Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

La plaignante a allégué que l’intimé avait abusé de son pouvoir lorsqu’il a évalué sa candidature – l’intimé l’a éliminée du processus de nomination parce qu’elle ne s’était pas présentée à son évaluation de langue seconde (ELS) et n’avait pas satisfait à la qualification essentielle de « fiabilité » – elle a soutenu que l’intimé avait abusé de son pouvoir en planifiant son ELS avant son entrevue, en évaluant sa fiabilité uniquement sur la base de ses communications avec elle pendant le processus d’évaluation et en l’éliminant du processus de sélection pour ne pas s’être présentée à son ELS – la Commission a conclu que l’intimé n’avait pas abusé de son pouvoir en éliminant la plaignante parce qu’elle ne s’était pas présentée à son ELS et n’avait pas fourni une note du médecin en temps opportun – la Commission a conclu que, dans les circonstances, l’intimé avait abusé de son pouvoir en fixant l’ELS de la plaignante avant l’entrevue – l’intimé a fait preuve de négligence lorsqu’il a éliminé par erreur la plaignante du processus de sélection et lorsqu’il a fallu trois mois pour la réintégrer dans le processus – aucun autre candidat n’avait une ELS avant une entrevue – l’intimé a modifié l’ordre d’évaluation de la plaignante pour des raisons de rapidité et sans tenir compte d’un désavantage possible pour elle – la Commission a conclu à un abus de pouvoir dans l’évaluation de la fiabilité de la plaignante – l’intimé a évalué la fiabilité des autres candidats en utilisant deux références, mais n’a pas communiqué avec les références de la plaignante – bien que l’avis d’emploi avisait les candidats que toutes les communications liées au processus pouvaient être utilisées lors de l’évaluation de leurs qualifications, de telles communications ne remplacent pas la méthode d’évaluation prévue – la réparation appropriée était une déclaration selon laquelle l’intimé avait abusé de son pouvoir à deux égards.

Plainte accueillie.

Contenu de la décision

Date: 20231212

Dossier: 771-02-38372

 

Référence: 2023 CRTESPF 117

Loi sur la Commission des

relations de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral et

Loi sur l’emploi dans la fonction publique

Armoiries

Devant une formation de la

Commission des relations

de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral

ENTRE

 

Masara Aldhahi

plaignante

 

et

 

ADMINISTRATEUR GÉNÉRAL

(ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration)

 

intimé

et

COMMISSION DE LA FONCTION PUBLIQUE

Répertorié

Aldhahi c. Administrateur général (ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration)

Affaire concernant une plainte d’abus de pouvoir aux termes des alinéas 77(1)a) et b) de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique

Devant : Nancy Rosenberg, une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

Pour la plaignante : Elle-même

Pour l’intimé : Marc Séguin, avocat

Pour la Commission de la fonction publique : Alain Jutras, par voie d’arguments écrits

Affaire entendue par vidéoconférence
le 10 mai 2022.

(Traduction de la CRTESPF)


MOTIFS DE DÉCISION

(TRADUCTION DE LA CRTESPF)

I. Plainte devant la Commission

[1] Masara Aldhahi (la « plaignante ») a présenté une plainte auprès de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (la « Commission ») à l’encontre de l’administrateur général du ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration (l’« intimé »). Elle a posé sa candidature dans le cadre d’un processus de nomination annoncé (2017-IMC-IA-26238) visant des postes de conseiller(ère) principal(e) en programme PM-05.

[2] L’intimé a éliminé la candidature de la plaignante en raison du fait que cette dernière ne s’est pas présentée à son évaluation de langue seconde (ELS) et a omis de fournir une note du médecin en temps opportun, comme cela lui avait été demandé, et parce qu’elle n’a pas satisfait à la qualification essentielle de « fiabilité » compte tenu des échanges qui ont eu lieu au cours du processus d’évaluation. Dans sa plainte, qui a été déposée en vertu l’article 77 de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique (L.C. 2003, ch. 22, art. 12 et 13; la « LEFP »), la plaignante a allégué un abus de pouvoir dans l’application du principe du mérite et le choix du processus, ainsi que de la discrimination. Les allégations concernant le choix du processus et la discrimination n’ont pas été retenues.

[3] La plaignante a fait valoir que l’intimé avait commis un abus de pouvoir en la convoquant à une ELS avant son entrevue, en évaluant sa fiabilité sur la base des échanges qui ont eu lieu au cours du processus d’évaluation et en l’éliminant du processus de sélection parce qu’elle ne s’était pas présentée à l’ELS.

[4] Je conclus que l’intimé a abusé de son pouvoir en fixant la date de l’ELS de la plaignante avant son entrevue et en évaluant sa fiabilité uniquement sur la base de ses communications au cours du processus de sélection. Toutefois, l’intimé n’a pas abusé de son pouvoir lorsqu’il a éliminé la plaignante du processus de sélection parce qu’elle ne s’est pas présentée à l’ELS ou qu’elle n’a pas fourni une note du médecin en temps opportun.

II. Résumé des faits

[5] La plaignante a posé sa candidature pour les postes le 1er octobre 2017 et a passé l’examen le 14 novembre 2017. Elle a échoué à l’examen et a été éliminée du processus de sélection. Cependant, elle a demandé la tenue d’une discussion informelle, dont la date a été fixée, annulée et reportée; la discussion a finalement commencé le 16 janvier 2018. Cette discussion a dépassé le temps imparti. La plaignante a demandé qu’elle soit poursuivie; la date du 21 février a été fixée, puis celle du 23 février 2018 par l’intimé. Tous ces retards sont attribuables à l’intimé.

[6] Lors de la discussion informelle, la plaignante a fait remarquer au membre du comité d’évaluation qu’il lui manquait la dernière page de son examen. Par conséquent, elle a été réintégrée dans le processus le 27 février 2018, trois mois après avoir été éliminée. On lui a d’abord dit qu’elle participerait à une entrevue de groupe et qu’une vérification des références serait menée, mais l’intimé a ensuite changé l’ordre du processus et a informé la plaignante qu’elle serait d’abord convoquée à une ELS.

[7] Le 5 mars 2018, la plaignante a reçu sa première invitation à participer à une ELS, prévue pour le 13 mars; elle devait confirmer sa présence au plus tard le 7 mars à 16 h. La plaignante a répondu qu’elle ne pouvait pas y assister en raison d’une réunion matinale avec son gestionnaire de son ministère d’attache. L’intimé lui a alors proposé un créneau horaire dans l’après-midi du même jour. Il a demandé une preuve de la réunion avec son gestionnaire de son ministère d’attache et une confirmation de sa présence l’après-midi.

[8] La plaignante n’a pas fourni de preuve de la réunion du matin avec son gestionnaire de son ministère d’attache comme cela lui avait été demandé et, selon l’intimé, elle n’a pas répondu à la proposition du créneau horaire de l’après-midi. La plaignante a déclaré qu’elle avait répondu en expliquant verbalement que le fait de se rendre le matin à une réunion avec son gestionnaire de son ministère d’attache et de passer une ELS en après-midi aurait signifié qu’elle aurait été absente du travail pendant toute la journée. Étant donné qu’elle occupait depuis peu un poste en détachement, elle estimait qu’elle ne pouvait pas s’absenter de son travail pendant une telle durée. Le 9 mars, elle a été éliminée du processus, car elle n’a pas confirmé sa présence à l’une ou l’autre des dates proposées pour l’ELS.

[9] Le 14 mars, la plaignante s’est vu offrir une troisième fois la possibilité de se rendre à une ELS, la date limite de confirmation ayant été fixée au 21 mars à 17 h. La réaction de la plaignante à cette proposition n’est pas claire. Elle a dit avoir parlé avec un chef d’équipe des ressources humaines le même jour et qu’ils avaient [traduction] « mis au clair un certain nombre de questions ».

[10] Le 9 avril, la plaignante s’est vu offrir une autre possibilité de passer l’ELS le 30 avril à 8 h 15. L’intimé lui a demandé de confirmer sa présence au plus tard le 25 avril à 12 h. Le 23 avril, n’ayant pas eu de nouvelles de la plaignante, l’intimé lui a envoyé un courriel de rappel, lui demandant à nouveau de confirmer sa présence au plus tard le 25 avril à 12 h. La plaignante a alors répondu et confirmé sa présence. Selon l’intimé, la plaignante n’a répondu qu’en raison du rappel. La plaignante a reconnu qu’elle avait répondu après avoir reçu le rappel, mais a déclaré qu’elle aurait répondu de toute façon.

[11] Le matin de l’ELS, fixée à 8 h 15 le 30 avril, la plaignante a fait savoir qu’elle était malade et incapable de passer l’examen. Elle a accusé réception de la demande de l’intimé de présenter une note médicale au plus tard le 3 mai à 17 h.

[12] L’intimé a alors proposé la tenue de l’ELS le 8 mai, sous réserve de la réception d’une note médicale justifiant l’absence du 30 avril. Le 2 mai, l’intimé a envoyé un rappel à la plaignante pour lui indiquer qu’elle devait envoyer la note médicale au plus tard le 3 mai à 17 h. Le 4 mai, comme aucune note médicale n’avait été fournie, l’intimé a annulé l’ELS fixée au 8 mai et a informé la plaignante qu’elle était éliminée du processus. La plaignante a reconnu que la note médicale n’avait peut-être pas été reçue dans le délai demandé. Elle a déclaré qu’elle avait essayé de l’envoyer, mais qu’il se pouvait qu’elle n’ait pas été livrée. Elle n’a pas donné de raison ou d’explication à ce sujet.

[13] Le 7 mai, l’intimé a demandé que lui soit fournie une preuve (un reçu de livraison ou une capture d’écran) attestant que la plaignante avait essayé d’envoyer la note médicale dans le délai imparti et a proposé de reporter la date de l’ELS si cette preuve était fournie. La plaignante a envoyé une photo horodatée de la note elle-même, mais rien n’indique qu’elle a essayé de l’envoyer le 3 mai.

[14] Le 10 mai, la plaignante a été éliminée du processus pour la dernière fois. L’intimé a déclaré qu’il ne pouvait pas évaluer la qualification essentielle en langue seconde puisque la plaignante ne s’était pas présentée à l’ELS ou n’avait pas fourni de note médicale dans les délais impartis et que, d’après ses communications au cours du processus de nomination, elle n’avait pas réussi à démontrer qu’elle possédait la qualification essentielle de « fiabilité ».

III. Argumentation des parties

[15] La Commission de la fonction publique n’a pas assisté à l’audience et n’a pas pris position sur le bien-fondé de la plainte. Elle a présenté des arguments écrits d’ordre général et portant sur des questions de politique.

A. L’ELS fixée avant une entrevue

[16] La plaignante a témoigné qu’à la date de l’audience, elle venait de commencer sa formation en français et visait à obtenir le niveau BBB. Elle a indiqué qu’elle ne pensait pas obtenir un poste parce qu’elle ne maîtrisait pas le français. Cependant, elle a soutenu qu’on ne pouvait pas savoir avec certitude qu’elle n’aurait pas été en mesure d’obtenir le niveau BBB à l’ELS à l’époque des événements pertinents.

[17] En outre, même si le besoin immédiat de l’intimé avait été de pourvoir des postes de niveau BBB ou CBC, si la plaignante avait passé son entrevue et si elle avait été pleinement évaluée, elle aurait peut-être pu être partiellement admise dans un bassin et avoir accès à des possibilités d’emploi pour des postes où l’anglais est essentiel, qui auraient pu se présenter plus tard. Elle a souligné que les bassins de candidats partiellement qualifiés sont fréquemment utilisés dans la fonction publique.

[18] La plaignante a estimé que le fait de fixer la date de l’ELS avant son entrevue n’était pas conforme aux procédures de la fonction publique ni à l’équité. Elle avait postulé à de nombreux processus et on ne lui avait jamais demandé de passer une ELS avant une entrevue – les ministères déterminaient toujours d’abord si un candidat était qualifié pour le poste et n’examinaient qu’ensuite les exigences linguistiques. Le processus de dotation de l’intimé était mal organisé, ce qui a entraîné plusieurs changements auxquels la plaignante a dû s’adapter. On lui a d’abord dit qu’elle passerait une entrevue, mais on a ensuite fixé une date pour l’ELS avant l’entrevue. Ce n’était pas la procédure normale et cette situation l’a désavantagée.

[19] Selon elle, si chaque ministère éliminait les candidats parce qu’ils ne satisfont pas aux exigences en matière de langue française, aucune dotation n’aurait lieu. Elle estime que les candidats devraient être éliminés s’ils ne satisfont pas aux exigences du poste, notamment en matière de connaissances ou d’études, mais pas en raison de leurs compétences en langue seconde. Elle a reconnu que, parfois, un poste exige des compétences en français, mais elle a ajouté que cela ne signifie pas que l’intimé doive l’écarter. Il s’est intéressé à la candidature de la plaignante, une entrevue lui ayant d’abord été proposée; elle ne comprenait donc pas pourquoi l’intimé n’aurait pas pu examiner sa candidature jusqu’au bout avant de fixer la date de l’ELS.

[20] La plaignante a d’abord été éliminée du processus parce que la dernière page de son examen était manquante. Elle a été réintégrée lorsque cette erreur a été décelée lors de la discussion informelle, mais les démarches pour organiser cette discussion et la réintégrer ont pris trop de temps et l’ont désavantagée. Si l’intimé n’avait pas perdu la page d’examen et si la discussion informelle n’avait pas pris autant de temps, la plaignante aurait passé son entrevue plus tôt, tout comme les autres candidats qui ont eu des entrevues de groupe avant leur ELS. Selon elle, l’intimé devait composer avec une situation et a fixé son ELS en premier pour simplifier les choses pour lui. Cela a désavantagé la plaignante et il n’était ni professionnel ni éthique de la part de l’intimé de changer les choses à la dernière minute.

[21] Sylvain DeCotret, directeur de la gestion des effectifs, a témoigné que, même si l’intimé souhaitait doter quelques postes au groupe et au niveau PM-05 nécessitant la maîtrise de l’anglais, l’objectif de ce processus était spécifiquement de pourvoir les postes exigeant des niveaux BBB et CBC. Les exigences linguistiques étaient essentielles.

[22] M. DeCotret a expliqué qu’il était difficile de faire passer 12 entrevues de groupe à une centaine de candidats, chacune mobilisant 5 évaluateurs et 4 candidats, dont certains se trouvaient à l’étranger. Il a précisé que les ELS pouvaient être fixées avant ou après les entrevues et qu’il ne devrait pas y avoir d’inconvénient dans un cas comme dans l’autre. Dans le présent cas, étant donné qu’il était très difficile de coordonner les calendriers de chacun pour fixer les dates des entrevues de groupe, les organisateurs ont essayé de faire passer les ELS en premier afin de réduire le nombre de candidats et de s’assurer que les candidats remplissaient les conditions requises. Bien qu’il ait été prévu à l’origine que la plaignante passe son entrevue de groupe avec plusieurs autres personnes qui avaient également pris du retard dans le processus, ces personnes ont retiré leur candidature, de sorte que cette option n’était plus disponible. M. DeCotret a indiqué qu’une simulation d’entrevue avec de faux candidats avait été une option envisagée.

[23] Selon M. DeCotret, l’ordre des étapes ne devrait pas avoir d’importance – la plaignante n’a pas été désavantagée par le fait que la date de l’ELS a été fixée avant celle de l’entrevue. En réalité, elle a eu plus de temps pour se préparer que les autres candidats. En outre, on peut affirmer sans risque de se tromper qu’elle n’aurait de toute façon pas satisfait aux exigences linguistiques, puisqu’elle n’avait pas encore commencé sa formation linguistique. Dans ces circonstances, il n’était pas déraisonnable de prévoir une ELS pour vérifier si elle satisfaisait aux exigences linguistiques avant de procéder à l’entrevue.

B. La « fiabilité » évaluée sur la base des communications échangées au cours du processus

[24] La plaignante a soutenu qu’elle n’aurait pas dû échouer à la qualification de « fiabilité » sur la base de ses échanges avec l’intimé au cours du processus. Elle a déclaré que ce critère ne consistait pas à passer un examen de français, mais à déterminer si l’on pouvait compter sur quelqu’un au travail. Elle a ajouté que des critères tels que la fiabilité devaient être évalués au moyen de références et a noté que le titre du guide d’évaluation de la fiabilité était [traduction] « Guide de cotation – Références ».

[25] M. DeCotret a témoigné de l’importance de la fiabilité aux postes de groupe et de niveau PM-05, car il s’agit de postes de haut niveau et les titulaires sont censés être totalement autonomes. La rapidité d’exécution et la réactivité sont extrêmement importantes; ils doivent parfois réagir rapidement à des situations instables et changeantes comme celles qui se produisent en Afghanistan et en Ukraine.

[26] M. DeCotret a reconnu que la fiabilité était normalement évaluée au moyen des références, mais il a ajouté que les communications avec les candidats au cours du processus de sélection peuvent être utilisées pour évaluer cette qualification, ou toute autre, comme il est indiqué dans l’offre d’emploi : [traduction] « Toutes les communications relatives à ce processus, notamment les courriels, peuvent être utilisées pour l’évaluation des qualifications. » Certains constats ont été faits lors des échanges avec la plaignante : manque de rapidité, difficultés à fournir les renseignements demandés et absence répétée de réponse. Cela a conduit à la décision qu’elle ne répondait pas à la qualification de fiabilité.

[27] L’intimé a fait valoir que l’article 36 de la LEFP et Jolin c. Administrateur général de Service Canada, 2007 TDFP 11 confirment que toute méthode d’évaluation peut être utilisée pour déterminer si un candidat possède les qualifications essentielles. Cela comprend l’évaluation des communications qui ont lieu pendant le processus de sélection lui-même, comme l’indiquait clairement l’affiche d’emploi.

C. La plaignante ne s’est pas présentée à l’ELS

[28] La plaignante a déclaré qu’elle était tombée malade le 30 avril, le jour où elle devait se présenter à l’ELS. Elle a reconnu ne pas avoir envoyé la note du médecin exigée dans le délai imparti, mais a déclaré qu’elle avait essayé de l’envoyer et que l’intimé aurait pu faire preuve d’une plus grande souplesse, de la même manière qu’elle s’était montrée patiente face aux retards antérieurs de l’intimé.

[29] Elle a fait valoir que toutes les invitations à l’ELS indiquaient qu’il pouvait y avoir [traduction] d’« autres circonstances exceptionnelles » pouvant être considérées comme des motifs valables pour ne pas assister à l’ELS. Les invitations énuméraient les motifs valables suivants :

[Traduction]

• motifs médicaux avec certificat médical;

• décès dans la famille proche;

• confirmation de plans de voyage approuvés à l’avance;

• motifs religieux;

• participation à un processus de nomination différent;

• autres circonstances exceptionnelles.

Un certificat médical ou une autre preuve peut être exigé.

 

[30] Pour ce qui est des ELS prévues en mars, l’intimé aurait dû tenir compte de la circonstance exceptionnelle suivante : la plaignante venait tout juste de commencer un poste en détachement à l’époque et estimait qu’elle ne pouvait pas demander de s’absenter de ses nouvelles obligations professionnelles pour pouvoir assister à son ELS. Elle était nouvelle à ce poste, qu’elle occupait de façon provisoire, et elle devait faire ses preuves.

[31] En ce qui concerne l’ELS fixée en avril, la plaignante estime que l’intimé n’a pas tenu compte du fait que la note de son médecin la mettait en congé jusqu’au 4 mai et qu’il l’a harcelée en lui demandant d’envoyer la note au plus tard le 3 mai. Comme elle l’a dit, [traduction] « la note était valable jusqu’au 4 mai, donc en théorie, j’étais absente jusqu’au 4 mai ».

[32] L’intimé a déclaré que, bien que tous les efforts aient été faits pour fixer une date pour l’ELS qui conviendrait à la plaignante, celle-ci ne s’est pas présentée à l’heure confirmée et n’a pas fourni de note du médecin dans les délais requis. Par conséquent, il a été impossible d’évaluer la qualification essentielle en langue seconde et, donc, de déterminer si elle avait le niveau requis, comme l’exigent les paragraphes 30(1) et (2) de la LEFP.

D. La discrimination

[33] La plainte faisait état de discrimination et la plaignante a déposé un avis auprès de la Commission canadienne des droits de la personne (CCDP). Toutefois, la plainte n’indiquait pas clairement une allégation de discrimination et, dans l’affirmative, sur quel motif elle était fondée. L’avis de la plaignante à la CCDP confirmait simplement que ses allégations figuraient toutes dans son formulaire de plainte initial, qui indiquait ce qui suit : [traduction] « J’en ai assez d’être victime de discrimination de la part de mon propre ministère […] ». Voici les termes de ses allégations :

[Traduction]

[…] J’avais besoin d’un congé de maladie pour me reposer et me remettre des événements traumatisants qui se sont produits dans ma vie. Ce n’est pas ce qui s’est passé, ils m’ont harcelée au sujet de la note médicale, que j’ai obtenue et que j’ai essayé d’envoyer, et ils ont été complètement négligents et irrespectueux concernant mon état de santé.

 

[34] L’intimé a affirmé que la plainte ne contenait pas d’allégation d’acte discriminatoire, comme le prévoient les articles 7 et 8 de la Loi canadienne sur les droits de la personne (L.R.C. (1985), ch. H -6), qui énoncent qu’une telle allégation doit être faite sur la base d’un motif de distinction illicite énoncé au paragraphe 3(1). L’intimé a indiqué que, si la plaignante alléguait une discrimination fondée sur la déficience, la seule preuve était qu’elle avait été malade pendant cinq jours et que, par conséquent, elle n’avait pas établi une preuve prima facie qui nécessiterait une explication raisonnable de la part de l’intimé.

[35] La plaignante n’a précisé aucun motif de discrimination. Si elle avait l’intention de formuler une allégation de discrimination fondée sur la déficience, elle ne l’a pas fait à l’audience et n’a pas non plus fourni de preuve que son état de santé au moment de l’ELS correspondait à une déficience. Je n’ai donc pas besoin de me prononcer sur cette question.

E. Le choix du processus

[36] Bien que le choix du processus soit un motif mentionné dans la plainte, ni les documents, ni les preuves, ni les arguments présentés lors de l’audience n’y font référence. Je n’ai pas à me prononcer sur cette question.

IV. Motifs de la décision

[37] L’abus de pouvoir n’est pas défini dans la LEFP; il y est simplement indiqué, au paragraphe 2(4), qu’on y entend notamment la mauvaise foi et le favoritisme personnel. Toutefois, la jurisprudence a précisé sa signification, par exemple dans Portree c. Administrateur général de Service Canada, 2006 TDFP 0014, au paragraphe 47 :

[…] [U]ne plainte d’abus de pouvoir doit démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il y a un acte répréhensible grave ou une faute majeure dans le processus, qui constitue plus qu’une simple erreur, omission ou conduite irrégulière justifiant l’intervention du Tribunal.

 

[38] Un abus de pouvoir peut découler d’un acte, d’une omission ou d’une erreur que le législateur n’aurait pas pu envisager dans le cadre du pouvoir discrétionnaire accordé aux personnes investies d’un pouvoir de dotation délégué (voir Tibbs c. Sous‑ministre de la Défense nationale, 2006 TDFP 8, aux par. 66 à 71). Il n’est pas nécessaire que les actes d’un administrateur général soient intentionnels pour conclure qu’il y a eu abus de pouvoir (voir Tibbs, aux par. 73 et 74).

A. Date de l’ELS fixée avant la date d’une entrevue

[39] La plupart des entrevues de groupe étaient terminées au moment où la plaignante a été réintégrée dans le processus. Cela est dû au fait que l’intimé a perdu une page de l’examen de la plaignante, a reporté la date de la discussion informelle et n’a pas prévu suffisamment de temps pour cette discussion, ce qui a nécessité une deuxième discussion. En conséquence, il a fallu trois mois pour que la plaignante soit réintégrée dans le processus. Malgré cette négligence de la part de l’intimé, l’équité du processus aurait pu être rétablie une fois la plaignante réintégrée, simplement en la convoquant à une entrevue.

[40] M. DeCotret a témoigné que l’ordre des étapes d’un processus ne devrait pas avoir d’importance, que l’ordre change souvent et qu’il n’entraîne pas de désavantage. L’intimé a voulu organiser les ELS en premier en raison du grand nombre de candidats et de la difficulté à organiser des entrevues de groupe. La preuve documentaire ne le confirme pas. Elle ne révèle pas que d’autres candidats ont été convoqués à une ELS avant d’être reçus en entrevue.

[41] M. DeCotret a également témoigné que l’intimé avait au départ prévu d’inscrire la plaignante à une entrevue de groupe avec d’autres candidats qui accusaient un retard dans le calendrier, mais que cela n’était plus possible lorsqu’ils ont retiré leur candidature. Cependant, il n’y avait aucune preuve concernant la raison pour laquelle la plaignante n’a pas simplement passé une entrevue seule, ou dans le cadre d’une entrevue de groupe avec de faux candidats, comme cela aurait probablement été le cas si elle s’était présentée à l’ELS et l’avait réussie.

[42] Son témoignage selon lequel il était très improbable que la plaignante ait pu atteindre les niveaux linguistiques requis suggère que la décision d’organiser d’abord l’ELS a été prise pour des raisons de rapidité et sans tenir compte d’un désavantage possible pour la plaignante.

[43] Il n’a pas été clairement établi que la plaignante aurait pu être placée dans un groupe de candidats partiellement qualifiés si elle avait réussi l’entrevue, mais échoué à l’ELS. Elle a pensé que c’était possible parce que, a-t-elle dit, des bassins de candidats partiellement qualifiés sont souvent constitués dans la fonction publique. M. DeCotret n’a pas dit que c’était impossible, mais il a souligné que le but de ce processus était de sélectionner des candidats de niveau BBB ou CBC et que ces exigences linguistiques étaient essentielles. Je ne peux pas me prononcer sur cette preuve, mais je constate qu’il est à tout le moins possible que la plaignante ait été désavantagée par cette méthode.

[44] J’estime, selon la prépondérance des probabilités, que le fait de fixer la date de l’ELS de la plaignante avant son entrevue, dans les circonstances données, constitue un abus de pouvoir.

B. La « fiabilité » évaluée sur la base des communications échangées au cours du processus

[45] La plaignante a soutenu qu’elle n’aurait pas dû se voir attribuer une mention d’échec pour la qualification de « fiabilité » sur la base de ses communications au cours du processus, que la « fiabilité » s’entendait de la fiabilité dans le cadre du travail, et non de la fiabilité dans le cadre d’un examen de français, et que l’évaluer de cette manière revenait à l’évaluer différemment des autres candidats.

[46] L’intimé a fait valoir que l’affiche de l’emploi précisait expressément que [traduction] « [t]outes les communications relatives à ce processus, y compris les courriels, peuvent être utilisées pour l’évaluation des qualifications ». Selon lui, cela signifiait qu’il pouvait évaluer la fiabilité de la plaignante sur la base des communications échangées au cours du processus et qu’elle avait été avertie par l’affiche du poste qu’il pourrait le faire.

[47] Dans Hill c. Sous-ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, 2017 CRTESPF 21, la Commission a indiqué ce qui suit :

46 L’article 36 de la LEFP accorde un pouvoir discrétionnaire aux gestionnaires délégués concernant le choix et l’utilisation des méthodes d’évaluation. Cependant, ce n’est pas un pouvoir absolu. Par conséquent, la Commission peut conclure qu’il y a eu abus de pouvoir si, par exemple, il est établi qu’il y a eu un vice fondamental dans la méthode d’évaluation. Le pouvoir discrétionnaire accordé au comité d’évaluation n’est pas absolu non plus. En réalité, le comité doit exercer ce pouvoir conformément à la nature et aux fins de la LEFP. Voir Bowman et al. c. le sous-ministre de Citoyenneté et Immigration Canada et al., 2008 TDFP 12, aux paragraphes 121 à 123.

 

[48] Aussi, comme l’a indiqué la Commission dans Fang c. Administrateur général (ministère de l’Industrie) et Conseil du Trésor (ministère de l’Industrie), 2023 CRTESPF 52 :

[115] […] une conclusion d’abus de pouvoir peut être rendue si le plaignant peut prouver que les méthodes utilisées étaient déraisonnables ou ne permettaient pas l’évaluation des qualifications énoncées dans l’énoncé des critères de mérite (voir Jogarajah c. Administrateur en chef de la santé publique de l’Agence de la santé publique du Canada, 2008 TDFP 15). Un outil d’évaluation doit également évaluer véritablement ce qui doit être évalué – si l’outil est lacunaire, le résultat ne peut pas être considéré comme raisonnable ou juste; voir Chiasson c. Sousministre de Patrimoine canadien, 2008 TDFP 27.

 

[49] La manière dont l’intimé a évalué la fiabilité de la plaignante pose problème à plusieurs égards. Tout d’abord, il a évalué la fiabilité des autres candidats sur la base de deux références, mais n’a pas contacté les répondants proposés par la plaignante, bien qu’il ait demandé des références à cette dernière et qu’il ait eu leurs coordonnées. Ni le tableau d’évaluation ni le guide de cotation ne font référence à l’utilisation de communications liées au processus pour évaluer la fiabilité. Les questions et les réponses attendues figurant dans le guide de cotation ont clairement été conçues pour évaluer les références professionnelles et non les communications liées au processus. Le tableau d’évaluation des résultats de tous les candidats n’incluait pas la note d’échec de la plaignante en matière de fiabilité.

[50] En outre, il n’est pas certain que le comité d’évaluation ou l’un de ses membres ait évalué la fiabilité de la plaignante – il semble que ce soient les représentants des ressources humaines qui l’aient fait. Concernant la fiabilité, le guide de cotation de la plaignante, une fois rempli, indique ce qui suit :

[Traduction]

Remarques des membres du comité

Comme indiqué dans l’offre d’emploi : Toutes les communications relatives à ce processus, y compris les courriels, peuvent être utilisées pour l’évaluation des qualifications. En examinant la correspondance et le comportement de la candidate au cours des derniers mois du processus, les RH ont remarqué que la candidate n’avait pas fait preuve d’un comportement qui témoignait de sa fiabilité.

En examinant la correspondance et le comportement, les conseillers en ressources humaines ont tenu compte des questions suivantes qui sont posées dans le questionnaire de vérification des références de la candidate.

 

[51] Ayant signalé cette possibilité dans l’offre d’emploi et étant en présence d’une candidate qui avait tendance à ne pas respecter les délais et à ne pas répondre, l’intimé était, à mon avis, en droit d’en tenir compte dans son évaluation de la fiabilité de la candidate. Si l’on ne peut pas compter sur une candidate pour répondre en temps voulu sans rappel, ou pour envoyer une note médicale en temps voulu, ou pour organiser son horaire de travail habituel de manière à être disponible pour une évaluation de langue seconde, je ne peux pas reprocher à l’intimé d’en tenir compte lorsqu’il évalue si elle a fait preuve du degré de fiabilité requis pour le poste.

[52] Toutefois, je ne pense pas que l’intimé pouvait uniquement tenir compte des communications échangées au cours du processus. L’offre d’emploi ne précisait pas que ces échanges pouvaient être utilisés pour évaluer les qualifications, mais seulement qu’ils pouvaient être utilisés [traduction] « pour l’évaluation des qualifications ». Cela signifie pour moi qu’elles pouvaient être utilisées en complément et en conjonction avec la méthode d’évaluation prévue, à savoir les références. L’offre d’emploi n’indique pas, ni même ne laisse entendre, que ces communications pouvaient être utilisées pour remplacer complètement l’outil d’évaluation que sont les références.

[53] Ce constat est confirmé par le témoignage de M. DeCotret. Il a reconnu que les informations sur lesquelles la fiabilité était évaluée provenaient principalement des références, mais il a déclaré que si les évaluateurs relevaient une information pertinente au cours du processus, ils pouvaient l’utiliser.

[54] Selon moi, l’intimé pouvait tenir compte des communications échangées au cours du processus, mais il devait le faire parallèlement aux références, et non pas en remplacement de celles-ci. À cet égard, selon la prépondérance des probabilités, je conclus que la méthode d’évaluation utilisée pour évaluer la fiabilité de la plaignante était viciée et ne permettait pas une évaluation convenable de sa fiabilité.

C. La plaignante ne s’est pas présentée à l’ELS

[55] La plaignante ne s’est pas présentée à l’ELS prévue. Elle a indiqué à l’intimé le matin de l’ELS, à 8 h 15, qu’elle était tombée malade. Plusieurs démarches avaient été faites auparavant pour fixer la date de l’ELS, au cours desquelles la plaignante avait déclaré qu’elle ne pouvait pas se présenter aux heures proposées ou n’avait pas confirmé sa présence en temps opportun.

[56] La plaignante n’a pas fourni de motifs convaincants pour expliquer son incapacité à se présenter aux dates proposées ou son incapacité à répondre en temps opportun. En l’absence de circonstances particulières, les réunions et obligations professionnelles normales ne constituent pas un motif suffisant pour refuser à plusieurs reprises les dates proposées ou pour ne pas répondre dans les délais. Ce principe s’applique même si un candidat occupe un nouvel emploi temporaire et ne se sent pas capable de s’absenter de son lieu de travail. Tous les candidats ont des obligations et des pressions professionnelles. Si la pression exercée sur la plaignante pour qu’elle ne s’absente pas de son bureau avait un caractère exceptionnel, elle n’a pas communiqué cette information à l’intimé ni tenu des propos qui vont dans ce sens lors de l’audience.

[57] La maladie est un motif valable pour ne pas assister à une ELS, mais une note médicale doit être fournie, si et quand elle est exigée. Bien que la plaignante n’ait pas fourni ce document dans les délais requis, l’intimé lui a tout de même proposé une autre date pour l’ELS, à condition qu’elle fournisse la preuve de sa tentative d’envoi de la note.

[58] La plaignante a estimé que l’intimé, en lui demandant d’envoyer la note avant le 3 mai alors que la note la mettait en congé jusqu’au 4 mai, n’avait pas tenu compte du contenu de sa note médicale; toutefois, elle n’a pas expliqué pourquoi elle n’avait pas pu envoyer la note. Elle n’a pas indiqué qu’elle ne pouvait pas l’envoyer parce qu’elle était malade. Elle a expliqué qu’elle avait essayé de l’envoyer et qu’elle ne savait pas pourquoi elle ne l’avait pas fait, qu’il s’agissait peut-être d’une panne d’Internet ce jour-là ou d’un problème technique. Selon elle, l’employeur aurait simplement dû être raisonnable. Il aurait dû constater que le 3 mai était passé, que la note n’avait pas été reçue et il aurait dû lui demander de l’envoyer.

[59] La plaignante n’a manifestement pas estimé qu’il était important d’envoyer la note médicale lorsqu’elle a été demandée ou de répondre en temps opportun à l’intimé. Elle n’a pas non plus donné la priorité à la fixation de la date de son ELS. Comme elle l’a déclaré, [traduction] « je venais d’entrer dans un poste en détachement et j’essayais de donner la priorité à mon travail ».

[Traduction]

J’occupais un nouveau poste et j’étais très stressée. Je prenais mes marques, j’essayais de montrer que j’étais bien présente et je ne prenais pas de congés. L’employeur veut le constater à tout moment, mais surtout lorsque vous êtes nouveau. C’était difficile, j’aurais aimé être comprise et obtenir des adaptations plutôt que d’être éliminée si rapidement. Je suis une fonctionnaire productive et efficace, j’attache de l’importance à l’argent des contribuables et je ne veux pas prendre de congés inutiles.

 

[60] Les demandes de l’intimé n’étaient pas déraisonnables dans les circonstances. Même si l’intimé aurait dû fixer l’entrevue de la plaignante avant son ELS, il n’y a aucune preuve que son manque de coopération pour fixer la date de son ELS était attribuable au changement dans l’ordre du processus. Les seules raisons que la plaignante a données pour expliquer son comportement étaient ses obligations professionnelles et son hésitation à s’absenter du travail. Si l’intimé avait fixé la date de son entrevue en premier, la plaignante aurait quand même occupé son poste de détachement au moment de l’ELS et, compte tenu des raisons invoquées, j’en déduis que sa réticence à se libérer pour l’ELS aurait persisté.

[61] Je conclus, selon la prépondérance des probabilités, que l’intimé n’a pas abusé de son pouvoir lorsqu’il a éliminé la candidature de la plaignante du processus parce qu’elle ne s’est pas présentée à son ELS ou qu’elle n’a pas fourni une note médicale en temps opportun.

V. Conclusion

[62] Je conclus, selon la prépondérance des probabilités, que l’intimé a abusé de son pouvoir lorsqu’il a fixé la date de l’ELS de la plaignante avant de lui proposer une entrevue et lorsqu’il a évalué sa fiabilité uniquement sur la base des communications échangées au cours du processus.

[63] Je conclus également que l’intimé n’a pas abusé de son pouvoir lorsqu’il a éliminé la candidature de la plaignante parce qu’elle ne s’est pas présentée à l’ELS ou qu’elle n’a pas fourni une note du médecin en temps opportun.

VI. Réparations

[64] La plaignante a demandé le versement du salaire perdu correspondant au poste de groupe et de niveau PM-05 jusqu’au moment où elle a obtenu une nomination ailleurs qui lui a permis d’atteindre ce niveau de salaire. Elle a également indiqué qu’elle était intéressée par une nomination auprès du ministère.

[65] La LEFP énonce ce qui suit en ce qui concerne les réparations :

Plainte fondée

(1) Si elle juge la plainte fondée, la Commission des relations de travail et de l’emploi peut ordonner à la Commission ou à l’administrateur général de révoquer la nomination ou de ne pas faire la nomination, selon le cas, et de prendre les mesures correctives qu’elle estime indiquées.

Restriction

La Commission des relations de travail et de l’emploi ne peut ordonner à la Commission de faire une nomination ou d’entreprendre un nouveau processus de nomination.

 

[66] L’article 82 indique clairement que la Commission n’a pas compétence, dans le cadre d’une plainte en matière de dotation, pour ordonner qu’une nomination soit faite. Selon la jurisprudence, la Commission ne peut pas non plus ordonner le paiement au titre de la perte de salaire :

[151] Le plaignant a demandé des dommages pour perte de salaire. Même si je suis sensible à cette demande, cette réparation aurait le même effet qu’une ordonnance visant à ce qu’il soit nommé au niveau ENG04, ce que je ne suis manifestement pas autorisé à faire en vertu de l’art. 82 de la LEFP (voir également Spruin, au par. 117).

 

[67] Indépendamment de la compétence, cependant, je considère que l’une ou l’autre ordonnance n’est pas pertinente compte tenu des faits du présent cas. J’ai conclu que l’intimé avait abusé de son pouvoir en fixant la date de l’ELS de la plaignante en premier et en évaluant sa fiabilité uniquement sur la base des communications échangées au cours du processus. Toutefois, je n’ai pas conclu qu’il avait abusé de son pouvoir en éliminant la plaignante du processus parce qu’elle ne s’était pas présentée à l’ELS et qu’elle n’avait pas fourni une note médicale en temps opportun. La preuve n’indique pas non plus de lien entre les abus de pouvoir de l’intimé et la conduite de la plaignante en ce qui concerne la fixation de la date de l’ELS. Par conséquent, j’estime que la réparation appropriée consiste à déclarer que l’intimé a abusé de son pouvoir à deux égards.

[68] Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

(L’ordonnance apparaît à la page suivante)


VII. Ordonnance

[69] Je déclare que l’intimé a abusé de son pouvoir en fixant la date de l’évaluation de langue seconde de la plaignante avant son entrevue.

[70] Je déclare également que l’intimé a abusé de son pouvoir en évaluant la fiabilité de la plaignante uniquement en fonction des communications échangées avec elle au cours du processus de nomination.

Le 12 décembre 2023.

Traduction de la CRTESPF

Nancy Rosenberg,

une formation de la Commission des

relations de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral

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