Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le fonctionnaire s’estimant lésé était affecté en tant qu’agent principal à l’ambassade du Canada aux Philippines – il a été informé qu’il serait rapatrié au Canada depuis cet endroit – il a décidé de vendre localement son VAP, aux Philippines – ses effets mobiliers (EM) ont été préparés aux fins d’expédition maritime et aérienne – il n’a pas vendu son VAP et a donc demandé de l’expédier au Canada après que les autres expéditions ont été effectuées – le 19 septembre 2017, le fonctionnaire s’estimant lésé a été informé qu’en raison de sa décision personnelle, l’employeur n’était pas en mesure d’expédier son VAP dans le même conteneur que les expéditions de ses EM – une autre expédition distincte pour le VAP coûterait un montant supplémentaire de 4 842 $ à l’employeur – par conséquent, le fonctionnaire s’estimant lésé serait tenu responsable sur le plan financier de la différence des coûts – le 16 octobre 2017, l’employeur a déclaré que les frais liés à l’entreposage devraient être imputés au fonctionnaire s’estimant lésé – le 3 novembre 2017, le fonctionnaire s’estimant lésé a déposé un grief contre le refus de l’employeur d’approuver l’expédition du VAP sans frais pour lui et de s’assurer que les frais d’entreposage accumulés en raison des décisions et des retards attribuables au ministère et à la mission ne lui soient pas transférés – l’employeur a soulevé une objection préliminaire selon laquelle le grief était hors délai – la Commission a conclu que le grief avait été déposé dans les délais, car les mesures qui y ont donné lieu se sont concrétisées le 16 octobre 2017, date à laquelle le fonctionnaire s’estimant lésé a été informé qu’il serait également responsable des frais d’entreposage – en ce qui concerne le fond, le fonctionnaire s’estimant lésé a allégué que l’omission de l’employeur de payer tous les frais contrevenait à l’article 15 de la version de 2013 de la Directive, qui est intégrée dans la convention collective du groupe Service extérieur (FS) conclue entre l’employeur et l’Association professionnelle des agents du service extérieur – l’article 15.18.1 de la Directive confère à l’employeur un vaste pouvoir discrétionnaire en ce qui concerne le paiement des frais de réinstallation – la Commission a conclu que la décision de l’employeur d’assumer une partie, mais pas la totalité, des frais d’expédition du VAP à Ottawa, en Ontario, et de refuser d’assumer les frais d’entreposage constituait un exercice raisonnable du pouvoir discrétionnaire de la direction – le fonctionnaire s’estimant lésé n’a pas établi que l’employeur avait suspendu ou avait retardé sa prise de décision – le fonctionnaire s’estimant lésé a allégué que le fait de l’obliger à payer certains des frais d’expédition et tous les frais d’entreposage allait à l’encontre du principe de la comparabilité, puisque cela le plaçait dans une position moins favorable qu’il ne l’aurait été s’il avait servi au Canada – la Commission a conclu que le plaignant n’avait fourni aucune information permettant de comparer sa situation à celle à laquelle il aurait eu droit concernant son VAP s’il avait été en service au Canada – la comparabilité est un principe qui doit être appliqué dans la mesure où cela est « possible et pratique », selon l’introduction et l’avant-propos de toutes les DSE, et elle n’annule pas le vaste pouvoir discrétionnaire conféré à l’employeur pour approuver les frais d’expédition et d’entreposage d’un VAP.

Objection préliminaire relative au respect des délais rejetée.
Grief rejeté.

Contenu de la décision

Date: 20230911

Dossier: 566-02-40343

 

Référence: 2023 CRTESPF 83

 

Loi sur la Commission des

relations de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral et

Loi sur les relations de travail

dans le secteur public fédéral

Coat of Arms

Devant une formation de la

Commission des relations de

travail et de l’emploi dans le

secteur public fédéral

ENTRE

 

BRONSON Hahn Borst

fonctionnaire s’estimant lésé

 

et

 

CONSEIL DU TRÉSOR

(ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement)

 

employeur

Répertorié

Borst c. Conseil du Trésor (ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement)

Affaire concernant un grief individuel renvoyé à l’arbitrage

Devant : Patricia H. Harewood, une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

Pour le fonctionnaire s’estimant lésé : Paul Raven, représentant

Pour l’employeur : Philippe Giguère, avocat

Décision rendue sur la base d’arguments écrits
déposés les 13 et 27 janvier, le 20 février, le 2 mars et les 12 et 17 mai 2023. (Traduction de la CRTESPF)


MOTIFS DE DÉCISION

(TRADUCTION DE LA CRTESPF)

I. Grief devant la Commission

[1] Le présent grief porte sur le pouvoir discrétionnaire de la direction d’approuver les frais de réinstallation. La question en litige est de savoir si le Conseil du Trésor (l’« employeur ») a raisonnablement exercé son pouvoir discrétionnaire lorsqu’il a refusé de rembourser tous les frais de réinstallation relatifs à l’expédition du véhicule motorisé particulier (VMP) du fonctionnaire s’estimant lésé (le « fonctionnaire »), un véhicule de marque Ford Edge, modèle 2014, de Manille, aux Philippines, jusqu’à Ottawa, en Ontario. L’affectation à l’ambassade du Canada à Manille de Bonson Hahn Borst, le fonctionnaire, en tant qu’agent consulaire de gestion venait de prendre fin lorsqu’il a présenté son grief le 3 novembre 2017.

[2] L’employeur a assumé une partie des frais d’expédition du VMP du fonctionnaire à Ottawa. Toutefois, il a été demandé au fonctionnaire de payer la différence résultant de l’expédition de son VMP et de ses effets mobiliers dans deux conteneurs différents de 20 pieds au lieu d’un seul conteneur de 40 pieds, et d’assumer les frais d’entreposage.

[3] L’employeur a déclaré que la décision du fonctionnaire de ne pas expédier son VMP avec ses effets mobiliers était un choix personnel et que la population canadienne ne devrait pas assumer les frais supplémentaires.

[4] Le fonctionnaire a allégué que le fait de ne pas assumer l’intégralité des frais contrevenait à la Directive sur le service extérieur (DSE) 15 – Réinstallation (la « Directive ») du Conseil national mixte (CNM) adoptée en 2013 et intégrée à la convention collective applicable du groupe Service extérieur (FS) conclue entre l’employeur et l’Association professionnelle des agents du Service extérieur (l’« agent négociateur »), qui a expiré le 30 juin 2014 (la « convention collective »). Le fonctionnaire a allégué que rien dans la Directive ne l’empêchait d’expédier son VMP séparément de ses effets mobiliers. En outre, le fait de lui faire payer une partie des frais d’expédition et la totalité des frais d’entreposage était contraire au principe d’équivalence, car cela le plaçait dans une situation moins favorable que celle dans laquelle il se serait trouvé s’il avait travaillé au Canada.

[5] Le fonctionnaire a expliqué la teneur de son grief dans le formulaire de grief, comme suit :

[Traduction]

[…]

Je présente un grief concernant le refus d’Affaires mondiales Canada (AMC) d’approuver l’envoi de mon VMP de Manille, aux Philippines, à Ottawa, au Canada, sans qu’aucuns frais ne soient portés à ma charge, et de veiller à ce que je ne sois pas tenu responsable des frais d’entreposage accumulés en raison des retards occasionnés par le ministère et la mission et des décisions prises par ces derniers.

[…]

 

[6] L’employeur a soulevé une objection préliminaire à tous les paliers de la procédure de règlement des griefs au motif que le grief était hors délai. À la suite du rapport du Comité des Directives sur le service extérieur du CNM, le Comité exécutif du CNM a examiné le grief sur le fond et est arrivé à la conclusion que le fonctionnaire avait été traité conformément à l’esprit de la Directive.

[7] La présente décision porte d’abord sur l’objection préliminaire. Elle porte ensuite sur le fond du grief. Selon moi, le grief n’est pas hors délai puisque les actions qui y ont donné lieu se sont concrétisées le 16 octobre 2017, lorsque le fonctionnaire a été informé qu’il serait également tenu d’assumer les frais d’entreposage.

[8] Toutefois, le grief est rejeté sur le fond puisqu’il n’y a pas eu de violation de la Directive. Le paragraphe 15.18.1 de la Directive confère à l’employeur un pouvoir discrétionnaire important en ce qui concerne le paiement des frais de réinstallation. Il n’existe pas de droit automatique au paiement des frais d’expédition d’un VMP; cette décision relève du pouvoir discrétionnaire de la direction.

[9] Dans le présent cas, le fonctionnaire était indécis quant à ce qu’il avait l’intention de faire de son VMP. La décision de l’employeur de rembourser une partie, mais non l’intégralité, des frais d’expédition du VMP à Ottawa et de refuser de rembourser les frais d’entreposage constituait un exercice raisonnable du pouvoir discrétionnaire de la direction et ne constituait pas une violation de la convention collective.

[10] Les questions en litige dans le présent grief sont les suivantes :

1) Le grief est-il hors délai?

2) Le refus de l’employeur d’assumer les frais d’entreposage et une partie des frais d’expédition du VMP du fonctionnaire de Manille à Ottawa constitue-t-il une violation du paragraphe 15.18.1 de la Directive?

 

II. Résumé de la preuve

[11] Les parties ont convenu de procéder par voie d’arguments écrits tant sur l’objection préliminaire que sur le fond du grief.

[12] Les parties ont également présenté un énoncé conjoint des faits (ECF) et un recueil conjoint de documents. Voici le contenu de l’ECF :

[Traduction]

 

1. Le grief dont est saisie la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (la « Commission ») a été présenté au titre des Directives sur le service extérieur (DSE), qui font partie intégrante de la convention collective conclue entre le Conseil du Trésor et l’Association professionnelle des agents du service extérieur (la « convention collective »), dont la date d’expiration est fixée au 30 juin 2014.

2. À l’époque pertinente, le fonctionnaire occupait à titre de poste d’attache un poste d’agent de gestion et des affaires consulaires (AGAC) au groupe et au niveau FS-02. Il était affecté à l’ambassade du Canada aux Philippines (l’« ambassade ») à titre d’agent principal, Affaires consulaires et urgences. Son affectation devait se terminer le 31 août 2017, mais la date a été changée au 17 août 2017. Le dernier jour de travail du fonctionnaire à l’ambassade a été le 25 août 2017.

3. Le 12 juillet 2017, un conseiller des DSE a confirmé au fonctionnaire qu’il serait rapatrié des Philippines au Canada. Il a été demandé au fonctionnaire de remplir le formulaire « Autorisation de revenir au Canada » et de préciser s’il avait l’intention d’expédier un véhicule motorisé particulier (VMP) (voir l’onglet A du recueil conjoint de documents, le « RCD »).

4. Le 13 juillet 2017, le fonctionnaire a répondu qu’il vendrait son VMP sur place, aux Philippines, et qu’il avait reçu l’approbation du chef de mission pour s’en départir (voir l’onglet A du RCD).

5. Le 13 juillet 2017, le fonctionnaire a également renvoyé à l’employeur le formulaire « Autorisation de revenir au Canada » dûment signé et rempli, dans lequel il a indiqué qu’il était en possession d’un VMP qu’il avait l’intention de vendre ou de céder aux Philippines (voir l’onglet B du RCD).

6. Le 27 juillet 2017, les effets mobiliers du fonctionnaire (expédition par voie maritime) ont été emballés. L’autorisation de sortie pour cette expédition a été reçue le 14 août 2017.

7. Le 1er août 2017, les effets mobiliers du fonctionnaire (expédition par voie aérienne) ont été emballés.

8. Le 17 août 2017, le fonctionnaire a apporté son VMP à un atelier de carrosserie local de Manille, aux Philippines, pour y faire effectuer des travaux de carrosserie pendant deux semaines.

9. Le 23 août 2017, Brian Nebres, coordonnateur de la logistique par intérim à l’ambassade, a interpellé le fonctionnaire de façon informelle et lui a demandé ce qu’il en était de son VMP. Le fonctionnaire a répondu qu’il essayait toujours de le vendre, et M. Nebres a alors demandé au fonctionnaire s’il souhaitait renvoyer son véhicule au Canada; le fonctionnaire a demandé si cette option était toujours possible et a déclaré que, si tel était le cas, la réponse était oui (voir l’onglet C du RCD).

10. Le 24 août 2017, le fonctionnaire a envoyé un courriel au conseiller des DSE dans lequel il a confirmé son départ le 27 août 2017, son dernier jour de travail au bureau étant le 25 août 2017. Il a également indiqué qu’il essayait toujours de vendre son VMP sur place, mais que, si aucune vente n’avait lieu d’ici le 28 août 2017, il demanderait à le renvoyer au Canada (voir l’onglet 1 du recueil de documents du fonctionnaire, le « RDF »).

11. Le fonctionnaire reconnaît qu’il n’a pas vérifié l’exactitude des renseignements fournis lors de sa discussion avec Brian Nebres auprès du conseiller des DSE affecté à son dossier.

12. Le 25 août 2017, le fonctionnaire a donné le feu vert à l’atelier de carrosserie local de Manille, aux Philippines, pour effectuer deux semaines de travaux de carrosserie sur son VMP.

13. Le 27 août 2017, le fonctionnaire a quitté Manille, aux Philippines, pour se rendre à Ottawa, au Canada, où il est arrivé le lendemain.

14. Le 28 août 2017, les effets mobiliers du fonctionnaire ont été expédiés à bord du navire Northern Diamond dans un conteneur de 20 pieds (voir l’onglet D du RCD).

15. Le même jour, le premier secrétaire de l’ambassade a envoyé une demande au ministère des Affaires étrangères, reçue le 29 août 2017, qui visait à obtenir l’autorisation d’expédier le VMP du fonctionnaire vers le Canada (voir l’onglet E du RCD).

16. Le 14 septembre 2017, le fonctionnaire a remis son formulaire d’expédition du VMP au conseiller des DSE affecté à son dossier (voir l’onglet C du RCD).

17. Le 18 septembre 2017, Panilpa INC a fourni à l’employeur un rapport comparatif des frais d’expédition de deux conteneurs de 20 pieds par rapport à un seul conteneur de 40 pieds. Selon l’offre à commandes, les frais d’expédition de deux conteneurs de 20 pieds s’élèveraient à 12 118 $ et ceux d’un seul conteneur de 40 pieds, à 7 276 $, soit une différence de 4 842 $ (voir l’onglet F du RCD).

18. Le 19 septembre 2017, le conseiller des DSE a indiqué au fonctionnaire qu’en raison des choix personnels de ce dernier, l’employeur n’était pas en mesure d’expédier son VMP dans le même conteneur que ses effets mobiliers. Par conséquent, le fonctionnaire serait tenu d’assumer les frais supplémentaires, qui s’élevaient à 4 842 $, s’il souhaitait toujours expédier son VMP (voir l’onglet C du RCD).

19. Le 29 septembre 2017, le directeur adjoint du Centre à la clientèle des DSE (AES) a informé le fonctionnaire que la décision de l’employeur demeurait inchangée et qu’il devait assumer les frais supplémentaires liés à l’expédition de son VMP au Canada (voir l’onglet G du RCD).

20. Entre le 4 et le 12 octobre 2017, le fonctionnaire a communiqué avec l’ambassade du Canada aux Philippines pour demander de l’aide afin d’obtenir les documents nécessaires à la vente du VMP (voir l’onglet 4 du RDF).

21. Le 6 octobre 2017 ou vers cette date, le fonctionnaire a de nouveau tenté de vendre le véhicule.

22. Le 16 octobre 2017, le directeur adjoint du Centre à la clientèle des DSE (AES) a indiqué, dans un courriel adressé au directeur du point de prestation des services communs de l’ambassade du Canada aux Philippines, que la dernière chose que le fonctionnaire lui avait dite était qu’il allait vendre le véhicule. Il a également indiqué que les frais d’entreposage devaient être assumés par le fonctionnaire (voir l’onglet 5 du RDF).

23. Le 23 octobre 2017, le fonctionnaire a fait savoir à l’employeur qu’il souhaitait toujours expédier son VMP, mais que, compte tenu des dernières discussions, il avait l’intention de le vendre sur place, aux Philippines (voir l’onglet H du RCD).

24. Le 25 octobre 2017, M. Gerunggay a reçu un courriel de Goetz Moving aux Philippines, indiquant qu’ils avaient besoin de l’autorisation du fonctionnaire et que les frais d’entreposage et opérationnels devaient être réglés avant la mise à disposition du VMP du fonctionnaire (voir l’onglet 8 du RDF).

25. Le 25 octobre 2017, le directeur du point de prestation des services communs de l’ambassade a envoyé un courriel au fonctionnaire dans lequel il indique que Levi Marimat, agent de logistique de l’ambassade, était en mesure de l’aider à récupérer son VMP de l’entrepôt. Il a également confirmé que la Direction générale des Directives sur le service extérieur d’Affaires mondiales Canada avait demandé au fonctionnaire de payer les frais d’entreposage du VMP. De plus, il a indiqué que le fonctionnaire devait lui fournir les coordonnées complètes de son représentant local. Nicole Cruz a reçu un courriel d’une personne, mais n’y a pas répondu, car elle ne savait pas qui était cette personne. En outre, il a indiqué qu’il appartenait au fonctionnaire d’entrer en contact avec l’ambassade au sujet de la remise de son VMP et non à une tierce partie (voir l’onglet 9 du RDF).

26. Le 31 octobre 2017, le directeur de la Direction des politiques et de la vérification des DSE (AEF) a de nouveau confirmé que le fonctionnaire devait assumer les frais liés à l’expédition supplémentaire du VMP, étant donné que, selon lui, la décision tardive du fonctionnaire et le fait qu’il n’a pas tenté de regrouper son VMP et ses effets mobiliers dans une seule expédition ont entraîné des frais supplémentaires (voir l’onglet P du RCD).

27. Le 31 octobre 2017, le fonctionnaire a envoyé un courriel à Levi Marimat, dans lequel il a demandé à l’ambassade de coordonner la transmission des documents requis avec son représentant juridique local, M. Gerunggay (voir l’onglet 11 du RDF).

28. Le 6 novembre 2017, le fonctionnaire a présenté un grief concernant le refus d’approuver l’expédition de son VMP de Manille, aux Philippines, à Ottawa, au Canada, sans frais à sa charge. À titre de mesure corrective, il a demandé à l’employeur d’autoriser l’expédition sans frais à sa charge et d’être indemnisé intégralement (voir l’onglet I du RCD).

29. Le 23 novembre 2017, le fonctionnaire a écrit à l’employeur pour demander que son VMP soit remis à son représentant local afin qu’il puisse vendre le véhicule sur place, aux Philippines. L’employeur l’a ensuite informé des étapes, des retards et des frais liés à cette décision. Le fonctionnaire a en outre été informé que l’ambassade estimait qu’il devait demeurer le contact pour les questions non résolues relatives au VMP, et non le représentant qu’il avait désigné (voir l’onglet J du RCD).

30. Le 24 novembre 2017, M. Gerunggay a été informé par Goetz Moving que l’ambassade leur avait demandé de retenir et de ne pas remettre le véhicule du fonctionnaire jusqu’à nouvel ordre et de s’abstenir de communiquer avec lui (M. Gerunggay) (voir l’onglet 12 du RDF).

31. Le 27 novembre 2017, le directeur du point de prestation des services communs de l’ambassade a écrit au fonctionnaire pour lui indiquer que la remise de son véhicule à un tiers, qui ne jouit pas de l’immunité diplomatique, posait problème. En effet, en vertu de son contrat avec Goetz Moving, l’ambassade demeurait la gardienne de son véhicule. En outre, l’ambassade jouissait d’un statut diplomatique qui lui permettait d’avoir la garde d’un véhicule muni de plaques diplomatiques et assorti de privilèges diplomatiques. Le directeur a également déclaré qu’il demanderait des conseils supplémentaires et a envoyé un courriel à cet effet le jeudi précédent. En outre, il a indiqué que la remise du véhicule à un tiers ne jouissant pas de l’immunité diplomatique obligerait son représentant à s’acquitter de droits de douane et de taxes d’un montant d’environ 16 000 $ (voir l’onglet 13 du RDF).

32. Le 29 novembre 2017, le fonctionnaire a écrit à l’employeur pour lui indiquer qu’il souhaitait expédier son VMP. Il a compris qu’il était tenu de payer les frais en sus de ceux que l’employeur aurait payés si le véhicule avait été expédié avec les effets mobiliers. Cependant, le paiement a été effectué sous toutes réserves (voir l’onglet K du RCD).

 

33. Le 16 janvier 2018, le VMP du fonctionnaire a été expédié au Canada à bord du navire Northern Diamond dans un conteneur de 20 pieds (voir l’onglet L du RCD).

34. Le 12 février 2018, l’employeur a rejeté le grief au deuxième palier de la procédure interne de règlement des griefs. Il a fait remarquer que le fonctionnaire n’avait pas l’intention, à l’origine, d’expédier son VMP, car il avait tenté de le vendre avant son retour. N’ayant pu le vendre, il a décidé de l’expédier. Cela a entraîné des frais supplémentaires imprévus en raison de l’utilisation d’un deuxième conteneur d’expédition. L’employeur a estimé que le fait de faire assumer ces frais supplémentaires par le fonctionnaire était une mesure appropriée (voir l’onglet M du RCD).

35. Le 14 février 2018, le grief a été renvoyé au Comité exécutif du CNM (le « Comité exécutif »).

36. Le 10 avril 2019, le Comité exécutif a conclu que le fonctionnaire avait été traité conformément à l’esprit de la DSE. Il a fait remarquer que sa décision tardive d’expédier son VMP avait entraîné l’utilisation de deux conteneurs de 20 pieds au lieu d’un conteneur de 40 pieds. Le Comité exécutif a établi que l’employeur avait fourni l’aide nécessaire au titre de la DSE, puisqu’il ne demandait que le remboursement des frais supplémentaires. En outre, il a estimé que les frais devaient être assumés par le fonctionnaire, puisqu’ils résultaient de ses propres choix (voir l’onglet N du RCD).

37. Le 23 avril 2019, le grief a été renvoyé à l’arbitrage auprès de la Commission. L’affaire se déroule par voie d’arguments écrits (voir l’onglet O du RCD).

[Les passages en évidence le sont dans l’original]

 

III. Le grief est-il hors délai?

A. Pour le fonctionnaire

[13] Le fonctionnaire a allégué que le grief n’est pas hors délai. Les actions qui y ont donné lieu sont survenues le 31 octobre 2017, et le grief a été présenté six jours plus tard, soit le 6 novembre 2017.

[14] Le 31 octobre 2017, le fonctionnaire a reçu une réponse du directeur des politiques et de la vérification des DSE, confirmant qu’il serait responsable d’une partie des frais d’expédition de son VMP de Manille à Ottawa, ainsi que de tous les frais d’entreposage.

[15] Le fonctionnaire a en outre soutenu que la décision prise par l’employeur le 31 octobre contenait de nouveaux renseignements et une analyse effectuée par une autorité supérieure. Comme dans Bowden c. Conseil du Trésor (Agence des services frontaliers du Canada), 2021 CRTESPF 93, au paragraphe 49, la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (la « Commission ») devrait considérer que le calcul du délai a été remis à zéro puisque la réponse comportait une nouvelle analyse en réponse aux arguments formulés par le fonctionnaire le 24 octobre 2017.

[16] Le fonctionnaire a fait valoir qu’à titre subsidiaire, dans le cas où le grief est jugé hors délai, une demande de prorogation de délai devrait être accordée au motif qu’il existe une raison claire, logique et convaincante pour expliquer le retard, que le retard est de moins de deux mois et que l’employeur ne subit pas de préjudice en accédant à la demande. Il a fait remarquer que, comme c’est le cas pour de nombreuses questions relatives à la Directive, l’agent négociateur a tenté d’utiliser la voie du règlement informel des différends pour régler cette question entre le 25 octobre 2017 et le 31 octobre 2017, et que ces sept jours devraient être exclus du calcul du délai. Le fonctionnaire a fait valoir qu’il existe une pratique de longue date consistant à renoncer au calcul des délais lorsque les parties participent à des discussions informelles. Cette pratique est conforme à l’esprit de l’article 207 de la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral (L.C. 2003, ch. 22, art. 2; la « Loi ») et à la convention collective. Après l’échec des tentatives de règlement à l’amiable, le fonctionnaire a présenté son grief.

[17] Le fonctionnaire a invoqué Schenkman c. Conseil du Trésor (Travaux publics et Services gouvernementaux Canada), 2004 CRTFP 1, à l’appui de sa demande de prorogation du délai de dépôt du grief.

B. Pour l’employeur

[18] L’employeur a fait valoir qu’il avait soulevé une objection relative au respect du délai à chaque étape de la procédure de règlement des griefs, et notamment devant le Comité des Directives sur le service extérieur du CNM.

[19] Les actions qui ont donné lieu au grief se sont produites le 19 septembre 2017. Ce jour-là, le fonctionnaire a été informé pour la première fois par le conseiller en DSE de l’employeur qu’il devrait payer les frais d’expédition supplémentaires correspondant à l’utilisation de deux conteneurs de 20 pieds au lieu d’un conteneur de 40 pieds. Le montant de ces frais s’élevait à 4 842 $.

[20] Le paragraphe 15.1.6 du Règlement du CNM fixe un délai de 25 jours pour la présentation d’un grief.

[21] Aucun accord verbal ou écrit n’a été conclu pour prolonger le délai fixé. Par ailleurs, il n’existe aucune pratique antérieure consistant à accepter de prolonger les délais sans confirmation verbale ou écrite. Les discussions informelles ne dispensent pas les fonctionnaires s’estimant lésés de l’obligation de présenter un grief. Le fonctionnaire aurait pu demander une prorogation du délai de présentation de son grief, mais il ne l’a pas fait.

[22] Le fonctionnaire a présenté son grief le 6 novembre 2017, soit neuf jours après la date limite.

[23] La Commission n’a pas compétence pour entendre le grief sur le fond parce qu’il est hors délai.

[24] L’employeur a invoqué plusieurs décisions à l’appui de son argument selon lequel le grief est hors délai (voir Fragomele c. Alliance de la Fonction publique du Canada, 2021 CRTESPF 117; Pomerleau c. Conseil du Trésor (Agence canadienne de développement international), 2005 CRTFP 148; et Vidlak c. Conseil du Trésor (Agence canadienne de développement international), 2006 CRTFP 96).

C. Analyse

[25] Le paragraphe 15.1.6 du Règlement du CNM de juin 2008 fixe le délai de présentation d’un grief à 25 jours après la date à laquelle l’employé a été avisé oralement ou par écrit, ou la date à laquelle il a pris connaissance pour la première fois, des actes ou des circonstances ayant donné lieu au grief.

[26] Les délais ne comprennent pas les samedis, les dimanches et les jours fériés désignés payés (voir le par. 15.1.19). Cela signifie que, si la date limite tombe un samedi, un dimanche ou un jour férié désigné payé, ce jour est exclu du calcul.

[27] Je ne partage pas l’avis du fonctionnaire selon lequel, dans le présent cas, le calcul du délai a été remis à zéro (voir Bowden). Les observations faites dans Bowden au sujet de la remise à zéro des délais ne se rapportaient en rien à l’objection relative au respect des délais soulevée dans le cadre de ce grief. Dans le présent cas, les circonstances n’ont pas changé et il n’y a pas eu de nouvelle analyse ou d’examen d’une décision antérieure justifiant la remise à zéro du délai.

[28] La décision de l’employeur du 31 octobre 2017 était une confirmation de ce qui avait été communiqué plus tôt au fonctionnaire : il serait tenu d’assumer les frais supplémentaires d’expédition de son VMP en raison de son choix tardif.

[29] J’estime donc que les circonstances qui ont mené au grief se sont concrétisées le 16 octobre 2017, alors que le fonctionnaire déployait encore des efforts pour vendre son VMP sur place et qu’il a été informé pour la première fois que tous les frais d’entreposage lui seraient imputés. Avant cela, il avait seulement été informé qu’il devrait assumer les frais supplémentaires correspondant à l’expédition de deux conteneurs de 20 pieds au lieu d’un conteneur de 40 pieds. L’employeur n’a rien précisé au sujet des frais d’entreposage, qui font partie intégrante du fond du grief présenté, et qui sont demandés à titre de mesure corrective. À la lumière de cette conclusion, le grief est opportun puisque, selon le formulaire de grief, il a été reçu par le directeur adjoint le 3 novembre 2017, soit 21 jours après que ce dernier élément d’information lui a été communiqué.

[30] Dans le présent grief, le fonctionnaire conteste à la fois les frais d’expédition et tous les frais d’entreposage et demande une réparation qui prévoit expressément [traduction] « […] que [le fonctionnaire ne soit] pas tenu responsable des frais d’entreposage accumulés en raison des retards occasionnés par le ministère et la mission et des décisions prises par ces derniers ».

[31] Bien que l’employeur ait affirmé que les actions qui ont donné lieu au grief se sont produites le 19 septembre 2017, date à laquelle l’employeur a informé le fonctionnaire qu’il devrait assumer les frais supplémentaires liés à l’expédition de deux conteneurs distincts de 20 pieds au lieu d’un seul conteneur de 40 pieds, aucune décision ni aucun renseignement sur les frais d’entreposage n’a été communiqué au fonctionnaire à ce moment-là.

[32] L’ECF indique que le grief a été présenté le 6 novembre (onglet I du RCD). Même si cette date avait été retenue à titre de date de présentation du grief, celui-ci serait opportun étant donné que j’ai établi que les actions qui ont donné lieu au grief se sont produites le 16 octobre.

[33] L’employeur a invoqué un certain nombre de décisions dont les faits diffèrent de ceux du présent cas. Dans chacune d’elles, les circonstances qui ont mené au grief son survenues à un moment précis, lorsque tous les renseignements sur lesquels le grief était fondé ont été communiqués au fonctionnaire s’estimant lésé. Les faits sont différents dans le présent cas. L’employeur a communiqué une partie des renseignements au fonctionnaire, à savoir ceux relatifs aux frais d’expédition, et a ensuite communiqué le reste des renseignements, à savoir ceux relatifs aux frais d’entreposage.

[34] Dans Fragomele, il est question d’une plainte concernant le devoir de représentation équitable qui portait sur un plaignant qui avait présenté un grief pour contester une décision en matière de dotation prise deux ans et demi plus tôt. Le plaignant connaissait les faits et les circonstances qui ont mené au grief depuis deux ans et demi, mais il ne s’est pas senti immédiatement lésé. Les faits diffèrent dans le cas dont je suis saisie.

[35] Dans Mark c. Agence canadienne d’inspection des aliments, 2007 CRTFP 34, la décision de refuser un congé de maladie a été communiquée à un moment précis. Aucun autre élément constituant le fondement du grief n’a été communiqué par la suite. Dans Pomerleau, l’employeur a communiqué au fonctionnaire s’estimant lésé une décision refusant de reconnaître son service à l’étranger. Aucune autre précision ni aucun autre renseignement ayant servi de fondement au grief n’a été communiqué ultérieurement, comme c’est le cas en l’espèce.

[36] Par conséquent, l’objection relative au respect du délai est rejetée. Il n’est pas nécessaire d’appliquer l’analyse établie dans Schenkman. Je vais maintenant procéder à l’examen du grief sur le fond.

IV. Le refus de l’employeur d’assumer les frais d’entreposage et d’expédition du VMP du fonctionnaire constitue-t-il une violation de la Directive?

[37] Les parties ont accepté de déposer des arguments écrits, et j’ai reproduit une version remaniée de leurs arguments dans la présente partie.

A. Pour le fonctionnaire

[38] Le fonctionnaire a fait valoir que l’article 15.18 de la DSE de 2013 fait partie intégrante de la convention collective et qu’il doit être interprété conformément aux principes modernes d’interprétation des contrats (voir Daigneault c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada), 2017 CRTEFP 38, aux par. 28 et 29; et Genest c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada), 2021 CRTESPF 31, aux par. 51 à 54). La Commission a déjà interprété les DSE qui font partie intégrante de la convention collective en tenant compte de ce cadre d’interprétation.

[39] En outre, les droits de la direction sont limités par les dispositions de la convention collective (voir Institut professionnel de la fonction publique du Canada c. Conseil du Trésor, 2019 CRTESPF 7 (« IPFPC »).

[40] Le fonctionnaire a soutenu en particulier que [traduction] « […] le libellé de la convention collective doit être interprété dans son contexte intégral, selon son sens grammatical et ordinaire, en conformité avec l’économie et l’objet de la convention et avec l’intention des parties ».

[41] Le fonctionnaire a insisté sur le fait qu’aucune disposition de la Directive n’exige que les VMP soient expédiés avec les effets mobiliers. En fait, le paragraphe 15.18.3 indique que les VMP peuvent être expédiés à partir d’un troisième endroit et séparément des effets mobiliers. Par conséquent, le fait d’exiger de M. Borst qu’il assume les frais d’expédition ne serait pas conforme à l’intention des parties.

[42] Le [traduction] « Guide du service extérieur » ne contient pas non plus de disposition indiquant que les fonctionnaires doivent assumer les frais d’expédition si un VMP n’est pas expédié avec les effets mobiliers. Le fait que le guide de 2017 ne contienne aucune disposition sur la question de savoir si les fonctionnaires devront payer les frais d’expédition si leur véhicule est expédié séparément laisse supposer qu’une telle politique n’existe pas ou qu’elle n’a jamais été communiquée aux fonctionnaires. En outre, étant donné qu’une telle restriction n’est pas prévue dans la Directive, elle ne peut pas être implicite, car elle serait contrecarrée par l’application de la convention collective.

[43] L’employeur aurait dû approuver l’expédition du VMP du fonctionnaire de Manille à Ottawa sans frais pour ce dernier et s’assurer qu’il ne soit pas tenu responsable des frais d’entreposage.

B. Pour l’employeur

[44] L’employeur a fait valoir que l’expédition d’un VMP n’est pas un droit garanti par la Directive. L’employeur avait le pouvoir discrétionnaire de déterminer l’aide nécessaire à la réinstallation accordée au fonctionnaire.

[45] L’employeur et le Comité exécutif du CNM ont tous deux conclu que le fonctionnaire avait été traité conformément à l’esprit de la Directive.

[46] Le fonctionnaire a fait le choix personnel de vendre son véhicule et a ensuite changé d’avis à la dernière minute pour l’expédier, ce qui a entraîné l’utilisation de deux conteneurs de 20 pieds au lieu d’un seul conteneur de 40 pieds. Par conséquent, il aurait dû assumer les frais supplémentaires, car sa décision a empêché l’employeur d’expédier le VMP de la manière la plus rentable.

[47] L’employeur a soutenu que son interprétation était conforme aux règles modernes d’interprétation des contrats, selon lesquelles il convient d’examiner le sens ordinaire du libellé retenu par les parties, dans son contexte global, et d’une manière qui respecte l’objectif et l’esprit généraux de la Directive.

[48] L’employeur s’est appuyé sur des décisions antérieures de la Commission et de la Cour fédérale pour étayer sa position selon laquelle les principes modernes d’interprétation des contrats devraient être appliqués pour résoudre les questions d’interprétation des contrats (voir Burden c. Canada (Procureur général), 2011 CF 251 (« Burden »); Beese c. Conseil du Trésor (Commission canadienne des grains), 2012 CRTFP 99, aux par. 23 et 24; Smolic c. Conseil du Trésor (ministère de l’Industrie), 2018 CRTESPF 34, aux par. 92 et 93; Turner c. Conseil du Trésor (ministère des Pêches et des Océans), 2018 CRTESPF 81, au par. 48; et Fehr c. Agence du revenu du Canada, 2017 CRTESPF 17, aux par. 56 et 57 (confirmé en contrôle judiciaire dans Canada (Procureur général) c. Fehr, 2018 CAF 159).

[49] On ne peut pas faire une lecture isolée de l’article 15.18 de la Directive. La Commission a reconnu l’importance d’interpréter les directives du CNM en tenant compte de leur objet, de leur intention et de leurs dispositions générales (voir Burden c. Agence Parcs Canada, 2011 CRTFP 94; et Brown c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada), 2021 CRTESPF 50).

[50] L’employeur a cité l’esprit de la Directive tel qu’il est explicitement énoncé aux paragraphes 15.1.2 et 15.1.4. En particulier, le but de la réinstallation est de réinstaller un employé de la manière la plus efficace, au prix le plus raisonnable pour le contribuable canadien, tout en causant le moins d’ennuis possible au fonctionnaire et à sa famille.

[51] La Commission devrait s’en remettre au seul pouvoir discrétionnaire de l’employeur et n’intervenir que si l’employeur a commis une erreur dans la procédure ou a pris une décision manifestement déraisonnable (voir Nova Scotia (Civil Service Commission) v. Nova Scotia Government Employees Union (NSGEU), 1987 CanLII 7984 (NS LA) (« Nova Scotia »)).

[52] N’eût été la décision personnelle du fonctionnaire et son changement d’avis tardif, l’employeur aurait pu donner suite à sa demande de façon plus efficace et au prix le plus raisonnable pour le public. Au lieu de cela, le fonctionnaire a continué de vouloir vendre son véhicule sur place jusqu’à ce qu’il soit trop tard et que ses effets mobiliers aient déjà été emballés.

[53] Le fonctionnaire n’a communiqué avec son conseiller des DSE que le 24 août 2017 pour indiquer qu’il essayait toujours de vendre son véhicule sur place. Il a ensuite envoyé sa voiture chez un carrossier pendant deux semaines. Il n’a fourni son formulaire d’expédition du VMP que le 14 septembre 2017. À cette date, il était trop tard pour expédier son VMP avec ses effets mobiliers.

[54] Le public ne devrait pas être tenu responsable des frais d’expédition et d’entreposage supplémentaires engagés en raison des décisions personnelles du fonctionnaire.

[55] L’interprétation du fonctionnaire porte atteinte au pouvoir discrétionnaire accordé à l’employeur en vertu du paragraphe 15.1.3 de la Directive pour déterminer l’aide à la réinstallation à accorder.

C. Analyse

1. Le refus de l’employeur d’assumer les frais d’entreposage et une partie des frais d’expédition du VMP du fonctionnaire de Manille à Ottawa constituait-il une violation du paragraphe 15.18.1 de la Directive?

[56] La Directive, dans sa version de 2013, fait partie intégrante de la convention collective qui était en vigueur au moment où le grief a été présenté. Il s’agit de l’une des nombreuses directives émanant du CNM, qui est un organisme de collaboration et de consultation entre le gouvernement fédéral, en tant qu’employeur, et les agents négociateurs de la fonction publique.

[57] Les principes suivants, énoncés dans l’introduction et l’avant-propos des Directives, s’appliquent à toutes les directives, y compris la DSE 15 :

[…]

L’équivalence – dans la mesure du possible et du pratique, les fonctionnaires en service à l’étranger ne devraient être ni plus ni moins favorisés que s’ils travaillaient au Canada.

L’encouragement – l’employeur doit offrir certains avantages supplémentaires pour intéresser les fonctionnaires à accepter à l’occasion une affectation à l’étranger et pour recruter et conserver des fonctionnaires faisant carrière dans le service extérieur.

Les dispositions relatives à l’exécution des programmes – afin d’assurer aux fonctionnaires en service à l’étranger tous les moyens nécessaires pour mener à bien les programmes qui leur sont confiés.

[…]

 

[58] La Directive énonce un ensemble de règles concernant le traitement des frais de réinstallation des fonctionnaires affectés à l’étranger, notamment les frais d’expédition d’un VMP au Canada ou dans un pays tiers. Bien que la Commission ait examiné certains aspects des Directives sur le service extérieur, cette disposition particulière sur l’expédition des VMP n’a pas fait l’objet d’une grande réflexion au niveau de l’arbitrage.

[59] Il n’est pas contesté que, dans la mesure où la Directive est incorporée par renvoi dans la convention collective, les règles modernes d’interprétation des contrats doivent s’appliquer lors de l’examen de ses dispositions.

[60] Je souscris à l’opinion des parties selon laquelle ces règles exigent que le libellé de la convention collective soit lu dans son contexte global, selon son sens grammatical et ordinaire, et en harmonie avec l’économie de la convention, son objet et l’intention des parties (voir Brown et Beatty, Canadian Labour Arbitration, 4e édition, au par. 4 :2100; Burden, au par. 15; et Smolic, au par. 92).

[61] En outre, la Commission a interprété d’autres dispositions des directives du CNM en appliquant les mêmes principes modernes d’interprétation des contrats (voir Brown et Genest). Rien ne justifie d’appliquer un autre cadre interprétatif.

[62] Voici les passages pertinents de la Directive :

[…]

15.18 Expédition d’un véhicule motorisé particulier (VMP)

15.18.1 Sous réserve des dispositions du présent article, l’administrateur général peut autoriser l’expédition d’un véhicule motorisé particulier (VMP), qui sert principalement au transport de la famille. Pour les besoins de l’expédition, les véhicules motorisés particuliers (VMP) comprennent les motocyclettes (lorsqu’ils ne sont pas expédiés avec les effets mobiliers), les berlines, les voitures sports ou les familiales, mini-fourgonnettes, camionnettes ou les véhicules à quatre roues motrices d’au plus trois-quart de tonne qui appartiennent au fonctionnaire ou à une personne à sa charge ou qui sont immatriculés au nom de l’un ou l’autre.

15.18.2 Le paiement des frais réels et raisonnables relatifs à mise en caisse, s’il s’agit d’une exigence de l’entreprise de transports et/ou d’assurances, à l’assurance et au transport d’un véhicule motorisé particulier du fonctionnaire en provenance et/ou à destination de son poste, peut être autorisé lorsque l’administrateur général est convaincu que le pays où le fonctionnaire est sur le point d’être réinstallé :

a) n’impose pas de restrictions quant à la taille ou à d’autres caractéristiques du véhicule motorisé particulier à expédier;

b) n’a pas de lois ou de conditions concernant l’utilisation des véhicules qui rendent, de l’avis de l’administrateur général, l’utilisation du véhicule motorisé particulier du fonctionnaire beaucoup moins sûre qu’au Canada;

c) n’impose ni droits prohibitifs d’importation, ni embargo à l’entrée des véhicules particuliers, ni restrictions prohibitives de cession.

15.18.3 Les dépenses autorisées en vertu du paragraphe 15.18.2 ne doivent pas dépasser les frais de mise en caisse, d’assurance et d’expédition du véhicule motorisé particulier du fonctionnaire, de son ancien lieu de travail au Canada au poste, bien que le véhicule motorisé particulier peut être expédié d’un troisième endroit jusqu’au poste du fonctionnaire.

15.18.4 Les dépenses autorisées en vertu du paragraphe 15.18.2 ne doivent pas dépasser les frais de mise en caisse, d’assurance et d’expédition du véhicule motorisé particulier du fonctionnaire, de son poste jusqu’à son nouveau lieu de travail au Canada; toutefois, ces dépenses ne seront autorisées que si le véhicule est la propriété du fonctionnaire ou de l’une des personnes à charge, au poste, avant l’expédition.

15.18.5 Dans le cas d’une affectation d’un poste à l’étranger à un autre, les dépenses autorisées en vertu du paragraphe 15.18.2 ne doivent pas dépasser les frais de mise en caisse, d’assurance et d’expédition du véhicule motorisé particulier du fonctionnaire :

a) de l’ancien au nouveau lieu de travail du fonctionnaire, si le véhicule est expédié à l’ancien lieu de travail; ou

b) de l’ancien lieu de travail du fonctionnaire au Canada à son nouveau lieu de travail, si le véhicule est expédié d’un endroit autre que l’ancien poste du fonctionnaire, sauf si l’administrateur général juge que des circonstances exceptionnelles permettent de passer outre à cette restriction et en informe le comité interministériel compétent de coordination du service extérieur.

15.18.6 Pour les besoins de la détermination du remboursement des frais de transport admissibles en vertu du paragraphe 15.4.3, le coût de l’expédition du véhicule motorisé particulier doit être établi conformément aux paragraphes 15.18.3, 15.18.4 et 15.18.5 ci-dessus sans dépasser le coût estimatif de l’expédition du véhicule de l’endroit où il se trouve jusqu’au nouveau lieu de travail.

15.18.7 L’administrateur général ne doit pas normalement autoriser le paiement des droits, des taxes ou l’immatriculation qu’un fonctionnaire peut être appelé à payer à un poste ou au Canada à l’égard de son véhicule motorisé particulier, d’une motocyclette, d’un bateau ou d’une remorque qu’il a expédiés.

15.18.8 Lorsque le véhicule à expédier dépasse la limite susmentionnée, l’administrateur général peut autoriser le paiement des frais réels et raisonnables d’expédition du véhicule dans la limite maximale permise.

15.18.9 L’administrateur général ne doit pas autoriser l’expédition d’un véhicule motorisé particulier qui ne répond pas aux stipulations du transporteur.

15.18.10 Les dispositions de l’article 15.18 peuvent s’appliquer à un VMP qui est expédié directement du fabricant jusque chez un concessionnaire local du poste du fonctionnaire, qu’il ait ou non été immatriculé au nom du fonctionnaire ou d’une de ses personnes à charge ou que l’un ou l’autre en soit propriétaire au moment de l’expédition, lorsque le fabricant ne veut pas expédier le véhicule directement chez le fonctionnaire. Seuls les frais de transport proprement dits du nouveau VMP seront remboursés à condition qu’une preuve satisfaisante montrant que ces frais ont été engagés soit présentée à l’administrateur général.

15.18.11 Les dispositions du paragraphe 15.18.10 pourront également s’appliquer lorsque, de l’avis de l’administrateur général, il est plus économique d’acheter un nouveau VMP d’un concessionnaire local que de payer directement pour l’expédition d’un VMP jusqu’au poste.

[…]

 

[63] En outre, la Directive comporte des exigences particulières. Le libellé du paragraphe 15.1.2 de la Directive est clair, à commencer par l’objectif des dispositions relatives à la réinstallation. Les dispositions relatives à la réinstallation devraient permettre de rembourser les frais de réinstallation légitimes, et non de permettre au fonctionnaire concerné de réaliser des gains personnels ou des extravagances.

[64] En fin de compte, l’objectif est de permettre une réinstallation efficace du fonctionnaire – au prix le plus raisonnable pour le public et avec un minimum de désagréments pour le fonctionnaire et sa famille, conformément au paragraphe 15.1.4 de la Directive. Il s’agit d’un exercice délicat d’équilibre.

[65] Une lecture de la Directive dans son contexte global et selon son économie me permet de constater que, tout au long de la Directive, qui a été élaborée conjointement par les agents négociateurs de la fonction publique et le gouvernement fédéral, on trouve des mécanismes permettant de contrôler ce qui peut faire l’objet d’un remboursement. Dans l’ensemble, l’intention de l’agent négociateur et de l’employeur est d’accorder un pouvoir discrétionnaire considérable à l’administrateur général pour déterminer les frais de réinstallation qui seront payés.

[66] Je partage l’avis de l’employeur selon lequel la Directive lui confère le pouvoir discrétionnaire exclusif de déterminer l’aide à la réinstallation qui sera accordée. Le paragraphe 15.1.3 indique clairement que, puisque c’est l’employeur qui décide de la réinstallation, c’est lui qui détermine l’aide nécessaire à la réinstallation qui sera accordée. Le libellé ne comporte aucune ambiguïté et il n’est pas nécessaire de consulter d’autres documents, y compris d’autres directives ou les guides des DSE, pour comprendre l’intention des parties de confier cette responsabilité à l’employeur.

[67] En ce qui concerne l’expédition d’un VMP, les paramètres de la couverture pouvant être accordée par l’administrateur général se trouvent à l’article 15.18, intitulé « Expédition d’un véhicule motorisé particulier (VMP) ».

[68] Tout d’abord, le libellé du paragraphe 15.18.1 des versions anglaise et française donne à l’administrateur général le pouvoir discrétionnaire d’approuver l’expédition d’un VMP. Dans la version anglaise, le libellé est le suivant : « deputy head may authorize shipment ». Dans la version française, le libellé est « l’administrateur général peut autoriser l’expédition ». Il s’agit d’un pouvoir discrétionnaire et non d’une obligation.

[69] Ensuite, le véhicule doit être principalement destiné au transport de la famille. La disposition précise même les types de véhicules autorisés, à savoir les motocyclettes (lorsqu’ils ne sont pas expédiés avec les effets mobiliers), les berlines, les voitures sports ou les familiales, mini-fourgonnettes, camionnettes ou les véhicules à quatre roues motrices d’au plus trois-quarts de tonne qui appartiennent au fonctionnaire ou à une personne à sa charge ou qui sont immatriculés au nom de l’un ou l’autre. Cette liste est exhaustive.

[70] Enfin, les dépenses qui peuvent être autorisées sont soumises aux dispositions de l’article 15.18 dans son ensemble. Il s’agit notamment du paragraphe 15.18.4, qui établit que les dépenses autorisées ne doivent pas dépasser les frais de mise en caisse, d’assurance et d’expédition du VMP du fonctionnaire, de son poste jusqu’à son nouveau lieu de travail au Canada. Les dépenses ne seront autorisées que si le véhicule est la propriété du fonctionnaire ou de l’une des personnes à charge, au poste, avant l’expédition.

[71] D’autres restrictions s’appliquent au pouvoir discrétionnaire de l’administrateur général. En voici deux :

1) le paiement des droits, des taxes ou l’immatriculation ne sera normalement pas autorisé (par. 15.18.7);

2) l’administrateur ne doit pas autoriser l’expédition d’un VMP qui ne répond pas aux stipulations du transporteur (par. 15.18.9).

 

[72] Comme dans Daigneault, où la Commission ne pouvait s’écarter du libellé clair de la DSE concernant les frais de réinstallation, je dois m’en tenir à ce qui est clairement exprimé dans la Directive aux paragraphes 15.1.4, 15.18.1 et 15.18.4.

[73] IPFPC ne présente pas d’intérêt en l’espèce; les faits diffèrent de ceux du présent cas. Dans IPFPC, la Commission s’est penchée sur certaines dispositions de la directive de l’employeur sur la gestion du rendement qui visaient à traiter le comportement reproché. Dans la mesure où la directive interférait avec le droit à la représentation par l’agent négociateur et à l’application régulière de la loi dans les cas de mesures disciplinaires répréhensibles prévu par la convention collective, la Commission a supprimé certaines parties de cette directive.

[74] Dans la présente affaire, les dispositions relatives à l’expédition d’un VMP ne sont pas incompatibles avec d’autres droits prévus par la convention collective; le fonctionnaire ne m’a pas non plus indiqué une disposition précise de la convention collective qui serait incompatible avec le paragraphe 15.18.1.

[75] Dans l’ECF, il est établi que le fonctionnaire avait au départ l’intention de vendre son véhicule sur place, mais qu’il a changé d’avis beaucoup plus tard, lorsqu’il a été informé que cela coûterait trop cher. Dès le 12 juillet 2017, son conseiller des DSE lui a demandé s’il avait l’intention d’expédier son VMP afin que la [traduction] « valeur selon le Canadian Red Book » puisse être établie. Il a répondu le lendemain par courriel qu’il allait vendre son VMP sur place et qu’il avait déjà obtenu l’autorisation de s’en départir.

[76] Sur son formulaire « Autorisation de revenir au Canada », à la partie 1.5, le fonctionnaire avait le choix d’indiquer s’il avait l’intention d’expédier ou de vendre son VMP. Il a coché la case indiquant qu’il allait le [traduction] « céder ou le vendre ». Le formulaire a été signé le 13 juillet 2017, et le fonctionnaire a reconnu par sa signature qu’il avait lu et compris les DSE et qu’il demanderait des éclaircissements sur leur application ou leur interprétation au besoin.

[77] Le Guide des DSE n’a aucune valeur juridique; c’est ce qui est indiqué dès la première page. Si le fonctionnaire l’a consulté à l’époque, il s’agissait là de la liste de vérification fournie pour l’expédition ou la vente d’un VMP :

[Traduction]

[…]

Véhicule motorisé particulier (VMP)

 Déterminez si vous allez vendre ou expédier votre VMP.

 Avant votre départ, prenez les dispositions nécessaires pour restituer les plaques diplomatiques et annuler l’assurance et l’immatriculation du véhicule. Conservez des copies de l’immatriculation du véhicule avec le reste de vos documents aux fins de l’assurance lorsque vous déménagez.

 Demandez à l’administration de la mission de vous fournir une lettre officielle indiquant que vous avez restitué vos plaques diplomatiques à la mission avant votre départ et que vous retournez au Canada en envoyant votre VMP dans le cadre de l’expédition par voie maritime.

 Faites une copie de votre permis de conduire international.

 Demandez à la compagnie d’assurance de votre lieu d’affectation une lettre confirmant que vous êtes toujours assuré et que vous conduisiez pendant votre affectation.

Vente d’un VMP

 Prenez toutes les dispositions nécessaires pour la vente.

 Prenez connaissance des lois et règlements locaux concernant la vente de véhicules, y compris les taxes, les inspections de sécurité, entre autres, en consultation avec le personnel administratif de la mission.

[…]

 

[Certains passages en évidence le sont dans l’original, et je mets en évidence]

 

[78] Le 23 août 2017, le coordonnateur de la logistique par intérim lui a indiqué de manière informelle qu’il pouvait toujours expédier son VMP. Le fonctionnaire a admis dans l’ECF qu’il n’a jamais vérifié l’exactitude de cette information auprès de son conseiller des DSE. C’est à cette personne qu’il aurait dû s’adresser pour toute question relative à l’application de la Directive.

[79] Le 25 août 2017, soit trois jours avant l’envoi de ses effets mobiliers à Ottawa, il a envoyé sa voiture chez un carrossier pour une durée de deux semaines. Après avoir quitté Manille le 27 août 2017, le fonctionnaire a continué d’exprimer qu’il préférait expédier son véhicule à Ottawa, mais qu’il essayait toujours de le vendre sur place.

[80] Le fonctionnaire n’a envoyé son formulaire à son conseiller des DSE pour expédier son VMP que le 14 septembre 2017, soit plus de deux semaines après que ses effets mobiliers eurent été expédiés et qu’il eut quitté son lieu d’affectation pour rentrer chez lui à Ottawa.

[81] Finalement, le 29 novembre 2017, le fonctionnaire a renoncé à vendre son véhicule sur place parce que cela lui aurait coûté trop cher. Cependant, à ce moment-là, il était trop tard pour expédier son VMP avec les effets mobiliers, lesquels effets avaient déjà été expédiés à Ottawa le 28 août 2017.

[82] Comme il est indiqué dans l’ECF, la remise du véhicule à son représentant ne jouissant pas de l’immunité diplomatique lui aurait coûté environ 16 000 $ au titre des droits de douane et des taxes, dont le fonctionnaire aurait dû s’acquitter lui-même. En fin de compte, le fonctionnaire a choisi une option qui était peut-être la plus raisonnable, la plus rentable et la moins gênante pour lui, mais pas pour le portefeuille du contribuable.

[83] Bien que le fonctionnaire reproche à l’employeur des [traduction] « retards occasionnés par […] la mission », selon ses propres termes, il n’a pas réussi à établir que l’employeur était indécis ou qu’il avait tardé à prendre sa décision. En outre, on ne sait pas très bien pourquoi le fonctionnaire n’a pas communiqué beaucoup plus tôt avec son conseiller des DSE au sujet de la logistique et de tous les frais potentiels liés à l’expédition ou à la mise en vente de son véhicule, afin qu’il puisse prendre une décision en toute connaissance de cause quant à ce qu’il allait faire de son VMP.

[84] Conformément au paragraphe 15.18.1 de la Directive, l’administrateur général a examiné toutes les circonstances et a exercé son pouvoir discrétionnaire en approuvant les frais d’expédition d’un conteneur de 40 pieds et en demandant au fonctionnaire de payer les frais supplémentaires correspondant à l’expédition séparée de deux conteneurs de 20 pieds. L’administrateur général a décidé de payer le montant maximal auquel le fonctionnaire aurait eu droit s’il avait utilisé un seul conteneur de 40 pieds et de faire assumer par ce dernier les frais d’entreposage engagés en raison de son choix.

[85] Par conséquent, je souscris aux arguments de l’employeur selon lesquels, n’eussent été la lenteur de la prise de décision et une certaine indécision du fonctionnaire, le VMP de ce dernier aurait pu être expédié avec ses effets mobiliers en août 2017 dans un seul conteneur de 40 pieds pour éviter d’engager des frais supplémentaires pour l’expédition d’un deuxième conteneur de 20 pieds. Cette option aurait été plus raisonnable pour le public canadien et aurait probablement été plus pratique pour lui aussi, puisqu’il aurait pu utiliser son véhicule plus tôt lorsqu’il est retourné à Ottawa. En fin de compte, ses hésitations l’ont conduit à prendre la décision tardive, en novembre, d’expédier son VMP à Ottawa.

[86] Bien qu’aucune disposition de la Directive n’exige que les VMP soient expédiés avec les effets mobiliers, l’administrateur général a examiné toutes les circonstances et a appliqué son pouvoir discrétionnaire d’approuver ou non les frais d’expédition et d’entreposage.

[87] Dans de telles circonstances, il était raisonnable pour l’employeur d’exiger du fonctionnaire qu’il assume une partie des frais de réinstallation. Le fonctionnaire ne s’est pas acquitté de son fardeau de démontrer que le refus de l’employeur d’assumer les frais d’entreposage et une partie des frais d’expédition du VMP du fonctionnaire de Manille à Ottawa constitue une violation du paragraphe 15.18.1 de la Directive. Par conséquent, le refus de l’employeur ne constitue pas une violation de la convention collective.

[88] Le fonctionnaire a également fait valoir que le fait de lui demander d’assumer une partie des frais d’expédition et l’intégralité des frais d’entreposage ne respectait pas le principe d’équivalence qui s’applique à l’ensemble des directives. Je conclus que le fonctionnaire n’a pas réussi à établir qu’il a été placé dans une situation moins favorable que celle dans laquelle il se serait trouvé s’il avait été en service au Canada. Le fonctionnaire n’a fourni aucun renseignement permettant de comparer sa situation à celle dans laquelle il se serait trouvé en ce qui concerne son VMP s’il avait travaillé au Canada. Par ailleurs, le principe d’équivalence doit être appliqué « dans la mesure du possible et du pratique ». Ce principe ne remet pas en cause le large pouvoir discrétionnaire dont dispose l’employeur pour approuver les frais d’expédition et d’entreposage d’un VMP.

[89] Bien que je considère comme non fondée et gratuite l’allégation formulée par l’employeur dans ses arguments selon laquelle le fonctionnaire n’avait jamais eu l’intention de vendre son véhicule aux Philippines, je ne vois aucune raison d’intervenir dans sa décision finale, qui était raisonnable (voir Nova Scotia, qu’il a invoquée).

[90] Je compatis avec le fonctionnaire qui a dû concilier ses obligations professionnelles et personnelles, comme tout autre agent du service extérieur qui s’apprête à rentrer chez lui après une affectation à l’étranger. Toutefois, je dois donner effet au paragraphe 15.18.1, tel qu’il est libellé.

[91] La Directive étant une directive du CNM qui s’applique aux fonctionnaires syndiqués affectés à l’étranger, il incombe au CNM d’en modifier les dispositions ou d’y ajouter des dispositions, au besoin. Mon pouvoir est limité par le libellé convenu.

[92] Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

(L’ordonnance apparaît à la page suivante)


V. Ordonnance

[93] L’objection préliminaire concernant le respect du délai est rejetée.

[94] Le grief est rejeté.

Le 11 septembre 2023.

Traduction de la CRTESPF

Patricia H. Harewood,

une formation de la Commission des

relations de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral

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