Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

La plaignante a présenté une plainte en vertu de l’article 133 du Code, alléguant que la défenderesse avait contrevenu à l’article 147 lorsqu’elle avait mis fin à son emploi à titre de représailles pour avoir déposé une plainte de violence en milieu de travail – après avoir été absente du milieu de travail pendant deux ans, la défenderesse a cherché à régulariser son congé et sa situation d’emploi en lui envoyant de multiples « lettres d’options » – les deux dernières lettres l’informaient que, si elle ne répondait pas, elle risquait d’être licenciée pour des raisons autres qu’un manquement à la discipline ou une inconduite – la plaignante n’a répondu à aucune des lettres, choisissant plutôt de présenter une plainte de violence en milieu de travail contre la défenderesse et, en fin de compte, une plainte auprès de la Commission – la défenderesse a demandé à la Commission de rejeter la plainte au motif qu’elle était hors délai ou, à titre subsidiaire, qu’il n’y avait pas eu de représailles au sens du Code – la Commission a conclu que la plainte avait été présentée dans les délais, mais l’a rejetée sur le fond – en appliquant le critère dans White, la Commission a conclu que la défenderesse n’avait pas contrevenu à l’article 147 du Code en indiquant l’option d’un congédiement non disciplinaire dans les lettres d’options – lorsque la plaignante a présenté sa plainte, elle n’avait pas été licenciée – la mention dans les lettres d’options de licenciement ou de congédiement pour incapacité n’était ni un licenciement ni une menace de licenciement, mais plutôt une option administrative que la défenderesse pouvait exercer pour remédier à l’absence prolongée d’une employée en raison d’une maladie – le fait d’offrir à une employée des options pour résoudre une situation d’absence en milieu de travail, sans plus, n’est pas punitif, disciplinaire ou de représailles.

Plaintes rejetées.

Contenu de la décision

Date: 20240307

Dossier: 560-34-41773

XR: 561‑02‑41772

 

Référence: 2024 CRTESPF 32

Loi sur la Commission

des relations de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral et

Loi sur les relations de travail

dans le secteur public fédéral

Armoiries

Devant une formation de la

Commission des relations

de travail et de l’emploi

dans le secteur public fédéral

Entre

 

Rupinder Panesar

plaignante

 

et

 

Agence du revenu du Canada

 

défenderesse

Répertorié

Panesar c. Agence du revenu du Canada

Affaire concernant une plainte visée à l’article 133 du Code canadien du travail

Devant : Caroline E. Engmann, une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

Pour la plaignante : Elle‑même

Pour la défenderesse : Elizabeth Matheson, avocate

Affaire entendue par vidéoconférence
du 21 au 23 juin 2022.

(Arguments écrits déposés les 7, 8, 14 et 18 juillet 2022.)

(Traduction de la CRTESPF)


MOTIFS DE DÉCISION

(TRADUCTION DE LA CRTESPF)

I. Plainte devant la Commission

[1] Le 20 mai 2020, Rupinder Panesar (la « plaignante ») a présenté une plainte en vertu de l’article 133 du Code canadien du travail (L.R.C. (1985), ch. L‑2; le « Code ») auprès de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (la « Commission ») selon laquelle son employeur, l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC » ou la « défenderesse »), l’avait licenciée en guise de représailles pour avoir présenté une plainte de violence en milieu de travail, ce qui est contraire à l’article 147 du Code.

[2] Au moment de sa plainte, elle était une employée de l’ARC occupant un poste de conseillère en assurance de la qualité à la Section de l’assurance de la qualité de la Direction de la taxe sur les produits et services/taxe de vente harmonisée (la « Direction de la TPS/TVH ») de la Direction générale de l’observation de l’ARC. Son poste était classifié au groupe et au niveau AU‑04 et faisait partie de l’unité de négociation représentée par l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada (l’« IPFPC »).

[3] La défenderesse s’est opposée à la compétence de la Commission pour entendre le grief parce qu’il est hors délai. De plus, la défenderesse a nié avoir pris une mesure contre la plaignante qui était interdite en vertu de l’article 147 du Code et, par conséquent, la Commission devrait rejeter la plainte.

[4] Lorsque la plaignante a présenté la présente plainte, elle a également présenté une plainte contre l’IPFPC, alléguant qu’il avait manqué à son devoir de représentation équitable. La Commission a rejeté cette plainte le 27 octobre 2021, dans Panesar c. Institut professionnel de la fonction publique du Canada, 2021 CRTESPF 119.

II. Résumé et décision

[5] Les faits essentiels à la base de la plainte sont relativement simples et clairs. La plaignante avait été absente du lieu de travail depuis plus de deux ans, d’abord en congé de maladie payé, puis en congé de maladie non payé. Entre le 3 janvier 2019 et le 24 février 2020, la défenderesse lui a envoyé un total de quatre lettres décrivant les options pour régler son congé et son statut d’emploi (ces lettres sont communément appelées des « lettres d’options »). La défenderesse a envoyé les lettres sous les auspices de la Directive sur les congés et les modalités de travail spéciales (la « Directive ») de l’ARC.

[6] Le 14 juin 2019, la plaignante a présenté une plainte en vertu des dispositions du Code portant sur la violence en milieu de travail (la « plainte de violence en milieu de travail »). Le Programme du travail du ministère de l’Emploi et du Développement social (EDSC) traitait la plainte de violence en milieu de travail à la date à laquelle la présente plainte pour représailles a été présentée.

[7] Le 24 février 2020, la défenderesse a envoyé à la plaignante une troisième lettre d’options, dans laquelle elle lui demandait de choisir l’une des quatre options décrites dans la lettre pour régler son statut de congé non payé et d’emploi. On lui avait donné une date limite du 6 mars 2020 pour répondre, à défaut de quoi la direction recommanderait son licenciement pour des raisons autres qu’un manquement à la discipline ou une inconduite. La plaignante n’a pas répondu à cette lettre d’options ni à aucune autre lettre d’options; elle a plutôt présenté la présente plainte.

[8] Selon les éléments de preuve, la plaignante a communiqué avec la Commission en février 2020 pour présenter la présente plainte. Il existait une certaine confusion administrative quant à la réparation précise qu’elle demandait; par conséquent, sa plainte n’a été enregistrée par la Commission que le 20 mai 2020. Selon les éléments de preuve, je conclus que la plainte a été présentée dans les délais prescrits et l’objection de la défenderesse relative à la compétence est rejetée.

[9] Sur le fond, je rejette la plainte, car je conclus qu’en envoyant les lettres d’options du 30 janvier 2020 et du 24 février 2020, la défenderesse n’a pas contrevenu à l’article 147 du Code. Je parviens à cette décision pour deux raisons. En premier lieu, la lettre d’options en soi ne constituait pas une activité interdite par l’article 147. En deuxième lieu, même si j’ai tort, la plainte est quand même rejetée, car la plaignante n’a établi aucun lien entre l’envoi de cette lettre d’options et l’exercice de son droit de présenter une plainte de violence en milieu de travail.

III. Décisions

[10] Pendant et avant l’audience, j’ai rendu plusieurs décisions procédurales, interlocutoires et en matière de preuve. J’estime que je dois traiter officiellement certaines d’entre elles dans la présente décision au bénéfice des parties et fournir le contexte approprié aux fins de la présente décision. Trois sont décrites dans la présente section.

A. Le refus de la demande d’ajournement de la plaignante

[11] La présente affaire devait procéder par vidéoconférence aux dates fixées, conformément aux lignes directrices de la Commission relatives aux vidéoconférences. La plaignante a demandé une audience en personne à Ottawa, en Ontario, qui a été accordée.

[12] La plaignante a ensuite demandé que l’audience en personne soit reportée. Lorsque j’ai reçu sa demande, j’ai prévu une conférence préparatoire à l’audience le 10 juin 2022 pour recevoir les arguments des parties. J’ai décidé comme suit après l’appel, refusant la demande :

[Traduction]

Le 10 juin 2022, une conférence préparatoire à l’audience a été tenue pour donner à la plaignante l’occasion de fournir [à la Commission] une explication détaillée de sa demande d’ajournement de l’audience en personne qui a été accordée à la suite de sa demande.

Selon les explications fournies par la plaignante, la Commission n’est pas convaincue qu’il serait dans l’intérêt de la justice et de l’équité d’accorder la demande d’ajournement. Le préambule de la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral reconnaît la résolution « efficace » des problèmes en milieu de travail. Accorder la demande de la plaignante ne favorisera pas la résolution efficace de sa plainte. La demande d’ajournement est par les présentes refusée.

[…]

B. Décision en matière de récusation

[13] Après avoir rendu cette décision, le 13 juin 2022, la plaignante a écrit à la Commission. Elle a déclaré qu’elle s’opposait à la commissaire désignée à son dossier et a demandé qu’un commissaire [traduction] « […] qui n’était pas un ancien avocat et qui n’avait pas représenté la défenderesse auparavant, qui n’était pas un ancien employé du gouvernement (fédéral, provincial ou territorial et/ou municipal), dont la carrière n’était pas celui de fonctionnaire » soit affecté à son dossier. En tant que formation de la Commission saisie de la présente affaire, j’ai considéré cette demande comme une requête en récusation et j’ai informé les parties que je rendrai ma décision bientôt. J’ai rendu ma décision relative à la requête en récusation le 17 juin 2022. Pour les motifs décrits dans la décision relative à la récusation, j’ai rejeté la demande de récusation. Cette décision est jointe à la présente décision en tant qu’annexe A.

C. Première décision en matière de preuve – demande de citer des témoins

[14] Au début de l’audience, la plaignante a demandé à citer quatre témoins, comme suit :

[Traduction]

[…]

Demande à la Commission concernant la comparution des [quatre] témoins de la défenderesse, notamment [noms caviardés] qui ont formulé des allégations (des faussetés, car elles n’ont pas eu lieu) contre moi et dont les fausses déclarations ont fondé les demandes coercitives d’évaluation de l’« aptitude au travail » et d’« évaluation médicale ». De plus, selon les allégations de ces témoins, l’employeur m’a refusé l’accès au lieu de travail à compter de 12 h le 21 juin 2017.

[…]

 

[15] Ma décision de rejeter sa demande se lit comme suit :

[Traduction]

La plaignante a demandé la présence de quatre personnes – [noms caviardés] – pour fournir des éléments de preuve ou des témoignages et pour lui permettre de les interroger au sujet de certaines déclarations ou affirmations faites à son sujet en 2016 et 2017 ou vers ces années. D’après le témoignage de la plaignante, ces personnes ont fait des déclarations qui ont servi de base à une demande de l’employeur visant à ce que la plaignante se soumette à une évaluation de l’aptitude au travail (EAT) – une question qui continue d’être un sujet de discorde entre la plaignante et son employeur. La pertinence de la demande de l’employeur d’une EAT ne constitue pas une question dont je suis saisie dans la présente plainte et je ne suis pas non plus tenue d’évaluer la validité ou la légitimité de la demande de l’employeur pour rendre ma décision en vertu des articles 133 et 147 du Code canadien du travail. La question de savoir si l’employeur avait une justification pour exiger ou demander une EAT relève d’un autre processus et tirer des conclusions ou des décisions d’évaluation concernant cette question serait ultra vires et outrepasserait ma compétence. En tant qu’organes établis par la loi, les décideurs administratifs doivent trancher des questions qui relèvent manifestement de leur mandat prévu par la loi.

D’après mon évaluation, rien de ce que ces quatre personnes pourront éventuellement dire dans leur témoignage ne me sera d’aucune utilité dans la présente affaire. Par conséquent, je rejette la demande de la plaignante visant à ce que ces personnes assistent à l’audience afin d’être interrogées par la plaignante.

Par souci de clarté, la présente décision n’empêche pas la plaignante d’obliger ces quatre personnes à témoigner dans une instance parallèle, en cours ou future où la légitimité de la demande de l’employeur visant à ce que la plaignante subisse une EAT est en litige. La plaignante peut être déçue par cette décision, mais je crois qu’il s’agit de la décision interlocutoire la plus juste et la plus judicieuse du point de vue juridique de prendre pour protéger les intérêts de la plaignante dans ses affaires en instance avec son employeur.

IV. Résumé de la preuve

A. Pour la plaignante

[16] La plaignante a témoigné pour son propre compte. Je lui ai permis de témoigner au sujet d’événements survenus au‑delà des 90 jours qui ont précédé le mois de mai 2020, lorsqu’elle a présenté sa plainte, même si la défenderesse s’y est opposée. J’ai décidé qu’elle ne pouvait témoigner au sujet de ces événements qu’à titre de considérations générales et de renseignements contextuels et que je ne tirerais aucune conclusion factuelle concernant des questions dont je n’étais pas directement saisie dans la présente plainte, plus particulièrement, sa plainte pour discrimination et harcèlement et la plainte de violence en milieu de travail.

[17] Jusqu’en février 2021, la plaignante était employée par l’ARC à la Section de l’assurance de la qualité pour les petites et moyennes entreprises. Elle a commencé à travailler pour l’ARC en tant que PM‑02 dans la région du Grand Toronto en Ontario, et elle a étudié et travaillé jusqu’à un poste AU‑04. Sa résidence est à Brampton, en Ontario, ce qui n’a jamais changé. Lorsqu’elle a accepté le poste AU‑04 à l’administration centrale de l’ARC en 2004, elle est demeurée une résidente à Brampton et se rendait chaque semaine à Ottawa pour son travail.

[18] Le 1er décembre 2015, elle a commencé à travailler à la Section de l’assurance de la qualité après une mutation latérale permanente. Elle s’est adressée au directeur de sa section et a demandé une mesure d’adaptation fondée sur sa situation de famille. Elle a cru comprendre qu’elle devait suivre une formation donnée par le gestionnaire de la section pendant un an et elle a été informée qu’elle pourrait ensuite travailler à distance. Elle devait commencer à travailler à distance le 1er décembre 2016. La défenderesse n’a jamais honoré sa demande de mesure d’adaptation fondée sur sa situation de famille.

[19] Elle n’a pas été autorisée à travailler dans son poste d’attache AU‑04 et n’a pas pu postuler des postes supérieurs en raison d’un manque d’expérience. Par conséquent, elle souhaitait changer de section, alors elle a communiqué avec une autre directrice pour lui demander de travailler dans sa section. Elle a rencontré son directeur pour discuter de ses préoccupations quant au fait qu’on ne lui attribuait pas de travail à son niveau d’attache. Lors de cette réunion, son directeur a menacé de lui imposer un plan d’action. Elle a été très surprise que le directeur la menace, qu’elle souhaitait signaler au commissaire adjoint de l’ARC.

[20] Elle a été élevée avec amour et compassion. Ses parents ne lui ont jamais crié dessus. Lorsqu’elle était enfant, elle n’a subi aucun abus de quelque nature que ce soit. Par conséquent, lorsque quelqu’un lui crie dessus, cela lui cause un préjudice. Elle ne voulait pas rencontrer son directeur à huis clos à moins que ce soit pour obtenir une critique constructive. Son directeur l’a interrogée au sujet de ses congés et de ses heures de travail. Elle a expliqué qu’elle devait quitter son travail tôt le vendredi pour rentrer chez elle à Brampton et qu’elle ne comprenait donc pas la raison pour laquelle elle était interrogée. La conversation a eu lieu en juillet 2016. Elle estimait qu’elle était surveillée, et tout ce qu’elle faisait est devenu un problème.

[21] Elle a rencontré le directeur de la Division des spécialistes de la vérification informatisée, qui a par la suite présenté de manière inexacte ce qui s’est passé au cours de leur réunion. Elle avait les larmes aux yeux et était bouleversée lorsqu’elle songeait au décès de son père. La défenderesse avait refusé de lui permettre de travailler de Toronto, et elle n’a pas pu être avec son père lorsqu’il est décédé. Même aujourd’hui, elle devient émotionnelle à l’idée qu’elle n’était pas présente au moment du décès de son père. Les choses se détérioraient dans son lieu de travail; elle était convoquée à des réunions impromptues et était interrogée à huis clos. La situation du travail était assez stressante.

[22] Elle s’est adressée au directeur général intérimaire et a expliqué qu’elle ne se sentait pas en sécurité dans son milieu de travail et qu’elle avait besoin d’un « havre ».

[23] Le stress au travail l’a fait s’effondrer au travail un jour. La défenderesse a appelé une ambulance pour l’emmener à l’hôpital. Elle s’est présentée au travail le lendemain et a découvert qu’un collègue mettait des chaussures sur son bureau, où elle mangeait. Le lendemain, le même collègue est entré et a commencé à frapper bruyamment les porte‑documents et à fermer les portes du cabinet. Elle a quitté la zone parce qu’elle ne se sentait pas en sécurité.

[24] Puisqu’elle s’était effondrée au milieu de travail, elle se préoccupait de sa santé physique; elle a donc pris un congé. Elle a pris un congé de maladie à la fin d’août 2016. Le 4 octobre 2016, la défenderesse lui a envoyé une trousse dans laquelle elle demande à la plaignante de subir une évaluation de l’aptitude au travail. Elle n’a jamais répondu à la lettre et n’a pas fourni la trousse à son médecin.

[25] Elle a plutôt fourni à la défenderesse la note suivante provenant de son médecin :

[Traduction]

La présente vise à certifier que la patiente indiquée ci‑dessus a été vue dans notre cabinet médical le 8 octobre 2016, elle n’a pas pu travailler et/ou aller à l’école pour des raisons médicales aux dates indiquées ci‑dessous.

Du : 5 septembre 2016 Au : 6 octobre 2016

Commentaires :

Elle peut retourner au travail le 11 octobre 2016.

 

[26] Elle a témoigné que lorsqu’elle est retournée au travail, elle a fourni la note de son médecin à la direction. La direction l’a ensuite informée qu’une demande d’accès à l’information (« demande d’AIPRP ») nécessitait son attention. Elle croyait que la direction cherchait des renseignements à son sujet et que quelqu’un de l’ARC avait présenté cette demande d’AIPRP. Elle a demandé à la Commission d’ordonner que la défenderesse divulgue l’auteur de la demande d’AIPRP. Je lui ai expliqué que les renseignements n’étaient pas pertinents à ma décision; cependant, j’ai ordonné à la défenderesse de lui fournir les renseignements s’ils étaient disponibles.

[27] La plaignante a affirmé que lorsqu’elle s’est rendue à son bureau d’origine, elle a découvert que ses effets avaient été déplacés à un autre bureau à cloisons. Son bureau avait été ébréché dans un coin, sa règle était effilée et son clavier était couvert de viande. Elle a discuté avec une adjointe administrative au sujet de la viande sur son clavier, et l’adjointe a dit qu’elle le nettoierait. Toutefois, selon la plaignante, le nettoyage n’aurait pas enlevé la viande qui s’était incrustée. Elle en a demandé un nouveau, qu’elle a finalement pu obtenir de la Section de la technologie de l’information de l’ARC.

[28] Elle a trouvé que lorsqu’elle est retournée au travail, les choses ne s’étaient pas améliorées; en fait, les choses s’étaient empirées. Son évaluation du rendement a été entièrement négative. On lui a dit qu’elle ne pouvait plus faire son travail, et son évaluation a été modifiée en vue d’inclure son comportement. Son gestionnaire a effectué un faux examen semestriel et on lui a donné un niveau deux. La défenderesse pouvait congédier un employé s’il obtenait un deuxième niveau deux.

[29] Elle a présenté une plainte de discrimination et de harcèlement contre plusieurs personnes en vertu de la Directive sur un milieu de travail exempt de discrimination et de harcèlement interne de l’ARC. La défenderesse n’a pas enquêté sur sa plainte parce qu’elle a dit que les allégations ne satisfaisaient pas aux critères d’acceptation en vertu de sa directive.

[30] La défenderesse lui a demandé de se conformer volontairement à une évaluation médicale. Son agent des relations de travail de l’IPFPC lui a demandé d’appeler son médecin et de fixer une date pour l’évaluation. Elle a consulté son médecin et a demandé un rendez‑vous. Elle n’a pas accepté de subir l’évaluation médicale; elle n’a jamais changé d’avis quant à s’y soumettre. Elle ne souscrivait pas au fondement de cette évaluation et, à son avis, une fois qu’elle l’acceptait, cela signifierait qu’elle souscrivait également au faux récit qui a servi de fondement de la demande de se soumettre à l’évaluation.

[31] Les agents des ressources humaines de l’ARC lui ont également dit de se conformer à l’évaluation médicale.

[32] Elle a écrit au commissaire adjoint de sa direction générale. Elle souhaitait être mutée à une autre direction générale et une autre relation hiérarchique.

[33] Elle a été informée qu’à compter du 21 juin 2017, elle n’était pas autorisée à se présenter au milieu de travail. Elle a été mise en congé de maladie. La défenderesse a communiqué avec la Sun Life, qui l’a appelée et l’a informée qu’une recommandation avait été envoyée relativement à des prestations d’invalidité à son égard et qu’une évaluation médicale était nécessaire. Elle a reçu une lettre qui indiquait qu’elle ne recevrait aucune prestation d’assurance‑emploi. Plus tard, elle a reçu une lettre de la défenderesse indiquant qu’elle l’avait mise en congé de maladie, puis en congé non payé. La défenderesse lui a alors envoyé les lettres d’options par courrier ordinaire et recommandé. Aucune des options présentées dans la lettre d’options ne constituait un bon choix pour elle, étant donné qu’elle avait travaillé 20 ans auprès de l’ARC.

[34] Elle avait été absente du lieu de travail depuis le 21 juin 2017. Elle n’a répondu à aucune des demandes de la défenderesse concernant une évaluation de l’aptitude au travail. Le 27 juillet 2017, le commissaire adjoint de l’ARC pour sa direction lui a écrit et lui a dit de communiquer avec le Programme du travail à EDSC.

[35] Elle a communiqué avec EDSC en 2019 et a présenté une plainte auprès de son Programme du travail le 14 juin 2019 (remarque : le 14 juin 2019 est la date figurant sur le formulaire d’enregistrement de la plainte; cependant, dans une lettre du 24 septembre 2019 provenant d’EDSC, la date de la plainte est indiquée comme étant le 17 juin 2019). Dans la section du formulaire d’enregistrement de la plainte intitulée « Nature de la plainte », elle a déclaré ce qui suit :

[Traduction]

VIOLENCE EN MILIEU DE TRAVAIL. Les étapes 1 et 2 n’ont pas été effectuées. Je me suis plainte au commissaire adjoint de la situation de violence en milieu de travail, il n’y a eu aucune tentative de régler la situation et aucune personne compétente n’a été nommée pour enquêter sur mes allégations de harcèlement.

 

[36] À l’origine, EDSC a fermé son dossier. Elle a reçu une lettre du 24 septembre 2019 qui indiquait ce qui suit :

[Traduction]

[…]

Après avoir enquêté sur votre plainte, à mon avis, l’employeur s’est conformé aux exigences de la Loi. Étant donné que vous ne m’avez fourni aucun renseignement indiquant que vous souhaitez poursuivre l’affaire, on a jugé que votre plainte avait été retirée le 13 septembre 2019.

Le Programme du travail d’Emploi et Développement social Canada ne peut donc prendre aucune autre mesure en votre nom.

[…]

 

[37] Après avoir reçu cette lettre, elle a communiqué avec EDSC et la plainte a été relancée. Elle lui a ensuite transmis la plainte de discrimination et de harcèlement qu’elle avait présentée antérieurement auprès de la défenderesse.

[38] Selon la plaignante, la défenderesse a reconnu sa plainte de violence en milieu de travail et l’a informée qu’elle entamerait le processus d’enquête. Il a fallu des mois à la défenderesse pour choisir la personne qu’elle voulait comme personne compétente [une personne compétente est une personne indépendante, objective et compétente choisie pour enquêter sur la plainte de violence en milieu de travail]. Elle a reçu quatre noms de la défenderesse, mais elle estimait qu’aucune de ces personnes n’était impartiale, et elle a informé la défenderesse de sa position. Elle lui a demandé d’expliquer la raison pour laquelle elle estimait qu’elles n’étaient pas impartiales. Selon elle, en vertu des Interprétations, politiques et guides no 943‑1‑IPG‑081 (IPG) d’EDSC, elle n’était pas tenue de fournir une explication à la défenderesse et elle a donc refusé d’en fournir une.

[39] Elle fait référence à une lettre qu’elle a reçue de M. Melançon, gestionnaire, Section de l’assurance de la qualité, du 24 février 2020, exposant les options pour régler sa situation de congé non payé. Elle a déclaré que la lettre constituait des représailles, en particulier son dernier paragraphe, qui se lit comme suit :

[Traduction]

Si vous ne choisissez pas votre option au plus tard à cette date, la direction recommandera votre licenciement « pour des raisons autres qu’un manquement à la discipline ou une inconduite » conformément à l’alinéa 51(1)g) de la Loi sur l’Agence du revenu du Canada.

 

[40] En ce qui a trait à la question concernant le respect des délais, la plaignante a témoigné qu’elle avait déposé sa plainte en février 2020. Elle a d’abord communiqué avec le Conseil canadien des relations industrielles (CCRI) le 6 février 2020 afin de déterminer ses options en matière de réparation après avoir reçu la deuxième lettre d’options du 30 janvier 2020. Le CCRI l’a informée que la Commission était le forum approprié pour ses options en matière de réparation. Le 14 février 2020, elle a composé le numéro sans frais de la Commission et a laissé deux messages avec son numéro de téléphone. Elle n’a reçu aucune réponse, donc le 24 février 2020, elle a de nouveau communiqué avec le CCRI et a expliqué qu’elle n’avait reçu aucune réponse de la Commission.

[41] Finalement, elle s’est entretenue avec un membre de l’équipe du greffe de la Commission. Elle a expliqué à l’agent du greffe qu’elle avait trouvé les formulaires sur le site Web de la Commission confus et qu’elle avait déterminé que les formulaires 16 et 26 étaient pertinents à sa situation. À la suite de sa conversation téléphonique avec l’agent du greffe, elle a reçu un courriel de la Commission l’informant qu’elle avait utilisé les mauvais formulaires pour présenter une plainte contre son employeur.

[42] Elle a fourni des formulaires de plainte pour démontrer qu’elle avait communiqué avec la Commission en février 2020.

[43] En contre‑interrogatoire, elle a confirmé qu’elle avait reçu la lettre du 30 janvier 2017 du commissaire adjoint de l’ARC l’informant des raisons pour lesquelles sa plainte de discrimination et de harcèlement ne ferait l’objet d’aucune enquête.

[44] Elle a également confirmé qu’elle avait été absente du lieu de travail depuis le 21 juin 2017.

1. Correspondance provenant de Nathalie Brisson

[45] En contre‑interrogatoire, la plaignante a confirmé avoir reçu une lettre du 3 janvier 2019 provenant de Nathalie Brisson, directrice intérimaire de son unité de travail. Cette lettre contenait les pièces jointes suivantes : 1) une lettre à l’intention d’un médecin; 2) des formulaires de consentement à l’évaluation médicale, l’un pour le médecin de la plaignante et l’autre pour une clinique médicale; 3) un formulaire d’Évaluation de l’aptitude au travail (FEAT). La lettre faisait référence à deux lettres antérieures qui avaient été envoyées à la plaignante le 22 septembre 2017 et le 18 janvier 2018, respectivement. Mme Brisson a confirmé que la plaignante avait été temporairement rayée de l’effectif parce qu’elle avait épuisé tous ses crédits de congé. Mme Brisson a ensuite décrit les options disponibles pour régler le statut de congé non payé de la plaignante comme suit :

[Traduction]

[…]

[…] Vers la période de 18 mois, lorsqu’un employé est en congé non payé (CNP), une lettre appelée la « lettre d’options » lui est envoyée. Cette lettre offre quatre options :

1. Retourner au travail (avec un FEAT confirmant l’aptitude au travail de l’employé)

2. Retraite pour des raisons médicales

3. Retraite

4. Démission

[…]

 

[46] Mme Brisson a en outre informé la plaignante que si elle souhaitait retourner au travail, elle devrait se soumettre à l’évaluation de l’aptitude au travail. Les étapes à suivre ont également été décrites dans la lettre.

[47] En contre‑interrogatoire, la plaignante a confirmé qu’elle avait également reçu une lettre du 16 mai 2019 provenant de Mme Brisson, qui décrivait toutes les lettres antérieures que l’ARC avait envoyées au sujet de son statut de congé, indiquant que la plaignante n’avait pas répondu.

[48] Mme Brisson a fait remarquer que la direction avait tenté de communiquer plusieurs fois avec la plaignante, sans succès, en vue de discuter de sa situation de congé non payé. Elle a décrit quatre options pour régler la situation de congé de la plaignante et a demandé que la plaignante fournisse une réponse écrite au plus tard le 16 juin 2019. Une enveloppe préadressée a été fournie à cette fin.

[49] La plaignante a témoigné qu’elle avait reçu la deuxième lettre de Mme Brisson, mais qu’elle n’y avait pas répondu.

2. Correspondance provenant de Jean‑Marc Melançon

[50] La plaignante a reçu une lettre du 30 janvier 2020, provenant de Jean‑Marc Melançon, gestionnaire, Section de l’assurance de la qualité, décrivant les quatre options pour régler son statut de congé non payé. La lettre concluait comme suit :

[Traduction]

[…]

[…] une réponse écrite indiquant votre décision et la date d’entrée en vigueur est requise; veuillez faire votre choix sur le formulaire de sélection des options de CNP ci‑joint, et me le retourner d’ici le 21 février 2020. Si vous ne choisissez pas votre option au plus tard à cette date, la direction peut amorcer le processus visant à mettre fin à votre emploi « pour des raisons autres qu’un manquement à la discipline ou une inconduite » conformément à l’alinéa 51(1)g) de la Loi sur l’Agence du revenu du Canada.

Vous pouvez communiquer avec moi au [numéro de téléphone caviardé] si vous avez des questions ou avez besoin de soutien dans le cadre de ce processus.

[…]

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

 

[51] La plaignante a témoigné qu’elle n’avait pas répondu à la lettre. Elle a estimé qu’il s’agissait de représailles et elle a conclu que la direction prenait déjà des mesures pour mettre fin à son emploi.

[52] Elle a reçu la lettre d’options du 24 février 2020 provenant de M. Melançon qui faisait suite à la lettre d’options du 30 janvier 2020. En plus de décrire les quatre options pour régler la situation de congé non payé, la lettre indiquait que si elle n’avait pas répondu avant la date limite du 6 mars 2020, la direction recommanderait son licenciement.

[53] Après un contre‑interrogatoire plus approfondi, la plaignante a confirmé qu’elle n’avait pas encore été licenciée à la date à laquelle elle avait déposé sa plainte. Elle a confirmé que la date réelle de son licenciement était le 22 février 2021.

  • [54]La plaignante a reconnu qu’elle avait reçu une lettre du 6 mai 2020 provenant d’EDSC, dans laquelle il est indiqué en partie ce qui suit :

[Traduction]

[…]

Après avoir enquêté sur votre plainte, à mon avis, la question sera mieux réglée entre les parties sans que j’y intervienne davantage. Par conséquent, conformément aux dispositions de l’alinéa 127.1(10)b de la partie II du Code canadien du travail, je recommande que vous et votre employeur régliez la question entre vous.

Le Programme du travail d’Emploi et Développement social Canada ne prendra donc aucune autre mesure en votre nom.

[…]

3. La réponse de la plaignante

[55] En réponse, la plaignante a déclaré qu’elle s’opposait aux lettres d’options qui lui avaient été présentées au cours de son contre‑interrogatoire parce qu’elles étaient fondées sur des allégations de ouï‑dire d’incidents qui n’ont pas eu lieu. Elle a témoigné que la défenderesse n’avait pas respecté les dispositions du Code, et elle a cherché à déposer en preuve l’IPG d’EDSC.

[56] Elle a ensuite lu les parties de l’IGP qui énoncent les définitions du harcèlement et des facteurs qui contribuent à la violence en milieu de travail (les sections 3.1, 3.2, 3.3, 11.1 et 11.2). Elle a témoigné que la défenderesse n’avait pas respecté l’IPG. Selon elle, EDSC l’a informée que la défenderesse devait nommer une personne compétente, ce qui n’avait toujours pas été fait. Par conséquent, sa plainte de violence en milieu de travail était toujours en cours.

B. Deuxième décision en matière de preuve – l’IPG

[57] La plaignante a demandé que l’IGP soit indiquée en tant que pièce. La défenderesse s’est opposée à son admissibilité pour des motifs de pertinence. J’ai accepté l’IGP et l’ai indiquée comme une pièce, mais j’ai jugé que sa pertinence par rapport à la plainte était douteuse. Compte tenu de la confusion apparente de la plaignante quant à la pertinence de l’IPG à la présente plainte, je conclus qu’il est nécessaire de reproduire ma décision, comme suit :

[Traduction]

[…]

Je ne suis pas convaincue de la pertinence de ce document à toute question que je dois trancher dans la présente plainte. Après avoir entendu les arguments des parties, je doute toujours de sa pertinence. Étant donné que la plaignante reconnaît que sa plainte de violence en milieu de travail qui relève de cette IPG demeure ouverte et continue, je demeure prudente de ne pas prendre de décision au sujet d’un processus qui ne relève pas directement de ma compétence.

[…]

C. Pour la défenderesse

[58] Deux témoins ont témoigné au nom de la défenderesse, soit Mme Brisson et M. Melançon. Ils ont chacun signé et envoyé des lettres d’options à la plaignante pendant qu’ils occupaient le poste de gestionnaire de la Section de l’assurance de la qualité.

[59] Mme Brisson est actuellement la gestionnaire de la Section des renseignements d’entreprise de la Direction de la TPS/TVH à la Direction générale des programmes d’observation. Auparavant, elle a été la directrice de la Section de l’assurance de la qualité pendant environ un an. Entre le 26 février 2018 et le 30 septembre 2019, elle a été la directrice intérimaire de la Division des spécialistes de la vérification informatisée et, à ce titre, elle avait des pouvoirs délégués en matière de ressources humaines pour trois sections, dont la Section de l’assurance de la qualité, où la plaignante travaillait.

[60] Pendant toute la période pertinente lorsqu’elle occupait son rôle, la plaignante était en congé non payé.

[61] Mme Brisson a envoyé une lettre du 3 janvier 2019 à la plaignante à titre d’avertissement préalable selon lequel la fin de la période de 18 mois de son congé non payé approchait et l’informait qu’une lettre d’options arriverait bientôt. Mme Brisson a fait référence aux lettres précédentes envoyées à la plaignante et auxquelles elle n’a pas répondu. La lettre de Mme Brisson portait sur les quatre options dont disposait la plaignante pour régulariser sa situation de congé non payé et soulignait qu’une évaluation de l’aptitude au travail serait nécessaire si elle choisissait de retourner au travail.

[62] Mme Brisson a fait référence à la Directive, qui exige que les gestionnaires doivent « […] réexaminer chaque cas périodiquement afin de s’assurer que le congé non payé [CNP] accordé pour maladie ou blessure survenue au travail n’est pas prolongé sans raisons médicales valables ». La Directive prévoit également que les cas de congé non payé doivent être réglés dans les deux ans qui suivent la date du début du congé, quoique chaque cas doit être évalué sous réserve de ses circonstances.

[63] Elle a envoyé la lettre du 3 janvier 2019 à la plaignante en vertu de la Directive.

[64] Elle a également envoyé à la plaignante la lettre d’options du 16 mai 2019, qui énonçait toutes les mesures que la défenderesse avait prises depuis 2017 pour donner suite à sa demande d’évaluation de l’aptitude au travail et à sa situation de congé non payé. Les quatre mêmes options ont été décrites dans la lettre, et elle s’est vue accorder la date limite du 14 juin 2019 pour répondre.

[65] Mme Brisson n’a reçu aucune réponse de la plaignante.

[66] En contre‑interrogatoire, on lui a demandé comment elle avait pris connaissance du contenu des lettres. Elle a répondu qu’elle avait été informée par les gestionnaires précédents au moment où elle a assumé le rôle.

[67] À la fin du contre‑interrogatoire de Mme Brisson, la plaignante a soulevé une objection à l’admissibilité de la lettre d’options du 16 mai 2019, au motif qu’elle contenait des renseignements par ouï‑dire et qu’elle ne devait pas être admise. Ma décision relative à cette objection suit.

D. Troisième décision en matière de preuve – la lettre d’options du 16 mai 2019

[68] La défenderesse a déposé en preuve la lettre d’options du 16 mai 2019 de Mme Brisson envoyée à la plaignante, qui s’y est opposée au motif qu’elle contenait du ouï‑dire. Mme Brisson a authentifié la lettre d’options, qu’elle a signée en sa qualité de directrice intérimaire de la section dans laquelle la plaignante travaillait. Elle l’a rédigée conformément à son pouvoir délégué en matière de ressources humaines. Elle a reçu des conseils, des lignes directrices et du soutien de la part des conseillers en relations de travail lorsqu’elle a rédigé la lettre d’options, qu’elle a ensuite signée et envoyée ou fait envoyer par la poste à la plaignante, qui a témoigné et reconnu qu’elle avait effectivement reçu la lettre d’options.

[69] Je crois comprendre que ce document a été rédigé pour établir les faits suivants, qui sont pertinents à ma décision quant à l’existence de représailles, contrairement à l’article 147 du Code :

a) La communication à la plaignante des options requises par la défenderesse pour régulariser son statut selon lequel elle est en congé non payé ou d’être temporairement rayée de l’effectif conformément aux dispositions de la Directive.

b) La réception par la plaignante de ces renseignements.

c) La réception par la plaignante des renseignements de la défenderesse au moment pertinent.

 

[70] À mon avis, a), b) et c) constituent les déterminations factuelles les plus saillantes qui sous‑tendent toute allégation de représailles. Comme je l’ai déjà déterminé et décidé, l’évaluation de la justification ou de la légitimité de l’exigence de la défenderesse que la plaignante se soumette à une évaluation de l’aptitude au travail ne relève pas de ma compétence. Comme je l’ai indiqué dans ma décision concernant la citation de quatre personnes à témoigner, je ne suis pas tenue de trancher ces questions dans la présente plainte.

[71] Si je comprends bien cette objection, la plaignante remet en question la véracité des événements décrits dans la lettre d’options du 16 mai 2019. La décision de remettre en question la version de la défenderesse de certains événements et le brillant qu’elle avait choisi de leur donner revient à la plaignante; toutefois, je fais remarquer que la plaignante a témoigné qu’elle n’avait jamais répondu aux lettres d’options. À mon avis, si une personne remet en question l’exactitude ou la véracité d’une déclaration, il lui incombe de présenter une thèse contraire.

[72] Quoi qu’il en soit, il n’est pas de mon rôle dans le contexte de la présente plainte de régler tous ces éléments; par conséquent, je m’abstiens de formuler des commentaires évaluatifs à cet égard.

[73] Je rejetterai l’objection relative à l’admissibilité de la lettre d’options du 16 mai 2019 au motif que les faits pour lesquels elle a été présentée, tels qu’ils sont décrits aux alinéas a), b) et c), sont pertinents à ma décision concernant la plainte, et qu’elle ne contrevient pas à la règle du ouï‑dire.

[74] Ensuite, M. Melançon a témoigné. Il est actuellement un gestionnaire à l’ARC au sein de sa Direction de la TPS/TVH. Pendant toute la période pertinente à la présente plainte, il a été le gestionnaire de la Section de l’assurance de la qualité où travaillait la plaignante. Lorsqu’il occupait ce poste, elle était en congé non payé et, en sa qualité de gestionnaire, il avait le pouvoir délégué de gérer son statut de congé non payé.

[75] M. Melançon a envoyé à la plaignante la lettre d’options du 30 janvier 2020, exposant les quatre options dont elle disposait et lui demandant de répondre au plus tard le 21 février 2020. Dans la lettre, il l’a informée qu’un processus distinct était en cours pour enquêter sur la plainte de violence en milieu de travail. Il a expliqué qu’il devait préciser que la procédure de règlement de la plainte de violence en milieu de travail était en cours et que des lettres distinctes avaient été envoyées.

[76] Sa lettre faisait également référence aux lettres antérieures envoyées à la plaignante, y compris la lettre d’options du 16 mai 2019, qu’il a souligné être la première. Il a fait remarquer que la défenderesse n’avait reçu aucune réponse à cette lettre de la part de la plaignante et qu’étant donné le temps écoulé, il était nécessaire de lui fournir de nouveau les options. Il a témoigné qu’afin de prolonger le congé non payé, la défenderesse avait besoin d’une preuve médicale à jour.

[77] Il n’a reçu aucune réponse à sa lettre d’options du 30 janvier 2020 avant la date limite du 21 février 2020; il en a donc envoyé une autre le 24 février 2020 comportant une date limite de réponse du 6 mars 2020. Il n’a reçu aucune réponse de la part de la plaignante.

[78] M. Melançon a témoigné au sujet du traitement de la plainte de violence en milieu de travail et du choix d’une personne compétente. Il semble qu’il y ait eu une certaine difficulté au début à communiquer avec la plaignante, car les courriels envoyés à celle‑ci ont rebondi comme non livrables. On lui a conseillé de communiquer avec elle par courrier ordinaire plutôt que par courriel.

[79] Le 31 janvier 2020, il a reçu un courriel de la plaignante, lui demandant de lui fournir [traduction] « […] les coordonnées intégrales de la personne compétente concernant l’enquête sur la violence en milieu de travail ». Il lui a envoyé une trousse contenant le nom de quatre personnes proposées en tant que personnes compétentes et lui a demandé de donner une réponse au plus tard le 9 mars 2020.

[80] M. Melançon a par la suite reçu une copie de la lettre adressée à la plaignante par EDSC le 6 mai 2020, l’informant qu’il avait fermé son dossier. Selon lui, la lettre signifiait qu’il n’y avait plus de rôle à jouer et que l’affaire était close.

[81] En contre‑interrogatoire, il a expliqué qu’il devait tenir compte de facteurs tels que la localisation géographique et la langue dans la sélection des noms de la personne compétente. Il ne se rappelait pas avoir fourni à la plaignante des renseignements supplémentaires sur les personnes compétentes qu’il avait proposées. La plaignante lui a proposé que la défenderesse avait violé l’IPG en ne nommant pas une personne compétente.

V. Résumé de l’argumentation

[82] À la suite de la partie de l’audience portant sur les éléments de preuve, j’ai demandé aux parties de présenter leurs arguments finaux par écrit et j’ai élaboré un calendrier pour la remise des arguments écrits des parties.

A. Pour la plaignante

[83] La Commission a reçu les arguments écrits de la plaignante le 7 juillet 2022. Le 8 juillet 2022, la plaignante a présenté de nouveau ses arguments écrits comportant plusieurs pièces jointes. Le document de deux pages traitait principalement d’une demande de documents de la défenderesse et de la plainte de violence en milieu de travail de 2019. Elle a également joint les formulaires qu’elle avait déposés auprès de la Commission en février 2020 pour amorcer sa plainte.

[84] À la suite d’un examen de ses arguments, la Commission a communiqué les directives suivantes :

[Traduction]

La Commission a reçu les arguments finaux de la plaignante concernant sa plainte présentée en vertu de l’article 133 du Code canadien du travail. La Commission fait remarquer que l’argument de la plaignante porte en grande partie sur une demande de documents concernant la plainte de violence en milieu de travail qu’elle a déposée le 14 juin 2019. Comme la Commission en a informé les parties à maintes reprises au cours de l’audience, il ne s’agit pas d’une question relevant de la compétence de la Commission.

 

Étant donné l’absence d’une audience au cours de laquelle la Commission aurait eu l’occasion de demander des éclaircissements sur les arguments des parties, la Commission invite la plaignante à répondre aux questions suivantes soulevées par la Commission au cours de l’audience :

 

1. Quel droit a‑t‑elle exercé en vertu du Code canadien du travail?

2. Quelle action ou inaction de la défenderesse allègue‑t‑elle être interdite par l’article 147 du Code canadien du travail? Tel que cela a été expliqué pendant l’audience, cette action ou inaction doit avoir eu lieu au cours de la période de 90 jours précédant la plainte.

3. Existe‑t‑il un lien direct entre l’exercice du droit décrit au point 1) et l’action ou l’inaction de la défenderesse visée au point 2)? Pourquoi?

 

La plaignante peut modifier et/ou soumettre de nouveau ses arguments finaux pour répondre aux questions susmentionnées. Elle doit le faire d’ici le 12 juillet 2022 ou informer la Commission qu’elle a l’intention d’invoquer les arguments finaux qu’elle a déjà présentés.

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

 

[85] La Commission n’a reçu aucune réponse de la plaignante à la date limite du 12 juillet 2022. Toutefois, après la présentation des arguments de la défenderesse le 14 juillet 2022, la plaignante a présenté des arguments écrits supplémentaires le 18 juillet 2022, apparemment en réponse aux arguments de la défenderesse.

[86] Afin de mieux comprendre les arguments de la plaignante, j’ai reproduit des extraits détaillés. Elle a commencé ses arguments comme suit :

[Traduction]

Je remercie la Commission, la commissaire et l’avocate de la défenderesse de leurs conseils, de leur patience et de leur générosité.

La défenderesse ou l’employeur n’a pas présenté ses témoins qui ont formulé les allégations initiales et les fausses déclarations (pas sous serment et ils n’ont pas témoigné en présence de la Commission) contre moi, c’est‑à‑dire [les noms ont été caviardés]. Ce sont ces personnes que l’employeur a indiquées et qui ont fondé sa demande coercitive d’évaluation médicale, la suspension, la trousse d’options et le licenciement, car ces actions sont toutes continuellement liées, progressives et corrélatives et aucune de ces actions de l’employeur n’est autonome ou isolée. Toutes les actions de l’employeur ont commencé avec la menace et les représailles de M. [nom caviardé] (c’est‑à‑dire [nom caviardé]) sous la forme de subterfuge, de camouflage ou de mesure disciplinaire déguisée.

Les deux témoins de l’employeur ont présenté de manière inexacte leurs postes (Mme Nathalie Brisson en tant que directrice et M. Jean‑Marc Malencon en tant que gestionnaire) dans leurs communications écrites, mais en interrogatoire principal devant la Commission, ils ont tous les deux déclaré qu’ils occupaient leur poste par intérim. Ni l’un ni l’autre des témoins n’a expliqué qu’ils étaient au courant des faits ou de l’origine des questions relatives à l’abus de pouvoir, aux contre‑vérités, aux fausses déclarations, aux fausses déclarations, aux mensonges, à la discrimination et au harcèlement, à la violence en milieu de travail, à la suspension et au licenciement et/ou qu’ils connaissaient ces faits. Ils n’ont pas déclaré qu’ils avaient pris les mesures qu’ils avaient prises de leur propre chef ni fourni des éléments de preuve à cet égard. Ils ne sont ni les propriétaires ni les responsables de l’ARC. Ils n’ont pas déclaré qu’ils s’étaient nommés eux‑mêmes aux postes qu’ils occupaient au moment où ils ont pris les mesures. M. Malencon a reconnu qu’il ne connaissait pas la 943‑1‑IPG‑081 et n’a pas fourni les renseignements requis et demandés au sujet des personnes compétentes. Par conséquent, M. Malencon n’a pas respecté l’équité procédurale ni respecté la primauté du droit, conformément à la 943‑1‑IPG‑081. Mme Brisson et M. Malencon ont tous deux représenté l’employeur et sont donc tenus de s’acquitter de leur devoir de suivre l’équité procédurale et la primauté du droit. En occupant les postes importants de « directeur ou directrice » et de « gestionnaire » pour représenter l’employeur et en ne faisant pas preuve de diligence raisonnable quant à leur connaissance des politiques et des procédures de l’ARC, du SCT et du gouvernement du Canada, de l’équité procédurale et de la primauté du droit équivalent à un aveuglement volontaire, car il leur incombe de connaître les fondements de leurs actions à la demande de l’employeur et au nom de ce dernier et les décisions et les mesures de représailles ultimes entraînants le licenciement. Il ne s’agit pas simplement d’un processus, il s’agit de la vie et du gagne‑pain d’un employé, de sa famille et de tout ce qui est si totalement lié.

[…]

 

[Sic pour l’ensemble de la citation]

 

[87] Elle a consacré la plupart de ses arguments à la légitimité de la demande de la défenderesse d’une évaluation de l’aptitude au travail et à sa plainte de violence en milieu de travail. Elle a soutenu que cette demande constituait ce qui suit :

[Traduction]

[…]

[…] l’abus de pouvoir, la discrimination et le harcèlement, les représailles, la suspension et le licenciement continus qui sont tous fondés sur des contre‑vérités absolues et délibérées, des fausses déclarations et mensonges flagrants et manifestes, de fausses déclarations et de la désinformation, de subterfuge, de camouflage et des mesures disciplinaires menant [au] licenciement.

[…]

 

[88] En ce qui a trait à la plainte de violence en milieu de travail, elle a soutenu que la défenderesse n’avait pas respecté les exigences de l’IPG et n’avait pas respecté « la primauté du droit » et « l’équité procédurale ».

[89] En ce qui concerne la plainte de représailles, elle a fait valoir que sa [traduction] « […] suspension et la trousse d’options équivalaient à une mesure disciplinaire entraînant le licenciement, ce qui confère à la Commission la compétence sur la question ».

[90] Elle a ajouté que la défenderesse avait présenté de manière inexacte les faits lorsqu’elle a déclaré qu’elle était absente du lieu de travail depuis juin 2017. Elle a déclaré ce qui suit : [traduction] « Je n’ai pas quitté le lieu de travail. C’est l’employeur qui a suspendu mon accès au lieu de travail à compter du 21 juin 2017, à 12 h. »

[91] Elle a poursuivi comme suit :

[Traduction]

[…]

Je crois comprendre que la Commission peut examiner, renvoyer ou examiner l’historique ou les renseignements généraux qui dépassent le délai de quatre‑vingt‑dix (90) jours afin de déterminer la genèse de la plainte et de chercher la vérité sur laquelle fonder sa décision.

La défenderesse ou l’employeur a déclaré que le licenciement est fondé sur ses éléments de preuve concernant la trousse des options de 2019, qui, selon lui, découle d’une absence de deux ans du lieu de travail. La défenderesse ou l’employeur a présenté de manière inexacte les faits en indiquant que c’est moi qui n’avais pas été au milieu de travail depuis deux ans et selon ses politiques et son processus, ainsi que la trousse d’options et le licenciement de 2019 qui en a découlé. Comme je l’ai indiqué ci‑dessus, la prémisse fondamentale de l’employeur est erronée. Cela dépasse le délai de « quatre‑vingt‑dix (90) jours ». Cela ouvre la voie à examiner tout renseignement au‑delà du délai de quatre‑vingt‑dix (90) jours et à en tenir compte.

[…]

 

[92] La plaignante a soutenu en outre que les [traduction] « questions concernant la décision de l’employeur de [la] licencier sont importantes, tout comme les liens et les renseignements généraux connexes ». Elle a ensuite formulé les questions comme suit :

[Traduction]

[…]

Question 1 : Pourquoi l’employeur a‑t‑il décidé de me licencier? L’employeur déclare qu’il m’a offert ou fourni une « trousse d’options » (de 2019 à 2020) à laquelle il n’a reçu aucune réponse de ma part. Il convient de noter que les trousses d’options étaient identiques et ne différaient en aucun égard.

Question 2 : Pourquoi l’employeur a‑t‑il décidé de m’offrir ou de me fournir la « trousse d’options »? L’employeur affirme qu’il m’a offert ou fourni une « trousse d’options » conformément à son processus lorsqu’un employé est absent du lieu de travail en raison d’un congé de maladie ou d’un congé non payé et il affirme que cela s’appliquait à ma situation.

Question 3 : Pourquoi étais‑je absente du lieu de travail depuis plus de deux ans? L’employeur déclare que j’ai quitté le lieu de travail et que je ne suis pas revenue. Comme je l’ai indiqué dans mon témoignage, les documents et les renseignements connexes, les affirmations, déclarations et les allégations de l’employeur
sont fausses. C’est l’employeur qui a suspendu mon accès au lieu de travail, qui m’a placé arbitrairement en congé de maladie et ensuite en congé non payé malgré mon opposition et mon désaccord quant aux décisions et aux actions de l’employeur.

Question 4 : Pourquoi l’employeur a‑t‑il décidé de suspendre mon accès au lieu de travail? Il s’agit d’une conséquence directe de la menace [du directeur] et de représailles sous forme de subterfuge, de camouflage et de mesures disciplinaires fondés sur des contre‑vérités, des faussetés, de fausses déclarations et de faux renseignements (confirmés par la lettre du commissaire adjoint [nom caviardé] de juillet 2017). Comme je l’ai indiqué dans mon témoignage, les documents et les renseignements connexes, les affirmations, déclarations et les allégations de l’employeur sont fausses. C’est l’employeur qui a suspendu mon accès au lieu de travail, malgré mon opposition et mon désaccord quant aux décisions et aux actions de l’employeur.

Question 5 : Pourquoi l’employeur a‑t‑il décidé de demander une « évaluation médicale »? Il s’agit d’une conséquence directe de la menace du directeur [nom caviardé] et de représailles sous forme de subterfuge, de camouflage et de mesures disciplinaires fondés sur des contre‑vérités, des faussetés, de fausses déclarations et de faux renseignements que j’ai signalés et à l’égard desquels j’ai déposé une plainte de discrimination et de harcèlement connexe auprès du Centre d’expertise pour la discrimination et le harcèlement de l’employeur en fonction des conseils et des lignes directrices que j’ai obtenus de la Direction générale des ressources humaines de l’employeur. Comme je l’ai indiqué dans mon témoignage, les documents et les renseignements connexes, les affirmations, déclarations et les allégations de l’employeur sont fausses.

Je crois que ma plainte auprès de la Commission devrait être accueillie pour toutes les raisons susmentionnées, et que le licenciement est un subterfuge, un camouflage et une mesure disciplinaire déguisée en contravention de l’article 133 et de l’article 147 connexe du Code canadien du travail.

[…]

 

[93] Elle a soutenu que sa plainte avait été déposée dans les délais parce qu’elle avait communiqué avec la Commission en février et qu’elle avait parlé à l’un de ses agents du greffe au sujet de la présentation d’une plainte.

B. Pour la défenderesse

[94] La Commission a reçu les arguments finaux de la défenderesse le 14 juillet 2022. Ils ont fait référence aux cas suivants : Babb c. Agence du revenu du Canada, 2012 CRTFP 47; Canada (Procureur général) c. Frazee, 2007 CF 1176; Gaskin c. Agence du revenu du Canada, 2008 CRTFP 96; Lapointe c. Agence du revenu du Canada, 2020 CRTESPF 19; Larivière c. Conseil du Trésor (ministère de l’Emploi et du Développement social), 2019 CRTESPF 73; Leary c. Conseil du Trésor (ministère de la Défense nationale), 2005 CRTFP 35; Lueck c. ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement, 2021 CRTESPF 87; Pacquet c. Air Canada, 2013 CCRO 691; Pezze c. Conseil du Trésor (ministère des Ressources naturelles), 2020 CRTESPF 37; Tanguay c. Opérations des enquêtes statistiques, 2005 CRTFP 43; Vallée c. Conseil du Trésor (Gendarmerie royale du Canada), 2007 CRTFP 52; Vanegas c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada), 2018 CRTESPF 60; Walker c. Administrateur général (ministère de l’Environnement et du Changement climatique), 2018 CRTESPF 78; Walker c. Canada (Procureur général), 2020 CAF 44; White c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada), 2022 CRTESPF 52.

[95] La défenderesse a soutenu que la plainte devrait être rejetée parce qu’elle est hors délai, car elle n’a pas été présentée dans le délai de 90 jours prévu par la loi. Par ailleurs, elle a soutenu que la plaignante n’a pas démontré qu’elle avait subi des représailles au sens du Code.

[96] En ce qui concerne la question du respect des délais, la défenderesse a soutenu ce qui suit :

[Traduction]

[…]

12. La plaignante a confirmé que la lettre d’options du 30 janvier 2020 portait un cachet postal du même jour. Elle a également confirmé qu’elle en avait reçu une copie, et ce, dans les deux semaines suivant le 30 janvier 2020. Elle a par la suite précisé qu’elle l’avait reçue au plus tard 15 jours après la date y figurant. Si les lettres d’options du 30 janvier 2020 et du 24 février 2020 constituent les représailles, alors la plaignante en était au courant ou aurait dû être au courant de la lettre du 30 janvier 2020 avant la date limite du 20 février 2020 […]

[…]

14. Même si la lettre du 30 janvier indique que l’employeur « peut » commencer le processus de licenciement si une réponse n’était pas reçue avant la date limite et la lettre du 24 février indique « recommandera » le licenciement si une réponse n’est pas reçue avant la date limite, il ne s’agit pas d’une distinction significative. Dans les deux cas, le licenciement n’est pas une certitude, mais plutôt un résultat possible si l’employeur n’a pas reçu de réponse. La plaignante aurait été au courant de cette éventualité lorsqu’elle a reçu la première lettre, qui, au plus tard, aurait été le 14 février 2020. En l’absence d’un argument concernant une différence de contenu entre les lettres du 30 janvier 2020 et du 2 février 2020, il n’y a aucune raison de laisser entendre que la plaignante n’était pas au courant de ce résultat potentiel le 14 février 2020.

[…]

 

[97] La défenderesse a demandé que la plainte soit rejetée au motif qu’elle est hors délai.

[98] En ce qui a trait au fond de la plainte, la défenderesse a adopté le critère à quatre volets énoncé dans Vallée et a soutenu que même si l’article 133 du Code était déclenché par la plainte de violence en milieu de travail du 14 juin 2019 de la plaignante, elle n’a pas satisfait aux autres éléments de ce critère.

VI. Questions en litige

[99] Je dois trancher les deux questions suivantes :

1) La plainte a‑t‑elle été présentée dans les délais impartis?

2) Dans l’affirmative, les lettres d’options du 30 janvier et du 24 février 2020 constituaient‑elles un acte de la défenderesse qui était interdit en vertu de l’article 147 du Code?

 

VII. Motifs

A. Cadre législatif

[100] Les dispositions de la partie II du Code sont importantes et portent sur la santé et la sécurité au travail. Il existe des dispositions sur les obligations de l’employeur et de l’employé, la création et le fonctionnement de comités en milieu de travail pour traiter les questions de santé et de sécurité, les recours et les sanctions pour les violations en matière de santé et de sécurité.

[101] L’une des protections importantes de l’employé prévues à la partie II est l’absence de représailles pour avoir exercé un droit en vertu de cette partie. Il est codifié à l’art. 147 comme suit :

147 Il est interdit à l’employeur de congédier, suspendre, mettre à pied ou rétrograder un employé ou de lui imposer une sanction pécuniaire ou autre ou de refuser de lui verser la rémunération afférente à la période au cours de laquelle il aurait travaillé s’il ne s’était pas prévalu des droits prévus par la présente partie, ou de prendre – ou menacer de prendre – des mesures disciplinaires contre lui parce que :

147 No employer shall dismiss, suspend, lay off or demote an employee, impose a financial or other penalty on an employee, or refuse to pay an employee remuneration in respect of any period that the employee would, but for the exercise of the employee’s rights under this Part, have worked, or take any disciplinary action against or threaten to take any such action against an employee because the employee

a) soit il a témoigné – ou est sur le point de le faire – dans une poursuite intentée ou une enquête tenue sous le régime de la présente partie;

(a) has testified or is about to testify in a proceeding taken or an inquiry held under this Part;

b) soit il a fourni à une personne agissant dans l’exercice de fonctions attribuées par la présente partie un renseignement relatif aux conditions de travail touchant sa santé ou sa sécurité ou celles de ses compagnons de travail;

(b) has provided information to a person engaged in the performance of duties under this Part regarding the conditions of work affecting the health or safety of the employee or of any other employee of the employer; or

c) soit il a observé les dispositions de la présente partie ou cherché à les faire appliquer.

(c) has acted in accordance with this Part or has sought the enforcement of any of the provisions of this Part.

 

[102] Un employé qui croit que son employeur a violé l’art. 147 a le droit de présenter une plainte en vertu de l’art. 133, comme suit :

133 (1) L’employé – ou la personne qu’il désigne à cette fin – peut, sous réserve du paragraphe (3), présenter une plainte écrite au Conseil au motif que son employeur a pris, à son endroit, des mesures contraires à l’article 147.

133 (1) An employee, or a person designated by the employee for the purpose, who alleges that an employer has taken action against the employee in contravention of section 147 may, subject to subsection (3), make a complaint in writing to the Board of the alleged contravention.

(2) La plainte est adressée au Conseil dans les quatre‑vingt‑dix jours suivant la date où le plaignant a eu connaissance – ou, selon le Conseil, aurait dû avoir connaissance – de l’acte ou des circonstances y ayant donné lieu.

(2) The complaint shall be made to the Board not later than ninety days after the date on which the complainant knew, or in the Board’s opinion ought to have known, of the action or circumstances giving rise to the complaint.

[…]

 

[103] Le CCRI est l’organe législatif principal chargé de traiter les recours prévus aux parties I et II du Code. Toutefois, le législateur a prévu un rôle particulier pour la Commission et ses prédécesseurs pour statuer sur les plaintes présentées en vertu de l’art. 133 concernant la fonction publique et les personnes qu’elle emploie (voir l’art. 240 de la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral (L.C. 2003, ch. 22, art. 2; LRTSPF).

B. Question I – La plainte a été présentée dans les délais

[104] Le paragraphe 133(2) du Code précise que « [l]a plainte est adressée au Conseil dans les quatre‑vingt‑dix jours suivant la date où le plaignant a eu connaissance – ou, selon le Conseil, aurait dû avoir connaissance – de l’acte ou des circonstances y ayant donné lieu ». Dans Larivière, au par. 71, la Commission a conclu que le délai prévu au par. 133(2) est obligatoire et qu’elle n’a aucun pouvoir de le proroger. Elle a fait référence à la décision de 2010 rendue dans Larocque c. Conseil du Trésor (ministère de la Santé), 2010 CRTFP 94.

[105] Je fais remarquer que l’analyse dans Laroque sur le pouvoir de la Commission de proroger les délais reposait sur la disposition législative claire de l’al. 240b) de la LRTSPF, qui empêchait d’appliquer le par. 156(1) du Code. L’alinéa 240b) a été abrogé, à compter de 2019. L’incidence de cette abrogation sur le pouvoir de la Commission, le cas échéant, de proroger les délais prévus à l’art. 240 n’a pas encore été déterminée. Je fais remarquer que, dans Wood c. Agence du revenu du Canada, 2020 CRTESPF 57, la Commission a réfléchi à l’effet de l’abrogation sur une plainte antérieure à l’abrogation et a conclu que l’abrogation n’avait pas d’effet rétroactif pour priver une partie de droits juridiques substantiels. D’après mes conclusions dans ce cas, il n’est pas nécessaire que j’entreprenne cette analyse.

[106] Le paragraphe 133(2) exige que la Commission entreprenne une enquête factuelle afin de déterminer si une plainte a été présentée dans les délais. Afin d’effectuer cette enquête, j’adopte l’analyse du prédécesseur de la Commission dans Boshra c. Association canadienne des employés professionnels, 2009 CRTFP 100, au par. 23 (confirmé dans 2011 CAF 98, aux paragraphes 49 et 51). Même si Boshra portait sur une plainte relative au devoir de représentation équitable en vertu de la partie I de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, tel était le nom de la LRTSPF à l’époque, la Commission a adopté cette approche dans le contexte d’une plainte présentée en vertu de l’art. 133 de la partie III de la LRTSPF (voir Larivière et Bhasin c. Conseil national de recherches du Canada, 2023 CRTESPF 11, au par. 20).

[107] La première question que je dois trancher est la nature essentielle de la plainte (conformément à Bhasin, au par. 24 et à Boshra, aux paragraphes 20 et 23). Ensuite, je dois déterminer si la plainte a été présentée dans les « […] quatre‑vingt‑dix jours suivant la date où le plaignant a eu connaissance – ou, selon le Conseil, aurait dû avoir connaissance – de l’acte ou des circonstances y ayant donné lieu ».

1. La nature essentielle de la plainte

[108] La défenderesse a mis la plaignante en congé de maladie à compter du 22 juin 2017. Il s’agissait d’un congé payé jusqu’en environ octobre 2017, date à laquelle sa banque de congés de maladie a été épuisée. La raison pour laquelle la défenderesse l’a mise en congé de maladie était double : 1) le souci relatif à son aptitude à demeurer dans lieu de travail; 2) l’incapacité des parties d’obtenir une évaluation de son aptitude au travail. Elle lui a communiqué sa décision au moyen de la lettre du 19 juillet 2017.

[109] La plaignante avait été absente du lieu de travail depuis le 21 juin 2017.

[110] Entre le 19 juillet 2017 et le 24 février 2020, la défenderesse a envoyé trois lettres d’options à la plaignante, décrivant les options pour elle en vue de régler son statut de congé non payé. Le 3 janvier 2019, elle lui a envoyé la lettre qui lui a donné un préavis selon lequel elle recevrait une lettre d’options de ce genre. La première lettre d’options était du 16 mai 2019 et elle décrivait les quatre options que la plaignante pouvait exercer, à savoir : 1) la retraite pour des raisons médicales; 2) la retraite pour des raisons non médicales; 3) la démission; 4) le retour au travail avec une évaluation médicale à jour. La lettre fixait la date limite du 14 juin 2019 pour qu’elle réponde et indique son choix.

[111] Le 14 juin 2019, la plaignante a présenté une plainte de violence en milieu de travail en vertu de la partie II du Code. Elle n’a pas répondu à la première lettre d’options du 16 mai 2019.

[112] Le 30 janvier 2020, la défenderesse a envoyé la deuxième lettre d’options à titre de suivi de la première. En plus des quatre options décrites dans la première lettre, la deuxième lettre comprenait ce qui suit :

[Traduction]

[…]

[…] une réponse écrite indiquant votre décision et la date d’entrée en vigueur est requise […] d’ici le 21 février 2020. Si vous ne choisissez pas votre option au plus tard à cette date, la direction peut amorcer le processus visant à mettre fin à votre emploi « pour des raisons autres qu’un manquement à la discipline ou une inconduite » conformément à l’alinéa 51(1)g) de la Loi sur l’Agence du revenu du Canada.

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

 

[113] La défenderesse a envoyé la troisième lettre d’options le 24 février 2020. Elle était essentiellement identique à la précédente du 30 janvier, sauf que le paragraphe final indiquait ce qui suit :

[Traduction]

[…]

[…] une réponse écrite indiquant votre décision et la date d’entrée en vigueur est requise; veuillez faire votre choix sur le formulaire de sélection d’options de CNP ci‑joint, et me le retourner d’ici le 6 mars 2020.

Si vous ne choisissez pas votre option au plus tard à cette date, la direction recommandera votre licenciement « pour des raisons autres qu’un manquement à la discipline ou une inconduite » conformément à l’alinéa 51(1)g) de la Loi sur l’Agence du revenu du Canada.

[Le passage en évidence l’est dans l’original et je mets en évidence]

 

[114] La plaignante a témoigné qu’elle n’avait pas répondu aux lettres. Elle a reçu la deuxième le ou vers le 3 février 2020. Le 6 février 2020, elle a téléphoné au CCRI au sujet de la présentation d’une plainte et on lui a conseillé de communiquer avec la Commission, ce qu’elle a fait. J’ai cité ses arguments finaux écrits comme suit :

[Traduction]

[…]

Le 6 février 2020, j’ai téléphoné au CCRI et on m’a informé que le CCRI ne traite pas avec les employés du gouvernement. On m’a conseillé de communiquer avec la CRTESPF. On m’a donné le numéro de téléphone 1‑866‑931‑3454 de la CRTESPF. J’ai expliqué que j’ai appelé ce numéro et j’ai reçu un message m’invitant à laisser mes coordonnées et quelqu’un me répondra.

J’ai communiqué avec la CRTESPF le 14 février 2020 et j’ai laissé mon nom et mon numéro de téléphone [caviardés]. Je n’ai reçu aucune réponse. Je crois avoir laissé deux messages sur la messagerie vocale de la CRTESPF.

Le 24 février 2020, j’ai communiqué avec le CCRI et j’ai parlé avec [un représentant]. Nous avions déjà parlé. Nous avons discuté du fait que l’ARC m’a licenciée et qu’il s’agissait d’une plainte de représailles en vertu des articles 133 et 147 du CCT. Il m’a demandé si j’avais téléphoné à la CRTESPF. J’ai expliqué que je l’avais appelée, mais la CRTESPF ne répond pas au téléphone et demandait plutôt à la personne de laisser ses coordonnées. Il a dit que la CRTESPF est le ministère avec qui je dois communiquer concernant l’ARC en vertu de la partie 2 et de l’art.147. Encore une fois, il a dit que je devais appeler la CRTESPF. Il a ajouté que lorsque le syndicat ne me représente pas, je dois communiquer avec la CRTESPF, soit le même ministère pour la plainte relative au devoir de représentation. Il m’a informé que si j’éprouvais des difficultés à communiquer avec la CRTESPF de l’appeler de nouveau. Il m’a fourni son numéro de téléphone [caviardé]. Il a dit que si je ne pouvais pas communiquer avec elle d’ici le lendemain, je devrais le rappeler. J’ai dit que, lorsque je lui ai parlé plus tôt, j’essayais depuis lors de communiquer avec la CRTESPF depuis deux semaines et elle ne répond pas; et que j’essayais depuis plus longtemps que cela et qu’elle ne répondait pas, mais depuis deux semaines, je laisse mon nom et mon numéro. Il m’a demandé mon nom et mon numéro. Il a dit qu’il allait envoyer un courriel à la CRTESPF et essayer de téléphoner aussi à la CRTESPF pour me rappeler. Il m’a dit que c’était le bon ministère à qui parler. Il a aussi dit qu’il y a des formulaires en ligne. J’ai dit qu’il y en a, mais que les formulaires sont très compliqués; je n’étais pas certaine d’être autorisée à les remplir par moi‑même. Il a répondu que oui je pouvais les remplir. J’ai dit que s’il pouvait me dire quel formulaire exactement remplir, car il y en a beaucoup. Il a dit qu’il y avait un délai de 90 jours. J’ai dit qu’il y a plus de deux semaines, l’ARC m’avait dit qu’elle me licencierait. Il a dit de le laisser essayer et si je n’entends pas de nouvelles dans deux jours de le rappeler.

Le 26 février 2020, j’ai de nouveau téléphoné [au représentant du CCRI] puisque je n’avais pas entendu de ses nouvelles ni de la Commission. Il n’était pas disponible et je lui ai donc laissé un message vocal. [L’un des agents du greffe de la Commission] (CRTESPF) m’avait téléphoné pour la première fois le 26 février 2020 à 15 h 38. J’avais manqué [son] appel, car je n’étais pas près du téléphone. Peu de temps après, j’ai retourné [son] appel. Je lui ai demandé de me rappeler, car il s’agissait d’un appel interurbain pour moi. Elle m’a rappelé immédiatement à 15 h 46. Je lui ai expliqué que j’avais essayé de communiquer avec la CRTESPF et que j’avais laissé deux messages et qu’ils étaient peut‑être occupés, car je n’avais pas entendu de nouvelles. J’ai expliqué que [le représentant du CCRI] était celui qui m’avait renvoyée à la CRTESPF. Je lui ai expliqué ma situation d’emploi et elle m’a dit que ce qu’elle pouvait faire, c’était de m’envoyer par courriel les renseignements dont j’avais besoin et les formulaires. J’ai expliqué que j’avais examiné tous les formulaires sur le site Web de la CRTESPF et qu’ils sont assez déroutants et j’en ai trouvé deux; l’un est le 26 et l’autre est le 16 ou le 21. J’ai dit qu’ils demandaient des renseignements que je ne suis pas certaine de bien comprendre. J’ai dit que je ne savais pas quels formulaires utiliser. Elle m’a dit qu’elle pouvait m’envoyer les formulaires et les renseignements connexes par courriel, mais qu’elle ne pouvait pas me fournir de conseils juridiques. Je lui ai expliqué que, parce que j’ai déposé ma plainte initiale pour discrimination et harcèlement auprès de l’employeur, puis pour violence en milieu de travail dans le cadre du Programme du travail, ce ne sont pas seulement des représailles, c’est comme un licenciement simplement parce qu’ils peuvent le faire. Donc, je ne sais pas quel formulaire, s’il s’agit d’un seul formulaire pour les représailles ou s’il y en a un autre pour la discrimination. Elle a dit que, pour la discrimination, je peux présenter une plainte auprès de la CCDP. Je lui ai donné mon adresse électronique [caviardée]. Elle a dit qu’elle m’enverrait cela immédiatement.

Après la fin de la conversation ci‑dessus, [l’agente du greffe] m’a envoyé un courriel (le mercredi 26 février 2020, à 16 h 13) comportant des renseignements.

Le 26 février 2020, j’ai déposé les formulaires 16 et 26 remplis en date du 26 février 2020 auprès de la CRTESPF.

[…]

 

[115] Le formulaire 26 qu’elle a déclaré avoir déposé le 26 février 2020 contenait les renseignements pertinents suivants :

[Traduction]

[…]

3. Court exposé de chaque action, omission ou situation ayant donné lieu à la plainte, y compris les dates et les noms des personnes concernées : LICENCIEMENT

4. Démarches entreprises par le plaignant ou en son nom pour remédier à l’action, à l’omission ou à la situation ayant donné lieu à la plainte :

PLAINTE DÉPOSÉE AUPRÈS DU PROGRAMME DU TRAVAIL D’EDSC EN VERTU DE L’ARTICLE 20 DU RÈGLEMENT DE CSST XX PRIS EN VERTU DE LA PARTIE II DU CCT.

5. Mesure corrective recherchée au titre de l’article 134 du Code canadien du travail :

OUI

[…]

 

[116] Selon son témoignage non contredit à l’audience, le 27 février 2020, la Commission a confirmé qu’elle avait reçu les formulaires qu’elle avait soumis. Elle a attendu la réponse et l’accusé de réception officiels de la Commission. Après n’avoir rien entendu, elle a de nouveau communiqué avec elle le 20 mai 2020 (apparemment après avoir reçu la lettre du Programme du travail d’EDSC du 6 mai 2020), moment auquel la Commission lui a conseillé de déposer de nouveau les formulaires, ce qu’elle a fait. La Commission a accusé réception de son acceptation des nouveaux formulaires le 26 mai 2020.

[117] Après examen du deuxième formulaire 26 qu’elle a déposé auprès de la Commission le 20 mai 2020, je conclus que les sections 3, 4 et 5 contiennent plus de renseignements que celui déposé en février 2020. Voici une comparaison côte à côte des deux formulaires :

 

[Traduction]

[…]

 

[…]

3. Court exposé de chaque action, omission ou situation ayant donné lieu à la plainte, y compris les dates et les noms des personnes concernées :

LICENCIEMENT

3. Court exposé de chaque action, omission ou situation ayant donné lieu à la plainte, y compris les dates et les noms des personnes concernées :

DISCRIMINATION, HARCÈLEMENT, VIOLENCE, REPRÉSAILLES, ABUS DE POUVOIR, MAUVAISE FOI, ALLÉGATIONS FAUSSES, PRÉSENTATION ERRONÉE, FAUSSE ÉVALUATION DU RENDEMENT, NON AUTORISÉE SUR LE LIEU DU TRAVAIL, PLACEMENT ARBITRAIRE EN CONGÉ DE MALADIE ADMINISTRATIF, CONGÉ NON PAYÉ, LICENCIEMENT, DIRECTEURS, DIRECTEURS GÉNÉRAUX, GESTIONNAIRES, COMMISSAIRES ADJOINTS, SOUS‑COMMISSAIRE, COMMISSAIRE, MINISTRE DU REVENU NATIONAL […]

4. Démarches entreprises par le plaignant ou en son nom pour remédier à l’action, à l’omission ou à la situation ayant donné lieu à la plainte :

DÉPOSÉ UNE PLAINTE […]

4. Démarches entreprises par le plaignant ou en son nom pour remédier à l’action, à l’omission ou à la situation ayant donné lieu à la plainte :

CONSULTER TOUS LES NIVEAUX DE GESTION AUCUNE RÉSOLUTION N’A ÉTÉ FOURNIE, DÉPOSÉ UNE PLAINTE DE DISCRIMINATION ET DE HARCÈLEMENT À L’INTERNE, CONFRONTÉE À DES REPRÉSAILLES, PLAINTE AU PROGRAMME DU TRAVAIL D’EDSC, AUCUNE RÉSOLUTION FOURNIE, LICENCIEMENT, AUCUNE ÉQUITÉ PROCÉDURALE, JUSTICE NATURELLE

5. Mesure corrective recherchée au titre de l’article 134 du Code canadien du travail :

OUI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

[Je mets en évidence]

5. Mesure corrective recherchée au titre de l’article 134 du Code canadien du travail :

RÉINTÉGRATION DANS MES FONCTIONS AVEC TOUTE LA RÉMUNÉRATION ET TOUS LES AVANTAGES, CONGÉS AVEC INTÉRÊT, HONORAIRES D’AVOCAT AVEC COÛTS, DÉCISION EN MATIÈRE DE DISCRIMINATION, DE HARCÈLEMENT, DE VIOLENCE, DE DOMMAGE À LA RÉPUTATION, DE STRESS […] VIOLENCE, PROMOTIONS REFUSÉES, DEMANDE D’UN ENVIRONNEMENT DE TRAVAIL SÉCURITAIRE

 

[118] Je ne trouve aucune différence intrinsèque entre les formulaires 26 déposés en février et mai. Les deux font référence au licenciement de la plaignante. Elle a témoigné qu’elle avait considéré comme des représailles les références au licenciement figurant dans les lettres d’options. La dernière section de la lettre d’options du 30 janvier 2020 indiquait : [traduction] « [s]i vous ne choisissez pas votre option au plus tard [le 21 février 2020], la direction peut amorcer le processus visant à mettre fin à votre emploi “pour des raisons autres qu’un manquement à la discipline ou une inconduite” conformément à l’alinéa 51(1)g) de la Loi sur l’Agence du revenu du Canada ».

[119] La troisième lettre d’options du 24 février 2020 contenait une mise en garde semblable, sauf que le mot [traduction] « peut » dans la lettre antérieure a été remplacé par [traduction] « amorcera » dans cette lettre. Cette lettre d’options s’est conclue avec la mise en garde suivante : [traduction] « [s]i vous ne choisissez pas votre option au plus tard [le 6 mars 2020], la direction recommandera votre licenciement […] ».

[120] Elle croyait que la défenderesse l’avait effectivement licenciée lorsqu’elle a reçu les lettres, et sa réponse était de communiquer avec le CCRI pour déposer une plainte.

[121] Il convient de noter que la première lettre d’options, du 16 mai 2019, ne contenait pas ce libellé de mise en garde.

[122] Je conclus que la nature essentielle de sa plainte était que la défenderesse l’avait licenciée parce qu’elle avait déposé une plainte de violence en milieu de travail.

2. La plainte a été déposée dans le délai de 90 jours

[123] Pour les motifs qui suivent, je conclus que la plaignante a « présent[é] une plainte écrite au Conseil au motif que son employeur a pris […] des mesures contraires à l’article 147 » au sens du paragraphe 133(1) du Code le 26 février 2020, lorsqu’elle a déposé le premier formulaire 26 auprès de la Commission.

[124] Le Code ne précise aucune méthode qu’un employé doit utiliser pour présenter une plainte en vertu de l’article 133.

[125] L’article 57.1 du Règlement sur les relations de travail dans le secteur public fédéral (DORS/2005‑79) se lit comme suit :

57.1 La plainte visée à l’article 133 du Code canadien du travail qui est présentée à la Commission est signée par le plaignant ou son représentant autorisé et comporte les renseignements suivants :

a) les nom et coordonnées du plaignant et de son représentant autorisé, le cas échéant;

b) les nom et coordonnées de l’employeur;

c) un court exposé de chaque action, omission ou situation ayant donné lieu à la plainte;

d) les démarches entreprises par le plaignant ou en son nom pour remédier à l’action, à l’omission ou à la situation ayant donné lieu à la plainte;

e) les mesures correctives recherchées au titre de l’article 134 du Code canadien du travail;

f) la date de la plainte.

 

[126] La Commission a élaboré son formulaire 26 en tant qu’outil pour présenter une plainte en vertu de l’article 133. Le formulaire comprend les éléments des alinéas 57.1a) à f), qui viennent d’être cités, au besoin.

[127] Tel que je l’ai fait remarquer, les deux formulaires 26 que la plaignante a soumis en février et en mai 2020 sont intrinsèquement les mêmes en ce qui concerne un « […] exposé de chaque action, omission ou situation ayant donné lieu à la plainte ». Dans les deux formulaires, elle allègue que la défenderesse l’a licenciée parce qu’elle a présenté une plainte (violence en milieu de travail). En plus de son témoignage sur ce qu’elle avait compris des derniers paragraphes des deux lettres d’options, je conclus qu’elle a présenté sa plainte dans les 90 jours des lettres d’options du 30 janvier et du 24 février 2020.

[128] À mon avis, toute confusion administrative concernant les bons formulaires à remplir ne doit pas être reprochée à la plaignante. Cela serait contraire à l’objet et aux objectifs déclarés de la partie II du Code.

C. Question II – la plainte n’est pas fondée

[129] Les interdictions et les recours prévus aux articles 133 et 147 du Code prévoient un régime de protection qui vise à promouvoir la santé et la sécurité au travail et à offrir un recours aux employés qui choisissent d’exercer leurs droits ou d’amorcer des processus en vertu de la partie II du Code.

[130] Sous réserve du paragraphe 133(6), qui inverse le fardeau de la preuve, la plaignante doit établir que, selon la prépondérance des probabilités, la défenderesse a contrevenu à l’article 147 du Code en se livrant à un comportement interdit. Le fardeau inversé ne s’applique pas dans le présent cas; par conséquent, il incombait à la plaignante d’établir que la défenderesse avait pris une mesure contre elle qui était interdite par l’article 147 du Code.

[131] Étant donné que j’ai décidé que la plainte a été déposée dans les délais, je dois maintenant évaluer son bien‑fondé. J’adopte le critère juridique applicable tel qu’il est défini par la Commission dans White comme suit :

[…]

[73] Dans les circonstances qui m’ont été présentées, et à la lumière du libellé de l’art. 147 du Code, je trouve plus utile de reformuler et de simplifier les principes exposés dans Vallée et Chaves comme suit :

1. Le plaignant a‑t‑il observé les dispositions de la partie II du Code ou cherché à en assurer l’application (article 147)?

2. Le défendeur a‑t‑il pris une mesure interdite par l’article 147 du Code à l’égard du plaignant (articles 133 et 147)?

3. Existe‑t‑il un lien direct entre a) les mesures prises contre le plaignant et b) l’observation des dispositions de la partie II du Code ou le fait de chercher à en assurer l’application par le plaignant?

[…]

1. La plaignante a‑t‑elle exercé ses droits en vertu de la partie II du Code?

[132] La défenderesse a concédé que la plainte de violence en milieu de travail satisfaisait à la première exigence selon laquelle il doit y avoir exercice d’un droit ou d’une autre activité en vertu de la partie II du Code. Sans déterminer la validité de la plainte de violence en milieu de travail, je conviens que la première exigence est satisfaite.

2. La défenderesse n’a pas agi contrairement à l’article 147 du Code

[133] Je conclus que la défenderesse n’a pris aucune mesure contre la plaignante qui est interdite par l’article 147 du Code.

[134] La deuxième étape du critère énoncé dans White exige que je détermine si le contenu des lettres d’options du 30 janvier et du 24 février 2020 de la défenderesse a enfreint les interdictions énoncées à l’article 147 du Code.

[135] Le catalogue des mesures interdites à l’article 147 est exhaustif et comprend les mesures suivantes prises par l’employeur : le congédiement, la suspension, la mise à pied, la rétrogradation, l’imposition d’une sanction pécuniaire, l’imposition d’une sanction non pécuniaire, le refus de verser la rémunération et la prise de toute mesure disciplinaire, ou la menace d’en prendre.

[136] Les faits du présent cas sont semblables à ceux dans Lueck. Il a été tranché avant la reformulation du critère énoncé dans Vallée dans White, mais il est néanmoins instructif. Dans Lueck, la Commission devait également déterminer si le contenu d’une lettre d’options contrevenait aux interdictions énoncées à l’article 147 du Code. Dans ce cas, la Commission a conclu que les options autres que le licenciement décrites dans la Directive et citées dans la lettre d’options, notamment le retour au travail, la retraite pour des raisons médicales, la retraite ou la démission, ne comportaient pas « […] une perte ou un désavantage qui pourrait être considéré comme une sanction pécuniaire ou autre en vertu de l’art. 147 du Code » (par. 277).

[137] Ces options sont décrites dans la Directive, comme suit :

[…]

La personne ayant le pouvoir délégué doit réexaminer chaque cas périodiquement afin de s’assurer que le [CNP] accordé pour maladie ou blessure survenue au travail n’est pas prolongé sans raisons médicales valables. Les cas de [CNP] doivent être réglés dans les deux ans qui suivent la date du début du congé, quoique chaque cas doit être évalué sous réserve de ses circonstances particulières.

Le [CNP] accordé pour maladie ou blessure survenue au travail se termine lorsque la personne :

· retourne au travail;

· démissionne ou prend sa retraite pour des raisons médicales;

· est licenciée en vertu de l’alinéa 51(1)g) de la Loi sur l’Agence du revenu du Canada.

[…]

 

[138] Dans le contexte de la présente plainte, je déduis que la querelle de la plaignante ne porte pas sur les options autres que le licenciement énoncées dans les lettres d’options. Je dois faire remarquer entre parenthèses qu’elle a contesté le fondement de la demande de la défenderesse d’une évaluation de l’aptitude au travail; toutefois, je n’ai pas besoin de trancher cette question dans la présente plainte.

[139] Selon la plaignante, l’action de la défenderesse qui est à la base de sa plainte, comme elle l’a indiqué sur le formulaire 26, est le « licenciement » ou, selon le libellé de l’article 147, un congédiement. Par conséquent, je dois déterminer si l’indication de l’option de congédiement non disciplinaire dans les lettres d’options a fait en sorte que l’action de la défenderesse soit visée par les paramètres interdits de l’article 147.

[140] Dans le présent cas, il ressort clairement des éléments de preuve que la plaignante est demeurée une employée de la défenderesse lorsqu’elle a présenté sa plainte; par conséquent, elle doit nécessairement avoir fait allusion à une menace de congédiement. Comme dans Babb, la conviction de la plaignante qu’elle serait licenciée ou qu’elle avait effectivement été licenciée, peu importe son caractère sincère, ne pouvait pas servir de fondement à une plainte en vertu de l’article 133 parce qu’au moment où elle a déposé la plainte, elle était toujours employée. Peut‑être qu’elle était prophétique puisqu’elle était fermement convaincue qu’elle ne subirait pas d’évaluation de l’aptitude au travail. Une fois qu’elle a adopté cette position, elle ne pouvait pas ensuite reprocher à la défenderesse de lui avoir simplement fourni des options pour régulariser son statut.

[141] J’estime que fournir une lettre d’options à une employée pour régulariser ou résoudre une absence prolongée du lieu de travail en raison d’une maladie ne constitue pas une action de l’employeur qui relève du catalogue des interdictions prévues à l’article 147 du Code. La lettre d’options n’est qu’à titre d’information et présente les diverses façons de résoudre une telle absence prolongée. Par exemple, l’option de retourner au travail avec ou sans mesure d’adaptation peut difficilement être interdite par l’article 147 du Code et l’option d’une retraite pour des raisons médicales ne pouvait pas non plus être interdite.

[142] J’estime que la mention de licenciement ou de congédiement pour incapacité comme l’une des options n’est pas de nature disciplinaire; il s’agit d’une option administrative que la défenderesse peut exercer pour remédier à l’absence prolongée d’une employée pour cause de maladie.

[143] La Loi sur l’Agence du revenu du Canada (L.C. 1999, ch. 17) précise que la défenderesse, dans l’exercice de ses responsabilités en matière de gestion des ressources humaines, peut prévoir deux catégories de licenciement :

a) un licenciement pour manquement aux normes de discipline et inconduite (al. 51(1)f), licenciement ou congédiement disciplinaire);

b) un licenciement pour des motifs autres que des manquements à la discipline ou inconduite (al. 51(1)g), licenciement ou congédiement non disciplinaire).

 

[144] La Directive de la défenderesse fait particulièrement référence au licenciement non disciplinaire en vertu de l’alinéa 51(1)g) comme l’une des options énumérées.

[145] Je conclus que la défenderesse n’a participé à aucune mesure interdite dans les 90 jours précédant le dépôt de la plainte.

3. Les lettres d’options n’étaient pas directement liées à la plainte de violence en milieu de travail

[146] Même si je n’ai pas besoin de tenir compte du reste du critère, étant donné ma conclusion selon laquelle la défenderesse n’a participé à aucune mesure interdite en vertu de l’article 147, je procéderai et j’achèverai l’analyse au cas où j’aurais commis une erreur, ainsi que par excès de prudence.

[147] En invoquant Pezze, la défenderesse a soutenu qu’il n’existe aucun lien direct entre l’exercice par la plaignante de ses droits en vertu de la partie II du Code (la plainte de violence en milieu de travail déposée en juillet 2019) et les lettres d’options. La proximité temporelle des deux événements ne suffit pas pour justifier des représailles en vertu de l’art. 133; un plaignant doit fournir des éléments de preuve qui permettent d’établir clairement un lien entre les deux événements ou actions.

[148] La défenderesse a également fait référence au témoignage de M. Melançon. Il a envoyé les deux lettres d’options de 2020 et a témoigné qu’il ne savait pas ce que visait la plainte de violence en milieu de travail; il n’était qu’au courant de son existence. La lettre d’options du 30 janvier 2020 énonçait ce qui suit :

[Traduction]

[…]

La direction est au courant du fait que vous avez communiqué avec le ministre du Revenu national et le sous‑commissaire de l’ARC par courriel en juillet 2019, en invoquant que vous étiez victime de violence en milieu de travail. Un processus distinct est en cours pour enquêter sur votre allégation afin de s’assurer que le milieu de travail est sécuritaire pour tous les employés.

[…]

 

[149] Je fais remarquer qu’une telle mention ne figure pas dans la deuxième lettre d’options. Je n’estime pas que la déclaration de M. Melançon selon laquelle il existe un [traduction] « processus distinct » pour la plainte de violence en milieu de travail favorise ou étaye la position de la défenderesse selon laquelle il n’existe aucun lien entre les deux événements.

[150] Le critère énoncé dans White envisage un lien direct entre les deux événements. Dans White, la Commission a décrit l’enquête ou la question à laquelle il faut répondre comme suit :

[…]

[114] […] la question de savoir si, selon la prépondérance des probabilités, la réprimande [la mesure contestée] disciplinaire a été accordée parce que le plaignant a refusé de travailler ou a agi autrement afin d’observer les dispositions de la partie II du Code de chercher à en assurer l’application. Je le répète, la dernière étape exposée dans Vallée, reformulée et simplifiée plus tôt dans la présente décision, exige qu’il y ait « […] un lien direct entre a) les mesures prises contre le plaignant et b) l’observation des dispositions de la partie II du Code ou le fait de chercher à en assurer l’application par le plaignant ». Dans le présent cas, cette exigence se rapporte au lien de causalité entre la réprimande du 30 avril 2019 et les gestes posés par le plaignant le 24 avril 2019.

[…]

[127] La question que je dois trancher est […] de savoir si la réprimande disciplinaire a été imposée parce que M. White avait refusé de travailler ou qu’il observait les dispositions de la partie II du Code ou cherchait à en assurer l’application.

[…]

[Les passages en évidence le sont dans l’original]

 

[151] Le Dictionnaire canadien d’Oxford définit [traduction] « parce que » comme [traduction] « la raison pour laquelle », « puisque », « en raison de ». Les deux actions ou événements doivent être directement liés.

[152] Je dois examiner les éléments de preuve pour déterminer s’il existe un lien direct entre la plainte de violence en milieu de travail déposée en juillet 2019 et les lettres d’options reçues par la plaignante en janvier et en février 2020.

[153] Les éléments de preuve pertinents dans le présent cas m’amènent clairement et sans équivoque à conclure qu’il n’y avait aucun lien entre la plainte de violence en milieu de travail et les lettres d’options que la plaignante a reçues en janvier et en février 2020.

[154] La plaignante a présenté une plainte de violence en milieu de travail en juillet 2019 et, comme je l’ai déjà mentionné, elle l’a fait apparemment en réponse à la première lettre d’options qu’elle a reçue en mai 2019. Depuis janvier 2019, la défenderesse est résolue et s’est concentrée singulièrement sur sa demande de régulariser son statut de congé non payé en exerçant les options qui lui sont offertes en vertu de la Directive.

[155] Je fais remarquer que la lettre d’options de mai 2019 ne contenait pas l’avis figurant dans les lettres de 2020 selon lequel, en l’absence d’un choix, la défenderesse recommanderait le licenciement de la plaignante pour des raisons non disciplinaires. Je dois examiner si l’inclusion de ces renseignements a modifié la nature de la lettre d’options, afin qu’elle soit visée par les paramètres de l’article 147 du Code. L’option d’un licenciement pour des raisons non disciplinaires est précisée dans la Directive et est la seule option qui relève du pouvoir de la défenderesse. La Directive prévoit ce qui suit :

[…]

La personne ayant le pouvoir délégué doit réexaminer chaque cas périodiquement afin de s’assurer que le congé non payé accordé pour maladie ou blessure survenue au travail n’est pas prolongé sans raisons médicales valables. Les cas de [CNP] doivent être réglés dans les deux ans qui suivent la date du début du congé, quoique chaque cas doit être évalué sous réserve de ses circonstances particulières.

Le [CNP] accordé pour maladie ou blessure survenue au travail se termine lorsque la personne :

· retourne au travail;

· démissionne ou prend sa retraite pour des raisons médicales;

· est licenciée en vertu de l’alinéa 51(1)g) de la Loi sur l’Agence du revenu du Canada.

[…]

 

[156] Je conclus que la nature essentielle de la lettre d’options du 16 mai 2019 était purement à titre d’information et administrative. Elle expose tous les scénarios possibles pour aborder le statut d’un employé après une absence prolongée du lieu de travail. Je ne crois pas que l’inclusion de cette option dans les deux lettres d’options de 2020 ait été faite en raison de la plainte de violence en milieu de travail que la plaignante a déposé en juillet 2019. Au contraire, l’option de la défenderesse a été incluse simplement pour l’informer de toutes les options, y compris la seule qui relevait de son pouvoir discrétionnaire.

VIII. Conclusion

[157] La plaignante devait établir, selon la prépondérance des probabilités, que les lettres d’options qu’elle a reçues en janvier et en février 2020 constituaient des mesures interdites par l’article 147 du Code. Elle ne l’a pas fait.

[158] Je n’étais pas convaincue que l’énoncé dans les lettres d’options selon lequel le gestionnaire recommanderait le licenciement de la plaignante pour des raisons non disciplinaires constituait une mesure de représailles. Je conclus que cet énoncé constituait un avis à la plaignante selon lequel si elle n’exerçait pas une option, la défenderesse exercerait la seule option qui lui était offerte. Fournir à un employé des options pour résoudre une situation d’absence du lieu de travail, sans plus, n’est pas de nature punitive, disciplinaire ou de représailles.

[159] La plaignante croyait que les lettres d’options équivalaient à un licenciement. Sa seule conviction ne suffit pas à la Commission de conclure que les lettres équivalaient à un licenciement.

[160] Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

(L’ordonnance apparaît à la page suivante)


IX. Ordonnance

[161] La plainte est rejetée.

Le 7 mars 2024.

Traduction de la CRTESPF

Caroline E. Engmann,

une formation de la Commission des relations de

travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral



 

Annexe A – Lettre de décision sur la requête en récusation

[Traduction]

Le 17 juin 2022.

 

Rupinder Panesar (partie déposante) PAR COURRIEL

[adresse électronique caviardée]

 

Elizabeth Matheson (représentante de l’employeur) PAR COURRIEL

[adresse électronique caviardée]

Objet : Lettre de décision

Dossier de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral n560‑34‑41773 Rupinder Panesar et Agence du revenu du Canada – Requête en récusation

Une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (la « Commission »), composée de la commissaire, Caroline E. Engmann, a demandé que je vous transmette la décision suivante concernant une de demande de récusation de la commissaire.

Historique de l’instance

Le 20 mai 2020, la plaignante a présenté une plainte auprès de la Commission en vertu de l’article 133 du Code canadien du travail (CTC) alléguant que l’Agence du revenu du Canada (défenderesse) avait commis des actes de représailles contre elle en contravention de l’article 147 du CTC (dossier n560‑34‑41773).

Le 20 décembre 2021, les parties ont été informées que la plainte avait été mise au calendrier aux fins d’une audience du 21 au 23 juin 2022 par vidéoconférence.

La commissaire Caroline E. Engmann a été désignée en tant que formation de la Commission pour entendre la plainte.

Le 13 avril 2022, en réponse à la demande de la Commission de tenir une conférence préparatoire à l’audience, la plaignante a demandé que l’audience se tienne « en personne à Ottawa » plutôt que « par Zoom ». Cette demande a été discutée lors d’une conférence préparatoire à l’audience tenue le 30 mai 2022. Les parties ont été informées que la demande serait discutée avec la présidente et qu’une réponse serait fournie. Un résumé des questions abordées lors de la conférence préparatoire à l’audience a été communiqué aux parties par courriel.

Le 2 juin 2022, la demande de la plaignante en vue d’une « audience en personne à Ottawa » a été accueillie et les parties ont été informées que l’audience prévue du 21 au 23 juin 2022 se tiendrait en personne à Ottawa.

Le 3 juin 2022, la plaignante a demandé que l’audience en personne soit reportée.

Une téléconférence a eu lieu le 10 juin 2022 pour répondre à la demande de report de l’audience de la plaignante. Après avoir entendu les arguments des parties, elles ont été informées qu’une décision serait rendue sur la demande de report le 13 juin 2022.

Le 13 juin 2022, la Commission a rejeté la demande de report de l’audience de la plaignante.

Demande de récusation

À la suite de la communication aux parties de la décision relative à la demande de report, le 13 juin 2022, la plaignante a présenté la demande suivante :

[…]

Je m’oppose à ce que la Commission affecte la commissaire à ce dossier. Je demande à la Commission d’affecter un commissaire :

– qui n’est pas un avocat et qui a représenté la défenderesse,

– qui n’est pas un ancien employé du gouvernement (fédéral, provincial/territorial et/ou municipal),

– dont la carrière n’était pas celle de fonctionnaire.

Dans ses arguments écrits subséquents, la plaignante a ajouté une autre restriction comme suit :

– dont les membres de la famille sont des employés de la défenderesse, de la Commission, de JUS et/ou du SCT

Dans ses arguments, la plaignante a fait valoir que la commissaire avait rendu certaines décisions favorables à la défenderesse, alors qu’elle avait rejeté ses demandes ou n’en avait pas tenu compte. La plaignante a invoqué les décisions suivantes : Marques v Dylex Ltd., (1977) 81 DLR (4e) 554 (Ont. Div. Ct.); Metropolitan Properties Co. (F.G.C.), Ltd. v. Lannon, [1968] 3 All E.R. 304 (C.A.); Commonwealth Coatings Corp v. Continental Casualty Co, 393 US 145 (1968) 337, au par. 339; R c. Lippé, [1991] 2 RCS 114, p. 144, 128 NR 1; Ghirardosi v. British Columbia (Minister of Highways); [1966] 367 SCR, 56 DLR (2e) 469; Banque de Montréal c. Brown, 2006 CF 503, [2006] ACF n623; Enquête Énergie c. Comm. de contrôle de l’énergie atomique, 1984 CanLII 5388 (CAF), [1985] 1 CF 563. Elle a également cité l’article suivant : Joshua Tayar, « Safeguarding the Institutional Impartiality of Arbitration in the face of Double‑Hatting », dans McGill Journal of Dispute Resolution, Vol. 5 (2018‑2019), no 5.

La défenderesse a demandé que la requête soit rejetée. La défenderesse a soutenu que le fait que la commissaire était auparavant une avocate de la défenderesse ne suffit pas à démontrer une crainte raisonnable de partialité (Shura c. Président de la Commission des libérations conditionnelles du Canada, 2020 CRTESPF 26). La méfiance n’est pas suffisante, les allégations doivent être étayées par des éléments de preuve suffisants selon lesquels il existe un fondement solide pour une crainte de partialité (Shura au par. 157, citant Adams v. British Columbia (Worker’s Compensation Board), [1989] B.C.J. No. 478).

Analyse et motifs

La Commission (et ses prédécesseurs) ont été établis par le Parlement pour, entre autres responsabilités, administrer les régimes de négociation collective et d’arbitrage de grief dans la fonction publique et au Parlement. Elle traite des griefs et des plaintes en matière de relations de travail entre le gouvernement fédéral en tant qu’employeur et ses employés.

Avant d’être nommée à la Commission en 2021, la commissaire était avocate auprès du Secrétariat du Conseil du Trésor, Services juridiques. La Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral, L.C. 2013, ch. 40, art. 365, prévoit que les commissaires doivent être nommés à partir d’une liste de personnes admissibles dressée par le président en consultation avec l’employeur et les agents négociateurs (article 6). Même si l’employeur et les agents négociateurs recommandent les personnes nommées admissibles, le paragraphe 6(4) consacre la présomption d’impartialité en prévoyant ce qui suit :

(4) Malgré son éventuelle nomination sur recommandation de l’employeur ou des agents négociateurs, le commissaire ne représente ni l’employeur ni les employés et est tenu d’agir avec impartialité dans l’exercice de ses attributions.

La Cour d’appel fédérale dans Oberlander c. Canada (Procureur général), 2019 CAF 64, au par. 8, a expliqué succinctement l’importance de la présomption d’impartialité comme suit, citant l’arrêt de la Cour suprême du Canada Bande indienne Wewaykum c. Canada, 2003 CSC 45 :

[…] « [l]’impartialité est la qualité fondamentale des juges et l’attribut central de la fonction judiciaire » (Conseil canadien de la magistrature, Principes de déontologie judiciaire (1998), p. 30). Elle est la clé de notre processus judiciaire et son existence doit être présumée […] cette présomption d’impartialité a une importance considérable, et le droit ne devrait pas imprudemment évoquer la possibilité de partialité du juge, dont l’autorité dépend de cette présomption. Par conséquent, bien que l’impartialité judiciaire soit une exigence stricte, c’est à la partie qui plaide l’inhabilité qu’incombe le fardeau d’établir que les circonstances permettent de conclure que le juge doit être récusé.

La Cour d’appel fédérale a ajouté qu’il incombe à l’appelant d’établir « une réelle probabilité de partialité » et qu’une allégation de partialité doit également être « défendable » ou « crédible ».

Le genre de requête présentée par la plaignante n’est pas nouveau, car la Commission et ses prédécesseurs ont traité de cette question dans le passé. Dans les deux décisions suivantes, la Commission a traité de demandes de récusation pour des motifs semblables à ceux invoqués par la plaignante, notamment l’emploi antérieur du commissaire au ministère de la Justice et à titre d’avocat du Conseil du Trésor. Dans Bialy c. Alliance de la Fonction publique du Canada, 2012 CRTFP 125, la Commission a rejeté une requête en récusation, estimant que, même si le commissaire désigné avait agi auparavant à titre d’avocat pour l’employeur, il était en mesure de rendre une décision de manière indépendante, équitable, objective et impartiale. De même, dans Veillette c. Chouinard, St‑Amand et Agence du revenu du Canada, 2013 CRTFP 61, la Commission a formulé le critère approprié pour déterminer s’il y a un motif raisonnable de crainte de partialité comme suit :

7. Le critère applicable pour déterminer s’il y a une cause raisonnable de crainte ou une probabilité raisonnable de partialité a été élaboré par la Cour suprême du Canada dans Committee for Justice and Liberty c. L’Office national de l’énergie, [1978] 1 R.C.S. 369 et dans R. c. S. (R.D.), [1997] 3 R.C.S. 484 (à la page 394) comme suit :

La Cour d’appel a défini avec justesse le critère applicable dans une affaire de ce genre. Selon le passage précité, la crainte de partialité doit être raisonnable et le fait d’une personne sensée et raisonnable qui se poserait elle‑même la question et prendrait les renseignements nécessaires à ce sujet. Selon les termes de la Cour d’appel, ce critère consiste à se demander « à quelle conclusion en arriverait une personne bien renseignée qui étudierait la question en profondeur, de façon réaliste et pratique […] ».

8. De plus, dans Adams v. British Columbia (Workers’ Compensation Board) (1989), 42 B.C.L.R. (2d) 228, la Cour d’appel de la Colombie‑Britannique a soulevé la question de la nature de la preuve requise pour démontrer l’apparence de partialité ainsi :

[…]

[…] une accusation de cette nature […] ne doit pas être formulée à moins qu’il n’existe des preuves suffisantes pour démontrer à une personne raisonnable qu’il y a tout lieu de craindre que la personne contre laquelle l’allégation est formulée ne fera pas montre d’un esprit impartial en rendant sa décision […]. De simples soupçons ne sauraient être considérés comme suffisants […]

 

[…]

En rejetant la requête en récusation, la Commission, dans Veillette, a invoqué des décisions antérieures de la Commission et a fait remarquer que :

11 Il est de connaissance commune que d’autres commissaires ont également travaillé au sein de la fonction publique fédérale ou pour des agents négociateurs au cours de leur carrière. L’expertise acquise par la spécialisation dans le domaine des relations de travail auprès du gouvernement fédéral, d’agents négociateurs ou dans le secteur privé est souvent vue comme constituant un atout pour la Commission. Voilà en outre pourquoi l’article 19 de la Loi prévoit que la Commission doit être représentative et traite spécifiquement de l’impartialité des Commissaires nonobstant l’origine de la recommandation de leur nomination à la Commission. Spécifiquement, le paragraphe 19(4) de la Loi prévoit :

(4) Malgré son éventuelle nomination sur recommandation de l’employeur ou des agents négociateurs, le commissaire ne représente ni l’employeur ni les fonctionnaires et est tenu d’agir avec impartialité dans l’exercice de ses attributions.

Dans ses arguments, la plaignante a fait valoir qu’il existait une « partialité pécuniaire » au motif que la commissaire avait une « attente raisonnable de gain pécuniaire ». Comme la Commission l’a fait remarquer dans Herbert c. Administrateur général (Commission des libérations conditionnelles du Canada), 2020 CRTESPF 28, au par. 34 : « Les commissaires ne sont pas des employés du CT, ni de quelque autre organisme du gouvernement fédéral que ce soit », y compris l’Agence du revenu du Canada. Ils sont nommés par le gouverneur en conseil et ils occupent une charge publique en vertu d’un décret. De plus, ils relèvent de la surveillance du commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique du Canada à titre de titulaires de charge publique en vertu de la Loi sur les conflits d’intérêts, L.C. 2006, ch. 9, art. 2.

Dans Energy Probe c. Atomic Energy Control Board, 1984 CanLII 3039 (CAF), l’un des cas cités par la plaignante, la Cour d’appel fédérale a conclu que le critère de la partialité pécuniaire est l’existence d’un « intérêt pécuniaire direct » dans l’affaire. Dans le présent cas, rien dans la preuve n’indique un « intérêt pécuniaire direct » de la part de la commissaire.

Dans Hamilton Health Sciences Corporation v. Canadian Union of Public Employees, Local 4800, 2004 CanLII 54977 (ON LA), un arbitre de grief a rejeté la requête de l’employeur en vue de sa récusation, entre autres, au motif que l’arbitre de grief avait déjà eu des rapports avec l’avocat du syndicat. Il a conclu que le critère applicable à la crainte raisonnable de partialité n’a pas été satisfait. Dans le cadre de son raisonnement, l’arbitre de grief a souligné la distinction entre la « partialité » et l’« impartialité » comme suit :

[6] La décision du juge Cory dans R. c. R.D.S., précitée, a donné des précisions sur le critère de la crainte de partialité. Il a fait observer que le test ne doit pas être lié à la « conscience très sensible ou scrupuleuse ». Il a affirmé qu’il faut faire preuve de rigueur pour conclure à la partialité, réelle ou apparente. Il a mis en garde qu’une telle conclusion doit être examinée avec soin, parce qu’une allégation de crainte raisonnable de partialité remet en question à la fois l’intégrité personnelle de l’arbitre de grief et l’intégrité de l’administration de la justice. (¶¶112‑113) Il a réitéré que les motifs d’une allégation de ce genre doivent être substantiels et qu’il incombe à la partie qui cherche à disqualifier l’arbitre de grief de présenter des éléments de preuve qui satisfont au critère. (¶114)

[7] Le juge Cory a également traité du sens du terme « partialité ». Il a fait observer que la « partialité » doit être comparée à l’impartialité. Selon lui, l’impartialité est « un état d’esprit dans lequel l’arbitre n’est pas intéressé par le résultat et est ouvert à la persuasion par les éléments de preuve et les arguments » tandis que la « partialité désigne un état d’esprit qui est d’une certaine façon prédisposé à un résultat particulier. » (¶¶104‑105) Il a déclaré qu’il ne suffit pas de démontrer qu’un décideur a certaines croyances, opinions ou même des partialités; « Il faut démontrer que ces croyances, opinions ou partialités empêchent le juré (ou, j’ajouterai, tout autre décideur) de mettre de côté toute idée préconçue et de prendre une décision sur la base des éléments de preuve. » (¶107) [je mets en évidence]

La Commission souscrit aux observations formulées dans Hamilton Health Sciences Award. Aucune des affirmations de la plaignante ne satisfait au seuil élevé pour établir une « partialité » sous quelque forme que ce soit ou une crainte raisonnable de partialité. Le simple fait que la commissaire ait été auparavant avocate du Conseil du Trésor ne soulève pas en soi une crainte raisonnable de partialité.

Rien ne permet de conclure que la commissaire désignée n’exercerait pas ses fonctions de manière indépendante, équitable et impartiale.

Pour ces motifs, la Commission rejette la demande de récusation de la plaignante.

[nom caviardé]

Agent de gestion des cas par intérim

Courriel : [adresse électronique caviardée]

au nom de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

c.c.

Services juridiques, Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada

[adresse électronique caviardée]

Agence du revenu du Canada (défenderesse)

[adresse électronique caviardée]

Bryan Girard (adjoint de M. Gualtieri)

[adresse électronique caviardée]

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.