101), [1985] C.R.T.F.P.C. no 246 (QL), au par. 166, McIntyre c. Conseil du Trésor (Revenu Canada – Douanes et Accise), dossiers de la CRTFP 166‑02‑25417 (19940718), [1994] C.R.T.F.P.C. no 101 (QL), au par. 27, Gravelle c. Administrateur général (ministère de la Justice), 2014 CRTFP 61, aux par. 78 au 93 et Lloyd c. Agence du revenu du Canada, 2017 CRTESPF 22, aux par. 37 à 44.

[251] En fin de compte, la direction devait traiter un incident grave commis par un CTI comptant 12 ans de service, en plus du fait qu’elle ne disait pas la vérité et n’a fait preuve d’aucune compréhension ou de remords.

[252] La fonctionnaire a été licenciée le 10 mars 2015.

[253] La jurisprudence sur la falsification de documents est bien établie. Voir Sheppard v. Canada Post, [1991] 25 C.L.A.S. 486, Renouf c. Conseil du Trésor (Revenu Canada, Impôt), dossiers de la CRTFP 166‑02‑27766 et 27865 (19980608), [1998] C.R.T.F.P.C. no 45 (QL), Moore c. Conseil du Trésor (Emploi et Immigration Canada), dossiers de la CRTFP 166‑02‑23658 (19930527), [1993] C.R.T.F.P.C. no 98 (QL), Pagé c. Administrateur général (Service Canada), 2009 CRTFP 26; Gangasingh c. Administrateur général (Commission canadienne du lait), 2012 CRTFP 113, McEwan c. Administrateur général (Commission de l’immigration et du statut de réfugié), 2015 CRTEFP 53 et Labourers’ International Union of North America, Local 493 v. Waste Management of Canada Corporation (2017), 133 C.L.A.S. 42.

[254] En ce qui concerne les facteurs atténuants, la jurisprudence énonce que l’acceptation d’une inconduite constitue le facteur le plus important. Voir Oliver c. Agence des douanes et du revenu du Canada, 2003 CRTFP 43, Way c. Agence du revenu du Canada, 2008 CRTFP 39 et Brazeau c. Administrateur général (ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux), 2008 CRTFP 62.

[255] Dans l’ensemble du processus, la fonctionnaire a nié toute inconduite et a contesté la version de la société P des événements survenus le 15 septembre 2014. La fonctionnaire, dans sa déclaration préliminaire, a affirmé qu’il n’y avait aucune [traduction] « inconduite » et que la conversation du 15 septembre 2014 ne s’était pas déroulée de la manière présentée par M. et Mme McArthur.

[256] Toutefois, la version de la fonctionnaire des événements relatifs à la réunion disciplinaire et de recherche des faits du 4 décembre 2015, avant qu’elle ne reçoive les détails de la plainte, reprenait pratiquement précisément ce que M. et Mme McArthur ont dit qu’elle avait fait.

[257] La première version des événements de la fonctionnaire était presque identique à la plainte même. Ce n’est qu’après avoir été informé par M. Lisk que l’énoncé était [traduction] « malheureux », et à la suite d’une pause de 15 minutes avec sa représentante syndicale, que la fonctionnaire a rétracté entièrement cet énoncé et a laissé entendre que le client mentait.

[258] La seule conclusion raisonnable à tirer de l’une ou l’autre version des événements est que la fonctionnaire a dit à M. McArthur de modifier la date de début de la proposition, afin d’obtenir un financement dans le cadre du PARI.

[259] À l’audience devant la présente commission, la fonctionnaire, se souvenant de la conversation de septembre 2014, a fourni une version détaillée et adaptée judicieusement de celle‑ci.

[260] La version de la fonctionnaire dans son témoignage devant cette commission était la suivante : [traduction] « Paul a déclaré que “nous avons commencé le projet”. Je n’étais pas certaine de la raison pour laquelle il a dit cela; j’avais besoin d’éclaircissements […] Je n’étais pas sûre s’il avait dit qu’il avait commencé ou n’avait pas commencé le projet et j’ai dit “Vous n’avez pas commencé le projet, n’est‑ce pas?” Il a dit “Non”. »

[261] La déclaration initiale de la fonctionnaire lors de la réunion disciplinaire et de recherche des faits le 4 décembre était la suivante : [traduction] « Le 15 septembre, le projet a été soumis, je savais que le projet avait commencé, elle avait eu une conversation avec Paul dans le cadre de laquelle il a dit qu’ils avaient commencé et elle lui a dit vous ne pouvez pas avoir commencé le projet parce que le PARI ne le couvrira pas […] vous n’avez donc pas commencé le projet, n’est‑ce pas? Paul dit “D’accord”. »

[262] La dernière version diffère sur les questions suivantes : a) la fonctionnaire ne savait pas que le projet avait été commencé et b) M. McArthur n’avait pas dit clairement que le projet avait été commencé avant que la fonctionnaire ait déclaré, [traduction] « Vous n’avez pas commencé le projet, n’est‑ce pas? »

[263] Toutefois, cette version très détaillée a été soulevée pour la première fois à l’audience et elle ne correspond pas à la version fournie lorsque les événements étaient frais dans l’esprit de la fonctionnaire. Elle a déclaré sans équivoque qu’en décembre 2014, elle savait que le projet avait été commencé et que M. McArthur l’avait confirmé avant qu’elle ne dise : [traduction] « Vous n’avez pas commencé le projet, n’est‑ce pas? »

[264] La version qui devrait être privilégiée est celle qui est conforme aux témoignages de M. et Mme McArthur, qui ont été énoncés plus près des événements réels et indiqués dans les notes concomitantes de Mme Pereira, qui n’a pas été contre‑interrogée au sujet de l’exactitude de ces notes.

[265] Il s’agit d’une question disciplinaire grave à l’égard de laquelle la fonctionnaire continue de montrer aucune compréhension ni aucun remords. En réalité, elle continue de tromper. M. Ciobanu a témoigné que le comportement était inacceptable, que la fonctionnaire n’avait démontré aucun remords et que, par conséquent, le lien de confiance avait été rompu et ne pouvait être remédié.

[266] L’employeur a soutenu respectueusement que cette situation convenait au licenciement et a demandé que le grief soit rejeté.

B. Pour la fonctionnaire s’estimant lésée

[267] Cette affaire est l’accumulation d’une enquête gravement viciée et inéquitable sur le plan de la procédure effectuée par l’employeur, le CNRC, et de sa décision déraisonnable de licencier la fonctionnaire en raison de son enquête.

[268] La fonctionnaire a travaillé en tant que CTI pour le PARI pendant 22 ans, d’abord en tant que membre du réseau travaillant dans le cadre du PARI et ensuite en tant qu’employée directe du CNRC. Tout au long de cette période, elle a été supervisée sur le plan fonctionnel par une personne au sein du PARI. Son rôle et ses responsabilités étaient les mêmes pendant ces 22 ans.

[269] Le fait qu’elle était une employée très productive et performante qui exécutait une charge de travail importante n’a pas été contesté. En outre, son approche est décrite comme holistique et comme donnant une impression positive. Elle est et était une professionnelle qui doit respecter plusieurs codes de conduite, celui du CNRC d’abord et avant tout et, ensuite, ceux des collèges de l’architecture de l’Ontario et du Québec. Elle risquait beaucoup en disant aux clients de falsifier des renseignements.

[270] Ses dernières évaluations du rendement ont démontré qu’elle répondait à toutes les attentes, sinon elle les dépassait. Ces évaluations démontraient également qu’elle avait un rendement de haut niveau et dépassait certaines cibles. Le titre de membre associée de l’Institut royal d’architecture du Canada lui a été conféré en raison de ses activités bénévoles constantes, de son travail en tant qu’architecte praticienne et, plus important encore, de sa carrière remarquable au PARI pendant plus de 20 ans.

[271] Son directeur et son directeur exécutif ont tous les deux reconnu que, pendant la période visée, elle n’avait pas été informée de problèmes ayant trait à ses communications avec les clients ou qu’elle devait améliorer la gestion de ses dossiers.

[272] Les griefs relatifs aux mesures disciplinaires exigent que l’arbitre de griefs détermine si l’employeur a établi l’inconduite et, dans l’affirmative, si la mesure disciplinaire était proportionnelle à l’inconduite. Si la mesure disciplinaire n’est pas proportionnelle, l’arbitre de griefs doit déterminer en quoi consisterait une mesure disciplinaire équitable. S’il n’y avait aucune inconduite, il n’est pas nécessaire d’examiner le deuxième volet du critère. La fonctionnaire a soutenu qu’il n’y avait pas eu inconduite.

[273] Il incombe à l’employeur d’établir l’inconduite alléguée. Dans McKinley c. BC Tel, 2001 CSC 38, aux par. 48 et 49, la Cour suprême du Canada a établi que pour déterminer si un employeur est en droit de licencier un employé pour malhonnêteté, il faut apprécier le contexte de l’inconduite alléguée. Plus particulièrement, il s’agit de savoir si la malhonnêteté de l’employé a eu pour effet de rompre la relation employeuremployé. La Cour suprême a également expliqué qu’il faut déterminer (1) si la preuve démontre, selon la prépondérance des probabilités, que l’employé a adopté un comportement malhonnête et (2) dans l’affirmative, si la nature et la gravité de la malhonnêteté justifiaient un licenciement. Ce critère ne mélange pas des questions de fait et de droit. L’évaluation de la gravité de l’inconduite exige plutôt que les faits démontrés au procès soient soigneusement examinés et soupesés.

[274] Dans McKinley, au paragraphe 53, c’est le principe de la proportionnalité qui sous‑tend l’approche qui est proposée. Il faut établir un équilibre utile entre la gravité de l’inconduite de l’employé et la sanction infligée. On saisit mieux l’importance de cet équilibre si on tient compte du sens de l’identité et de la valorisation que les gens tirent fréquemment de leur emploi.

[275] En l’espèce, l’employeur ne s’est pas acquitté du fardeau de la preuve qui lui incombait. Il n’a pas établi l’inconduite. La preuve documentaire n’étaye pas les allégations formulées par la plaignante, soit la société P. Au contraire, les échanges de courriels établissent clairement qu’elle savait que la trousse de proposition qu’elle a soumise le 26 juin 2014 avait été rejetée, qu’elle devait soumettre une demande révisée et qu’elle ne pouvait pas commencer le projet avant son approbation.

[276] En outre, lorsque les éléments de preuve visés par le témoignage de M. McArthur contredisent ceux de la fonctionnaire, le témoignage de la fonctionnaire devrait être privilégié, car il est étayé par la documentation et donc plus crédible.

[277] Le document sur lequel l’employeur s’est fondé pour étayer l’argument de M. McArthur selon lequel on lui a demandé de modifier la date de ses demandes était une estimation d’un sous‑traitant que la fonctionnaire n’a pas vu avant l’audience de son grief devant la Commission en mai 2018.

[278] La fonctionnaire n’avait rien à gagner de l’attribution d’une entente de contribution à la société P dans le cadre du PARI. Elle a témoigné qu’elle n’avait aucune relation avec M. et Mme McArthur autre que d’être leur CTI responsable. Elle n’avait pas besoin de signer une entente avec ce client pour réaliser son objectif annuel relatif aux ententes de contribution et n’a tiré aucun avantage du financement de son produit par le PARI.

[279] La société P a témoigné qu’elle avait désespérément besoin des fonds du PARI ou elle perdrait tout. L’analyse factuelle de cette affaire est essentielle. Les éléments de preuve présentés par l’employeur n’ont pas permis d’établir, selon la prépondérance des probabilités, la conduite malhonnête de la fonctionnaire. Il ne s’est pas acquitté de son fardeau de la preuve consistant à établir l’inconduite.

[280] Subsidiairement, dans la mesure où la fonctionnaire était coupable, il s’agissait potentiellement du manque d’une bonne communication et d’une omission de veiller à ce que son client comprenne clairement ce qui devait être fait.

[281] S’il y a eu inconduite, la mesure disciplinaire imposée à la fonctionnaire n’était pas proportionnelle. Une analyse factuelle est requise à ce stade. Afin d’évaluer la gravité de l’inconduite, les faits établis à l’audience doivent être examinés et soupesés.

[282] Dans Gannon c. Conseil du Trésor (Défense nationale), 2002 CRTFP 32, au par. 130, l’ancienne Commission des relations de travail dans la fonction publique (CRTFP) a reconnu que les gens commettent parfois des erreurs et parfois une inconduite eux‑mêmes dans le cadre de leur emploi. Selon la règle générale, l’employeur a le droit d’imposer une mesure disciplinaire aux employés pour inconduite, mais pas pour des erreurs. Si l’inconduite de l’employé peut être qualifiée d’erreur et d’erreur de jugement qui n’a pas été commise de bonne foi ou comportant une intention hostile ou malveillante, une mesure disciplinaire qui favorise l’indulgence et une mise en garde de mettre fin à la conduite à l’avenir suffisent habituellement, selon évidemment les circonstances de l’incident. Les règles, les lignes directrices et les politiques ne prévoient pas tous les incidents d’inconduite ou d’irrégularités.

[283] Le critère à appliquer, c’est ce qu’une personne raisonnable jugerait acceptable dans des circonstances comparables. En l’espèce, l’application du critère objectif de la personne raisonnable dans des circonstances comparables ne considérerait pas la confusion comme étant de la mauvaise foi ou une intention malveillante, mais plutôt un échec de communication entre les parties. Dans Gannon, le fonctionnaire s’estimant lésé occupait un poste de direction, qui comportait un élément de haute confiance et d’autonomie. Il a joui d’une relation de travail positive avec son employeur pendant de nombreuses années. Son employeur lui avait donné une mise en garde claire que sa conduite était inacceptable, mais il a pourtant continué ladite conduite. L’arbitre de griefs a conclu que s’il ne s’était pas fait prendre, il aurait probablement maintenu le même comportement.

[284] Subsidiairement, même si la fonctionnaire bénéficiait d’une autonomie et d’un niveau élevé de confiance, l’inconduite alléguée constituait un incident isolé dans le contexte d’un milieu de travail très chaotique en raison de la cyberattaque. Elle n’a pas été avertie de problèmes à l’égard de clients ou de gestion des dossiers, et elle a établi qu’elle comprenait qu’elle devrait impliquer son directeur plus tôt lorsqu’elle est confrontée à une situation difficile. Cela a été démontré à l’employeur environ deux semaines plus tard, après que M. Lisk lui ait fait part de son commentaire pendant la première audience disciplinaire le 4 décembre 2015.

[285] Dans Douglas c. Conseil du Trésor (Développement des ressources humaines Canada), 2004 CRTFP 60, la fonctionnaire s’estimant lésée, une agente de programme, a été licenciée parce qu’elle s’était placée en situation de conflit d’intérêts et qu’elle avait accordé un traitement de faveur à un membre du public, communiqué des renseignements confidentiels à ladite personne, falsifié des documents, tenté d’obtenir de manière frauduleuse un avantage lié à l’emploi à des fins personnelles et menti à son chef d’équipe. Plus particulièrement, elle avait indiqué qu’un particulier était son conjoint de fait afin de l’inscrire au Régime de soins de santé de la fonction publique et elle avait falsifié des documents afin qu’il obtienne des soins de personnes à charge de 7 500 $.

[286] Dans cette affaire, l’ancienne CRTFP a conclu que les infractions étaient graves et que la fonctionnaire occupait un poste de confiance, travaillait avec une supervision minimale et gérait des fonds publics. Toutefois, l’ancienne CRTFP a conclu que les éléments de preuve avaient permis d’établir qu’il s’agissait d’une unique et complexe indiscrétion. Dans le présent cas, comme dans Douglas, l’employeur n’a pas établi que les actes de la fonctionnaire étaient répétitifs. Il s’est fié au fait qu’il s’agissait d’un événement grave. Cependant, il a omis de tenir compte de tous les éléments de preuve établissant que la présentation du projet avait été fait dans la confusion, l’incertitude et le retard. En outre, la fonctionnaire n’avait aucun investissement personnel relativement à l’octroi d’une entente de contribution. Elle a été honnête avec son directeur, soit le Dr Dobson, lorsqu’elle l’a informé du courriel de Mme McArthur du 23 septembre 2014, déclarant que le projet avait déjà commencé.

[287] Contrairement à toutes les affaires figurant dans les deux recueils de jurisprudence de l’employeur, la fonctionnaire n’avait rien à gagner. Cette preuve n’est pas contestée. Contrairement aux affaires qu’il a invoquées, il n’a pas établi qu’il a subi un préjudice en raison de l’inconduite alléguée. Il n’a présenté aucun argument selon lequel il a subi un préjudice des actes allégués de la fonctionnaire. Il disposait de tous les faits liés au projet et aux dépenses connexes engagées en juillet et en août lorsqu’il a non seulement offert une entente de contribution à la société P, mais lorsqu’elle a également antidaté la nouvelle entente de contribution après que M. et Mme McArthur se soient plaints.

[288] Dans Cassell v. Irving H. Miller, 2016 ONSC 5570, au par. 648, la Cour supérieure de l’Ontario a analysé le cas de M. Cassell, qui avait fait preuve d’une conduite téméraire quant à la vérité relativement à la question de savoir s’il avait obtenu une couverture d’assurance appropriée pour ses clients propriétaires. Même si la Cour a conclu que ses actes équivalaient à une inconduite, elle a conclu que l’employeur n’était pas justifié de le licencier au motif que la nature et l’étendue de sa conduite ne justifiaient pas un licenciement; il n’y avait aucune preuve d’une mesure disciplinaire antérieure et l’inconduite devait être examinée dans le contexte d’un employé qui avait travaillé pour le même employeur pendant 10 ans, même s’il existait quelques problèmes de rendement.

[289] La fonctionnaire n’avait fait l’objet d’aucune mesure disciplinaire antérieure, avait obtenu des évaluations du rendement très satisfaisantes et n’avait pas été avertie ni informée des problèmes de gestion des clients, des commentaires négatifs ou des plaintes. Ces facteurs devaient être pris en considération par l’employeur dans sa détermination de la mesure disciplinaire appropriée, ce qu’il n’a pas fait.

[290] L’employeur n’a pas imposé la mesure disciplinaire en temps opportun. La Commission doit également examiner la question de la rapidité d’exécution lorsqu’elle détermine si une mesure disciplinaire aurait dû être imposée relativement aux autres plaintes alléguées, que l’employeur a prises en considération lorsqu’il a déterminé que le licenciement était approprié.

[291] Il a également été établi clairement que la plainte déposée par la société I était désuète et qu’elle avait déjà été traitée par la direction directement auprès du client en avril 2013. Elle n’aurait jamais dû être recherchée ni faire l’objet d’une enquête en février 2015. L’employeur ne pouvait pas tenir compte de cette plainte dans sa décision de licencier la fonctionnaire parce qu’il ne l’avait pas traitée en temps opportun, ou il avait toléré le comportement de la fonctionnaire lorsqu’il a choisi de ne pas l’aborder avec elle en 2013. Le fait de rechercher et de présenter une ancienne plainte en vue de renforcer sa décision de la licencier n’était pas raisonnable. En outre, le seul témoignage sur la plainte est celui de la fonctionnaire et ce témoignage n’a pas été contesté. Cela s’applique également à la supposée plainte de la société M; le seul témoignage sur la situation avec cette cliente est celui de la fonctionnaire.

[292] Il incombait à l’employeur d’établir non seulement que la conduite de la fonctionnaire justifiait une mesure disciplinaire, mais également que la mesure disciplinaire imposée était raisonnable.

[293] L’employeur n’a pas appliqué des mesures disciplinaires progressives. La fonctionnaire n’a eu aucune mise en garde, aucune rétroaction, ni aucune communication au sujet de la plainte avant son licenciement. En réalité, même si l’employeur savait qu’elle était une employée très productive et compétente qui n’avait fait l’objet d’aucune mesure disciplinaire antérieure, il a choisi de croire M. et Mme McArthur. Ils étaient des clients du PARI pour la première fois et, selon leur propre aveu, ils avaient besoin d’argent. L’employeur les a privilégiés plutôt que la fonctionnaire qui travaillait en tant que CTI pendant plus de 20 ans et dont les EEE étaient très positifs.

[294] En réalité, en l’espèce, l’employeur n’a même pas envisagé une mesure disciplinaire progressive et n’a pas tenu compte d’importants facteurs atténuants. Il n’a pas tenu compte du fait que ses employés travaillaient dans un contexte de confusion sans aucune orientation claire quant à la façon de naviguer les restrictions imposées en raison de la cyberattaque. Il n’a pas tenu compte qu’il s’agissait de circonstances spéciales, dans le cadre desquelles la CTI ne pouvait pas examiner la trousse complète qu’elle recommandait avant de l’envoyer au bureau de Toronto; la CTI exerçait ses fonctions un peu à l’aveuglette et sans pouvoir tirer profit de SONAR.

[295] Dans Schenkman c. Conseil du Trésor (Travaux publics et Services gouvernementaux), 2002 CRTFP 62, un gestionnaire principal de projets a été licencié pour grossière négligence et pour avoir amorcé des procédures d’approvisionnement irrégulières et inappropriées, entre autres allégations. Dans cette affaire, le comité qui a effectué l’enquête sur la conduite du fonctionnaire s’estimant lésé ne lui a pas communiqué les documents dont il disposait et sur lesquels il s’est appuyé pour tirer ses conclusions. Les éléments de preuve contre lui ne lui ont été communiqués que s’il présentait une demande visant un document particulier. Avant l’audience, il n’a pas eu accès aux documents qui devaient être utilisés contre lui. L’ancienne CRTFP a conclu que la preuve documentaire produite par l’employeur était incomplète et non fiable. En outre, elle a conclu que le fonctionnaire s’estimant lésé n’avait pas la possession exclusive et continue des dossiers à l’égard desquels l’employeur a demandé à la CRTFP de conclure qu’il devrait être tenu responsable des documents manquants. L’ancienne CRTFP a conclu que le témoignage des trois membres du comité contenait des inférences, des hypothèses et des conclusions fondées sur des documents incomplets. Elle a également conclu que, selon la preuve documentaire, les décisions du fonctionnaire s’estimant lésé ne pouvaient être confirmées ni invalidées. L’ancienne CRTFP a conclu que le principe fondamental était que, faute d’avoir une preuve documentaire suffisante, l’employeur ne pouvait pas établir que le fonctionnaire s’estimant lésé avait été coupable d’inconduite et qu’on avait empêché le fonctionnaire s’estimant lésé de démontrer la qualité et l’intégrité du travail qu’il avait fait sur chaque dossier et les décisions qu’il avait recommandées ou prises lui‑même.

[296] La fonctionnaire dans le présent cas n’avait pas accès à son dossier complet et, par conséquent, ne pouvait pas comparer chacune des versions du modèle de proposition pour les petits projets afin d’expliquer ses actes à chaque étape.

[297] L’employeur a présenté un nouveau document sur lequel il s’est également appuyé. La fonctionnaire n’avait jamais vu ce document avant son dépôt en preuve pendant l’interrogatoire principal de Mme McArthur en mai. Ce document est l’estimation du sous‑traitant, soit Oak Computing (E‑5). Mme Pereira a témoigné que les documents invoqués et qui ont peut‑être été présentés à la fonctionnaire étaient les mêmes que ceux énumérés dans le rapport sur la recherche des faits. Elle a également témoigné qu’elle ne se souvenait pas de tous les documents qui avaient été montrés à la fonctionnaire. Ses notes ne comportaient aucune mention d’une discussion sur ce document et il n’est pas énuméré à la liste dans le rapport sur la recherche des faits. Il n’est pas non plus énuméré dans les questions (numérotées « E6 » et « E7 ») qui constituent le fondement des questions posées aux audiences de recherche des faits.

[298] Contrairement à ce que l’employeur a allégué, les notes de Mme Pereira ont été remises en question en contre‑interrogatoire. L’exactitude de ses notes et l’écart entre celles‑ci et le rapport sur la recherche des faits ont été remis en question. La liste de documents dans le rapport sur la recherche des faits ne mentionne pas les estimations du sous‑traitant du 2 juillet 2014 et du 15 septembre 2014. La fonctionnaire n’a pas été interrogée précisément au sujet de ces documents et, par conséquent, elle ne pouvait pas répondre aux allégations découlant de ceux‑ci. Toutefois, l’employeur les a invoqués à l’appui de la proposition selon laquelle elle aurait conseillé à la société P de les falsifier.

[299] La fonctionnaire a été honnête et a collaboré tout au long du processus d’enquête. Elle a fourni tous les renseignements que l’employeur a demandés, ainsi que des renseignements supplémentaires. Toutefois, l’employeur l’a continuellement induit en erreur et a retenu des renseignements d’elle, ce qui l’a donc empêché de fournir une réponse complète aux allégations contre elle.

[300] L’employeur n’a pas tenu entièrement compte de la réadaptation de la fonctionnaire. Il n’a pas accordé un poids suffisant à l’évaluation de la possibilité de réadaptation établie. Le risque d’une confusion répétée à la suite de cette épreuve est très faible. Le PARI-CNRC n’exerce plus ses activités dans le contexte d’une cyberattaque. La fonctionnaire a démontré, à l’époque et maintenant, qu’elle comprend qu’elle aurait dû susciter la participation de son directeur plus tôt, soit lorsqu’elle a pris connaissance qu’il existait un problème possible.

[301] La fonctionnaire a entendu ce que M. Lisk lui a dit dans le contexte de la réunion disciplinaire et de recherche des faits du 4 décembre 2014 et elle l’a pris au sérieux. C’est la raison pour laquelle, tel qu’il a été indiqué, elle a communiqué immédiatement avec le Dr Dobson lorsqu’elle a ressenti de la tension avec la cliente, soit la société M.

[302] De plus, l’employeur n’a pas établi qu’il n’avait pas confiance qu’elle pouvait continuer d’exercer toutes ses fonctions de CTI pendant qu’elle faisait l’objet d’une enquête. Il ne l’a pas suspendu, n’a pas limité sa capacité d’exécuter son travail ni son accès à l’information dans le cadre du PARI. Elle a continué de travailler comme toujours, sans modifications. La direction ne l’a retiré du dossier de la société P qu’à la demande de la cliente.

[303] La fonctionnaire a tiré une leçon précieuse sur l’importance de la communication. Elle comprend la nécessité de veiller à ce que ses conseils soient bien compris afin d’empêcher des erreurs. L’employeur n’a pas établi qu’il avait subi un préjudice ou qu’il existe un risque d’autres préjudices si elle était réintégrée dans ses fonctions.

[304] La mesure disciplinaire imposée à la fonctionnaire, soit le licenciement, constitue la dernière mesure disciplinaire dans le contexte du travail et de l’emploi. Il s’agit de la peine capitale en droit du travail. En l’espèce, elle était manifestement disproportionnée par rapport à sa conduite alléguée.

[305] La fonctionnaire ne conteste pas que les audiences devant la Commission sont des audiences de novo, ce qui signifie que celle‑ci a essentiellement vicié les lacunes et les erreurs procédurales considérables qui sont survenues pendant le processus d’enquête qui a mené à son licenciement.

[306] Toutefois, conformément à la décision de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique dans Grant c. Administrateur général (Agence des services frontaliers du Canada), 2016 CRTEFP 37, elle a demandé que la Commission tienne compte de l’incidence que l’enquête viciée et son rapport erroné ont eue sur elle. Elle n’a pas eu l’occasion de répondre à l’allégation très sérieuse qu’elle avait demandé à M. et à Mme McArthur de modifier l’estimation du sous‑traitant; elle n’a pas vu non plus le document avant l’arbitrage.

[307] Ce n’est qu’en mai 2018 que la fonctionnaire a été informée de plusieurs allégations contre elle et de plusieurs documents que l’employeur possédait et avait évalués dans le cadre de sa décision de la licencier.

[308] L’employeur ne peut pas maintenant attaquer la conduite de la fonctionnaire pendant l’enquête, étant donné qu’il a été établi qu’elle n’avait pas eu la possibilité de répondre à la panoplie d’allégations formulées contre elle.

[309] L’employeur ne peut pas soutenir que la fonctionnaire n’a manifesté aucun remords ni qu’elle ne comprenait pas la gravité de son inconduite alléguée pendant l’enquête s’il reconnaît qu’elle n’avait pas eu l’occasion de voir bon nombre de documents et qu’elle ne savait pas exactement ce dont elle était accusée.

[310] S’il s’agit réellement d’une audience de novo, ses réponses, explications et sa reconnaissance de ce qui a fait défaut, lesquelles ont été entendues à l’audience, constituent les éléments qui doivent être examinés. Les constatations d’une enquête ne peuvent être uniquement invoquées sans tenir compte des nombreuses lacunes qu’elle comportait. Il ne peut s’agir de l’un ou de l’autre, mais des deux ou de ni l’un ni l’autre.

[311] En réponse aux arguments de l’employeur, la jurisprudence qu’elle a invoquée concernait des parties automotivées au moment du dépôt des plaintes. M. et Mme McArthur ont maintenu ce qu’ils ont dit pour sauver la face. Ils avaient désespérément besoin d’un financement. Il s’agit d’un couple marié et ils ont investi ensemble dans leur projet. Ils avaient tous les motifs de falsifier les documents, contrairement à la fonctionnaire qui n’avait rien à gagner.

[312] En réplique à la réponse de l’employeur et à la version de l’appel téléphonique présentée par M. MacArthur, la fonctionnaire a soutenu qu’elle ne diffère pas beaucoup de la version qu’elle a communiquée à l’employeur le 4 décembre. La fonctionnaire a témoigné de manière uniforme et sa version des événements survenus en décembre 2014 était constante. Elle a fait valoir tout au long du processus qu’elle n’avait jamais dit aux clients de mentir ou de falsifier un document.

[313] Mme Pereira a témoigné que la note [traduction] « […] m’attirera‑t‑il des ennuis? » a été ajoutée après le fait, et non immédiatement après l’explication de la conversation téléphonique.

[314] La fonctionnaire a convenu qu’il s’agissait d’une conversation téléphonique inoffensive. Elle s’en souvient et s’est souvenue d’autres détails parce que, en fin de compte, elle a été licenciée en raison de celle‑ci. Elle n’avait aucune raison de croire, le 4 décembre, que sa brève explication de cette conversation téléphonique mènerait enfin à son licenciement.

[315] L’employeur n’a présenté aucun argument relatif à la question des facteurs atténuants, étant donné que les parties s’étaient entendues de scinder l’audience sur la question du redressement en tant que solution de rechange, afin d’éviter la nécessité de présenter des éléments de preuve en ce qui concerne les facteurs atténuants.

V. Motifs

[316] Un arbitre de griefs saisi d’une affaire concernant une mesure disciplinaire doit évaluer si la conduite donnant lieu à la mesure disciplinaire a eu lieu, si la sanction imposée était appropriée et, dans la négative, si la sanction était appropriée; voir Basra c. Canada (Procureur général), 2010 CAF 24, aux par. 24 à 26, William Scott & Co. v. C.F.A.W., Local P‑162, [1977] 1 Can. LRBR 1, aux par. 13 et 14 (« Wm. Scott »).

[317] La lettre de licenciement énonce que la fonctionnaire a été licenciée pour avoir recommandé à un demandeur du PARI de falsifier ou de fournir de faux renseignements à l’appui de sa proposition visant à obtenir un financement dans le cadre du PARI-CNRC. L’employeur a soutenu que ces conseils ont été fournis afin que le demandeur puisse avoir accès à un financement du PARI-CNRC d’environ 50 000 $ qui n’aurait pas été approuvé autrement.

[318] Selon le CNRC, les actes de la fonctionnaire sont entièrement inacceptables étant donné son rôle de CTI. La lettre mentionne que cet acte a miné l’intégrité et le professionnalisme des travaux du CNRC. En plus de ses préoccupations quant à la gestion de ce dossier par la fonctionnaire, l’employeur était préoccupé par la gestion de plusieurs de ses autres dossiers ce qui, à son avis, nuisait encore davantage à la réputation du PARI-CNRC. Selon l’employeur, malgré les plaintes et les questions soulevées par les clients, la fonctionnaire a refusé de reconnaître les lacunes dans son traitement de ces dossiers.

[319] Il incombe à l’employeur d’établir les faits sous‑jacents qui sont invoqués pour justifier l’imposition de la mesure disciplinaire, ainsi que le caractère approprié de la mesure disciplinaire; voir Palmer & Snyder, Collective Agreement Arbitration in Canada (4e éd.), au paragraphe 10.67. La norme de la preuve est celle de la norme civile de la prépondérance des probabilités.

[320] L’examen du caractère approprié de la sanction exige un examen de toutes les circonstances connexes pertinentes, y compris les facteurs atténuants, tels que l’état d’esprit de l’employé, qui a un rapport direct avec la culpabilité et les facteurs aggravants, par exemple le comportement de la fonctionnaire pendant le processus d’enquête (voir, p. ex. Wm. Scott, au par. 14, Samuel‑Acme Strapping Systems v. U.S.W.A., Local 6572 (2001), 65 C.L.A.S. 157, au par. 210, Georgian Bay General Hospital v. OPSEU, Local 367 (2014), 243 L.A.C. (4e) 112, aux par. 58, 65, 66 et 68, Fundy Gypsum Co. v. U.S.W.A., Local 9209 (2003), 117 L.A.C. (4e) 58, aux par. 40 et 45, et, de façon plus générale, Brown and Beatty, Canadian Labour Arbitration, 5e éd., à la page 7:4424).

[321] Plus précisément, il faut déterminer si l’inconduite de la fonctionnaire était suffisamment grave pour justifier le licenciement en tant que mesure disciplinaire. La mesure disciplinaire était-elle proportionnelle à la gravité de l’inconduite alléguée? (Voir McKinley, aux par. 29, 48 et 57, Basra c. Administrateur général (Service correctionnel du Canada), 2014 CRTFP 28, au par. 29.)

[322] La lettre de licenciement énonce que lors de la réunion disciplinaire, la fonctionnaire n’a pas reconnu son inconduite. Elle a plutôt offert des explications pour justifier ses actes. Elle n’a exprimé aucun regret ni aucun remords. Le CNRC a conclu qu’en raison des actes de la fonctionnaire, la relation de confiance a été irrémédiablement rompue.

[323] L’employeur devait établir les allégations énumérées dans la lettre de licenciement qui, à son avis, justifiaient l’imposition d’une mesure disciplinaire. Plus particulièrement, il devait établir, selon la prépondérance des probabilités, que la fonctionnaire avait recommandé au demandeur de falsifier ou de fournir de faux renseignements afin que celui-ci obtienne un financement qui n’aurait pas été approuvé autrement. Il devait également établir qu’il y avait des lacunes dans la gestion de plusieurs de ses autres dossiers, ce qui a nui à la réputation du PARI CNRC.

[324] Si l’employeur s’est acquitté de ce fardeau, il devait ensuite établir que la mesure imposée était proportionnelle à la gravité de l’inconduite. Dans la détermination de la proportionnalité, je dois déterminer si la mesure disciplinaire imposée était excessive en examinant toutes les circonstances connexes pertinentes, y compris les facteurs atténuants et aggravants, tels que l’état d’esprit de la fonctionnaire et sa conduite pendant l’enquête. Dans la négative, la mesure reste valide. Si je conclus que le licenciement était excessif, je dois trancher la question de savoir quelle mesure disciplinaire est justifiée en l’espèce.

A. La fonctionnaire a‑t‑elle recommandé à M. et Mme McArthur de falsifier ou de fournir de faux renseignements en vue d’obtenir un financement qui n’aurait pas été approuvé autrement?

[325] M. Lisk a témoigné que le fait que la fonctionnaire ait conseillé à M. et Mme McArthur de consigner par écrit quelque chose qui était faux en vue d’obtenir un financement constituait une grave erreur. La fonctionnaire a violé le Code de conduite du CNRC. M. Ciobanu considérait son inconduite comme une tentative de frauder le gouvernement en facturant un montant pour un projet qui était supérieur au montant que le client devrait recevoir; il s’agissait d’une inconduite grave et d’un comportement inacceptable de la part d’une CTI. La fonctionnaire savait que la falsification de renseignements dans une entente de contribution constituait un motif de résiliation immédiate de l’entente et qu’elle pourrait avoir de graves conséquences pour un demandeur. M. et Mme McArthur ont témoigné qu’ils le savaient aussi. Ils ont accusé la fonctionnaire de leur avoir dit de falsifier la date de début dans leur demande, afin qu’ils obtiennent un financement dans le cadre du PARI.

[326] La fraude, le vol et d’autres formes de malhonnêteté sont parmi les formes les plus graves d’inconduite de la part d’un employé. Un tel comportement est considéré contraire à l’éthique en ce qui concerne la confiance qui est un élément essentiel de toute relation de travail viable et productive. Afin de justifier la prise d’une mesure disciplinaire contre la fonctionnaire pour de tels motifs, l’employeur doit en avoir une preuve claire, logique et convaincante que la fonctionnaire a conseillé à M. et Mme McArthur de commettre une fraude et qu’elle l’a fait avec une intention malhonnête. Pour les motifs qui suivent, je conclus qu’il n’existe aucune preuve de ce genre. Au mieux, il est possible qu’il y ait eu des problèmes de communication entre la fonctionnaire et M. et Mme McArthur, que je qualifie de problèmes de rendement préexistants que l’employeur n’a pas abordé en temps opportun.

[327] Dans sa plainte écrite à l’intention de M. Lisk, M. McArthur a déclaré [traduction] « nous avons reçu des conseils limités, déroutants et, une fois, de piètres conseils quant à la façon de satisfaire aux exigences d’une demande. Ces conseils sont ceux où il soutient qu’on lui a demandé directement de soumettre de nouveau mes dates de projet pour un projet déjà soumis et commencé ». Dans un autre document joint à sa plainte, faisant référence à sa conversation avec la fonctionnaire le 15 septembre 2014, M. McArthur a écrit ce qui suit :

[Traduction]

Liza m’a demandé si notre projet avait commencé, car notre date de début initial était dans le passé. J’ai répondu par l’affirmative, il avait effectivement été commencé. À ce moment‑là, elle m’a encore posé la question, mais formulé légèrement différemment […] « Vous n’avez pas encore commencé, n’est‑ce pas? » J’ai trouvé cela un peu déroutant, mais je m’y suis conformé. Elle m’a alors demandé de modifier les dates figurant dans ma demande afin d’indiquer une date future du 1er octobre comme ma date de début.

[328] Même si ces documents ne sont pas datés, M. Lisk a confirmé qu’ils lui avaient été envoyés sous forme de documents PDF numérisés joints à un courriel en date du 25 octobre 2014, soit le lendemain de la signature et de l’approbation de l’entente de contribution par le PARI.

[329] Même s’il existe d’importants écarts, il existe également de nombreuses similitudes entre les témoignages de M. et Mme McArthur et celui de la fonctionnaire. À l’audience, je me suis assuré de prendre des notes détaillées des deux témoignages en ce qui concerne leur souvenir de ce qui a été dit pendant leur conversation téléphonique du 15 septembre 2014. La vérité de ce qui a été dit se situe dans le chevauchement de leur témoignage et de la preuve documentaire à l’appui.

[330] M. McArthur a témoigné que le 15 septembre 2014, il était avec Mme McArthur en Floride. M. McArthur a déclaré qu’il avait eu une conversation téléphonique avec la fonctionnaire. La fonctionnaire lui a dit qu’une somme de 50 000 $ pourrait être dans leur compte bancaire dans quelques jours. Elle lui a demandé si le projet avait commencé. Il a dit [traduction] « Oui, il a commencé en juillet ». Il se rappelait que la fonctionnaire lui avait alors dit : [traduction] « Le projet n’a pas commencé, n’est‑ce pas? » La manière qu’elle a posé la question l’a mené à conclure qu’elle lui demandait de modifier la date de début du projet de juillet à octobre.

[331] Mme McArthur s’est rappelé qu’elle était dans la chambre d’hôtel en Floride lorsqu’elle a entendu l’appel téléphonique entre M. McArthur et la fonctionnaire. Il semblait que des fonds du PARI étaient disponibles et que tout semblait bon. M. McArthur semblait perplexe et a dit : [traduction] « Quoi? ». Mme McArthur l’a entendu dire : [traduction] « Nous avons déjà commencé le 1er juillet. » Elle a remarqué qu’il semblait confus par ce que la fonctionnaire lui demandait de faire. Après avoir raccroché, il lui a dit que la fonctionnaire leur avait demandé de remonter la date et de la modifier aux fins de l’entente d’Oak Computing. Mme McArthur ne se sentait pas à l’aise de le faire, mais a néanmoins modifié la date de début parce qu’ils avaient désespérément besoin d’un financement.

[332] La fonctionnaire s’est rappelé que M. McArthur l’avait appelé sur son téléphone cellulaire. Il l’a appelé de son téléphone cellulaire en Floride et lui a dit qu’ils avaient commencé le projet. Elle a témoigné qu’elle avait besoin de précisions sur ce qui s’était passé. Elle était dans son bureau, situé sur la promenade Sussex, à Ottawa, et la réception cellulaire était faible. Elle est sortie de son bureau pour qu’elle puisse mieux comprendre. Elle voulait des précisions et lui a demandé à nouveau : [traduction] « Vous n’avez pas commencé le projet, n’est‑ce pas? ». Il a répondu : [traduction] « Non, nous ne l’avons pas commencé ». La fonctionnaire a dit à M. McArthur qu’il devait envoyer les documents par télécopieur au bureau de Toronto. Elle n’a pas vu la deuxième entente sur le développement de logiciels d’Oak Computing, du 15 septembre 2014. La première fois qu’elle a vu le document modifié était à l’audience. Elle a nié lui avoir dit de modifier la date de début de leur projet de juillet à octobre. Une copie de la plainte déposée par M. et Mme McArthur et les documents à l’appui n’ont pas été fournis à la fonctionnaire.

[333] Pendant la réunion disciplinaire et de recherche des faits en décembre 2014, Mme Pereira a témoigné qu’elle avait pris des notes détaillées des réponses de la fonctionnaire aux questions posées par M. Lisk. Lorsque M. Lisk a demandé à la fonctionnaire si elle connaissait la date à laquelle le projet de la société P avait été commencé, elle a déclaré que le projet avait été soumis le 15 septembre 2014, qu’elle savait que le projet avait commencé et qu’elle avait eu une conversation avec M. McArthur au cours de laquelle il lui a dit qu’ils l’avaient commencé, ce à quoi elle a répondu : [traduction] « Vous ne pouvez pas avoir commencé le projet parce que le PARI ne le couvrira pas. Vous n’avez donc pas commencé le projet, n’est‑ce pas? » La fonctionnaire a demandé à M. Lisk si cet énoncé lui attirerait des ennuis. Les notes de Mme Pereira indiquent que M. Lisk a dit : « Il s’agit d’une conversation malheureuse ». La fonctionnaire a ensuite demandé une pause pour discuter avec sa représentante syndicale. Dès son retour, elle a accusé le client d’avoir menti et a déclaré qu’elle ne lui avait pas dit de modifier la date de début. La réunion disciplinaire et de recherche des faits a pris fin et l’employeur n’a pas enquêté davantage la plainte de la société P.

[334] Par conséquent, je dois déterminer quelle explication est la plus probable, celle de M. et Mme McArthur, selon laquelle la fonctionnaire leur a conseillé de modifier la date de début dans leur demande, ou celle de la fonctionnaire, selon laquelle elle ne leur a pas conseillé de modifier la date de début et qu’elle ne pouvait pas bien entendre M. McArthur pendant leur conversation téléphonique.

[335] La règle établie dans Faryna v. Chorny, [1952] 2 D.L.R. 354, est habituellement invoquée lorsque deux témoignages sont contradictoires. Elle peut également être appliquée pour choisir entre deux versions des mêmes événements, comme en l’espèce. Elle est énoncée comme suit à la page 357 de cette affaire :

[Traduction]

[…] Selon le critère, la version des faits d’un témoin doit être assujettie à un examen raisonnable de sa compatibilité avec les probabilités qui entourent les faits de l’espèce. En somme, le véritable critère pour déterminer la véracité de la version du témoin en pareil cas doit être sa conformité à la prépondérance des probabilités qu’une personne raisonnable et bien informée estimerait d’emblée comme étant raisonnable dans le lieu et le contexte en question. […]

[336] Selon la prépondérance des probabilités, je ne considère pas que le témoignage de M. et Mme McArthur ou celui de la fonctionnaire constituent une description exacte de la conversation du 15 septembre 2014. Ce qui a eu lieu est un malentendu et une omission de la part de la fonctionnaire de faire un suivi du courriel de Mme McArthur, en date du 23 septembre 2014, dans laquelle cette dernière mentionne que le projet était commencé. Je ne suis pas d’accord avec l’énoncé de l’employeur selon lequel M. et Mme McArthur n’avaient rien à gagner du dépôt d’une plainte auprès de M. Lisk. Au contraire, selon leur témoignage et leur courriel à la fonctionnaire en date du 23 septembre 2014, ils avaient désespérément besoin d’un soutien financier du PARI. La fonctionnaire, d’autre part, n’avait rien à gagner d’une entente de contribution approuvée et de conseiller à M. et Mme McArthur de modifier la date de début de leur proposition. Elle n’a pas tenté de camoufler ou de cacher le courriel de M. et Mme McArthur du 23 septembre 2014 et elle a pleinement participé au processus d’enquête.

[337] Mme McArthur a témoigné qu’après la conversation avec la fonctionnaire, elle a discuté de l’affaire avec M. Haw, [traduction] « afin de déterminer ce que nous pouvions faire pour obtenir les fonds ». Elle a témoigné que M. Haw avait communiqué avec M. Lisk. Elle a affirmé qu’elle pensait qu’il y avait eu un échange de courriels. M. Haw n’a pas témoigné à l’audience et M. Lisk n’a pas témoigné au sujet de ses échanges avec M. Haw.

[338] M. et Mme McArthur savaient que le PARI ne couvrait que les projets qui n’avaient pas été commencés. La fonctionnaire leur a rappelé le 26 août 2014 et, selon les notes de Mme Pereira, de nouveau le 15 septembre 2014. Ils savaient qu’ils devaient présenter une nouvelle proposition, car leur proposition initiale avait été rejetée le 7 juillet 2014. À ce moment‑là, il n’y avait aucune preuve établissant que la fonctionnaire savait qu’ils avaient commencé leur projet en juillet. La fonctionnaire a témoigné qu’elle avait pris connaissance pour la première fois le 15 septembre 2014 du fait que M. et Mme McArthur avaient commencé leur projet. Pendant leur conversation téléphonique, elle a informé M. et Mme McArthur que le PARI ne finançait pas les projets déjà commencés, ce qui n’a pas été contesté par l’employeur. Je conclus que le dépôt de la plainte contre la fonctionnaire avait pour but d’exercer une pression sur le PARI en vue d’obtenir un financement.

[339] En réponse à sa participation aux plaintes écrites déposées auprès de M. Lisk, Mme McArthur a témoigné qu’elle [traduction] « avait également participé à la rédaction des deux lettres et que celles‑ci avaient pour but d’obtenir les fonds d’une manière quelconque ». Ce témoignage a été corroboré par le témoignage du Dr Dobson selon lequel avant sa participation, une discussion avait eu lieu entre M Haws et M. Lisk au sujet d’une plainte.

[340] La fonctionnaire, d’autre part, n’avait rien à gagner de la réception des fonds par M. et Mme McArthur. Elle avait atteint tous ses objectifs pour l’année et ne recevait aucune rémunération en raison de l’approbation de l’entente de contribution de M. et Mme McArthur, qui n’avait aucune incidence sur ses évaluations du rendement. Elle n’avait aucun motif ni aucune intention, ce qui n’a pas été contesté par l’employeur.

[341] Le 24 septembre 2014, la fonctionnaire a envoyé au Dr Dobson tous ses échanges de courriels avec M. et Mme McArthur. L’entente de contribution faisait toujours l’objet d’un examen par le Dr Dobson. Il avait reçu le courriel du 23 septembre 2014 de M. et Mme McArthur, affirmant qu’ils avaient commencé les travaux de leur projet et dans lequel Mme McArthur a indiqué que si ce fait les rendait inadmissibles au financement, qu’il en soit ainsi. Même si je suis d’accord avec la fonctionnaire qu’il incombait à la direction de décider si la demande serait approuvée, elle aurait dû faire un suivi auprès de M. et Mme McArthur et de la direction afin de les informer de la situation.

[342] Le Dr Dobson et M. Lisk n’ont pas communiqué avec la fonctionnaire pour discuter du courriel de M. et Mme McArthur ou tenter de discuter d’une date de début appropriée. L’employeur a choisi plutôt d’amorcer une [traduction] « enquête disciplinaire et de recherche des faits » basée sur l’allégation que la fonctionnaire avait conseillé à M. et Mme McArthur de falsifier leur demande. L’employeur a automatiquement supposé qu’il y avait une inconduite potentielle, même s’il savait qu’il aurait été possible de diviser le projet afin de déterminer une date de début appropriée, comme le PARI l’avait fait souvent dans le passé.

[343] La plainte déposée par M. McArthur auprès de M. Lisk indique que la fonctionnaire lui avait demandé de modifier la date de début. À l’audience, il n’a pas témoigné que la fonctionnaire lui avait demandé de modifier la date de début. Toutefois, en contre‑interrogatoire, il a confirmé qu’il maintenait sa position selon laquelle la fonctionnaire lui avait effectivement demandé de modifier la date de début. Je souligne également que la plainte a été déposée le 25 octobre 2014, soit le lendemain de l’approbation de la proposition et un mois suivant le courriel de Mme McArthur daté du 23 septembre 2014, informant le PARI qu’ils avaient déjà commencé leur projet. Rien dans son courriel du 23 septembre ne laisse entendre ou ne fait référence à la suggestion alléguée de la fonctionnaire de falsifier la date de début de leur projet. À aucun moment au cours du processus de demande, soit du 13 juin à septembre 2014, M. et Mme McArthur ne se sont plaints au PARI au sujet de la fonctionnaire. Ils n’ont jamais demandé d’être réaffectés à un autre CTI.

[344] Mme Lowder et M. Palmer ont témoigné que lorsque les demandeurs ne collaborent pas à l’échange de renseignements, y compris les renseignements financiers, il n’existe aucune confiance, et le directeur doit s’impliquer dans le dossier. Mme Lowder a témoigné qu’à titre de CTI, elle fait toujours l’objet de plaintes. Les CTI qui ne font pas l’objet de plaintes ne font pas leur travail. M. Palmer a témoigné que lorsqu’il a reçu une plainte, son approche consistait à en discuter avec le CTI concerné. Il a expliqué que le rôle de directeur consistait à aider les CTI et à collaborer avec eux dans l’élaboration d’ententes de contribution avant de mettre au point les propositions. M. Palmer a expliqué que les projets ont des dates de début générales. Les CTI peuvent discuter d’une date de début d’un projet en fonction des étapes du projet. Si le projet a été commencé de manière importante et que le risque est partiellement en cours, le CTI et le directeur doivent communiquer avec le client pour déterminer s’il reste quelque chose à soutenir.

[345] En ce qui concerne l’antidatage d’une date de début, M. Palmer a déclaré que ce n’est pas habituel, mais que ça pouvait être fait dans des circonstances visant moins d’une semaine. Mme Lowder a déclaré qu’en ce qui concerne la modification des dates, une fois qu’une proposition est achevée, le CTI peut recommander une date de début. La proposition est ensuite acheminée à la personne détenant le pouvoir de signature. M. et Mme McArthur n’étaient pas organisés et ont contribué au retard en refusant de fournir les renseignements financiers requis. Tout au long du processus, la fonctionnaire n’a obtenu aucune aide du Dr Dobson. Il a témoigné clairement que selon ses attentes, les CTI traiteront toutes les questions seules, sans son aide. M. Lisk, d’autre part, a témoigné que la fonctionnaire aurait dû demander la participation du Dr Dobson plus tôt.

[346] Selon les éléments de preuve, M. Lisk ou le Dr Dobson n’ont, à aucun moment, reconnu que M. et Mme McArthur ne collaboraient pas. Ils n’ont pas communiqué avec la fonctionnaire pour déterminer ce qui s’était passé ou comment ils pourraient déterminer une date de début appropriée. Ils ont plutôt choisi d’amorcer une enquête sur la gestion des dossiers de la fonctionnaire. Tout au long du processus de demande, la correspondance par courriels entre novembre 2013 et septembre 2014 démontre que M. et Mme McArthur disaient avoir désespérément besoin d’un financement, sans toutefois collaborer avec la fonctionnaire; cette situation est attestée par leur refus de communiquer leurs renseignements financiers et en prenant beaucoup de temps pour répondre aux demandes de renseignements de la fonctionnaire afin de remplir leur demande.

[347] En appliquant le critère énoncé dans Faryna et en s’appuyant sur les éléments de preuve et les témoignages des témoins, selon la prépondérance des probabilités, la preuve n’est pas suffisante pour me permettre de conclure que la fonctionnaire a sciemment conseillé à M. et Mme McArthur de falsifier ou de fournir de faux renseignements dans leur demande pour obtenir un financement qui n’aurait pas été approuvé autrement. En fin de compte, M. et Mme McArthur savaient que la présentation de faux renseignements pour obtenir un financement était contraire aux règles. La cyberattaque n’a eu aucune incidence sur le début de leur projet. Pourtant, l’employeur l’a invoqué pour justifier la modification de la date de début, afin de ne pas pénaliser M. et Mme McArthur.

[348] Mme Pereira a témoigné qu’elle avait consigné les réponses de la fonctionnaire mot pour mot et au fur et à mesure que M. Lisk posait des questions. Je n’ai aucune raison de douter de l’exactitude de ses notes. Les notes indiquent que la fonctionnaire a déclaré que le projet avait été soumis le 15 septembre 2014, qu’elle savait qu’il avait été commencé, qu’elle avait eu une conversation avec M. McArthur au cours de laquelle il avait dit qu’ils l’avaient commencé et qu’elle lui a dit : [traduction] « Vous ne pouvez pas avoir commencé le projet parce que le PARI ne le couvrira pas. Vous n’avez donc pas commencé le projet, n’est‑ce pas? » Cela est conforme au témoignage de la fonctionnaire à l’audience. Les notes n’indiquent nulle part que la fonctionnaire a dit à M. et Mme McArthur de modifier la date de début dans leur proposition. Au contraire, elle leur a rappelé de nouveau que le PARI n’approuvera pas le financement de projets qui ont déjà été commencés.

[349] Les notes de Mme Pereira de l’audience disciplinaire et de recherche des faits, ainsi que les échanges de courriels entre la fonctionnaire et M. et Mme McArthur et leur témoignage établissent clairement que M. et Mme McArthur comprenaient les règles, mais qu’ils ont néanmoins décidé de présenter leur proposition avec une date de début fausse. Il n’y a aucune indication que la fonctionnaire leur a dit de modifier la date de début. Elle a fourni au Dr Dobson toutes ses communications par courriels avec M. et Mme McArthur, y compris le courriel du 23 septembre 2014, dans lequel Mme McArthur a affirmé qu’ils avaient commencé leur projet en juillet 2014, et que si cette date les rendait inadmissibles au financement, qu’il en soit ainsi. Le Dr Dobson disposait de ces renseignements lorsqu’il a examiné la proposition de M. et Mme McArthur. La fonctionnaire a été honnête relativement à tous ses renseignements pendant le processus d’enquête.

[350] Le témoignage de la fonctionnaire concernant son souvenir de sa conversation avec M. McArthur n’a pas été contesté par l’employeur. L’audience disciplinaire et de recherche des faits a pris fin soudainement lorsque M. Lisk a déclaré qu’il s’agissait [traduction] « d’une conversation malheureuse ». Il a supposé automatiquement que la fonctionnaire avait dit à M. et Mme McArthur de modifier la date de début dans leur proposition plutôt que de l’interroger davantage et de lui donner la pleine possibilité de répondre. En outre, la fonctionnaire n’a pas reçu de copie de la plainte ou des allégations contre elle. Elle n’a pas non plus reçu de copie du rapport d’enquête ou les documents sur lesquels le rapport était fondé. Pourtant, l’employeur a soutenu qu’elle avait eu l’occasion de dire la vérité et de rétablir la vérité, mais qu’elle ne s’était pas prévalue de cette occasion. Il l’a accusé d’avoir menti et de n’avoir manifesté aucun remords pendant l’enquête, ce qui constituait en soi un motif de licenciement. Je conclus que cette conduite de la part de l’employeur est abusive.

[351] Seule une partie des documents sur lesquels le rapport est fondé a été déposée en preuve. La preuve documentaire produite par l’employeur était incomplète et non fiable. Le rapport d’enquête contenait des inférences, des hypothèses et des conclusions fondées sur de l’information incomplète. Le rapport d’enquête et la grande partie de son contenu ne sont pas du tout fiables.

[352] L’exactitude des notes de Mme Pereira et les écarts entre celles‑ci et le rapport sur la recherche des faits ont été remis en question. La liste de documents figurant dans le rapport sur la recherche des faits ne mentionne pas les estimations du sous‑traitant en date du 2 juillet 2014 et du 15 septembre 2014. La fonctionnaire n’a pas été interrogée spécifiquement sur ces documents et, par conséquent, elle ne pouvait pas répondre aux allégations découlant de ceux‑ci. Toutefois, l’employeur les a invoqués à l’appui de l’allégation qu’elle avait conseillé à la société P de les falsifier et a soutenu qu’elle avait été malhonnête pendant le processus d’enquête.

[353] Je n’ai aucune raison de douter du témoignage de la fonctionnaire selon lequel elle avait besoin d’éclaircissements sur ce qui s’était passé relativement au projet de M. et Mme McArthur. Je crois qu’elle utilisait son téléphone mobile à son bureau situé sur la promenade Sussex, que la réception était mauvaise et qu’elle était sortie de son bureau pour qu’elle puisse mieux comprendre et qu’elle a demandé de nouveau à M. McArthur : [traduction] « Vous n’avez pas commencé le projet, n’est‑ce pas? » Je conclus également que sa déclaration selon laquelle elle n’a pas vu la deuxième entente sur le développement de logiciels d’Oak Computing datée du 15 septembre 2014 et qu’elle l’a vu pour la première fois à l’audience est crédible. La date modifiée dans les documents d’Oak Computing ne permet pas d’établir qu’elle a sciemment conseillé à M. et Mme McArthur de falsifier la date de début. La preuve me permet de conclure que M. et Mme McArthur ont falsifié leur demande.

[354] Le Dr Dobson a témoigné qu’il a pris connaissance des interactions de la fonctionnaire avec la société P dans le cadre d’une discussion avec elle à un moment donné au milieu de 2014. Elle l’a alors informé qu’ils demandaient un financement de 50 000 $ dans le cadre du PARI. Elle l’a averti au préalable qu’elle travaillait en fonction de ce montant, ce qui est conforme à son témoignage et à celui de Mme McArthur. Mme McArthur a affirmé qu’à un moment donné en juin 2014, la fonctionnaire a dit à elle et à son époux que [traduction] « la somme avait été réservée » pour eux. M. et Mme McArthur ont allégué que la fonctionnaire leur avait promis une somme de 50 000 $.

[355] Je suis d’avis que la déclaration de Mme McArthur selon laquelle elle avait été confuse lorsqu’elle a été informée par la fonctionnaire le 16 juin 2014 que leur demande avait été refusée et qu’elle estimait que leur demande était [traduction] « complète » parce que la somme de 50 000 $ avait été réservée pour leur projet n’est pas crédible. Je conclus que le témoignage de M. et Mme McArthur est entièrement fallacieux et intéressé en ce qui concerne la façon dont ils concilieraient les courriels du 16 juin 2014, alors qu’on leur avait dit que leur demande avait été refusée, et la conversation de M. McArthur avec la fonctionnaire du 15 septembre 2014, lorsqu’elle lui aurait dit que la somme de 50 000 $ serait déposée dans leur compte bancaire. Les deux ont témoigné qu’ils estimaient que la somme de 50 000 $ avait été réservée pour leur projet, mais la fonctionnaire les avait informés par écrit que leur demande avait été refusée.

[356] Si une promesse de financement de 50 000 $ avait été faite, elle était conditionnelle à la divulgation des renseignements financiers requis et au fait qu’ils n’avaient pas encore commencé les travaux liés à leur projet. M. et Mme McArthur connaissaient les règles. La fonctionnaire a témoigné qu’elle les avait informés dès le début de leur réunion en 2013 que le PARI ne finançait que des projets qui n’étaient pas commencés. La fonctionnaire leur a répété tout au long de ses communications écrites avec eux, ce qui est attesté par leur correspondance par courriel. Ils l’ont également reconnu en contre‑interrogatoire.

[357] La preuve la plus convaincante est le courriel du 26 août 2014 que la fonctionnaire a envoyé à Mme McArthur l’informant que le PARI ne finance que les projets qui n’ont pas été commencés. M. et Mme McArthur savaient qu’ils avaient commencé les travaux le 2 juillet 2014; cependant, ils ont choisi de ne pas en informer la fonctionnaire. La correspondance par courriel entre la fonctionnaire et eux, de juin 2014 à août 2014, démontre clairement qu’ils n’ont, en aucun temps, informé la fonctionnaire qu’ils avaient commencé les travaux sur leur projet. Je conclus que M. et Mme McArthur ont menti dans leur demande de PARI, sans encouragement ou directives de la part de la fonctionnaire.

[358] L’employeur a soutenu qu’il est bien établi que même dans les cas où tous les motifs cités dans la lettre de licenciement ne sont pas établis, le rôle de la Commission consiste à évaluer la gravité des motifs qui ont été établis à l’audience dans la détermination du motif de licenciement. Je ne suis pas d’accord.

[359] Il est bien établi en droit qu’un employeur est tenu de respecter assez rigoureusement les motifs choisis pour agir. Un employeur ne peut pas reformuler le motif invoqué simplement parce que la preuve n’appuie pas le motif invoqué, mais plutôt quelque chose qui lui ressemble. Le fait d’interdire à l’employeur de modifier à l’arbitrage les motifs de licenciement a pour but de préserver l’équité du processus d’arbitrage. La lettre de licenciement ne mentionne aucunement une promesse à M. et Mme McArthur. La lettre mentionne spécifiquement que la fonctionnaire a conseillé à M. et Mme McArthur de falsifier ou de présenter des renseignements faux pour obtenir un financement qu’ils ne pourraient pas obtenir autrement.

[360] Aucun élément de preuve n’étaye l’allégation de M. et Mme McArthur selon laquelle la fonctionnaire leur a sciemment conseillés de falsifier leur proposition. La fonctionnaire n’avait rien à gagner d’une proposition approuvée. M. et Mme McArthur avaient désespérément besoin d’argent et ont utilisé leurs personnes‑ressources pour s’assurer de l’obtenir. Il n’y a aucun élément de preuve permettant d’étayer l’allégation selon laquelle la fonctionnaire avait conseillé un demandeur du PARI de falsifier ou de présenter des renseignements faux en vue d’obtenir un financement qui n’aurait pas été approuvé autrement. Par conséquent, il n’existe aucun motif justifiant le licenciement de la fonctionnaire à cet égard.

B. Existaient‑ils des lacunes dans le traitement des dossiers par la fonctionnaire s’estimant lésée qui ont nui à la réputation du PARI CNRC?

[361] Le décideur, M. Ciobanu, a témoigné que le licenciement était justifié en raison des actes de la fonctionnaire à l’égard du dossier de la société P. En contre-interrogatoire, il a témoigné que la plainte déposée par la société P aurait suffi pour justifier le licenciement. Les plaintes déposées par les sociétés I et M n’étaient pas essentielles au licenciement. Ayant déterminé qu’il n’existe aucune preuve d’inconduite justifiant le licenciement de la fonctionnaire sur la base de ses actes dans le traitement du dossier de la société P, je dois maintenant examiner les allégations de l’employeur selon lesquelles il existait des lacunes dans le traitement des dossiers par la fonctionnaire qui ont nui à la réputation du PARI-CNRC.

[362] Le 15 décembre 2014, le CNRC a mené une autre enquête sur les dossiers antérieurs et actuels de la fonctionnaire, afin d’examiner les deux plaintes concernant les sociétés I et M. M. Lisk a témoigné que la société M estimait que la fonctionnaire avait promis un projet qui ne pouvait être exécuté et que ce malentendu a fait en sorte que la société M est devenue frustrée à l’égard du PARI. Il a déclaré que la fonctionnaire avait mené la cliente à tirer des conclusions fausses et qu’il s’agissait d’une mauvaise gestion du dossier. En ce qui concerne le dossier de la société I, l’employeur était d’avis que la fonctionnaire avait fourni ses renseignements contradictoires.

[363] En décembre 2014, la fonctionnaire a averti la direction que la société M déposerait une plainte. Le courriel daté du 23 décembre 2014, dont la ligne d’objet indiquait [traduction] « Interactions récentes du PARI », semble indiquer que le Dr Dobson a eu une conversation téléphonique avec la cliente. Selon M. Lisk, l’entreprise était jeune et la fonctionnaire lui avait fourni des renseignements erronés et mal géré son dossier. La fonctionnaire leur a donné de faux espoirs.

[364] La plainte de la société I a été déposée en avril 2013 dans le cadre de la post‑évaluation du PARI-CNRC, soit le document [traduction] « Procédures de rétroaction et de plaintes ». À l’origine, le Dr Dobson a témoigné qu’aucune autre mesure n’avait été prise à la suite de cette plainte. Les évaluations du rendement de la fonctionnaire ne mentionnent aucunement cette plainte; la fonctionnaire n’a fait l’objet d’aucune mesure disciplinaire à cet égard. La preuve documentaire démontre que le Dr Dobson a fait un suivi auprès de la société I le 18 décembre 2014, et qu’il a reçu une plainte par courriel. Le problème était le fait qu’elle avait utilisé le terme [traduction] « cupide ».

[365] La fonctionnaire a témoigné que pendant la réunion disciplinaire et de recherche des faits, la plainte de la société M en date de décembre 2014 ne lui a pas été communiquée; on ne l’a pas non informé de la plainte de la société I d’avril 2013. Tel qu’il a été mentionné, aucune copie du rapport d’enquête ou des documents sur lesquels il était fondé n’a été donnée à la fonctionnaire. Elle n’a pas eu l’occasion d’y répondre.

[366] La fonctionnaire a soutenu que l’employeur n’avait pas imposé la mesure disciplinaire en temps opportun. La Commission doit trancher la question du délai au moment de déterminer si une mesure disciplinaire aurait dû être imposée relativement à d’autres plaintes alléguées, que l’employeur a prises en considération lorsqu’il a déterminé que le licenciement était approprié.

[367] Pour les motifs qui suivent, je conclus qu’il n’existait aucune lacune dans le traitement des dossiers par la fonctionnaire qui aurait nui à la réputation du PARI-CNRC. L’employeur n’a déposé aucun élément de preuve quant à l’atteinte à la réputation du PARI-CNRC. L’employeur n’a pas établi qu’il avait subi un préjudice en raison du traitement par la fonctionnaire des dossiers des sociétés P, I et M.

[368] M. Lisk et le Dr Dobson ont tous les deux reconnu que pendant la période visée en 2013 à 2014, la fonctionnaire n’a pas été informée de problème quelconque dans ses communications avec les clients ou qu’elle devait améliorer son traitement des dossiers. La fonctionnaire n’a eu aucun avertissement, aucune rétroaction, ni aucune communication d’une plainte ayant trait à son travail. Tout au long du processus d’enquête, à compter de la date à laquelle la société P a déposé sa plainte, jusqu’à la date de son licenciement, la fonctionnaire a continué d’exercer ses fonctions et de travailler avec les clients. Elle a été retirée du dossier de la société P uniquement à la demande de M. et Mme McArthur. L’employeur ne l’a pas suspendue, n’a pas limité sa capacité pour exécuter son travail et n’a pas limité son accès à l’information dans le cadre du PARI. S’il avait de telles préoccupations quant à sa réputation, il l’aurait réaffecté à un autre travail.

[369] En outre, l’employeur n’a cité personne de la société M ou de la société I à témoigner au sujet de leurs plaintes. Le seul élément de preuve qui a été présenté était un rapport d’enquête incomplet et non fiable. Il contenait des inférences, des hypothèses et des conclusions fondées sur des documents incomplets. L’employeur n’a pas produit tous les documents sur lesquels le rapport était fondé. Il s’est fondé sur une preuve par ouï‑dire de M. Lisk ayant trait aux plaintes reçues des sociétés, et le Dr Dobson a témoigné que la fonctionnaire n’avait fait l’objet d’aucune mesure disciplinaire à l’égard de la plainte déposée par la société I et qu’elle l’avait averti de la plainte de la société M.

[370] Les notes de Mme Pereira constituent le seul élément de preuve fiable. Je conclus de ces notes que la conduite de la fonctionnaire à l’égard de ces plaintes équivalait à un manque d’une bonne communication et d’une omission de veiller à ce que ses clients comprennent clairement ce qui devait être fait; ce que la fonctionnaire a reconnu dans son témoignage. La fonctionnaire a reconnu qu’elle aurait dû faire preuve d’une meilleure communication avec ses clients et susciter la participation de son directeur plus tôt lorsque des problèmes sont survenus. À mon avis, ces lacunes n’équivalent pas à des motifs de discipline, mais plutôt à des problèmes de gestion du rendement. Si l’employeur avait des préoccupations quant à la capacité de la fonctionnaire de gérer les attentes de ses clients, plutôt qu’un processus disciplinaire, il aurait dû suivre un processus de gestion du rendement.

[371] Même s’il pourrait exister des problèmes relatifs à sa communication avec ses clients, ils ne constituaient pas des lacunes qui ont nui à la réputation du PARI-CNRC. Il n’y a aucune preuve que le PARI-CNRC a subi un préjudice. L’employeur n’a pas établi qu’il a subi un préjudice en raison du traitement par la fonctionnaire des dossiers des sociétés I, M ou P. Par conséquent, je conclus qu’il n’existe aucun motif d’imposer une mesure disciplinaire à la fonctionnaire à cet égard. Ayant déterminé qu’il n’existe aucun motif de licenciement, je n’ai pas à trancher la question de savoir si l’inconduite de la fonctionnaire était suffisamment grave pour justifier le licenciement.

VI. Conclusion et redressement

[372] M. Lisk a expliqué qu’avant le 28 février 2003, la fonctionnaire n’était pas une employée du CNRC, car elle travaillait à l’université Carleton, qui embauchait des conseillers technologiques en vertu d’un contrat pour d’autres organisations à but non lucratif. Ils étaient appelés des [traduction] « membres du réseau », mais ils exerçaient leurs fonctions en tant que conseillers technologiques membres de l’effectif. La lettre d’offre datée du 28 février 2003 constituait sa date d’embauche officielle en tant que CTI au PARI-CNRC. Cette information est également confirmée dans le curriculum vitae de la fonctionnaire. Elle a soutenu avoir été une CTI au PARI-CNRC de 1993 à 2015.

[373] En tant que mesures correctives, la fonctionnaire a demandé d’être réintégrée dans son poste d’attache, rétroactivement à la date de son congédiement; qu’elle ne subisse aucune perte de rémunération, d’indemnisation ou d’avantage social (y compris la pension) en raison des actes de l’employeur; qu’elle soit indemnisée pour préjudice moral; que la lettre de licenciement signée par M. Ciobanu et datée du 10 mars 2015, soit annulée et détruite en sa présence; que tout document lié à l’enquête disciplinaire, y compris, sans toutefois s’y limiter, les notes, la preuve documentaire, ou le rapport d’enquête soient détruits en sa présence; que toute mention d’une mesure disciplinaire soit radiée de son dossier personnel; qu’elle bénéficie de toute autre mesure afin de remédier complètement la situation; et qu’elle soit indemnisée intégralement.

[374] Les parties ont demandé que j’accueille leur requête conjointe visant à scinder l’audience. À l’audience, j’ai accueilli cette requête et j’ai conclu que si je faisais droit au grief, j’autoriserais les parties à négocier le redressement approprié.

[375] La fonctionnaire a témoigné que depuis son licenciement, elle travaille en tant que gestionnaire principale commerciale en architecture d’Algonquin à BGIS, une filiale de Brookfield Properties. Les allégations de fraude et de malhonnêteté sont graves et peuvent être fort dommageables pour ceux et celles qui en sont accusés. Lorsque, comme en l’espèce, une partie formule en vain de telles allégations et qu’elle a accès à suffisamment de renseignements pour conclure que l’autre partie n’a pas fait preuve de malhonnêteté ou d’un comportement frauduleux, il est approprié d’accorder des dommages. Dans la détermination du redressement approprié, les parties tiendront compte de l’octroi de dommages.

[376] Si les parties ne sont pas en mesure de convenir d’un redressement approprié, elles peuvent souhaiter tenter la médiation de la question en recourant aux Services de règlement des différends (SRD) de la Commission.

[377] Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

(L’ordonnance apparaît à la page suivante)


 

VII. Ordonnance

[378] Le grief est accueilli.

[379] Les parties disposeront d’un délai de 90 jours pour tenter de déterminer le redressement approprié pour le licenciement illégal de la fonctionnaire. Le redressement devra inclure une indemnité pour dommages. Si elles ne sont pas en mesure de déterminer le redressement approprié, elles peuvent communiquer avec les SRD de la Commission et participer à une médiation pour régler la question du redressement. Si les parties règlent la question du redressement, elles doivent en informer la Commission afin qu’elle puisse fermer son dossier.

[380] Si, à la fin de la période de 90 jours, les parties ne sont toujours pas en mesure de régler la question du redressement, elles devront communiquer immédiatement avec la Commission pour organiser une vidéoconférence en vue de discuter la tenue d’une audience sur la question du redressement.

[381] Les noms des trois sociétés qui ont déposé des plaintes contre la fonctionnaire seront anonymisés dans ma décision en tant que société P, société M et société I. Toutes les autres demandes d’anonymisation sont rejetées.

[382] Les pièces seront caviardées comme suit : Tous les renseignements sur lesquelles les parties se sont entendues seront caviardés. De plus, les renseignements contenus dans les pièces, indiquées en rouge et en jaune dans le tableau de l’employeur du 7 décembre 2018, seront caviardés. Enfin, les noms des dirigeants des sociétés M et I, qui ont été indiqués en turquoise dans le tableau susmentionné de l’employeur, seront caviardés.

[383] Dans les 90 jours suivant la date de la présente décision, les pièces caviardées doivent être déposées auprès de la Commission. L’avocat de l’employeur doit veiller à ce que le caviardage soit effectué conformément à la présente ordonnance. Les représentantes de la fonctionnaire doivent informer l’avocat de l’employeur s’ils souhaitent vérifier les pièces caviardées avant leur dépôt auprès de la Commission. Les pièces originales seront mises sous scellés auprès de la Commission jusqu’à ce que les pièces caviardées soient déposées. Une fois déposées, les pièces originales respectives seront retournées aux parties et les pièces caviardées feront partie du dossier de la Commission.

Le 30 décembre 2020.

Traduction de la CRTESPF

Chantal Homier‑Nehmé,

une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

 

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