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Date: 2021-08-25

Dossier: 590-14-42691

AFFAIRE CONCERNANT

 

UNE COMMISSION DE L’INTÉRÊT PUBLIC

 

EN VERTU DE LA LOI SUR LES RELATIONS DE TRAVAIL DANS LE SECTEUR PUBLIC FÉDÉRAL

 

 

Et un renouvellement de la convention collective de l’Alliance de la Fonction publique du Canada (l’« Alliance ») et Sa Majesté du chef du Canada représentée par le Bureau du vérificateur général du Canada (le « BVG ») à l’égard de tous les employés de l’unité de négociation du Groupe des services à la vérification (« ASG ») tel qu’il a été déterminé dans le certificat émis par la Commission des relations de travail dans la fonction publique le 28 juillet 1999.

 

 

Répertorié

Alliance de la Fonction publique du Canada c. Bureau du vérificateur général du Canada

Devant : Morton Mitchnick, président,

Gary Cwitco et Jean-François Munn, représentants

Pour l’agent négociateur :

Seth Sazant, négociateur; Elanor Sherlock, agente de recherche, AFPC

Caroline Leclerc et Corey McCormick, membres de l’équipe

Pour l’employeur :

Daniel Sipes, négociateur et Sophie Béliveau, directrice, Gestion financière, Groupe du contrôleur; Nathalie Cousineau, parajuriste principale et agente administrative, Services juridiques; Claude Andrée Montsion, directrice, Ressources humaines et Kimberly Leblanc, directrice principale, Ressources humaines.

 

Affaire entendue par vidéoconférence,

le 29 et le 30 juin 2021.

(Traduction de la CRTESPF)


 

RAPPORT DE LA COMMISSION DE L’INTÉRÊT PUBLIC

[1] Le présent document est le rapport de la Commission de l’intérêt public, établi pour favoriser le règlement d’une convention collective entre l’Alliance de la Fonction publique du Canada (l’« Alliance ») et le Bureau du vérificateur général du Canada (le « BVG »).

[2] Conformément à la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral, l’Alliance a signifié un avis de négocier au BVG le 12 juillet 2018 afin de renouveler la convention collective du Groupe des services à la vérification (« ASG ») qui a expiré le 30 septembre 2018. Le ASG est constitué de personnes occupant des postes où ils participent principalement à la prestation de services généraux, notamment les finances, les ressources humaines, les communications et les installations. Le tableau suivant présente la répartition des membres de l’unité de négociation entre les niveaux de classification respectifs :

Niveau

Titulaires

ASG-02

20

ASG-03

42

ASG-04

45

ASG-05

40

ASG-06

19

Total

166

 

[3] Les parties se sont réunies à 10 reprises au total entre le 8 octobre 2020 et le 5 février 2021, afin de mener des négociations. L’Alliance a déclaré qu’elle était dans une impasse et a demandé l’établissement d’une Commission de l’intérêt public (CIP) le 17 mars 2021. La présente Commission a donc été dûment nommée et a tenu des audiences à ce sujet les 29 et 30 juin.

[4] Les parties jouissent d’une bonne relation de travail et leurs propres négociations les ont conduites à un accord, ou du moins à s’en rapprocher, sur la majeure partie des questions. Les points qui avaient été résolus au moment des audiences de la CIP étaient les suivants :

  • · Article 3 – Champ d’application

  • · Article 14 – Congé payé ou non payé pour les affaires de l’AFPC

  • · Article 19 – Élimination de la discrimination et du harcèlement

  • · Article 25 – Durée du travail

  • · Article 28 – Heures supplémentaires

  • · Article 38 – Congé de maternité non payé

  • · Article 39 – Réaffectation ou congé liés à la maternité

  • · Article 40 – Congé parental non payé

  • · Article 41 – Congé non payé pour s’occuper de la proche famille

  • · Article 42 – Congé personnel

  • · Article 43 – Congé payé pour obligations familiales

  • · Article 45 – Congé pour proches aidants

  • · Article 47 – Congé de deuil

  • · Article 62 – Durée de la convention

  • · Nouvel article – Congé pour cause de violence familiale

  • · Annexe E – Soutien au mieux-être des employés

 

[5] Ayant également participé à des discussions informelles avec les parties, la Commission ne doute pas que si l’on pouvait trouver un moyen de contourner les deux questions « fondamentales » empêchant le règlement, les autres questions pourraient être facilement résolues par les parties en poursuivant leurs discussions directes. La Commission ne présentera donc ses observations qu’en ce qui concerne ces deux questions fondamentales.

[6] Les facteurs d’intérêt général pour la tâche de la Commission sont bien sûr énoncés à l’article 175 de la LRTSPF, qui stipule ce qui suit :

175 Dans la conduite de ses séances et l’établissement de son rapport, la commission de l’intérêt public prend en considération les facteurs qui, à son avis, sont pertinents et notamment :

a) la nécessité d’attirer au sein de la fonction publique des personnes ayant les compétences voulues et de les y maintenir afin de répondre aux besoins des Canadiens;

b) la nécessité d’offrir au sein de la fonction publique une rémunération et d’autres conditions d’emploi comparables à celles des personnes qui occupent des postes analogues dans les secteurs privé et public, notamment les différences d’ordre géographique, industriel et autre qu’elle juge importantes;

c) la nécessité de maintenir des rapports convenables, quant à la rémunération et aux autres conditions d’emploi, entre les divers échelons au sein d’une même profession et entre les diverses professions au sein de la fonction publique;

d) la nécessité d’établir une rémunération et d’autres conditions d’emploi justes et raisonnables, compte tenu des qualifications requises, du travail accompli, de la responsabilité assumée et de la nature des services rendus;

e) l’état de l’économie canadienne et la situation fiscale de l’État fédéral.

 

[7] Nous avons souligné la référence aux relativités internes de la fonction publique fédérale elle-même parce que, dans les circonstances particulières de la présente affaire, c’est vraiment la cause de l’impasse actuelle. Tel qu’il a été indiqué, les négociations ont été, pour la plupart, constructives et fructueuses. Le problème, d’une part, est la situation inhabituelle à laquelle l’Alliance doit faire face concernant les deux questions mentionnées ci-dessus et, d’autre part, le fait que beaucoup d’eau a coulé sous les ponts au cours de la présente ronde de négociation, ce qui a donné lieu à un modèle bien établi d’ajustements salariaux au cours des trois années sur lesquelles les parties s’entendent et qui devraient constituer la durée de la présente convention collective. Comme l’indique à raison le BVG dans son mémoire :

[Traduction]

La plupart des conventions collectives ont expiré en 2018 et, depuis, le gouvernement du Canada a conclu 51 accords provisoires ou définitifs avec des groupes représentant près de 242 000 employés, soit plus de 88 % des fonctionnaires de l’administration publique centrale et des organismes distincts.

Après le début de la pandémie de COVID-19, l’incertitude économique a conduit à des accords de plus courte durée, consistant généralement en une entente de trois ans basée sur le schéma suivant :

  • - Année 1 : 2,8 %

  • - Année 2 : 2,2 %

  • - Année 3 : 1,35 % plus 0,15 % pour les mesures spécifiques au groupe

Plus de 96 000 membres des groupes de négociation représentés par l’AFPC ont accepté des conventions de trois ans conformément à ce modèle.

[8] Comme précédemment mentionné, les chiffres ci-dessus comprennent les membres d’un certain nombre d’organismes distincts.

[9] À la lumière de tout cela, quelles sont les « exceptions » qui poussent l’Alliance à persister, comme elle l’a fait, à demander un règlement qui (même modestement, étant donné le nombre d’employés ici) dépasse celui qui prévaut dans l’ensemble du secteur? La Commission les exposera.

I. La question de la « grille »

[10] Comme l’indique une fois de plus à raison l’Alliance dans son mémoire :

[Traduction]

Presque toutes les autres unités de négociation du secteur public fédéral possèdent une grille salariale. Le système actuel de niveaux de rémunération « à fourchette large », qui prévoit des taux minimum et maximum, ainsi qu’une augmentation spécifique accordée chaque année pour évoluer dans cette fourchette, ne correspond pratiquement à aucun des taux de toutes les autres unités de négociation du secteur public fédéral. Il n’est pas conforme à la pratique du BVG lui-même.

 

[…]

L’absence de grille salariale complique également davantage la tâche aux membres pour savoir exactement quel devrait être leur taux de rémunération. Cette situation est davantage aggravée par la débâcle du système Phénix qui dure depuis un certain temps. Le manque de transparence pour les membres recevant leur salaire est certainement exacerbé par un système de rémunération à fourchette large.

[…]

 

Même si ce n’est pas vrai dans tous les cas, il y a une tendance très claire qui soutient la position du syndicat de mettre en œuvre une grille salariale. De plus, le syndicat ne cherche pas à égaler les écarts généralement plus faibles entre les taux de rémunération minimum et maximum ni le nombre généralement plus faible d’échelons à l’intérieur de la grille.

[11] Près de 50 % des membres de cette unité de négociation reçoivent déjà une rémunération au taux maximal de la classification et, par conséquent, l’introduction de cette « grille » touchera un peu plus de la moitié des 166 membres de l’unité de négociation. Mais cela représente tout de même un coût, et l’Alliance, en reconnaissance du modèle et du « mandat » de l’équipe de négociation du BVG qui en résulte, a proposé de reporter cette mise en œuvre jusqu’au dernier jour de validité de la convention, soit le 30 septembre 2021. L’équipe du BVG a proposé de mettre en œuvre le système de grille, mais, étant donné les limites de son mandat actuel, elle n’est disposée à l’accepter que si le coût actuel est prélevé sur l’augmentation générale payable à tous les membres de l’unité.

[12] La Commission ne désapprouve pas la position du BVG. Il y a toutefois une autre circonstance à prendre en compte ici. Au cours des discussions concernant les éléments monétaires lors de la dernière ronde de négociation, l’Alliance a proposé une grille salariale qui permettrait à cette unité de respecter les normes du secteur (et du groupe PA), mais elle a finalement retiré sa proposition. Au cours de l’année suivante, cependant, le BVG a institué une grille salariale pour ses vérificateurs (le groupe AP), qui représente environ 50 % de l’effectif total; peu après, il a fait de même pour le groupe de la direction (EX). Le processus de rémunération de ce dernier groupe n’a pas encore été finalisé, mais pour le groupe AP, le passage à la grille s’est ajouté à l’application des augmentations salariales standard. Une grille avait déjà été créée pour le groupe de la TI. Ainsi, à ce stade, le seul groupe qui n’a pas encore adopté une grille salariale, à part le très petit groupe Gestion juridique, est le groupe actuel. La Commission croit que le BVG est conscient du problème que cette séquence d’événements a créé pour le règlement en cause, et la Commission espère qu’une solution pourra être trouvée, soit en adoptant la proposition de l’Alliance de convertir ce groupe à une grille le dernier jour de validité de la convention collective, soit en établissant dans une lettre d’entente les conditions de cette conversion, qui entreront en vigueur à compter du premier jour de la prochaine convention collective.

II. La question de la « parité »

[13] Le groupe PA a généralement été le point de comparaison pour le présent groupe au BVG. Toutefois, lors de la dernière ronde de négociation, les parties ont convenu d’une augmentation de l’ajustement salarial pour tous les employés ASG-05 et ASG-06, ce qui a créé un alignement avec les groupes AP-02 et AP-03, respectivement. Depuis, cependant, un autre échelon a été ajouté au sommet de l’échelle salariale pour les AP-02 et deux autres échelons pour les AP-03 à la suite d’un exercice d’évaluation comparative (en utilisant les comparateurs du groupe AP). L’Alliance demande le même ajout au sommet des échelles ASG-05 et ASG-06, respectivement, ainsi qu’un ajustement pour le niveau ASG-04.

[14] La « parité » ayant ainsi été atteinte au moins pour les ASG-05 et 06, il n’est pas surprenant que l’Alliance tienne à maintenir cette relativité dans la ronde actuelle. Le BVG répond toutefois que cet ajustement salarial ne constituait pas un accord sur la parité. En particulier, selon le BVG, l’accord n’était pas motivé par un examen de la comparabilité exacte entre le groupe ASG et le groupe AP. La motivation du BVG à l’époque était de faciliter la mobilité du personnel qualifié des rangs AP pour remplir les rôles des ASG en cas de besoin. Depuis cet ajustement des taux, le BVG indique que six AP ont été transférés à des postes ASG-5 et ASG-6 et qu’aucun ASG n’a été transféré au groupe AP à partir de ces postes. Le BVG indique qu’il n’a actuellement aucun problème de recrutement ou de maintien en poste à ces niveaux et, en l’absence d’une évaluation de la comparabilité, il ne voit pas la nécessité de procéder à d’autres ajustements salariaux pour le moment.

[15] Une fois de plus, la Commission reconnaît la difficulté à laquelle fait face le BVG. Il n’en demeure pas moins que si les parties peuvent trouver un moyen de résoudre cette question, en plus du type d’arrangement suggéré par la Commission pour la question no 1, il semblerait que cette convention collective se mette en place assez rapidement. De plus, d’un point de vue purement pratique, le BVG, lorsqu’il décidera s’il doit faire pression une fois de plus pour obtenir une allocation dans le cadre de son mandat, devrait tenir compte de la possibilité que son problème de personnel resurgisse si la différence de taux avec son homologue AP est rétablie.

[16] La Commission laisse donc aux parties le soin de voir ce qui peut être fait au sujet de ces deux questions qui font actuellement obstacle à un règlement final.

 

Le 25 août 2021.

Morton Mitchnick

Président

Traduction de la CRTESPF

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