Décisions de la CRTESPF
Informations sur la décision
À l’automne 2017, l’employeur a mis en place un poste qui allait de 15 h à 23 h, du lundi au vendredi. L’agent négociateur avait déposé un grief de principe en février 2023, alléguant que l’employeur avait violé la convention collective en créant le poste et que les employés qui y travaillaient étaient des « travailleurs de jour », et non des « travailleurs par postes », et qu’ils avaient donc droit à une prime de poste plus élevée. L’employeur a déposé une objection préliminaire selon laquelle le grief était hors délai, puisque l’agent négociateur était au courant du changement depuis 2017. L’agent négociateur a soutenu que le grief n’était pas hors délai, car il n’avait été informé du poste qu’en octobre 2022 et, de toute façon, il s’agissait d’un grief continu. La Commission a conclu que le grief était un grief continu classique, car la violation alléguée se reproduisait chaque jour où un employé travaillait le poste en question et chaque jour où l’employeur ne payait pas la prime de poste plus élevée aux employés pendant ce poste. Toutefois, la Commission a également fait remarquer que cela ne signifiait pas que le retard dans le dépôt du grief n’avait pas eu de conséquences. L’employeur était libre de présenter cet argument lorsque la Commission a entendu le grief sur le fond.
Objection préliminaire rejetée.
Contenu de la décision
Date: 20251103
Dossier: 569-02-52406
Référence: 2025 CRTESPF 147
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relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral et Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral |
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Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral |
Entre
Alliance de la fonction publique du Canada
agent négociateur
et
Conseil du Trésor
(ministère de l’Emploi et du Développement social)
employeur
Répertorié
Alliance de la Fonction publique du Canada c. Conseil du Trésor (ministère de l’Emploi et du Développement social)
Affaire concernant un grief de principe renvoyé à l’arbitrage
Devant : Christopher Rootham, une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral
Pour l’agent négociateur : Wael Afifi, Alliance de la Fonction publique du Canada
Pour l’employeur : Erin Saso, Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada
Décision rendue sur la base d’arguments écrits
déposés le 24 juin, le 9 juillet et le 3 octobre 2025.
(Traduction de la CRTESPF)
MOTIFS DE DÉCISION |
(TRADUCTION DE LA CRTESPF) |
I. Survol
[1] Le présent grief de principe concerne un horaire de postes. L’employeur s’oppose au grief au motif qu’il est hors délai parce que l’horaire de postes a été mis en œuvre en 2017 et que l’Alliance de la Fonction publique du Canada (AFPC) n’a déposé le présent grief de principe que le 3 février 2023.
[2] J’ai rejeté l’objection de l’employeur. Le présent cas est un exemple classique de grief continu, ce qui signifie que l’AFPC aurait pu déposer le grief de principe en tout temps sans que le grief ne soit hors délai. Mes raisons suivent.
II. Nature du grief
[3] Le présent grief de principe porte sur un horaire de postes au Centre de gestion des dossiers d’Emploi et Développement social Canada (EDSC) à Edmonton, en Alberta. À l’automne 2017, EDSC a mis en œuvre un poste qui se déroule du lundi au vendredi de 15 h à 23 h. C’est ce qu’on appelle le poste Nighthawk. Jusqu’à maintenant, EDSC n’a pas dit si son nom vient de l’oiseau nighthawk en anglais (engoulevent en français) ou du film de 1981 Nighthawks (Les Faucons de la nuit) mettant en vedette Sylvester Stallone et Billy Dee Williams. L’AFPC allègue qu’EDSC a violé la convention collective en créant le poste Nighthawk. Elle soutient également que les employés qui travaillent ce poste sont en fait des « travailleurs de jour » et non des « travailleurs par postes », ce qui signifie qu’ils ont droit à une prime de 7 $ l’heure après 18 h. L’employeur dit qu’il s’agit de travailleurs par postes et qu’ils ont droit à la prime de poste de 2,25 $ l’heure après 16 h. D’après ce que je peux déterminer, l’AFPC ne s’oppose pas au nom Nighthawk.
III. Il s’agit d’un grief continu et, par conséquent, il a été déposé dans les délais
[4] Le 12 octobre 2022, des représentants de l’AFPC ont visité le Centre de gestion des dossiers d’Edmonton. L’AFPC affirme que c’était la première fois qu’elle était informée de l’horaire Nighthawk. L’employeur affirme que l’AFPC était au courant ou aurait dû être au courant de l’horaire Nighthawk en 2017. L’AFPC a déposé le présent grief de principe le 3 février 2023.
[5] Le délai pour déposer un grief de principe dans la convention collective pertinente est de 25 jours ouvrables. L’employeur affirme que le grief a été déposé en retard, soit très en retard si le délai s’écoule à partir de 2017, mais encore en retard s’il s’écoule à partir du 12 octobre 2022.
[6] Je ne suis pas d’accord. Je suis plutôt d’accord avec l’AFPC pour dire qu’il s’agit d’un grief continu.
[7] Un grief continu « […] est un grief dans lequel l’événement faisant l’objet du grief est exécuté successivement, ou la violation de la convention collective est récurrente ou répétitive. Chaque fois que la violation se produit, le délai recommence » (de Conseil des métiers et du travail des chantiers maritimes du gouvernement fédéral (Esquimalt, C.-B.) c. Conseil du Trésor du Canada, 2025 CRTESPF 67, au par. 17).
[8] J’ai dit dans le survol que le présent cas est un exemple classique de grief continu. Je voulais dire cela littéralement. Dans Palmer et Snyder, Collective Agreement Arbitration in Canada, 7e éd., au paragraphe 3.44 du chapitre 3.03(1)b), les auteurs ont écrit : [traduction] « Lorsqu’une allégation a été faite selon laquelle un employeur a indûment fixé des heures de travail, il a été conclu qu’il s’agit d’un grief continu. »
[9] L’employeur soutient qu’il s’agit d’un cas de récurrence de dommages, ce qui est différent d’un grief continu. Je ne suis pas d’accord pour dire que le présent cas porte sur les conséquences récurrentes d’une action antérieure. Ce grief est un grief continu classique. La violation alléguée se reproduit chaque jour où un employé travaille le poste Nighthawk, et la violation alléguée se reproduit également chaque jour où l’employeur ne paie pas une prime de 7 $ l’heure aux employés du poste Nighthawk. Cela signifie que le grief de principe a été déposé dans les délais.
[10] Cela ne veut pas dire que le retard dans le dépôt du grief n’a pas de conséquences. L’employeur peut faire valoir que l’AFPC est empêchée de déposer un grief concernant un horaire qui était en place depuis plus de cinq ans avant le dépôt du présent grief. L’employeur a déjà fait valoir que toute réparation est limitée en raison du retard ou, tout au plus, devrait être plafonnée à la période de 25 jours qui a précédé le grief de principe, conformément à Canada (Office national du film) c. Coallier, [1983] A.C.F. no 813 (C.A.)(QL). Je ne suis pas prêt à me prononcer sur cette question maintenant, mais l’employeur est libre de présenter cet argument lorsque la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (la « Commission ») entendra le grief sur le fond.
[11] Bref, le grief a été déposé dans les délais. Toute autre conséquence de ce délai doit être traitée ultérieurement. Ma conclusion signifie également que je n’ai pas besoin d’examiner la demande de prorogation de délai de l’AFPC pour déposer le présent grief, qu’elle a présentée à titre subsidiaire.
[12] Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :
(L’ordonnance apparaît à la page suivante)
IV. Ordonnance
[13] L’objection préliminaire de l’employeur est rejetée. Le présent grief sera inscrit au calendrier pour une audience en temps voulu.
Traduction de la CRTESPF
Christopher Rootham,
une formation de la Commission
des relations de travail et de l’emploi
dans le secteur public fédéral