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Date: 20231129

Dossier: 771-02-41813

 

Référence: 2023 CRTESPF 111

Loi sur la Commission

des relations de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral et

Loi sur l’emploi dans la

fonction publique

Armoiries

Devant une formation de la

Commission des relations

de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral

ENTRE

 

Abdelhakim Chabi

plaignant

 

et

 

ADMINISTRATEUR GÉNÉRAL

(Services publics et Approvisionnement Canada)

 

Intimé

et

AUTRES PARTIES

Répertorié

Chabi c. Administrateur général (Services publics et Approvisionnement Canada)

Affaire concernant une plainte d’abus de pouvoir aux termes de l’alinéa 77(1)b) de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique

Devant : Goretti Fukamusenge, une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

Pour le plaignant : Lui-même

Pour l’intimé : Hugo Giguère

Pour la Commission de la fonction publique : Claude Zaor, analyste principal


MOTIFS DE DÉCISION

I. Plainte devant la Commission

[1] Le 9 juin 2020, Abdelhakim Chabi (le « plaignant ») a présenté une plainte auprès de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (la « Commission ») en vertu de l’alinéa 77(1)b) de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique (L.C. 2003, ch. 22, art. 12 et 13).

[2] Le plaignant a allégué que l’administrateur général de Services publics et Approvisionnement Canada (l’« intimé ») avait abusé de son pouvoir dans le choix du processus de nomination. Il a contesté la décision de l’intimé d’avoir eu recours à un processus de nomination non annoncé (numéro du processus 2020-SVC-INA-HQ-369830) pour doter un poste de gestionnaire à la planification stratégique et d’investissement, au groupe et au niveau CS-04, au sein de la Direction générale des services numériques.

[3] La Commission a fait plusieurs tentatives pour organiser une conférence préparatoire à l’audience, mais elle n’a pas pu rejoindre le plaignant.

[4] La question à considérer dans la présente affaire est de savoir si la plainte est réputée avoir été retirée. Pour les motifs exposés ci-dessous, la plainte est considérée comme ayant été retirée. Le dossier est fermé.

II. Résumé du contexte

[5] En vertu de l’article 11 du Règlement concernant les plaintes relatives à la dotation dans la fonction publique (DORS/2006-6; le « Règlement ») une plainte est présentée par écrit auprès de la Commission et comporte entre autres les noms et coordonnées du plaignant. La Commission a créé un formulaire à cet effet.

[6] Dans le formulaire de dépôt de plainte signé le 9 juin 2020, le plaignant a indiqué une adresse électronique du travail, une adresse postale du lieu du travail ainsi qu’un numéro de téléphone portable.

[7] Le 12 août 2020, la Commission a invité les parties à participer à une médiation, en utilisant l’adresse électronique fournie par le plaignant. Le plaignant a répondu au courriel et a donné son accord.

[8] Les parties ont participé à une médiation le 21 janvier 2021. Elles n’ont pas pu régler le litige. Selon les commentaires contenus dans le rapport de médiation, le plaignant allait confirmer s’il allait poursuivre ou non le processus. Ces commentaires comprenaient ce qui suit : « Le Plaignant va décider si il [sic] poursuit le process [sic]. Il va consulter le syndicat. »

[9] Le 21 juillet 2022, la Commission a informé les parties que le dossier avait été sélectionné pour faire partie du projet pilote de conférences de règlement. Les parties étaient invitées d’aviser les Services de médiation et de règlement des différends de la Commission, au plus tard le 28 juillet 2022, si elles participeront à la conférence de règlement.

[10] Entre-temps, à la demande de l’intimé, la procédure a été mise en suspens jusqu’à la fin 2022.

[11] Le 6 janvier 2023, la Commission a de nouveau envoyé un avis aux parties selon lequel le dossier avait été identifié pour une conférence de règlement. L’avis pour le plaignant a été envoyé à l’adresse de courriel du travail que le plaignant avait indiquée dans le formulaire de dépôt de plainte. Le plaignant n’y a pas répondu.

[12] Le 12 janvier 2023, la Commission a reçu un message de l’intimé selon lequel le plaignant aurait quitté pour un autre ministère. Le message indique ce qui suit :

[…]

Le présent courriel fait suite à votre correspondance ci-dessous invitant les parties à participer à une conférence de règlement.

Nos dossiers indiquent que le plaignant a accepté une mutation au ministère […] en date du 1er octobre 2021, par conséquent il est possible qu’il n’ait pas reçu votre correspondance puisqu’elle a été acheminée à l’adresse courriel qui était valide avant de quitter notre organisation. De plus, nous ne possédons pas ses nouvelles coordonnées.

[…]

 

[13] Le 27 janvier 2023, le greffe de la Commission a tenté d’entrer en contact avec le plaignant au numéro de téléphone indiqué dans le formulaire de dépôt de plainte. Le greffe a laissé un message concernant son dossier et lui a demandé d'appeler la Commission. Puisqu’il n’avait pas reçu de réponse, le greffe a essayé de nouveau, et, à ce moment, le numéro était hors service.

[14] Le dossier a été mis au calendrier des audiences pour les 2 et 3 mai 2023.

[15] Le 28 mars 2023, la Commission a envoyé un message aux parties en utilisant cette fois-ci l’adresse électronique du nouveau lieu de travail du plaignant. Le message indiquait que la Commission souhaitait organiser une conférence de gestion des cas pour le 6 ou le 7 avril 2023, et demandait aux parties de fournir leurs disponibilités au plus tard le 4 avril 2023.

[16] La Commission a alors reçu un message automatisé d’absence venant d’un compte courriel qui semble être celui du plaignant. Il indiquait que le plaignant ne travaillait plus au nouveau lieu de travail. Le message se lit comme suit :

Note that I left […], for any concern, please contact my manager [nom exclu]

Notez que je ne travaille plus a [sic] […], pour toute question veuillez contacter mon gestionnaire [nom exclu].

 

[17] Le même jour, afin de joindre le plaignant, le greffe de la Commission a communiqué avec le gestionnaire par courriel comme suit :

Bonjour,

J’essaie de contacter M. Abdelhakim Chabi au sujet d’un dossier qu’il a avec le [sic] CRTESPF. Est-il possible de fournir l’adresse courriel actuelle de M. Chabi? Ou de bien vouloir aviser M. Chabi de contacter le [sic] CRTESPF à : director.directeur@fpslreb-crtespf.gc.ca.

[…]

 

[18] Le 13 avril 2023, le greffe de la Commission a fait un suivi auprès du gestionnaire par courriel :

[…]

Nous avons essayé de rejoindre Abdelhakim Chabi, sans succès. Une audience concernant Chabi, est prévue pour les 2 et 3 mai, [sic] 2023. Le message automatique ci-joint indique de vous contacter. Nous apprécierons grandement votre réponse.

[…]

 

[19] Le 14 avril 2023, le gestionnaire a répondu que le plaignant travaillait maintenant pour un autre ministère. Son message se lit comme suit :

[Traduction]

[…]

Chabi a transféré à […] au début d’avril 2022. Cela dit, je ne vois pas son courriel ou ses informations dans GEDS. N’hésitez pas à me faire savoir si vous souhaitez plus d’informations.

Merci,

[…]

 

[20] Le 14 avril 2023, le greffe de la Commission a tenté d’envoyer un message au plaignant à l’adresse courriel du nouveau travail, sans succès. Le message a été rejeté.

[21] Le 24 avril 2023, la Commission a informé les parties que l’audience prévue pour les 2 et 3 mai 2023 était annulée. Le message a été envoyé à l’adresse électronique que le plaignant avait fournie dans le formulaire de dépôt de plainte.

III. Motifs

[22] L’article 8.2 du Règlement régit le retrait réputé. Cette disposition ne prévoit pas les cas dans lesquels une plainte est réputée avoir été abandonnée. Elle énonce simplement que la Commission peut :

8.2 […] envoyer aux parties un avis d’examen de l’état de l’instance exigeant que celles-ci présentent leurs observations indiquant les raisons pour lesquelles elle ne devrait pas considérer la plainte comme ayant été retirée et, à défaut de réponse dans le délai qu’elle fixe, considérer la plainte comme ayant été retirée.

8.2 … send a notice of status review to each of the parties that requires them to make submissions stating the reasons why the complaint should not be considered to be withdrawn and, if there is no response within the period specified by the Board, may consider the complaint to be withdrawn.

 

[23] Dans la présente plainte, la Commission n’a pas pu s’enquérir des observations de toutes les parties conformément à cette disposition, puisqu’elle ne pouvait rejoindre le plaignant.

[24] Cependant, en vertu de l’article 22 de la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (L.C. 2013, ch. 40, art. 365), « [l]a Commission peut trancher toute affaire ou question dont elle est saisie sans tenir d’audience ». La Commission estime qu’elle a des éléments suffisants pour trancher la question du retrait réputé.

[25] Le 21 janvier 2021, le plaignant a participé à une médiation lors de laquelle il avait indiqué qu’il allait informer la Commission s’il poursuivait sa plainte. Depuis, la Commission n’a plus eu de contacts avec le plaignant. Selon la preuve, la Commission a essayé de rejoindre le plaignant à plusieurs reprises, sans succès. Le plaignant a fourni une adresse électronique de travail lors du dépôt de sa plainte, il a changé d’emploi à deux reprises et n’a pas informé la Commission du changement de ses coordonnées.

[26] Les circonstances de la présente affaire sont similaires à celles de Patwell c. sous-ministre de l’Emploi et du Développement social, 2018 CRTESPF 37. Dans cette affaire, la Commission avait tenté de rejoindre le plaignant, sans succès. La Commission a conclu que la plainte avait été abandonnée. Je souscris aux commentaires suivants du paragraphe 31 de cette décision :

[31] […] la Commission est d’avis que le comportement du plaignant reflète le comportement de quelqu’un qui a abandonné sa plainte. L’absence de communication avec le greffe, la Commission et le défendeur et l’omission d’informer la Commission de tout changement à ses coordonnées, comme en font foi les événements précédant l’audience, combiné à son défaut de comparaître, sont suffisants pour constituer un abandon de sa plainte. L’intérêt public et une administration de la justice efficace privilégient la conclusion que la plainte soit traitée comme ayant été abandonnée.

 

[27] Ce raisonnement a d’ailleurs été adopté dans d’autres affaires de la Commission, dont Dubord c. Syndicat des employé-e-s de la sécurité et de la justice, 2018 CRTESPF 92 (voir les paragraphes 58 à 64) et Stewart c. Administrateur général (Gendarmerie royale du Canada), 2023 CRTESPF 26, au par. 27.

[28] Le plaignant avait le fardeau de la preuve de démontrer le fondement des allégations (voir Tibbs c. Sous-ministre de la Défense nationale, 2006 TDFP 8, au par. 50.) Son absence de suivi pour faire avancer sa plainte après la médiation survenue en janvier 2021 et son défaut d’informer la Commission du changement de ses coordonnées mènent à déduire que le plaignant a décidé de ne plus poursuivre sa plainte.

[29] Compte tenu des circonstances de la présente affaire, je ne crois pas qu’il serait dans l’intérêt public et une administration de la justice efficace de garder cette plainte en attente, dans l’espoir que le plaignant communique, un jour, avec la Commission pour s’enquérir de son recours.

[30] Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

(L’ordonnance apparaît à la page suivante)


 

IV. Ordonnance

[31] La plainte est considérée comme ayant été retirée. Le dossier est fermé.

Le 29 novembre 2023.

Goretti Fukamusenge,

une formation de la Commission des

relations de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral

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