Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le plaignant a travaillé comme fonctionnaire électoral lors de l’élection fédérale de septembre 2021 – il était censé travailler le jour de l’élection, mais à la suite d’un différend avec certains membres du personnel d’Élections Canada, on l’a informé que ses services n’étaient plus requis – le plaignant a prétendu que sa nomination avait été révoquée en vertu de l’art. 74 de la LEFP – pour présenter une plainte en vertu de l’art. 74 de la LEFP, une révocation de nomination doit avoir été effectuée en vertu du par. 67(1), 67(2) ou 15(3) – la Commission a déterminé que la nomination n’avait pas été faite au sens de la LEFP, puisqu’il ne s’agissait pas d’une nomination faite par la Commission de la fonction publique ou par l’administrateur général à l’aide de pouvoirs délégués – il s’agissait plutôt d’une nomination faite en vertu de la Loi électorale du Canada (L.C. 2000, ch. 9) par la directrice du scrutin de la circonscription – par conséquent, l’art. 74 de la LEFP ne pouvait pas s’appliquer.

Plainte rejetée.

Contenu de la décision

Date : 20220323

Dossier : 771-02-43739

 

Référence : 2022 CRTESPF 18

Loi sur la Commission des

relations de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral et

Loi sur l’emploi dans la

fonction publique

Armoiries

Devant une formation de la

Commission des relations

de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral

Entre

 

Terry Omer

plaignant

 

et

 

ADMINISTRATEUR GÉNÉRAL

(Bureau du directeur général des élections)

 

intimé

et

AUTRES PARTIES

Répertorié

Omer c. Administrateur général (Bureau du directeur général des élections)

Affaire concernant une plainte de révocation déraisonnable déposée aux termes de l’article 74 de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique

Devant : Marie-Claire Perrault, une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

Pour le plaignant : Lui-même

Pour l’intimé : Caroline Laurin

Pour la Commission de la fonction publique : Louise Bard

Décision rendue sur la base d’arguments écrits
déposés le 26 janvier et les 1er et 7 février 2022.

(Traduction de la CRTESPF)


MOTIFS DE DÉCISION

(TRADUCTION DE LA CRTESPF)

I. Plainte devant la Commission

[1] Le 10 novembre 2021, Terry Omer (le « plaignant ») a déposé une plainte auprès de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (la « Commission ») contre l’administrateur général du Bureau du directeur général des élections (« l’intimé » ou « Élections Canada »). L’objet de la plainte était une révocation d’une nomination aux termes de l’art. 74 de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique (L.C. 2003, ch. 22, art. 12 et 13; LEFP).

[2] Le 26 janvier 2022, l’intimé a déposé auprès de la Commission une requête en rejet de la plainte, faisant valoir que l’art. 74 de la LEFP ne s’applique pas puisqu’aucune nomination n’a été faite au sens de la LEFP.

[3] La Commission de la fonction publique (CFP), qui est partie à toutes les plaintes de dotation dont la Commission est saisie, a soutenu que l’art. 74 ne s’applique pas, car ses conditions n’ont pas été remplies.

[4] Pour les motifs qui suivent, la requête en rejet de la plainte est accueillie et la plainte est rejetée.

II. Contexte

[5] Le plaignant a travaillé comme fonctionnaire électoral pour l’intimé lors de la dernière élection fédérale, en septembre 2021. Le jour d’élection officiel était le 20 septembre 2021, mais le processus électoral a commencé avant cette date, soit par l’inscription des électeurs et les votes par anticipation. Selon les arguments du plaignant, qui n’ont pas été contestés par l’intimé, il semble qu’il ait travaillé pour Élections Canada à compter de la fin d’août 2021 et pendant plusieurs jours en septembre, y compris dans les bureaux de vote par anticipation du 10 au 13 septembre 2021.

[6] Le plaignant a été nommé à titre de fonctionnaire électoral par Martine Bélanger, la directrice du scrutin de sa circonscription, soit Brossard–Saint-Lambert, au moyen d’une série de nominations visant les dates susmentionnées. Il existe également un document de nomination pour le 20 septembre 2021, le jour d’élection, mais Mme Bélanger l’a annulé.

[7] Il semble que dans le cadre de ses échanges avec certains membres du personnel d’Élections Canada, la relation entre le plaignant et certains membres du personnel est devenue de plus en plus conflictuelle. Le 16 septembre 2021, Mme Bélanger l’a informé que ses services n’étaient plus requis.

[8] En plus d’avoir présenté cette plainte, le plaignant a également déposé un grief pour ce qu’il a appelé un licenciement, en alléguant une discrimination fondée sur la race et l’ethnicité. Son grief fait l’objet d’une décision distincte.

III. Résumé de l’argumentation sur la requête en rejet de la plainte

A. Pour l’intimé

[9] L’intimé a fait valoir que la Commission n’a pas compétence, car aucune nomination ni aucune révocation de nomination n’a été effectuée en vertu de la LEFP. Voici un extrait de son argumentation qui démontre son raisonnement :

[Traduction]

[…]

La présente plainte porte sur une nomination faite aux termes de l’article 22 de la Loi électorale du Canada, LC 2000, ch. 9 (LEC). Le plaignant a été embauché pour travailler au bureau de vote de Brossard – Saint-Lambert les 10, 11, 12, 13 et 20 septembre 2021 (voir l’annexe A). Les membres du personnel électoral nommés en vertu de la LEC ne sont ni des fonctionnaires de la fonction publique ni des employés d’Élections Canada. Ils sont embauchés et gérés par le directeur du scrutin de la circonscription électorale où ils travailleront et leurs nominations peuvent être révoquées à la discrétion du directeur du scrutin. Les membres du personnel électoral nommés en vertu de la LEC sont rémunérés conformément au Tarif des honoraires – élections fédérales (DORS/2021-22). Ils occupent leur poste pour une période limitée pendant une élection et leurs nominations sont régies par la LEC.

L’article 74 de la LEFP énonce que « [l]a personne dont la nomination est révoquée par la Commission en vertu du paragraphe 67(1) ou par l’administrateur général en vertu des paragraphes 15(3) ou 67(2) peut, selon les modalités et dans le délai fixés par règlement de la Commission des relations de travail et de l’emploi, présenter à celle-ci une plainte selon laquelle la révocation n’était pas raisonnable ».

Dans Pugh, [2007] TDFP 0003, et Comeau, [2007] TDFP 0047, l’ancien Tribunal a indiqué qu’afin d’avoir compétence pour entendre la plainte, il faut premièrement démontrer qu’une nomination a été faite en vertu de la LEFP et que, deuxièmement, la nomination a ensuite été révoquée.

Dans la présente affaire, puisqu’aucune nomination n’a été faite en vertu de la LEFP et qu’aucune enquête n’a été menée en vertu des paragraphes 67(1), 67(2) ou 15(3), il ne peut y avoir aucune révocation de nomination aux termes de l’article 74.

[…]

 

B. Pour le plaignant

[10] Le plaignant soutient qu’il a travaillé pour Élections Canada depuis 2011 et que son emploi est plus qu’occasionnel. En outre, s’il n’y a aucun recours devant la Commission, il se retrouve sans recours pour corriger une situation injuste.

C. Pour la Commission de la fonction publique

[11] Pour présenter une plainte aux termes de l’art. 74 de la LEFP, une révocation de nomination doit avoir été effectuée en vertu du par. 67(1), 67(2) ou 15(3). Rien dans les documents présentés ne laisse entendre qu’une telle révocation a été effectuée. Par conséquent, le plaignant n’a aucun recours devant la Commission aux termes de l’art. 74 de la LEFP.

IV. Analyse

[12] La Loi électorale du Canada (L.C. 2000, ch. 9) prévoit ce qui suit au sujet de la nomination des fonctionnaires électoraux :

32 (1) Sous réserve des paragraphes (2) et (3) et 33(2) et (3), après la délivrance du bref, le directeur du scrutin nomme, conformément aux instructions du directeur général des élections, les fonctionnaires électoraux qu’il estime nécessaires pour l’exercice dans la circonscription des attributions que la présente loi confère aux fonctionnaires électoraux.

(2) Il peut, conformément aux instructions du directeur général des élections, nommer des fonctionnaires électoraux avant la délivrance du bref s’il l’estime indiqué afin de les former et de les préparer en vue de l’exercice, après cette délivrance, des attributions que la présente loi confère aux fonctionnaires électoraux.

[…]

 

[13] Le plaignant a produit des documents qui, selon lui, démontrent qu’il a été nommé. Il s’agit de déclarations solennelles qu’un travailleur temporaire doit signer pour attester qu’il est qualifié pour travailler à titre de fonctionnaire électoral. Le document comprend également une section intitulée « Nomination » (Appointment en anglais) qui énonce que le directeur du scrutin nomme la personne pour les jours énoncés dans la déclaration. Les documents ont été produits pour les dates suivantes : du 10 au 13 septembre 2021 et le 20 septembre 2021.

[14] Il ne s’agissait pas d’une nomination au sens de la LEFP, étant donné qu’il ne s’agit pas d’une nomination faite par la Commission de la fonction publique ou par l’administrateur général à l’aide de pouvoirs délégués. Il s’agit plutôt d’une nomination faite en vertu de la Loi électorale du Canada par la directrice du scrutin de la circonscription. Par conséquent, l’art. 74 de la LEFP ne peut pas s’appliquer.

[15] L’article 74 de la LEFP, en vertu duquel la plainte a été présentée, est rédigé en partie comme suit :

74 La personne dont la nomination est révoquée par la Commission en vertu du paragraphe 67(1) ou par l’administrateur général en vertu des paragraphes 15(3) ou 67(2) peut, selon les modalités et dans le délai fixés par règlement de la Commission des relations de travail et de l’emploi, présenter à celle-ci une plainte […]

 

[16] Comme l’indique la CFP, aucune des conditions énoncées à l’art. 74 n’est remplie dans la présente affaire. Le paragraphe 15(3) est rédigé comme suit :

15 (3) Dans les cas où la Commission autorise un administrateur général à exercer le pouvoir de faire des nominations dans le cadre d’un processus de nomination interne, l’autorisation doit comprendre le pouvoir de révoquer ces nominations — et de prendre des mesures correctives à leur égard — dans les cas où, après avoir mené une enquête, il est convaincu qu’une erreur, une omission ou une conduite irrégulière a influé sur le choix de la personne nommée.

 

[17] Les paragraphes 67(1) et (2) portent sur l’enquête qui pourrait donner lieu à une révocation. Une enquête suit également un processus de nomination interne et une nomination par la Commission de la fonction publique ou par l’administrateur général.

[18] La nomination que la directrice du scrutin a fait pour les jours précédant l’élection et le jour de l’élection n’a pas été faite à la suite d’un processus de nomination interne. Il s’agissait d’une nomination faite en vertu de l’art. 32 de la Loi électorale du Canada. Par conséquent, l’art. 74 ne peut pas s’appliquer.

[19] Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

(L’ordonnance apparaît à la page suivante)


V. Ordonnance

[20] La requête en rejet de l’intimé est accueillie.

[21] La plainte est rejetée.

Le 23 mars 2022.

Traduction de la CRTESPF

Marie-Claire Perrault,

une formation de la Commission des

relations de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral

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