Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le demandeur a demandé le réexamen d’une décision d’arbitrage de grief qui avait rejeté ses griefs – la Commission a passé en revue la jurisprudence et le cadre législatif pertinents et a conclu que le pouvoir énoncé à la partie 1 de la LRTSPF qui permet à la Commission de réexaminer ses décisions ne s’applique pas aux décisions d’arbitrage de grief prises en vertu de la partie 2 – la Commission a tenu compte de Canada (Procureur général) c. Philps, 2017 CAF 178, et a rejeté la demande.

Demande rejetée.

Contenu de la décision

Date: 20211108

Dossier: 525-02-43177

XR: 566-02-8818 et 10674

 

Référence: 2021 CRTESPF 121

Loi sur la Commission des

relations de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral et

Loi sur les relations de travail dans

le secteur public fédéral

Coat of Arms

Devant une formation de la

Commission des relations de

travail et de l’emploi dans

le secteur public fédéral

Entre

 

Corey Nash

demandeur

 

et

 

Conseil du trésor

(Service correctionnel du Canada)

 

défendeur

Répertorié

Nash c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada)

Affaire concernant une demande d’exercice par la Commission de l’un ou l’autre de ses pouvoirs prévus à l’article 43 de la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral

Devant : Ian R. Mackenzie, une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

Pour le demandeur : Lui-même

Pour le défendeur : Caroline Engmann, avocate

Décision rendue sur la base d’arguments écrits
déposés les 12 et 31 mai et le 24 juin 2021.

(Traduction de la CRTESPF)


MOTIFS DE DÉCISION

(TRADUCTION DE LA CRTESPF)

I. Demande devant la Commission

[1] Le 12 mai 2021, Corey Nash (le « demandeur ») a demandé un réexamen en vertu du paragraphe 43(1) de la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral (L.C. 2003, ch. 22, art. 2; LRTSPF) d’une décision rendue par la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (la « Commission ») dans Nash c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada), 2021 CRTESPF 38 (la « décision d’arbitrage »). La décision d’arbitrage a rejeté deux griefs que le demandeur avait renvoyés à l’arbitrage en ce qui concerne l’interprétation et l’application de sa convention collective (dont il est question dans la section de l’aperçu des présents motifs). Le paragraphe 43(1) de la LRTSPF prévoit ce qui suit :

43. (1) La Commission peut réexaminer, annuler ou modifier ses décisions ou ordonnances ou réentendre toute demande avant de rendre une ordonnance à son sujet.

 

[2] Le paragraphe 43(2) de la LRTSPF ne s’applique pas dans le présent cas.

[3] Étant donné que le demandeur était représenté par un avocat engagé par son agent négociateur, l’Alliance de la Fonction publique du Canada, dans l’instance qui a mené à la décision d’arbitrage, son agent négociateur a reçu une copie de la demande de réexamen de la décision du demandeur (la « demande »). Toutefois, l’agent négociateur a choisi de ne pas participer au processus de demande.

[4] Le défendeur a participé au processus de demande et était représenté par la même avocate qui l’avait représenté dans l’instance ayant mené à la décision d’arbitrage. Le 6 août 2021, le gouverneur en conseil a nommé cette avocate commissaire (numéro C.P. 2021-0814), à compter du 13 septembre 2021. Je n’ai eu aucune discussion avec cette membre de la Commission au sujet de la demande et de la présente décision.

II. Aperçu

[5] Le demandeur travaille pour le Service correctionnel du Canada (SCC). Il a renvoyé deux griefs à l’arbitrage, dans lesquels il alléguait un traitement discriminatoire, ce qui contrevient à sa convention collective. Le premier grief portait sur son renvoi en tant que membre d’une commission d’enquête en 2011 sans en avoir discuté avec lui au préalable. Le deuxième grief alléguait une discrimination fondée sur son auto-identification de son origine métisse au SCC et de l’incidence subséquente sur son avancement professionnel.

[6] Le premier grief portait sur des événements qui avaient débuté en novembre 2011. Le deuxième grief a été déposé en 2013.

[7] Les griefs ont été entendus en deux étapes à l’arbitrage. L’audience d’arbitrage a commencé en personne à Edmonton (Alberta), les 3 et 4 juillet 2019, et s’est poursuivie par vidéoconférence du 1er au 4 décembre 2020, en raison de restrictions liées à la pandémie. La Commission a rejeté les griefs dans la longue décision d’arbitrage (639 paragraphes) rendue le 13 avril 2021.

III. Résumé de l’argumentation

A. Pour le demandeur

[8] Le demandeur a demandé que la décision d’arbitrage soit annulée ou qu’une formation de la Commission entende de nouveau la preuve.

[9] Le demandeur a soutenu que l’audition de ses griefs n’avait pas eu lieu en temps opportun et que cela lui avait causé un préjudice. Il a fait valoir qu’il s’agissait là d’un retard excessif dans l’examen des questions relatives aux droits de la personne.

[10] Le demandeur a également soutenu qu’une audience et une décision du Tribunal de la dotation de la fonction publique (Nash c. Commissaire du Service correctionnel du Canada, 2014 TDFP 10; la « décision du TDFP mentionnée ») avaient été mentionnées dans la décision d’arbitrage et que cette chronologie des événements lui avait causé un préjudice.

[11] Le demandeur a soutenu qu’au départ, seulement trois jours étaient prévus pour l’audience d’arbitrage, alors que la Commission aurait dû prévoir suffisamment de temps pour entendre les deux griefs. Il a déclaré qu’à la fin des trois premiers jours, le défendeur a demandé un délai de six mois pour se préparer à la reprise de l’audience. Il a soutenu que le fait que l’on donne plus de temps au défendeur pour se préparer à l’audience d’arbitrage lui avait causé un préjudice. Il a également fait valoir qu’il s’agissait d’une atteinte au principe de la justice naturelle.

[12] Le demandeur a également allégué que la Commission avait adopté une conduite biaisée, car elle avait permis au défendeur de disposer de plus de temps pour se préparer à l’audience d’arbitrage, avait retardé l’audience des griefs pendant des années, avait permis l’audition d’autres questions (d’autres fonctionnaires) qui se sont produites après l’audition des griefs en question et avait utilisé les renseignements de la décision du TDFP mentionnée.

[13] Le demandeur a également soutenu qu’une décision antérieure (voir Nash c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada), 2007 CRTFP 98) avait été citée à l’audience d’arbitrage, mais négligée dans la décision d’arbitrage.

[14] Le demandeur a également déclaré qu’un témoin avait renvoyé, lors de l’audience d’arbitrage, à des notes qui ne lui avaient pas été communiquées par l’intermédiaire d’une demande d’accès à l’information et de protection des renseignements personnels. Il a soutenu que cela avait de toute évidence causé un préjudice à sa capacité de défendre ses intérêts à l’arbitrage.

B. Pour le défendeur

[15] Le défendeur a déclaré qu’il ne reconnaissait pas que l’article 43 de la LRTSPF s’appliquait aux décisions d’arbitrage. En supposant que l’article 43 s’applique bel et bien aux décisions portant sur les griefs, le défendeur a soutenu que le demandeur ne satisfaisait pas au critère pour le réexamen d’une décision. Il a soutenu que le demandeur cherche de toute évidence à remettre en litige ses griefs.

[16] Compte tenu de la charge de travail de l’avocate du défendeur au moment de l’audience d’arbitrage, il n’y avait aucun avantage en matière de préparation en raison de l’inscription de l’audience au rôle. Il n’y avait pas non plus de fondement à l’allégation du demandeur au sujet de « notes » qui ne lui avaient pas été fournies. Le défendeur a soutenu que les notes mentionnées dans la décision d’arbitrage ont trait à une réunion entre le témoin et le demandeur. Après cette réunion, une autre personne qui assistait à l’audience d’arbitrage a envoyé un courriel au demandeur et au témoin dans laquelle elle résumait leur discussion.

C. Les arguments en réfutation du demandeur

[17] Le demandeur a soutenu que la LRTSPF et ses règlements connexes ne fournissent aucune orientation sur l’article 43 ou son intention. Il a soutenu qu’il n’y avait aucune exigence de présenter une demande de contrôle judiciaire pour une décision d’arbitrage, bien que ce soit une option.

[18] Le demandeur a fait valoir que la mise au rôle de questions relatives aux droits de la personne devrait être une priorité pour la Commission. Le demandeur a déclaré que le retard de la Commission à entendre ses griefs lui a causé un préjudice. Il a également soutenu que les représentants du défendeur lui avaient délibérément causé des préjudices en raison de leurs retards et de leur défaut de traiter en priorité les questions relatives aux droits de la personne pour les peuples autochtones, ainsi que les questions de santé et de sécurité.

[19] Le demandeur a soutenu que la Commission est responsable du calendrier des audiences et de la tenue équitable de ces audiences. Il a soutenu que l’article 43 était conçu pour régler ce genre de questions.

[20] Le demandeur a renvoyé à une décision de la Commission, Lavoie c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada), 2021 CRTESPF 54, concernant un grief relatif à l’indemnité de repas pour heures supplémentaires datant de 2015, que la Commission avait tranchée en mai 2021. Il a fait valoir que c’était là la preuve que la Commission et le défendeur accordent la priorité aux indemnités de repas supplémentaires plutôt qu’aux questions relatives aux droits de la personne concernant les Métis et au racisme et à la discrimination systémiques et institutionnalisés. Il a soutenu que la Commission et le défendeur avaient l’obligation d’établir l’ordre de priorité des cas et qu’en l’espèce, ils avaient tous deux échoué.

[21] Le demandeur a également soutenu que les audiences devant la Commission devraient être transcrites, comme c’est le cas pour d’autres tribunaux, comme la Commission des libérations conditionnelles du Canada.

[22] Le demandeur a également fait référence aux appels de la Commission de vérité et réconciliation à prendre des mesures en ce qui concerne la justice, le perfectionnement professionnel et la formation des fonctionnaires.

[23] Le demandeur a soutenu que l’article 43 de la LRTSPF prévoit que la Commission agira équitablement et que les retards injustifiés dans l’audition de ses griefs lui avaient porté préjudice. Il a soutenu que la seule solution raisonnable consiste à annuler la décision d’arbitrage et à réentendre la preuve en prévoyant un délai approprié pour que les deux parties présentent les faits à une nouvelle audience d’arbitrage et sur un pied d’égalité.

IV. Motifs

[24] La présente demande de réexamen de la décision comporte deux questions liées au seuil. La première est de savoir si le paragraphe 43(1) s’applique aux décisions d’arbitrage de griefs rendues en vertu de la partie 2 de la LRTSPF. Dans l’affirmative, la deuxième question relative au seuil est de déterminer si la Commission peut procéder au réexamen d’une décision d’arbitrage de grief portant sur l’interprétation de l’application d’une convention collective sans l’appui de l’agent négociateur du demandeur.

[25] La première question relative au seuil dans la présente demande de réexamen de la décision est de savoir si le paragraphe 43(1) de la LRTSPF s’applique aux décisions rendues au sujet des griefs renvoyés à l’arbitrage en vertu de la partie 2 de la LRTSPF ou se limite aux décisions prises au sujet des plaintes et des demandes en matière de relations de travail déposées en vertu de la partie 1. Le demandeur a déclaré que la Commission avait de larges pouvoirs en matière de réexamen. Le défendeur a indiqué qu’il ne reconnaissait pas que la Commission avait le pouvoir de réexaminer une décision d’arbitrage.

[26] Dans Kruse c. Administrateur général (Agence des services frontaliers du Canada), 2021 CRTESPF 28, la Commission a récemment fait remarquer que, compte tenu de la structure de la LRTSPF et de la répartition des pouvoirs entre la partie 1 et la partie 2, il y a incertitude quant à savoir si l’article 43 peut être appliqué à l’arbitrage des griefs. Cette incertitude découle de la Cour d’appel fédérale qui a semé la confusion dans Canada (Procureur général) c. Philps, 2017 CAF 178. Dans des décisions antérieures, la Cour avait conclu que le pouvoir de réexamen de décision de la Commission n’était lié qu’à la partie 1 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique et à sa législation antérieure : Doyon c. C.R.T.F.P., [1979] 2 C.F. 190 (C.A.); Sincère c. Canada (Procureur général), 2005 CAF 103; Chaudhry c. Canada (Procureur général), 2009 CAF 376. Dans Chaudhry, la Cour a déclaré que « […] [é]tant donné que les décisions des arbitres de grief nommés sous le régime de la LRTFP ne sont pas des décisions de la Commission, elles ne peuvent faire l’objet du réexamen prévu à l’article 43 ».

[27] En vertu de la LRTSPF et de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, les pouvoirs des décideurs en matière d’arbitrage des griefs sont énoncés au paragraphe 226(1) et ne comprennent pas le pouvoir de réexaminer les décisions énoncées au paragraphe 43(1) ou tout pouvoir semblable à celui prévu au paragraphe 43(1). Ces pouvoirs sont généralement semblables à ceux qui sont énoncés dans la législation antérieure. La différence dans le régime législatif actuel réside dans le fait que la Commission peut maintenant trancher les griefs renvoyés à l’arbitrage : ce changement s’est produit en 2014. Toutefois, cela ne veut pas dire que la Commission a reçu plus de pouvoirs en matière d’arbitrage de griefs que ceux que les arbitres de grief ont en vertu de la LRTSPF ou qu’ils avaient auparavant en vertu de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique et de sa législation antérieure.

[28] Même si la distinction entre les « arbitres de grief » et la « Commission » a perdu de son importance à la lumière des modifications apportées à la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique en 2014, il reste que les pouvoirs conférés par la législation aux décideurs (qu’ils soient des arbitres de grief ou la Commission) en ce qui concerne les procédures d’arbitrage en vertu de la partie 2 de la LRTSPF sont différents de ceux qui ont été accordés à la Commission en ce qui concerne les procédures en matière de relations de travail en vertu de la partie 1. Il est vrai que, dans certaines situations, des pouvoirs semblables existent à la fois en vertu de la partie 2 et de la partie 1. Par exemple, le pouvoir général de convoquer des témoins est conféré à la Commission relativement à toute procédure prévue à l’article 20 de la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (L.C. 2013, ch. 40, art. 365) et a été étendu aux arbitres de grief en vertu du paragraphe 226(1) de la LRTSPF. Toutefois, dans d’autres situations, certains pouvoirs sont exclusifs à la partie 2 ou à la partie 1. Par exemple, l’alinéa 226(2)a) confère à tous les décideurs un pouvoir spécifique d’interpréter et d’appliquer la Loi canadienne sur les droits de la personne (L.R.C. (1985), ch. H-6) en ce qui concerne les procédures d’arbitrage en vertu de la partie 2 que la Commission ne possède pas en ce qui concerne les procédures relatives aux relations de travail en vertu de la partie 1. De même, le paragraphe 43(1) confère à la Commission des pouvoirs précis en matière de réexamen des décisions concernant les procédures relatives aux relations de travail en vertu de la partie 1 que les décideurs ne possèdent pas en ce qui concerne les procédures d’arbitrage en vertu de la partie 2 et que la Commission elle-même ne possède pas en ce qui concerne les procédures qui ne sont pas visées par la partie 1 de la LRTSPF.

[29] En dépit de sa décision fondamentale dans Doyon, confirmée plusieurs décennies plus tard dans Sincère et Chaudhry, la Cour d’appel fédérale a plus récemment fait observer qu’elle croit que, dans une décision d’arbitrage d’un grief, la Commission a compétence pour modifier les décisions sur les griefs; voir Philps (au paragraphe 8) :

[8] […] je crois néanmoins que l’arbitre de grief possédait la compétence nécessaire pour traiter la demande en vertu de l’article 43 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22, art. 2. Cet article donne à la CRTEFP la compétence de modifier les décisions qu’elle a rendues. À la lumière du libellé explicite de l’article 43, la décision de la Commission selon laquelle elle n’avait pas la compétence d’effectuer les expurgations demandées en raison de la règle du functus officio est déraisonnable.

[30] Toutefois, la Cour d’appel fédérale semble avoir exprimé ces commentaires sans entendre les arguments des parties sur ce point. En outre, la Cour n’a pas expliqué comment elle en est venue à croire que la Commission avait maintenant compétence pour modifier les décisions d’arbitrage ou pourquoi la Cour s’est écartée de sa jurisprudence antérieure, que la Commission avait jusqu’alors appliquée assidûment depuis Doyon. De toute évidence, les observations formulées par la Cour dans Philps contredisent directement sa jurisprudence antérieure. Je conclus que la jurisprudence de longue date de la Cour, énoncée dans Doyon et confirmée dans Sincère et Chaudhry, est toujours applicable, surtout en l’absence d’indication claire par la Cour que ces précédents ne devraient plus être suivis. En outre, même si les types de décideurs établis dans la partie 2 de la LRTSPF ont été élargis en 2014, il reste que les pouvoirs des décideurs en ce qui concerne l’arbitrage des griefs sont précisés dans la partie 2 de la LRTSPF et ont été précisés de la même façon dans sa législation antérieure et que les pouvoirs de la Commission en ce qui concerne les plaintes et les demandes en matière de relations de travail sont précisés différemment dans la partie 1 de la LRTSPF et sont aussi précisés différemment dans sa législation antérieure. Par conséquent, je conclus que les précédents de Doyon, Sincère et Chaudhry de la Cour sont toujours applicables, surtout compte tenu du fait qu’ils représentent mieux l’intention du législateur au moment où il a adopté la LRTSPF et sa législation antérieure. Par conséquent, je conclus que l’article 43 de la LRTSPF ne confère pas à la Commission le pouvoir d’examiner les décisions d’arbitrage en vertu de la partie 2.

[31] Je n’ai pas besoin d’aborder l’autre question relative au seuil, à savoir s’il faut obtenir l’accord de l’agent négociateur afin de réexaminer la décision d’arbitrage du demandeur en raison de ma conclusion sur la première question relative au seuil. Quoi qu’il en soit, les parties n’ont pas présenté d’arguments à ce sujet.

[32] Même si je conclus que la Commission n’a pas compétence pour entendre la demande de réexamen de la décision et que je n’ai pas besoin de trancher la deuxième question relative au seuil, je tiens à souligner que j’aurais été d’avis que le demandeur ne se serait pas acquitté du fardeau de prouver qu’il était justifié de procéder au réexamen de la décision d’arbitrage.

[33] La Cour d’appel fédérale a confirmé qu’une demande de réexamen de la décision en vertu de l’article 43 n’est pas un appel ou une demande de nouvelle décision; voir Chaudhry, au par. 8, qui se lit comme suit : « […] Il s’agit plutôt d’une exception limitée au caractère définitif des décisions de la Commission qui permet aux décideurs de réexaminer leur décision en tenant compte d’un nouvel élément de preuve ou d’un nouvel argument. »

[34] Chaudhry c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada), 2009 CRTFP 39, avait établi les lignes directrices suivantes pour l’examen d’une décision en vertu du paragraphe 43(1) :

[…]

29 […]

•le réexamen ne doit pas remettre en litige le fond de l’affaire;

il doit être fondé sur un changement important des circonstances;

•il doit tenir compte uniquement des nouveaux éléments de preuve ou arguments qui ne pouvaient être raisonnablement présentés lors de l’audience initiale;

•on doit s’assurer que les nouveaux éléments de preuve ou arguments ont des conséquences importantes et déterminantes sur l’issue de la plainte;

•on doit veiller à ce que le réexamen soit fondé sur un motif impérieux;

•le pouvoir de réexamen doit être exercé de manière « […] judicieuse, avec beaucoup de soin et peu fréquemment ». […]

[…]

 

[35] Le demandeur soulève maintenant les allégations suivantes concernant la décision d’arbitrage : le retard dans l’audition des griefs, le temps accordé au défendeur pour se préparer par rapport au temps qui lui a été accordé, le défaut d’examiner une décision antérieure à l’égard du demandeur et le fait qu’un témoin aurait invoqué des notes auxquelles il n’avait pas accès. Il a également mentionné l’absence de transcription de l’audience d’arbitrage. Aucune de ces allégations n’a eu d’effet significatif et déterminant sur le résultat de la décision d’arbitrage. De plus, à l’exception de l’allégation du défaut d’examiner une décision antérieure, le demandeur n’a pas présenté de nouveaux éléments de preuve ou d’arguments qui n’auraient pu être soulevés à l’audience d’arbitrage par le représentant de son agent négociateur.

[36] Le demandeur aurait pu invoquer l’argument du retard à prévoir une audience au début de l’audience d’arbitrage. J’ai déjà mentionné que le demandeur était représenté par un avocat embauché par son agent négociateur dans l’instance qui a mené à la décision d’arbitrage. L’argument selon lequel le défendeur a eu plus de temps pour se préparer n’est pas non plus un argument nouveau, car le demandeur aurait pu l’invoquer au moment de l’ajournement ou de la nouvelle convocation de l’audience d’arbitrage.

[37] Le fait de ne pas avoir examiné une décision antérieure liée au demandeur ne constitue pas un motif impérieux de procéder à un réexamen de la décision. À première vue, cette décision antérieure n’était pas liée à l’objet des griefs renvoyés à l’arbitrage et n’aurait pas pu avoir d’effet significatif et déterminant sur l’issue de la décision d’arbitrage.

[38] La question des notes utilisées par un témoin n’est pas nouvelle non plus. Le demandeur aurait pu le soulever à l’audience d’arbitrage lorsque la preuve a été présentée. De même, le demandeur aurait pu soulever la question de la transcription de l’audience à cette audience, puisque la Commission avait la pratique de longue date de ne pas enregistrer ses audiences.

[39] De toute évidence, le demandeur n’est pas satisfait du résultat de la décision d’arbitrage. Toutefois, une demande de réexamen de la décision ne constitue pas une occasion de remettre en litige des griefs.

[40] Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

(L’ordonnance apparaît à la page suivante)


V. Ordonnance

[41] La demande de réexamen de la décision est rejetée.

Le 8 novembre 2021.

Traduction de la CRTESPF

 

Ian R. Mackenzie,

une formation de la Commission des relations de

travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

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