Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le plaignant est un vétéran à la retraite des Forces armées canadiennes et avait été inscrit au système de priorité – sa candidature a été éliminée à l’étape de la présélection d’un processus de nomination annoncé à l’interne parce qu’il n’avait pas satisfait à deux critères de mérite essentiels – il a soutenu que lors de la discussion informelle de suivi, il avait démontré à l’intimé qu’il satisfaisait aux qualifications, mais que celui-ci avait maintenu sa position – la Commission a conclu que, même si le plaignant ne pouvait peut-être pas souscrire à l’évaluation de l’intimé de ses qualifications, le rôle de la Commission ne consiste pas à refaire une évaluation ou à remettre en question l’évaluation – il incombait au plaignant de démontrer ses qualifications lorsqu’il a présenté sa candidature – la discussion informelle ne constitue pas une occasion pour les candidats de demander une nouvelle évaluation ou d’insister pour qu’ils fassent l’objet d’une réévaluation – le plaignant a soutenu que la Directive sur l’administration des priorités et le Guide sur les droits de priorité de la Commission de la fonction publique (CFP) exigeaient que l’intimé le réévalue – la Commission a conclu que l’administration du droit de priorité du plaignant incombait à la CFP et qu’elle outrepassait la compétence de la Commission.

Plainte rejetée.

Contenu de la décision

Date : 20220601

Dossier : EMP‑2017‑11371

 

Référence : 2022 CRTESPF 45

Loi sur la Commission des

relations de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral et

Loi sur l’emploi dans la

fonction publique

Armoiries

Devant une formation de la

Commission des relations

de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral

entre

 

DEAN SCOTT

plaignant

 

et

 

Administrateur général (ministère des Transports)

 

intimé

Répertorié

Scott c. Administrateur général (ministère des Transports)

Affaire concernant une plainte d’abus de pouvoir déposée aux termes de l’alinéa 77(1)a) de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique

 

Devant : James R. Knopp, une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

Pour le plaignant : Lui‑même

Pour l’intimé : Lisa Bambrick, parajuriste principale, Services juridiques du Conseil du Trésor

Pour la Commission de la fonction publique : Alain Jutras, analyste principal

Décision rendue sur la base d’arguments écrits

déposés le 31 janvier et les 10 et 14 février 2022.

(Traduction de la CRTESPF)


MOTIFS DE DÉCISION

(TRADUCTION DE LA CRTESPF)

I. La plainte en matière de dotation

[1] Dean Scott (le « plaignant ») est un vétéran à la retraite des Forces armées canadiennes (FAC). Il a été libéré des FAC et a été inscrit au système de priorité. Il a présenté sa candidature dans le cadre d’un processus de dotation, a été éliminé à l’étape de la présélection et a déposé une plainte auprès de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (la « Commission »), alléguant qu’il y avait eu abus de pouvoir. Pour les motifs qui suivent, sa plainte est rejetée.

II. Chronologie des événements

[2] Selon les arguments écrits des parties, entre le 24 février et le 9 mars 2015, l’administrateur général du ministère des Transports (l’« intimé ») a annoncé un processus de sélection interne, portant le numéro 15‑MOT‑IA‑HRS‑82781, en vue de doter trois postes pour une durée indéterminée, soit un agent des politiques et des normes maritimes, un agent d’analyse des règlements et des lois et un agent principal des programmes, au groupe et au niveau PM‑05. Un bassin de candidats qualifiés a été créé à partir de ce processus.

[3] Le 20 mars 2015, l’intimé a envoyé une demande d’autorisation en matière de priorité à la Commission de la fonction publique (CFP) pour doter le poste d’agent principal des programmes. Il s’agit du processus par lequel les candidats qualifiés possibles bénéficiaires d’un droit de priorité sont informés de la possibilité d’emploi, qui peuvent ensuite répondre s’ils sont intéressés par celle-ci. Le plaignant n’a pas été recommandé aux fins de cette demande d’autorisation en matière de priorité.

[4] Le poste d’agent principal des programmes n’a pas été doté à ce moment‑là.

[5] À l’été 2017, l’intimé était prêt à doter le poste à partir du bassin de candidats qualifiés.

[6] Le 17 juillet 2017, l’intimé a envoyé une nouvelle demande d’autorisation en matière de priorité à la CFP pour doter ce poste.

[7] Le 19 juillet 2017, le plaignant a reçu un avis du Système de gestion de l’information sur les priorités au sujet du poste, ainsi qu’une liste détaillée des exigences en qualification.

[8] Vingt‑sept personnes bénéficiaires d’un droit de priorité ont été identifiées; quatre d’entre elles, y compris le plaignant, ont exprimé leur intérêt à l’égard du poste. Le plaignant a présenté sa candidature dans les délais prescrits.

[9] Le 4 août 2017, l’intimé a achevé l’évaluation du plaignant et a consigné les résultats dans une feuille de présélection.

[10] Le 15 août 2017, l’intimé a envoyé le courriel (en partie) suivant au plaignant :

[Traduction]

[…]

Le présent courriel a pour objet de vous informer que vous avez été éliminé à l’étape de la présélection puisque vous n’avez pas démontré que vous satisfaisiez aux critères suivants :

– EX1 : Expérience appréciable** dans le développement de relations de travail avec divers intervenants internes et externes.

– EX5 : Expérience appréciable** en rédaction de documents de programme à l’intention de la haute direction*, comme des notes d’information, des protocoles d’entente, des propositions de projet, des procédures, entre autres.

*On entend par « haute direction » les personnes occupant un poste de directeur ou de niveau supérieur.

** On entend par « expérience appréciable » une expérience d’au moins trois (3) ans.

[…]

 

[11] Le 15 août 2017, l’intimé a présenté le formulaire de rétroaction à la CFP indiquant que le plaignant n’avait pas satisfait à deux des qualifications essentielles.

[12] Le 15 août 2017, le plaignant a écrit à l’intimé pour contester l’évaluation qu’il avait reçue.

[13] Le lendemain, soit le 6 août 2017, l’intimé a accepté de rencontrer le plaignant pour discuter de l’évaluation. La réunion a eu lieu le 23 août 2017.

[14] La réunion n’a pas été satisfaisante pour le plaignant et, le 31 août 2017, sa plainte présentée en vertu de l’al. 77(1)a) de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique (L.C. 2003, ch. 22, art. 12 et 13; LEFP) a été reçue par la Commission. Le 22 octobre 2017, il a déposé ses allégations auprès de la Commission et le 5 décembre 2017, l’intimé a déposé sa réponse.

[15] L’audience pour entendre l’affaire a été fixée aux 31 janvier et 1er février 2022 au moyen d’une plateforme de vidéoconférence. Les audiences en personne avaient été suspendues en mars 2020 en raison de la pandémie mondiale de la COVID‑19.

[16] Le 23 novembre 2021, une conférence de gestion de cas a été tenue au cours de laquelle le plaignant a affirmé que l’essentiel de son cas reposait sur la réunion de rétroaction et sa conviction selon laquelle le représentant de l’intimé n’était pas en mesure d’expliquer correctement la raison pour laquelle il avait été éliminé du processus à l’étape de la présélection. Selon le plaignant, il s’agissait d’un abus de pouvoir.

[17] À la conférence, l’intimé a fait remarquer que lorsqu’un abus de pouvoir est allégué, la portée de l’enquête se limite au processus lui‑même. Elle ne comprend pas les événements qui sont survenus après la fin du processus. L’article 47 de la LEFP n’exige pas la tenue obligatoire de discussions informelles. Il s’agit d’une décision discrétionnaire prise indépendamment du processus de présélection.

[18] À la conférence, j’ai fait part au plaignant de ma préoccupation selon laquelle la position de l’intimé était correcte et que je n’avais pas compétence pour conclure qu’un abus de pouvoir a eu lieu à l’extérieur du processus lui‑même.

[19] Le plaignant a répété sa ferme conviction qu’il avait la jurisprudence pour étayer son affirmation selon laquelle les actions de l’intimé lors de la réunion informelle équivalaient à un abus de pouvoir.

[20] J’ai décidé lors de la conférence de gestion de cas que le cas devrait procéder par voie d’arguments écrits et que le plaignant devait déposer les siens au plus tard la date qui avait été fixée pour l’audience, soit le 31 janvier 2022. La CFP avait aussi jusqu’à cette date pour déposer ses arguments. L’intimé devait répondre au plus tard le 11 février 2022 et le plaignant disposait d’un droit de réfutation à déposer au plus tard le 25 février 2022. Ces arguments ont tous été déposés dans les délais ou avant les délais.

III. Résumé de l’argumentation

A. Pour le plaignant

[21] Dans ses arguments, le plaignant décrit en détail son expérience et ses qualifications, surtout son expérience au sein des FAC. Il donne son opinion quant à la raison pour laquelle il n’aurait pas dû être éliminé du processus à l’étape de la présélection et déclare qu’il possédait évidemment l’expérience et les qualifications nécessaires.

[22] Au paragraphe 2.3 de ses arguments, il affirme ceci : [traduction] « Le plaignant soutient que la décision du comité de sélection d’éliminer le plaignant du processus de nomination parce qu’il n’avait pas satisfait à deux (2) des qualifications essentielles […] constitue un abus de pouvoir. »

[23] La plainte comportait des extraits de son curriculum vitae qu’il avait soumis lorsqu’il a présenté sa candidature et comportait l’affirmation selon laquelle l’expérience énoncée dans ces extraits démontrait qu’il satisfaisait effectivement aux qualifications (EX1 et EX5) que l’intimé avait indiqué être absentes lorsqu’il l’a éliminé à l’étape de la présélection. Les arguments tiennent compte de ce qu’il avait également soutenu dans ses allégations, qu’il a déposées le 22 octobre 2017. Dans ses allégations, le plaignant a déclaré qu’il avait présenté ces points à l’intimé pendant sa discussion informelle, mais ce dernier a répondu que le curriculum vitae ne comportait pas les détails nécessaires. Le plaignant a répliqué que des détails supplémentaires n’étaient pas requis dans les qualifications essentielles et que son curriculum vitae aurait dû être lu dans son ensemble. Il a également remis en question la compréhension de l’intimé des compétences et de l’expérience du personnel des Forces armées canadiennes.

[24] Le plaignant allègue également un abus de pouvoir au paragraphe 2.9 de ses arguments, comme suit : [traduction] « […] en raison du non‑respect de la procédure législative applicable aux personnes bénéficiaires d’un droit de priorité et de la partialité dans l’évaluation des candidatures à la fois à l’étape de la demande d’emploi et de la discussion de rétroaction. »

[25] Les arguments du plaignant portent ensuite longuement sur le manquement présumé de l’intimé de se conformer à la Directive sur l’administration des priorités de la CFP et à son Guide sur les droits de priorité, notamment :

[Traduction]

 

1 – S’assurer que les communications de l’intimé avec les bénéficiaires de priorité et l’évaluation de leurs qualifications sont menées de façon juste et transparente;

2 – Communiquer avec les bénéficiaires de priorité qui ont manifesté leur intérêt, afin de leur fournir tous les renseignements nécessaires sur le poste à pourvoir et les méthodes d’évaluation qui seront utilisées;

3 – Fournir des preuves attestant que le bénéficiaire de priorité a été évalué de façon appropriée, si ce dernier a indiqué qu’il souhaitait être pris en considération pour le poste visé, et a fourni de l’information visant à démontrer qu’il possédait les qualifications essentielles relatives aux études et à l’expérience;

4 – Fournir en temps opportun au bénéficiaire de priorité, à la CFP et à l’organisation d’attache une rétroaction écrite, au moyen du Système de gestion de l’information sur les priorités, sur le résultat de l’évaluation, incluant une explication claire et détaillée du résultat obtenu;

5 – S’assurer que les bénéficiaires de priorité repérés par le Système pour une possibilité d’emploi sont évalués avant tout autre candidat. Cette mesure permet de respecter l’exigence législative de nommer les bénéficiaires de priorité avant toute autre personne, et de s’assurer qu’ils sont évalués de façon juste et équitable, en évitant toute comparaison avec les autres candidats.

 

 

[26] Le plaignant soutient que l’intimé ne s’est pas conformé à chacune de ces exigences. Par exemple, en ce qui concerne le premier point, il soutient que l’intimé n’a pas examiné l’ensemble de ses qualifications énoncées dans le curriculum vitae et n’a pas compris tous les attributs de ses qualifications acquises pendant ses années en tant que cadre de direction au ministère de la Défense nationale. L’intimé n’a demandé aucun éclaircissement à l’égard de ces points.

[27] En ce qui concerne le deuxième point, il soutient que l’intimé n’a pas communiqué avec lui pour lui fournir des renseignements sur le poste à doter et les méthodes qui allaient être utilisées aux fins de l’évaluation. En ce qui concerne les troisième et quatrième points, il soutient que l’intimé n’a pas communiqué avec lui pour lui fournir des renseignements sur le fait qu’il a été évalué de façon appropriée. Il a seulement été informé qu’il avait été éliminé à l’étape de la présélection. Aucune explication claire et détaillée du résultat obtenu n’a été fournie. En ce qui concerne le cinquième point, il souligne le fait qu’il a fallu trois semaines pour l’informer qu’il avait été éliminé à l’étape de la présélection, ce qui, selon lui, consistait à camoufler le fait que l’intimé avait déjà décidé qui nommer à l’interne.

[28] Le plaignant était particulièrement mécontent du déroulement de la discussion informelle. Au paragraphe 3.6 de ses arguments, il affirme ce qui suit :

[Traduction]

3.6 Lors de l’entrevue de rétroaction postérieure, le plaignant a contesté auprès de l’intimé le fait que le curriculum vitae n’était pas justifié à l’égard de l’ensemble des qualifications, mais que celles‑ci ont plutôt été évaluées et la crédibilité leur a été attribuée uniquement en fonction des pouvoirs discrétionnaires concernant le format. L’intimé n’y a pas répondu en contre‑interrogatoire. L’intimé n’a pas expliqué clairement en quoi les deux (2) qualifications essentielles n’ont pas été satisfaites. L’intimé a fait remarquer qu’il y avait un manque de rapports importants à la haute direction. Toutefois, de son propre aveu, il n’avait aucune expérience ni aucune compréhension de la structure des grades des FAC. Le plaignant a informé l’intimé qu’il n’existait aucune correspondance directe entre la structure hiérarchique et les grades des FAC et de la fonction publique. En fait, le plaignant a indiqué qu’il était lui‑même, pratiquement, un cadre supérieur et que ses voies hiérarchiques auraient toutes été vers d’autres cadres supérieurs. L’exigence relative aux qualifications essentielles n’indiquait pas quels poste, titre ou ancienneté de la haute direction devaient être inclus dans le curriculum vitae, mais n’indiquait que « cadre supérieur ». L’intimé a omis de s’enquérir sur cet important facteur et a pris la décision et a formulé des commentaires de discussions en fonction de son manque de connaissance.

 

[29] Au paragraphe suivant, le plaignant soutient que [traduction] « […] l’administrateur général devrait d’abord déterminer comment la personne nommée satisfait aux qualifications essentielles ».

[30] Le plaignant conclut ses arguments par le paragraphe 3.8, qui énonce ce qui suit :

[Traduction]

3.8 Le plaignant soutient que l’intimé n’a pas discuté pleinement des décisions et n’a fourni aucune preuve de la façon dont la personne nommée satisfaisait aux qualifications essentielles. L’intimé n’a pas fait preuve de jugement et de discrétion avec un esprit ouvert concernant les qualifications EX1 et EX5. Le plaignant fait valoir que les deux (2) qualifications essentielles avaient été satisfaites et que l’intimé a agi de manière discriminatoire lorsqu’il a procédé à la promotion et à la nomination de personnes à l’intérieur de l’organisation d’embauche. Contrairement au paragraphe 2 du courriel de l’intimé daté du 5 décembre 2017, le gestionnaire responsable de l’embauche n’a pas fait plus que ce qui était nécessaire; il a fait preuve d’une mauvaise compréhension, n’a pas été honnête et a été désintéressé. De plus, le gestionnaire responsable de l’embauche a omis de communiquer avec les références du plaignant en vue de corroborer les qualifications essentielles. En raison de la réticence du gestionnaire à répondre aux questions publiques, à justifier et à réévaluer le résultat, le plaignant estimait avoir fait l’objet d’un traitement injuste et que le résultat n’était pas transparent.

 

[31] Dans ses arguments, le plaignant mentionne les décisions suivantes :

Tibbs c. Sous-ministre de la Défense nationale, 2006 TDFP 8, pour les cinq types génériques d’abus, plus particulièrement le cinquième type, soit « […] commet un abus de pouvoir le délégué qui refuse d’exercer son pouvoir discrétionnaire en adoptant une politique qui entrave sa capacité d’examiner des cas individuels avec un esprit ouvert ».

Rizqy c. Sous‑ministre de l’Emploi et du Développement social, 2021 CRTESPF 12, AbiMansour c. Sousministre des Pêches et des Océans, 2021 CRTESPF 3, et Ross c. Commissaire du Service correctionnel du Canada, 2017 CRTEFP 48, à l’appui du principe selon lequel il n’est pas nécessaire qu’un abus de pouvoir soit intentionnel pour que la Commission conclue qu’il a eu lieu.

Laviolette c. Commissaire du Service correctionnel du Canada, 2015 CRTEFP 6, dans laquelle le prédécesseur de la Commission a conclu qu’un abus de pouvoir avait eu lieu parce que le comité de sélection avait pris des décisions malgré un manque d’information.

 

[32] Le plaignant donne également son avis sur la réparation appropriée qui devrait s’appliquer dans les circonstances.

B. Pour l’intimé

[33] Dans ses arguments du 11 février 2022, l’intimé affirme qu’il a satisfait aux exigences législatives dans des circonstances concernant un droit de priorité. Il fait référence comme suit aux paragraphes 39.1(1) et (2) de la LEFP :

39.1 (1) Malgré les articles 40 et 41, la personne qui, d’une part, a été libérée des Forces canadiennes pour des raisons médicales attribuables, selon la décision du ministre des Anciens Combattants, au service et qui, d’autre part, appartient à une catégorie déterminée par la Commission a droit, si elle satisfait aux conditions établies par la Commission, à une priorité de nomination absolue pendant la période fixée par la Commission.

Qualifications essentielles

(2) La personne a une priorité de nomination à tout poste pour lequel, selon la Commission, elle possède les qualifications essentielles visées à l’alinéa 30(2)a).

 

39.1(1) Despite sections 40 and 41, priority for appointment over all other persons is to be given, during the period determined by the Commission, to a person who was released from the Canadian Forces for medical reasons that the Minister of Veterans Affairs determines are attributable to service, who belongs to a class determined by the Commission and who meets the requirements established by the Commission.

Essential qualifications

(2) A person referred to in subsection (1) has a priority for appointment with respect to any position if the Commission is satisfied that the person meets the essential qualifications referred to in paragraph 30(2)(a).

 

[34] L’alinéa 30(2)a) de la LEFP énonce ce qui suit, dans la note marginale « Définition du mérite » :

30(2) Une nomination est fondée sur le mérite lorsque les conditions suivantes sont réunies :

a) selon la Commission, la personne à nommer possède les qualifications essentielles — notamment la compétence dans les langues officielles — établies par l’administrateur général pour le travail à accomplir;

 

30(2) An appointment is made on the basis of merit when

(a) the Commission is satisfied that the person to be appointed meets the essential qualifications for the work to be performed, as established by the deputy head, including official language proficiency […].

 

[35] L’intimé soutient que le gestionnaire responsable de l’embauche a légitimement exercé son pouvoir discrétionnaire lorsqu’il a déterminé que le plaignant ne satisfaisait pas aux qualifications essentielles du poste.

[36] En outre, il fait valoir qu’il a agi conformément à la Directive sur l’administration des priorités et au Guide sur les droits de priorité de la CFP. Une rétroaction décrivant les critères essentiels auxquels il n’a pas satisfait a été envoyée au plaignant. Le gestionnaire responsable de l’embauche a rencontré le plaignant pour discuter de la décision prise à l’égard de sa candidature et a fourni au plaignant une plateforme pour obtenir des renseignements supplémentaires. Au cours de cette réunion, le plaignant a présenté des renseignements supplémentaires qui n’avaient pas été inclus dans sa candidature. Ces renseignements ont été pris en considération et évalués, mais, en fin de compte, le gestionnaire responsable de l’embauche a décidé qu’ils ne suffisaient toujours pas pour démontrer que son expérience satisfaisait aux exigences du poste. Les références du plaignant n’ont pas été contactées parce qu’il n’avait pas réussi l’étape de la présélection initiale.

[37] Les exigences nécessaires pour être admissible au poste ont été clairement énoncées dans l’avis de la CFP envoyé au plaignant par courriel le 19 juillet 2017. Il incombait au candidat de décrire clairement comment il satisfaisait aux qualifications essentielles du poste dans la lettre d’accompagnement. Une explication complète de l’élimination du plaignant a été fournie de façon équitable, transparente et en temps opportun. Les références du plaignant n’ont pas été contactées parce qu’il n’avait pas réussi l’étape de la présélection initiale.

[38] En ce qui concerne les allégations d’abus de pouvoir, l’intimé soutient que le processus de nomination a été mené de façon équitable et transparente et que l’évaluation du plaignant par rapport à la qualification essentielle et la rétroaction quant à la raison pour laquelle sa candidature avait été écartée ne comportent aucun élément d’abus de pouvoir.

[39] En ce qui a trait à l’évaluation des qualifications essentielles, l’intimé cite les trois cas suivants à l’appui du principe selon lequel le rôle de la Commission ne consiste pas à substituer son évaluation des qualifications d’un candidat à celle du comité d’évaluation :

Lavigne c. Canada (Justice), 2009 CF 684, aux paragraphes 2 et 70;

Oddie c. Sous‑ministre de la Défense nationale, 2007 TDFP 30, au paragraphe 66;

Broughton c. Sous‑ministre de Travaux publics et Services gouvernementaux, 2007 TDFP 20, au paragraphe 54.

 

[40] Enfin, l’intimé fait référence à Henry c. Administrateur général de Service Canada, 2008 TDFP 10, aux paragraphes 55 à 58, dans son affirmation selon laquelle il incombait au plaignant de s’assurer que sa candidature était complète et qu’elle contenait tous les renseignements nécessaires pour démontrer qu’il satisfaisait à toutes les qualifications essentielles énumérées dans l’annonce d’emploi.

C. Les arguments de la CFP

[41] Dans ses arguments qui étaient propres au présent cas, la CFP a indiqué que certains détails de la plainte ont trait à l’administration du droit de priorité du plaignant. Il s’agit d’une question qui outrepasse la compétence de la Commission. Dans Magee c. Commissaire du Service correctionnel du Canada, 2011 TDFP 12, au paragraphe 20, l’ancien Tribunal de la dotation de la fonction publique (TDFP) a reconnu que le Guide sur l’administration des priorités de la CFP (maintenant intitulé Guide sur les droits de priorité de la CFP) prévoit que la CFP est responsable de l’administration et de la surveillance des affaires concernant les droits de priorité. Les personnes bénéficiaires d’un droit de priorité qui ont des questions ou des préoccupations quant à leur droit de priorité peuvent communiquer avec la Division des droits de priorité de la CFP.

D. La réfutation du plaignant

[42] Le 14 février 2022, le plaignant a déposé une réfutation qui reprend essentiellement ses arguments antérieurs, en ajoutant que [traduction] « […] l’intimé n’a présenté aucun argument convaincant selon lequel un abus de pouvoir n’a pas eu lieu ».

IV. Analyse et décision

[43] Les parties ont fait référence à de nombreux cas dans leurs arguments. Je les ai tous lus et examinés attentivement, mais je ne mentionnerai que ceux qui, à mon avis, contribuent à éclairer le raisonnement qui sous‑tend ma décision de rejeter la plainte.

[44] Les arguments du plaignant comportent essentiellement deux volets. Tout d’abord, dans ses allégations et dans une certaine mesure, dans les arguments, il a fait valoir qu’il possède les qualifications pour le poste en question et que l’intimé a abusé de son pouvoir lorsqu’il ne les a pas reconnues.

[45] Toutefois, le principal point de ses arguments, tel qu’il l’a indiqué lors de la conférence de gestion de cas du 23 novembre 2021, est son mécontentement à l’égard de la discussion informelle, qui a été tenue après que la décision de l’éliminer à l’étape de la présélection avait déjà été prise. Il soutient que l’intimé ne s’est pas acquitté de nombreuses de ses obligations en vertu de la Directive sur l’administration des priorités et le Guide sur les droits de priorité.

[46] Il est évident que le plaignant ne souscrit pas à l’évaluation de ses qualifications effectuée par l’intimé. Il estime qu’il aurait dû être évalué différemment et demande essentiellement à la Commission de parvenir à cette conclusion. Toutefois, comme il a été conclu dans Broughton au paragraphe 54, le rôle de la Commission ne consiste pas à reprendre une évaluation ou de se demander si l’expérience du plaignant a été évaluée correctement par le comité de sélection. Selon les arguments du plaignant et de l’intimé, il semble que son curriculum vitae et sa lettre d’accompagnement ne comportaient pas suffisamment de détails pour permettre d’établir clairement qu’il possédait les qualifications d’expérience EX‑2 et EX‑5. Il lui incombait se s’assurer que les documents à l’aide desquels il devait démontrer ses qualifications (le curriculum vitae et la lettre d’accompagnement) présentaient des renseignements suffisants dès le début pour permettre à l’intimé de déterminer qu’il était admissible.

[47] Comme le TDFP l’a conclu dans Henry, aux paragraphes 54 à 57 :

[54] Les candidats ne doivent pas supposer que les comités d’évaluation effectueront un suivi auprès d’eux afin de s’assurer qu’ils ont indiqué tous les éléments requis pour satisfaire aux critères relatifs aux qualifications essentielles. En l’espèce, le comité d’évaluation n’était aucunement tenu de le faire. De la même façon, si la demande d’un candidat est incomplète, ce dernier ne doit pas supposer que le comité d’évaluation se fondera sur sa connaissance personnelle du candidat pour accepter sa candidature à l’étape de la présélection. Un comité d’évaluation peut éliminer la candidature d’un postulant qui ne possède pas les qualifications essentielles. À cet égard, voir Neil c. le Sousministre d’Environnement Canada et al., [2008] TDFP 0004.

[55] Le Tribunal estime qu’il incombait à la plaignante de veiller à ce que sa demande soit complète et à ce que celleci contienne tous les renseignements nécessaires pour démontrer qu’elle possédait toutes les qualifications essentielles. Comme l’a énoncé le Tribunal dans la décision Charter c. le Sousministre de la Défense nationale et al., [2007] TDFP 0048 :

[37] Pour qu’un candidat soit nommé à un poste, il doit démontrer, dans le cadre du processus d’évaluation choisi, qu’il possède les qualifications essentielles liées au poste.

[56] Comme dans la décision Charter, l’outil d’évaluation choisi en l’espèce correspondait aux demandes d’emploi des candidats. Après avoir examiné la demande de la plaignante, le comité d’évaluation a jugé que cette dernière ne répondait pas au critère de la formation et a donc éliminé sa candidature du processus à l’étape de la présélection.

[57] Dans des décisions antérieures, le Tribunal a précisé que son rôle ne consistait pas à réévaluer les qualifications des plaignants, mais bien à examiner s’il y avait eu abus de pouvoir dans la façon dont le comité d’évaluation a examiné les demandes […]

 

[48] L’utilisation du terme « complaint » dans la version anglaise de la dernière phrase du paragraphe précédent constitue une erreur. Un comité d’évaluation n’examine pas une plainte; il examine une demande.

[49] Le plaignant soutient que même si sa lettre d’accompagnement et son curriculum vitae n’étaient pas suffisamment détaillés, il a démontré qu’il possédait les qualifications lors de la discussion informelle. L’intimé ne s’est toutefois pas conduit de manière appropriée à cette étape et a omis de donner suite aux renseignements que le plaignant avait fournis.

[50] Le processus des discussions informelles est énoncé à l’article 47 de la LEFP, qui prévoit que lorsqu’une personne est informée que sa candidature n’a pas été retenue pour une nomination, une discussion informelle peut être tenue à la demande de cette personne. Il ne s’agit pas d’une étape obligatoire dans le processus de plainte (voir Henry, aux paragraphes 61 et 62) ni, d’ailleurs, d’une étape de l’évaluation d’un candidat, car elle est tenue après l’achèvement de l’évaluation et que sa candidature n’a pas été retenue. Comme l’a conclu le TDFP au paragraphe 76 de Roska, la discussion informelle est un moyen de communication qui vise principalement à permettre à un candidat de discuter des raisons du rejet de sa candidature dans le cadre d’un processus. Si le gestionnaire estime qu’une erreur a été commise, il s’agit d’une occasion de la corriger. Toutefois, la discussion informelle ne constitue pas une occasion pour un candidat de demander ou d’insister pour être réévalué. Dans la présente affaire, l’intimé n’a pas jugé qu’une réévaluation était justifiée.

[51] Le plaignant soutient que même si l’article 47 de la LEFP n’obligeait pas l’intimé à le réévaluer, la Directive sur l’administration des priorités et le Guide sur les droits de priorité de la CFP l’obligeaient à le faire. En fait, il soutient que l’intimé ne s’est pas conformé à plusieurs des exigences énoncées dans ces documents.

[52] Toutefois, comme la CFP l’a fait remarquer dans ses arguments, l’administration des droits de priorité est une question qui outrepasse la compétence de la Commission. Dans Magee, au paragraphe 20, le TDFP a reconnu que la CFP est responsable de l’administration et de la surveillance des affaires concernant les droits de priorité. Les personnes bénéficiaires d’un droit de priorité qui ont des questions ou des préoccupations quant à leur droit de priorité peuvent les soulever auprès de la Division des droits de priorité de la CFP, et non de la Commission.

[53] Même s’il est malheureux que la discussion informelle ne se soit pas déroulée d’une manière satisfaisante pour le plaignant, cela ne me donne aucun fondement pour conclure qu’un abus de pouvoir a eu lieu dans le cadre de l’évaluation du plaignant.

[54] Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

(L’ordonnance apparaît à la page suivante)


V. Ordonnance

[55] La plainte est rejetée.

Le 1er juin 2022.

Traduction de la CRTESPF

James R. Knopp,

une formation de la Commission des relations de

travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

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