Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

La Commission de la fonction publique (CFP) a enquêté sur le fonctionnaire s’estimant lésé pour fraude commise pendant un examen sur le Web qui faisait partie d’un processus de nomination – la CFP a conclu qu’il y avait eu fraude, et elle a exercé son pouvoir de révoquer la nomination en vertu de l’art. 69 de la LEFP – le fonctionnaire s’estimant lésé a déposé un grief alléguant qu’il avait été licencié et il a renvoyé ce grief à la Commission en vertu de l’alinéa 209(1)b) de la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral (L.C. 2003, ch. 22, art. 2) – le fonctionnaire s’estimant lésé a prétendu que le grief portait sur une mesure disciplinaire entraînant un licenciement – la Commission a conclu que, par suite de la révocation effectuée par la CFP, la nomination du fonctionnaire s’estimant lésé était nulle ab initio – il était réputé n’avoir jamais été nommé au poste – il ne pouvait pas présenter un grief concernant un licenciement en vertu de l’alinéa 209(1)b), puisqu’il n’avait pas occupé de poste dont il pouvait être licencié.

Grief rejeté.

Contenu de la décision

Date: 20210929

Dossier: 566‑02‑38676

 

Référence: 2021 CRTESPF 111

Loi sur la Commission

des relations de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral et

Loi sur les relations de travail

dans le secteur public fédéral

Armoiries

Devant une formation de la

Commission des relations

de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral

ENTRE

 

Hassan Dayfallah

fonctionnaire s’estimant lésé

 

et

 

administrateur général

(ministère des Transports)

 

défendeur

Répertorié

Dayfallah c. Administrateur général (ministère des Transports)

Affaire concernant un grief individuel renvoyé à l’arbitrage

Devant : Bryan R. Gray, une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

Pour le fonctionnaire s’estimant lésé : Nigel McKechnie, avocat

Pour le défendeur : Karl Chemsi, avocat

Décision rendue sur la base d’arguments écrits
déposés le 7 octobre et les 13 et 20 décembre 2019, et le 21 janvier 2020.

(Traduction de la CRTESPF)


MOTIFS DE DÉCISION

(TRADUCTION DE LA CRTESPF)

I. Résumé

[1] Hassan Dayfallah, le fonctionnaire s’estimant lésé (le « fonctionnaire ») s’est joint à la fonction publique en 2007 et il était un employé du ministère des Pêches et des Océans lorsqu’il a cherché un avancement professionnel et a postulé un poste d’analyste principal de la planification (EC‑05) au ministère des Transports (« Transports Canada ») en 2015. Il a été jugé qualifié pour le poste et y a été nommé.

[2] La Commission de la fonction publique (CFP) a par la suite fait une enquête sur le fait qu’il avait demandé de l’aide auprès d’une autre personne pour effectuer un examen en ligne qui faisait partie du processus de nomination. Cela était contraire aux règles et la CFP a conclu que le fonctionnaire avait commis une fraude lorsqu’il a demandé une telle aide, et la CFP a exercé son pouvoir en vertu de l’art. 69 de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique (L.C. 2003, ch. 22, art. 12 et 13; LEFP) pour ordonner la révocation de sa nomination. La CFP a également décidé qu’elle n’exercerait pas son pouvoir en vertu de l’art. 73 de la LEFP pour le nommer à un autre poste.

[3] Plusieurs aspects de l’enquête, de la déclaration de fraude et de la révocation de sa nomination ont été contestés sans succès devant la Cour fédérale. Le fonctionnaire cherche maintenant à renvoyer un grief à la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (la « Commission »), dans lequel il soutient que l’administrateur général (ministère des Transports) (le « défendeur ») a mis fin à son emploi au moyen d’une mesure disciplinaire et que la décision était infondée, injustifiée, arbitraire, discriminatoire, excessive et rendue de mauvaise foi.

[4] Le défendeur a présenté une requête visant à rejeter le grief pour défaut de compétence au motif que le licenciement du fonctionnaire ne découlait pas de l’exercice du pouvoir discrétionnaire du défendeur et qu’il n’était donc pas de nature disciplinaire.

[5] Pour les raisons qui suivent, je conclus que la Commission n’a pas compétence pour accepter le renvoi du grief.

II. Arguments du fonctionnaire s’estimant lésé

[6] La requête visant à rejeter le grief pour défaut de compétence doit être rejetée et la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (la « Commission ») devrait accepter le renvoi du grief et tenir une audience sur celui‑ci.

[7] Il s’agit uniquement de savoir si l’al. 211a) de la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral (L.C. 2003, ch. 22, art. 2; LRTSPF), qui énonce que les griefs individuels portant sur les licenciements sous le régime de la LEFP ne peuvent être renvoyés à l’arbitrage, prive la Commission de la compétence pour entendre la présente affaire. La réponse est non.

[8] Il s’agit d’un grief de licenciement. La CFP a enquêté sur le fonctionnaire pour fraude commise lors d’un examen en ligne. La CFP a révoqué sa nomination après avoir rendu une décision défavorable contre lui. Elle a également décidé qu’elle mettait fin à son emploi.

[9] Il serait fondamentalement injuste que la carrière du fonctionnaire prenne fin en raison du fait que la CFP a outrepassé sa compétence et que le défendeur a mis en œuvre cette décision.

[10] Après une enquête, il a été jugé que le fonctionnaire avait commis une fraude dans le processus de nomination. La CFP a révoqué sa nomination. Mais la CFP a également pris une mesure supplémentaire. Elle a décidé de mettre fin à son emploi, même si elle n’avait pas le pouvoir de le faire. Sans remettre en question la compétence de la CFP, le défendeur a mis en œuvre l’« ordonnance » de la CFP de mettre fin à l’emploi du fonctionnaire alors que le défendeur était tenu d’amorcer un processus disciplinaire.

[11] En ce qui concerne la demande de contrôle judiciaire, la CFP a modifié son plan d’action, en s’éloignant de son ordonnance de mettre fin à l’emploi du fonctionnaire. Le défendeur cherche maintenant à invoquer cette ordonnance pour justifier le licenciement du fonctionnaire.

[12] La CFP et le défendeur ont créé une question de compétence étroite, mais importante, qui va au‑delà du cas du fonctionnaire. Même s’il est tentant de mettre l’accent sur le comportement répréhensible du fonctionnaire, il s’agit d’une occasion pour la Commission de distinguer entre une révocation de la nomination et un licenciement.

[13] Le fonctionnaire ne pouvait pas être licencié en vertu de l’art. 69 de la LEFP. En cas de fraude dans un processus de nomination, la LEFP ne confère pas ce pouvoir.

[14] L’article 69 de la LEFP prévoit ce qui suit :

Fraude

69 La Commission peut mener une enquête si elle a des motifs de croire qu’il pourrait y avoir eu fraude dans le processus de nomination; si elle est convaincue de l’existence de la fraude, elle peut :

a) révoquer la nomination ou ne pas faire la nomination, selon le cas;

b) prendre les mesures correctives qu’elle estime indiquées.

[Je mets en évidence]

 

[15] Tout au plus, l’art. 69 de la LEFP permet à la CFP de révoquer une nomination et de transmettre au défendeur tout renseignement pertinent recueilli dans le cadre de son enquête. Une fois qu’il reçoit ces renseignements, le défendeur peut prendre des mesures disciplinaires à l’égard du fonctionnaire et, s’il le juge indiqué, peut‑être mettre fin à son emploi.

[16] La Commission a compétence parce que le licenciement aurait dû être imposé pour des raisons disciplinaires, ce qui aurait déclenché le processus disciplinaire. Le défendeur a décidé de passer outre entièrement ce processus et doit maintenant en assumer les conséquences.

[17] Dans le présent cas, la CFP a transmis les renseignements au défendeur et a décidé sans apparence de droit que le fonctionnaire devrait être licencié. Elle a ensuite cherché à mettre en œuvre cette décision. Pour ce faire, le défendeur a alors dû, en droit, prendre des mesures disciplinaires contre le fonctionnaire pour le licencier.

[18] Par conséquent, la Commission a compétence pour recevoir l’affaire en vertu de l’al. 209(1)b) de la LRTSPF. Le fonctionnaire demande une réparation pour son licenciement disciplinaire et non pour la révocation de sa nomination.

[19] À l’appui de ses arguments, l’avocat du fonctionnaire fait valoir ce qui suit que dans Seck c. Canada (Procureur général), 2012 CAF 314, la Cour d’appel fédérale a déclaré que la CFP pouvait prendre des mesures administratives visant à assurer l’intégrité du processus de nomination dans la fonction publique fédérale, mais qu’elle ne pouvait pas prendre des mesures disciplinaires :

[…]

[48] Dans le cas de fraude dans le processus de nomination, la Commission peut : a) « révoquer la nomination ou ne pas faire la nomination »; b) « prendre les mesures correctives qu’elle estime indiquées ». Il s’agit là de mesures administratives visant à assurer la probité du processus de nomination à la fonction publique fédérale, et non pas à proprement parler de mesures disciplinaires. Cette distinction est importante, tant afin de cerner les limites des mesures que peut prendre la Commission en vertu de l’article en cause qu’afin de préciser le devoir de la Commission d’agir équitablement envers ceux qui font l’objet de l’enquête.

[…]

 

[20] Il souligne également la décision de la Cour fédérale dans MacAdam c. Canada (Procureur général), 2014 CF 443, à l’appui de cet argument, comme suit :

[…]

[109] Même si Seck, CAF, précitée, aux paragraphes 48 à 51, traite d’une mesure corrective en vertu de l’article 69 de la LEFP, je suis d’avis que les principes énoncés par la Cour d’appel fédérale s’appliquent également à la révision de mesures correctives en vertu de l’article 66 de la LEFP. Les deux articles de la LEFP confèrent à la Commission les mêmes pouvoirs de prendre des mesures lorsqu’elle conclut que les processus de nomination ont été viciés par la fraude, en ce qui concerne l’article 69, ou par une conduite irrégulière, entre autres, en ce qui concerne l’article 66. Ces pouvoirs de prendre des mesures sont : a) « révoquer la nomination ou ne pas faire la nomination » ou b) « prendre les mesures correctives qu’elle estime indiquées ».

[110] Dans Seck CAF, précitée, au paragraphe 48, la Cour d’appel fédérale a conclu que ces mesures correctives sont :

48 […] mesures administratives visant à assurer la probité du processus de nomination à la fonction publique fédérale, et non pas à proprement parler de mesures disciplinaires. Cette distinction est importante, tant afin de cerner les limites des mesures que peut prendre la Commission en vertu de l’article en cause qu’afin de préciser le devoir de la Commission d’agir équitablement envers ceux qui font l’objet de l’enquête.

[…]

 

[21] Il cite également Seck à l’appui du principe selon lequel la CFP ne peut pas imposer de mesures disciplinaires aux fonctionnaires en vertu de l’art. 69 de la LEFP, mais qu’elle peut enquêter sur des questions et transmettre des renseignements pertinents au défendeur, qui peut alors choisir de prendre des mesures disciplinaires :

[…]

[49] Les employeurs des fonctionnaires sont responsables des mesures disciplinaires envers eux, et cellesci sont régies par la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique. La Commission ne peut donc prendre de mesures disciplinaires en vertu de l’article 69 de la Loi. Elle peut tout au plus, comme elle l’a fait dans le cas de l’appelante, remettre à l’employeur l’information pertinente constatée au cours de son enquête. Il appartiendra à celuici, s’il le juge opportun, d’entamer les mesures disciplinaires qui s’imposent. Le rôle et le mandat de la Commission portent sur la probité du processus de nomination à la fonction publique plutôt que sur la discipline des fonctionnaires fautifs.

[…]

 

[22] L’avocat invoque également Seck à l’appui de son argument selon lequel la CFP ne peut pas prendre des mesures disciplinaires, mais qu’elle peut prendre des mesures correctives, lesquelles il reconnaît ensuite ne peuvent pas faire l’objet d’un grief :

[…]

[52] De même, les mesures correctives prévues à l’article 69 ne comprennent pas l’imposition de mesures pénales contre les fonctionnaires fautifs. Cette tâche appartient plutôt aux tribunaux de droit commun en vertu de l’article 133 de la Loi. Par contre, rien n’interdit à la Commission de remettre les conclusions de son enquête aux forces policières afin qu’elles puissent décider s’il y a lieu d’effectuer leur propre enquête et, le cas échéant, de déposer une accusation en vertu de l’article 133, en tenant compte de la Loi sur la preuve au Canada, L.R.C. 1985, ch. C5, de l’article 13 de la Charte canadienne des droits et libertés, et du fardeau de la preuve hors de tout doute raisonnable propre au droit pénal.

[…]

 

[23] Enfin, l’avocat soutient que la LEFP contient une liste limitée de pouvoirs quant au moment où un licenciement peut avoir lieu, notamment en vertu des art. 62, 63, 119 et 128 en ce qui a trait aux stagiaires, à la démission, à l’activité politique ou lorsqu’un titulaire de charge publique cesse d’occuper sa charge.

[24] L’avocat fait valoir qu’aucune de ces circonstances n’est survenue dans l’affaire dont je suis saisi, qui a privé la CFP du pouvoir de révoquer la nomination et de congédier le fonctionnaire. Par conséquent, l’affaire demeure nécessairement une mesure disciplinaire prise par le défendeur qui s’inscrit dans l’al. 209(1)b) de la LRTSPF et de la compétence de la Commission.

III. La requête en rejet du défendeur

[25] L’avocat du défendeur a soutenu ce qui suit.

[26] M. Dayfallah a renvoyé un grief à l’arbitrage en vertu de l’al. 209(1)b) de la LRTSPF, alléguant qu’il a fait l’objet de mesures disciplinaires entraînant le licenciement.

[27] La Commission n’a pas compétence pour entendre le grief, car le fonctionnaire a cessé d’être employé dans la fonction publique fédérale en application de l’art. 69 de la LEFP et non en raison d’une mesure disciplinaire. En fait, la CFP a mené une enquête et déterminé qu’il avait commis une fraude dans le cadre d’un processus de nomination auprès du défendeur, Transports Canada.

[28] La CFP a révoqué sa nomination conformément à son pouvoir en vertu de la LEFP et a ordonné au défendeur de mettre en œuvre la révocation. Le défendeur n’a pas participé au processus de révocation en vertu de la LEFP. Il a accepté la conclusion de la CFP, mais n’a pas participé au processus décisionnel. Le licenciement du fonctionnaire ne découlait pas d’un exercice du pouvoir discrétionnaire du défendeur et, a fortiori, ne constituait pas une mesure disciplinaire. Par conséquent, la présente affaire devrait être rejetée pour faute de compétence.

[29] La Commission n’a pas compétence à l’égard de ce grief. L’alinéa 209(1)b) de la LRTSPF lui confère la compétence d’entendre un grief portant sur une mesure disciplinaire entraînant le licenciement, la rétrogradation, la suspension ou une sanction pécuniaire. Le fonctionnaire a cessé d’être employé dans la fonction publique à la suite de la révocation de sa nomination par la CFP en vertu de l’art. 69 de la LEFP, qui ne peut faire l’objet d’un grief.

[30] À la suite de son enquête, la CFP a conclu que le fonctionnaire avait commis une fraude et a ordonné la révocation de sa nomination. Encore une fois, Transports Canada n’a pas participé à la détermination de l’existence d’une fraude.

[31] En fait, le fonctionnaire a déposé une demande de contrôle judiciaire de la décision de la CFP. La Cour fédérale a rejeté la demande et a conclu que la décision de la CFP était équitable sur le plan procédural et qu’elle était raisonnable. La Cour a également confirmé que la mesure prise par la CFP en vertu de l’art. 69 de la LEFP n’était pas de nature disciplinaire et ne pouvait pas faire l’objet d’un grief en vertu de la LRTSPF. La Cour a déclaré ce qui suit : « Je souscris à l’observation du défendeur selon laquelle la révocation d’une nomination ne vise pas à discipliner ni à punir un candidat, mais plutôt à renforcer l’intégrité du processus de nomination. » (Voir Dayfallah c. Canada (Procureur général), 2018 CF 1120; « Dayfallah ».)

[32] Une fois que la CFP a pris la décision de révoquer la nomination du fonctionnaire, on a ordonné au défendeur de la mettre en œuvre. Le défendeur n’avait aucun pouvoir discrétionnaire quant au licenciement et a transmis la décision de révocation au fonctionnaire au moyen d’une lettre du 15 janvier 2018.

[33] À la suite de la conclusion de son enquête, la CFP a ordonné à Transports Canada de révoquer la nomination du fonctionnaire. Le défendeur devait suivre l’ordonnance de la CFP rendue en vertu de son pouvoir conféré par l’art. 69 de la LEFP.

[34] La seule mesure que le défendeur a prise consistait à informer le fonctionnaire que, par ordonnance directe de la CFP, sa nomination avait été révoquée et qu’il avait cessé d’être employé dans la fonction publique. Le défendeur ne disposait d’aucun pouvoir discrétionnaire quant à l’application de l’ordonnance de la CFP. En d’autres termes, l’acte qui a mené au licenciement du fonctionnaire n’a pas été exercé par le défendeur.

IV. Analyse

[35] L’avocat du défendeur fait remarquer que la question relative au pouvoir de révoquer une nomination qui découle d’une fraude commise à l’égard d’un processus de nomination est bien analysée.

[36] Le fonctionnaire n’a qu’à examiner l’issue de sa contestation des actes de la CFP, étant donné que la décision de la Cour fédérale cite le pouvoir de la Cour d’appel fédérale de révoquer sa nomination.

[37] Dans Seck (citée avec approbation dans Dayfallah, au par. 107), la Cour d’appel fédérale a mentionné expressément le résultat de cette révocation, à savoir la perte de son emploi, comme suit :

[…]

[48] Dans le cas de fraude dans le processus de nomination, la Commission peut : a) « révoquer la nomination ou ne pas faire la nomination »; b) « prendre les mesures correctives qu’elle estime indiquées ». Il s’agit là de mesures administratives visant à assurer la probité du processus de nomination à la fonction publique fédérale, et non pas à proprement parler de mesures disciplinaires. Cette distinction est importante, tant afin de cerner les limites des mesures que peut prendre la Commission en vertu de l’article en cause qu’afin de préciser le devoir de la Commission d’agir équitablement envers ceux qui font l’objet de l’enquête.

[49] Les employeurs des fonctionnaires sont responsables des mesures disciplinaires envers eux, et cellesci sont régies par la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique. La Commission ne peut donc prendre de mesures disciplinaires en vertu de l’article 69 de la Loi. Elle peut tout au plus, comme elle l’a fait dans le cas de l’appelante, remettre à l’employeur l’information pertinente constatée au cours de son enquête. Il appartiendra à celuici, s’il le juge opportun, d’entamer les mesures disciplinaires qui s’imposent. Le rôle et le mandat de la Commission portent sur la probité du processus de nomination à la fonction publique plutôt que sur la discipline des fonctionnaires fautifs.

[50] La révocation d’une nomination par la Commission en vertu de l’article 69 n’est donc pas une mesure disciplinaire, car une telle nomination est nulle ab initio. Il ne s’agit pas là d’un congédiement ou d’un licenciement qui peut faire l’objet d’un grief. Les autres mesures correctives que peut prendre la Commission ne peuvent non plus faire l’objet d’un grief.

[51] Si la Commission ne peut prendre de mesures disciplinaires en vertu de l’article 69, les mesures correctives qu’elle prend en vertu de cet article ne peuvent être contestées par un grief en vertu de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique. Le recours approprié est plutôt une demande de contrôle judiciaire devant la Cour fédérale. Il n’est donc pas question d’appliquer aux mesures correctives en vertu de l’article 69 les principes juridiques propres au droit du travail, tels les principes de la proportionnalité et de la gradation des sanctions. Ces mesures correctives doivent plutôt être contrôlées en utilisant les principes du droit administratif, c’estàdire qu’elles doivent relever de la compétence de la Commission et être raisonnables.

[…]

[Je mets en évidence]

 

[38] Le recours du fonctionnaire aux passages des paragraphes 48 et 49 de Seck ne tient pas compte du contexte de ce cas. Dans Seck, l’employée n’avait jamais été nommée au poste. La CFP a mené son enquête pendant que le processus de nomination était en cours et a conclu qu’elle avait commis une fraude au sens de l’art. 69 de la LEFP. Puisque l’employée n’avait pas encore été nommée, la révocation d’une nomination ne constituait pas une option pour la CFP à titre de mesure corrective.

[39] L’avocat du fonctionnaire fait valoir que la CFP n’a pas le pouvoir législatif de révoquer une nomination et de congédier un fonctionnaire.

[40] Cet argument ne résiste pas à une lecture simple de l’examen de cette question par la Cour d’appel fédérale, comme suit :

[…]

[50] La révocation d’une nomination par la Commission en vertu de l’article 69 n’est donc pas une mesure disciplinaire, car une telle nomination est nulle ab initio. Il ne s’agit pas là d’un congédiement ou d’un licenciement qui peut faire l’objet d’un grief. Les autres mesures correctives que peut prendre la Commission ne peuvent non plus faire l’objet d’un grief.

[…]

[Je mets en évidence]

 

[41] La CFP a sans aucun doute le droit de révoquer une nomination. Toutefois, la révocation constitue‑t‑elle un [traduction] « licenciement » en vertu de la LRTSPF, comme le prétend le fonctionnaire?

[42] Cette question est pertinente parce qu’en vertu de l’al. 209(1)b), dans le présent contexte, seul un grief portant sur « une mesure disciplinaire entraînant le licenciement, la rétrogradation, la suspension ou une sanction pécuniaire » peut être renvoyé à la Commission pour arbitrage.

[43] Si la nomination du fonctionnaire est nulle ab initio (ce qui signifie [traduction] « dès le début »), il est considéré, en vertu de la loi, comme n’avoir jamais été nommé au poste. S’il n’a jamais été nommé, il n’occupait pas un poste duquel il pouvait être licencié. Par conséquent, étant donné que le fonctionnaire ne pouvait pas être licencié, il n’y a eu aucun licenciement au sens de l’al. 209(1)b) de la LRTSPF.

[44] Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

(L’ordonnance apparaît à la page suivante)


V. Ordonnance

[45] Le grief est rejeté pour défaut de compétence.

Le 29 septembre 2021.

Traduction de la CRTESPF

Bryan R. Gray,

une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

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