Décisions de la CRTESPF
Informations sur la décision
L’employeur a allégué que le grief en litige a été déposé en dehors du délai de 25 jours prévu par la convention collective applicable – il a également allégué que la Commission n’avait pas compétence puisque le fonctionnaire s’estimant lésé a déposé le grief alors qu’il n’était plus un employé – la Commission a rejeté l’objection relative au respect des délais – selon le paragraphe 95(2) du Règlement sur les relations de travail dans le secteur public fédéral (DORS/2005-79), une objection relative au respect des délais ne peut être soulevée auprès de la Commission que si le grief a été rejeté au motif qu’il était hors délai au premier palier de la procédure de règlement des griefs pour lequel le délai n’a pas été respecté, et à tout palier subséquent de la procédure applicable au grief – il n’y avait aucune mention du non respect des délais prévus pour déposer le grief au premier et au troisième paliers de la procédure de règlement des griefs, seulement au dernier palier – par conséquent, une objection fondée sur le respect des délais ne pouvait pas être soulevée auprès de la Commission – la Commission a également rejeté l’objection relative à la compétence – l’argumentation de l’employeur était fondée sur le fait que le fonctionnaire s’estimant lésé a pris sa retraite, puis a déposé son grief – même s’il est un ancien employé, le grief se rattachait à des faits qui sont survenus pendant que le fonctionnaire s’estimant lésé était encore un employé, notamment une allégation selon laquelle les actes de l’employeur l’ont amené à prendre sa retraite avant la date prévue.
Objections de l’employeur rejetées.
Contenu de la décision
Date : 20220831
Référence : 2022 CRTESPF 75
Loi sur la Commission des
relations de travail et de l’emploi
dans le secteur public fédéral et
Loi sur les relations de travail
dans le secteur public fédéral
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Commission des relations
de travail et de l’emploi dans le
secteur public fédéral
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enTRE
Kalim Kokozaki
fonctionnaire s’estimant lésé
et
AgencE DU REVENU DU Canada
employeur
Répertorié
Kokozaki c. Agence du revenu du Canada
Affaire concernant un grief individuel renvoyé à l’arbitrage
Devant : Edith Bramwell, une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral
Pour le fonctionnaire s’estimant lésé : Dejan Toncic, Institut professionnel de la fonction publique du Canada
Pour l’employeur : Nicholas Gualtieri
Décision rendue sur la base d’arguments écrits
déposés le 23 juin et les 7 et 25 juillet 2022.
(Traduction de la CRTESPF)
MOTIFS DE DÉCISION
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(TRADUCTION DE LA CRTESPF)
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I.
Objections au grief renvoyé à l’arbitrage
[1] Kalim Kokozaki, le fonctionnaire s’estimant lésé (le « fonctionnaire »), a renvoyé à la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (la « Commission ») un grief individuel portant sur l’interprétation ou l’application de la convention collective conclue entre l’Agence du revenu du Canada (ARC ou l’« employeur ») et l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada (l’« agent négociateur ») (date d’expiration : le 21 décembre 2022; la « convention collective »). Le 23 juin 2022, l’employeur a présenté deux objections concernant le renvoi à l’arbitrage. Il allègue que l’affaire a été déposée en dehors du délai prescrit de 25 jours pour déposer un grief en vertu de la convention collective. L’employeur allègue aussi que la Commission n’a pas compétence, puisque le fonctionnaire a déposé l’affaire alors qu’il n’était plus un employé de l’ARC. Le 7 juillet 2022, l’agent négociateur a présenté sa réponse aux objections de l’employeur et a demandé qu’elles soient rejetées. Le 25 juillet 2022, l’employeur a répliqué, en confirmant ses objections.
II.
Analyse
A.
L’objection relative au respect des délais
[2] Selon le paragraphe 95(2) du Règlement sur les relations de travail dans le secteur public fédéral (DORS/2005-79), une objection relative au délai ne peut être soulevée auprès de la Commission que si le grief a été rejeté au motif qu’il était hors délai au premier palier de la procédure de règlement des griefs pour lequel le délai n’a pas été respecté, et à tout palier subséquent de la procédure applicable au grief. L’agent négociateur a déclaré qu’il n’y avait aucune mention du non‑respect des délais prévus pour déposer le grief au premier et au troisième paliers de la procédure de règlement des griefs, mais seulement du non‑respect au dernier palier de la procédure de règlement des griefs, ce qui n’est pas contesté. Par conséquent, une objection fondée sur le respect des délais ne pouvait pas être soulevée auprès de la Commission.
[3] La Commission rejette l’objection relative au respect des délais soulevée par l’employeur.
B.
L’objection relative à la compétence
[4] L’autre objection soulevée par l’employeur, au sujet de la compétence de la Commission, concerne le statut d’ancien employé du fonctionnaire et l’application du paragraphe 206(2) de la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral (L.C. 2003, ch. 22, art. 2; la « LRTSPF »), qui énonce ce qui suit :
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[Le passage en évidence l’est dans l’original]
[5] La Cour d’appel fédérale a statué, en interprétant une disposition similaire de l’ancienne Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (L.R.C. (1985), ch. P‑35) dans La Reine c. Lavoie, [1978] 1 CF 778 (C.A.), qu’il faut un libellé très clair pour priver une personne de son droit de présenter un grief, y compris pour priver un ancien fonctionnaire du droit de contester des affaires qui se sont produites à l’époque où il était un employé (voir Lavoie, à la page 783). Dans Glowinski c. Conseil du Trésor (ministère de l’Industrie), 2007 CRTFP 91, et Kidd c. Conseil national de recherches du Canada, 2010 CRTFP 73, les arbitres de grief ont appliqué Lavoie et ont conclu que le même raisonnement s’appliquait au paragraphe 206(2) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, comme se nommait la LRTSPF à l’époque, dont le libellé était le même qu’aujourd’hui.
[6] Plus récemment, dans Canada (Procureur général) c. Santawirya, 2019 CAF 248, au paragraphe 20, la Cour d’appel fédérale a confirmé ce qui suit « […] si les faits sont survenus pendant que la personne s’estimant lésée était fonctionnaire, la Commission est compétente, que la personne le fût toujours ou non lorsqu’elle a déposé un grief. » La question de compétence qui se pose dans le cas d’un ancien employé est celle de savoir si les faits à l’origine de l’affaire contestée sont survenus pendant que la personne était encore un employé (voir Kidd, aux par. 30 à 33; Santawirya, aux par. 11 et 19 à 21).
[7] L’argumentation de l’employeur dans la présente affaire est fondée sur le fait que le fonctionnaire a pris sa retraite le 19 janvier 2021 et qu’il a déposé son grief ultérieurement. Même si le fonctionnaire est un ancien employé de l’ARC, l’employeur ne conteste pas que le présent grief se rattache à des faits qui sont survenus pendant que le fonctionnaire était encore un employé. Le grief et les décisions que les parties ont présentés indiquent, entre autres, que le grief porte sur les actes de l’employeur à l’époque où celui‑ci a lancé une enquête qui, selon les allégations du fonctionnaire, a obligé ce dernier à prendre sa retraite avant la date prévue de son départ à la retraite.
[8] Par conséquent, la Commission rejette l’objection de l’employeur à sa compétence d’instruire le grief.
[9] Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :
(L’ordonnance apparaît à la page suivante)
III.
Ordonnance
[10] Les objections de l’employeur sont rejetées.
Le 31 août 2022.
Traduction de la CRTESPF
Edith Bramwell,
une formation de la Commission des
relations de travail et de l’emploi
dans le secteur public fédéral