Décisions de la CRTESPF

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Date : 20221110

Dossier : 561-34-43940

 

Référence : 2022 CRTESPF 93

 

Loi sur la Commission des

relations de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral et

Loi sur les relations de travail

dans le secteur public fédéral

Coat of Arms

Devant une formation de la

Commission des relations

de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral

Entre

 

Stephen Huff, ERIn ALCOCK, KEN BROWN, LUCY BOURAK, CHARLENA DAVIS, JAMES HALL, FRED LONGE, JENNIFER MYLES, LISA-NICOLLE SCHNEIDER ET JEAN VEERMAN

plaignants

 

et

 

Institut professionnel de la fonction publique du Canada

 

défendeur

Répertorié

Huff c. Institut professionnel de la fonction publique du Canada

Affaire concernant une plainte présentée en vertu de l’article 190 de la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral

Devant : David Orfald, une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

Pour les plaignants : Stephen Huff et Lisa-Nicolle Schneider

Pour le défendeur : Isabelle Roy et Martin Ranger, Institut professionnel de la fonction publique du Canada

Décision rendue sur la base d’arguments écrits

déposés le 7 décembre 2021, et le 28 janvier, le 10 février, les 30 et 31 mai et le 2 juin 2022.

(Traduction de la CRTESPF)


MOTIFS DE DÉCISION

(TRADUCTION DE LA CRTESPF)

I. Plainte devant la Commission

[1] Le 27 juillet 2021, Stephen Huff a déposé une plainte auprès de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (la « Commission ») contre son agent négociateur, l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada (IPFPC ou « le défendeur »). Lorsqu’il a rempli les formulaires requis pour le traitement de la plainte, M. Huff a précisé que la plainte avait été déposée par lui-même et par les neuf autres personnes énumérées sur la page couverture de la présente décision (les « plaignants »).

[2] Les plaignants ont allégué que le défendeur s’était adonné à une pratique de travail déloyale en manquant à son devoir de représentation équitable en ce qui concerne le traitement des griefs déposés par les plaignants et d’autres employés de l’Agence du revenu du Canada (ARC). Les griefs en question ont fait l’objet d’une décision par une formation de la Commission, énoncée dans Myles c. Agence du revenu du Canada, 2020 CRTESPF 49.

[3] Dans Myles, la Commission a rejeté les griefs déposés par les plaignants contre le calcul de leur emploi continu. Ce calcul a été utilisé pour déterminer leur droit à certaines indemnités de départ en vertu d’une convention collective conclue entre l’IPFPC et l’ARC.

[4] Dans la présente plainte, les plaignants ont contesté la qualité de la représentation de l’IPFPC devant la Commission dans Myles. Ils ont également affirmé que la décision du défendeur de ne pas procéder à une demande de contrôle judiciaire de la décision rendue par la Commission dans Myles constituait une violation de son devoir de représentation équitable, conformément à l’article 187 de la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral (L.C. 2003, ch. 22, art. 2; la « Loi »).

[5] Le défendeur a soulevé une objection préliminaire à la plainte, en faisant valoir qu’elle doit être rejetée au motif qu’elle est hors délai. Selon le défendeur, la plainte a été déposée auprès de la Commission plus de 90 jours après les événements qui en font l’objet, y compris la date à laquelle le plaignant a été informé de la décision finale de l’IPFPC de ne pas entreprendre une demande de contrôle judiciaire à l’égard de la décision rendue par la Commission dans Myles.

[6] Une exigence législative énoncée au paragraphe 190(2) de la Loi prévoit un délai obligatoire de 90 jours pour déposer une plainte alléguant un manquement au devoir de représentation équitable de l’agent négociateur.

[7] L’IPFPC a demandé de ne pas être tenu de déposer une réponse sur le bienfondé de la plainte tant que la Commission n’aura pas répondu à sa demande de traitement sommaire de la plainte au motif qu’elle est hors délai.

[8] Selon l’article 22 de la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (L.C. 2013, ch. 40, art. 365), la Commission « […] peut trancher toute affaire ou question dont elle est saisie sans tenir d’audience ». Les parties à la présente affaire ont été informées que la Commission envisageait de rendre une décision en ce qui concerne les objections du défendeur sur la base d’arguments écrits. Elles ont eu la possibilité de déposer des arguments écrits supplémentaires. Les deux parties se sont prévalues de cette possibilité.

[9] Je suis convaincu de pouvoir trancher l’objection préliminaire du défendeur sur la base des arguments écrits que les parties ont déposés.

[10] Comme je l’ai mentionné, selon la Loi, une plainte doit être déposée dans les 90 jours suivant le manquement allégué au devoir de représentation équitable. Les allégations des plaignants en ce qui concerne la gestion de leurs griefs pendant l’arbitrage de Myles sont toutes antérieures à la publication de la décision de la Commission en mai 2020. En ce qui concerne le contrôle judiciaire proposé de Myles, la période de 90 jours pour déposer une plainte liée au devoir de représentation équitable a commencé à s’écouler lorsque les plaignants ont été informés de la décision finale de l’IPFPC de ne pas présenter de demande de contrôle judiciaire en juin 2020. La présente plainte a été déposée auprès de la Commission bien plus de 90 jours après cet événement. Pour les motifs qui suivent, elle est hors délai et doit être rejetée.

II. Résumé des faits

[11] Le présent résumé est fondé sur les faits allégués par les plaignants et sur les renseignements contenus dans la décision rendue par la Commission dans Myles.

[12] Les plaignants sont employés par l’ARC et sont membres de l’unité de négociation Vérification, finances et sciences (VFS) représentée par l’IPFPC. Par conséquent, ils sont régis par les conventions collectives conclues entre l’IPFPC et l’ARC pour le groupe VFS.

[13] Les plaignants faisaient partie d’un groupe de plus de 150 employés de l’ARC dont les griefs ont été tranchés dans Myles. Tous étaient d’anciens employés du ministère du Revenu du gouvernement de l’Ontario qui ont été transférés à l’ARC en mars 2012 dans le cadre d’un programme appelé « Réforme de l’administration de la taxe de vente de l’Ontario » (RATVO). Les fonctionnaires s’estimant lésés (les « fonctionnaires ») ont demandé que leur service auprès du gouvernement de l’Ontario soit inclus dans le calcul du service continu auprès de l’ARC. Si leur service auprès du gouvernement de l’Ontario avait été inclus, les fonctionnaires auraient eu droit à des indemnités de départ plus élevées aux termes de la convention collective conclue entre l’ARC et l’IPFPC qui a été signée le 10 juillet 2012 et qui a expiré le 21 décembre 2014. Les fonctionnaires estimaient qu’au cours de la mise en œuvre du programme de la RATVO, on leur avait promis que leur service auprès du gouvernement de l’Ontario serait comptabilisé dans le calcul de l’indemnité de départ. L’IPFPC a représenté les fonctionnaires devant la Commission dans Myles et a présenté ces arguments.

[14] L’audience de la Commission dans Myles a eu lieu du 2 au 5 octobre 2018 et des arguments écrits ont été présentés entre le 13 novembre 2018 et le 1er février 2019. La Commission a rejeté les griefs dans sa décision rendue le 7 mai 2020.

[15] L’IPFPC a informé les plaignants de la décision rendue par la Commission dans Myles le 19 mai 2020. Les plaignants ont joint à leur plainte une copie d’une lettre que M. Huff a reçue de Marcia Kredentser, gestionnaire régionale de l’IPFPC en Ontario. La lettre de trois pages résumait la décision de la Commission et expliquait pourquoi l’IPFPC ne présenterait pas de demande de contrôle judiciaire à l’égard de Myles. La lettre expliquait que les fonctionnaires pouvaient demander un réexamen de la recommandation de ne pas présenter une demande de contrôle judiciaire en écrivant à Isabelle Roy, avocate générale de l’IPFPC, au plus tard le 28 mai 2020.

[16] Les plaignants ont demandé un réexamen dans ce délai. Ils ont joint à leur plainte des copies des demandes faites par deux plaignants (datées des 24 et 25 mai 2020). Les demandes de réexamen portaient sur le bienfondé des griefs et remettaient en question les conclusions tirées par la Commission dans Myles. Elles ont fait référence à la décision d’un prédécesseur de la Commission dans Clough c. Agence du revenu du Canada, 2015 CRTEFP 48, confirmée par la Cour d’appel fédérale dans Canada (Revenu national) c. Clough, 2016 CAF 148. Dans Clough, d’anciens fonctionnaires du gouvernement de la Colombie-Britannique avaient obtenu gain de cause dans leur grief visant à faire reconnaître le service auprès de cette province aux fins du calcul de l’indemnité de départ. Les demandes de réexamen affirmaient que, dans Myles, la Commission n’avait pas respecté la décision antérieure rendue dans Clough.

[17] Dans une lettre datée du 13 juin 2020, Mme Roy a fourni la réponse de l’IPFPC aux demandes de réexamen. Elle a expliqué que, dans le cadre d’un contrôle judiciaire, un tribunal examinera uniquement si la décision rendue par la Commission était raisonnable. Elle a expliqué pourquoi l’IPFPC avait conclu qu’un contrôle judiciaire de Myles était voué à l’échec. Elle a informé les fonctionnaires qu’ils pouvaient procéder seuls à un contrôle judiciaire, à leurs frais, mais qu’ils devaient en informer l’IPFPC s’ils le faisaient. La lettre contenait un hyperlien qui menait à des renseignements sur la façon de déposer une demande de contrôle judiciaire et sur les délais applicables.

[18] Le 16 novembre 2020, la plaignante Charlena Davis a écrit une lettre en son nom et au nom de plusieurs autres fonctionnaires à la présidente de l’IPFPC, Debi Daviau. La lettre résumait les préoccupations au sujet de la façon dont l’IPFPC avait géré le dossier depuis sa création en 2013-2014 et réitérait les préoccupations au sujet de la décision de ne pas procéder à un contrôle judiciaire, particulièrement à la lumière de la décision antérieure rendue par la Commission dans Clough. Dans la lettre, on demandait quelles mesures l’IPFPC prendrait pour rétablir la confiance des fonctionnaires à l’égard du syndicat.

[19] Le 30 novembre 2020, Mme Kredentser a répondu à Mme Davis. Elle a expliqué les mesures que l’IPFPC avait prises pour représenter les fonctionnaires dans Myles, en insistant sur la façon dont les représentants de l’IPFPC avaient fait valoir que les griefs étaient semblables à ceux déposés dans Clough, mais a expliqué pourquoi la Commission avait été en mesure de différencier les griefs faisant l’objet de la décision Myles de ceux visés par Clough.

[20] Le 14 décembre 2020, Mme Davis a répondu par écrit à Mme Kredentser, indiquant qu’il s’agissait de sa dernière correspondance sur la question. La lettre réitérait les préoccupations des fonctionnaires au sujet de la décision de l’IPFPC de ne pas demander de contrôle judiciaire et indiquait que la décision prise par l’IPFPC [traduction] « […] doit être renvoyée au Conseil canadien des relations industrielles (CCRI) aux fins d’examen conformément à l’article 37 ».

[21] La présente plainte a d’abord été déposée devant la Commission le 27 juillet 2021. Toutefois, les plaignants n’ont rempli les formulaires requis pour compléter le processus de réception que le 7 décembre 2021.

[22] Étant donné que les pièces jointes à la plainte sont essentielles pour comprendre l’explication des événements par les plaignants, j’ai inclus les formulaires de plainte soumis le 7 décembre 2021 dans les arguments écrits, ainsi que la réponse du défendeur du 28 janvier 2022 et la réponse des plaignants du 10 février 2022.

[23] Le 18 mai 2022, la Commission a indiqué aux parties qu’elle envisageait de rendre une décision sur la base d’arguments écrits, et elle a invité les parties à présenter d’autres arguments écrits, qui ont été reçus les 30 et 31 mai et le 2 juin 2022.

III. Résumé de l’argumentation

[24] Les plaignants ont soutenu que la Commission devrait faire preuve d’indulgence à l’égard du délai de 90 jours, compte tenu de la pandémie de COVID-19. Ils ont indiqué qu’ils n’ont reçu la décision sur les griefs Myles que le 19 mai 2020 et qu’ils avaient jusqu’au 28 mai 2020 pour demander un réexamen de la décision de l’IPFPC de ne pas demander de contrôle judiciaire. Ils ont effectivement demandé un réexamen et, le 13 juin 2020, l’IPFPC a confirmé qu’il n’entamerait pas de processus de demande de contrôle judiciaire. Les plaignants ont fait valoir que l’IPFPC ne leur avait pas parlé des délais de dépôt d’une demande de contrôle judiciaire par eux-mêmes, et que la Commission devrait faire preuve d’indulgence pour cette raison. Ils ont affirmé que l’IPFPC leur avait dit qu’ils devraient chercher à être représentés par un avocat. Ils ont indiqué qu’ils avaient téléphoné à plusieurs cabinets d’avocats et que, chaque fois, ceux-ci leur ont répondu plus tard en raison de la pandémie de COVID-19. Ils ont déclaré que les cabinets d’avocats avec lesquels ils ont communiqué ont tous refusé de les représenter, en raison de conflits d’intérêts.

[25] En faisant valoir que la Commission devrait faire preuve d’indulgence à l’égard du délai de 90 jours pour déposer une plainte, les plaignants ont fait remarquer qu’ils ne sont pas des avocats, mais des vérificateurs. Ils n’avaient pas l’impression de pouvoir tenter de présenter une demande de contrôle judiciaire par eux-mêmes. Il est possible qu’ils n’aient pas respecté les délais parce qu’ils essayaient de faire appel à un avocat. Ils ont demandé à la Commission de trancher la question sur le fond plutôt que sur le processus seulement.

[26] Le défendeur a soutenu que la Commission n’a pas le pouvoir discrétionnaire de prolonger la limite de 90 jours prévue par la Loi, citant Myles c. Institut professionnel de la fonction publique du Canada, 2017 CRTESPF 31, au paragraphe 42 (« Myles c. IPFPC »). L’IPFPC a soutenu que, même si le délai de prescription a commencé le dernier jour où le défendeur a communiqué avec les plaignants sur l’affaire (le 30 novembre 2020), la plainte n’a été déposée que le 27 juillet 2021, soit bien au-delà du délai de 90 jours prévu par la loi.

[27] L’IPFPC a également soutenu que la période de 90 jours pour le dépôt des plaintes de pratique déloyale de travail est clairement énoncée dans le « Guide à l’intention des plaignants qui se représentent eux-mêmes » de la Commission, publié sur son site Web.

[28] Le défendeur a soutenu que, étant donné que la plainte a été déposée en dehors du délai de 90 jours prévu par la Loi, elle devrait être rejetée sommairement sans audience.

IV. Motifs

[29] Les exigences législatives pour déposer une plainte alléguant un manquement au devoir de représentation équitable d’un agent négociateur sont énoncées au paragraphe 190(2) de la Loi. Ce paragraphe prévoit un délai de 90 jours pour déposer une plainte. Les paragraphes 190(1) et (2) indiquent ce qui suit :

190 (1) La Commission instruit toute plainte dont elle est saisie et selon laquelle :

190 (1) The Board must examine and inquire into any complaint made to it that

[…]

g) l’employeur, l’organisation syndicale ou toute personne s’est livré à une pratique déloyale au sens de l’article 185.

(g) the employer, an employee organization or any person has committed an unfair labour practice within the meaning of section 185.

(2) Sous réserve des paragraphes (3) et (4), les plaintes prévues au paragraphe (1) doivent être présentées dans les quatre-vingt-dix jours qui suivent la date à laquelle le plaignant a eu — ou, selon la Commission, aurait dû avoir — connaissance des mesures ou des circonstances y ayant donné lieu.

(2) Subject to subsections (3) and (4), a complaint under subsection (1) must be made to the Board not later than 90 days after the date on which the complainant knew, or in the Board’s opinion ought to have known, of the action or circumstances giving rise to the complaint.

 

[30] Il est bien établi que le libellé du paragraphe 190(2) est obligatoire et que la Commission n’a pas le pouvoir discrétionnaire de prolonger la période de 90 jours; voir Myles c. IPFPC au paragraphe 42, Castonguay c. Alliance de la Fonction publique du Canada, 2007 CRTFP 78, au paragraphe 55, et Paquette c. Alliance de la Fonction publique du Canada, 2018 CRTESPF 20, au paragraphe 36. Le seul pouvoir discrétionnaire de la Commission au moment d’interpréter le paragraphe 190(2) en ce qui concerne le délai de 90 jours est de déterminer le moment où le plaignant a eu ou aurait dû avoir connaissance des faits à l’origine de la plainte; voir Esam c. Alliance de la Fonction publique du Canada (Syndicat des employées et employés nationaux), 2014 CRTFP 90, au paragraphe 33, Éthier c. Service correctionnel du Canada et Union of Canadian Correctional Officers - Syndicat des agents correctionnels du Canada - CSN, 2010 CRTFP 7, au paragraphe 18, et Tohidy c. Alliance de la Fonction publique du Canada, 2022 CRTESPF 69, au paragraphe 45.

[31] Selon leur propre résumé des événements à l’origine de la plainte, les plaignants ont été informés par l’IPFPC de la décision de la Commission rendue dans Myles le 19 mai 2020. En même temps, ils ont été informés que l’IPFPC n’avait pas l’intention de présenter une demande de contrôle judiciaire de la décision. Si je devais déterminer que le 19 mai 2020 était la date à laquelle les plaignants ont eu ou auraient dû avoir connaissance des faits à l’origine de la plainte, le délai de 90 jours pour déposer la plainte aurait été le 17 août 2020.

[32] Selon les affirmations des plaignants, ils ont été informés de la réponse de l’IPFPC à leur demande de réexamen le 13 juin 2020. Dans cette lettre, ils ont été informés que la décision de ne pas procéder à un contrôle judiciaire était désormais une décision finale, mais qu’ils avaient le droit de demander eux-mêmes un contrôle judiciaire. Si je devais déterminer que le 13 juin 2020 était la date à laquelle les plaignants ont eu ou auraient dû avoir connaissance des faits à l’origine de la plainte, le délai de 90 jours pour déposer la plainte aurait été le 11 septembre 2020.

[33] L’IPFPC a également soutenu que même si sa correspondance finale aux plaignants (le 30 novembre 2020) était utilisée afin de calculer le délai de 90 jours, la plainte serait encore hors délai.

[34] La présente plainte a été déposée le 27 juillet 2021. Pour qu’une plainte déposée à cette date soit valide, la Commission devrait conclure que les plaignants ont eu ou auraient dû avoir connaissance des faits à l’origine de la plainte le 28 avril 2021 ou après cette date.

[35] Les plaignants n’ont présenté aucune allégation ou aucun argument qui me permettrait de conclure qu’ils n’ont eu connaissance des actions ou des omissions du défendeur qu’après cette date. Il ressort clairement des arguments des plaignants qu’ils étaient au courant des résultats de la représentation de l’IPFPC devant la Commission dans Myles le 19 mai 2020. Ils savaient également à cette date que la région de l’Ontario de l’IPFPC ne recommandait pas la présentation d’une demande de contrôle judiciaire de cette décision.

[36] Il est également clair d’après les arguments des plaignants qu’au plus tard le 13 juin 2020, l’IPFPC avait pris une décision finale de ne pas lancer un processus de demande de contrôle judiciaire de Myles, les avait informés de leur droit de le faire par eux-mêmes et leur avait fourni un lien vers des renseignements sur la façon de déposer une demande contrôle judiciaire et les délais pour le faire.

[37] La présente plainte a été présentée plus d’un an après que les lettres du 19 mai 2020 et du 13 juin 2020 ont été remises aux plaignants.

[38] Je ne vois rien dans l’échange de lettres entre les plaignants et le défendeur en novembre et décembre 2020 qui soulève de nouvelles allégations ou formule de nouvelles demandes qui donneraient lieu à la présentation d’une plainte relative au devoir de représentation équitable. Même si c’était le cas, la période de 90 jours suivant la lettre du 30 novembre 2020 aurait expiré le 28 février 2021, soit plus de cinq mois avant que la présente plainte ne soit déposée.

[39] Je comprends que les plaignants ont soulevé des préoccupations de compassion liées à l’incidence de la pandémie de COVID-19, à leur manque de connaissances juridiques et à leurs difficultés à obtenir les services d’un avocat. Toutefois, il n’y a aucune disposition dans la Loi et aucune jurisprudence citée par les plaignants ou que je connais qui permettrait à la Commission d’exercer son pouvoir discrétionnaire de proroger le délai de 90 jours et qui permettrait à la présente plainte d’être entendue sur le fond. Même si cette plainte devait être entendue sur le fond, il est évident, daprès leurs arguments, que ce que les plaignants cherchent en fin de compte, cest un réexamen de la décision rendue par la Commission dans Myles par une cour supérieure, par lintermédiaire dun contrôle judiciaire. Les dates limites pour demander un contrôle judiciaire de Myles sont passées depuis longtemps, tout simplement.

[40] Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

(L’ordonnance apparaît à la page suivante)


V. Ordonnance

[41] La plainte est rejetée au motif qu’elle était hors délai.

Le 10 novembre 2022.

Traduction de la CRTESP

David Orfald,

une formation de la Commission des

relations de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral

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