Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le plaignant a présenté quatre allégations d’abus de pouvoir de la part de l’intimé dans le cadre d’un processus de nomination interne annoncé – 1) le plaignant a allégué qu’une évaluation du rendement utilisée à titre d’outil de sélection pour l’évaluer était inexacte – la Commission a conclu que le processus de l’Entente de rendement de la fonction publique (ERFP) ne faisait pas partie du processus de nomination et que tout échec dans le cadre du processus de l’ERFP ne pouvait pas constituer un abus de pouvoir dans le cadre du processus de nomination – de plus, l’offre d’emploi n’exigeait pas que les candidats ne se fondent que sur des exemples tirés de leur ERFP pour démontrer les compétences de base et fonctionnelles, qui faisaient partie des qualifications essentielles – 2) le plaignant a soutenu que le directeur qui a évalué sa demande avait fait preuve de partialité envers lui – le parti pris allégué reposait sur trois interactions principales : un refus de le rencontrer, une demande de mesure d’adaptation et la participation au processus de règlement des griefs lié à l’ERFP – la Commission a conclu qu’il n’y avait aucune preuve que le directeur avait traité le plaignant différemment des autres employés d’un niveau semblable – la nature de la demande de mesure d’adaptation n’était pas pertinente au bien-fondé de la plainte – la Commission a également conclu que le fait d’accueillir un grief n’était pas une indication de partialité de la part du directeur, surtout qu’en le faisant, il a permis au plaignant d’être pris en considération dans le processus de nomination – la Commission a conclu qu’une personne raisonnable ne considérerait pas l’évaluation des compétences par le directeur comme de la partialité – 3) le plaignant a allégué que le directeur avait consulté les chefs de section plutôt que le superviseur immédiat – il ressortait clairement de l’offre d’emploi que le directeur n’était pas tenu de consulter le superviseur d’un candidat – il n’y avait rien d’inapproprié à consulter les chefs de section, lesquels auraient eu une certaine connaissance du travail des candidats – 4) le plaignant a allégué que l’évaluation des compétences était inexacte et qu’il y avait des incohérences entre les évaluations du directeur et une réévaluation effectuée au cours de la période de discussion informelle – il n’a pas réussi à démontrer au directeur qu’il possédait toutes les compétences – il a soutenu que les instructions relatives aux six compétences étaient ambiguës et qu’il n’y avait aucune exigence de les évaluer au niveau MA-04 – les instructions précisaient clairement que les compétences devaient être décrites, étant donné que les candidats postulaient pour un poste de niveau MA-04 – le plaignant a soutenu qu’il n’y avait pas de corrigé clair pour aider le directeur à évaluer le niveau approprié des exemples des six compétences – l’évaluation des six compétences exigeait que le directeur exerce son jugement; il n’y avait aucune preuve d’une évaluation manifestement incorrecte – le plaignant a fait valoir qu’il n’y avait aucune preuve que l’analyse de la cohérence de son rendement ait été faite parallèlement à celle des autres candidats, puisque sa candidature a été évaluée plus tard dans le processus – aucune preuve n’a été présentée à la Commission sur les analyses de cohérence des autres candidats ni aucune preuve selon laquelle les personnes nommées ne satisfaisaient pas aux qualifications essentielles – le plaignant ne s’est pas acquitté de son fardeau de démontrer un abus de pouvoir dans le processus de nomination – en ce qui concerne les questions de procédure, il a tenté d’introduire des allégations nouvelles et modifiées – la Commission a rejeté sa demande de dépôt de nouvelles allégations, car aucun renseignement nouveau ne justifierait de les accepter, et il n’était pas équitable de modifier les allégations si tard dans la procédure – au cours de l’audience, le plaignant a cherché à présenter des éléments de preuve relatifs à un processus de nomination subséquent pour le groupe et niveau MA-04 – la Commission ne les a pas autorisés, puisque la plainte portait uniquement sur le processus de nomination devant la Commission – à la suite de l’audience, le plaignant a demandé que cette décision soit réexaminée – aucun autre témoignage au cours de l’audience n’aurait justifié un réexamen de la décision sur la recevabilité – après la conclusion de l’audience, le plaignant a tenté de présenter des éléments de preuve supplémentaires, ce à quoi l’intimé s’est opposé – la Commission a appliqué le critère énoncé dans Whyte c. Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada, 2010 TCDP 6 (confirmé dans Murray c. Canada (Procureur général), 2013 CF 49).

Plainte rejetée.

Contenu de la décision

Date : 20220912

Dossier : EMP-2018-11675

 

Référence : 2022 CRTESPF 77

Loi sur la Commission des

relations de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral

et Loi sur l’emploi

dans la fonction publique

Coat of Arms

Devant une formation de la

Commission des relations

de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral

ENTRE

 

Mario Ghafari

plaignant

 

et

 

ADMINISTRATEUR GÉNÉRAL

(Statistique Canada)

 

intimé

et

AUTRES PARTIES

Répertorié

Ghafari c. Administrateur général (Statistique Canada)

Affaire concernant une plainte d’abus de pouvoir déposée aux termes de l’alinéa 77(1)a) de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique

 

Devant : Ian R. Mackenzie, une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

Pour le plaignant : Lui-même

Pour l’intimé : Liliia Vorontsova, stagiaire en droit

Pour la Commission de la fonction publique : Alain Jutras, analyste principal

Affaire entendue à Ottawa (Ontario),

les 16 et 17 février et les 4 et 8 mars 2022.
(Arguments écrits déposés après l’audience les 10, 11, 15 et 28 mars 2022.)

(Traduction de la CRTESPF)


MOTIFS DE DÉCISION

(TRADUCTION DE LA CRTESPF)

I. Demande devant la Commission

[1] Le plaignant, Mario Ghafari, a déposé une plainte en vertu de l’alinéa 77(1)a) de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique (L.C. 2003, ch. 22, art. 12 et 13; la « LEFP ») dans laquelle il a allégué que l’intimé, soit le statisticien en chef du Canada, avait abusé de son pouvoir dans le cadre d’un processus de nomination interne annoncé pour des postes de méthodologistes principaux à Statistique Canada en 2017.

[2] Le plaignant a fait valoir que le directeur chargé du processus de nomination avait fait preuve de partialité à son égard. Il a également allégué qu’une évaluation du rendement utilisée pour l’évaluer était incorrecte, ce qui l’a pénalisé dans le processus de nomination. Il a allégué que le directeur n’avait pas consulté ses superviseurs. Il a également allégué que l’évaluation était incorrecte. L’intimé a nié avoir abusé de son pouvoir dans le cadre du processus de nomination.

[3] La Commission de la fonction publique (CFP) n’a pas assisté à l’audience, mais elle a présenté des arguments écrits sur les politiques et les lignes directrices qui se rapportaient au processus de nomination contesté. Elle ne s’est pas prononcée sur le bien-fondé de la plainte.

[4] Pour les motifs qui suivent, la plainte est rejetée. Le plaignant n’a pas démontré, selon la prépondérance des probabilités, que l’intimé avait abusé de son pouvoir dans le cadre du processus de nomination.

A. Questions de procédure

[5] Le plaignant a fourni une liste de huit témoins auxquels s’ajoutent des témoins anonymes qu’il avait l’intention de faire témoigner. L’administrateur général s’est opposé à la comparution de certains de ces témoins, et j’ai rendu une décision avant l’audience au sujet des témoins que le plaignant pouvait faire témoigner.

[6] Une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (la « Commission ») est habilitée à décider des personnes qui peuvent venir témoigner devant elle. La pertinence du témoignage est le facteur primordial pour déterminer s’il est nécessaire de faire témoigner un témoin. De plus, la formation a le pouvoir de limiter les témoignages répétitifs qui ne l’aideront pas dans sa décision relative à une plainte.

[7] Je n’ai pas autorisé le plaignant à faire témoigner les conseillers en ressources humaines de l’intimé. La plainte porte sur des allégations d’abus de pouvoir de la part du décideur. Le plaignant n’a pas établi que la preuve de conseils qui auraient pu ou non être fournis était pertinente pour rendre une décision sur la question de l’abus de pouvoir.

[8] J’ai limité le nombre de membres du comité de sélection que le plaignant pouvait faire témoigner. J’ai déterminé que le témoignage d’un seul témoin était suffisant pour rendre compte du rôle du comité de sélection. J’ai reporté la décision sur la pertinence de ce témoignage et j’ai demandé aux parties de présenter des arguments sur la pertinence du témoignage lors de l’audience.

[9] J’ai également permis au plaignant de faire témoigner un témoin, soit Wesley Yung, au sujet de processus de nomination similaires. J’ai également reporté la décision sur la pertinence de ce témoignage, puisque, à première vue, il dépassait la portée du processus de nomination qui fait l’objet de la présente plainte.

[10] Au début de l’audience, le plaignant a cherché à introduire des allégations nouvelles et modifiées. L’intimé s’y est opposé. J’ai rejeté la demande du plaignant de déposer de nouvelles allégations, car aucun élément nouveau ne justifiait d’admettre de nouvelles allégations. J’ai également déterminé qu’il n’était pas dans l’intérêt de l’équité de modifier les allégations si tard dans la procédure. Dans la mesure où les allégations modifiées proposées apportaient des précisions sur des allégations existantes, j’ai dit au plaignant qu’il pouvait reformuler ses allégations existantes dans son argumentation.

[11] Au cours de l’audience, le plaignant a voulu présenter des preuves relatives à un processus de nomination ultérieur pour un poste de groupe et de niveau MA-04. Je n’ai pas admis cette preuve, car la plainte porte uniquement sur le processus de nomination de 2017. Après la fin de l’audience, le plaignant a demandé que cette décision soit réexaminée. Les décisions sur l’admissibilité des preuves au cours d’une audience sont définitives. Le réexamen de telles décisions au cours d’une procédure n’est indiqué que si de nouveaux éléments de preuve justifient un tel réexamen. Dans le présent cas, il n’y a pas eu de témoignage supplémentaire au cours de l’audience qui justifierait le réexamen de cette décision sur l’admissibilité de ces éléments de preuve.

[12] Après la fin de l’audience, le plaignant a voulu soumettre des éléments de preuve supplémentaires : la description du poste de groupe et de niveau MA-04, ainsi qu’un document fournissant une échelle d’évaluation des compétences. L’intimé s’est opposé à la soumission de cette preuve.

[13] Les deux parties se sont appuyées sur le critère en trois parties permettant de déterminer si un témoignage postérieur à l’audience peut être admis. Ce critère est énoncé dans Whyte c. Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada, 2010 TCDP 6 (confirmé dans Murray c. Canada (Procureur général), 2013 CF 49), comme suit :

1) Aurait-il été possible, en faisant preuve de diligence raisonnable, d’obtenir la preuve [...] avant l’audience?

2) L’élément de preuve « influerait-il substantiellement sur l’issue de l’affaire [...] »?

3) La preuve « paraît-elle crédible »?

 

 

[14] J’ai rejeté la demande visant à admettre de nouveaux éléments de preuve. J’ai statué que les deux documents que le plaignant a cherché à présenter pouvaient être facilement obtenus avant l’audience. En outre, le témoignage qui a motivé sa demande d’admission de documents supplémentaires a été entendu le 4 mars 2022, et une journée d’audience supplémentaire pour les arguments oraux a été tenue le 8 mars 2022. Le plaignant n’a formulé sa demande que deux jours plus tard, soit le 10 mars 2022.

B. Les allégations

[15] Le plaignant a formulé les quatre allégations suivantes dans sa plainte :

• Une évaluation du rendement utilisée comme outil de sélection était incorrecte, ce qui l’a pénalisé.

• Le directeur qui a évalué sa demande a fait preuve de partialité et n’a donc pas été en mesure de fournir une évaluation juste.

• Le directeur a consulté les chefs de section plutôt que le superviseur immédiat, comme le précisait l’affiche du processus de sélection.

• L’évaluation des compétences de base et fonctionnelles, qui font partie des qualifications essentielles, était incorrecte, et il existait des incohérences entre les évaluations du directeur et une réévaluation effectuée pendant la période de discussion informelle.

 

II. Résumé de la preuve

[16] Le plaignant était candidat à un processus de nomination interne annoncé pour un poste de groupe et de niveau MA-04 lancé en mai 2017 pour pourvoir des postes de méthodologistes principaux à Statistique Canada. Il travaillait en tant que méthodologiste au sein de la Division des méthodes d’enquêtes sociales à Statistique Canada depuis 2008.

[17] Les outils d’évaluation choisis pour le processus de nomination ont été les suivants :

• Les résultats de fin d’exercice de l’entente de rendement de la fonction publique (ERFP) pour les exercices 2015-2016 et 2016-2017;

• l’établissement d’un [traduction] « bilan des réalisations »;

• un examen écrit.

 

[18] En ce qui concerne les résultats de l’ERFP, seules les personnes ayant obtenu la mention [traduction] « réussite » ou une mention de niveau supérieur pour les compétences de base et les objectifs de travail devaient être prises en compte dans le processus de nomination.

[19] L’affiche d’emploi contenait la question et la réponse suivantes concernant le recours aux ERFP :

[Traduction]

[...]

[...] Les ententes de rendement peuvent-elles être utilisées comme outil d’évaluation dans un processus de sélection?

Oui. Les gestionnaires chargés de l’embauche ont toujours été en mesure d’utiliser les ententes de rendement à des fins de dotation. Il appartient à chaque ministère de choisir et d’appliquer des outils d’évaluation pertinents et valides.

[...]

 

[20] Au moment du processus de nomination, la cote [traduction] « réussite (moins) » avait été attribuée aux résultats du plaignant dans le cadre de l’ERFP de l’exercice 2016-2017; il a donc été écarté du processus de nomination. Il a déposé un grief dans lequel il contestait cette ERFP. Elle a alors été modifiée et le plaignant s’est vu attribuer la mention [traduction] « réussite ». Le plaignant a ensuite été présélectionné, et son bilan des réalisations a été validé par le directeur (David Dolson) en octobre 2017. Les bilans des réalisations des autres candidats ont été évalués en juin et juillet 2017.

[21] L’ERFP a été utilisée à titre d’outil de présélection et n’a pas été transmise aux directeurs qui ont validé les bilans des réalisations. Steve Matthews était le responsable du comité de sélection. Il a témoigné que le comité a examiné l’ERFP de chaque candidat uniquement pour déterminer si chacun d’entre eux avait obtenu la mention [traduction] « réussite » ou une cote de niveau supérieur. M. Dolson a témoigné qu’il n’avait pas examiné l’ERFP du plaignant lorsqu’il a procédé à la validation des bilans des réalisations.

[22] L’affiche d’emploi mentionnait les qualifications essentielles suivantes : études, expérience et compétences. Le plaignant a satisfait à la qualification relative aux études. Il a également satisfait aux qualifications suivantes en matière d’expérience :

[Traduction]

[...]

EXP1 : Expérience récente* et responsabilité concernant divers aspects de la méthodologie des enquêtes ou de la recherche dans des domaines connexes.

[...]

EXP2 : Expérience en matière de présentation orale et écrite de questions méthodologiques devant des pairs ou des groupes de clients ou lors de conférences.

[...]

 

[23] Les candidats devaient satisfaire aux six [traduction] « compétences de base » et [traduction] « compétences fonctionnelles » requises, à savoir :

[Traduction]

[...]

COMPÉTENCES DE BASE

C1 – Faire preuve d’intégrité et de respect

C2 – Faire preuve de réflexion approfondie

C3 – Travailler efficacement avec les autres

C4 – Faire preuve d’initiative et être orienté vers l’action

 

COMPÉTENCES FONCTIONNELLES

C5 – Concevoir un plan et une organisation en vue d’obtenir des résultats (niveau 2)

C6 – Réfléchir de manière innovante (niveau 2)

[...]

 

[24] Le bilan des réalisations était présenté en ces termes dans l’offre d’emploi :

[Traduction]

[...]

Le bilan des réalisations est un instrument d’évaluation qui vous demande de rendre compte de vos réalisations professionnelles sur la base de comportements observables au travail. L’instrument consiste en un modèle structuré qui vous permet de consigner des descriptions de situations dans lesquelles vous avez démontré des comportements associés à chaque qualification.

[...]

 

[25] Les candidats devaient [traduction] « démontrer clairement » comment ils répondaient à chacune des qualifications essentielles énumérées ci-dessous, y compris les compétences de base et fonctionnelles. Les candidats devaient fournir, pour chaque qualification, [traduction] « [...] un ou plusieurs exemples tirés de [leur] propre expérience qui, selon [eux], démontrent [leur] maîtrise de la qualification évaluée. » Les candidats étaient tenus de fournir suffisamment de précisions dans le bilan des réalisations pour démontrer, à la fois :

[Traduction]

[...]

1) qu’ils possèdent la qualification essentielle (par exemple, qu’ils possèdent l’expérience ou la compétence);

2) que la qualité de leur travail démontre une maîtrise suffisante de cette qualification essentielle, qui indique qu’ils sont prêts à occuper le poste à pourvoir.

[...]

 

[26] Les candidats disposaient d’au maximum 500 mots pour répondre aux quatre premières compétences et d’au maximum 750 mots pour les compétences fonctionnelles. L’affiche du poste fournissait les suggestions suivantes sur la façon de préparer le bilan des réalisations :

[Traduction]

[...]

• Assurez-vous que votre réponse porte sur la qualification évaluée.

• Fournissez des exemples concrets et précis de comportements qui illustrent la qualification requise.

• Choisissez des exemples dont la complexité, la portée et le degré de difficulté sont suffisants pour vous permettre d’illustrer la mesure dans laquelle vous avez démontré la qualification.

• Concentrez-vous sur ce que vous avez fait et indiquez clairement quel était votre rôle [...]

• Décrivez l’exemple au passé. Cela vous permettra de fournir des exemples concrets, plutôt que de faire des affirmations générales.

[...]

 

[27] En ce qui concerne les compétences de base et les compétences fonctionnelles, le bilan des réalisations commençait par la même expression : [traduction] « Compte tenu du fait que vous postulez un poste de groupe et de niveau MA-04, veuillez fournir au moins un exemple de votre comportement professionnel type qui démontre la compétence de [la compétence requise] [...] ».

[28] Un document de [traduction] « validation du bilan des réalisations » avait été préparé pour faciliter l’évaluation des candidats. Pour chaque qualification, y compris les compétences de base et les compétences fonctionnelles, une cote était attribuée :

[Traduction]

 

• « MA-04 (de façon permanente et suffisante) » – si le candidat a démontré une maîtrise permanente et suffisante de la qualification, laissant penser qu’il est prêt pour le poste de MA-04;

• « Niveau supérieur au niveau MA-04 (à l’occasion) » - si le candidat a démontré une maîtrise permanente et suffisante de la qualification, laissant penser qu’il est prêt pour un poste de niveau MA-04 et a démontré qu’il est prêt à occuper un poste de niveau MA-05 ou d’un niveau supérieur à l’occasion;

• « Inférieur au niveau MA-04 ».

 

 

[29] Les qualifications essentielles devaient ensuite être évaluées en tenant compte du document relatif au bilan des réalisations ainsi que de l’évaluation du directeur du candidat. M. Dolson était le directeur du plaignant (le « directeur attitré »). L’affiche d’emploi indiquait ce qui suit :

[Traduction]

[...]

Votre directeur attitré devra valider l’exactitude des informations fournies et confirmer que vous êtes prêt pour le poste à pourvoir.

Le directeur peut contacter votre superviseur ou vos clients pour obtenir les informations nécessaires à la validation de vos exemples.

[...]

 

[30] L’affiche d’emploi contenait la question et la réponse suivantes :

[Traduction]

[...]

[...] Mon directeur/ma directrice ignore tout de mon travail quotidien. Comment peut-il/elle valider mon exemple?

Le directeur/la directrice peut contacter votre superviseur immédiat ou vos clients pour obtenir les informations nécessaires à la validation de votre exemple. Toutefois, c’est votre directeur/directrice qui est responsable en dernier ressort de la validation de votre bilan des réalisations.

[...]

 

[31] M. Dolson a consulté séparément Patrice Mathieu et Edward Chen pour procéder à l’évaluation du plaignant. M. Mathieu et M. Chen étaient les chefs des sections où le plaignant avait travaillé ou travaillait. Son superviseur immédiat relevait du chef de section. M. Mathieu avait été le superviseur immédiat du plaignant au cours de différentes périodes où le superviseur principal du plaignant était en congé. Cependant, M. Dolson a témoigné qu’il avait consulté M. Mathieu en raison de sa connaissance du plaignant acquise dans le cadre de son rôle de chef de section.

[32] M. Dolson a témoigné n’avoir consulté que les chefs pour les sept candidats qu’il a évalués. Il a témoigné avoir pensé que les chefs devaient avoir une bonne idée des résultats obtenus par les candidats et une bonne connaissance de ce qui était attendu au niveau MA-04.

[33] M. Matthews a témoigné que les directeurs n’étaient pas tenus de consulter les superviseurs, mais qu’ils étaient libres de le faire.

[34] Au terme de l’évaluation du plaignant, M. Dolson a déterminé que le plaignant n’avait pas satisfait aux six compétences de base et fonctionnelles. Dans la section [traduction] « Remarques finales » de l’évaluation, M. Dolson a tiré les conclusions suivantes :

[Traduction]

Il s’agit d’un processus de sélection pour un poste de méthodologiste principal. Une trop grande partie des éléments de réponse fournis dans le cadre de cette candidature ne se rapporte pas au travail de méthodologie proprement dit, ce qui explique en grande partie pourquoi j’ai inscrit la mention « Inférieur au niveau MA4 ». Même lorsque des exemples de méthodologie sont fournis – à l’exception notable du travail pour la Division des communications – ils ne répondent pas à l’exigence « de façon permanente et suffisante » pour le niveau MA4.

 

[35] M. Matthews a témoigné que tous les directeurs se sont réunis pour un contrôle de l’uniformité des évaluations de tous les candidats. M. Dolson ne se souvenait pas d’avoir assisté à cette réunion, mais il pense y avoir assisté. L’évaluation du plaignant n’a pas été modifiée à la suite de l’examen de cohérence. Je n’ai entendu aucun témoignage sur les changements apportés aux évaluations d’autres candidats à la suite de ce contrôle de l’uniformité.

[36] M. Matthews a fourni une rétroaction au plaignant lors d’une discussion informelle en décembre 2017. Le plaignant a soulevé deux préoccupations principales lors de cette discussion : l’exigence d’exemples de compétences de base liés au travail méthodologique, et la subjectivité de l’évaluation.

[37] En vue de la discussion informelle, M. Matthews a demandé à Normand Laniel, un directeur adjoint qui avait une bonne connaissance du travail du plaignant, d’examiner le bilan des réalisations de ce dernier.

[38] M. Laniel a déterminé que le plaignant ne possédait pas les qualifications essentielles suivantes : [traduction] C1 – Faire preuve d’intégrité et de respect; C2 – Faire preuve de réflexion approfondie; C4 – Faire preuve d’initiative et être orienté vers l’action; C5 – Concevoir un plan et une organisation en vue d’obtenir des résultats. L’évaluation du plaignant n’a pas été modifiée après cet examen.

[39] La première compétence (C1) du bilan des réalisations était intitulée [traduction] « Faire preuve d’intégrité et de respect ». Le plaignant a fourni des exemples d’activités au travail, mais M. Dolson a fait le commentaire suivant sur le contenu du bilan des réalisations qui se rapportait à cette compétence : [traduction] « Les informations fournies sont exactes, mais rien n’est mentionné au sujet de l’élément “mener leurs activités professionnelles d’une manière qui reflète un engagement envers l’excellence du service à la clientèle”. Cette omission est importante. »

[40] Dans sa réponse à une ordonnance de communication, l’intimé a déclaré qu’un peu plus de 75 % des candidats retenus ont fait référence au service à la clientèle. M. Dolson a déclaré que, parmi les réponses qui lui ont été montrées à l’audience, tous les candidats qu’il a évalués ont fait référence d’une façon ou d’une autre au service à la clientèle.

[41] Dans son examen, M. Laniel a estimé que le plaignant ne satisfaisait pas à cette compétence. Il a relevé quelques inexactitudes dans la réponse. Il a mentionné que les conversations téléphoniques du plaignant dérangeaient ses voisins et qu’un superviseur s’inquiétait du fait que le plaignant ne [traduction] « travaillait pas toutes ses heures » de travail.

[42] La deuxième compétence (C2) était intitulée [traduction] « Faire preuve de réflexion approfondie ». Le plaignant a fourni des exemples liés à la correspondance des adresses, à la création d’un fichier principal à partir de plusieurs gros fichiers, à la réduction de la taille des gros fichiers et à la recommandation de mettre les programmes à l’essai en utilisant de fausses données.

[43] M. Dolson a formulé les commentaires suivants au sujet du bilan des réalisations :

[Traduction]

[...]

Quatre éléments sont fournis. Le premier, relatif à la correspondance d’adresses, fait référence à la réflexion approfondie sur les méthodes d’enquête, mais il s’agit d’une question plutôt banale – une analyse était nécessaire pour déterminer qu’un mauvais fichier était utilisé. Les deux éléments suivants font tous deux référence à des sujets liés aux technologies de l’information dont la résolution a été utile [...] mais il ne s’agit pas d’une réflexion approfondie sur la méthodologie ou les statistiques. Le quatrième point recommande d’effectuer des tests à l’aide de données synthétiques; une bonne idée, mais qui ne nécessite pas une réflexion approfondie.

[...]

 

[44] M. Laniel a fait remarquer que les exemples fournis étaient de niveau MA-02 et que le niveau de complexité et la capacité de réflexion requis étaient faibles.

[45] La troisième compétence (C3) était intitulée [traduction] « Travailler efficacement avec les autres ». Le plaignant a donné des exemples de partage d’informations avec ses collègues sur un programme informatique utilisé pour les statistiques. Il a également déclaré que, pendant les réunions, il écoutait toujours attentivement, posait des questions pour obtenir des éclaircissements et fournissait des recommandations et des idées lorsque cela était possible.

[46] M. Dolson a formulé les commentaires suivants au sujet du bilan des réalisations :

[Traduction]

[...]

Plusieurs des exemples fournis sont exacts et témoignent d’un bon travail avec les autres. Le candidat montre un grand attachement aux valeurs de l’équité et du respect, ce qui contribue à une bonne collaboration avec les autres mais, bien qu’il partage souvent l’information de manière proactive, il lui arrive aussi de refuser de le faire. De plus, les deux chefs de section m’ont confirmé que, trop souvent, l’employé ne prêtait pas suffisamment attention aux réunions et passait à côté d’informations importantes, et qu’il n’assurait pas un suivi adéquat pour obtenir ces informations. Cela nuisait à sa capacité de suivre ses collègues et de bien travailler avec eux.

[...]

 

[47] M. Laniel a jugé que le plaignant satisfaisait à cette compétence et n’a formulé aucun commentaire.

[48] La quatrième compétence (C4) était intitulée [traduction] « Faire preuve d’initiative et être orienté vers l’action ». Le plaignant a fourni une réponse que M. Dolson n’a pas considérée comme un exemple de méthodologie. M. Laniel a fait remarquer qu’un des exemples fournis n’était pas exact, qu’un autre exemple n’était pas précis et que les autres exemples n’étaient pas suffisants.

[49] La cinquième compétence (C5) était intitulée [traduction] « Concevoir un plan et une organisation en vue d’obtenir des résultats (niveau 2) ». Le plaignant a fourni des exemples dans sa réponse, notamment la conception et le formatage de feuilles de calcul et l’organisation de fichiers électroniques dans des dossiers. M. Dolson a fait remarquer que les exemples portaient sur l’organisation des résultats, et non sur l’organisation « en vue d’obtenir des résultats ». M. Laniel a déclaré qu’aucun des exemples n’avait de rapport avec la compétence.

[50] La sixième compétence (C6) était intitulée [traduction] « Réfléchir de manière innovante (niveau 2) ». L’affiche d’emploi contenait la définition suivante : [traduction] « [...] Implique de trouver, créer et mettre en œuvre des solutions nouvelles ou des solutions de rechange viables à des problèmes, des situations ou des processus de travail dans l’ensemble de l’organisation ». Le plaignant a fourni un exemple du travail qu’il a effectué avec l’équipe de communication lors du recensement de 2016, pour lequel lui et l’équipe ont reçu un prix de l’innovation de la part du statisticien en chef. Il a également fourni un exemple d’une idée concernant l’utilisation de la voix par protocole Internet.

[51] M. Dolson a déclaré qu’un certain esprit d’innovation avait été démontré dans le premier élément, mais que [traduction] « [...] il n’y avait aucune preuve d’esprit d’innovation de façon permanente et suffisante ». M. Dolson a témoigné qu’il ne considérait pas comme suffisant le fait de recevoir un prix d’innovation dans le cadre d’un projet d’équipe. Il a également remis en question le niveau de contribution du plaignant au projet. M. Dolson a déclaré que cette évaluation aurait pu aller dans un sens ou dans l’autre et qu’elle était [traduction] « limite ». M. Laniel a jugé que le plaignant avait satisfait à cette compétence et a déclaré : [traduction] « A obtenu un prix d’innovation! »

[52] La conclusion générale de M. Dolson (« Remarques finales ») au sujet du bilan des réalisations était la suivante :

[Traduction]

Il s’agit d’un processus de sélection pour un poste de méthodologiste principal. Une trop grande partie des éléments de réponse fournis dans le cadre de cette candidature ne se rapporte pas au travail de méthodologie proprement dit, ce qui explique en grande partie pourquoi j’ai inscrit la mention « Inférieur au niveau MA4 ». Même lorsque des exemples de méthodologie sont fournis – à l’exception notable du travail pour la Division des communications – ils ne répondent pas à l’exigence « de façon permanente et suffisante » pour le niveau MA4.

 

[53] M. Laniel n’a formulé aucune remarque finale.

[54] M. Laniel a témoigné qu’en validant le bilan des réalisations, il n’a pas consulté l’ERFP du plaignant. Il a également témoigné qu’il n’avait pas discuté du bilan des réalisations avec M. Dolson.

[55] Le plaignant a allégué que M. Dolson avait fait preuve de partialité dans son évaluation du bilan des réalisations. Le plaignant a fait état de trois incidents survenus avec M. Dolson.

[56] Le premier incident concerne une demande faite par le plaignant pour rencontrer M. Dolson en 2014. Le plaignant avait des préoccupations quant à l’attribution des tâches et à un certain favoritisme personnel. Il a demandé à rencontrer M. Dolson, le chef de section et son superviseur. M. Dolson a refusé de le rencontrer et a témoigné qu’il s’agissait d’un problème qui aurait d’abord dû être réglé par le superviseur ou le chef de section. Si le problème n’était pas résolu, la question aurait pu être abordée par le directeur adjoint. Ce n’est que si le problème ne pouvait être résolu à ce niveau qu’il serait intervenu, a témoigné M. Dolson.

[57] Le plaignant a témoigné avoir fait une demande de mesures d’adaptation en raison d’un handicap auprès de M. Dolson. J’ai déterminé que les précisions concernant la demande de mesures d’adaptation ne sont pas pertinentes dans le cadre des présentes allégations. M. Dolson a d’abord refusé de prendre des mesures d’adaptation pour le plaignant, qui a ensuite soulevé la question auprès du statisticien en chef. Par la suite, la demande a été acceptée. M. Dolson a témoigné qu’il était probable que la demande de mesures d’adaptation eût été acceptée sans l’intervention du statisticien en chef.

[58] Le plaignant a témoigné que M. Dolson était l’agent des griefs de premier palier pour son grief dans lequel il contestait l’ERFP de l’exercice 2016-2017. L’ERFP a été préparée par le superviseur du plaignant. Après l’audience sur le grief, M. Dolson a pris la décision de modifier la cote attribuée pour la cote [traduction] « réussite » (ce qui a permis au plaignant d’être présélectionné dans le cadre du processus de nomination). Le plaignant a témoigné que M. Dolson n’était pas intervenu lors de l’audience sur le grief et que, selon lui, les modifications apportées à l’ERFP l’avaient été uniquement à l’initiative des Ressources humaines. M. Dolson a témoigné qu’il était parvenu à cette décision après avoir entendu le représentant de l’agent négociateur et après avoir discuté avec le superviseur et un représentant des ressources humaines. Le plaignant a également témoigné qu’il avait demandé dans son grief à ne plus être supervisé par M. Dolson.

III. Motifs

[59] Pour les motifs exposés dans la présente partie, j’ai conclu que le plaignant n’a pas prouvé l’existence d’un abus de pouvoir dans le cadre du processus de nomination. Par conséquent, sa plainte est rejetée.

A. Introduction

[60] Le plaignant et l’intimé ont présenté des arguments oraux après la fin de la partie de l’audience consacrée à la preuve. La CFP a présenté des arguments écrits avant le début de l’audience.

[61] Le paragraphe 79(1) de la LEFP confère à la CFP le droit de se faire entendre. J’ai examiné les arguments de la CFP. À l’exception d’un énoncé général du droit en vertu de la LEFP, je n’ai pas considéré ces arguments suffisamment pertinents en ce qui concerne la plainte. Par conséquent, je ne les ai pas résumés dans la présente décision et je ne leur ai accordé aucun poids.

[62] Le plaignant et l’intimé ont présenté des arguments sur l’évaluation de chacune des compétences. Le rôle de la Commission n’est pas de réévaluer les candidats, mais de déterminer s’il y a eu un abus de pouvoir dans le cadre du processus de nomination; voir Vaudrin c. Sous-ministre de Ressources humaines et Développement des compétences Canada, 2011 TDFP 19, et Broughton c. Sous‑ministre de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, 2007 TDFP 20. Par conséquent, je n’ai résumé que les parties de leurs arguments qui ont trait à la prétendue partialité de M. Dolson ou qui visent à démontrer un abus de pouvoir dans le cadre de l’évaluation.

[63] L’alinéa 77(1)a) de la LEFP prévoit qu’un candidat non retenu dans la zone de sélection d’un processus de nomination interne peut présenter à la Commission une plainte selon laquelle il n’a pas été nommé ou fait l’objet d’une proposition de nomination en raison d’un abus de pouvoir dans l’application du principe du mérite.

[64] Le plaignant a le fardeau de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que l’intimé a abusé de son pouvoir (voir Tibbs c. Sous-ministre de la Défense nationale, 2006 TDFP 8, aux par. 49 et 55).

[65] Selon le paragraphe 30(1) de la LEFP, les nominations doivent être fondées sur le mérite et, selon l’alinéa 30(2)a), une nomination est fondée sur le mérite lorsque la personne à nommer possède les qualifications essentielles établies par l’administrateur général pour le travail à accomplir.

[66] L’« abus de pouvoir » n’est pas défini dans la LEFP; cependant, le paragraphe 2(4) fournit les indications suivantes : « Il est entendu que, pour l’application de la présente loi, on entend notamment par abus de pouvoir la mauvaise foi et le favoritisme personnel. » Le paragraphe 2(4) doit être interprété de façon générale, ce qui signifie que l’« abus de pouvoir » ne saurait se limiter à la mauvaise foi et au favoritisme personnel (voir Ross c. Commissaire du Service correctionnel du Canada, 2017 CRTEFP 48, au par. 14). Dans Canada (Procureur général) c. Lahlali, 2012 CF 601, aux paragraphes 21 et 38, la Cour fédérale a confirmé que la définition d’« abus de pouvoir » énoncée au paragraphe 2(4) n’est pas exhaustive et qu’elle peut comprendre d’autres formes de conduite inappropriée.

[67] Un abus de pouvoir peut consister en un acte, une omission ou une erreur que le législateur n’aurait pas pu envisager dans le cadre du pouvoir discrétionnaire accordé aux personnes détenant un pouvoir délégué en matière de dotation (voir, par exemple, Tibbs, aux par. 66 et 71, et Agnew c. Sous-ministre des Pêches et des Océans, 2018 CRTESPF 2, au par. 95). L’abus de pouvoir est une question de degré. Pour qu’une telle conclusion puisse être tirée, l’erreur ou l’omission doit être si énorme qu’elle ne peut pas faire partie du pouvoir discrétionnaire accordé au gestionnaire délégué.

[68] L’intimé a fait valoir qu’une allégation d’abus de pouvoir est une question très grave et ne doit pas être faite à la légère (voir Portree c. Administrateur général de Service Canada, 2006 TDFP 14). L’intimé a également fait valoir que les allégations du plaignant étaient frivoles et non fondées puisqu’aucune preuve documentaire ne les étayait. Malgré ma conclusion selon laquelle le plaignant ne s’est pas acquitté du lourd fardeau de prouver un abus de pouvoir, je ne partage pas l’avis de l’intimé selon lequel ses allégations étaient frivoles.

[69] Le plaignant a formulé quatre allégations dans sa plainte, que j’ai exposées dans la partie de la présente décision consacrée aux allégations. Pour faciliter l’analyse, j’aborderai ces quatre allégations sous les rubriques suivantes : 1) l’utilisation de l’ERFP (de l’exercice 2016-2017), 2) l’allégation de partialité (de M. Dolson), 3) le processus de consultation (sur lequel M. Dolson s’est appuyé pour évaluer le plaignant) et 4) l’évaluation des compétences.

1. L’utilisation de l’ERFP

[70] Le plaignant a formulé des allégations générales concernant l’utilisation de l’ERFP dans le processus de nomination et des allégations spécifiques liées à l’ERFP relative à l’exercice 2016-2017. Je vais d’abord aborder les allégations générales.

[71] Le plaignant a fait valoir que l’affiche d’emploi indiquait clairement que l’ERFP pouvait être utilisée pour évaluer les candidats et que son utilisation limitée en tant qu’outil de présélection n’a été explicitée qu’après la fin du processus de nomination. Il a également fait valoir que la seule source d’information concernant les compétences des candidats pour le dossier de candidature était l’ERFP et qu’il était donc normal pour un candidat d’utiliser le contenu de l’ERFP comme [traduction] « l’un des éléments » pour rédiger le bilan des réalisations. L’intimé a fait valoir qu’il était clair, d’après l’affiche d’emploi, que l’ERFP ne devait servir que d’outil de présélection, et que le témoignage de M. Dolson confirmait que l’ERFP n’était pas utilisé pour valider le bilan des réalisations. L’intimé a déclaré que, par conséquent, l’allégation du plaignant selon laquelle il a été pénalisé par les résultats de l’ERFP n’était pas fondée.

[72] Selon le témoignage de M. Matthews, l’ERFP ne servait pas à l’évaluation des candidats. Elle n’était utilisée que comme outil de présélection. M. Dolson a témoigné qu’il n’avait pas examiné l’ERFP des candidats lors de la validation des bilan des réalisations. La preuve a démontré que le contenu de l’ERFP n’a pas été pris en compte dans l’évaluation mais dans la sélection des personnes nommées. Cette démarche est conforme à l’article 36 de la LEFP, selon lequel l’intimé dispose d’un pouvoir discrétionnaire considérable pour évaluer et sélectionner les candidats.

[73] L’affiche d’emploi n’exigeait pas que les candidats puissent s’appuyer uniquement sur des exemples tirés de leur ERFP pour démontrer leurs compétences. J’estime que l’impression du plaignant selon laquelle il devait se limiter à ces exemples n’est pas étayée par l’affiche d’emploi. Par conséquent, cela ne peut pas non plus constituer un abus de pouvoir.

[74] Le plaignant a également allégué que la version initiale de l’ERFP pour l’exercice 2016-2017 (qui a été utilisée pour l’écarter du processus de nomination) l’a pénalisé. Une partie de son allégation porte sur le fait qu’il s’est appuyé sur cette ERFP pour rédiger son bilan des réalisations. J’ai déjà établi qu’il n’était pas exigé des candidats qu’ils se contentent du contenu de l’ERFP pour rédiger leur bilan des réalisations. Le plaignant a également fait valoir que le retard dans le réexamen de son ERFP pour l’exercice 2016-2017 a fait en sorte qu’il n’a été évalué que plus tard dans le processus et non en même temps que les autres candidats.

[75] Le processus de l’ERFP est indépendant du processus de nomination. Par conséquent, toute irrégularité dans le processus de l’ERFP (en l’occurrence, le fait d’avoir tardé à modifier la cote attribuée au plaignant pour lui attribuer la cote [traduction] « réussite ») ne peut constituer un abus de pouvoir dans le cadre du processus de nomination.

2. Allégation de partialité

[76] Le plaignant a fait valoir que M. Dolson avait fait preuve de partialité à son égard. Le fardeau de prouver la partialité incombe au plaignant (voir Denny c. Sous-ministre de la Défense nationale, 2009 TDFP 29).

[77] L’intimé a fait valoir que, contrairement aux circonstances dans Amirault c. Sous-ministre de la Défense nationale, 2012 TDFP 6, M. Dolson et le plaignant n’avaient pas de conflits graves en milieu de travail. L’intimé a fait valoir que, même si le plaignant avait des différends avec son superviseur et ses chefs de section, M. Dolson n’était pas directement impliqué dans ceux-ci. L’intimé a fait valoir que les différends évoqués par le plaignant au sujet de M. Dolson relevaient des rapports professionnels et du déroulement des activités habituelles au bureau. L’intimé a également fait remarquer que M. Dolson a déclaré dans son témoignage qu’il avait participé à une séance de formation sur le processus de validation et qu’il avait eu des discussions sur l’uniformité, ce qui a permis d’éliminer toute possibilité de partialité dans le processus de nomination.

[78] L’intimé a fait valoir que la décision de M. Dolson d’accueillir le grief du plaignant, dans lequel celui-ci contestait l’ERFP de l’exercice 2016-2017, constituait une preuve de l’absence de partialité; voir Smith c. Sous-ministre de la Défense nationale, 2018 CRTESPF 19, au paragraphe 42.

[79] Le critère permettant de déterminer s’il y a partialité est la perception raisonnable d’un « observateur relativement bien renseigné » (voir Denny, au par. 126). La partialité, ou la crainte de partialité, doit être réelle, probable ou raisonnablement évidente; il ne suffit pas de soupçonner ou de supposer qu’il y ait eu partialité (voir Bizimana c. Sous-ministre de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, 2014 TDFP 3, au par. 96).

[80] La partialité alléguée de M. Dolson repose sur trois éléments principaux : un refus de rencontrer le plaignant, une demande de mesures d’adaptation et la participation à la procédure de règlement des griefs concernant l’ERFP du plaignant. Les rapports avec les gestionnaires ne sont pas toujours positifs, et cela se produit dans tous les milieux de travail. Les gestionnaires ne se contentent pas de gérer les problèmes liés au milieu de travail; ils ont aussi un rôle à jouer dans les processus de nomination. La question de la partialité dans un processus de nomination ne se pose que lorsque la nature ou la teneur de l’interaction entre un plaignant et un évaluateur pourrait être perçue par un observateur raisonnable comme empreinte de partialité. La perception du plaignant n’est pas un facteur dont on tient compte dans cette appréciation.

[81] Dans Denny, le TDFP a conclu qu’il existait une crainte raisonnable de partialité en raison d’une animosité antérieure entre un membre du comité de sélection et le plaignant. Dans cette affaire, l’évaluation elle-même comportait de graves lacunes, et le fait que l’examen pratique a été administré par le membre du comité qui était prétendument partial renforçait l’impression d’une évaluation inéquitable, partiale et défaillante.

[82] Dans Amirault, le plaignant avait déposé une plainte contre l’un des membres du comité de sélection auprès de l’ancien Tribunal de la dotation de la fonction publique et avait eu par le passé de graves conflits avec les autres membres du comité d’évaluation.

[83] Le premier incident invoqué par le plaignant est le refus de M. Dolson d’organiser une rencontre avec un superviseur pour discuter de problèmes d’attribution des tâches. Deux niveaux de gestion séparaient M. Dolson et le plaignant : le chef de section et le directeur adjoint. Par conséquent, M. Dolson avait le pouvoir de faire régler le problème à un niveau de gestion inférieur. Aucune preuve ne démontre que M. Dolson a traité le plaignant différemment des autres employés de même niveau.

[84] Le deuxième incident concerne une demande de mesures d’adaptation en matière de droits de la personne faite par le plaignant et la réponse initiale de M. Dolson à cette demande. J’ai déterminé que la nature de cette demande n’est pas pertinente concernant le bien-fondé de la présente plainte. Dans un premier temps, M. Dolson l’a refusée. Après que le plaignant l’a soulevée auprès du statisticien en chef, elle a été acceptée.

[85] Bien que M. Dolson ait témoigné que les mesures d’adaptation auraient fini par être autorisées, même sans l’intervention du statisticien en chef, je suis d’accord avec le plaignant pour dire qu’elles n’ont été accordées qu’après cette intervention. Cependant, la question des mesures d’adaptation a finalement été résolue à la satisfaction du plaignant et ne constituait pas une source de conflit direct entre lui et M. Dolson. La question des mesures d’adaptation portait sur une pratique de bureau que M. Dolson n’avait pas instaurée. Les mesures qu’il a prises pour répondre à la demande de mesures d’adaptation relevaient de ses fonctions normales de gestion. Je conclus qu’une personne raisonnable ne considérerait pas que M. Dolson a fait preuve de partialité envers le plaignant parce qu’il a soulevé cette question.

[86] Le troisième incident concernait le grief du plaignant dans lequel celui-ci contestait l’ERFP de l’exercice 2016-2017. L’ERFP initiale a été rédigée par le superviseur du plaignant. M. Dolson était l’agent des griefs de premier palier et a entendu le grief. Après l’audience, et en consultation avec un agent ministériel des relations de travail, il a accueilli le grief en partie en modifiant la cote et en supprimant une partie du texte.

[87] Dans Smith, la Commission a fait remarquer qu’un des éléments permettant de conclure à l’absence de partialité était le fait que la personne présumée partiale avait réintégré le plaignant dans le processus de nomination. Il s’agit d’une situation similaire. N’eût été la décision de M. Dolson de modifier la cote attribuée au plaignant dans l’ERFP, le plaignant aurait été écarté du processus de nomination, sans avoir la possibilité d’être évalué sur la base de son bilan des réalisations.

[88] Une personne raisonnable ne considérerait pas le fait d’accueillir un grief comme une indication de partialité de la part de M. Dolson, surtout si cela a permis au plaignant d’être pris en considération dans le processus de nomination.

[89] Le plaignant a également souligné que M. Dolson avait dans un premier temps approuvé l’ERFP que le superviseur avait rédigée. Il a laissé entendre que M. Dolson aurait pu soulever des préoccupations au sujet de l’ERFP lorsqu’il l’a examinée pour la première fois. M. Dolson a accueilli le grief après avoir entendu le représentant du plaignant à l’audience sur le grief. Lorsqu’il a examiné l’ERFP pour la première fois, il n’a disposé d’aucune autre argumentation que celle fournie par le superviseur. J’estime que cela ne démontre pas de partialité de la part de M. Dolson.

[90] Le plaignant a également fait mention d’autres éléments révélant la partialité présumée de M. Dolson au cours du processus de nomination.

[91] Le plaignant a déclaré que M. Dolson l’avait fait échouer dans le cadre de la compétence [traduction] « Faire preuve d’intégrité et de respect » pour avoir omis de mentionner l’excellence du service à la clientèle alors que des preuves indiquaient que d’autres candidats ne l’avaient pas mentionnée non plus. M. Dolson a reconnu dans son témoignage que son évaluation de cette compétence avait été [traduction] « délicate ». Il a contesté le fait que les autres candidats qu’il avait évalués n’ont pas évoqué l’excellence du service à la clientèle.

[92] J’aborde l’évaluation des compétences plus loin dans la présente décision. Toutefois, une personne raisonnable ne considérerait pas l’évaluation de cette compétence par M. Dolson comme étant empreinte de partialité. Un désaccord sur la façon d’évaluer une compétence n’est pas un élément révélateur de partialité. Je conclus également que le plaignant n’a pas établi que d’autres candidats évalués par M. Dolson n’ont pas mentionné dans leurs réponses des exemples qui, selon M. Dolson, faisaient référence au service à la clientèle.

[93] Le plaignant a fait valoir que le fait que M. Dolson n’a pas jugé que le plaignant avait démontré son esprit d’innovation alors qu’il a reçu un prix pour l’innovation de la part du statisticien en chef constituait un autre exemple de partialité. Il a également déclaré que le témoignage de M. Dolson, qui mettait en doute le rôle du plaignant dans le projet qui a mené à l’attribution du prix, démontrait un parti pris. M. Dolson a reconnu établir un seuil élevé en matière de démonstration de l’esprit d’innovation et a même suggéré que la réponse du plaignant [traduction] « était à la limite ». J’estime qu’un désaccord sur la définition appropriée du terme « innovation » ne constitue pas une preuve de partialité. Une personne raisonnable considérerait qu’il y a eu désaccord sur le niveau requis d’innovation, mais que cela ne signifie pas que M. Dolson a fait preuve de partialité.

[94] Le plaignant a fait remarquer que M. Dolson lui avait attribué une mention d’échec pour six compétences et que M. Laniel lui avait attribué une mention d’échec pour quatre compétences. Il a fait valoir que l’écart de 33 % entre les évaluateurs était [traduction] « énorme » et démontrait la partialité de M. Dolson. J’estime qu’un désaccord dans l’évaluation d’un candidat ne constitue pas une preuve de partialité. Des personnes raisonnables peuvent être en désaccord sur la cotation des compétences.

[95] Pour ces motifs, après avoir examiné chaque allégation séparément, j’ai tenu compte de l’ensemble des faits soumis par le plaignant et j’ai conclu à l’absence de preuve de partialité de la part de M. Dolson, et l’allégation d’abus de pouvoir pour cause de partialité est rejetée.

3. Le processus de consultation

[96] Le plaignant a soutenu que M. Dolson aurait dû consulter ses superviseurs immédiats et non les chefs de section et que la consultation des chefs de section constituait un abus de pouvoir. Il s’est référé à la mention sur l’affiche d’emploi invitant à consulter les superviseurs immédiats pour obtenir des renseignements sur le travail quotidien des candidats. Il a également soutenu que M. Mathieu, un chef de section, a admis dans son témoignage qu’il n’aurait pas eu connaissance du travail quotidien du plaignant.

[97] L’intimé a fait valoir que, dans le cadre de ce processus de nomination, le directeur était en définitive responsable de la validation du bilan des réalisations et disposait d’une latitude et d’une souplesse considérables pour choisir les personnes à consulter qui avaient la meilleure connaissance du travail d’un candidat. L’intimé a souligné que M. Dolson a déclaré dans son témoignage que les chefs de section avaient une bonne idée du travail des employés et une compréhension de ce qui était requis pour les postes de niveau MA-04. L’intimé a fait valoir que M. Dolson avait toujours consulté uniquement les chefs de section pour tous les candidats. L’intimé a déclaré que M. Dolson était le mieux placé pour évaluer s’il disposait de suffisamment d’information sur le plaignant (voir Portree, au par. 59).

[98] Dans le cadre du processus de nomination, rien n’obligeait à consulter les superviseurs immédiats. Lorsqu’elle procède à des nominations, l’article 36 de la LEFP permet à la CFP ou à son délégué (l’intimé) de recourir à toute méthode d’évaluation « [...] qu’elle estime indiquée pour décider si une personne possède les qualifications [...] ». À moins que la méthode d’évaluation ne constitue un abus de pouvoir, la Commission n’a aucun rôle à jouer dans l’évaluation de la méthode d’évaluation utilisée.

[99] L’affiche d’emploi indiquait clairement que le directeur n’était pas tenu de consulter le superviseur d’un candidat. La preuve a démontré que M. Dolson n’a pas consulté les superviseurs immédiats d’aucun candidat. Par conséquent, le fait de ne pas consulter les superviseurs immédiats n’était pas arbitraire et ne constitue pas un abus de pouvoir. La consultation des chefs de section, qui auraient eu une certaine connaissance du travail des candidats, n’avait rien de déraisonnable.

[100] Le plaignant a également fait valoir que les aspects négatifs du rendement d’un candidat ont plus de poids aux niveaux supérieurs de gestion qu’au niveau du superviseur immédiat. Il a fait valoir que le fait que M. Dolson a consulté les chefs de section a amplifié le poids de tout aspect négatif allégué par rapport aux nombreux aspects positifs de sa candidature. Il a soutenu que la consultation du superviseur immédiat aurait donné lieu à des commentaires plus positifs qui auraient pu l’emporter sur les aspects négatifs.

[101] Encore une fois, le choix des méthodes d’évaluation est laissé au délégué de la CFP, c’est-à-dire à l’intimé. La Commission n’a aucun rôle à jouer pour déterminer si l’évaluation aurait pu être plus approfondie qu’elle ne l’a été.

4. L’évaluation des compétences de base et fonctionnelles associées aux qualifications essentielles

[102] Comme il a déjà été mentionné, l’article 36 de la LEFP permet à la CFP ou à son délégué (l’intimé) de recourir à toute méthode d’évaluation « [...] qu’elle estime indiquée pour décider si une personne possède les qualifications [...] ». Le rôle de la Commission n’est pas de réévaluer les candidats dans le cadre d’un processus de nomination, mais d’examiner la façon dont l’évaluation a été faite et de déterminer s’il y a eu abus de pouvoir; voir Abi-Mansour c. Président-directeur général de Passeport Canada, 2014 TDFP 12, au paragraphe 29.

[103] Il incombe aux candidats de démontrer clairement dans leur dossier de candidature qu’ils possèdent toutes les qualifications essentielles; voir Walker‑McTaggart c. Président-directeur général de Passeport Canada, 2011 TDFP 39, au paragraphe 21. Dans le présent cas, le plaignant n’a pas démontré à M. Dolson qu’il possédait les six compétences qui font partie intégrante des qualifications essentielles. Même si je reconnaissais que l’évaluation de M. Laniel était plus précise, il reste que le plaignant n’a pas atteint le seuil de réussite pour quatre des six compétences.

[104] Le plaignant a présenté des arguments sur les évaluations de M. Dolson concernant les six compétences. Je n’ai pas résumé ces arguments, car cela obligerait la Commission à réévaluer le bilan des réalisations du plaignant. J’ai abordé les préoccupations du plaignant au sujet de certaines des évaluations de M. Dolson dans la partie de la présente décision consacrée aux allégations de partialité.

[105] Le plaignant a fait valoir que M. Dolson et M. Laniel se sont fondés sur des informations incorrectes à son sujet pour évaluer les compétences de base et fonctionnelles. Cet argument touche également à l’évaluation du candidat, et le fait d’examiner les informations dont disposaient les évaluateurs conduirait la Commission à réévaluer sa candidature.

[106] Le plaignant a fondé son argumentation sur des erreurs présumées dans l’évaluation de certaines des compétences, en se concentrant sur les compétences intitulées [traduction] « Faire preuve d’intégrité et de respect » et [traduction] « Réfléchir de manière innovante ». Le plaignant était en désaccord avec l’opinion de M. Dolson sur son rendement à l’égard de ces compétences. L’intimé a fait valoir qu’une erreur mineure qui n’affecte pas le résultat d’un processus ne peut pas être considérée comme un abus de pouvoir; voir Smith, au paragraphe 58. Je conviens que si des erreurs ont été commises dans l’évaluation de deux des compétences par M. Dolson, le résultat n’en serait pas affecté, dans la mesure où l’exigence du processus de nomination était d’obtenir une mention de réussite pour toutes les compétences.

[107] Le plaignant a fait valoir que la [traduction] « complexité » ne faisait pas partie des critères d’évaluation des compétences de base et fonctionnelles. Il a fondé cet argument sur le fait que la complexité était mentionnée spécifiquement dans la partie [traduction] « expérience constituant un atout » de l’affiche d’emploi, mais pas dans la partie [traduction] « compétences de base et fonctionnelles ». L’affiche d’emploi ne mentionne pas la complexité dans la liste des compétences essentielles. Cependant, la question et la réponse suivantes figurent dans l’affiche d’emploi :

[Traduction]

Q2. Existe-t-il des lignes directrices qui pourraient m’aider à préparer mon bilan des réalisations?

Il n’y a pas de lignes directrices, mais voici quelques suggestions qui pourraient vous aider :

[...]

· Fournissez des exemples concrets et précis de comportements qui illustrent la qualification requise.

· Choisissez des exemples dont la complexité, la portée et le degré de difficulté sont suffisants pour vous permettre d’illustrer la mesure dans laquelle vous avez démontré la qualification.

[Je mets en évidence]

 

[108] M. Dolson n’a pas fait référence à la [traduction] « complexité » dans son évaluation. M. Laniel a fait référence à la complexité uniquement dans son évaluation de la compétence intitulée [traduction] « Réfléchir de manière innovante » (C2). La référence à la [traduction] «complexité» dans la question et la réponse se rapporte aux exemples qui démontrent la qualification ou la compétence, et non à la compétence elle-même. M. Laniel a formulé des commentaires sur la complexité de l’exemple fourni par le plaignant. Je conclus à l’absence d’abus de pouvoir, car le plaignant n’a pas établi que la complexité faisait partie des critères utilisés pour évaluer les compétences de base et fonctionnelles. En outre, j’estime que les compétences n’ont pas été évaluées en fonction de la complexité, car l’affiche d’emploi ne mentionnait que la nécessité de fournir des exemples suffisamment complexes.

[109] Le plaignant a fait valoir que les instructions relatives aux six compétences étaient ambiguës et que rien n’exigeait qu’elles soient évaluées au niveau MA-04. Il a également fait valoir que des exemples de méthodologie et de travail statistique n’étaient pas requis dans les exemples à fournir pour ces compétences.

[110] Je ne partage pas cet avis. Les instructions indiquaient clairement que les compétences devaient être décrites, en tenant compte du fait que [traduction] « [...] vous postulez un poste de niveau MA-4 [...] ». Le directeur avait la possibilité d’évaluer ces compétences en tenant compte des fonctions de travail essentielles du niveau MA-04 (statistiques et méthodes). De plus, les méthodes d’évaluation choisies par l’intimé ne sont pas sujettes à un examen par la Commission.

[111] Le plaignant a fait valoir qu’il n’existait pas de corrigé clair pour aider les directeurs à évaluer le niveau approprié des exemples pour les six compétences. Il a déclaré que, par conséquent, le directeur était tenu de faire appel à son expérience et à son jugement, ce qui était arbitraire. L’évaluation des compétences est un exercice intrinsèquement subjectif, qui exige de l’évaluateur que celui-ci fasse appel à son expérience et à son jugement.

[112] Le plaignant a fait valoir que rien ne prouve que l’analyse de la cohérence de son bilan des réalisations a été effectuée en même temps que celle des autres candidats, puisque sa candidature a été évaluée plus tard dans le processus. Son bilan des réalisations n’a pas été évalué en même temps que celui des autres candidats, car il a été sélectionné plus tard dans le processus de nomination. M. Matthews a déclaré que le bilan des réalisations du plaignant avait fait l’objet d’une analyse de la cohérence. Aucune preuve n’a été présentée sur l’analyse de la cohérence des bilans des autres candidats. J’estime que rien n’indique qu’il y a eu abus de pouvoir dans le cadre de l’analyse de la cohérence. Le plaignant n’a pas établi l’existence d’un manque de cohérence avec les évaluations des autres candidats.

[113] Le plaignant a invoqué la décision Clark c. Sous-ministre de la Défense nationale, 2019 CRTESPF 8. Dans cette décision, la Commission a déclaré que, si l’outil utilisé pour évaluer une qualification est vicié, le résultat ne peut pas être considéré comme raisonnable ou équitable (voir également Chiasson c. Sous-ministre du Patrimoine canadien, 2008 TDFP 27, au par. 50). Dans Clark, la Commission a conclu qu’une question de présélection était viciée « [...] puisqu’elle n’indiquait pas clairement ce qui était requis des candidats ». La Commission a également conclu que la question avait été évaluée incorrectement. Dans le présent cas, la question était formulée assez clairement pour que les candidats sachent que les exemples à fournir se rapportaient aux fonctions d’un poste de niveau MA-04. Dans Clark, la question a également été clairement évaluée incorrectement. Dans le présent cas, les six compétences qui ont été évaluées faisaient appel au jugement de l’évaluateur (M. Dolson). Il n’y a aucune preuve d’une évaluation clairement incorrecte par M. Dolson comme dans Clark.

[114] Le plaignant a également invoqué Goncalves c. Commissaire de la Gendarmerie royale du Canada, 2017 CRTESPF 2. Dans cette affaire, la Commission a jugé que la personne nommée ne possédait manifestement pas toutes les qualifications essentielles établies. Aucune preuve ne me permet d’affirmer que les personnes nommées ne possédaient pas les qualifications essentielles.

[115] Le plaignant a également invoqué Hunter c. Sous-ministre de l’Industrie, 2019 CRTESPF 83, pour étayer sa position selon laquelle des documents devraient être fournis à l’appui d’une décision de sélection. Dans Hunter, il était question d’un processus de nomination non annoncé et la question des documents était liée à la décision de recourir à un processus non annoncé. Dans le présent cas, le processus de sélection a été annoncé, et je conclus qu’il n’est pas pertinent d’invoquer Hunter.

IV. Conclusion

[116] Le plaignant estime qu’il n’a pas été évalué de façon équitable dans le cadre du processus de nomination. Toutefois, il ne s’est pas acquitté du fardeau de démontrer l’existence d’un abus de pouvoir dans le cadre du processus de nomination.

[117] Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

(L’ordonnance apparaît à la page suivante)


V. Ordonnance

[118] La plainte est rejetée.

Le 12 septembre 2022.

Traduction de la CRTESPF

Ian R. Mackenzie,

une formation de la Commission des

relations de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral

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