Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le plaignant a allégué que l’intimé avait abusé de son pouvoir dans l’application du mérite et dans le choix du processus – il a également allégué une discrimination fondée sur l’âge – cette plainte est relative à un programme de développement d’employés intitulé « Programme d’apprentissage et de formation agent professionnel de projet EN-SUR » (PAF ou le « programme ») – selon le Guide du programme : « Le Programme de perfectionnement […] est conçu pour fournir un mécanisme structuré de perfectionnement afin de faire passer les agents de projets EN-SUR du premier échelon EN-SUR-01 au niveau de travail EN-SUR-02 » – le PAF prévoit que la personne qui complète le programme se voit offrir une nomination par processus non annoncé au groupe et au niveau EN-SUR-02 – le plaignant n’a jamais été admis dans le PAF et n’a jamais fait partie du groupe EN-SUR; il fait partie du groupe EG – le plaignant a affirmé ne pas se plaindre de la validité du programme, mais bien de la façon dont il est appliqué – il n’a pas non plus contesté les qualifications de la personne nommée – puisque le plaignant a reconnu la validité du PAF et la validité de la nomination qui en découlait, la Commission a conclu que l’allégation d’abus de pouvoir dans le choix du processus ne pouvait donc pas tenir et l’a rejetée puisque le plaignant n’avait pas démontré un abus de pouvoir – la Commission a également conclu qu’il n’y avait pas d’abus de pouvoir dans l’application du mérite – en ce qui concerne l’allégation de discrimination, le plaignant a soutenu que, selon lui, les personnes nommées au PAF étaient plus jeunes et que les personnes qui étaient plus âgées n’étaient pas nommées au PAF – toutefois, la Commission a conclu que le plaignant ne l’avait pas convaincue de l’existence d’une preuve prima facie de discrimination – par conséquent, le plaignant n’a pas démontré que l’intimé avait abusé de son pouvoir.

Plainte rejetée.

Contenu de la décision

Date: 20240326

Dossier: 771-02-38216

 

Référence: 2024 CRTESPF 43

Loi sur la Commission des

relations de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral et

Loi sur l’emploi dans la

fonction publique

Armoiries

Devant une formation de la

Commission des relations

de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral

ENTRE

 

Michel Pothier

plaignant

 

et

 

Administrateur Général

(ministère des Ressources naturelles)

 

intimé

et

AUTRES PARTIES

Répertorié

Pothier c. Administrateur général (ministère des Ressources naturelles)

Affaire concernant une plainte d’abus de pouvoir déposée en vertu des alinéas 77(1)a) et 77(1)b) de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique

Devant : Guy Grégoire, une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

Pour le plaignant : Lui-même

Pour l’intimé : Christine Côté, avocate

Pour la Commission de la fonction publique : Louise Bard, analyste principale

Affaire entendue par vidéoconférence

les 11 et 12 octobre 2023.


MOTIFS DE DÉCISION

I. Plainte devant la Commission

[1] Le 18 avril 2018, le ministère des Ressources naturelles du Canada (l’« intimé ») a affiché une notification de nomination ou de proposition de nomination de Mathieu Turgeon-Pelchat (la « personne nommée ») à un poste d’une durée indéterminée d’agent de projet professionnel, au groupe et au niveau EN-SUR-02, à la suite d’un processus de nomination non annoncé. Le processus de nomination porte le numéro 2018-RSN-INA-PROM-SPRS-183460. Le poste est au sein du Secteur de la politique stratégique et des résultats au Centre canadien de cartographie et d’observation de la Terre à Sherbrooke, au Québec.

[2] Le 19 avril 2018, Michel Pothier (le « plaignant ») a déposé une plainte en vertu des alinéas 77(1)a) et b) de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique (L.C. 2003, ch. 22, art. 12 et 13; la « Loi ») à l’encontre de cette nomination auprès de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (la « Commission »). Il a allégué que l’intimé avait abusé de son pouvoir dans l’application du mérite ainsi que dans le choix du processus. Sa plainte se fonde également sur une allégation de discrimination illicite fondée sur l’âge allant à l’encontre du paragraphe 3(1) de la Loi canadienne sur les droits de la personne (L.R.C. (1985), ch. H-6; la « LCDP »).

[3] Pour les motifs qui suivent, je conclus que le plaignant n’a pas démontré, selon la prépondérance de la preuve, que l’intimé a contrevenu à la Loi en abusant de son pouvoir lors de l’évaluation de la personne nommée, dans le choix du processus de nomination ou que l’intimé a contrevenu à la LCDP.

[4] Il est à noter que la Commission de la fonction publique (CFP) n’a pas assisté à l’audience, mais qu’elle a soumis ses arguments écrits, généraux et spécifiques, concernant la politique de nomination.

II. Traitement de la preuve documentaire

[5] Dans le présent cas, le plaignant a déposé une preuve documentaire fort volumineuse. L’intimé a voulu s’opposer à certains documents au motif, entre autres, d’absence de pertinence. J’ai reconnu qu’effectivement plusieurs documents, à première vue, n’étaient pas nécessairement pertinents, mais que considérant le volume, il n’aurait pas été économique, en matière de temps, de valider la pertinence de chacun, individuellement. Par conséquent, les parties ont accepté que je reçoive en liasse l’ensemble des documents en preuve tout en sachant que certains n’auraient pas été admissibles s’ils avaient été analysés normalement lors d’une objection. Ces documents ne feront pas partie de mon analyse. Dans ces circonstances, l’ensemble de la documentation soumise par le plaignant est admis en preuve en tenant compte de mes remarques concernant la pertinence.

[6] Le cahier de documents de l’intimé a également été reçu en preuve.

III. Résumé de la preuve

[7] La nomination faisant l’objet de la plainte est consécutive à un programme de développement d’employés intitulé « Programme d’apprentissage et de formation agent professionnel de projet EN-SUR » (PAF ou le « programme »). On peut lire ce qui suit dans le Guide du programme (le « guide ») : « Le Programme de perfectionnement […] est conçu pour fournir un mécanisme structuré de perfectionnement afin de faire passer les agents de projets EN-SUR du premier échelon EN-SUR-01 au niveau de travail EN-SUR-02. »

[8] Selon le guide, la raison d’être de ce programme est de pallier la difficulté à trouver du personnel déjà formé à cause du niveau scientifique des opérations, de l’unicité de son mandat et de sa localisation régionale. Le programme fournit aux employés l’expérience et les connaissances requises pour acquérir les compétences et les aptitudes nécessaires pour exercer pleinement les tâches de l’agent de projet EN-SUR-02. Enfin, le programme et le processus de recrutement sont « […] en ligne avec le Cadre de nomination ministériel, RNCan 2008-10-14 (CNM 2008-10-14) ».

[9] Le guide définit l’admissibilité au programme comme suit : « Tous les employés de niveau EN-SUR-01 dans les bureaux du CIT-S [autre nom de l’organisme de l’intimé] travaillant en tant que Professionnel, agent de projet en formation feront partie du Programme. » Il y est aussi mentionné ce qui suit : « Les processus de dotation collective externe seront utilisés comme principal mécanisme pour l’admission future au Programme. »

[10] Le plaignant n’a jamais été admis dans le PAF et il n’a jamais fait partie du groupe EN-SUR; il fait partie du groupe EG.

[11] Lors de son discours d’ouverture, de son témoignage et de son argumentation, le plaignant s’est plaint de n’avoir jamais été nommé dans un poste de groupe et niveau EN-SUR-02. C’est fondamentalement ici que réside sa plainte. Il a affirmé ne pas se plaindre de la validité du programme, mais bien de la façon dont il est appliqué. Il ne conteste pas non plus les qualifications de la personne nommée ni n’affirme que la nomination ne respecte pas le principe du mérite, ou qu’il voudrait faire perdre son poste à la personne nommée.

[12] Durant son témoignage, le plaignant a fait grand état de ses qualifications, de son expérience, de ses connaissances et de ses compétences. Il aurait voulu déposer en preuve ses évaluations du rendement annuelles des années antérieures, mais elles avaient été déclarées inadmissibles dans une décision interlocutoire rendue précédemment par la Commission.

[13] Il a beaucoup insisté sur le fait que l’intimé avait reconnu son expertise en acceptant de lui payer à 100 % son programme d’études de baccalauréat en informatique pour compléter sa formation académique et éventuellement le rendre admissible au groupe EN-SUR. Il a répété plusieurs fois son incompréhension du fait que l’intimé ne lui avait jamais offert un poste par voie de processus de nomination non annoncé dans le groupe EN-SUR.

[14] Il a témoigné avoir déposé la présente plainte contre la nomination mentionnée plus haut, mais qu’il aurait voulu déposer la même plainte contre toutes les nominations EN-SUR-02, car il n’avait jamais été nommé alors qu’il aurait dû l’être.

[15] Il a affirmé que d’autres employés, plus jeunes, se sont fait payer des cours remboursés à seulement 50 % et ont été admis au PAF alors que lui, qui était un EG-05, n’a pas bénéficié du même traitement. Il a soutenu qu’un EG-05 était mieux payé qu’un EN-SUR-01, mais moins qu’un EN-SUR-02, et c’est pourquoi il était prêt à accepter un poste EN-SUR-01 dans l’espoir d’être promu éventuellement au groupe et au niveau EN-SUR-02.

[16] Le plaignant a affirmé qu’il y avait eu des processus de nomination annoncés au cours des années au groupe et aux niveaux EN-SUR-01 et 02, mais qu’il ne s’était qualifié à aucun de ceux-ci. Il a soutenu que, depuis l’obtention de son baccalauréat en informatique, il y a eu plus de 10 nominations dans le groupe EN-SUR. Il a aussi participé à un processus EN-SUR-03, mais il n’a pas réussi non plus. Il n’a contesté aucune nomination consécutive à ces processus de nomination.

[17] Le plaignant a affirmé que l’intimé avait procédé à un processus de dotation EN-SUR-02, sans spécifier quand, et qu’il avait réussi l’examen, mais il avait échoué à l’entrevue. Toutefois, le candidat qui s’était qualifié était le plus vieux; le processus a été annulé. Le plaignant a soutenu que c’est parce que le candidat était plus vieux que le processus avait été annulé. C’est à partir de cet incident qu’il a remarqué que les personnes nommées au PAF étaient plus jeunes, et que les personnes qui étaient plus âgées, déjà dans l’organisation, dont lui-même, n’étaient pas nommées. C’est de là que part son allégation de discrimination fondée sur l’âge. L’intimé fait preuve de discrimination envers les personnes plus âgées de son organisation. Il a prétendu que, parmi les raisons, l’une d’elles est que ces personnes plus matures sont plus difficiles à contrôler et manipuler.

[18] L’intimé a toujours refusé de l’admettre au PAF et au groupe EN-SUR-01, et le plaignant a soutenu que tous ceux qui y sont admis sont plus jeunes, jamais plus vieux. Ce dernier a prétendu que l’intimé aurait dû utiliser son pouvoir discrétionnaire pour le nommer dans un poste EN-SUR par processus non annoncé et que son refus d’obtempérer à sa demande constituait un abus de pouvoir pour avoir refusé d’exercer son pouvoir discrétionnaire de nomination.

[19] D’autre part, le plaignant a affirmé que l’intimé insiste à recruter au PAF des personnes plus jeunes qui ont obtenu leur diplôme en géomatique, qui nécessite une formation de quatre ans, alors que lui-même détient un baccalauréat en informatique de trois ans. Il a témoigné avoir fait la démonstration à l’intimé que ses qualifications sont complètement suffisantes pour être nommé dans un poste EN-SUR. Il a affirmé avoir bien plus d’expérience que la personne nommée et connaître bien davantage les systèmes informatiques utilisés au sein de l’organisation et avoir même donné une formation à des gens du groupe et du niveau EN-SUR-01.

[20] Le plaignant a fait état de diverses plaintes et divers griefs qui sont en cours de traitement, dont un grief concernant sa description de travail et sa classification, et une plainte de harcèlement, dont le rapport a conclu qu’il n’y avait pas eu de harcèlement à l’égard du plaignant. Ce rapport est en cours de contestation par le plaignant. Je lui ai rappelé que je n’avais pas la compétence, dans le cadre de la présente plainte, pour juger ces griefs et plaintes.

[21] Le bref contre-interrogatoire du plaignant a révélé qu’au moins deux personnes, sensiblement du même âge que lui avaient été nommées au groupe EN-SUR.

[22] L’intimé a appelé à témoigner Sylvain Vallières, qui, en 2018, était gestionnaire et supervisait le PAF. Il a indiqué faire partie du groupe EN-SUR depuis son embauche. Il a expliqué que le PAF visait à aider à la dotation de talents récents dans le domaine de la géomatique. Il a défini « talents récents » comme les personnes faisant partie des domaines de pointe comme l’intelligence artificielle et la réseautique, des habilités qui manquaient au sein de l’organisation. Le PAF existe depuis 2010.

[23] Il a expliqué que, dans le cadre du PAF, l’organisation recrutait des personnes du groupe et niveau EN-SUR-01 au sein de l’organisation ou de l’extérieur.

[24] Les personnes étaient admises au PAF pour une période de deux ans durant laquelle elles participaient à deux ou trois stages; subissaient une évaluation mensuelle menée par leur gestionnaire; devaient suivre des cours de formation; devaient produire un rapport de stage au terme duquel elles se voyaient offrir un poste au groupe et au niveau EN-SUR-02 par processus de dotation non annoncé. Il en était ainsi dans le présent cas.

[25] M. Vallières a aussi expliqué que, à titre de gestionnaire du PAF, il s’assurait que les gestionnaires qui recevraient les participants au programme étaient prêts à recevoir les stagiaires, à faire des rencontres mensuelles entre gestionnaire et stagiaire et à faire les suivis des rapports de stages. Les candidats recrutés étaient des personnes déjà au groupe et au niveau EN-SUR-01; ces candidats étaient ciblés par la gestion. Souvent, ils étaient des étudiants ayant obtenu leur diplôme en géomatique dans le programme COOP de l’Université de Sherbrooke. Il n’y avait pas d’affichage d’appel de candidatures. Pour être admissible au PAF, les personnes devaient avoir obtenu leur diplôme en géomatique au maximum deux ans plus tôt. Il a affirmé que le PAF est un processus de dotation complémentaire aux processus de dotation ordinaire de recrutement d’EN-SUR-01 et EN-SUR-02.

[26] M. Vallières a expliqué que le plaignant, ne faisant pas partie du groupe EN-SUR, n’a jamais été considéré pour le programme et que, par conséquent, il n’en avait jamais fait partie.

[27] Il a témoigné qu’il connaissait le plaignant pour avoir travaillé avec lui à Sherbrooke, mais qu’il n’avait jamais été son gestionnaire ni n’avait travaillé au sein de la même équipe. Ils se connaissaient suffisamment pour se saluer, mais sans plus.

[28] M. Vallières a précisé qu’il y avait environ 80 employés à Sherbrooke, dont 15 personnes faisant partie du groupe EN-SUR, alors qu’à Ottawa il y avait plus de 100 employés, dont 7 ou 8 du groupe EN-SUR.

[29] L’intimé a profité du témoignage de M. Vallières pour introduire en preuve l’énoncé des critères de mérite (ECM), l’évaluation narrative de la personne nommée par rapport à l’ECM, la justification du recours au processus de nomination non annoncée, la notification de candidatures retenues et de celle de la nomination.

[30] En contre-interrogatoire, M. Vallières a affirmé ignorer pourquoi le plaignant n’avait jamais reçu d’offre d’emploi pour le groupe EN-SUR ou dans le cadre du PAF. Il a soutenu qu’il y avait d’autre possibilités que le PAF pour être nommé au sein du groupe EN-SUR, dont les processus ordinaires de dotation.

[31] L’intimé désirait appeler un second témoin pour attester de l’évaluation narrative de la personne nommée, mais le plaignant a confirmé qu’il ne doutait pas de ses compétences, qu’il ne voulait pas que la personne nommée perde son poste et qu’il ne voulait pas faire annuler le processus de nomination. Par conséquent, le témoin n’a pas été appelé à témoigner.

IV. Résumé de l’argumentation

[32] Dans son argumentation, le plaignant a fait valoir qu’il y avait eu abus de pouvoir du fait qu’il n’avait pas été nommé. En ce qui a trait au processus non annoncé, il s’est demandé pourquoi il n’avait pas fait l’objet lui-même d’une nomination. L’employeur lui a payé sa formation universitaire à 100 %. Cette décision de la gestion était clairement basée sur des besoins opérationnels et la difficulté à recruter des EN-SUR. Sa formation palliait donc clairement un besoin organisationnel. Il aurait donc dû être nommé.

[33] Le plaignant a soutenu qu’il y avait eu entrave au pouvoir discrétionnaire de la gestion puisque cette dernière avait refusé d’exercer son pouvoir discrétionnaire et de le nommer dans un poste au groupe EN-SUR. Il a affirmé que ses collègues avaient bénéficié de ce pouvoir en se faisant nommer et que la suite logique à sa formation payée aurait été de se faire nommer comme ses collègues l’ont été.

[34] Il a affirmé être victime de discrimination basée sur l’âge et avoir été lésé à cause de son âge par l’intimé. Il s’est appuyé sur la preuve que seuls les détenteurs d’un diplôme en géomatique de moins de deux ans étaient admissibles au PAF, donc seulement des plus jeunes. Il a quand même reconnu qu’il y avait des plus vieux, mais que la plupart étaient plus jeunes. De plus, comme il n’y a pas eu d’autre processus EN-SUR-01, il s’est demandé comment il devait s’y prendre pour obtenir un poste dans ce groupe.

[35] Il a reconnu le paragraphe 30(4) de la Loi et n’a pas contesté la nomination. Il a affirmé que lui aussi avait les mêmes qualifications, sinon plus, que la personne nommée, et que le PAF ne constitue qu’un prétexte pour nommer des personnes plus jeunes.

[36] Dans son argumentation, l’intimé a reconnu que le plaignant avait beaucoup de doléances contre son employeur, mais que l’objet de la présente plainte était en fonction de la Loi et que ma compétence concerne la présente nomination spécifiquement. Le plaignant n’était pas dans le PAF; il n’a donc pas été considéré pour la nomination. L’intimé a aussi soutenu que je n’avais pas à déterminer pourquoi le plaignant n’avait pas été inclus dans le processus.

[37] L’intimé a fait valoir que les allégations d’abus de pouvoir dans l’évaluation du mérite de la personne nommée et dans le choix du processus visent la façon dont le programme est appliqué et pas la nomination comme telle. Il a fait valoir que les questions concernant la description de poste et sa classification soulevées par le plaignant excèdent ma compétence. Il a réitéré que le plaignant ne contestait pas la nomination, mais bien la façon dont le PAF était utilisé.

[38] L’intimé a affirmé qu’il ne niait pas les compétences du plaignant, mais que cette reconnaissance ne devrait pas donner lieu à un précédent, dans d’autres cas, ou dans l’établissement de ces compétences.

[39] L’intimé s’est appuyé sur Tibbs c. Sous-ministre de la Défense nationale, 2006 TDFP 8, pour affirmer que le plaignant ne s’était pas acquitté de son fardeau de la preuve et qu’il n’y avait aucun élément factuel pour soutenir ses allégations. Il s’est appuyé sur Portree c. Administrateur général de Service Canada, 2006 TDFP 14, pour affirmer que le plaignant n’avait pas démontré la faute grave de l’intimé pour supporter ses allégations.

[40] L’intimé a également renvoyé à l’article 33 de la Loi pour faire valoir que l’employeur peut choisir le processus de nomination de son choix, annoncé ou non. Il a soutenu que le fait de choisir un processus de nomination non annoncé ne constituait pas un abus de pouvoir (voir Robbins c. Administrateur général de Service Canada, 2006 TDFP 17), et que le fait que le plaignant n’avait pas pu postuler n’était pas inéquitable (voir Jack c. Commissaire du Service correctionnel du Canada, 2011 TDFP 26).

[41] L’intimé s’est appuyé sur Visca c. Sous-ministre de la Justice, 2007 TDFP 24, pour faire valoir que l’employeur jouit d’un pouvoir discrétionnaire de choisir la bonne personne, pas nécessairement la plus qualifiée, même si cette dernière s’attendait à avoir le poste.

[42] L’intimé a admis ma compétence en application de la LCDP en vertu de l’article 80 de la Loi. Il a renvoyé aux articles 3 et 7 de la LCDP pour affirmer que, s’il y avait eu discrimination, c’est contre les nominations au PAF au groupe et au niveau EN-SUR-01 qu’il aurait fallu déposer la plainte, et non contre la présente nomination au groupe et au niveau EN-SUR-02.

[43] Il a renvoyé à Leang c. Commissaire du Service correctionnel du Canada, 2021 CRTESPF 66, et à Lablack c. Sous-ministre de Santé Canada, 2013 TDFP 7, pour affirmer que le plaignant doit établir une preuve prima facie selon laquelle l’intimé a commis un acte discriminatoire. Si une telle preuve est établie, il incombe alors à l’intimé de fournir une explication raisonnable selon laquelle sa conduite n’était pas discriminatoire.

[44] L’intimé a soutenu que le plaignant s’était appuyé sur le fait qu’un processus de dotation EN-SUR-02 avait été annulé, selon lui, au motif que le candidat qui aurait été nommé était plus âgé. Il a fait valoir que cette affirmation du plaignant ne reposait que sur les soupçons qu’il entretenait au sujet de ce processus de dotation. Il s’est appuyé sur Rosenthal c. Président de l’agence fédérale de développement économique, 2011 TDFP 22, pour soutenir que des allégations générales ou des soupçons n’étaient pas suffisants pour établir une preuve prima facie. L’intimé a affirmé que les raisons de l’annulation de ce processus n’avaient, de toute façon, rien à voir avec la nomination visée par la présente plainte.

[45] De plus, l’intimé a fait remarquer qu’il y avait effectivement eu des nominations au groupe EN-SUR de personnes au moins du même âge que le plaignant, alors l’allégation de discrimination ne pouvait pas tenir.

[46] L’intimé a aussi soutenu qu’il existait d’autres avenues que le PAF pour obtenir une nomination au groupe EN-SUR. Il y a eu par le passé des processus de dotation annoncés pour le groupe EN-SUR, auxquels le plaignant avait participé sans malheureusement se qualifier, ayant échoué lors de l’entrevue sur des questions d’actualités.

[47] L’intimé a aussi affirmé, en s’appuyant sur Vani c. Statisticien en chef du Canada, 2008 TDFP 29, qu’il n’y avait aucun lien entre la personne nommée et le plaignant et qu’en aucun temps a-t-il fait référence à l’âge de la personne nommée pour soutenir son allégation de discrimination basée sur l’âge. Il a soutenu que la nomination était basée sur l’ECM, et non sur l’âge de la personne. Il a affirmé que par conséquent, le plaignant ne s’est pas déchargé de son fardeau d’établir une preuve prima facie.

[48] Toutefois, l’intimé a demandé que, si j’en venais à la conclusion contraire, je prenne en considération que les actions de l’intimé sont reconnues comme raisonnables et qu’elles ne constituent pas un acte discriminatoire comme l’entend Rosenthal. Il a réitéré que le plaignant ne faisait pas partie du PAF et ne pouvait donc pas être considéré pour une nomination dans le cadre du programme. Il a réaffirmé que l’âge du plaignant n’était pas un facteur considéré pour son admissibilité, ou non, au PAF.

[49] L’intimé a de plus soutenu que le PAF lui-même n’était pas basé sur des motifs discriminatoires illicites tels que l’âge, mais sur les critères de mérite basés sur la formation. Il a affirmé que le PAF ne servait pas de prétexte pour n’engager que de plus jeunes personnes et nous a renvoyé au Guide et à la justification qu’il a présenté, où il spécifie rechercher des compétences spécifiques qui n’ont rien à voir avec l’âge. L’intimé a soutenu que le critère exigeant d’avoir un diplôme en géomatique de moins de deux ans n’était pas discriminatoire, parce qu’on voulait par ce critère recruter des gens qui étaient à la fine pointe de la technologie.

V. Motifs

[50] Le plaignant a, à maintes reprises au cours de l’audience, répété qu’il ne contestait pas les qualifications ni le mérite de la personne nommée. Il n’a pas non plus demandé la révocation de la nomination de la personne nommée. Il a aussi reconnu que le PAF en soi est valide. C’est l’application qu’on fait du PAF qu’il conteste puisqu’il n’arrive pas à y être admis. L’objet fondamental de sa plainte est de ne pas avoir été nommé par processus non annoncé dans un poste du groupe EN-SUR.

[51] Dès le début de l’audience, j’ai informé le plaignant que mon rôle était de déterminer si l’intimé avait procédé à la nomination de la personne nommée en contrevenant à la Loi, en commettant un abus de pouvoir dans l’évaluation de la personne nommée ou dans le choix du processus. Je reviendrai à l’allégation de discrimination.

[52] Je regroupe ici, pour plus de commodité, les articles de la Loi et de la LCDP auxquels ont fait référence les parties durant l’audience ou sur lesquels j’appuie ma décision. Voici d’abord les articles pertinents de la Loi :

[…]

30(1) Les nominations — internes ou externes — à la fonction publique faites par la Commission sont fondées sur le mérite et sont indépendantes de toute influence politique.

30(1) Appointments by the Commission to or from within the public service shall be made on the basis of merit and must be free from political influence.

[…]

(2) Une nomination est fondée sur le mérite lorsque les conditions suivantes sont réunies :

(2) An appointment is made on the basis of merit when

a) selon la Commission, la personne à nommer possède les qualifications essentielles — notamment la compétence dans les langues officielles — établies par l’administrateur général pour le travail à accomplir;

(a) the Commission is satisfied that the person to be appointed meets the essential qualifications for the work to be performed, as established by the deputy head, including official language proficiency; and

b) la Commission prend en compte :

(b) the Commission has regard to

(i) toute qualification supplémentaire que l’administrateur général considère comme un atout pour le travail à accomplir ou pour l’administration, pour le présent ou l‘avenir,

(i) any additional qualifications that the deputy head may consider to be an asset for the work to be performed, or for the organization, currently or in the future,

(ii) toute exigence opérationnelle actuelle ou future de l’administration précisée par l’administrateur général,

(ii) any current or future operational requirements of the organization that may be identified by the deputy head, and

(iii) tout besoin actuel ou futur de l’administration précisé par l’administrateur général.

(iii) any current or future needs of the organization that may be identified by the deputy head.

[…]

(3) Les besoins actuels et futurs de l’administration visés au sous-alinéa (2)b)(iii) peuvent comprendre les besoins actuels et futurs de la fonction publique précisés par l’employeur et que l’administrateur général considère comme pertinents pour l’administration.

(3) The current and future needs of the organization referred to in subparagraph (2)(b)(iii) may include current and future needs of the public service, as identified by the employer, that the deputy head determines to be relevant to the organization.

[…]

(4) La Commission n’est pas tenue de prendre en compte plus d’une personne pour faire une nomination fondée sur le mérite.

(4) The Commission is not required to consider more than one person in order for an appointment to be made on the basis of merit.

[…]

33 La Commission peut, en vue d’une nomination, avoir recours à un processus de nomination annoncé ou à un processus de nomination non annoncé.

33 In making an appointment, the Commission may use an advertised or non-advertised appointment process.

[…]

36(1) […] la Commission peut avoir recours à toute méthode d’évaluation — notamment la prise en compte des réalisations et du rendement antérieur, examens ou entrevues — qu’elle estime indiquée pour décider si une personne possède les qualifications visées à l’alinéa 30(2)a) et au sous-alinéa 30(2)b)(i).

36(1) In making an appointment, the Commission may … use any assessment method, such as a review of past performance and accomplishments, interviews and examinations, that it considers appropriate to determine whether a person meets the qualifications referred to in paragraph 30(2)(a) and subparagraph 30(2)(b)(i).

[…]

77(1) Lorsque la Commission a fait une proposition de nomination ou une nomination dans le cadre d’un processus de nomination interne, la personne qui est dans la zone de recours visée au paragraphe (2) peut, selon les modalités et dans le délai fixés par règlement de la Commission des relations de travail et de l’emploi, présenter à celle-ci une plainte selon laquelle elle n’a pas été nommée ou fait l’objet d’une proposition de nomination pour l’une ou l’autre des raisons suivantes :

77(1) When the Commission has made or proposed an appointment in an internal appointment process, a person in the area of recourse referred to in subsection (2) may — in the manner and within the period provided by the Board’s regulations — make a complaint to the Board that he or she was not appointed or proposed for appointment by reason of

a) abus de pouvoir de la part de la Commission ou de l’administrateur général dans l’exercice de leurs attributions respectives au titre du paragraphe 30(2);

(a) an abuse of authority by the Commission or the deputy head in the exercise of its or his or her authority under subsection 30(2);

b) abus de pouvoir de la part de la Commission du fait qu’elle a choisi un processus de nomination interne annoncé ou non annoncé, selon le cas;

(b) an abuse of authority by the Commission in choosing between an advertised and a non-advertised internal appointment process; or

[…]

80 Lorsqu’elle décide si la plainte est fondée, la Commission des relations de travail et de l’emploi peut interpréter et appliquer la Loi canadienne sur les droits de la personne, sauf les dispositions de celle-ci sur le droit à la parité salariale pour l’exécution de fonctions équivalentes.

80 In considering whether a complaint under section 77 is substantiated, the Board may interpret and apply the Canadian Human Rights Act, other than its provisions relating to the right to equal pay for work of equal value.

[…]

 

[53] Voici les articles pertinents de la LCDP :

[…]

3(1) Pour l’application de la présente loi, les motifs de distinction illicite sont ceux qui sont fondés sur la race, l’origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, l’âge, le sexe, l’orientation sexuelle, l’identité ou l’expression de genre, l’état matrimonial, la situation de famille, les caractéristiques génétiques, l’état de personne graciée ou la déficience.

3(1) For all purposes of this Act, the prohibited grounds of discrimination are race, national or ethnic origin, colour, religion, age, sex, sexual orientation, gender identity or expression, marital status, family status, genetic characteristics, disability and conviction for an offence for which a pardon has been granted or in respect of which a record suspension has been ordered.

[…]

3.1 Il est entendu que les actes discriminatoires comprennent les actes fondés sur un ou plusieurs motifs de distinction illicite ou l’effet combiné de plusieurs motifs.

3.1 For greater certainty, a discriminatory practice includes a practice based on one or more prohibited grounds of discrimination or on the effect of a combination of prohibited grounds.

[…]

7 Constitue un acte discriminatoire, s’il est fondé sur un motif de distinction illicite, le fait, par des moyens directs ou indirects :

7 It is a discriminatory practice, directly or indirectly,

a) de refuser d’employer ou de continuer d’employer un individu;

(a) to refuse to employ or continue to employ any individual, or

b) de le défavoriser en cours d’emploi.

(b) in the course of employment, to differentiate adversely in relation to an employee,

on a prohibited ground of discrimination.

[…]

 

[54] La Loi, aux alinéas 77(1)a) et 77(1)b), permet aux personnes dans la zone de recours de déposer une plainte alléguant un abus de pouvoir de la part de l’administrateur général dans l’exercice de ses attributions respectives au titre du paragraphe 30(2), et un abus de pouvoir dans le choix du processus de nomination.

[55] C’est en vertu des deux premiers paragraphes de l’article 77 de la Loi que le plaignant a déposé sa plainte à l’encontre de la nomination de la personne nommée. Il a aussi basé sa plainte sur une allégation de discrimination fondée sur l’âge. La jurisprudence a établi de longue date qu’il appartient au plaignant de démontrer, sur la prépondérance de la preuve, que l’administrateur général a abusé de son pouvoir ou qu’il a commis un acte discriminatoire. C’est au plaignant qu’il incombe de s’acquitter du fardeau de la preuve.

[56] La décision Tibbs a statué qu’il incombe au plaignant de prouver qu’il y a eu abus de pouvoir. De plus, la Loi dans son ensemble et son préambule font ressortir clairement qu’il faut plus que de simples erreurs ou omissions pour constituer un abus de pouvoir. « L’abus de pouvoir constitue plus qu’une simple erreur ou omission » et il comprendra toujours une conduite irrégulière (voir Tibbs, aux paragraphes 65 et 66).

A. Est-ce qu’il y a eu abus de pouvoir dans le choix du processus?

[57] L’article 33 de la Loi énonce clairement et sans équivoque que l’intimé peut avoir recours à un processus de nomination annoncé ou non annoncé. Ainsi, le plaignant ne peut pas tout simplement alléguer qu’il y a eu abus de pouvoir du fait que l’intimé a choisi un processus non annoncé. Il doit prouver que la décision de l’intimé de choisir un tel processus constituait un abus de pouvoir.

[58] Le paragraphe 30(4) de la Loi stipule que, dans le cas d’un processus de nomination non annoncé, la direction n’est pas tenue de considérer ou d’évaluer d’autres personnes que la personne nommée. Ainsi, il n’y avait aucun besoin d’effectuer une évaluation comparative entre le plaignant et la personne nommée.

[59] Le plaignant a reconnu à maintes reprises que le PAF était valide. Ce programme prévoit que la personne qui complète le programme se voit offrir une nomination par processus non annoncé au groupe et au niveau EN-SUR-02. J’en viens à la conclusion que, puisque le plaignant reconnaît la validité du programme et par conséquent la validité de la nomination qui en a découlé, l’allégation d’abus de pouvoir dans le choix du processus ne peut donc pas tenir. Cette allégation est donc rejetée puisqu’il n’a pas démontré qu’il y avait abus de pouvoir dans le choix du processus.

[60] Je crois important de souligner ici que, lors de l’audience, j’ai donné beaucoup de latitude au plaignant pour s’exprimer et faire valoir tous les points qu’il jugeait utiles. Celui-ci a mis l’accent sur ses études, sur ses connaissances acquises durant ses 20 années au sein de l’organisation, sur son expérience et sur les programmes informatiques auxquels il a contribué. Il a également fait valoir les différends qu’il avait avec l’intimé concernant les tâches qu’il accomplissait, sa description de travail et sa classification, pour lesquels des griefs sont toujours en cours. Il a aussi fait mention d’une plainte de harcèlement qu’il avait déposée et qui est toujours en procédures judiciaires. Il aurait voulu déposer ses évaluations du rendement annuelles, mais elles avaient été jugées irrecevables dans une décision interlocutoire rendue par la Commission.

[61] L’intimé, pour sa part, a voulu s’opposer à maintes reprises à la pertinence des témoignages offerts par le plaignant et, à ma suggestion, il a accepté de les limiter qu’à quelques-unes.

[62] Durant l’audience, j’ai aussi, à maintes reprises, affirmé au plaignant que je croyais son témoignage selon lequel il possédait l’expérience qu’il disait avoir. J’ai reconnu que, même si je ne voyais pas les évaluations du rendement annuelles, je prenais pour acquis qu’elles étaient bonnes. La raison pour laquelle j’ai accepté ces témoignages est qu’ils n’avaient aucune pertinence ou valeur probante pour déterminer les questions en litige, à savoir la présence d’abus de pouvoir ou de discrimination. Il ne faudrait pas pour autant prendre ces acceptions comme preuves avérées dans d’autres instances; chacune devra évaluer sa propre preuve.

B. Allégation en vertu de l’alinéa 77(1)a) de la Loi

[63] Puisque le plaignant a convenu que la nomination respecte le mérite et que l’évaluation de la personne nommée à la suite de sa participation au PAF n’est pas abusive, j’en viens aussi à la conclusion qu’il n’y a pas à démontrer qu’il y a eu d’abus de pouvoir dans l’application du mérite. Cette allégation est donc rejetée.

C. Allégation de discrimination basée sur l’âge

[64] L’article 7 de la LCDP indique que « [c]onstitue un acte discriminatoire, s’il est fondé sur un motif de distinction illicite, le fait […] de refuser d’employer ou de continuer d’employer un individu […] ». L’article 3 de la LCDP inclut l’âge comme motif de distinction illicite.

[65] Le plaignant doit présenter une preuve prima facie (à première vue), notamment, une preuve qui « […] porte sur les allégations qui ont été faites et qui, si on leur ajoute foi, est complète et suffisante pour justifier un verdict en faveur de la plaignante, en l’absence de réplique de l’employeur intimé » (tiré de Commission ontarienne des droits de la personne c. Simpsons-Sears, 1985 CanLII 18 (CSC), [1985] 2 R.C.S. 536). Si une telle preuve est établie, il incombe alors à l’intimé de fournir une explication raisonnable selon laquelle sa conduite n’était pas discriminatoire.

[66] La décision Leang reprend, au paragraphe 68, les critères pour établir une preuve prima facie de discrimination :

[68] Afin d’établir une preuve prima facie de discrimination, la plaignante devait démontrer (1) qu’elle possède une caractéristique protégée par la LCDP contre la discrimination, (2) qu’elle a subi un effet préjudiciable relativement à son emploi et (3) que la caractéristique protégée a constitué un facteur dans la manifestation de l’effet préjudiciable (voir Moore c. Colombie-Britannique (Éducation), 2012 CSC 61).

 

[67] Dans le présent cas, le plaignant ne m’a pas convaincu de l’existence d’une preuve prima facie. Effectivement, l’âge est reconnu comme motif illicite de discrimination par la LCDP. La décision Vani, au par. 54, précise toutefois ce qui suit :

[54] De plus, en l’espèce, il ne suffit pas au plaignant de présenter des allégations de discrimination fondée sur l’âge. Il doit alléguer des faits qui, s’ils sont prouvés, permettraient de déterminer qu’ils lui ont nui d’une manière ou d’une autre en raison de son âge. Ce lien direct n’existe pas entre les faits allégués par le plaignant. En conséquence, son allégation d’abus de pouvoir lié à une discrimination fondée sur l’âge n’est pas prouvée.

 

[68] Il en va de même dans le présent cas. Le plaignant a allégué être victime de discrimination, mais il a reconnu que d’autres personnes de son âge avaient effectivement été nommées au groupe EN-SUR et qu’il y avait eu des personnes plus vieilles et plus jeunes qui avaient été nommées. De plus, l’âge de la personne nommée dans la présente plainte n’a fait l’objet d’aucune preuve à savoir si effectivement elle était plus jeune que le plaignant. Et même si tel avait été le cas, comme dans Vani, le plaignant n’a pas établi un lien direct avec les faits allégués pour me convaincre d’une preuve prima facie de discrimination basée sur l’âge.

[69] J’en viens donc à la conclusion que le plaignant n’a pas établi une preuve prima facie de discrimination. Par conséquent, le plaignant n’a pas démontré que l’intimé a abusé de son pouvoir.

[70] Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

(L’ordonnance apparaît à la page suivante)


VI. Ordonnance

[71] La plainte est rejetée.

Le 26 mars 2024.

Guy Grégoire,

une formation de la Commission des

relations de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral

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