Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Les plaignants ont allégué qu’il y avait eu abus de pouvoir dans le choix du processus, dans le choix des critères de mérite et dans l’évaluation de la personne nommée – l’intimé a nié avoir abusé de son pouvoir dans le cadre du processus de nomination – les plaignants ont soutenu que la nomination de la personne nommée présentait des lacunes, entre autres, car la justification pour le choix d’un processus non annoncé avait été rédigée après l’approbation de la nomination – toutefois, la preuve a démontré que l’essentiel de la justification et de l’évaluation avait été préparé avant la nomination – les plaignants ont aussi avancé qu’en choisissant un processus de nomination non annoncé, l’intimé n’avait pas respecté les valeurs que sont l’équité et la transparence – un des plaignant a aussi affirmé que le processus était inéquitable, parce qu’il n’avait pas eu l’occasion de postuler – la Commission a indiqué que même si le plaignant n’avait pas eu l’occasion de postuler, elle était convaincue que le choix de procéder par le biais d’un processus non annoncé était un choix légitime et équitable – l’intimé avait choisi cette façon de procéder de manière objective et dans l’intention de trouver, le plus rapidement possible, une personne qualifiée et expérimentée pour remplacer le titulaire du poste pendant son absence de deux ans – les plaignants ont suggéré que la personne nommée n’effectuait pas les tâches du poste de conseiller principal – selon la preuve présentée, la personne nommée remplaçait bel et bien le titulaire du poste, bien qu’il ait conservé certaines de ses anciennes tâches de chef de projet (CS-03) – sa nomination dans le poste de conseiller principal n’était pas un subterfuge qui cachait un objectif malhonnête – les plaignants ont allégué que l’énoncé des critères de mérite avait été taillé sur mesure et ne satisfaisait pas aux exigences du poste – ils ont aussi fait valoir que l’intimé avait fait preuve de favoritisme personnel et de mauvaise foi en abaissant les critères de mérite et en effectuant cette nomination – selon la preuve, la Commission a conclu que l’intimé avait pu établir un lien entre les qualifications apparaissant dans l’énoncé des critères de mérite et les normes de qualification établies pour le groupe Économique et services de sciences sociales – ainsi, le choix des critères de mérite ne constituait pas un abus de pouvoir – de plus, la preuve présentée n’avait pas permis d’établir que le processus de nomination non annoncé était teinté de favoritisme personnel – les plaignants ont également allégué que la personne nommée n’était pas qualifiée pour le poste – cependant, ils n’ont pas établi que l’intimé l’avait mal évaluée – par conséquent, la Commission a conclu que les plaignants n’avaient pas démontré que l’intimé avait abusé de son pouvoir dans le cadre de ce processus de nomination.

Plaintes rejetées.

Contenu de la décision

Date: 20210629

Dossiers: EMP-2017-10992 et 10993

 

Référence: 2021 CRTESPF 78

Loi sur la Commission

des relations de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral et

Loi sur l’emploi dans la fonction publique

Armoiries

Devant une formation de la

Commission des relations

de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral

ENTRE

 

charles bérubé et pierre gautreau

plaignants

 

et

 

Sous-ministre de L’INDUSTRIE

 

intimé

et

AUTRES PARTIES

Répertorié

Bérubé c. Sous-ministre de l’Industrie

Affaire concernant une plainte d’abus de pouvoir aux termes des alinéas 77(1)a) et b) de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique

Devant : Nathalie Daigle, une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

Pour les plaignants : Eux-mêmes

Pour l’intimé : Viviane Beauregard, avocate

Pour la Commission de la fonction publique : Louise Bard, analyste principale

Affaire entendue par vidéoconférence,

les 9 et 10 novembre 2020, et le 10 mars 2021.


MOTIFS DE DÉCISION

I. Introduction

[1] Les plaignants, Charles Bérubé et Pierre Gautreau, ont chacun déposé une plainte en vertu des alinéas 77(1)a) et b) de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique (L.C. 2003, ch. 22, art. 12 et 13; la « LEFP »), dans laquelle ils formulent des allégations d’abus de pouvoir à l’encontre de l’intimé, le sous-ministre de l’Industrie, aussi connu sous le titre d’usage d’Innovation, Sciences et Développement économique Canada (ISDEC ou l’« intimé »). Selon les plaignants, il y a eu abus de pouvoir dans le choix d’un processus non annoncé, dans le choix des critères de mérite et dans l’évaluation du candidat pour doter le poste de conseiller principal, Direction générale de la petite entreprise, classifié au groupe et au niveau EC-08.

[2] L’intimé nie avoir abusé de son pouvoir dans le cadre du processus de nomination.

[3] La Commission de la fonction publique (CFP) n’était pas présente à l’audience, mais elle a présenté des arguments écrits concernant ses politiques et ses lignes directrices applicables. Elle n’a pas pris position sur le bien-fondé des plaintes.

[4] Pour les motifs énoncés ci-après, les plaintes sont rejetées. Les plaignants n’ont pas démontré, selon la prépondérance des probabilités, que l’intimé a abusé de son pouvoir dans le cadre de ce processus de nomination.

II. Contexte

[5] Le 8 février 2017, un « Avis de nomination intérimaire » (ANI) a été publié, mentionnant que Wai Fai Lee avait été nommé au poste de conseiller principal (EC-08) pour la période du 12 septembre 2016 au 12 septembre 2018.

[6] Les plaignants ont déposé leurs plaintes d’abus de pouvoir le 23 février 2017, auprès de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique (CRTEFP).

[7] Le 19 juin 2017, la Loi modifiant la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique et d’autres lois et comportant d’autres mesures (L.C. 2017, ch. 9) a reçu la sanction royale et a modifié le nom de la CRTEFP pour qu’il devienne la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (la « Commission »).

[8] Le 21 mars 2017, la CRTEFP a ordonné que les deux plaintes soient regroupées aux fins d’une audience.

A. Questions

[9] Je dois trancher les questions suivantes :

1) Y a-t-il eu abus de pouvoir lors du choix d’un processus de nomination non annoncé?

2) Y a-t-il eu abus de pouvoir dans le choix et l’évaluation des critères de mérite?

III. Résumé de la preuve

[10] Les plaignants ont tous les deux témoigné à l’audience.

[11] L’intimé a cité deux témoins : Christian Laverdure, qui, au moment du processus de dotation, était le directeur général du service aux entreprises et le directeur général de la section de la consommation au sein d’ISDEC, et Alain Pelletier, le directeur qui a supervisé l’équipe des Ressources humaines, Partenaires d’affaires, au moment du processus.

[12] Il importe de savoir que le poste de conseiller principal (EC-08) a été classifié au groupe et au niveau EC-08 au sein d’ISDEC en septembre 2013. Le 22 février 2016, « J.J. », le titulaire du poste, a commencé à occuper le poste. Au cours de l’année 2016, des changements organisationnels ont été effectués au sein d’ISDEC et le poste de J.J. a été transféré dans l’équipe de M. Laverdure. À l’automne 2016, J.J. a quitté temporairement son poste, en affectation avec Échanges Canada, et ce départ était prévu jusqu’en septembre 2018. M. Lee a été nommé de façon intérimaire dans le poste pour remplacer J.J.

[13] M. Gautreau a affirmé à l’audience qu’il travaille depuis 36 ans dans la fonction publique. Il occupait, au moment de l’audience, le poste de gestionnaire principal, Produits de l’information, au groupe et au niveau EC-07. Il travaille dans la direction de M. Laverdure. Il a expliqué qu’il y a plus de 10 ans, M. Lee, qui occupait un poste CS-03, et l’équipe de M. Lee, se rapportaient à lui. Cette équipe assurait la gestion de sites Web. M. Gautreau a expliqué que les produits que l’équipe livrait ne contenaient pas d’analyses de marché et ne comportaient pas de données économiques. Il a ajouté qu’en assurant la gestion de sites Web, cette équipe recevait un grand nombre de demandes de clients. Certaines de ces demandes concernaient des problèmes avec les calculs comptables de l’application. Ces problèmes demandaient des changements dans la programmation de l’application. M. Lee, du groupe des CS, avait la responsabilité de faire les corrections à l’application. Selon M. Gautreau, M. Lee était très compétent et corrigeait les bogues dans les programmes.

[14] M. Gautreau a affirmé que, le 7 septembre 2016, M. Laverdure a rencontré son équipe immédiate de gestionnaires, dont M. Gautreau fait partie. M. Laverdure a annoncé aux gestionnaires de son équipe que M. Lee s’était qualifié dans un processus pour un poste au groupe et au niveau CS-05. Selon M. Gautreau, M. Laverdure ne voulait pas prendre le risque que M. Lee soit recruté par une tierce partie. Il avait une solution en tête. Étant donné l’absence de J.J. dans le poste EC-08 pour une période de deux ans, il avait l’intention de nommer M. Lee au poste pour deux ans. Après avoir annoncé son intention, M. Laverdure a demandé aux gestionnaires présents de l’informer s’ils avaient un intérêt pour le poste. Selon M. Gautreau, en annonçant son intention de vouloir garder M. Lee, M. Laverdure a clairement démontré du favoritisme personnel envers lui. Selon lui, M. Laverdure aurait dû rencontrer individuellement les candidats potentiellement intéressés par le poste de conseiller principal (EC-08).

[15] M. Gautreau a affirmé qu’il a des études plus en ligne avec le poste EC-08 que M. Lee, qu’il a beaucoup plus d’expérience que lui et qu’il aurait pu se qualifier pour le poste. En plus, a-t-il affirmé, il occupait un poste de groupe et niveau EC-07. Il a expliqué qu’il détient un baccalauréat en génie et une maîtrise en administration (MBA). Selon M. Gautreau, le choix de M. Laverdure était fait, il comptait sélectionner un candidat de groupe et niveau CS-03 pour le poste de groupe et niveau EC-08. Il n’avait donc aucune chance.

[16] Le 8 septembre 2016, M. Gautreau a informé M. Laverdure par courriel que les membres de son équipe allaient probablement lui poser des questions concernant la nomination intérimaire de M. Lee, puisqu’il ne semblait pas satisfaire aux critères liés aux études pour le poste.

[17] Le 12 septembre 2016, M. Lee a commencé à occuper le poste.

[18] À la suite de son courriel, M. Gautreau n’a vu aucune annonce de la nomination de M. Lee. Il n’a perçu aucun changement, non plus, dans le travail effectué par M. Lee. Il lui a semblé que ses tâches continuaient d’être orientées vers les sites Web et il dirigeait toujours la même équipe. En ce qui concernait J.J., avant son départ, il n’avait pas une équipe technique sous son contrôle.

[19] Le 27 janvier 2017, plus de quatre mois après avoir envoyé son courriel à M. Laverdure, ce dernier lui a répondu. Il lui a répondu que le candidat satisfaisait aux exigences du poste et que l’intimé avait fait toutes les démarches nécessaires pour s’assurer que le processus respectait les règles de dotation.

[20] Ce même jour, le 27 janvier 2017, le premier avis de notification a été publié. La zone de recours était limitée aux employés sous la direction de M. Laverdure. M. Gautreau pouvait donc contester cette nomination. La zone de recours a toutefois plus tard été élargie afin de permettre à d’autres employés de présenter une plainte.

[21] M. Gautreau a affirmé que, dans la semaine qui a suivi l’émission de l’avis de notification, plusieurs économistes de tous les coins du ministère ont partagé avec lui leur consternation pour le motif que le candidat nommé ne semblait pas détenir les qualifications pour le poste.

[22] Le 8 février 2017, le nouvel avis de nomination a été publié. Il élargissait la zone de sélection.

[23] Le 21 ou 22 février 2017, M. Gautreau a rencontré M. Laverdure. M. Laverdure lui a dit, selon son souvenir, qu’il l’avait considéré pour le poste. Selon M. Gautreau, M. Laverdure avait aussi maintenu que M. Lee était qualifié pour le poste. M. Gautreau a maintenu que M. Lee ne l’était pas.

[24] Le 23 février 2017, M. Gautreau a présenté sa plainte.

[25] M. Bérubé, quant à lui, a expliqué qu’il détient deux maîtrises et un doctorat de l’Université du Québec à Montréal. Il travaille à ISDEC depuis 2007 et il occupe le poste de chercheur principal, Direction générale de la petite entreprise, de groupe et niveau EC-07. Il effectue de la recherche socio-économique, c’est-à-dire de la recherche relative aux phénomènes sociaux, économiques et à leurs relations en soutient pour le développement de politiques à ISDEC.

[26] Il a expliqué que, lorsqu’il s’est joint à ISDEC en 2014, le poste EC-08 visé par sa plainte était dans son secteur, qui est un secteur qui effectue des recherches socio-économiques. Toutefois, le poste a été transféré par la suite dans la direction où M. Laverdure travaillait. Or, selon M. Bérubé, aucune recherche n’est faite dans cette direction et il était incohérent de transférer le poste à cette direction.

[27] Il a expliqué que, dans son domaine, les chercheurs forment une communauté d’experts autour de questions spécifiques. Dans certains domaines, par exemple, il fournit lui-même une analyse experte qui fait autorité. Les communautés d’experts permettent l’obtention d’informations fiables et de qualité sur tous les domaines du droit uniforme. Il avait donc un grand intérêt pour un poste au groupe et au niveau EC-08.

[28] Il a expliqué qu’après la publication de l’avis annonçant la nomination intérimaire rétroactive de M. Lee dans le poste EC-08 pour une période de deux ans (du 12 septembre 2016 au 12 septembre 2018), ses chercheurs (dont les postes sont au groupe et aux niveaux EC-04, EC-05 et EC-06) l’ont questionné au sujet de cet avis de nomination. Il a affirmé que le niveau EC-08 est le dernier échelon dans le groupe EC, et qu’ils étaient tous indignés par la nomination d’un employé dont le poste est au groupe et au niveau CS-03 et qui n’avait ni la formation ni l’expérience pour un poste EC-08.

[29] M. Bérubé a demandé aux Ressources humaines la description de travail de ce poste (dont le numéro de poste est le 16038). Le directeur des Ressources humaines lui a fait parvenir la description de travail originale en anglais quelques jours plus tard. La description de travail a plus tard été traduite. Cependant, selon M. Bérubé, la traduction ne reflète pas du tout l’importance des éléments essentiels énumérés dans la version anglaise du document.

[30] Le 22 février 2017, M. Bérubé a rencontré M. Laverdure pour en savoir plus sur le poste et tenter de le convaincre qu’il pourrait, comme chercheur, conduire des travaux de recherche sur la transformation numérique au Canada. Cependant, M. Laverdure lui a répondu qu’il avait un besoin pressant immédiat de poursuivre les activités déjà commencées dans l’équipe. Plusieurs projets de grande ampleur étaient déjà en cours.

[31] Selon M. Bérubé, il a questionné M. Laverdure sur ses démarches pour trouver le meilleur candidat. M. Laverdure lui a répondu qu’il l’avait fait à l’intérieur de son groupe. Il avait invité ses gestionnaires à lui communiquer leur intérêt pour le poste. Au cours de la réunion, aucun d’eux ne s’était montré intéressé à effectuer le travail accompli par J.J. Il a donc annoncé qu’il prévoyait nommer M. Lee dans le poste EC-08 afin d’assurer la continuité du travail entrepris.

[32] Le 23 février 2017, M. Bérubé a présenté sa plainte.

[33] M. Laverdure a expliqué que la description de travail du poste de conseiller principal (EC-08) est entrée en vigueur en 2013.

[34] En 2015, M. Laverdure a commencé à occuper les fonctions de directeur général du service aux entreprises et de directeur général de la section de la consommation au sein d’ISDEC. Au cours de l’année 2016, à la suite de changements organisationnels au sein d’ISDEC, J.J. s’est joint à l’équipe de M. Laverdure.

[35] À l’automne 2016, J.J. a quitté temporairement son poste, et ce départ était prévu jusqu’en septembre 2018 avec Échanges Canada.

[36] Ce départ a créé des besoins opérationnels dans l’équipe de M. Laverdure. Ce dernier s’est vu dans l’obligation de doter le poste en fonction des nouveaux besoins d’ISDEC. À ce moment, M. Laverdure avait besoin d’un candidat pouvant poursuivre le travail qui avait été commencé par J.J., soit de mettre en place une stratégie numérique dans le cadre des services gouvernementaux offerts au public. Voici entre autres quelques projets qui étaient en cours à ce moment-là : le guichet unique, les services en ligne et la mise en œuvre du numéro d’entreprise. Pour faire ce travail, le détenteur du poste devait posséder une connaissance des tendances nationales et mondiales de la technologie numérique et des transformations numériques.

[37] M. Laverdure n’a pas de souvenir d’avoir dit à M. Gautreau ou à quiconque que M. Lee s’était qualifié dans un processus de dotation pour un poste de niveau CS-05 et qu’il voulait le garder dans son équipe.

[38] Étant donné le départ imminent de J.J., M. Laverdure s’est adressé à deux représentants des Ressources humaines : M. Pelletier et une autre représentante. L’objectif de M. Laverdure était de trouver un remplaçant à J.J. pendant son absence de deux ans. Un consensus s’est peu à peu dégagé au cours de ces discussions : une nomination intérimaire était la meilleure solution.

[39] M. Laverdure a donc discuté de cette option avec son équipe de gestionnaires, dont M. Gautreau faisait partie. Il a invité les gestionnaires de son équipe à lui dire s’ils avaient un intérêt pour le poste. M. Lee n’était pas présent au cours de cette réunion. Aucun gestionnaire ne lui a dit être intéressé par le poste. Au cours de la réunion, M. Laverdure a abordé l’option de nommer M. Lee dans le poste.

[40] M. Lee travaillait avec J.J. pour M. Laverdure. M. Laverdure estimait que M. Lee avait les connaissances et l’expérience requises pour combler le poste de conseiller principal. Il serait en mesure de poursuivre les divers projets en cours visant la mise en place d’une stratégie numérique dans le cadre des services gouvernementaux offerts au public.

[41] En septembre 2016, lors de discussions avec M. Lee, M. Laverdure s’est assuré que M. Lee était la bonne personne, c’est-à-dire la mieux qualifiée et la plus expérimentée, pour remplir les exigences spécifiques recherchées durant l’absence de J.J. M. Lee était dans le poste de chef de projet (CS-03) au sein d’ISDEC depuis août 2003. Il travaillait avec J.J. et répondait aux demandes d’ISDEC découlant de la modernisation des programmes et des services.

[42] Par la suite, M. Laverdure a informé l’équipe de la haute gestion qu’il estimait que M. Lee détenait les connaissances et l’expérience pour occuper ce poste pendant la période de deux ans. Il a expliqué que M. Lee était à l’affût des tendances nationales et mondiales en matière de transformation numérique et connaissait bien le domaine de la prestation de services numériques. L’équipe de la haute gestion a approuvé la nomination intérimaire de M. Lee dans le poste.

[43] Le 12 septembre 2016, M. Lee a commencé à exécuter ses tâches reliées à ce nouveau poste de conseiller principal (EC-08), tout en poursuivant ses tâches en tant que CS-03.

[44] M. Laverdure, en collaboration avec les Ressources humaines, a rédigé un nouvel énoncé des critères de mérite (ECM) pour le travail devant être accompli. Pour ce faire, il a d’abord examiné les critères de mérite utilisés dans le cadre de la nomination de J.J. Les représentants des Ressources humaines avaient conseillé qu’il identifie les principales expériences en lien avec les besoins opérationnels et organisationnels d’ISDEC du moment. Ensuite, il s’est fondé sur ses connaissances des aptitudes de M. Lee qu’il avait perçues depuis 2015 afin d’évaluer le candidat.

[45] En octobre et novembre 2016, M. Laverdure a rédigé le document [traduction] « Évaluation des qualifications sur la base de l’Énoncé des critères de mérite (ECM) et des conditions d’emploi ».

[46] Enfin, M. Laverdure a précisé que sa relation avec M. Lee était strictement professionnelle. Ils ne se sont jamais rencontrés à l’extérieur du bureau.

[47] Je note que, dans les mois qui ont suivi une séance de médiation tenue en juillet 2017, deux analyses de classification ont été complétées par l’intimé pour le poste de conseiller principal (EC-08), lequel était occupé de façon intérimaire par M. Lee à ce moment.

[48] Le 29 septembre 2017, à la suite d’une séance de médiation, M. Laverdure a remis aux plaignants une analyse additionnelle préparée par l’intimé. Cette analyse explique de façon plus détaillée dans quelle mesure le candidat satisfait aux exigences du poste. Les plaignants ont contesté la valeur de cette analyse lors de l’audience. Je n’ai pas accordé d’importance à cette analyse étant donné qu’elle a été produite après la nomination contestée par la plainte de dotation. En guise de rappel, j’ai le mandat d’examiner s’il y a eu un abus de pouvoir lors de la nomination de M. Lee, le 8 février 2017, dans le poste de conseiller principal. L’analyse additionnelle a été rédigée en septembre 2017 et n’existait pas au moment de la nomination.

[49] La nomination intérimaire du 8 février 2017 était rétroactive au 12 septembre 2016 et valide jusqu’au 12 septembre 2018. Initialement, la durée de l’intérimaire était prévue du 12 septembre 2016 au 12 septembre 2018. La nomination intérimaire de M. Lee a toutefois été prolongée à quelques reprises pour des périodes de 6 mois étant donné l’absence prolongée de J.J. Au moment de l’audience, M. Lee continuait à occuper le poste.

[50] En avril 2018, M. Laverdure a quitté ses fonctions au sein d’ISDEC.

IV. Analyse

[51] L’article 77 de la LEFP précise qu’un candidat non reçu dans le cas d’un processus de nomination interne annoncé peut présenter une plainte à la Commission selon laquelle il n’a pas été nommé ou fait l’objet d’une proposition de nomination en raison d’un abus de pouvoir.

[52] L’« abus de pouvoir » n’est pas défini dans la LEFP. Toutefois, le par. 2(4) prévoit ce qui suit : « Il est entendu que, pour l’application de la présente loi, on entend notamment par abus de pouvoir la mauvaise foi et le favoritisme personnel [le passage en évidence l’est dans l’original]. » Comme il est indiqué dans Tibbs c. Sous-ministre de la Défense nationale, 2006 TDFP 8 (« Tibbs »), l’abus de pouvoir peut aussi comprendre une conduite irrégulière ou des omissions importantes. Dans une plainte concernant un abus de pouvoir, le fardeau de la preuve repose sur le plaignant (voir Tibbs, aux paragraphes 48 à 55).

A. Question no 1 : Y a-t-il eu abus de pouvoir lors du choix d’un processus de nomination non annoncé?

[53] Les plaintes ont été déposées en vertu de l’alinéa 77(1)b) de la LEFP. Cet alinéa prévoit comme suit le droit de recours lorsque le choix du processus de nomination est en litige :

77 (1) Lorsque la Commission a fait une proposition de nomination ou une nomination dans le cadre d’un processus de nomination interne, la personne qui est dans la zone de recours visée au paragraphe (2) peut, selon les modalités et dans le délai fixés par règlement de la Commission des relations de travail et de l’emploi, présenter à celle-ci une plainte selon laquelle elle n’a pas été nommée ou fait l’objet d’une proposition de nomination pour l’une ou l’autre des raisons suivantes :

b) abus de pouvoir de la part de la Commission du fait qu’elle a choisi un processus de nomination interne annoncé ou non annoncé, selon le cas;

 

[54] L’article 33 de la LEFP énonce aussi que « [l]a Commission peut, en vue d’une nomination, avoir recours à un processus de nomination annoncé ou à un processus de nomination non annoncé ».

[55] M. Laverdure a expliqué à l’audience pourquoi il a choisi un processus non annoncé pour doter ce poste de façon intérimaire.

[56] Il a expliqué qu’il a eu des discussions avec les représentants des Ressources humaines en lien avec la nomination intérimaire lors de rencontres tenues les 1er, 12 et 20 septembre 2016. Par la suite, soit le 2 mars 2017, une chef d’équipe de la Direction générale des ressources humaines a préparé la justification écrite pour le choix d’un processus non annoncé. M. Laverdure a expliqué que cela a été fait en mars puisqu’ils avaient oublié de le faire par écrit auparavant, bien que la décision ait été prise et que la nomination intérimaire ait été décidée en septembre 2016. Ainsi, lorsque les conseillers en ressources humaines ont constaté que la justification écrite était absente du dossier de dotation, ils ont veillé à compléter le dossier. La justification précise ce qui suit :

[…]

Voici un sommaire des discussions tenues en lien avec l’intérimaire EC-08 lors des rencontres du 1er, 12 et 20 septembre 2016 :

La Direction générale du bureau de la consommation (OCA) vit un changement organisationnel important et comprend maintenant quatre directions : OCA- S4B - Service Lab et Innovation. Un travail de collaboration entre la direction générale et les RH doit être amorcée afin d’établir la nouvelle structure et prévoir les besoins.

La direction d’Innovation doit entre autre chose, répondre à la stratégie de services du ministère et du gouvernement, à la mise en œuvre du numéro d’entreprise, aux défis des « Big Data » et des « Open data » (priorité du gouvernement). Un poste de Conseiller principal EC-08 sera à la tête de la division d’Innovation et il est impératif que la personne en place puisse être en mesure de diriger et mettre en œuvre des services qui comportent une composante numérique ou en ligne importante. Ceci implique que la personne puisse être en mesure de déterminer ce qui peut être mise en œuvre de ce qui ne peut l’être (le possible et l’impossible).

Le titulaire actuel du poste EC-08 est partie jusqu’en septembre 2018 via un Échange Canada et vous avez décidé de combler le poste temporairement jusqu’au retour du titulaire. L’option retenue est d’offrir un intérimaire (non-annoncé) de deux ans à Wai Fai Lee puisque vous avez établi qu’il était qualifié et la meilleure personne pour occuper les fonctions étant donné les exigences spécifiques recherchées (numérique). De par son expérience professionnel, M. Lee a justement acquis l’expérience particulière qui était recherchée quant à la direction et la mise en œuvre des services comportant une composante numérique ou en ligne importante. Vous jugez que cette décision est le moyen le plus efficace pour répondre aux priorités gouvernementales tout en minimisant les impacts/risques (interruption de services) que pourrait engendrer le fait de ne pas combler le poste rapidement.

Prière de confirmer que ceci reflète bien nos discussions ou encore à corriger l‘information au besoin.

[…]

[Sic pour l’ensemble de la citation]

 

[57] À l’audience, M. Laverdure a précisé qu’il était entièrement d’accord avec le contenu de cette justification. De plus, il avait jugé qu’un processus annoncé n’était pas la solution la plus efficace pour doter le poste étant donné que J.J. s’absentait pour une période temporaire seulement, c’est-à-dire une période de deux ans. M. Lee devait remplacer J.J. pendant son absence initialement prévue du 12 septembre 2016 au 12 septembre 2018.

[58] Selon les plaignants, l’intimé a fait preuve d’abus de pouvoir en ne respectant pas la Politique de gestion de la dotation en vigueur depuis le 1er avril 2016. Ils affirment que le courriel du 2 mars 2017 de la chef d’équipe de la Direction générale des ressources humaines à M. Laverdure n’équivaut pas à une justification écrite suffisante pour le choix du processus non annoncé. De plus, ils insistent que la justification écrite pour le choix du processus a été préparée cinq mois après le début de la nomination et elle ne justifie pas une nomination intérimaire d’une durée de 24 mois. Selon les plaignants, le fait d’avoir affiché l’avis en retard pourrait avoir donné un avantage indu à la personne nommée en plus de semer le doute chez les candidats potentiels dans la zone de sélection qui auraient été tentés d’exercer leur droit de recours.

[59] M. Gautreau a ajouté que la nature rétroactive de l’avis de nomination est un manque flagrant de transparence. De plus, il trouve injuste le fait que M. Laverdure a annoncé son intention de nommer M. Lee dans le poste avant d’inviter les autres à exprimer leurs intérêts pour le poste. Selon lui, le choix d’un processus non annoncé n’était pas transparent et équitable.

[60] M. Gautreau a affirmé, de plus, que le travail à faire relativement à la mise en œuvre du numéro d’entreprise, aux défis des mégadonnées et des données ouvertes n’est pas de la recherche socio-économique. Il a ajouté que le titulaire précédent, J.J., n’était pas responsable de la livraison de services. Par contre, M. Lee aurait, selon M. Gautreau, conservé ses mêmes tâches qu’auparavant. Selon M. Gautreau, J.J. n’était pas responsable de la livraison de services, et son départ ne risquait pas de causer une interruption de service. Il a ajouté que, quand il s’agit de recherche socio-économique, il n’y a pas d’interruption de services possibles.

[61] M. Gautreau a affirmé qu’il n’y avait pas urgence à combler le poste puisqu’il n’y avait personne dans le poste avant la nomination intérimaire. Selon M. Gautreau, M. Laverdure ne voulait pas perdre M. Lee. L’absence de J.J. offrait une occasion de garder M. Lee. Il a ajouté aussi qu’il est bizarre d’invoquer l’urgence pour un poste de groupe EC qui concerne la recherche socio-économique.

[62] M. Bérubé est aussi en désaccord avec l’énoncé selon lequel la nomination était le moyen le plus efficace pour répondre aux priorités gouvernementales tout en minimisant les risques d’interruption de services que pourrait engendrer le fait de ne pas combler le poste rapidement. Selon M. Bérubé, il n’y avait personne dans ce poste depuis plusieurs mois. Selon lui, la situation n’était pas urgente mais prévisible et connue. Afin d’appuyer son point, il a porté à mon attention Ayotte c. Sous-ministre de la Défense nationale, 2009 TDFP 21. Dans cette décision, le Tribunal de la dotation de la fonction publique (le « Tribunal ») a effectivement jugé qu’on ne peut invoquer l’urgence lorsque la situation est prévisible et connue.

[63] M. Bérubé a aussi précisé que le titulaire du poste, J.J., était un développeur d’applications pour entreprises et qu’il n’a jamais publié de recherche socio-économique dans le cadre de son travail de EC-08. Toutefois, il n’y a pas eu d’opposition à sa nomination puisque, selon M. Bérubé, J.J. avait le diplôme requis et il y a eu un processus de nomination. Toutefois, selon M. Bérubé, M. Lee ne fait pas le travail que J.J. faisait. Il a ajouté que J.J. n’était pas responsable d’une équipe d’employés qui fait le développement d’applications web.

[64] L’intimé, pour sa part, est d’avis que la décision de procéder avec une nomination non annoncée était à la discrétion du gestionnaire, M. Laverdure, et qu’elle était conforme à la LEFP et aux politiques applicables. Il a souligné que tel qu’il est spécifié dans Robbins c. l’Administrateur général de Service Canada, 2006 TDFP 17, on ne peut alléguer qu’il y a eu abus de pouvoir uniquement parce qu’on a opté pour un processus non annoncé.

[65] L’intimé a fait valoir que le gestionnaire, M. Laverdure, n’a eu environ qu’un mois de préavis avant le départ du titulaire qui partait en affectation de 24 mois avec Échanges Canada. Le gestionnaire a jugé qu’un processus non annoncé serait le moyen le plus efficace pour répondre aux priorités gouvernementales tout en minimisant les impacts et les risques, en particulier l’interruption de services que pourrait engendrer le fait de ne pas combler le poste rapidement. La direction d’Innovation devait entre autres répondre à la stratégie de services du ministère et du gouvernement, à la mise en œuvre du numéro d’entreprise, aux défis des mégadonnées et des données ouvertes qui sont des priorités du gouvernement.

[66] M. Laverdure a expliqué qu’il était impératif que la personne en place puisse être en mesure de diriger et mettre en œuvre des services qui comportent une composante numérique ou en ligne importante. Le gestionnaire a fait une analyse et il a déterminé qu’aucun autre employé ne pourrait faire les tâches du poste.

[67] L’article 33 de la LEFP énonce explicitement qu’il est permis d’avoir recours à un processus de nomination non annoncé. La LEFP n’accorde pas de préférence aux processus annoncés par rapport aux processus non annoncés (voir Brown c. le sous-ministre de la Défense nationale, 2010 TDFP 12 (« Brown »)). De plus, le paragraphe 30(4) de la LEFP précise qu’il n’est pas nécessaire « […] de prendre en compte plus d’une personne pour faire une nomination fondée sur le mérite ». Comme l’a souligné le Tribunal dans Jack c. le commissaire du Service correctionnel du Canada, 2011 TDFP 26, au paragraphe 18, les employés n’ont pas un « […] droit d’accès garanti à toutes les possibilités d’emploi ».

[68] L’intimé ne conteste pas le fait qu’il est important pour la gestion de préparer la justification pour le choix du processus et d’afficher l’avis de nomination en temps opportun. Par contre, il soumet que le Tribunal a déterminé, dans Brown, que ce type d’erreur ou d’omission n’est pas suffisamment sérieux pour constituer un abus de pouvoir. Ce principe a été réitéré dans Bérubé-Savoie c. le sous-ministre de Ressources humaines et Développement des compétences Canada, 2013 TDFP 2. Il fait valoir que ce qui a contribué au retard est le fait que l’organisation était en période de restructuration. Malgré ceci, le gestionnaire a eu plusieurs discussions avec les représentants des Ressources humaines avant la nomination, l’évaluation narrative a été complétée et l’avis de nomination intérimaire a été affiché.

[69] De plus, l’intimé fait valoir que dans Silke c. le sous-ministre de la Défense nationale, 2010 TDFP 9, le Tribunal a confirmé qu’une plainte ne peut être déposée au nom d’une autre personne et ne peut porter sur la façon dont d’autres employés ont été traités. Pour cette raison, les plaignants ne peuvent se plaindre que d’autres employés auraient pu être affectés à cause de l’affichage tardif de l’avis de nomination.

[70] Au sujet de l’urgence de la nomination qui est contestée par les plaignants, l’intimé soutient que la justification ne fait pas mention d’une situation d’urgence, mais plutôt du besoin de combler le poste de façon immédiate afin d’assurer la continuation des besoins essentiels et organisationnels des programmes et des services de l’organisation. En effet, M. Laverdure avait besoin d’un candidat pouvant poursuivre le travail de mettre en place une stratégie numérique dans le cadre des services gouvernementaux offerts au public qui avait été commencée par J.J.

[71] La CFP fait valoir, quant à elle, qu’en vertu de l’article 33 de la LEFP, la CFP ou l’autorité déléguée peut, en vue d’une nomination, avoir recours à un processus de nomination annoncé ou à un processus de nomination non annoncé. Elle n’a pas pris de position au sujet des plaintes.

[72] Je conclus que les plaignants n’ont pas établi la preuve d’un abus de pouvoir de la part de l’intimé dans le choix d’un processus de nomination non annoncé.

[73] Les plaignants soutiennent que la nomination de M. Lee présente des lacunes, entre autres, car la justification pour le choix d’un processus non annoncé n’a été rédigée que le 2 mars 2017. Cette justification n’existait donc pas au moment où M. Laverdure a approuvé la nomination de M. Lee. C’est vrai.

[74] Par contre, la preuve démontre que même si la justification n’était pas encore rédigée, des consultations et des discussions ont eu lieu entre M. Laverdure et les représentants des Ressources humaines au moment où la nomination a été effectuée. Ces consultations ont eu lieu, selon la preuve, les 1er, 12 et 20 septembre 2016.

[75] La preuve démontre donc que l’essentiel de la justification et de l’évaluation a été préparé avant la nomination. Il est certes important pour la gestion de préparer la justification pour le choix du processus et d’afficher l’avis de nomination en temps opportun. Toutefois, il a été décidé dans Brown que ce type d’erreur ou d’omission n’est pas suffisamment sérieux pour constituer un abus de pouvoir. J’estime donc que les plaignants n’ont pas réussi à démontrer en quoi le fait de rédiger la justification de façon tardive est en soi un abus de pouvoir.

[76] Je note que, dans Hunter c. Sous-ministre de l’Industrie, 2019 CRTESPF 83, la formation de la Commission a conclu qu’une série de lacunes dans l’administration du processus de nomination constituait un abus de pouvoir. Les lacunes comprenaient aussi l’absence d’une justification écrite à l’étape de la décision. Or, à cette erreur, s’ajoutait le refus initial d’en fournir une à un candidat potentiel et la position par la suite qu’aucune justification n’était nécessaire (voir le paragraphe 90 de la décision). Ici, l’intimé a plutôt reconnu, dès le 2 mars 2017, qu’une justification était nécessaire. C’est justement parce qu’il a constaté que cette justification n’était pas au dossier qu’il a entrepris de la rédiger.

[77] Les plaignants avancent également qu’en choisissant un processus de nomination non annoncé, l’intimé n’a pas respecté les valeurs que sont l’équité et la transparence, énoncées dans le préambule de la LEFP. M. Gautreau a aussi affirmé que le processus était inéquitable, essentiellement parce qu’il n’avait pas eu l’occasion de postuler.

[78] À ce sujet, je note que M. Laverdure a affirmé avoir donné l’occasion aux gestionnaires de sa division de lui communiquer leur intérêt pour le poste au cours d’une réunion. Selon M. Gautreau, cela n’est pas ce qui s’est passé. M. Laverdure a plutôt communiqué aux gestionnaires pendant la réunion son intention de nommer M. Lee dans le poste pour ne pas le perdre. Les deux, M. Laverdure et M. Gautreau, ont reconnu toutefois que M. Laverdure avait invité ses gestionnaires à lui offrir une rétroaction au sujet de la dotation du poste. M. Gautreau a aussi affirmé ne pas avoir eu envie de revendiquer le poste devant les autres personnes présentes. Par la suite, il a envoyé un courriel à M. Laverdure pour exprimer son désaccord avec l’intention de M. Laverdure de nommer M. Lee de façon intérimaire dans le poste. Dans ce courriel, il n’a pas manifesté d’intérêt pour le poste.

[79] La question de l’impossibilité de postuler dans un processus de nomination non annoncé a été abordée dans Jarvo c. le sous-ministre de la Défense nationale, 2011 TDPF 6. Le Tribunal a fait remarquer, au paragraphe 35, ce qui suit :

35 […] Aux termes de la LEFP, les processus de nomination non annoncés ne sont pas inéquitables de par le simple fait que certains employés ne peuvent pas postuler; en fait, cette accessibilité limitée est inhérente à ce type de processus. Compte tenu de la nature même des processus de nomination non annoncés, l’impossibilité de postuler ne peut pas être raisonnablement considérée comme un manque d’équité.

 

[80] En conséquence, même si M. Gautreau n’a pas eu l’occasion de postuler, je suis convaincue que le choix de procéder par le biais d’un processus non annoncé était un choix légitime et équitable. Selon les témoignages présentés par M. Laverdure et M. Pelletier, ils ont choisi cette façon de procéder de manière objective et dans l’intention de trouver, le plus rapidement possible, une personne qualifiée et expérimentée pour remplacer J.J. pendant son absence de deux ans. M. Laverdure a expliqué que M. Lee était la meilleure personne pour occuper les fonctions étant donné sa capacité de composer avec l’aspect numérique rattaché au poste. En fait, M. Lee secondait J.J. dans son travail depuis l’arrivée de J.J. dans l’équipe. Ainsi, selon M. Laverdure, M. Lee avait acquis les compétences spécifiques nécessaires pour remplir les tâches de conseiller principal de J.J.

[81] Les plaignants ont suggéré que M. Lee n’effectue pas les tâches du poste de conseiller principal. En particulier, J.J., qui occupait ce poste, n’avait pas d’équipe sous sa gouverne. Selon la preuve présentée, toutefois, il appert que M. Lee remplace bel et bien J.J., bien qu’il ait conservé certaines de ses anciennes tâches de chef de projet (CS-03). Selon moi, sa nomination dans le poste de conseiller principal n’est pas un subterfuge qui cache un objectif malhonnête. Tous les témoins s’entendent sur le fait que M. Lee effectue, entre autres, la mise en œuvre d’un service pour le programme de transformation des entreprises qui comporte une composante numérique. Il s’agit d’une tâche qui incombait à J.J. Il s’agissait aussi d’un critère de mérite utilisé dans le cadre de la nomination de J.J. dans le poste. Le réel enjeu, selon moi, est que les plaignants soutiennent que ce genre de tâche ne relève pas du groupe EC, qui effectue principalement de la recherche économique ou socio-économique.

[82] En somme, j’estime que la justification relative au choix d’un processus de nomination non annoncé explique de façon appropriée pourquoi un processus non annoncé a été choisi plutôt qu’un processus annoncé. J.J. devait s’absenter pour deux ans. M. Laverdure a eu recours à un processus de nomination non annoncé puisqu’il s’agissait de la méthode de dotation la plus efficace pour satisfaire aux besoins d’ISDEC.

[83] Je conclus donc que les plaignants n’ont pas établi la preuve d’un abus de pouvoir de la part de l’intimé dans le choix d’un processus de nomination non annoncé.

B. Question 2 : Y a-t-il eu abus de pouvoir dans le choix et l’application des critères de mérite?

[84] Les plaintes ont aussi été déposées en vertu de l’alinéa 77(1)a) de la LEFP, qui renvoie au paragraphe 30(2). Ces dispositions sont rédigées comme suit :

77 (1) Lorsque la Commission a fait une proposition de nomination ou une nomination dans le cadre d’un processus de nomination interne, la personne qui est dans la zone de recours visée au paragraphe (2) peut, selon les modalités et dans le délai fixés par règlement de la Commission des relations de travail et de l’emploi, présenter à celle-ci une plainte selon laquelle elle n’a pas été nommée ou fait l’objet d’une proposition de nomination pour l’une ou l’autre des raisons suivantes :

a) abus de pouvoir de la part de la Commission ou de l’administrateur général dans l’exercice de leurs attributions respectives au titre du paragraphe 30(2);

30 (2) Une nomination est fondée sur le mérite lorsque les conditions suivantes sont réunies :

a) selon la Commission, la personne à nommer possède les qualifications essentielles — notamment la compétence dans les langues officielles — établies par l’administrateur général pour le travail à accomplir;

b) la Commission prend en compte :

(i) toute qualification supplémentaire que l’administrateur général considère comme un atout pour le travail à accomplir ou pour l’administration, pour le présent ou l’avenir,

(ii) toute exigence opérationnelle actuelle ou future de l’administration précisée par l’administrateur général,

(iii) tout besoin actuel ou futur de l’administration précisé par l’administrateur général.

 

[85] En premier lieu, en ce qui concerne le choix des critères de mérite, les faits entourant cette question sont les suivants. M. Laverdure a expliqué que l’Énoncé des critères de mérite et des conditions d’emploi qui avait été utilisé pour doter le poste lors de la nomination de J.J. comptait cinq critères d’expérience. J.J. avait été nommé dans le poste EC-08 en 2014, avant que M. Laverdure ne commence à occuper son poste de directeur en 2015. Cet énoncé des critères de mérite avait servi à doter le poste à durée indéterminée.

[86] Étant donné qu’il s’agissait de trouver un remplaçant pour J.J. et donc d’une nomination intérimaire de deux ans, l’équipe de gestion a estimé que l’ECM pouvait être simplifié et réduit à trois critères selon les besoins opérationnels à ce moment-là. M. Laverdure a donc identifié les critères le plus pertinents en fonction des besoins opérationnels de l’intimé au moment de la nomination intérimaire.

[87] M. Pelletier a expliqué que c’est lui qui a conseillé M. Laverdure à ce sujet. Il travaille dans le domaine de la dotation depuis 2003. Il a participé à des centaines de processus de dotation depuis. Au moment de ce processus de dotation, comme directeur, il supervisait une équipe des Ressources humaines. Lorsqu’il a conseillé M. Laverdure, il a pris en considération le fait que l’aspect technologique relié au poste EC-08 était important dans l’équipe de M. Laverdure. Il avait en effet pris conscience qu’il était très important que le candidat possède une connaissance technique afin d’être en mesure de traduire le jargon informatique technique pour l’équipe de la haute gestion.

[88] Ainsi, le 6 septembre 2016, après avoir révisé la description de travail et les critères de sélection énumérés dans l’ECM déjà existant du poste EC-08, dans un courriel à M. Laverdure, il a précisé ce qui suit : « J’ai remarqué qu’il [l’ECM] contient beaucoup de critères. Je ne l’ai pas analysé en détail mais je crois qu’il serait possible d’en éliminer quelques-uns pour simplifier l’évaluation narrative. » Il a précisé à l’audience que la description de travail et l’ECM étaient très détaillés, même pour un processus annoncé, et qu’il serait plus efficace et approprié de raccourcir l’ECM. Selon lui, l’ECM doit s’adapter au contexte, il doit être dynamique, et non statique. Il importait donc de garder ce qui était pertinent et d’omettre ce qui n’était pas pertinent à ce moment-là.

[89] Ainsi, l’Énoncé des critères de mérite et des conditions d’emploi a été simplifié. M. Laverdure a choisi les trois critères d’expérience suivants en réponse aux besoins opérationnels d’ISDEC au moment de la nomination intérimaire :

1 Expérience appréciable de la direction de travaux de recherche appuyant la conception de services pour des politiques ou des programmes destinés aux entreprises.

2. Expérience de la direction et de la mise en œuvre d’un service pour le programme de transformation des entreprises qui comporte une composante numérique ou en ligne importante.

3. Expérience de la gestion de projets liés à des initiatives complexes ayant trait à l’économie et à la prestation de services.

 

[90] Les plaignants allèguent que l’énoncé des critères de mérite a été taillé sur mesure et ne satisfait pas aux exigences du poste.

[91] Selon eux, l’énoncé des critères de mérite ne reflète pas le niveau d’expertise requis correspondant à la description de travail du poste et aux normes de classification rattachées aux postes EC.

[92] M. Bérubé a porté à mon attention la description de travail pour le poste de conseiller principal (EC-08). Il a insisté que l’aspect économique ou socio-économique est au centre de la description de travail. La première activité principale identifiée est la suivante :

Planifie et orienter la réalisation d’analyses et de recherches économiques et socioéconomiques pour soutenir l’élaboration, la mise en œuvre et l’évaluation de stratégies, de politiques, de programmes, de cadres et d’initiatives en matière de prestation des services en vue de favoriser la croissance et la compétitivité des PME canadiennes, d’améliorer la prestation des services et l’exécution des programmes du gouvernement, et de facilité pour les PME canadiennes l’accès à ces services et programmes.

 

[93] Selon M. Bérubé, l’expérience demandée pour doter le poste occupé par M. Lee évacue complètement l’activité principale de cette description de travail. En particulier, il a porté à mon attention que deux critères de mérite utilisés dans le processus qui a mené à la nomination de J.J. ont été omis dans le présent processus ayant mené à la nomination intérimaire. Ce sont les deux expériences suivantes :

1. Expérience appréciable* de la formulation de conseils stratégiques à l’intention de la haute direction, incluant directeur général ou directrice générale, sous-ministre adjoint ou une sous-ministre adjointe et sous-ministre.

[…]

5. Expérience de l’établissement et de l’entretien de relations de travail avec différents partenaires et intervenants, y compris des membres d’autres ministères, d’organisations fédérales, provinciales, territoriales et d’entreprises privées.

[…]

 

[94] De plus, selon M. Bérubé, M. Lee n’a pas l’expérience recherchée. Son expérience, qui est décrite dans l’évaluation, est une expérience relative aux systèmes informatiques et non à la recherche socio-économique.

[95] Selon M. Bérubé, PerLE (BizPal) est un service en ligne qui aide les gens d’affaires à créer une liste personnalisée de licences et de permis dont ils peuvent avoir besoin pour démarrer ou exploiter une entreprise. Les autres expériences mentionnées, comme le Plan d’affaires interactif, l’Atelier en ligne sur la petite entreprise et le Réseau Entreprises Canada, sont toutes des plateformes ou outils pour donner des services aux entreprises.

[96] M. Gautreau et M. Bérubé affirment que l’intimé n’avait pas le droit, ni en 2014 pour J.J., ni en 2016 pour M. Lee, d’inclure dans les processus qui ont mené à leur nomination le critère « Expérience de la direction et de la mise en œuvre d’un service pour le programme de transformation des entreprises qui comporte une composante numérique ou en ligne importante. » Selon eux, il s’agit d’une tâche qui ne correspond pas aux tâches effectuées par un titulaire d’un poste de groupe EC. Les normes d’emploi pour le groupe EC par le Secrétariat du Conseil du Trésor (SCT) décrivent les tâches effectuées par un titulaire d’un poste de groupe EC.

[97] Les plaignants sont donc de l’avis que l’ECM ne satisfait pas aux normes de qualifications du SCT pour les postes EC. Pour démontrer ce point, M. Bérubé a identifié sur le site Web du Secrétariat du Conseil du Trésor le Bulletin d’information du 16 mars 2016 intitulé « Économique et services de sciences sociales (EC) ». Dans ce bulletin d’information, il est précisé : « Le 13 juin 2007 conformément à l’article 11.1(1)b) de la Loi sur la gestion des finances publiques, le Conseil du Trésor du Canada a approuvé une nouvelle norme d’évaluation des emplois pour le groupe Économique et services de sciences sociales (EC) […] »

[98] Selon ce bulletin d’information, le groupe Économique et services des sciences sociales inclut les postes principalement impliqués dans, par exemple, la réalisation de sondages, d’études, de projets et d’essais nécessitant une connaissance pratique d’un domaine spécialisé comme l’économique, l’histoire, le droit ou la psychologie, ainsi que la mise au point de techniques et de procédures spécialisées ou l’élaboration ou l’utilisation d’applications de traitement de données connexes, ou l’interprétation de résultats.

[99] Ce bulletin d’information énonce ce qui suit par rapport aux poste exclus :

Les postes exclus du groupe Économique et services de sciences sociales sont ceux dont la principale raison d’être est comprise dans la définition d’un autre groupe ou ceux dont l’une ou plusieurs des activités suivantes sont primordiales :

1. réalisation, établissement du calendrier ou contrôle des opérations de l’équipement électronique utilisé pour le traitement des données aux fins de l’entreposage, de l’extraction et de la comparaison des renseignements, ainsi que de la rédaction des rapports ou pour le règlement des problèmes relevés selon les plans établis;

2. collecte, enregistrement, organisation, transmission et traitement de renseignements, classement et diffusion de fonds de renseignements, et application directe de règles et de règlements;

3. planification, élaboration, diffusion ou gestion de politiques, de programmes, de services ou d’autres activités à l’intention du public ou de la fonction publique;

4. explication, promotion et communication de programmes, de politiques et de services du gouvernement fédéral;

5. application d’une connaissance approfondie des mathématiques à l’élaboration ou à la mise en pratique de méthodes mathématiques et analytiques, y compris celles qui servent à l’établissement des statistiques;

6. planification, élaboration, prestation et gestion de politiques, de programmes, de services et d’autres activités visant à promouvoir l’établissement, la croissance et l’amélioration des industries, des échanges commerciaux et des exportations et la réglementation des échanges et du commerce.

 

[100] Selon les plaignants, le critère contesté dans l’ECM ressemble aux activités 3 et 6 ci-dessus. Il s’agirait donc d’une tâche qui ne peut pas être effectuée par un titulaire d’un poste de groupe EC.

[101] M. Bérubé m’a présenté, ensuite, un document similaire intitulé Systèmes d’ordinateurs (CS) du 30 septembre 2014 qu’il a trouvé sur le site Web du Secrétariat du Conseil du Trésor. Dans ce document, il est précisé que, conformément à l’article 101 de la Loi sur la réforme de la fonction publique, le Conseil du Trésor du Canada a établi la définition qui s’applique au groupe Systèmes d’ordinateurs à compter du 18 mars 1999. Ensuite, il est précisé que le groupe Systèmes d’ordinateurs comprend les postes qui sont principalement liés à l’application de la connaissance des systèmes informatiques à la planification, au développement, à l’installation et la maintenance des systèmes de traitement des technologies de l’information pour gérer, administrer ou soutenir les programmes et activités du gouvernement fédéral.

[102] Ensuite, il est précisé dans ce bulletin d’information que ce groupe comprend les postes qui ont, comme objectif principal, la responsabilité d’une ou plusieurs des activités énumérées sous « Postes inclus ». M. Bérubé a porté à mon attention les activités 3, 4, 7, 8 et 9 suivantes :

3. analyse et conception de systèmes de gestion et infrastructures de soutien et élaboration et la maintenance des logiciels connexes;

4. conception, mise en œuvre, installation et maintenance de bases de données et de logiciels de création de bases de données, contrôle de l’intégrité, de la sécurité et de la modification des bases de données et fourniture d’installations de reprise et de sauvegarde des bases de données;

7. élaboration et réalisation des activités ci-après ou prise de décision à cet égard :

a. évaluation technique ou vérification de systèmes de traitement en technologies de l’information;

[…]

8. prestation de conseils et de services de consultation concernant les systèmes, installations et applications de traitement en technologie de l’information, y compris l’évaluation de la sécurité technique de ces systèmes;

9. planification et recherche en ce qui concerne la capacité, les possibilités, les applications et la configuration de systèmes de traitement existants et futurs en technologie de l’information;

 

[103] Selon M. Bérubé, M. Lee effectue ces activités, bien qu’il ait été nommé de façon intérimaire dans le poste de conseiller principal EC-08. Il insiste que l’activité 4 ci‑dessus concerne justement la conception, la mise en œuvre, l’installation et la maintenance de bases de données et de logiciels de création de base de données.

[104] Les plaignants font valoir que l’intimé a fait preuve de favoritisme personnel et de mauvaise foi en abaissant les critères de mérite et en effectuant cette nomination. Selon eux, l’intimé a ainsi abusé de son pouvoir. De plus, M. Bérubé est de l’avis que M. Lee a été avantagé par sa nomination. Il a porté à mon attention Spirak c. le sous-ministre de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, 2012 TDFP 20 (« Spirak »). Le paragraphe 42 de cette décision se lit comme suit :

42 Le Tribunal juge que les qualifications essentielles relatives à l’expérience figurant dans l’ECM du poste EG-07 parallèle créé par l’intimé sont moins rigoureuses que celles qui avaient été établies pour le poste ayant fait l’objet d’un processus de nomination externe annoncé. L’annonce de ce dernier poste indiquait quatre qualifications liées à l’expérience; seules deux d’entre elles se retrouvaient dans l’ECM du poste parallèle visé par un processus non annoncé. Ce dernier poste n’exigeait aucune expérience de la gestion des ressources financières relativement à des projets de construction ou de la gestion d’équipes techniques multidisciplinaires dans le domaine de la construction. Or, ces deux critères faisaient partie des qualifications essentielles liées au poste ayant fait l’objet d’un processus externe annoncé. M. Carson a donc été en mesure d’acquérir de l’expérience dans le domaine de la gestion des finances relativement à des projets de construction et de la gestion d’équipes techniques multidisciplinaires dans le domaine de la construction. Ainsi, le Tribunal conclut que M. Carson a bel et bien été avantagé par sa nomination.

 

[105] L’intimé, quant à lui, soutient que, dans Visca c. le sous-ministre de la Justice, 2007 TDFP 24 (« Visca »), le Tribunal a indiqué qu’aux termes du paragraphe 30(2) de la LEFP, les gestionnaires disposent d’un pouvoir discrétionnaire considérable pour établir les qualifications liées au poste qu’ils souhaitent doter et pour choisir la personne qui non seulement satisfait aux qualifications essentielles mais représente la bonne personne pour occuper le poste. Selon l’intimé, même si les plaignants sont en désaccord avec l’ECM, ils ont le fardeau de prouver qu’il y a eu abus de pouvoir. Or, dans Feeney c. le sous-ministre de la Défense nationale, 2008 TDFP 17, le Tribunal a confirmé qu’il n’est pas nécessaire que les qualifications essentielles relatives à un poste en particulier soient énumérées dans une description de travail. Les gestionnaires sont simplement tenus d’établir les qualifications pour le travail à accomplir (voir aussi Neil c. le sous-ministre d’Environnement Canada, 2008 TDFP 4).

[106] L’intimé indique que le gestionnaire a examiné ses besoins avant de doter le poste de façon temporaire. L’ECM a été développé en partenariat avec les Ressources humaines pour s’assurer qu’il soit conforme aux normes de qualifications et qu’il satisfait aux besoins du poste. Ainsi, l’ECM a été conçu pour refléter les besoins actuels des tâches du poste. La personne nommée a été évaluée et trouvée qualifiée. L’intimé m’a montré dans la description de travail du poste de conseiller principal EC-08 lesquelles des activités principales qui y sont énumérées sont applicables dans la présente affaire. Il a porté à mon attention les 3e et 5e paragraphes sous « Activités principales ». Le paragraphe 3 concerne l’activité suivante :

À titre de spécialiste du Ministère, fournir des conseils consultatifs aux dirigeants et aux cadres supérieurs d’Industrie Canada sur l’élaboration de politiques, sur des propositions de modification des lois, sur des questions opérationnelles et sur les répercussions et les implications des règles relatives aux politiques et des modifications législatives en rapport avec la transformation technologique requise pour soutenir des initiatives comme exploiter la possibilité de tirer profit d’un guichet unique pour des services en ligne aux entreprises qui font affaire avec le gouvernement fédéral, exploiter les occasions d’accroître l’utilisation du numéro d’entreprise lors des transactions avec le gouvernement fédéral, et élaborer une stratégie en vue d’offrir un accès plus rapide et plus facile aux transactions et aux renseignements du gouvernement du Canada au moyen de services électroniques.

 

[107] Le paragraphe 5 concerne l’activité suivante :

Lors de modifications d’ordre législatif/réglementaire, gérer le processus de modification des lois à l’échelle du Parlement, ce qui comprend l’élaboration et la mise en œuvre d’une stratégie de communication et de tous les documents destinés au Cabinet, aux députés, au Comité permanent de la Chambre des communes, au Sénat et aux médias, afin d’assurer une coordination appropriée avec la Direction générale des communications du Ministère.

 

[108] L’intimé est de l’avis que l’ECM reflète ces activités et que les allégations des plaignants sont basées sur des perceptions personnelles et leurs opinions quant aux critères de mérite qui auraient dû être choisis et la façon dont le processus et l’évaluation auraient dû être menés.

[109] La CFP fait valoir que la LEFP donne aux administrateurs généraux l’autorité d’établir les critères de mérite. En vertu de l’alinéa 30(2)a) de la LEFP, les qualifications essentielles établies par l’administrateur général doivent être liées au travail à accomplir. De plus, ces qualifications doivent rencontrer ou outrepasser les normes de qualification applicables qui sont établies par l’employeur.

[110] Les plaignants insistent que les qualifications essentielles apparaissant dans l’ECM ont été dénaturées et ne respectent pas les normes de qualification de la classification pour le poste en question. Je note toutefois que je n’ai pas compétence pour déterminer si le poste est classifié correctement et selon les normes de classification applicables. Cependant, j’ai compétence pour instruire les plaintes selon lesquelles l’intimé aurait abusé de son pouvoir en établissant des qualifications essentielles qui ne satisfont pas aux normes de qualifications applicables établies par l’employeur ou ne les dépassent pas.

[111] Je note que, dans Rinn c. le Sous-ministre des Transports, de l’Infrastructure et des Collectivités, 2007 TDFP 44 (« Rinn »), le plaignant avait soutenu que l’intimé avait fait preuve d’abus de pouvoir dans divers domaines dont les suivants : 1) le plaignant avait fait valoir que l’exécution des fonctions quotidiennes du poste nécessitait du titulaire une expérience récente à titre de pilote et que le candidat reçu ne possédait aucune expérience de pilotage; 2) le plaignant avait fait valoir que l’intimé avait fait peu de cas de la norme de classification et modifié les qualifications essentielles pour le poste intérimaire, c’est-à-dire l’exigence d’une expérience récente du pilotage d’un aéronef n’aurait pas dû être rayée des qualifications essentielles pour le poste.

[112] Le Tribunal a conclu qu’il n’avait pas compétence pour déterminer si un poste est classifié correctement et selon les normes de classification applicables. Toutefois, il a conclu qu’il avait compétence pour instruire une plainte selon laquelle l’administrateur général aurait abusé de son pouvoir en établissant des qualifications essentielles. Ce serait le cas si ces qualifications ne satisfont pas aux normes de qualifications applicables établies par l’employeur ou ne les dépassent pas.

[113] Dans Rinn, le Tribunal a conclu que la plainte n’était pas justifiée. Il a noté que la nomination portait sur un poste intérimaire temporaire et que la personne nommée satisfaisait aux critères de mérite du poste. Les paragraphes pertinents de cette décision sont les suivants :

[40] Le paragraphe 31(2) de la LEFP indique que les qualifications essentielles établies pour un poste par l’administrateur général et utilisées pour procéder à une nomination fondée sur le mérite, doivent respecter ou dépasser les normes de qualification applicables établies par l’employeur. L’article 31 est ainsi rédigé :

31. (1) L’employeur peut fixer des normes de qualification, notamment en matière d’instruction, de connaissances, d’expérience, d’attestation professionnelle ou de langue, nécessaires ou souhaitables à son avis du fait de la nature du travail à accomplir et des besoins actuels et futurs de la fonction publique.

(2) Les qualifications mentionnées à l’alinéa 30(2)a) et au sous-alinéa 30(2)b)(i) doivent respecter ou dépasser les normes de qualification applicables établies par l’employeur en vertu du paragraphe (1).

[41] Le paragraphe 31(2) fait référence à l’alinéa 30(2)a) et au sous-alinéa 30(2)b)(i) et, par conséquent, il s’applique aux critères pour que la nomination soit fondée sur le mérite. Ainsi, le Tribunal a compétence pour entendre une plainte voulant que l’administrateur général ait abusé de son pouvoir en établissant des qualifications essentielles ou supplémentaires qui ne répondent pas ou ne dépassent pas les normes de qualification applicables établies par l’AFPC pour l’employeur.

[…]

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

 

[114] Mon rôle est donc de déterminer si les qualifications apparaissant dans l’énoncé des critères de mérite pour le poste de conseiller principal par intérim respectent ou dépassent les normes de qualification établies pour le poste en question.

[115] Pour les raisons qui suivent, je suis de l’avis que M. Laverdure a pu établir un lien entre les qualifications apparaissant dans l’énoncé des critères de mérite et les normes de qualification établies pour le groupe Économique et services de sciences sociales.

[116] Les normes de qualifications portées à mon attention à l’audience étaient contenues dans le Bulletin d’information du 16 mars 2016 intitulé « Économique et services de sciences sociales (EC) ». Selon ce bulletin d’information, lorsque les responsabilités principales d’un poste se rattachent à l’une ou à plusieurs des activités énumérées aux points 1 à 8 du Bulletin, ces postes sont inclus spécifiquement dans le groupe Économique et services de sciences sociales. Les responsabilités principales à prendre en considération sont les suivantes :

Postes inclus

Sans limiter la généralité de la définition énoncée ci-dessus, sont inclus dans ce groupe [Économique et services de sciences sociales] les postes dont les responsabilités principales se rattachent à l’une ou à plusieurs des activités suivantes :

1. réalisation de sondages, d’études, de projets et d’essais nécessitant une connaissance pratique d’un domaine spécialisé comme l’économique, l’histoire, le droit ou la psychologie, ainsi que la mise au point de techniques et de procédures spécialisées ou l’élaboration ou l’utilisation d’applications de traitement de données connexes, ou l’interprétation de résultats;

2. identification, description, classification, organisation et repérage de pièces d’archives, de galerie d’art, de bibliothèque ou de musée; ou création, manipulation, vérification, analyse et transmission de dossiers descriptifs concernant ces pièces, ce qui, dans les deux cas, nécessite une connaissance pratique du domaine;

3. révision de textes législatifs ou réalisation d’études sur des sujets tels que la pratique de l’immobilier, l’expropriation, le contentieux et les relations de travail, ce qui nécessite une connaissance pratique du domaine juridique en cause aux fins de l’interprétation des résultats ou de la préparation de présentations;

4. application d’une connaissance pratique d’un domaine spécialisé comme l’économique, l’histoire, le droit ou la psychologie pour l’utilisation et la modification ou l’adaptation de systèmes, d’utilitaires ou de logiciels informatiques;

5. application d’une connaissance approfondie de l’économique, de la sociologie ou de la statistique pour la préparation d’études, de prévisions et d’enquêtes économiques, socio-économiques et sociologiques sur une variété de sujets de portée nationale ou internationale;

6. application d’une connaissance approfondie de l’économique, de la sociologie ou de la statistique pour l’élaboration, l’application et l’évaluation de méthodes et d’indicateurs de statistiques et d’enquête par sondage servant aux projets de recherches en sciences naturelles ou sociales, ou à la planification de sondages et de recensements, ou encore à la détermination des mesures et des techniques statistiques à utiliser pour l’analyse des données et la rédaction des rapports;

7. prestation de conseils dans les domaines de l’économique, de la sociologie et de la statistique;

8. exercice de leadership pour l’une ou l’autre des activités susmentionnées.

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

 

[117] L’intimé a démontré que les qualifications apparaissant dans l’ECM pour le poste de conseiller principal par intérim correspondent à la responsabilité principale numéro 4 ci-dessus. La responsabilité numéro 5 est aussi applicable. J’estime donc que l’intimé a démontré que les qualifications apparaissant dans l’ECM pour le poste de conseiller principal par intérim respectent les normes de qualification établies pour ce groupe. Je note que, selon ce bulletin d’information, il suffit que les responsabilités principales se rattachent « […] à l’une ou à plusieurs des activités […] » énumérées aux points 1 à 8.

[118] Je garde en tête que les trois critères de mérite ont été choisis par M. Laverdure pour refléter le travail à accomplir et les besoins organisationnels d’ISDEC au moment de la nomination intérimaire. M. Laverdure avait besoin d’un candidat pouvant poursuivre le travail qui avait été commencé par J.J. Il était impératif que le candidat puisse mettre en place une stratégie numérique dans le cadre des services gouvernementaux offerts au public et qu’il puisse conseiller la haute gestion à ce sujet.

[119] J’ai entendu l’argument des plaignants voulant que l’« [e]xpérience de la direction et de la mise en œuvre d’un service pour le programme de transformation des entreprises qui comporte une composante numérique ou en ligne importante » a été demandée pour s’ajuster au profil du candidat. Toutefois, je note que cette qualification était aussi un critère de mérite qui a été utilisé dans le processus de dotation qui a mené à la nomination de J.J. dans son poste à durée indéterminée en 2014. Il ne s’agit donc pas d’un nouveau critère « inventé » par M. Laverdure.

[120] M. Laverdure a expliqué que quelques-uns des projets en cours au moment de la nomination comptaient les projets du guichet unique, des services en ligne et de la mise en œuvre du numéro d’entreprise. Il a expliqué que le candidat devait être en mesure de diriger et mettre en œuvre ces projets qui comportent une composante numérique. Le candidat devait posséder une connaissance des tendances nationales et mondiales de la technologie numérique et des transformations numériques.

[121] Je note aussi que M. Laverdure devait combler le poste temporairement jusqu’au retour du titulaire prévu originalement en septembre 2018. Tel qu’il est souligné dans Visca, aux termes du paragraphe 30(2) de la LEFP, les gestionnaires disposent d’un pouvoir discrétionnaire considérable pour établir les qualifications liées au poste qu’ils souhaitent doter et pour choisir la personne qui, non seulement satisfait aux qualifications essentielles, mais représente la bonne personne pour occuper le poste visé.

[122] Je note, de même, que dans Feeney c. le sous-ministre de la Défense nationale, 2008 TDFP 17, le Tribunal a confirmé qu’il n’est pas nécessaire que les qualifications essentielles relatives à un poste en particulier soient énumérées dans une description de travail. Dans cette affaire, l’intimé avait inclus la possession d’un permis de conduire provincial dans les qualifications essentielles pour un poste de pompier civil. Le plaignant s’était porté candidat à ce poste, mais il avait obtenu son permis de conduire provincial après la date de clôture du processus de nomination. Sa candidature avait donc été éliminée du processus. Ce dernier a fait valoir que l’intimé avait exigé un permis de conduire provincial dans le seul but de favoriser certains candidats issus d’un autre service d’incendie. Il a ajouté que la capacité de conduire un véhicule n’était indiquée nulle part comme exigence dans la description de travail.

[123] Le Tribunal a conclu que l’établissement de l’exigence de posséder un permis de conduire provincial à titre de qualification essentielle relevait du pouvoir discrétionnaire de l’intimé. Le Tribunal a également déterminé qu’il n’était pas nécessaire que les qualifications essentielles relatives à un poste en particulier soient énumérées dans une description de travail. Les gestionnaires disposent d’un pouvoir discrétionnaire considérable dans la sélection et l’utilisation des méthodes d’évaluation pour déterminer si un candidat possède les qualifications établies. La plainte a été rejetée.

[124] Les plaignants affirment également que M. Laverdure a fait preuve de favoritisme à l’égard de M. Lee. Selon eux, M. Lee a beaucoup moins d’expérience en recherches économiques et socio-économiques qu’eux. L’argument des plaignants repose sur le fait que M. Lee a occupé un poste de groupe CS jusqu’au moment de sa nomination intérimaire. Il n’a jamais occupé un poste de groupe EC avant sa nomination intérimaire.

[125] À ce sujet, je note que Spirak, qui a été portée à mon attention, se distingue du présent cas. Dans Spirak, le plaignant alléguait que l’intimé avait abusé de son pouvoir dans l’application du mérite en prolongeant pour un an la nomination intérimaire de la personne nommée au moyen d’un processus non annoncé. Le Tribunal a conclu que la preuve relative à cette nomination établissait l’existence d’un favoritisme personnel. Le Tribunal notait ce qui suit au paragraphe 73 :

73 La nomination de M. Carson a été effectuée dans un contexte où le gestionnaire et la personne nommée, qui partagent la même affiliation professionnelle, ont discuté, quoique sur le ton de la plaisanterie, de la création de leur propre entreprise. Le gestionnaire a consacré du temps au recrutement de travailleurs afin d’aider la personne nommée à construire la charpente de son garage, a payé les travailleurs 8 000 $ comptant et a passé deux fins de semaine à les aider à effectuer le travail. Ces événements témoignent de l’existence d’une relation personnelle entre le gestionnaire et la personne nommée. Cette relation, examinée parallèlement aux erreurs sérieuses entourant la nomination, porte le Tribunal à conclure que le plaignant a établi que l’intimé a abusé de son pouvoir en prolongeant la nomination intérimaire de M. Carson au poste de chef, Groupe de la construction, en décembre 2009.

 

[126] Ainsi, il y avait lieu de croire qu’il existait une relation personnelle entre le gestionnaire d’embauche et la personne nommée. Cela n’est pas le cas dans le présent cas. Selon moi, la preuve présentée ne permet pas d’établir que le processus de nomination non annoncé était teinté de favoritisme personnel. Les plaignants n’ont pas démontré qu’il existait une relation personnelle autre que professionnelle entre M. Laverdure et M. Lee.

[127] Je note aussi que, dans Soccar c. le Commissaire de la Gendarmerie Royale du Canada, 2013 TDFP 14, l’intimé avait offert à la personne nommée plusieurs nominations intérimaires consécutives. En ce qui a trait aux nominations intérimaires, le Tribunal a conclu que l’intimé avait des motifs valables pour choisir des processus non annoncés et que la plaignante n’avait pas réussi à établir que l’intimé avait fait preuve de favoritisme personnel ou de partialité lorsqu’il avait effectué les nominations.

[128] En me fondant sur la preuve présentée à l’audience, je constate que la nomination concernait un poste intérimaire temporaire tel qu’indiqué. La période de nomination initiale de M. Lee était pour une période de deux ans, mais elle a été prolongée à plus d’une reprise pour des périodes de six mois par la suite. Malgré tout, M. Laverdure a expliqué pourquoi il a choisi les critères de mérite. Mon mandat est de décider si le choix de ces critères constituait un abus de pouvoir. Je conclus que la preuve présentée ne me permet pas de conclure que le choix des critères de mérite constituait un abus de pouvoir. La plainte d’abus de pouvoir fondée sur ce motif est donc rejetée.

[129] Je conclus aussi que la preuve présentée ne me permet pas de conclure qu’il existait une relation personnelle, autre que professionnelle, entre M. Laverdure et M. Lee. La plainte d’abus de pouvoir fondée sur le favoritisme personnel à l’endroit de M. Lee est donc aussi rejetée.

[130] En deuxième lieu, les plaignants allèguent que la personne nommée n’est pas qualifiée pour le poste.

[131] Les faits entourant cette question sont les suivants. D’abord, l’ECM comportait la qualification essentielle liée aux études suivantes :

Études :

Grade d’une université reconnue avec spécialisation acceptable en économique, sociologie ou statistique.

REMARQUE

Les candidats et les candidates doivent toujours détenir un grade universitaire. Les cours formant la spécialisation n’ont pas nécessairement à faire partie d’un programme d’études menant à l’obtention d’un grade dans le domaine de la spécialisation exigée. La spécialisation peut également être formée d'un agencement acceptable d’études, de formation et (ou) d’expérience.

[…]

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

 

[132] Au sujet des études de M. Lee et de la question à savoir s’il satisfaisait au critère de mérite lié aux études, M. Laverdure a pris en considération le fait que M. Lee avait complété en 1994 un baccalauréat en Sciences (spécialisation en chimie) à l’Université Carleton, Ottawa (Ontario). Il a estimé que cette éducation combinée à son expérience de travail était adéquate. Dans son évaluation du candidat, il a inscrit ce qui suit :

[Traduction]

Le candidat est titulaire d’un diplôme universitaire de l’Université Carleton et a suivi un cours de statistique et le candidat a une vaste expérience pratique de l’application de principes économiques et statistiques dans la prestation de services en ligne aux petites et moyennes entreprises, comme l’outil Plan d’affaires interactif, l’Atelier en ligne sur la petite entreprise, le Réseau Entreprises Canada et PerLE. Grâce à ces services, le candidat a effectué des analyses sur des données économiques clés, y compris la segmentation du marché, de données sur l’importation et l’exportation, les coûts opérationnels et les exportations, les données sur le marché du travail, la taille du marché et les risques du marché, etc.

L’expérience du candidat en matière de conception et de gestion du plan d’affaires interactif qui comprend le développement d’exemples de plans d’affaires et la création d’un tutoriel en ligne pour aider les propriétaires d’entreprises à mieux comprendre la production, la distribution et la vente de leurs produits et services, fournit au candidat un niveau de connaissances et d’expérience d’un point de vue pratique.

En outre, le candidat possède une solide connaissance des principes de psychologie utilisés pour comprendre les besoins des clients du point de vue de l’interaction des services et de la convivialité du service.

 

[133] Puis, au sujet des trois critères d’expérience et de la question à savoir si M. Lee satisfaisait à ces critères, M. Laverdure a pris en considération les faits suivants, qu’il a résumés dans son évaluation du candidat. Cette évaluation se retrouve dans le document intitulé [traduction] « Évaluation des qualifications sur la base de l’Énoncé des critères de mérite (ECM) et les conditions d’emploi » et se lit comme suit :

[Traduction]

[…]

[1.] Expérience appréciable de la direction de travaux de recherche appuyant la conception de services pour des politiques ou des programmes destinés aux entreprises.

 

Le candidat a une expérience significative dans la conduite de recherches sur le développement d’échantillons de plans d’affaires et d’outils de planification financière. Pendant 4 ans, le candidat a effectué des analyses de marché sectorielles, notamment sur la taille de l’industrie, les tendances de croissance et la segmentation du marché, les coûts de démarrage, les dépenses opérationnelles, les coûts de démarrage, le passif et les indicateurs financiers tels que l’analyse du seuil de rentabilité, les ratios de rentabilité, etc.

 

[2.] Expérience de la direction et de la mise en œuvre d’un service pour le programme de transformation des entreprises qui comporte une composante numérique ou en ligne importante.

 

Le candidat a une expérience significative dans la conduite de projets de transformation d’entreprises ayant une forte composante en ligne. Le candidat a dirigé la transformation du Réseau Entreprises Canada (REC) et la présence numérique de BizPal "PerLE" pendant plus de 6 ans.

Le candidat a dirigé la consolidation de 12 sites Web provinciaux et territoriaux en un seul service national du CBN qui a permis une personnalisation régionale et sectorielle tout en offrant aux clients un meilleur accès à des informations commerciales fiables.

Avec PerLE, le candidat a dirigé la transformation du service de partenariat, y compris l’élaboration et la mise en œuvre d’un ensemble d’informations sur l’industrie de la restauration (assistant d’information) pour le partenariat afin de soutenir la personnalisation régionale du service pour répondre aux besoins des restaurateurs locaux.

Au cours des deux dernières années, le candidat a dirigé les efforts visant à aligner le service numérique de l’organisation afin de soutenir l’intégration en profondeur des données économiques clés dans le but de fournir des services mieux intégrés aux entreprises canadiennes.

 

[3.] Expérience de la gestion de projets liés à des initiatives complexes ayant trait à l’économie et à la prestation de services.

 

Le candidat a une expérience significative dans la gestion de projets sur des initiatives de prestation de services avec des données économiques complexes.

Par exemple, le candidat a dirigé la refonte d’un nouveau site Web du Réseau Entreprises Canada (REC), qui a nécessité l’intégration de dépenses complexes du gouvernement du Canada en matière de marchés publics et d’autres sources de données économiques du gouvernement ouvert et de Statistique Canada dans le contexte des besoins des PME. Gérant une équipe pluridisciplinaire, le candidat a dirigé le processus d’évaluation des données économiques au niveau le plus pointu. Dans le cadre de ce processus, des rapports économiques ont été analysés et des éléments de données clés ont été extraits et catégorisés pour permettre une livraison modulaire de l’information.

[…]

 

[134] Selon les plaignants, l’évaluation du candidat est erronée et les critères de mérite n’ont pas été appliqués de façon équitable et transparente.

[135] Au sujet du critère lié aux études, M. Gautreau a fait valoir que les qualifications demandent un diplôme d’un établissement d’enseignement postsecondaire reconnu avec spécialisation acceptable en économie, en sociologie ou en statistique. M. Lee a un diplôme de premier cycle universitaire en sciences avec une spécialisation en chimie. L’évaluation indique que M. Lee a complété un seul cours de statistique. Toutefois, d’après les différents témoignages reçus, M. Lee avait suivi deux cours dans le domaine de spécialisation.

[136] Selon M. Gautreau, les sites Web cités comme expérience ne contiennent aucune donnée économique, statistique ou socio-économique. Il a ajouté que M. Lee n’a entrepris aucune recherche économique, statistique ou socio-économique en rapport avec les sites Web. Le travail de M. Lee relativement à ces sites Web était de les concevoir. Au sujet de la connaissance de M. Lee en psychologie, M. Gautreau affirme qu’une connaissance en psychologie peut être utile pour un développeur Web qui cherche à développer une bonne expérience pour le visiteur sur le site Web. Cependant, ce n’est pas pertinent à la recherche économique et socio-économique.

[137] Au sujet des études de M. Lee, M. Bérubé a demandé aux Ressources humaines à quoi correspondait une spécialisation acceptable en économie, en sociologie ou en statistique. Selon M. Bérubé, le représentant des Ressources humaines lui a répondu que deux cours étaient suffisants dans la mesure où la spécialisation est formée d’un agencement acceptable d’études, de formation ou d’expérience.

[138] M. Bérubé a affirmé que l’intimé demande deux semestres complets ou une année complète de cours pour la nomination d’employés de niveau EC-06 et EC-07. Il a présenté deux annonces d’emploi pour des postes EC-06 et EC-07 pour démontrer cela. Il affirme qu’il est inacceptable que l’intimé ait accepté que le titulaire du poste EC-08 ne détienne que deux cours dans le domaine. Il a ajouté qu’en fait, depuis 2015, pour tous les postes de groupe EC à ISDEC, l’intimé demande une année complète ou deux semestres de cours en économie, en sociologie ou en statistique. Il a donc insisté que le ou les deux cours en statistique suivis par M. Lee combinés à son expérience pratique ne peuvent être considérés suffisants. Selon lui, ISDEC est sévère dans l’application de ce critère pour les postes de niveau EC-4, 05, 06 et 07. Il est donc incohérent qu’il ne le soit pas pour le poste au dernier échelon de l’échelle.

[139] M. Bérubé a aussi déposé en preuve un document intitulé « Programme de recrutement et de perfectionnement des EC - Volet analyse ». Le document présente ce que fait un analyste EC à Statistique Canada. Il est précisé que le programme de recrutement et de perfectionnement des EC (volet analyse) combine une formation structurée obligatoire avec une expérience de travail pratique, qui consiste habituellement en 2 périodes de 12 mois d’affectations par rotation.

[140] Ensuite, afin de démontrer que le candidat choisi ne satisfait pas aux critères d’expérience, M. Gautreau a fait valoir que le premier critère, soit « [e]xpérience appréciable de la direction de travaux de recherche appuyant la conception de services pour des politiques ou des programmes destinés aux entreprises », dans le contexte de la description de travail, signifie qu’il s’agit de recherches économiques et socio-économiques en support du programme et des politiques. Selon lui, le développement de contenu pour le site Web ne correspond pas à de la recherche économique. Le développement d’un gabarit de plan d’affaires ne constitue pas de la recherche économique et socio-économique non plus.

[141] M. Bérubé est aussi en désaccord avec l’évaluation du candidat, en ce qui concerne le premier critère d’expérience. Il est en désaccord avec l’annotation que le candidat a effectué des analyses sur des données économiques clés, notamment sur : « […] la segmentation du marché, les données d’importation / exportation, les coûts opérationnels, les données associées au marché du travail, la taille du marché et les risques de marché, etc. ». M. Bérubé répond que des statistiques sur le nombre de recherches sur un site Web, le coût des sites ou même une description statistique concernant les entreprises en utilisant des portails informatiques ne constituent pas une expérience en recherche socio-économique. Il a insisté que l’évaluation ne démontre pas que le candidat détient une expérience de la recherche et de la direction de travaux de recherche appuyant la conception de services pour des politiques ou des programmes destinés aux entreprises. Il m’a renvoyée aux décisions suivantes : 1) Tibbs; 2) Cameron c. l’Administrateur général de Service Canada, 2008 TDFP 16; 3) Robert c. le Sousministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, 2008 TDFP 24; 4) Ayotte c. sous-ministre de la Défense nationale, 2009 TDFP 21. Il a porté à mon attention le paragraphe 108 de la décision Ayotte, qui se lit comme suit :

108 Dans des décisions antérieures telles que Tibbs c. Sousministre de la Défense nationale et al., [2006] TDFP 0008, Chiassonc. [sic] Sousministre de Patrimoine canadien et al., [2008] TDFP 0027, et Cameron et Maheux au paragraphe 75, le Tribunal a déclaré qu’ « il y a abus de pouvoir lorsqu’un délégué se fonde sur des éléments insuffisants pour prendre une décision discrétionnaire y compris lorsqu’il ne dispose d’aucun élément de preuve ou qu’il ne tient pas compte d’éléments pertinents. »

 

[142] Au sujet de la deuxième expérience demandée, soit l’« [e]xpérience de la direction et de la mise en œuvre d’un service pour le programme de transformation des entreprises qui comporte une composante numérique ou en ligne importante », les plaignants font valoir que cette demande d’expérience est surprenante étant donné qu’elle va à l’encontre du travail attendu d’un membre du groupe EC. M. Bérubé souligne que la définition du groupe Systèmes d’ordinateurs (CS) préparée par le SCT inclut dans le groupe CS les postes dont la principale raison d’être est l’activité suivante : « planification et recherche en ce qui concerne la capacité, les possibilités, les applications et la configuration de systèmes de traitement existants et futurs en technologies de l’information […] ». M. Bérubé ajoute que c’est étrange que l’on retrouve une qualification dans l’ECM qui vise une expérience que l’on ne trouverait pas dans la définition du groupe Économique et services de sciences sociales (EC) préparée par le SCT. Cette allégation est toutefois analysée dans la partie précédente de la décision ayant trait au choix des critères de mérite.

[143] Au sujet de la troisième expérience demandée, soit l’« expérience de la gestion de projets liés à des initiatives complexes ayant trait à l’économie et à la prestation de services », M. Gautreau a fait valoir que M. Lee a dirigé une série de projets. Toutefois, il s’occupait de la partie informatique, il ne faisait pas le travail d’un EC. De plus, étant donné que M. Lee a toujours été dans un poste de CS, son expérience d’un poste EC ne peut venir de son travail passé. Selon lui, la livraison de sites Web n’est pas de la recherche.

[144] M. Bérubé a présenté des arguments semblables. Selon lui, l’expérience notée n’est pas pertinente, et elle est très loin des expériences de recherche et de conduite d’études socio-économique. L’expérience demandée évacue complètement l’aspect économique ou socio-économique essentiel tel qu’il est décrit dans la description de travail du poste de EC.

[145] Selon M. Bérubé, l’intimé, y compris la section des Ressources humaines, ne semble pas comprendre le travail d’un EC ou encore ce qu’est de la recherche socio-économique. Il souligne que toute personne qui planifie et dirige de la recherche socio-économique doit avoir un plan de recherche qui définit les balises de la recherche. Ensuite, les projets de recherche et leurs objectifs y sont décrits. Il a fourni en preuve plusieurs exemples de projets de recherche qu’il a produits.

[146] Enfin, M. Bérubé est en désaccord avec le fait qu’un poste EC-08 ait été transféré vers 2016 à l’équipe du Service aux entreprises. J.J. était déjà en poste à ce moment-là. Toutefois, cette décision ne relève pas de la responsabilité de la Commission.

[147] Selon les plaignants, ils ont démontré avec ce qui précède qu’il y a eu de la mauvaise foi, ce qui constitue un abus de pouvoir dans l’application du mérite, comme dans Beyak c. le sous-ministre de Ressources naturelles Canada, 2009 TDFP 7. En somme, selon eux, M. Laverdure a nommé dans un poste EC-08 un candidat de groupe et niveau CS-03 qui n’avait ni le diplôme ni l’expérience pour faire les tâches exigées telles que décrites dans la description de travail. Ce ne sont pas de simples erreurs ou omissions. Cumulativement, ces erreurs équivalent à une insouciance grave au point de correspondre à de la mauvaise foi (voir Morgenstern c. le commissaire du Service correctionnel du Canada, 2010 TDFP 18).

[148] L’intimé, quant à lui, soutient que M. Lee a travaillé dans la division de M. Laverdure pendant de nombreuses années. Il a acquis les compétences d’un poste EC dans le cadre de ses 15 années de travail à ISDEC et en travaillant directement avec J.J. et les titulaires de poste EC-07. M. Laverdure a évalué M. Lee en se servant de son curriculum vitæ et de ses connaissances personnelles. Il était capable de poursuivre le travail qui avait été commencé par J.J., soit de mettre en place une stratégie numérique dans le cadre des services gouvernementaux offerts au public et de conseiller la haute gestion à ce sujet. Il avait une connaissance de ce qui se fait en langage numérique au niveau national et international.

[149] L’intimé rappelle que, tel qu’il est indiqué dans Jolin c. l’administrateur général de Service Canada, 2007 TDFP 11 et dans Visca, l’article 36 de la LEFP prévoit un vaste pouvoir discrétionnaire pour choisir les méthodes d’évaluation visant à déterminer si un candidat possède les qualifications qui ont été établies pour le poste.

[150] Il a fait valoir qu’avant de nommer M. Lee dans le poste pour une période de deux ans, M. Laverdure s’est assuré qu’il était qualifié et qu’il était la meilleure personne pour occuper les fonctions étant donné les exigences spécifiques recherchées dans le domaine du numérique. M. Laverdure a décrit dans le document d’évaluation comment il satisfaisait à chacune des qualifications essentielles du poste.

[151] Pour ces raisons, l’intimé maintient qu’il n’y a pas eu d’abus de pouvoir dans l’application du mérite et dans l’évaluation de M. Lee.

[152] La CFP fait valoir que, lorsqu’il y a une nomination, l’article 36 de la LEFP permet à la CFP, ou l’autorité déléguée, dans ce cas-ci l’intimé, d’utiliser « […] toute méthode d’évaluation […] qu’elle estime indiquée pour décider si une personne possède les qualifications […] ».

[153] Malgré qu’il y ait une grande discrétion pour la sélection des outils d’évaluation, les administrateurs généraux doivent néanmoins respecter les exigences de la Politique de la CFP en matière d’évaluation.

[154] Mon rôle est de déterminer, en fonction des preuves et des témoignages qui ont été présentés à l’audience, si les plaignants ont démontré que l’intimé a abusé de son pouvoir en évaluant M. Lee.

[155] Je conclus que la preuve présentée ne me permet pas de conclure que l’intimé a ainsi abusé de son pouvoir. D’abord, en ce qui concerne la qualification liée aux études, l’annonce de possibilité d’emploi indiquait que les exigences liées aux études étaient les suivantes :

Études :

Grade d’une université reconnue avec spécialisation acceptable en économique, sociologie ou statistique.

REMARQUE

Les candidats et les candidates doivent toujours détenir un grade universitaire. Les cours formant la spécialisation n’ont pas nécessairement à faire partie d’un programme d’études menant à l’obtention d’un grade dans le domaine de la spéclalisation [sic] exigée. La spéclallsation [sic] peut également être formée d’un agencement acceptable d’études, de formation et (ou) d’expérience.

[…]

 

[156] La dernière phrase de cette citation est la suivante : « La spécialisation peut également être formée d’un agencement acceptable d’études, de formation et (ou) d’expérience. » Dans Abi-Mansour c. Président de la Commission de la fonction publique, 2016 CRTEFP 53, au paragraphe 97, la Commission a établi ce qui suit :

97 […] le pouvoir discrétionnaire inhérent présenté par le mot « peut » sous-entend qu’il appartient au gestionnaire de décider si une combinaison donnée est effectivement acceptable. Il ne peut sous-entendre que c’est le candidat qui décide ce qui « peut » être acceptable, comme le plaignant semble le faire. […]

 

[157] J’estime que M. Laverdure a expliqué, de façon détaillée, comment il a conclu que le candidat satisfaisait à cette qualification. Il a expliqué que la personne avait, à son actif, en plus d’un diplôme acceptable, au moins un cours de statistique et une vaste expérience pratique de l’application des principes économiques et statistiques dans la prestation de services en ligne aux petites et moyennes entreprises. M. Laverdure s’est fondé sur ses connaissances des aptitudes de M. Lee qu’il avait perçues depuis 2015. Il satisfaisait donc, selon lui, aux critères d’études exigés.

[158] J’estime qu’il s’agissait d’une conclusion acceptable. Dans un nombre de décisions, la Commission a confirmé que son rôle est de déterminer s’il y a eu abus de pouvoir et non pas de réévaluer la personne nommée. Il ne m’appartient donc pas de réévaluer la qualification, mais plutôt d’examiner si l’approche adoptée concorde avec les exigences de la loi. Je suis d’accord avec l’énoncé dans Abi-Mansour que « […] le pouvoir discrétionnaire inhérent présenté par le mot « peut » sous-entend qu’il appartient au gestionnaire de décider si une combinaison donnée est effectivement acceptable ». Selon moi, M. Laverdure n’a pas outrepassé ce pouvoir discrétionnaire.

[159] Les plaignants ont également fait valoir que l’évaluation de l’expérience de M. Lee n’était pas adéquate. Selon eux, M. Lee ne possède pas les qualifications d’expérience exigées dans l’ECM. À ce sujet, j’ai examiné la preuve qui m’a été présentée. L’évaluation narrative de M. Lee contient, pour chaque qualification, un court texte expliquant comment M. Laverdure a établi que M. Lee possédait les qualifications d’expériences demandées. Bien que l’évaluation narrative soit brève, selon moi, elle contient suffisamment d’éléments et de renseignements pour étayer les conclusions de M. Laverdure que M. Lee possède les critères d’expérience recherchés.

[160] Je comprends que les plaignants sont en désaccord avec le fait qu’un poste de groupe et niveau EC-08 ait été transféré en 2016 à l’équipe du Service aux entreprises. Selon eux, cette équipe n’effectue pas de recherches économiques ou socio-économiques et ce transfert était illogique. Toutefois, je note que l’intimé est le mieux placé pour établir quels sont les programmes et les services qu’il doit livrer et quelles sont les dispositions qu’il prendra pour livrer ces programmes et ces services. La Commission n’a pas le mandat de réviser ces décisions. Ainsi, bien que M. Gautreau souhaiterait que le poste de conseiller principal dans l’équipe du Service aux entreprises soit éliminé ou relocalisé à une direction générale qui fait spécifiquement ce genre de recherche, il ne s’agit pas d’un redressement que la Commission peut accorder.

[161] Les plaignants n’ont donc pas établi que l’intimé a mal évalué la personne retenue en concluant qu’elle satisfaisait aux qualifications reliées aux études et à l’expérience.

[162] Les plaintes d’abus de pouvoir fondées sur ce motif sont donc rejetées.

[163] En dernier lieu, je tiens à souligner le travail remarquable qui a été accompli par les deux parties dans la présentation de leur cause. Les plaintes sont rejetées du fait que, dans mon analyse de tous les facteurs énumérés et des arguments présentés, je n’ai pas décelé de lacunes substantielles. Malgré ceci, j’ai trouvé que les plaignants ont fort bien présenté les enjeux importants auxquels ils ont été confrontés et leur perception de l’abus de pouvoir qu’ils ont subi. Leur effort a servi à éclairer la situation.

[164] Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

(L’ordonnance apparaît à la page suivante)


V. Ordonnance

[165] Les plaintes sont rejetées.

Le 29 juin 2021.

Nathalie Daigle,

une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

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