Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date: 20231201

Dossier: 566-32-46703

 

Référence: 2023 CRTESPF 112

 

Loi sur la Commission des

relations de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral et

Loi sur les relations de travail dans

le secteur public fédéral

Coat of Arms

Devant une formation de la

Commission des relations

de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral

Entre

 

Monica Schiller

fonctionnaire s’estimant lésée

 

et

 

Agence canadienne d’inspection des aliments

 

employeur

Répertorié

Schiller c. Agence canadienne d’inspection des aliments

Affaire concernant un grief individuel renvoyé à l’arbitrage

Devant : Edith Bramwell, une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

Pour la fonctionnaire s’estimant lésée : Chantale Mercier, Alliance de la Fonction publique du Canada

Pour l’employeur : Jason Bruder, Agence canadienne d’inspection des aliments

Décision rendue sur la base d’arguments écrits
déposés le 10
février et les 20 et 30 mars 2023.

(Traduction de la CRTESPF)


MOTIFS DE DÉCISION

(TRADUCTION DE LA CRTESPF)

I. Grief individuel renvoyé à l’arbitrage

[1] Monica Schiller, la fonctionnaire s’estimant lésée (la « fonctionnaire ») a été nommée pour une période déterminée à titre d’adjointe au programme d’importation et d’exportation à l’Agence canadienne d’inspection des aliments (l’« employeur ») à compter du 21 août 2017 et jusqu’au 29 mars 2018, au groupe et au niveau CR-04. La nomination pour une période déterminée de la fonctionnaire a été prolongée et devait prendre fin le 31 mars 2020.

[2] Le 7 février 2020, la fonctionnaire a été informée que sa nomination pour une période déterminée ne serait pas prolongée au-delà du 31 mars 2020. L’employeur lui a envoyé le courriel suivant :

[Traduction]

[…]

Je veux confirmer, conformément à notre conversation d’aujourd'hui, que votre mandat n’est pas prolongé au-delà du 31 mars 2020. Afin de vous aider à poursuivre d’autre travail, nous vous mettrons en congé payé jusqu’au 31 mars 2020. Vous n’avez pas besoin de vous présenter au travail. Si vous devez aller au bureau d’ici le 31 mars, veuillez communiquer avec moi ou avec Heather pour prendre les dispositions nécessaires.

[…]

 

[3] La fonctionnaire a déposé un grief contestant son licenciement et alléguant que l’employeur avait manqué à son obligation de prendre des mesures d’adaptation au point de lui imposer une contrainte excessive, qu’il a omis de résoudre une question de harcèlement et que ses actes – y compris le non-renouvellement de sa nomination pour une période déterminée – constituaient de la discrimination, en violation de l’article 18 de la convention collective entre l’Agence canadienne d’inspection des aliments et l’Alliance de la Fonction publique du Canada (AFPC) pour le groupe Commis aux écritures et aux règlements, qui a expiré le 31 décembre 2018 (la « convention collective ») et de la Loi canadienne sur les droits de la personne (L.R.C. (1985), ch. H-6; LCDP). Elle a déclaré ce qui suit dans le grief :

[Traduction]

Je conteste mon licenciement ainsi que ce qui suit :

1. Je conteste le manquement de l’employeur de s’acquitter de son obligation de prendre des mesures d’adaptation à mon égard au point de subir une contrainte excessive

2. Problème de harcèlement non résolu - autres incidents notés et 18 octobre 2019 non résolu

3. Les actes de l’employeur constituent de la discrimination, ce qui constitue une violation de ma convention collective et de la Loi canadienne sur les droits de la personne (LCDP).

[…]

 

[4] Le 10 février 2023, la fonctionnaire a renvoyé son grief à l’arbitrage en vertu de l’alinéa 209(1)a) de la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral (L.C. 2003, ch. 22, art. 2; LRTSPF), qui se lit comme suit :

209 (1) Après l’avoir porté jusqu’au dernier palier de la procédure applicable sans avoir obtenu satisfaction, le fonctionnaire qui n’est pas un membre, au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, peut renvoyer à l’arbitrage tout grief individuel portant sur :

(1) An employee who is not a member as defined in subsection 2(1) of the Royal Canadian Mounted Police Act may refer to adjudication an individual grievance that has been presented up to and including the final level in the grievance process and that has not been dealt with to the employee’s satisfaction if the grievance is related to

a) soit l’interprétation ou l’application, à son égard, de toute disposition d’une convention collective ou d’une décision arbitrale;

(a) the interpretation or application in respect of the employee of a provision of a collective agreement or an arbitral award ….

 

[5] Comme l’exige le paragraphe 210(1) de la LRTSPF, un avis a été donné à la Commission canadienne des droits de la personne que le grief soulevait une question concernant l’interprétation ou l’application de la LCDP. À ce jour, la Commission canadienne des droits de la personne n’a pas informé la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (la « Commission », qui dans la présente décision renvoie à la Commission actuelle et à tous ses prédécesseurs) de son intention de présenter des arguments dans cette affaire.

[6] Le 20 mars 2023, l’employeur a répondu au renvoi à l’arbitrage de la fonctionnaire et s’est opposé à la compétence de la Commission d’entendre le grief.

[7] Pour les motifs qui suivent, je rejette l’objection de l’employeur.

II. Résumé de l’argumentation

[8] L’employeur soulève les points suivants à l’appui de son objection.

[9] D’abord, l’employeur soutient que le [traduction] « renvoi à la Commission dans la présente affaire, tel qu’il est décrit dans le formulaire 20 tel que déposé, n’indique pas correctement le type de grief que la fonctionnaire s’estimant lésée cherche à renvoyer à l’arbitrage ». Il soutient que l’essence du grief n’est pas les allégations de discrimination, mais le licenciement allégué de la fonctionnaire. À ce titre, il soutient que le grief n’aurait pas dû être renvoyé à l’arbitrage en vertu de l’alinéa 209(1)a) de la LRTSPF, mais en vertu de l’alinéa 209(1)c) ou de l’alinéa 209(1)d), qui portent, entre autres, sur les licenciements. L’employeur a déclaré ce qui suit :

[Traduction]

[…]

Toutefois, la première ligne du grief se lit comme suit : « Je conteste mon licenciement », et la première mesure corrective demandée se lit comme suit : « l’employeur révoque immédiatement mon licenciement ». L’employeur soutient donc respectueusement que la qualification exacte du grief devrait être en vertu de l’alinéa 209(1)c) ou de l’alinéa 209(1)d).

[…]

 

[10] Deuxièmement, l’employeur soutient que, de toute façon, la fonctionnaire n’a pas été licenciée. Au contraire, l’employeur allègue qu’elle a été nommée pour une période déterminée le 21 août 2017 et que la prolongation de sa nomination pour une période déterminée a pris fin le 31 mars 2020, sans autre prolongation. L’employeur déclare que les décisions Ikram c. Agence canadienne d’inspection des aliments, 2012 CRTFP 4, et Shenouda c. Conseil du Trésor (ministère de l’Emploi et du Développement social), 2017 CRTEFP 21, avaient conclu que le non-renouvellement d’une nomination pour une période déterminée n’était pas un renvoi ou un licenciement aux fins du paragraphe 209(1) de la LRTSPF. Par conséquent, l’employeur soutient que la Commission n’aurait pas non plus compétence pour entendre le grief en vertu des alinéas 209(1)c) ou d).

[11] Troisièmement, l’employeur soutient que si la Commission détermine qu’elle n’a pas compétence pour entendre la question du non-renouvellement de la nomination pour une période déterminée de la fonctionnaire, elle n’aura pas compétence pour entendre les allégations de discrimination, comme suit :

[Traduction]

[…]

L’Employeur soutient donc de plus que le premier critère pour la Commission dans le présent cas est de déterminer si la Commission a compétence pour entendre la question relative à la fin de l’emploi pour une période déterminée de la fonctionnaire s’estimant lésée. S’il est établi que la Commission n’a pas compétence pour entendre le grief, alors toute allégation de discrimination ne relève pas aussi de cette compétence […]

[…]

 

[12] Quatrièmement, l’employeur soutient qu’il est désigné « employeur distinct » aux fins de l’alinéa 209(1)d) de la LRTSPF par le Décret désignant des organismes distincts pour l’application de la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral (DORS/2005-59), que son pouvoir de nommer des personnes relève de la Loi sur l’Agence canadienne d’inspection des aliments (L.C. 1997, ch. 6) et que, comme le grief porte sur la dotation, il ne relève pas de la compétence de la Commission.

[13] En réponse à l’objection de l’employeur, la fonctionnaire soutient que le grief a été renvoyé à l’arbitrage en bonne et due forme en vertu de l’alinéa 209(1)a) de la LRTSPF. Elle déclare que son grief soulevait plusieurs questions, qu’elle a ensuite circonscrites à l’arbitrage à celles sur lesquelles la Commission aurait compétence, à savoir les allégations selon lesquelles [traduction] « […] l’employeur a violé à plusieurs reprises les dispositions de la convention collective de l’article 18 (Élimination de la discrimination) ». Elle soutient que l’essentiel de son grief porte sur des allégations de violation de la convention collective qui peuvent être déterminées à l’arbitrage en vertu de l’alinéa 209(1)a).

[14] La fonctionnaire soutient que les décisions Ikram et Shenouda se distinguent de son grief, car les griefs dans ces cas contestaient le non-renouvellement d’une nomination pour une période déterminée comme un « licenciement » ou un « renvoi » en vertu des alinéas 209(1)c) ou d) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP), comme la LRTSPF était alors nommée, et non comme une violation d’une convention collective en vertu de l’alinéa 209(1)a). Elle soutient que la décision Togola c. Conseil du Trésor (ministère de l’Emploi et du Développement social), 2014 CRTFP 1, appuie sa position selon laquelle la Commission a compétence sur le non-renouvellement d’une nomination pour une période déterminée lorsqu’il est allégué qu’il s’agit d’une violation discriminatoire de la convention collective.

[15] Par conséquent, la fonctionnaire demande que la Commission rejette l’objection de l’employeur.

III. Motifs

[16] L’employeur soutient que l’essence du grief est une contestation du non‑renouvellement de l’emploi pour une période déterminée de la fonctionnaire et que, par conséquent, la Commission n’a pas compétence sur aucun aspect du grief renvoyé. Cet argument interprète mal les questions soulevées.

[17] Plus précisément, l’employeur soutient que la première question à trancher est celle de savoir si la Commission a compétence pour examiner le licenciement allégué de la fonctionnaire. Dans la négative, l’employeur soutient que la Commission n'a pas compétence pour entendre ses allégations de discrimination. Je ne partage pas ce point de vue. Il s’agit plutôt de savoir si les allégations soulevées relèvent des motifs d’arbitrage définis au paragraphe 209(1) de la LRTSPF.

[18] Comme il a été mentionné précédemment, les conditions d’emploi de la fonctionnaire sont régies par la convention collective. L’article 18 de cette convention collective se lit comme suit :

18.01 Il n’y aura aucune discrimination, ingérence, restriction, coercition, harcèlement, intimidation, ni aucune mesure disciplinaire exercée ou appliquée à l’égard d’un-e employé-e du fait de son âge, sa race, ses croyances, sa couleur, son origine ethnique, sa confession religieuse, son sexe, son orientation sexuelle, son identité sexuelle et l’expression de celle-ci, sa situation familiale, son incapacité mentale ou physique, son adhésion au Syndicat ou son activité au sein de ce dernier, son état matrimonial ou une condamnation pour laquelle l’employé-e a été gracié.

18.01 There shall be no discrimination, interference, restriction, coercion, harassment, intimidation, or any disciplinary action exercised or practiced with respect to an employee by reason of age, race, creed, colour, national origin, religious affiliation, sex, sexual orientation, gender identity and expression, family status, mental or physical disability, membership or activity in the Union, marital status or a conviction for which a pardon has been granted.

[…]

...

 

[19] Bien que le non-renouvellement d’une nomination pour une période déterminée ne constitue pas un « licenciement » ou un « renvoi » aux fins des alinéas 209(1)c) ou d) de la LRTSPF (voir Ikram, au par. 8), cela ne veut pas dire que la Commission ne peut pas faire enquête à l’arbitrage pour déterminer si le non-renouvellement d’une nomination pour une période déterminée était discriminatoire, lorsque la discrimination est alléguée comme une violation de la convention collective. Plusieurs décisions ont statué que les griefs contestant le non-renouvellement d’une nomination pour une période déterminée ou un renvoi en cours de stage qui est allégué avoir été discriminatoire ou en violation d’une convention collective peuvent être examinés à l’arbitrage dans le contexte d’un renvoi à l’arbitrage en vertu de l’alinéa 209(1)a).

[20] Par exemple, dans Togola, citée par la fonctionnaire, M. Togola a renvoyé à l’arbitrage un grief dans lequel il avait allégué que son employeur avait refusé de renouveler sa nomination pour une période déterminée pour des motifs discriminatoires. L’employeur de M. Togola s’est opposé à la compétence d’un arbitre de grief au motif que le non-renouvellement d’une nomination pour une période déterminée ne relevait pas de sa compétence. M. Togola a répondu que le grief relevait de la compétence de l’arbitre de grief puisque le non-renouvellement était fondé sur des motifs discriminatoires, en violation d’une convention collective qui relevait de la compétence de l’arbitre de grief.

[21] Même si, en fin de compte, les allégations de discrimination de M. Togola n’ont pas été jugées étayées par la preuve, l’arbitre de grief, s’appuyant sur une décision antérieure (Medeiros c. Conseil du Trésor (ministère des Affaires étrangères et du Commerce international), 2012 CRTFP 104), a conclu ce qui suit au paragraphe 91 que si M. Togola avait établi qu’il était victime de discrimination, elle aurait eu compétence pour entendre le grief :

91 Je suis d’avis que dans un cas comme celui-ci, où il s’agit d’une fin d’emploi survenue à la suite du non-renouvellement d’un contrat en vertu de l’article 58 de la LEFP, je n’ai en principe pas compétence pour trancher le grief, à moins que le fonctionnaire puisse démontrer qu’il a été victime de discrimination. Le cas échéant, j’ai compétence en vertu du paragraphe 209(1) et de l’alinéa 226(1)g) de la Loi pour trancher ce grief. À cet égard, je souscris aux conclusions de l’arbitre de grief dans Medeiros qui a eu à décider de deux griefs dont l’un portait sur le non‑renouvellement de contrat et l’autre sur une question de la discrimination […]

 

[22] Par conséquent, lorsqu'une convention collective interdit la discrimination et qu’un employé se plaint que l’action contestée a violé cette convention collective à cet égard, le grief peut être entendu à l’arbitrage comme un grief concernant l’interprétation ou l’application d’une convention collective en vertu de l’alinéa 209(1)a) de la LRTSPF.

[23] À l’appui de son argument selon lequel, si la Commission n’a pas compétence pour entendre la contestation de la fonctionnaire à l’égard du non-renouvellement de sa nomination pour une période déterminée, elle n’a pas compétence pour entendre les allégations de discrimination, l’employeur cite le paragraphe 53 de Shenouda, qui stipule ce qui suit :

53 La Commission n’a pas une compétence absolue en matière de questions relatives à des violations prétendues des droits de la personne, dont traite Chamberlain. Dans ce cas, l’arbitre de grief a examiné la question en détail. Je suis d’accord avec le raisonnement et j’accepte les conclusions de l’arbitre de grief, plus particulièrement ce qui suit […]

 

[24] Je suis d’accord avec l’argument de la fonctionnaire selon lequel les faits de Shenouda se distinguent de la présente affaire. La décision Shenouda n’accepte pas la proposition selon laquelle les allégations de discrimination concernant le non‑renouvellement d’une nomination pour une période déterminée ne peuvent pas être renvoyées à l’arbitrage. La question en litige dans ce cas était plutôt de savoir si Mme Shenouda avait le droit de soulever ces questions dans le contexte d’un renvoi à l’arbitrage en vertu de l’alinéa 209(1)c) de la LRTFP. Elle n’avait pas soulevé d’allégations de discrimination dans le cadre de la procédure de règlement des griefs individuels, et les allégations n’avaient pas été renvoyées à la Commission en vertu de l’alinéa 209(1)a), en tant que violations de la convention collective. Ce n’est qu’une fois que le grief renvoyé en vertu de l’alinéa 209(1)c) était déjà à l’arbitrage que Mme Shenouda a allégué, pour la première fois, que son emploi avait pris fin pour cause de discrimination.

[25] L’employeur de Mme Shenouda a plaidé avec succès qu’un grief concernant le non-renouvellement d’une nomination pour une période déterminée ne pouvait être renvoyé à l’arbitrage en vertu de l’alinéa 209(1)c) de la LRTFP (voir Shenouda, aux paragraphes 15, 16 et 50). Étant donné que la Commission n’avait aucune compétence en matière de non-renouvellement d’un emploi pour une période déterminée en vertu de l’alinéa 209(1)c), toute allégation de discrimination ne relevait pas non plus de sa compétence dans le contexte d’un renvoi en vertu de l’alinéa 209(1)c).

[26] L’employeur de Mme Shenouda a reconnu que la Commission peut avoir compétence, en vertu de l’alinéa 209(1)a) de la LRTFP, pour entendre un grief concernant le non-renouvellement d’une nomination pour une période déterminée lorsqu’il est allégué qu’il s’agit d’un acte discriminatoire en violation d’une convention collective (voir Shenouda, au par. 19).

[27] La décision Shenouda n’appuie pas la position de l’employeur selon laquelle les violations de l’article sur la discrimination de la convention collective portant sur le non-renouvellement d’un emploi pour une période déterminée ne peuvent être entendues à l’arbitrage. Je ne trouve pas que Shenouda soit utile dans les circonstances du présent cas, où le renvoi à l’arbitrage a été fait en vertu de l’alinéa 209(1)a).

[28] Dans son grief, la fonctionnaire allègue que l’employeur a violé la convention collective de plusieurs façons. Bien que l’une de ces allégations concerne le non‑renouvellement de son emploi pour une période déterminée, l’essence de son grief est que les actes de l’employeur constituent une discrimination en violation de la convention collective. Dans de telles circonstances, son grief peut être renvoyé à l’arbitrage en vertu de l’alinéa 209(1)a) de la LRTSPF.

[29] De plus, un grief qui soulève des allégations de discrimination en tant que violations d’une convention collective n'est pas le même qu'un grief qui soulève « des violations [indépendantes] des droits de la personne » comme il est mentionné dans Shenouda, interprétant Chamberlain c. Canada (Procureur général), 2015 CF 50. Dans Chamberlain, on a conclu qu’un arbitre de grief n’avait pas compétence pour entendre un grief qui ne portait que sur des allégations de violation de la LCDP; Chamberlain n'a pas conclu que l’arbitre de grief ne pouvait entendre un grief qui se limitait à des allégations de discrimination.

[30] La compétence de la Commission d’entendre les allégations de discrimination de la fonctionnaire en tant que violations d’une convention collective découle de l’alinéa 209(1)a) de la LRTSPF. Un tel grief peut en effet consister, dans son intégralité, en des allégations de discrimination, lorsque les allégations font référence à une violation d’une convention collective, comme c'est le cas ici. Contrairement à ce qu’affirme l’employeur, la compétence pour entendre de telles allégations à l’arbitrage ne dépend pas du renvoi adéquat d’une autre question à l’arbitrage.

[31] La fonctionnaire allègue des actes discriminatoires distincts, à savoir le manquement de l’employeur à son obligation de prendre des mesures d’adaptation, son défaut d’offrir un milieu de travail exempt de harcèlement et son refus discriminatoire de renouveler sa nomination pour une période déterminée. Elle allègue que ces actes constituent des violations de la convention collective et de la LCDP. En tant que questions concernant l’interprétation ou l’application de la convention collective, chacune de ses allégations relève du motif d’arbitrage énoncé à l’alinéa 209(1)a) de la LRTSPF. Même si la Commission déterminait sur le fond que le non‑renouvellement de la nomination pour une période déterminée de la fonctionnaire ne constituait pas, en fait, un acte discriminatoire, les deux autres allégations de la fonctionnaire, en soi, pourraient toujours être jugées à l’arbitrage en vertu de l’alinéa 209(1)a).

[32] Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

(L’ordonnance apparaît à la page suivante)


IV. Ordonnance

[33] L’objection de l’employeur est rejetée.

[34] L’affaire sera soumise à une audience conformément à la pratique habituelle de la Commission.

Le 1er décembre 2023.

Traduction de la CRTESPF

Edith Bramwell,

une formation de la Commission des

relations de travail et de l’emploi dans le

secteur public fédéral

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.