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Dossier de la Commission : 590-18-46501

 

 

AFFAIRE CONCERNANT UNE COMMISSION DE L’INTÉRÊT PUBLIC

EN VERTU DE LA LOI SUR LES RELATIONS DE TRAVAIL

DANS LE SECTEUR PUBLIC FÉDÉRAL

et une demande d’établissement d’une commission de l’intérêt public touchant l’Alliance de la Fonction publique du Canada et le Personnel des fonds non publics, Forces canadiennes – catégorie de l’exploitation – Kingston

 

 

Commission de l’intérêt public :

 

Jesse Kugler, président

Sebastien Huard, représentant de l’employeur

Joe Herbert, représentant de l’agent négociateur

 

Pour l’agent négociateur :

MaryAnne Laurico, représentante régionale, présidente du syndicat

Sarah Allen, agente de recherche

Tim McIntyre, représentant régional

Kristofer Klith, représentant local

Robin Delve, représentant local

 

Pour l’employeur :

Amy Lecompte

Andréa Kelly

Diana Guinée

Ryan Thompson

 

 

Audiences tenues à Ottawa (Ontario), les 29 et 30 août 2023, et par vidéoconférence le 28 septembre 2023. Séance exécutive tenue le 2 novembre 2023.

 

(Traduction de la CRTESPF)


 

Contexte

[1] Le présent document est le rapport de la Commission de l’intérêt public (la « Commission ») établie en vertu de la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral, L.C. 2003, ch. 22, art. 2 (la « Loi ») concernant le renouvellement de la convention collective conclue entre l’Alliance de la Fonction publique du Canada (AFPC) et le Personnel des fonds non publics, Forces canadiennes, catégorie de l’exploitation – Kingston (« PFNP‑Kingston » ou l’« employeur »).

[2] Le mandat de l’employeur est de fournir des services aux membres des Forces canadiennes et à leurs familles afin d’améliorer le moral et le bien-être de la communauté militaire et de contribuer à la préparation opérationnelle et à l’efficacité des Forces canadiennes. L’employeur remplit ce mandat par la prestation de trois programmes principaux : i) les Économats des Forces canadiennes (CANEX); ii) les services financiers du RARM; iii) les programmes de soutien du personnel.

[3] En résumé, CANEX est un système de points de vente au détail et de restauration exploités dans les bases, escadres, unités et stations des Forces canadiennes pour le bénéfice et la commodité du personnel militaire et de leurs familles. En plus de répondre aux besoins quotidiens de la communauté militaire en matière de vente au détail, CANEX soutient les membres des Forces armées canadiennes et leurs familles en utilisant un pourcentage de ses revenus pour soutenir d’autres activités visant à améliorer le moral et le bien-être. Les services financiers du RARM offrent une assurance vie et invalidité aux membres des Forces armées canadiennes. Les programmes de soutien du personnel comprennent une large gamme de services récréatifs, de conditionnement physique et communautaire qui améliorent la qualité de vie, le moral et la forme physique de la communauté militaire.

[4] Le Personnel des fonds non publics (PFNP) emploie environ 4 000 personnes dans ses 48 bases, escadres et unités au Canada, en Europe et à l’échelle internationale. Le PFNP compte vingt‑deux unités de négociation au Canada. Douze de ces unités de négociation sont représentées par l’Union internationale des travailleurs et travailleuses unis de l’alimentation et du commerce (TUAC) et dix sont représentées par l’AFPC.

[5] Le 10 juin 1982, l’AFPC a été accréditée comme agent négociateur exclusif de tous les employés du PFNP-Kingston appartenant à la catégorie de l’exploitation. Les parties ont négocié des conventions collectives successives depuis ce temps et entretiennent une relation de négociation collective longue et mature.

[6] Les services offerts par le PFNP dans chaque base des Forces canadiennes varient en fonction des besoins de la communauté militaire desservie. L’unité de négociation du PFNP‑Kingston représentée par l’AFPC compte environ 97 employés, dont 44 sont à temps plein et 53 sont à temps partiel. Au moment de l’audience, il y avait environ 26 postes vacants au sein de l’unité de négociation, dont 3 étaient à temps plein et 23 étaient à temps partiel. L’unité de négociation comprend les employés qui travaillent dans des classifications d’« exploitation » liées à l’exploitation du supermarché CANEX, du CANEX du CMR, du mess des officiers de Fort Frontenac, du mess des officiers et des cadres du CMR, du club de golf et de curling de la garnison, du mess des élèves‑officiers et centre de loisirs du CMR, de Garrison Lanes, du conditionnement physique et des sports, des loisirs communautaires, du Musée des communications et de l’électronique, des messes de la base des Forces canadiennes Kingston et de l’athlétisme du CMR.

Négociation collective

[7] La plus récente convention collective entre l’AFPC et le PFNP-Kingston a expiré le 30 juin 2022.

[8] L’AFPC a publié un avis de négociation en vue du renouvellement de la convention collective le 14 juin 2022. Les parties ont participé à des négociations collectives du 10 au 12 janvier 2023. Bien que certains progrès aient été réalisés, de nombreuses questions monétaires et non monétaires, dont les salaires, sont demeurées en suspens.

[9] Le 17 janvier 2023, l’AFPC a déposé une demande auprès de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral en vue de créer une Commission de l’intérêt public, et cette Commission a par la suite été créée.

[10] Les 29 et 30 août ainsi que le 28 septembre 2023, une audience a été convoquée devant la Commission. Avec l’aide de la Commission, les parties ont participé à une médiation et ont pu régler certaines des questions en litige. Fait important, les parties ont convenu que la convention collective renouvelée s’appliquerait pour une durée de trois ans. Elles ont également convenu des augmentations salariales et des rajustements salariaux suivants pendant cette période :

• 2022 : augmentation salariale générale de 3,5 % et rajustement de 2,50 % selon la grille

 

• 2023 : augmentation salariale générale de 3,0 %

 

• 2024 : augmentation salariale générale de 2,0 % et rajustement de 1,0 % selon la grille

 

[11] Les parties n’ont pas réussi à s’entendre sur le rajustement approprié de la grille salariale pour 2023, l’AFPC proposant 3,5 % et le PFNP-Kingston soutenant qu’il ne devrait y avoir aucun rajustement de la grille en 2023. En plus de cette question, les parties n’ont pas réussi à s’entendre sur vingt-six propositions non salariales de l’AFPC. Par conséquent, l’audience devant la Commission a porté sur les questions en suspens.

Le rapport de la CIP sur le PFNP-Petawawa

[12] Le 31 octobre 2023, la Commission de l’intérêt public, présidée par l’arbitre Kaplan (la « Commission Kaplan »), a publié son rapport concernant l’unité de négociation de l’AFPC à PFNP-Petawawa. Comme dans la présente affaire, l’AFPC et le PFNP-Petawawa ont convenu d’un mandat de trois ans ainsi que des augmentations et des rajustements salariaux mentionnés au paragraphe 10 ci-dessus. Comme dans la présente affaire, la seule question en litige concernant les salaires était le rajustement de la grille salariale pour 2023, les parties prenant devant la Commission Kaplan les mêmes positions qu’elles ont prises devant cette Commission.

[13] Dans son rapport, la Commission Kaplan a recommandé un rajustement salarial de 1,75 % pour 2023. Outre la recommandation du libellé sur la rétroactivité et la suppression d’une note sur la rémunération, la Commission Kaplan n’a recommandé aucune autre proposition monétaire ou non monétaire. La Commission Kaplan a estimé que l’accent devait être mis exclusivement sur les salaires parce que la question des salaires était au centre des discussions menées par les parties dans le cadre de la médiation et que cela représentait la meilleure voie à suivre pour parvenir à une convention collective renouvelée. Cette Commission partage cette approche.

[14] La Commission a tenu sa séance exécutive le 2 novembre 2023, et les deux représentants ont présenté des observations sur la pertinence et l’application des recommandations de la Commission Kaplan dans cette affaire.

Le contexte législatif

[15] En vertu de l’article 172 de la Loi, la Commission a été créée pour aider l’AFPC et le PFNP-Kingston à conclure une convention collective renouvelée. La Loi prévoit que la Commission fournira cette aide en délivrant au président « un rapport exposant les résultats de son intervention ainsi que ses conclusions et recommandations ». À moins d’entente entre les parties, le rapport de la Commission est non-exécutoire et ne sert qu’à aider les parties dans leurs efforts pour conclure un renouvellement de convention collective.

[16] L’article 175 de la Loi prescrit les éléments que la Commission doit considérer dans ses délibérations. L’article 175 de la Loi prévoit ce qui suit :

175. Dans la conduite de ses séances et l’établissement de son rapport, la commission de l’intérêt public prend en considération les facteurs qui, à son avis, sont pertinents et notamment :

a) la nécessité d’attirer au sein de la fonction publique des personnes ayant les compétences voulues et de les y maintenir afin de répondre aux besoins des Canadiens;

b) la nécessité d’offrir au sein de la fonction publique une rémunération et d’autres conditions d’emploi comparables à celles des personnes qui occupent des postes analogues dans les secteurs privé et public, notamment les différences d’ordre géographique, industriel et autre qu’elle juge importantes;

c) la nécessité de maintenir des rapports convenables, quant à la rémunération et aux autres conditions d’emploi, entre les divers échelons au sein d’une même profession et entre les diverses professions au sein de la fonction publique;

d) la nécessité d’établir une rémunération et d’autres conditions d’emploi justes et raisonnables, compte tenu des qualifications requises, du travail accompli, de la responsabilité assumée et de la nature des services rendus;

e) l’état de l’économie canadienne et la situation fiscale de l’État fédéral.

 

[17] Les parties ont présenté à la Commission des arguments écrits et oraux longs et complets portant sur l’application de ces facteurs aux questions en litige. Bien qu’il ne soit ni pratique ni nécessaire de réciter ces arguments dans leur intégralité, la Commission les a soigneusement examinés avant de formuler ses recommandations.

Les arguments du syndicat

[18] L’AFPC a soutenu que les facteurs suivants soutenaient les propositions qu’elle sollicite dans le cadre des négociations collectives : le recrutement et le maintien en poste, la comparabilité et les tendances salariales récentes dans la conjoncture économique et financière actuelle.

[19] En ce qui concerne le recrutement et le maintien en poste, l’AFPC soutient que le PFNP‑Kingston a un problème qui est à la fois [traduction] « grave » et [traduction] « persistant ». L’AFPC fait remarquer que le Plan stratégique 2022-2025 des Services de bien-être et moral des Forces canadiennes (SBMFC) reconnaît explicitement ce problème. Il précise que la raison pour laquelle l’employeur refuse sa proposition de [traduction] « banque de congés des représentants syndicaux » trouve sa source dans la volonté de l’employeur d’éviter d’exacerber ses problèmes actuels de dotation. De même, l’AFPC souligne que la raison pour laquelle l’employeur a rejeté sa proposition de congé annuel est également fondée sur sa préoccupation à l’égard de la [traduction] « pénurie de personnel » qu’il connaît. Selon l’AFPC, ces problèmes de recrutement et de maintien en poste sont inextricablement liés à la [traduction] « rémunération non concurrentielle » qui doit être abordée dans le cadre de cette ronde de négociations collectives.

[20] En ce qui concerne la comparabilité, l’AFPC soutient que l’administration publique centrale est la meilleure et la plus appropriée. Elle soutient qu’une comparaison entre les postes de PFNP-Kingston et les postes de comparaison pertinents au sein des unités de négociation PA, SV, EB et TC représentées par l’AFPC révèle une disparité salariale importante qui doit être corrigée. L’AFPC s’appuie sur une décision d’arbitrage de différends entre l’AFPC et les opérateurs d’enquêtes statistiques rendue par un conseil d’arbitrage présidé par l’arbitre Mitchnick en 2022 pour la proposition selon laquelle l’administration publique centrale demeure un élément de comparaison pertinent et approprié pour les organismes distincts exerçant leurs activités dans le secteur public fédéral en général. L’AFPC nie que les règlements conclus entre le TUAC et le PFNP constituent des éléments de comparaison appropriés, et souligne qu’il n’y a pas eu de tendance historique ou de relation entre l’AFPC et les résultats des négociations du TUAC.

[21] En ce qui a trait aux récentes tendances salariales, l’AFPC souligne l’effet paralysant de l’inflation sur les salaires réels et la tendance écrasante des arbitres à tenir compte de ce fait en augmentant les salaires lors du règlement des conventions collectives par arbitrage de différends. L’AFPC soutient que le présent cas ne devrait pas être différent et que sa proposition sur les salaires tient mieux compte de la situation économique actuelle et des tendances arbitrales. L’AFPC soutient que la Commission devrait rejeter l’argument de l’incapacité de payer invoqué par l’employeur, soulignant que le principe s’applique peu dans le contexte des activités de l’employeur dans la fonction publique en général, comme le PFNP. Par conséquent, dans les circonstances, l’AFPC demande que la Commission recommande sa proposition salariale.

[22] Enfin, l’AFPC soutient que ses propositions non salariales sont raisonnables, nécessaires et devraient être recommandées par la Commission.

Les arguments de l’employeur

[23] L’employeur soutient qu’il s’agit d’une organisation gouvernementale unique au sein de la fonction publique et que le résultat approprié de la négociation collective doit correspondre à cette réalité. Contrairement à l’administration publique centrale, l’employeur soutient qu’il n’est pas assujetti aux politiques et lignes directrices publiées par le Conseil du Trésor, et qu’il ne reçoit pas de financement directement du Conseil du Trésor. L’employeur soutient qu’il est soumis à plusieurs contraintes génératrices de revenus qui le positionnent de façon unique avec le secteur public fédéral.

[24] L’employeur souligne qu’il est financé différemment des organismes relevant de l’administration publique centrale. Il soutient qu’environ soixante pour cent de son financement provient directement des services fournis à la communauté militaire qu’elle dessert alors que seulement quarante pour cent du financement provient du ministère de la Défense nationale par l’entremise du Conseil du Trésor. Selon l’employeur, son modèle de financement unique, ainsi que son indépendance opérationnelle, signifie qu’il est inacceptable de reproduire les résultats des négociations collectives dans l’administration publique centrale du PFNP-Kingston. L’employeur soutient en outre que le recours de l’AFPC au système de la Classification nationale des professions (CNP) est vicié parce que la CNP est trop générale et vague pour permettre une application adéquate des principes fondamentaux de reproduction et de comparabilité.

[25] L’employeur soutient plutôt que les éléments de comparaison les plus appropriés pour l’unité de négociation de l’AFPC au sein du PFNP-Kingston sont le marché privé et les éléments de comparaison internes. Ce qui importe le plus, du point de vue de l’employeur, ce sont les résultats de la convention collective librement négociée qu’il a conclue avec les TUAC. L’employeur soutient que les résultats des TUAC, qui s’appliquent aux mêmes types d’employés qui exécutent le même type de travail pour le même employeur, constituent la meilleure preuve de la négociation collective libre dans la présente affaire. Étant donné que les résultats obtenus par les TUAC ne soutiennent pas les demandes de l’AFPC, l’employeur demande que sa position sur les salaires soit recommandée par la Commission. L’employeur fait également remarquer que si les demandes financières de l’AFPC étaient satisfaites, les services qu’elle fournit seraient touchés défavorablement.

[26] L’employeur nie qu’il y ait un problème de recrutement et de maintien en poste au PFNP‑Kingston, et certainement pas un problème qui justifierait l’acceptation des propositions de l’AFPC. L’employeur soutient que la capacité de recruter et de retenir est difficile sur l’ensemble du marché du travail en général, et que plusieurs des postes vacants actuellement au sein du PFNP-Kingston demeurent vacants en raison d’un manque de financement et non, comme le laisse entendre l’AFPC, en raison d’une incapacité de recruter et de garder du personnel.

[27] En ce qui concerne les quelque vingt-six propositions non salariales avancées par l’AFPC, l’employeur les qualifie de propositions révolutionnaires pour lesquelles il n’y a aucune preuve de besoin démontré et qui ne sont pas soutenues par les données de comparaison pertinentes. Par conséquent, l’employeur demande à la Commission de les rejeter.

Discussion

[28] La Commission a pour tâche d’aider les parties à conclure une convention collective renouvelée en formulant des recommandations sur les questions en litige après avoir examiné, entre autres, les facteurs prévus à l’article 175 de la Loi. Les parties, à juste titre, ont consacré une bonne partie de leur temps à traiter des questions salariales. Ce rapport fait de même.

[29] La nécessité d’attirer et de retenir des employés compétents pour répondre aux besoins de la communauté militaire du PFNP-Kingston va de soi. Le PFNP joue un rôle important dans l’efficacité globale des Forces armées canadiennes. L’AFPC affirme que l’employeur a reconnu ses problèmes de dotation et soutient que ce fait est confirmé par le nombre important de postes de l’unité de négociation qui demeurent vacants. L’AFPC affirme que la solution à ce problème est une augmentation salariale considérable. L’employeur affirme le contraire, alléguant que les postes vacants existent parce qu’il n’a pas été en mesure d’obtenir du financement pour les combler et non, comme l’affirme l’AFPC, parce que les taux de rémunération sont insuffisants pour attirer et conserver du personnel. Après avoir examiné les documents et les arguments des parties, il n’est pas possible pour la Commission de conclure s’il existe un problème de recrutement et de maintien en poste au PFNP-Kingston. Nous accordons donc peu de poids à ce facteur.

[30] Le présent cas, comme la plupart des autres, repose sur l’application des principes de comparabilité et de reproduction qui sous-tendent les alinéas 175a) et 175b) de la Loi. La Commission doit tenir compte des comparateurs publics et privés ainsi que de la nécessité de maintenir des relations appropriées en ce qui concerne les conditions d’emploi entre les professions du secteur public pour parvenir à ses recommandations. Bien qu’elles soient pertinentes, les ententes volontaires conclues entre l’APN et les TUAC ne permettent pas d’établir une tendance en soi que l’AFPC et le PFNP-Kingston doivent suivre. Les documents dont dispose la Commission révèlent que l’AFPC n’a pas suivi par le passé les résultats des négociations collectives auxquelles sont parvenus les PFNP et les TUAC, et cette notion est soutenue par la position actuelle de l’employeur sur les salaires qui est supérieure au règlement qu’il a conclu avec les TUAC. Dans le même ordre d’idées, les documents dont dispose la Commission n’établissent pas que l’AFPC et le PFNP‑Kingston reproduisent toujours le modèle établi par l’AFPC dans l’administration publique centrale.

[31] En fin de compte, les facteurs législatifs énoncés dans la Loi et les principes de reproduction et de comparabilité nous amènent, tout comme la Commission Kaplan, à conclure que le point approprié se situe à mi-chemin entre les positions respectives des parties. Par conséquent, à notre avis, le rajustement approprié de la grille salariale pour 2023 est de 1,75 %.

[32] L’AFPC a présenté des propositions visant à harmoniser les taux de rémunération des employés de différentes bases qui exécutent le même travail ou un travail similaire important, un objectif valable du point de vue des relations de travail, comme l’a souligné la Commission Kaplan, mais qui dépasse notre compétence, qui se limite à PFNP-Kingston.

[33] Avant de conclure notre discussion sur les salaires, nous nous sentons obligés de formuler deux observations. Premièrement, l’employeur a soutenu qu’il était limité par les restrictions ou le « mandat » imposé par le gouvernement au financement public qu’il reçoit et a exhorté la Commission à formuler ses recommandations en fonction de ces contraintes. Nous ne retenons pas cette prétention. À notre avis, cela entraverait le vaste pouvoir discrétionnaire conféré à la Commission en vertu de l’article 175 de la Loi de tenir compte des facteurs énumérés et de formuler des recommandations pour aider les parties à conclure une convention collective renouvelée. Deuxièmement, l’employeur a fait valoir qu’il n’était pas en mesure de financer les propositions monétaires avancées par l’AFPC et que cela aurait une incidence négative sur la prestation des services à la communauté militaire de PFNP-Kingston. Les arbitres ont constamment rejeté l’idée que les employeurs du secteur public peuvent invoquer une incapacité de payer pour éviter les augmentations salariales normatives. Quoi qu’il en soit, sans trancher cette question, il incombe à l’employeur d’établir qu’il est incapable de payer, et nous ne sommes pas convaincus que l’employeur s’est acquitté de ce fardeau en se fondant sur les éléments devant la Commission.

[34] L’AFPC a présenté une myriade de propositions non salariales. Elles vont de l’amélioration des congés pour activités syndicales à l’augmentation du nombre de jours fériés en passant par la prestation d’avantages de préretraite et d’avantages postérieurs au départ à la retraite semblables à ceux offerts dans l’administration publique centrale. Après avoir pris en considération les principes de comparabilité, de reproduction et de nécessité démontrée ainsi que le mandat de la Commission, nous ne croyons pas que la recommandation de ces principes aidera les parties à conclure une convention collective renouvelée. Un certain nombre d’entre elles sont qualifiées à juste titre de propositions innovatrices. Certaines ne sont pas étayées par la preuve d’un besoin démontré tandis que d’autres ne semblent pas normatives. Quelques-unes semblaient dépasser la compétence de la Commission ou étaient régies par la loi. Dans les circonstances, la Commission refuse de recommander l’une ou l’autre des propositions non salariales de l’AFPC.

Recommandations

[35] Pour les raisons qui précèdent, la Commission recommande :

i. Que les éléments convenus entre les parties soient intégrés à la convention collective renouvelée.

 

ii. Salaires comme suit :

 

• 1ᵉʳ juillet 2022 : 3,5 % d’augmentation salariale générale + 2,5 % de rajustement salarial

 

• 1ᵉʳ juillet 2023 : 3 % d’augmentation salariale générale + 1,75 % de rajustement salarial

 

• 1ᵉʳ mai 2024 : 2 % d’augmentation salariale générale + 1 % de rajustement salarial

 

iii. La rémunération rétroactive sera versée à tous les employés qui étaient en service pendant toute la durée de la convention collective.

 

Fait le 30 novembre 2023.

 

« Jesse Kugler »

___________________________________

Jesse Kugler, président

 

Je ne suis pas d’accord. Voir le document ci-joint.

___________________________________

Sebastien Huard, représentant de l’employeur

 

Addendum ci-joint.

___________________________________

Joe Herbert, représentant de l’AFPC

 

Traduction de la CRTESPF

DISSIDENCE DU REPRÉSENTANT DE L’EMPLOYEUR

Je ne suis pas en mesure d’approuver deux aspects des recommandations finales du président : le rajustement salarial supplémentaire de 1,75 % qui entrera en vigueur le 1er juillet 2023 et l’application de la rémunération rétroactive à tous les anciens employés.

 

Rajustement salarial

Comme l’a précisé le président, les propositions finales des parties sur les salaires ne divergeaient que sur la question de savoir si un rajustement salarial supplémentaire était justifié au cours de la deuxième année de l’entente de renouvellement (2023). Le Syndicat a proposé un rajustement salarial supplémentaire de 3,5 %, tandis que l’employeur n’en a offert aucun. Le président a recommandé un ajustement salarial de 1,75 %.

 

Compte tenu des efforts déjà consentis par les deux parties pour en arriver presque à une entente, je suis d’avis que tout rajustement supplémentaire devrait être soutenu par une preuve claire d’un besoin démontré. Nous n’avons pas reçu de tels éléments de preuve. Je ne peux donc pas soutenir la recommandation d’un rajustement salarial supplémentaire de 1,75 % à compter du 1er juillet 2023.

 

Contrairement à ce que prétend le syndicat, la fonction publique fédérale n’est pas un comparateur approprié. L’historique de négociation des parties ne soutient pas une telle position.

 

Des rapports antérieurs de CIP relatifs à d’autres endroits n’étayent pas non plus la conclusion selon laquelle il devrait y avoir une comparabilité entre les employés du PFNP et les employés de l’administration publique centrale. Au cours de la dernière ronde de négociations, après avoir entendu des arguments semblables à ceux présentés à la présente Commission au sujet des groupes de comparaison appropriés, la présidente Flaherty a déclaré dans des rapports unanimes de CIP pour la BFC Valcartier et la BFC Bagotville qu’il était approprié d’envisager des postes similaires dans les secteurs privé et public et a finalement recommandé des améliorations salariales qui ne reproduisaient pas les augmentations salariales négociées pour l’administration publique centrale.

 

J’aurais accordé plus d’importance à la comparaison avec les groupes internes d’autres bases, où des postes identiques ou semblables offrent des programmes et des services semblables, des fonctions semblables et dans les mêmes cadres législatifs et financiers, qu’ils soient ou non représentés par l’AFPC.

 

L’employeur avait présenté des règlements avec trois unités de négociation différentes des TUAC qui ont été ratifiés à la fin de l’été. Même si les règlements de l’AFPC et des TUAC ne se succèdent pas nécessairement d’un endroit à l’autre, cela reste une indication convaincante de ce que ces parties pourraient convenir d’elles-mêmes.

 

Rémunération rétroactive

Je ne suis pas du même avis que le président quant à la pertinence de la rémunération rétroactive. Les parties dans la présente affaire ont une pratique acceptée de limiter la rémunération rétroactive aux employés actifs au moment de la ratification. Les règlements récents des TUAC prévoient que les anciens employés ne recevront un salaire rétroactif que s’ils ont quitté leur emploi en raison de l’affectation d’un membre de leur famille à une autre base. Et les rapports unanimes de CIP pour Bagotville et Valcartier lors de la dernière ronde de négociations ne traitaient pas de la rétroactivité salariale.

 

Pour ces motifs, je ne suis pas d’accord avec la recommandation du président concernant la rémunération rétroactive.


Addendum

Les questions en litige dans le présent cas reprenaient en grande partie celles dans PFNP (Petawawa) et AFPC, le 31 octobre 2023 (Kaplan). Par conséquent, mes observations dans cette affaire, dans la mesure où les questions en litige sont les mêmes, s’appliquent également dans le présent cas. Cela dit, il est également significatif que les rapports finaux des commissions respectives soient si similaires dans leurs conclusions.

 

Fait le 21 novembre 2023.

 

 

Joe Herbert

 

Représentant de l’AFPC

 

 

Traduction de la CRTESPF

 

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