Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Pratiques déloyales de travail - Plaintes fondées sur l'alinéa 23(1)a) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP) relativement à de prétendues violations de l'alinéa 8(2)a) et du sous-alinéa 8(2)c)(ii) de la LRTFP - la première plainte déposée contre le défendeur, le sous-ministre délégué, Santé Canada, alléguait que la mutation de certains plaignants d'une division du Bureau des médicaments vétérinaires (BMV) à une autre division constituait une mesure de représailles de la direction pour avoir mis à jour certaines irrégularités dans l'évaluation des médicaments au BMV - la deuxième plainte alléguait que le défendeur avait refusé de régler plusieurs de ses griefs et plaintes par le passé - le plaignant a soutenu que la direction cherchait à semer la discorde en vue de l'obliger à s'abstenir d'exercer ses droits aux termes de la LRTFP et qu'il était victime de discrimination et d'intimidation en violation de la LRTFP - la Commission a conclu que la preuve produite par les plaignants n'avait pas établi le bien-fondé de leurs plaintes - la preuve a établi qu'il existe des problèmes d'ordre interpersonnel et scientifique graves et troublants au BMV, mais cela ne prouve pas que les décisions prises par le défendeur ou toute personne agissant en son nom contreviennent aux interdictions énoncées à l'article 8 de la LRTFP. Plaintes rejetées.

Contenu de la décision

Dossiers : 161-2-858 161-2-860

Loi sur les relations de travail Devant la Commission des relations dans la fonction publique de travail dans la fonction publique ENTRE SHIV CHOPRA ET AUTRES plaignants et ALAN NYMARK défendeur AFFAIRE : Plainte fondée sur l'article 23 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

Devant : Yvon Tarte, président Pour le plaignant : Judith Allen, avocate Pour le défendeur : Ronald Snyder, avocat

Affaire entendue à Ottawa (Ontario), les 15 et 16 septembre 1998.

DÉCISION La présente décision concerne deux plaintes distinctes déposées contre M. Alan Nymark, sous–ministre délégué, Santé Canada. Une troisième plainte contenue dans le dossier de la Commission 161–2–856 concernant des questions analogues a été retirée au début de l'audience.

Les parties ont convenu au cours de l'audience que les deux autres plaintes feraient l'objet d'une seule décision fondée sur les éléments de preuve produits les 15 et 16 septembre 1998. Quatre personnes ont témoigné au nom des plaignants; une seule personne a témoigné au nom du défendeur.

Dans la première plainte, M. S. Chopra, M m e M. Haydon, M. C. Basudde, M. G. Lambert, M. R. Sharma et M. A. Vilim (161-2-858) prétendent que l’affectation de MM. G. Lambert, R.M. Sharma et A. Vilim à une autre division du Bureau des médicaments vétérinaires (BMV) était une mesure de représailles de la direction parce qu’ils avaient mis au jour certaines irrégularités concernant l'évaluation des médicaments au BMV.

Dans la deuxième plainte, déposée par M. Chopra seulement, ce dernier prétend que le défendeur a refusé de régler plusieurs de ses griefs et plaintes par le passé. Il soutient que la direction cherche à semer la discorde en vue de l'obliger à s’abstenir d’exercer ses droits aux termes de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP) et qu'il est victime de discrimination et d'intimidation en violation de la LRTFP.

La preuve Pour les plaignants M me Margaret Haydon travaille actuellement à la Division de l'évaluation des produits pharmaceutiques (DÉPP) du BMV, Direction de la protection de la santé, Santé Canada, elle s'occupe de l'évaluation des médicaments.

La DÉPP est le fruit de la fusion des anciennes Division des médicaments antiparasitaires, Division des médicaments endocriniens, antiparasitaires et du système nerveux central et Division des médicaments antimicrobiens, qui existaient avant 1997.

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Décision Page 2 Dans son curriculum vitae (pièce C-1, onglet 3), M me Haydon indique que son travail à la BMV depuis 1983 est le suivant : [Traduction] Responsabilités de réglementation relativement à l'évaluation des recherches sur les médicaments vétérinaires envoyées par l’industrie pharmaceutique pour déterminer leur conformité avec les dispositions pertinentes de la Loi sur les aliments et drogues et du Règlement d’application avant d'approuver leur mise en marché au Canada. Les domaines spécifiques d'évaluation sont l’innocuité du produit chez les espèces visées et son efficacité selon l’allégation sur l'étiquette provisoire, l’examen de l’étiquette et la coordination des recommandations de la Division de l’innocuité pour les humains et de la Division de la fabrication et du contrôle de la qualité. Je suis également responsable des évaluations et des recommandations relatives aux demandes d'études expérimentales et aux demandes de médicaments d'urgence.

La pièce C-2, onglet 6, contient un organigramme qui indique que le BMV relève de la Direction des aliments, dont le directeur général est M. Paterson. Le BMV, dont le directeur est M. Lachance, est composé de deux divisions et d'un bureau d'affaires. Outre la DÉPP déjà mentionnée, il y a la Division de l’innocuité pour les humains (DIH), laquelle est dirigée par M. Yong. MM. R.M. Sharma, Vilim, Basudde, Lambert et Chopra travaillent en qualité d'évaluateurs de médicaments à la DIH.

MM. V.D. Sharma, Malik, Breton, Lobo, Alexander, Barrett et Blanchard ainsi que M me Haydon travaillent en qualité d'évaluateurs de médicaments à la DÉPP dirigée par M. Landry.

Les médicaments destinés aux animaux de boucherie sont soumis au BMV par leurs fabricants en vue d'être évalués et approuvés. Le BMV fonctionne selon le principe du recouvrement des coûts depuis le 1 er avril 1996. Il est arrivé à la DÉPP, à différentes périodes par le passé, de se retrouver avec un arriéré de travail que l'on éliminait, parfois, en recourant aux heures supplémentaires. Deux études indépendantes ont reproché au BMV sa lenteur à approuver les médicaments.

La première étude a été effectuée par Price Waterhouse en 1992 (pièce C-2, onglet 5) et la seconde, par KPMG au début de 1998 (pièce C-2, onglet 5). Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 3 En janvier 1998, MM. Vilim, R.M. Sharma et Lambert furent affectés temporairement à la DÉPP en vue de réduire un arriéré de travail (pièce C-2 onglet 6). Dans la note de service adressée à ces trois médecins vétérinaires, M. Paterson indiquait ce qui suit : [Traduction] Arriéré de demandes Comme il a été précisé à la réunion du personnel du BMV tenue le 27 novembre 1997, la Division de l'évaluation des produits pharmaceutiques est aux prises avec un important arriéré.

J'ai lancé une invitation pour trouver des volontaires parmi le personnel de la Division de l’innocuité pour les humains en vue d'aider, à titre temporaire, à réduire l'arriéré. Personne n'a répondu à mon invitation. Par conséquent, en date du 5 janvier 1998, je vous affecte à la Division de l'évaluation des produits pharmaceutiques pour aider à réduire l'arriéré. J'ai demandé à M. Landry de vous exposer personnellement les tâches qui vous seront confiées.

J'espère que, grâce à un effort concerté, cet arrangement ne durera que le temps nécessaire pour réduire l'arriéré et le rendre plus gérable.

Je vous remercie de votre collaboration. Selon M me Haydon, les affectations temporaires de MM. Sharma et Vilim (jusqu'en mars 1998) et de M. Lambert (jusqu'en juillet 1998) n'ont pas permis de réduire l'arriéré de la DÉPP.

L'étude de KPMG mentionnée plus haut a été effectuée durant l'affectation de MM. Sharma, Vilim et Lambert à la DÉPP. Vu que M m e Haydon avait déjà déposé sa plainte contre la mutation, elle a refusé de participer à l'étude de l'employeur. Elle a en outre déclaré qu'elle n'était pas d'accord avec les conclusions de KPMG, soit que le BMV avait des problèmes interpersonnels. Ce point de vue, déjà exposé par le défendeur dans ses réponses aux griefs (pièce C-1, onglet 2), ne tenait pas compte des grandes divergences de vues sur le plan scientifique entre les évaluateurs de médicaments et leurs gestionnaires.

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Décision Page 4 M me Haydon a également déclaré avoir fait l'objet de pressions de la part de la direction pour approuver des médicaments dont l’innocuité lui semblait douteuse. À quatre occasions au moins, on lui a dit que les fabricants pourraient intenter des poursuites contre elle. M. Landry lui a dit qu'elle pourrait être accusée d'insubordination pour avoir exprimé des réserves au sujet d'un médicament en particulier.

Au cours du contre-interrogatoire, M me Haydon a reconnu que M. Paterson avait discuté de l'arriéré à la DÉPP et à la DIH lors de la réunion du personnel tenue le 27 novembre 1997. Elle a aussi indiqué que la possibilité d'une action en justice avait été soulevée au cours d'une discussion au sujet d'une lettre envoyée au BMV par l'avocat d'un fabricant de médicaments.

Le témoin suivant a été M. Shiv Chopra, qui travaille à Santé Canada depuis 1969. Il est titulaire d'un baccalauréat en médecine vétérinaire décerné par le collège de médecine vétérinaire du Punjab ainsi que d'une maîtrise et d'un doctorat en microbiologie décernés par l'Université McGill à Montréal (voir la pièce C-1, onglet 3).

M. Chopra a décrit en détail son travail et certains des médicaments qu'il a été appelé à évaluer. Il a affirmé avoir souvent eu l'impression d’être harcelé par M. Landry, qui exerçait continuellement des pressions sur lui et sur ses collègues pour qu'ils respectent les délais artificiels établis par le Ministère pour l'approbation des médicaments. À titre d'exemple de l'ingérence de M. Landry, il a mentionné le fait que l'approbation du médicament Revalor–H, qui faisait partie de sa charge de travail, avait été confiée à quelqu'un d'autre pour accélérer les formalités et ainsi contourner ses réserves.

M. Chopra croit que la direction a essayé de l'isoler de ses collègues pour le faire fléchir dans sa détermination à appliquer la loi et à protéger la population canadienne. Ses plaintes ont été jugées frivoles par la direction et, dans certains cas, après avoir présenté avec succès des griefs, il n'a pas obtenu le redressement prévu. Il croit aussi que le grief du mois de septembre 1997 (pièce C-1, onglet 2) n'a pas été réglé au complet. Il s'est dit également préoccupé par le fait que le défendeur, dans sa réponse au grief, a indiqué qu'un examen indépendant serait mené à la suite d'un incident survenu lors d'une réunion entre le personnel de Santé Canada et des

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Décision Page 5 représentants de l’industrie le 30 janvier 1997, alors qu'il avait obtenu l'assurance que l'affaire avait été réglée.

Le témoin faisait partie d'une équipe chargée d'examiner le Nutrilac, une hormone de croissance bovine mise au point par génie génétique dont le nom technique est somatotropine bovine recombinante ou STbr. Le rapport produit par l'équipe d'examen, intitulé [traduction] « RAPPORT D'ANALYSE DES ÉCARTS » a été préparé en avril 1998 (pièce C-1, onglet 4). Ce rapport a été sévèrement critiqué par MM. Lachance (le directeur du BMV), Landry et Yong, qui en ont exigé la modification.

M. Chopra n'a pas participé à l'étude effectuée par KPMG, laquelle, selon lui, a été commandée pour régler des conflits interpersonnels qui, maintient-il, n'existent pas. En mai 1998, le témoin a assisté à une réunion du personnel convoquée pour discuter du rapport de KPMG sur l’évaluation du milieu de travail. Au cours de la réunion, M. Lachance a précisé que les employés qui avaient de la difficulté à comprendre que le BMV travaillait désormais en partenariat avec ses clients et selon le principe du recouvrement des coûts allaient devoir se faire à l’idée et changer d'attitude sinon ils pourraient être mutés à un endroit on n'entendrait plus parler d'eux.

En terminant, M. Chopra s'est souvenu d'une réunion tenue en novembre 1997 au cours de laquelle on a demandé des volontaires pour éliminer l'arriéré de la DÉPP.

Lors du contre-interrogatoire, M. Chopra a reconnu qu'il y avait eu par le passé des affectations temporaires d’une division à l’autre du BMV.

M. Cris Basudde est ensuite venu témoigner. Il est titulaire d'un diplôme en médecine vétérinaire décerné par l'Université de Nairobi, au Kenya, ainsi que d'une maîtrise en pharmacologie et d'un doctorat en toxicologie décernés par l'Université de Londres, Angleterre.

M. Basudde travaille en qualité d'évaluateur de médicaments à Santé Canada depuis 1990. Il a indiqué avoir sensiblement les mêmes préoccupations d’ordre scientifique que M me Haydon et M. Chopra. Il croit que ces préoccupations n'ont pas été réglées de façon satisfaisante par la direction. Il a participé à l'étude menée par

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Décision Page 6 KPMG; il a été interviewé pendant environ une heure et demie par un dénommé Michael Dandeneau le 25 février 1998.

Quand MM. Sharma, Vilim et Lambert ont été temporairement affectés à la DÉPP, M. Basudde s'est retrouvé seul pour faire le travail de la DIH, laquelle fait maintenant face à un arriéré de travail.

M. Gérard Lambert a témoigné à son tour. Il est titulaire d'un diplôme en médecine vétérinaire, d'une maîtrise et d'un doctorat en pharmacologie décernés par l'Université de Montréal. Il travaille en qualité d'évaluateur de médicaments au BMV à Santé Canada depuis 1973.

M. Lambert a déclaré avoir participé à l'examen effectué par Price Waterhouse, mais pas à l'étude de KPMG. Ses préoccupations sont les mêmes que celles des témoins qui l'ont précédé.

Le témoin a indiqué que son affectation temporaire à la DÉPP a débuté le 5 janvier 1998 et a pris fin en juillet 1998 avec son retour à la DIH à titre de chef intérimaire, à la demande de M. Yong. M. Lambert ne croit pas que l'affectation temporaire des trois évaluateurs de la DIH à la DÉPP a permis de sensiblement réduire l'arriéré de la DÉPP.

Au cours du contre-interrogatoire, M. Lambert a reconnu avoir assisté à une réunion le 14 janvier 1998 (pièce R-3) au cours de laquelle M. Paterson a essayé d’expliquer les réaffectations temporaires.

Pour le défendeur M. Paterson est le directeur général de la Direction des aliments à Santé Canada depuis 1996. Il est responsable du BMV.

M. Paterson a déclaré qu'il y avait déjà eu des affectations temporaires entre les divisions. Dans le cas qui nous intéresse, avant de décider de réaffecter temporairement MM. Sharma, Vilim et Lambert, il a examiné d'autres solutions possibles telles que la sous-traitance, le recours aux heures supplémentaires et la redistribution de la charge de travail.

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Décision Page 7 Le témoin a discuté de ces possibilités avec son comité de gestion (composé du directeur, M. Lachance, et des trois chefs de division). Ils ont privilégié les affectations temporaires à cause des énormes contraintes budgétaires du BVD.

MM. Sharma et Lambert ont été choisis pour l'affectation temporaire à cause de leur expérience antérieure à la DÉPP. M. Vilim a été choisi simplement parce qu'il était disponible. Il était impossible de déplacer M. Chopra parce qu’il participait à l'examen de la STbr. Quant à M. Basudde, il s’occupait d’une présentation importante à la DIH.

M. Paterson a affirmé que les griefs et les plaintes n'ont en rien influé sur sa décision d'affecter temporairement MM. Sharma, Vilmin et Lambert à la DÉPP.

M. Paterson a déclaré n’avoir jamais, à titre personnel ou au nom de la direction, fait quelque commentaire ou proféré quelque menace que ce soit dans le but d’obliger qui que ce soit à s’abstenir d'exercer les droits que lui accorde la LRTFP.

Argumentation J'ai demandé aux parties de soumettre leurs observations par écrit, et elles sont reproduites ci-dessous.

Pour les plaignants [Traduction] En résumé, l'IPFPC soutient que, en violation du sous-alinéa 8(2)c)(ii) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. 1985, c. P-35, telle que modifiée, le défendeur, Santé Canada, par la façon dont il a donné suite aux graves préoccupations d’ordre scientifique soulevées par les plaignants par le truchement de la procédure de règlement des griefs a cherché, par intimidation, menaces ou l'imposition d'autres sanctions, à obliger les plaignants à s’abstenir d'exercer les droits que leur accorde la Loi. Plus particulièrement, l'IPFPC soutient que le défendeur a cherché à miner la crédibilité des plaignants au Bureau des médicaments vétérinaires le Bureau ») en ramenant leurs griefs à des « problèmes interpersonnels » et, par l'intermédiaire du rapport de KPMG, à les rabaisser et à les désigner comme des « fauteurs de troubles ». En outre, l'IPFPC soutient qu'en réaffectant trois des plaignants à la Division de l'évaluation des produits pharmaceutiques DÉPP »), le Bureau voulait, en exerçant une de ses prérogatives de gestion, faire comprendre aux plaignants

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Décision Page 8 qu’il pouvait les réaffecter et qu'il n’hésiterait pas à le faire pour qu'on « n'entende plus jamais parler d'eux » s'ils persistaient à déposer des griefs sur des questions analogues à celles dont il est question en l'espèce.

Le contexte des plaintes 1. L'IPFPC accepte qu’il a le fardeau d'établir que, par ses agissements, l'employeur a violé les dispositions du sous-alinéa 8(2)c)(ii) de la Loi aux fins des présentes plaintes, et reconnaît qu'une allégation de violation de ce sous-alinéa de la Loi est sérieuse.

2. En examinant les agissements de l'employeur aux termes de l'article 8 de la Loi, la Commission doit tenir compte de l’importance de la question en litige pour déterminer si le défendeur, Santé Canada, a violé la Loi. La Commission doit tenir compte du rôle crucial joué par les plaignants à titre de fonctionnaires et de scientifiques qui doivent assurer l’innocuité des aliments provenant des animaux de boucherie et consommés par la population canadienne. Plus particulièrement, en vertu de la Loi sur les aliments et drogues, L.R.C. 1985, c. F-27, telle que modifiée, art. 6, et du Règlement sur les aliments et drogues, partie C, Division 8, les plaignants doivent s'assurer que les nouveaux médicaments vétérinaires répondent aux normes sévères établies par le Parlement du Canada. Au sujet des obligations du Bureau relativement à l’innocuité pour les humains, on peut lire dans un document du Bureau des médicaments vétérinaires daté de 1993-1994, que :

[Traduction] Les médicaments destinés aux animaux de boucherie doivent être évalués avec soin pour déterminer les risques de résidus nocifs dans la viande, le lait, les œufs, le poisson ou le miel. Les fabricants soumettent les médicaments vétérinaires à des études sur la toxicité et le métabolisme, lesquelles sont utilisées pour déterminer les risques possibles tels que la mutagénécité, la cancérogénicité, la toxicité pour la reproduction, le développement, et d'autres effets précis. Les données découlant de ces études sont évaluées attentivement en vue de déceler les effets nocifs possibles pour les humains de l'ingestion des résidus dans les aliments.

Document du Bureau des médicaments vétérinaires, 1993-1994, Recueil des documents de l'IPFPC, C-2, onglet 5, page 462 (g)

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Décision Page 9 3. À cet égard, l'IPFPC renvoie la Commission à la preuve présentée par le défendeur, par l'intermédiaire de M. Paterson, selon laquelle les témoignages de M. Chopra et M m e Haydon concernant les graves problèmes d’innocuité et d'efficacité que posaient les médicaments STbr et Revalor H étaient justes et exacts.

4. En outre, il est indispensable que la Commission tienne compte du fait que la réponse faite par le défendeur aux griefs en cause est définitive et obligatoire aux termes de la Loi. Dans leurs griefs, les plaignants se sont dits préoccupés, sur le plan scientifique, des pressions exercées par la direction du Bureau des médicaments vétérinaires pour qu'ils approuvent de nouveaux médicaments vétérinaires dont l’innocuité était douteuse. Le seul moyen interne dont les plaignants disposent officiellement pour faire connaître leurs préoccupations est le dépôt d'un grief non arbitrable aux termes de l'article 90 de la Loi. L'IPFPC maintient que, pour déterminer si la réponse du défendeur et sa décision de redistribuer les tâches en invoquant un important arriéré de travail étaient contraires au sous-alinéa 8(2)c)(ii) de la Loi, la Commission doit tenir compte des moyens limités dont disposent les plaignants pour porter leurs préoccupations à l'attention de la direction et des attentes légitimes que ces préoccupations seront prises au sérieux.

Canada (Conseil du Trésor) c. Burke (5 mai 1988) J.C.F. n o 416 (C.A. féd.) (QL) La réponse au dernier palier de la procédure de règlement des griefs et l'étude de KPMG

La nature des préoccupations soulevées 5. Les plaignants, par leurs griefs, ont soulevé de graves préoccupations d’ordre scientifique concernant l'approbation des nouveaux médicaments vétérinaires destinés aux animaux de boucherie et l’ingérence de la direction et de l’industrie dans le processus d'évaluation scientifique des données. Même si ces préoccupations ne datent pas d’hier et touchent des questions complexes, l'IPFPC soutient que la preuve documentaire fournie au défendeur à l'appui des présents griefs est pertinente, dans la mesure elle établit la teneur des préoccupations d’ordre scientifique soulevées par les plaignants. Ces préoccupations peuvent être ainsi résumées :

i. Le fait que la direction du Bureau n’a pas tenu compte des observations des plaignants au sujet de l'insuffisance des données utilisées pour établir l’innocuité du médicament STbr (ou hormone de

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Décision Page 10 croissance bovine). Les pressions exercées sur M m e Haydon pour qu'elle publie un avis de conformité conditionnel relativement au STbr en 1992, et le fait qu'elle a été écartée du dossier parce qu'elle a continué à se plaindre de l’insuffisance des données;

Recueil de documents de l'IPFPC, C-1, onglet 4, pages 198 à 422

ii. L'approbation du médicament Revalor H malgré le refus de trois évaluateurs, y compris les plaignants M. Chopra et M m e Haydon, de publier un avis de conformité. En outre, les plaignants s’inquiétaient des pressions exercées par le fabricant du médicament pour obtenir l'approbation du médicament et de la réponse de M. Landry, à savoir : « Je lui ai dit que je le compenserais pour les ennuis qu'il a eus avec le Revalor-H quand nous nous évaluerions le prochain médicament », qui était accompagnée du commentaire suivant de M. Paterson, écrit à la main : « Don. Je te remercie d'avoir réglé le problème. J'espère toutefois que tu ne lui a pas promis la lune »;

Documents concernant le médicament Revalor-H, Recueil de documents de l'IPFPC, supra, pages 118 à 187

Note de service de M. Landry à M à l’intention de 30 avril 1997; Recueil de documents de l'IPFPC, supra, page 185(b)

iii. M m e Haydon a déclaré, lors de son témoignage qui n'a pas été contredit par le défendeur, qu'elle s'était sentie menacée et intimidée quand M. Landry lui avait dit qu'elle risquait des poursuites si elle ne changeait pas le contenu de son évaluation scientifique;

iv. M m e Haydon a déclaré avoir été informée qu’elle pourrait être accusée d'insubordination quand elle a parlé de fraude relativement à l'évaluation du médicament Revalor H. Le défendeur n'a présenté aucune preuve en réfutation de ce témoignage.

La genèse des griefs 6. Comme l'indiquent la preuve documentaire et les témoignages, les préoccupations au sujet de l'approbation des

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m e Ruth Swinimer M. Paterson, datée du

Décision Page 11 médicaments vétérinaires et de l'intervention de la direction ont été soulevées pour la première fois par les plaignants le 19 décembre 1996 quand MM. Vilim, Sharma, Basudde et Lambert ont déposé une plainte interne. Dix mois de médiation ont suivi le dépôt de cette plainte à laquelle s’est ajoutée celle de M. Chopra à l’invitation de M. Landry, directeur intérimaire du Bureau. Vu l'échec de la médiation, les griefs suivants ont été déposés :

i. Le grief de M m e Haydon daté du 9 mai 1997; Grief de M m e Haydon daté du 9 mai 1997; Recueil de documents de l'IPFPC, cartable C-1, onglet 2, p. 78 et 79

ii. Le grief de M. Chopra daté du 2 septembre 1997; Grief de M. Chopra daté du 2 septembre 1997; Recueil de documents de l'IPFPC, cartable C-1, onglet 2, p. 19 à 35

iii. Le grief de MM. Chopra, Basudde, Lambert, Vilim et Sharma daté du 10 octobre 1997;

Grief de MM. Chopra, Basudde, Lambert, Vilim et Sharma le grief collectif ») daté du 10 octobre 1997; Recueil de documents de l'IPFPC, cartable C-1, onglet 2, p. 45 à 48

7. Le grief collectif revêt une importance particulière en l'espèce du fait qu'il résume l'affaire :

[Traduction] Le présent grief fait suite aux problèmes de longue date attribuables aux tentatives de la direction de déprécier et de déprofessionaliser les tâches et fonctions exposées dans les descriptions de travail des fonctionnaires s'estimant lésés qui consistent à appliquer les dispositions de la Loi et du Règlement sur les aliments et drogues en matière d’innocuité pour les humains.

Les fonctionnaires en cause sont des scientifiques très compétents dans le domaine de l’innocuité et de l'efficacité des médicaments vétérinaires. Ils ont tous de longs états de service irréprochables au sein de la division et du Ministère.

Grief collectif, supra, page 47

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Décision Page 12 L'essence de la réponse au dernier palier de la procédure de règlement des griefs : les plaignants sont des « fauteurs de troubles »

8. Dans la réponse au dernier palier de la procédure de règlement des griefs, le sous-ministre délégué de Santé Canada, M. Alan Nymark, a écrit ce qui suit :

[Traduction] À la suite d'un examen attentif du grief et de la documentation qui y est jointe, y compris des préoccupations qui y sont soulevées, je conclus que l'allégation de harcèlement n'est pas fondée.

Malgré ce qui précède, il est évident à mes yeux que les relations interpersonnelles au Bureau des médicaments vétérinaires posent un problème; j'ai donc commandé une étude indépendante du lieu de travail pour examiner cette question.

Réponse de M. Alan Nymark au dernier palier de la procédure de règlement des griefs datée du 19 décembre 1997; Recueil de documents de l'IPFPC, C-1, onglet 2, pages 63 et 64

9. Dans son témoignage, M. Paterson, directeur général de la Direction des aliments à Santé Canada, a affirmé qu'il avait conseillé M. Nymark lors de la rédaction de la réponse au dernier palier, qu'il lui avait suggéré que les griefs concernaient des problèmes interpersonnels et qu'il lui avait mentionné les divers examens internes effectués par le Ministère, y compris le rapport de Price Waterhouse et le processus de médiation.

10. Le Bureau a mené plusieurs examens internes en vue de revoir le système d'approbation des médicaments et le rendement du Bureau. Plus particulièrement, l'IPFPC renvoie la Commission aux documents suivants :

i. Le « Rapport Gagnon » intitulé « Working Partnerships... Drug Review for the Future », lequel passe en revue le système canadien d'approbation des médicaments, juillet 1992;

Rapport Gagnon; Recueil de documents de l'IPFPC, C-2, onglet 5, pages 423 à 451

ii. Le Bureau des médicaments vétérinaires, 1993-1994;

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Décision Page 13 Recueil de documents, C-2, onglet 5, pages 462(b) à 462(g)

iii. L'examen effectué par l'Institut canadien de la santé animale intitulé « Performance Audit Pilot Project: Tracking Review Performance of the Bureau of Veterinary Drugs », 3 juin 1997;

Rapport de l'ICSA, Recueil de documents de l'IPFPC, C-2, onglet 5, pages 463 à 470

iv. L'examen stratégique effectué par Price Waterhouse pour le Bureau des médicaments vétérinaires, 1 e r août 1996. Examen de Price Waterhouse, Recueil de documents de l'IPFPC, C-2, onglet 5, pages 471 à 541.

11. L'IPFPC soutient qu'il est révélateur qu'au cours des examens approfondis mentionnés ci-dessus il n’a jamais été question de « problèmes interpersonnels ». En fait, le rapport Gagnon a qualifié le Bureau d’extrêmement efficace et de « modèle » à suivre.

12. Par suite des griefs, la direction a commandé le [traduction] « Rapport d'évaluation du lieu de travail » remis par KPMG le 12 mai 1998. Relativement aux plaintes en l'espèce, le rapport formule les recommandations suivantes :

i. « Le nouveau directeur doit prendre des mesures d’amélioration du rendement et du comportement. Le rendement insuffisant, comportements inconvenables professionnels ne réprimande. » Plus recommandait au Bureau d’inclure les capacités comportementales dans les attentes relatives au rendement à titre d’élément de mesure du rendement (la façon dont on accomplit son travail est aussi importante que ce qu’on sait et ce qu’on est capable de faire);

Examen de KPMG, Recueil de documents de l'IPFPC, C-2, onglet 6, page 574

ii. Le rapport conclut que le climat de travail est « empoisonné, étouffant, stressé et malsain » et que la majorité du personnel affirme en avoir assez de ce qui est perçu comme de l'infantilisme de la part d'un « groupe » de fauteurs de troubles qui passent leur temps à conspirer, à se plaindre, à nourrir

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l'absentéisme, les et non font l’objet d’aucune particulièrement, KPMG

Décision Page 14 leurs rancœurs, à boycotter toutes les nouvelles initiatives et à fomenter le trouble.

13. KPMG a tiré ces conclusions à partir d'entrevues avec les membres du personnel du Bureau. Aucun des plaignants, à l'exception de M. Basudde qui a été interviewé pendant une heure et demie, n'a participé à l'examen. D'après le témoignage non contredit de M m e Haydon, seulement 50 % environ des membres du Bureau ont participé à l'examen, y compris les chefs MM. M. Yong et Landry.

14. En outre, M. Basudde a contesté les questions posées par l'intervieweur de KPMG, plus particulièrement la question visant à déterminer ce que les plaignants voulaient obtenir. L'IPFPC soutient qu'il est évident que les plaignants étaient considérés comme des fauteurs de troubles.

Lettre de M. Basudde à M. Paterson datée du 6 mars 1998, pièce C-3

15. Par les plaintes en l'espèce, confirmées par les témoignages de M m e Haydon et de MM. Chopra, Basudde et Lambert, les plaignants ont voulu montrer qu'ils s’étaient sentis ciblés par la direction du fait de l’examen commandé à la KPMG et qu'ils avaient été désignés comme des « fauteurs de troubles » en vue d'exercer des représailles contre eux parce qu'ils avaient déposé des griefs dans lesquels ils soulevaient des préoccupations d’ordre scientifique et faisaient état de l’ingérence de la direction dans le processus d'évaluation des médicaments. En outre, quand ils ont fait part à M. Lachance de leurs préoccupations au sujet du ton de l'examen, ce dernier a répondu, d'après le témoignage non contredit de M. Chopra : « vous pourriez être muté à un endroit l'on n'entendra plus parler de vous ».

16. L'IPFPC soutient que le fait d'avoir commandé un examen à KPMG constitue une mesure de représailles contre les plaignants parce qu'ils avaient déposé des griefs. L'examen visait à les désigner comme des « fauteurs de troubles », à miner leur crédibilité au Bureau et à atténuer l'importance des questions soulevées dans leurs griefs. L'IPFPC soutient que ce « ciblage » s’est trouvé amplifié par la décision de la direction de présenter le rapport à tout le Bureau lors d'une réunion extraordinaire qui s'est tenue le 26 mai 1998 au Centre des conférences. D’entrée de jeu, le personnel de KPMG a annoncé que cette réunion pourrait mettre certaines personnes « mal à l’aise ». L'IPFPC tient à faire remarquer que le témoignage de M. Chopra au sujet de cette réunion n'a pas été contredit ni contesté par le défendeur.

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Décision Page 15 Représailles exercées expressément contre M. Chopra 17. En outre, dans la réponse au grief de M. Chopra au dernier palier de la procédure, M. Nymark a rejeté le grief et a fourni la même réponse relativement aux problèmes interpersonnels. Il a aussi ajouté ce qui suit :

[Traduction] Malgré ce qui précède, je conviens que les plaintes au sujet des agissements personnels à la suite d'une rencontre entre Santé Canada et des représentants de l’industrie le 30 janvier 1997 nécessitent un examen plus poussé. J'ai demandé que soit effectuée une étude indépendante, et je déciderai alors du suivi à donner aux plaintes.

Réponse de M. Alan Nymark au dernier palier de la procédure de règlement des griefs, datée du 19 décembre 1997; Recueil de documents de l'IPFPC, C-1, onglet 2, page 64(b)

18. M. Nymark fait référence dans cette lettre à un incident mettant en cause un représentant d'Elanco. Dans son témoignage non contredit devant la Commission, M. Chopra a indiqué que la direction lui avait donné l’assurance que l'incident en question avait été réglé une fois pour toutes. Malgré cela, 11 mois plus tard, l'affaire est ramenée sur le tapis et donne lieu à une enquête par le truchement de la réponse au grief de M. Chopra.

19. L'IPFPC soutient que la réouverture de l'enquête sur l'incident Elanco constitue une sanction contre M. Chopra et une mesure d'intimidation parce qu'il s'est plaint, dans son grief personnel et dans le grief collectif, de l'intervention de l’industrie et de la direction. En outre, l'IPFPC soutient qu'il est révélateur que le défendeur n'ait présenté aucun élément de preuve pour réfuter la thèse des plaignants.

Conclusion 20. Pour ce seul motif, l'IPFPC demande donc respectueusement que les plaintes soient accueillies du fait que l'examen de KPMG, que la qualification des questions soulevées de « problèmes interpersonnels » et que la décision de rouvrir l'enquête concernant l'incident Elanco constituent des représailles contre les plaignants parce qu'ils ont exprimé leurs préoccupations en se prévalant de la procédure de règlement des griefs. Plus particulièrement, l'IPFPC maintient que le défendeur ciblait les plaignants et visait à miner leur crédibilité au Bureau et dans l’industrie afin d’atténuer

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Décision Page 16 l’importance des préoccupations d’ordre scientifique qui avaient été soulevées.

L'arriéré de travail et la réaffectation de MM. Vilim, Sharma et Lambert

21. L'IPFPC ne prétend pas que Santé Canada, et plus particulièrement la direction du Bureau, n'a pas le droit d'attribuer le travail ou de définir et d’éliminer un arriéré de travail véritable. Il prétend toutefois que la direction n'a pas exercé ces droits de gestion dans des circonstances acceptables. Vu le moment choisi pour muter trois scientifiques à la Division de l’innocuité pour les humains et l’inefficacité de cette décision, la direction a plutôt exercé ces droits dans le but d'intimider ces scientifiques et de les empêcher de déposer des plaintes concernant les irrégularités relevées dans le système d'évaluation et d'approbation des médicaments en vigueur au Bureau. Plus particulièrement, l'IPFPC maintient que la direction a voulu montrer à tous les plaignants qu'elle pouvait unilatéralement modifier le contenu, la qualité et l'efficacité de leur travail de manière à les empêcher d'agir collectivement en vue de porter ces questions à l'attention de la direction.

Comment se crée un arriéré 22. D'après la preuve non contredite qui a été présentée à la Commission, il faut satisfaire à toutes les exigences de la Loi et du Règlement sur les aliments et drogues dans les trois divisions du Bureau, soit la Division de l’innocuité pour les humains (DIH), la Division de l'évaluation des produits pharmaceutiques (DÉPP) et l'unité de la fabrication de la DÉPP avant d'approuver un nouveau médicament destiné aux animaux de boucherie. L'approbation d'un nouveau médicament peut être faite de plusieurs manières : par une présentation de drogue nouvelle (PDN), un supplément à une présentation de drogue nouvelle (SPDN), une présentation de nouvelle drogue expérimentale, une demande d'études expérimentales ou une demande de médicament d'urgence.

23. En outre, chaque présentation ou demande est assujettie à des échéanciers administratifs qui précisent le délai accordé entre le dépôt de la demande ou de la présentation au Bureau et la décision finale d'émettre un avis de conformité ou d'exiger des données additionnelles attestant de l’innocuité du médicament. Par exemple, il faut traiter les PDN et SPDN dans un délai de 180 jours, les présentations de nouvelle drogue expérimentale dans un délai de 60 jours, les demandes d’études expérimentales dans un délai de 60 jours et les demandes de médicament d’urgence dans un délai de 24 heures.

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Décision Page 17 24. En outre, il est évident, d'après le témoignage de M m e Haydon, que le terme « arriéré » désigne simplement le fait que, si aucun évaluateur de médicaments n'est disponible, la demande sera inscrite sur une liste de demandes en attente en vue d'être évaluée par le premier évaluateur qui se libérera, suivant la date à laquelle la demande ou présentation a été soumise (et, naturellement, en respectant les échéanciers administratifs établis).

25. Enfin, il est clair que l'existence d'un arriéré, que ce soit à la DÉPP ou dans un autre division, n'est pas un phénomène nouveau au Bureau.

Examen de Price Waterhouse, Recueil de documents de l'IPFPC, C-2, onglet 5, pages 435 et 442 et 443

La détermination de l'arriéré actuel 26. Comme le montre le témoignage de M. Paterson, directeur général de la Direction des aliments, Santé Canada, un comité de direction a déterminé qu’il y avait un arriéré de travail à la DÉPP du Bureau lors d'une réunion tenue en octobre 1997 au cours de laquelle M m e Joy MacAulay a fourni à MM. Paterson, Landry et Yong des renseignements au sujet de cet arriéré.

Rapport de M m e MacAulay concernant l'arriéré de travail à la DÉPP, pièce R-1

27. L'IPFPC soutient qu'il est significatif, selon les renseignements disponibles à l'époque, que 18 présentations fussent déjà en retard et qu’il s’en ajouterait 12 autres à la fin de novembre 1997. Le nombre d’autres présentations qui, selon les projections jusqu’au mois de mars 1998, devaient accuser du retard était beaucoup moins élevé, soit huit en décembre, six en janvier, neuf en février et deux en mars.

Rapport de M m e J. MacAulay, supra, page 1 28. Un mois plus tard, soit le 27 novembre 1997, M m e MacAulay a communiqué les mêmes renseignements lors d’une réunion à laquelle assistaient tous les évaluateurs du Bureau, y compris les plaignants. À cette réunion, les évaluateurs ont été invités à se porter volontaires avant le 1 er décembre 1997 pour aider à réduire l'arriéré, faute de quoi ils seraient affectés temporairement à la DÉPP (voir par exemple, la pièce R-2, paragraphe 3). À cet égard, l'IPFPC renvoie la Commission à l'organigramme qui indique que les seules personnes qui ne faisaient pas partie de la DÉPP étaient les plaignants l'exception de M m e Haydon, qui travaillait déjà à la DÉPP) et de l’unique employé de la

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Décision Page 18 division de la fabrication. L'IPFPC soutient, par conséquent, que la réaffectation, qu'elle ait été volontaire ou non, visait nécessairement les plaignants.

Organigramme, Recueil de documents de l'IPFPC, C-2, onglet 6, page 662

29. En terminant, l'IPFPC renvoie la Commission au témoignage non contredit de M. Lambert selon lequel la dernière fois il a été réaffecté pour aider à réduire un arriéré la réaffectation a duré six ans. Il est évident que la prolongation de la réaffectation « temporaire » dont il est question en l'espèce était de nature à préoccuper M. Lambert vu que cette possibilité a clairement été mentionnée lors de la réunion entre MM. Lambert, Vilim, Sharma, Paterson et Yong le 14 janvier 1998.

Procès-verbal daté du 14 janvier 1998, pièce R-3, page 3

30. Le 12 décembre 1997, MM. Lambert, Vilim et Sharma qu'ils seraient réaffectés à la DÉPP en vue d'éliminer l'arriéré de présentations de médicaments vétérinaires. commencer le 5 janvier 1998 (voir la pièce C-2, pages 655 à 657), au moins deux mois et demi après que M eut fourni pour la première fois des renseignements sur l’arriéré au comité de direction.

Lettre de M. Paterson datée du 12 décembre 1997, Cahier de documents de l'IPFPC, C-2, pages 655 à 657

31. Compte tenu des échéanciers administratifs fixés pour évaluer les présentations de médicaments vétérinaires, l'IPFPC soutient respectueusement qu’en raison du temps qui s’est écoulé entre la détermination officielle d'un arriéré par la direction en octobre 1997 et l'affectation des trois plaignants à la DÉPP le 5 janvier 1998, il y a lieu de s’interroger sérieusement sur l’« urgence » d’éliminer l'arriéré. À cet égard, l'IPFPC soutient que le fait que les mutations aient coïncidé avec le rejet des griefs des plaignants est un motif suffisant en soi pour accueillir les présentes plaintes.

Les tâches attribuées aux plaignants pour éliminer l'arriéré

32. Subsidiairement, l'IPFPC maintient que les tâches exécutées par MM. Vilim, Lambert et Sharma après leur réaffectation à la DÉPP n'étaient pas destinées à réduire l'arriéré et, compte tenu également du moment choisi pour

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M. Paterson a informé Cette réaffectation devait m e MacAulay

Décision Page 19 décréter les mutations dont nous avons parlé plus haut, il y a lieu de douter du bien-fondé des réaffectations. Plus particulièrement, l'IPFPC soutient que la preuve suivante confirme que les plaignants ont eu raison de mettre en doute le bien-fondé de ces réaffectations :

M. Vilim 33. À la suite de sa réaffectation, M. Vilim a été chargé de mettre la dernière main à l'examen des étiquettes finales (contrevérification des étiquettes finales imprimées et des contre-indications au regard des renseignements figurant dans le dossier) à la DÉPP. L'IPFPC soutient qu'il est révélateur, selon les renseignements fournis par M m e MacAulay (pièce R-1), que l'arriéré recensé excluait l'examen des étiquettes finales. En outre, dans le procès-verbal d'une réunion tenue le 14 janvier 1998 à laquelle assistaient MM. Lambert, Vilim, Sharma et Paterson (pièce R-3), M. Vilim fait remarquer que l'examen des étiquettes finales ne correspond pas à ses compétences; selon l'IPFPC, cela contredit le témoignage de M. Paterson selon lequel M. Vilim a été réaffecté à cause de ses compétences comme chimiste.

M. Sharma 34. Comme l'a révélé le témoignage non contredit de M m e Haydon, M. Sharma a été affecté à un projet spécial sur les bonnes pratiques de fabrication en plus d'exécuter d’autres tâches à la DÉPP. Ce projet ne figurait pas dans la liste de l’arriéré que M m e MacAulay a établie et qui figure à la pièce R-1.

M. Lambert 35. Comme l'a révélé le témoignage non contredit de M. Lambert, ce dernier a été réaffecté à la DÉPP en vue d’aider à réduire l'arriéré déterminé par M m e MacAulay et a également été affecté à temps plein au comité interne d’analyse des écarts relativement au STbr en plus d’être appelé à traiter une présentation à la DIH.

36. M. Lambert, dont le témoignage n'a pas été contredit, a déclaré que seulement une des présentations comprises dans l'arriéré déterminé par M m e MacAulay (pièce R-1) a été traitée à la suite de la mutation des trois évaluateurs de la DIH.

M. Basudde 37. Enfin, M. Basudde, le seul évaluateur qui est demeuré à la DIH après la réaffectation, a indiqué que l'arriéré à la DIH est devenu tellement important à la suite des réaffectations

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Décision Page 20 que MM. Vilim et Sharma ont y retourner en vue de s’occuper de toute urgence d’une présentation de nouvelle drogue expérimentale qui arrivait à échéance.

38. L'IPFPC soutient qu'il est révélateur que le défendeur n'ait produit aucun élément de preuve indiquant que l'arriéré à la DÉPP a été éliminé d'une façon ou d'une autre en dépit, semble-t-il, de l'existence de documents à ce sujet. Le défendeur n'a produit que deux pièces : la première se rapporte à l'arriéré qui existait en octobre 1997 (pièce R-1) et la seconde, à l'arriéré des mois d'août à septembre 1998 (pièce R-5). Le défendeur n'a produit aucun élément de preuve pour la période de réaffectation allant de janvier à mars 1998.

Conclusion 39. Vu ce qui précède, l'IPFPC soutient respectueusement que la décision du défendeur de faire coïncider la réaffectation des plaignants avec le rejet de leurs griefs, la détermination de l’arriéré et les moyens pris pour l'éliminer au cours de la période d’examen et de rejet des griefs et l’attribution aux plaignants de tâches qui n'avaient rien à voir avec l'élimination de l'arriéré suffisent pour montrer que les réaffectations visaient à pénaliser les plaignants et à exercer des représailles contre eux parce qu'ils s'étaient prévalus des droits que leur accorde la Loi. Plus précisément, la décision du défendeur se voulait un moyen de diviser le groupe et de faire craindre aux plaignants une mutation à un endroit l'on n'entendrait plus jamais parler d'eux.

Admissibilité et pertinence des documents présentés à l'appui des plaintes

40. Lors de l'audience devant la Commission, le défendeur a soulevé des objections générales au sujet de la pertinence des documents produits par les plaignants à l'appui de leurs plaintes.

41. L'IPFPC soutient que tous les documents fournis à la Commission, soit les pièces C-1, C-2 et C-3, sont pertinents et admissibles. Il tient à faire remarquer que la plupart de ces documents émanent du défendeur et qu'ils ont été obtenus par le truchement d'une demande d'accès à l'information et d'un bref d'assignation à produire des pièces. Le défendeur n'ayant jamais, avant la tenue de l'audience, dit quoi que ce soit au sujet de l'admissibilité ou de la pertinence des documents en question, l'IPFPC soutient qu'il ne peut pas s’opposer maintenant devant la Commission.

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Décision Page 21 42. Subsidiairement, l'IPFPC maintient que les documents suivants qu’ont expressément mentionnés les témoins lors de l'audience sont clairement pertinents et admissibles :

i. Tous les documents qui se trouvent à l'onglet 1 de la pièce C-1 décrivent les plaintes présentées en vertu de l'article 23 et sont clairement pertinents;

ii. Tous les documents qui se trouvent à l'onglet 2 de la pièce C-1 décrivent les griefs et les documents justificatifs produits par les plaignants qui seraient à l'origine de la violation des droits que leur accorde le sous-alinéa 8(2)c)(ii) de la Loi. Ils sont donc clairement pertinents;

iii. Les curriculum vitae qui se trouvent à l'onglet 3 de la pièce C-1 établissent les titres et qualités des plaignants et sont clairement pertinents;

iv. Les documents qui se trouvent à l'onglet 4 de la pièce C-1 décrivent les préoccupations d’ordre scientifique des plaignants qui seraient à l'origine de la violation des droits que leur accorde le sous-alinéa 8(2)c)(ii) de la Loi. L'IPFPC maintient que ces documents n'ont pas été produits pour attester de la véracité des allégations. Ils sont pertinents dans la mesure ils établissent la nature des préoccupations d’ordre scientifique soulevées par les plaignants par le truchement de la procédure de règlement des griefs que prévoit la Loi. En outre, l'IPFPC soutient qu'ils sont également pertinents dans la mesure ils établissent que le défendeur n'a pas tenu compte de ces préoccupations dans sa réponse aux griefs;

v. Comme le démontre le témoignage de M. Paterson, les documents qui se trouvent à l'onglet 5 de la pièce C-2, soit les multiples examens internes effectués au Bureau des médicaments vétérinaires, sont visiblement pertinents étant donné que M. Paterson les a invoqués lorsqu'il a été appelé à conseiller M. Alan Nymark sur la réponse à donner au dernier palier de la procédure de règlement des griefs;

vi. Les documents qui se trouvent à l'onglet 5 de la pièce C-2 sont clairement pertinents du fait qu'ils se rapportent directement à la réaffectation de trois des plaignants à la DÉPP du Bureau des médicaments vétérinaires.

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Décision Page 22 43. En outre, l'IPFPC n’est pas au courant de la nature précise des objections du défendeur. Par conséquent, il se réserve le droit de réfuter toutes les objections qui seront officiellement soulevées par M e Snyder relativement à ces documents.

Conclusion 44. L'IPFPC soutient que le défendeur, dans sa réponse au dernier palier de la procédure de règlement de griefs, a voulu miner la crédibilité des plaignants tant au Bureau qu'auprès des représentants de l’industrie en ramenant leurs griefs à des « problèmes interpersonnels ». Le ton et les recommandations du rapport de KPMG, la façon dont il a été présenté au Bureau avec l'avertissement qu’il pourrait mettre certaines personnes « mal à l'aise » et son absence évidente de pertinence par rapport aux questions de fond soulevées dans les griefs des plaignants ont eu pour effet de marginaliser et de rabaisser ces derniers au point ils y penseront à deux fois avant de déposer un grief du genre à l'avenir.

45. En outre, l'IPFPC soutient que la décision de rouvrir l'enquête relative à l'incident Elanco visait uniquement à pénaliser et à isoler M. Chopra à cause de son grief personnel et du grief collectif.

46. De plus, l'IPFPC soutient que le moment choisi pour régler le problème de l'arriéré à la DÉPP, la décision d'affecter les trois plaignants à cette division et le fait que les tâches qui leur ont été attribuées n'avaient rien à voir avec les présentations faisant partie de l'arriéré étayent l'allégation des plaignants selon laquelle la réaffectation visait simplement à les intimider et à les pénaliser pour leurs griefs. Surtout, l'IPFPC s'appuie sur le fait que le défendeur n'a produit aucun élément de preuve indiquant que l'arriéré était plus important durant l'automne de 1997 ou qu'il avait été éliminé, ou du moins réduit, au printemps de 1998, ce qui aurait étayé l'argument du défendeur selon lequel la réaffectation des plaignants résultait véritablement de l'exercice par la direction de sa prérogative de redistribuer le travail.

47. En dernier lieu, l'IPFPC réitère qu'en évaluant les agissements du défendeur en l'espèce la Commission doit tenir compte du rôle important et vital de défenseurs de l’intérêt du public que jouent les plaignants à titre de scientifiques et de fonctionnaires appelés à juger de l’innocuité des médicaments administrés à des animaux de boucherie. Les agissements du défendeur doivent également être évalués à la lumière de la nature définitive et obligatoire

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Décision Page 23 de la réponse donnée au dernier palier de la procédure à un grief non arbitrable comme celui que les plaignants ont déposé.

48. Par conséquent, et vu l'ensemble des circonstances, l'IPFPC soutient que les plaignants ont établi, selon la prépondérance des probabilités que, de la façon dont elle a réglé les griefs et par la réaffectation de trois d'entre eux à la DÉPP, le défendeur cherchait, par intimidation, menaces ou d'autres sanctions, à les obliger à s’abstenir d'exercer les droits que leur accorde la Loi, en contravention du sous-alinéa 8(2)c)(ii).

49. L'IPFPC demande respectueusement à la Commission : a) de rendre une ordonnance déclarant que le défendeur a violé le sous-alinéa 8(2)c)(ii) de la Loi; b) de rendre une ordonnance pour que le défendeur cesse et s’abstienne d’agir de la sorte.

LE TOUT RESPECTUEUSEMENT SOUMIS Pour le défendeur PARTIE I QUESTIONS PRÉLIMINAIRES APERÇU 1. Les plaignants ont déposé deux plaintes devant la Commission des relations de travail dans la fonction publique (ci-après appelée la « Commission ») dans lesquelles ils prétendent que le défendeur a violé les droits que leur accorde la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (ci-après appelée la « Loi »).

2. Plus particulièrement, les plaignants maintiennent que le défendeur a violé le sous-alinéa 8(2)c)(ii) de la Loi, qui sont reproduits ci-dessous :

8(1) Il est interdit à quiconque occupant un poste de direction ou de confiance, qu'il agisse ou non pour le compte de l'employeur, de participer à l'administration syndicale, ou représentation des fonctionnaires par une telle organisation ou dans les affaires en général de celle-ci.

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paragraphe 8(1) et le

la formation ou à d'une organisation d'intervenir dans la

Décision Page 24 8(2)c)(ii) [Il est interdit] de chercher, notamment par intimidation, par menace de destitution ou par l'imposition de sanctions pécuniaires ou autres, à obliger un fonctionnaire :

(ii) à s'abstenir d'exercer tout autre droit que lui accorde la présente loi.

Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, 1985, c. P-35 (ainsi modifiée)

3. L'unique question que la Commission doit trancher est celle de savoir s'il y a eu violation des dispositions susmentionnées.

4. Nous soutenons que les allégations ne sont pas fondées compte tenu de l'ensemble de la preuve produite par les plaignants.

5. Les plaignants n'ont pas directement ou indirectement déclaré, prétendu ou autrement inféré sous serment que le défendeur les avait obligés à s’abstenir d'exercer les droits que leur accorde la Loi ni n’ont laissé entendre, insinué ou fait croire qu'on leur avait nié leurs droits à la représentation. En affirmant autre chose dans son argumentation, l'avocate des plaignants n'a absolument pas tenu compte de leurs témoignages.

Argumentation écrite des plaignants, paragr. 48

6. Le fait que les plaignants n'ont pas abordé, directement ou indirectement, la question des prétendues violations de l'article 8 constitue en soi une preuve convaincante que la totalité de leurs plaintes n'était pas fondée et que leurs préoccupations relativement à ces questions n'existaient pas.

7. En revanche, il est devenu évident dès le début de l'audience que l'intention des plaignants était d'accéder à une tribune publique aux seules fins d'attaquer publiquement le processus d'approbation des médicaments en vigueur à la Direction générale de la protection de la santé (DGPS) et sa transparence face au public. Cette intention a été confirmée dans l'argumentation même de l'avocate on peut lire que la Commission « doit tenir compte des moyens limités dont disposent les plaignants pour porter leurs préoccupations à l'attention de la direction ».

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Décision Page 25 Argumentation écrite des plaignants, paragr. 4

8. Nous soutenons que l'utilisation inadéquate et abusive, par les plaignants, de la procédure de plaintes de la Commission a jeté le discrédit sur ce processus administratif.

9. Malgré cette utilisation inadéquate, l'avocate a eu la témérité d’affirmer à plusieurs reprises que le défaut du défendeur de produire des preuves pour réfuter les allégations des plaignants au sujet du peu de cas que ferait censément le Ministère de l’innocuité pour les humains dans le processus d'approbation des médicaments, des pressions directes qu’il exerce et de son manque de communication était une indication de la véracité de ses propos.

Argumentation écrite des plaignants paragr. 5(iv), 15, 16 et 19

10.Compte tenu de ce qui précède, le défendeur se voit dans l'obligation de présenter brièvement les réfutations suivantes.

11.Contrairement à ce que croient les plaignants, le but de l'audience n'est pas de donner suite à leurs préoccupations au sujet du processus d'approbation des médicaments en vigueur à la DGPS, ni de débattre du degré de transparence de la direction générale, ni de passer en revue le contenu des rapports d'évaluation du milieu de travail, ni d'entendre les doléances des plaignants en ce qui concerne le contenu des réponses à leurs griefs, ni de discuter des motifs qui ont amené le défendeur à entreprendre une enquête au sujet de l'interaction de M. S. Chopra avec des représentants de l’industrie (soit l'incident Elanco).

12.Comme nous l'avons déjà indiqué, le but de l'audience et, partant, l'unique objectif du défendeur est d'examiner les allégations des plaignants selon lesquelles les droits que leur accorde l'article 8 ont été violés. La Commission n'a pas compétence pour examiner les autres questions qui lui ont été soumises. Le défendeur n'est nullement tenu ou obligé de réfuter les autres éléments de preuve.

PRÉOCCUPATIONS RELATIVES À L'APPROBATION DES MÉDICAMENTS - EXAMENS DU MILIEU DE TRAVAIL

13. Si l'article 8 de la Loi n'était pas si restrictif, le défendeur aurait produit des éléments de preuve relatifs au

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Décision Page 26 processus d'approbation des médicaments en vigueur à la DGPS et à la transparence de son fonctionnement afin de réfuter les allégations non fondées des plaignants.

14. La stratégie des plaignants pour mettre en doute l'intégrité de la DGPS aux yeux du public dans le cadre de la présente audience est nettement apparente du fait qu’ils n’ont présenté qu’une version des choses et qu’ils ont omis de mentionner les mécanismes de protection en place, y compris les comités scientifiques internes et les comités consultatifs composés de scientifiques de renommée nationale et internationale chargés d’examiner les produits et les processus. En outre, les plaignants ont visiblement omis de mentionner les consultations forts publicisées qui sont actuellement en cours à la grandeur du Canada pour une période de trois ans dans le but d'examiner les questions de protection de la santé et le renouvellement de 22 textes législatifs régissant la DGPS.

15.Un tel manque d'impartialité dans la présentation de la preuve devant un tribunal qui n'a pas compétence pour examiner les questions soulevées témoigne de l'insouciance dont font preuve les plaignants au vu de l’énorme publicité que suscite la présente audience.

16. Il y a lieu de faire remarquer que le défendeur a soulevé des objections à de nombreuses occasions au sujet de la pertinence d'une grande partie de la preuve documentaire présentée par les plaignants dans les pièces C-1 et C-2, laquelle preuve portait essentiellement sur l'approbation des médicaments et les examens commandés par le Ministère. En outre, le défendeur a régulièrement soulevé des objections concernant la pertinence des témoignages sur ces questions. Comme ces éléments de preuve ne se rapportent pas aux allégations touchant précisément l'article 8, il n'y avait pas lieu d'y répondre et, de fait, le défendeur n’y a pas répondu.

17. En outre, le fait que les plaignants ont visiblement omis de préciser, directement ou indirectement, les droits accordés par la Loi qu'on les a obligés à s’abstenir d'exercer ou la façon dont leurs droits à la représentation ont été transgressés vient confirmer l'absence de pertinence de la documentation susmentionnée et des témoignages y relatifs concernant les plaintes aux termes de l'article 23. Par conséquent, la position du défendeur au sujet de la non-pertinence de cette preuve s’en trouve renforcée.

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Décision Page 27 Argumentation écrite des plaignants paragr. 5, 12, 15, 16, 19, 20, 44 et 45

18.Quoique le défendeur ait soutenu que la documentation susmentionnée n'était ni directement ni indirectement liée à la question principale dont a été saisie la Commission, cette dernière a quand même admis en preuve les documents contenus dans les pièces C-1 et C-2 qui ont expressément été mentionnés et désignés au cours de l'audience. Par conséquent, le défendeur demande à la Commission de ne pas apprécier cette preuve.

19. Enfin, il y a aussi lieu de faire remarquer que le défendeur s'est opposé à de nombreuses occasions à l'admissibilité de ladite documentation et de nombreux aspects du témoignage des plaignants relativement aux questions en cause du fait qu'ils allaient à l’encontre des principes du ouï-dire et du double ouï-dire.

20.Comme l'a correctement reconnu l'avocate, c'est aux plaignants qu'incombait le fardeau d'établir que les agissements du défendeur étaient contraires aux interdictions énoncées à l'article 8 de la Loi.

Argumentation écrite des plaignants paragr. 1 21. La preuve ne doit pas servir à établir le bien-fondé de la cause des plaignants vu qu'elle ne satisfait pas aux critères de fiabilité et d'exactitude.

22. L'avocate n'a pas convoqué les témoins voulus pour confirmer les ouï-dire ou les doubles ouï-dire découlant des témoignages des plaignants au sujet des prétendues menaces, pressions directes et irrégularités au travail et du peu de cas qu’aurait censément fait la direction de l’innocuité pour les humains dans le processus d'approbation des médicaments. Compte tenu des lacunes évidentes de l'argumentation des plaignants à cet égard, le défendeur n'était ni tenu, ni obligé de produire de preuve en réfutation.

23.Malgré ce qui précède, le défendeur ferait preuve de négligence en ne reprenant pas, pour référence, quelques-unes des affirmations incroyables faites par les plaignants dans leur argumentation.

24. Plus particulièrement, et parce que cela a constitué un aspect important de l'argumentation des plaignants, le défendeur se doit de faire certaines observations au sujet des allégations relatives au rapport de KPMG.

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Décision Page 28 RAPPORT DE KPMG 25. Il faut se reporter particulièrement à l’affirmation selon laquelle l'examen confié à la KPMG par le Bureau était une mesure de représailles contre les plaignants à cause de leurs griefs. L'avocate a soutenu que l'examen « visait à les désigner comme des « fauteurs de troubles », à miner leur crédibilité au Bureau et à atténuer l'importance des questions soulevées dans leurs griefs ».

Argumentation écrite des plaignants, paragr. 15, 16 & 20

26. Il est remarquable que les plaignants soient arrivés à de telles conclusions quand l'objectif de l'étude avait été clairement énoncé, soit [traduction] « examiner les préoccupations et les besoins de la direction et du personnel du Bureau des médicaments vétérinaires (BMV) ». L'étude faisait suite à un communiqué du directeur général au personnel du BMV dans lequel il était expressément indiqué que le but de l'évaluation du milieu de travail [traduction] « était de faire le bilan de santé de l'organisation et d'améliorer celle-ci en mettant l'accent sur les préoccupations des employés et sur le climat de travail ».

Rapport de KPMG, pièce C-2, p. 546 27. La conclusion des plaignants selon laquelle la direction avait un motif ultérieur de mener l'étude est à ranger dans la catégorie des suppositions et de la spéculation. Pour prouver une telle allégation, il aurait fallu faire témoigner un membre du cabinet d'experts-conseils indépendant qui a mené à l'étude ou, à tout le moins, un représentant de la direction qui a eu son mot à dire dans la décision de mener l'étude, mais cela n'a pas été fait.

28. En outre, les tentatives des plaignants de se poser en fonctionnaires persécutés dont les préoccupations auraient censément été accueillies avec indifférence par la direction est loin de s’appuyer sur une preuve convaincante.

28. Premièrement, il y a lieu de faire remarquer que tous les plaignants, sauf un, ont refusé de participer à l'étude qui leur aurait permis d'exprimer leurs vues sur le fonctionnement du Bureau.

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Décision Page 29 Argumentation écrite des plaignants, paragr. 13

29.Deuxièmement, bien que les plaignants aient tous affirmé dans leurs témoignages que le rapport de KPMG les avait étiquetés comme des « fauteurs de troubles », le rapport en question n'a pas qualifié qui que ce soit au Bureau de fauteur de troubles, quoiqu’il ait conclu de façon générale à l’existence de problèmes de relations interpersonnelles.

Rapport de KPMG, pièce C-2, pp. 548, 549 et 550 30.Troisièmement, en ce qui a trait à l'affirmation des plaignants selon laquelle le rapport a eu pour effet « de marginaliser et de rabaisser ces derniers au point ils y penseront à deux fois avant de déposer un tel grief à l'avenir », cette allégation est démentie par l'absence de témoignage en ce sens de la part des plaignants. Il s'agit d'un autre exemple d’argument non fondé.

Argumentation écrite des plaignants, paragr. 44 CONCLUSION 31. Pour tous les motifs ci-dessus, nous soutenons que la totalité de la documentation et des témoignages concernant l'approbation des médicaments et les divers rapports d'évaluation du milieu de travail ne sont d’aucune utilité pour démontrer la validité des plaintes formulées aux termes de l'article 23, et qu'il ne devrait pas en être tenu compte.

PARTIE II FONDEMENT DES PLAINTES AUX TERMES DE L'ARTICLE 23

CONTEXTE 32. La Commission doit déterminer la validité de deux plaintes déposées par les plaignants, portant respectivement les numéros de dossier 161-2-858 et 161-2-860, qui ont été regroupées aux fins de l'audience.

33.Aux termes des plaintes, il y aurait eu violation du paragraphe 8(1) (soit intervention de la direction dans la représentation des fonctionnaires) et du sous-alinéa 8(2)c)(ii) (soit obliger un fonctionnaire à s’abstenir d'exercer tout autre droit qu’accorde la Loi).

34. Les allégations de fait formulées dans les plaintes sont essentiellement de trois ordres :

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Décision Page 30 a) Le défendeur n'a pas convenablement réglé les multiples plaintes et griefs déposés par les plaignants relativement au harcèlement et à la coercition dont ils auraient censément fait l’objet pour qu’ils approuvent des produits dont l’innocuité était douteuse et au prétendu refus d'examiner convenablement les plaintes et griefs;

b) Le défendeur n'a pas répondu aux griefs de façon satisfaisante au dernier palier de la procédure de règlement des griefs;

c) Le défendeur, en guise de représailles, a réaffecté trois des plaignants à la Division de l'évaluation des produits pharmaceutiques (DÉPP).

SEUIL DE LA PREUVE 35. Les allégations voulant que l'employeur ait violé l'article 8 de la loi « sont sérieuses ».

Barzotto c. Makuch (16 novembre 1988) 161-2-520 36.Comme l'a affirmé l'ancien président de la Commission, J. Finkelman, c.r. : « [i]l faut se rappeler qu'une plainte formulée en vertu de l'article 8 de la Loi a des aspects pratiquement criminels » et que les motifs invoqués pour formuler une telle plainte doivent être fondés.

Gennings c. Milani (9 août 1971) 161-2-87 37.Nous soutenons, par conséquent, que même si le seuil de la preuve permettant de démontrer que l'article 8 a été violé est la « prépondérance des probabilités », cette preuve doit néanmoins être « claire et forte ».

Murray c. le Conseil du Trésor (10 août 1993) 166-2-23654

VIOLATION DU PARAGRAPHE 8(1) 38. Les plaignants ont prétendu que le défendeur était intervenu dans leur représentation, en violation du paragraphe 8(1) de la Loi.

39.Absolument aucune preuve n'a été produite qui permette de conclure, de supposer ou, par ailleurs, d’inférer qu'une telle violation a eu lieu.

40. L'absence d'une telle preuve et le fait que l'avocate, dans son argumentation, n'a jamais affirmé ou autrement soutenu qu'une telle violation avait eu lieu, sont

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Décision Page 31 révélateurs de la frivolité de cet aspect des plaintes des plaignants.

41.Nous soutenons, par conséquent, que la Commission ne peut pas conclure qu'il paragraphe 8(1).

DÉFAUT DE S'OCCUPER DES PLAINTES ET DES GRIEFS ANTÉRIEURS

42. Les plaignants allèguent que le défendeur a violé le sous-alinéa 8(2)c)(ii) en ne donnant pas suite à leurs multiples plaintes et griefs concernant le harcèlement ou la coercition dont ils ont prétendument fait l’objet pour qu’ils approuvent des produits dont l’innocuité était douteuse et le prétendu refus d'examiner convenablement les plaintes et griefs.

43. Premièrement, nous soutenons que ces questions ne sont pas un motif suffisant de déposer une plainte aux termes de l'article 23 pour les raisons exposées à la Partie I de l'argumentation du défendeur.

44.Deuxièmement, et quoi qu'il en soit, les plaignants n'ont pas, directement ou indirectement, affirmé, prétendu ou autrement donné à entendre sous serment qu'en dépit de leurs préoccupations le défendeur les avait obligés à s’abstenir d'exercer les droits que leur accorde la Loi, ni n’ont-ils suggéré, insinué ou donné à entendre qu'ils craignaient de se prévaloir de tout autre droit que leur accorde la Loi, y compris le droit de déposer des griefs à l'avenir.

45.Vu la non-pertinence des questions en ce qui a trait aux plaintes aux termes de l'article 8 et vu le peu de valeur de la preuve produite par les plaignants à l'appui de l'allégation selon laquelle ils se sont abstenus d’exercer les droits que leur accorde la Loi, cette allégation devrait être rejetée.

MÉCONTENTEMENT CAUSÉ PAR LES RÉPONSES AUX GRIEFS

46. Le plaignant, M. S. Chopra, a prétendu que les droits que lui accorde l'article 8 ont été violés parce que le défendeur ne lui a pas donné satisfaction au dernier palier de la procédure de règlement des griefs relativement à un de ses griefs.

47. Plus particulièrement, M. S. Chopra a affirmé que le défendeur lui avait « menti » en affirmant que ses allégations de harcèlement et de coercition avaient été

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y a eu violation du

Décision Page 32 réglées par le truchement de ses « griefs antérieurs ou d'autres mécanismes de redressement ». Le plaignant a en outre déclaré que le ministère « n'avait rien fait pour régler ses griefs et ses préoccupations professionnelles ».

48. Premièrement, même si l'allégation ci-dessus s'avère fondée (ce que le défendeur nie), cela ne permet pas pour autant de conclure qu'il y a eu violation de l'article 8 de telle sorte qu’elle ne constitue pas un motif valable de déposer une plainte aux termes de l'article 23. Lors de son témoignage, le plaignant n'a pas mentionné que le mécontentement que lui avait causé la réponse reçue l'avait obligé à s’abstenir d'exercer tout autre droit que lui accorde la Loi, y compris celui de déposer d'autres griefs à l'avenir.

49.Deuxièmement, l'article 92 de la Loi précise les questions qu’un fonctionnaire peut renvoyer à l'arbitrage quand il estime ne pas avoir obtenu satisfaction au dernier palier de la procédure de règlement des griefs.

Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, 1985, c. P-35, art. 92

50. En limitant les questions qui peuvent être renvoyées à l'arbitrage, le législateur a admis qu’il était possible que certains fonctionnaires ne soient pas satisfaits de la réponse obtenue relativement à leur grief, sans leur offrir d’autre recours.

51. Le plaignant a reconnu « la nature définitive et obligatoire de la réponse donnée au dernier palier de la procédure à [son] grief non arbitrable ».

Argumentation écrite paragr. 47

52. Il est évident que le plaignant a fait fi de la volonté du législateur en poursuivant ses démarches pour obtenir un redressement, et en déposant une plainte aux termes de l'article 23. Cet abus flagrant du processus prévu aux termes de l'article 23 dans le seul but de manifester le mécontentement que lui avait causé la réponse reçue ressort clairement de l’argumentation personnelle du plaignant :

L'IPFPC maintient que, pour déterminer si la réponse du défendeur et sa décision de redistribuer les tâches en invoquant un important arriéré étaient contraires au sous-alinéa 8(2)c)(ii) de la Loi, la Commission doit tenir compte des moyens limités dont disposent les

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des plaignants,

Décision Page 33 plaignants pour porter leurs préoccupations à l'attention de la direction et des attentes légitimes que ces préoccupations seront prises au sérieux.

Argumentation écrite des plaignants, paragr. 4

53.Nous soutenons que le mécontentement causé par la réponse à un grief n'est pas un motif légitime et approprié de déposer une plainte aux termes de l'article 23 et que le plaignant, qui a agi en toute connaissance de cause, doit être réprimandé pour avoir pris pareille mesure.

54.Qu'à cela ne tienne, la preuve non contredite produite par M. Paterson indique que le défendeur a beaucoup réfléchi au contenu de la réponse à faire puisqu’il a consulté de nombreuses personnes à la DGPS, y compris M. Paterson et le personnel des ressources humaines.

55. Pour ces motifs, cet élément de la plainte du plaignant devrait être rejeté.

RÉAFFECTATION DES TROIS PLAIGNANTS 56. Les plaignants allèguent qu'en prenant la décision de muter trois scientifiques de la Division de l’innocuité pour les humains (DIH) à la Division de l'évaluation des produits pharmaceutiques (DÉPP) « la direction a exercé ces droits dans le but d'intimider ces scientifiques et de les empêcher de déposer des plaintes concernant les irrégularités relevées dans le système d'évaluation et d'approbation des médicaments en vigueur au Bureau ».

Argumentation écrite des plaignants, paragr. 21

57.Nous soutenons que les plaignants n'ont produit aucun élément de preuve à l'appui de cette allégation et que, de toute façon, ils n'ont produit aucune preuve directe ou indirecte que les droits que leur accorde le sous-alinéa 8(2)c)(ii) ont été violés par suite de la décision mentionnée ci-dessus.

58. En outre, les plaignants n'ont produit aucun élément de preuve démontrant que le défendeur, M. Nymark, a joué un rôle direct dans les réaffectations temporaires ou qu'il était au courant de celles-ci.

59. Il faut donc rejeter cet élément des allégations des plaignants.

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Décision Page 34 60.Quoi qu'il en soit, M. Paterson avait manifestement le pouvoir de réaffecter temporairement trois des plaignants à la DÉPP, aux termes de l'article 7 de la Loi, qui précise ce qui suit :

La présente loi n'a pas pour effet de porter atteinte au droit ou à l'autorité de l'employeur quant à l'organisation de la fonction publique, à l'attribution des fonctions aux postes et à la classification de ces derniers.

Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, 1985, c. P-35, art. 7

61. La preuve sans équivoque qui a été produite a confirmé ce qui suit :

a) Que, suivant la politique en vigueur au Ministère, l’évaluation des présentations de drogue nouvelle devait être effectuée dans un délai de 180 jours (pièce C-2, onglet 5, p. 462(e));

b) Que ce n'était pas la première fois que des scientifiques étaient mutés temporairement de la DIH à la DÉPP et vice-versa pour éliminer un arriéré. Comme l'ont admis les plaignants : « il est clair que l'existence d'un arriéré, que ce soit à la DÉPP ou dans une autre division, n'est pas un nouveau phénomène au Bureau » (Argumentation écrite des plaignants, paragr. 25);

c) Qu'en novembre 1997 l'arriéré de présentations de drogue nouvelle à la DÉPP était 12 fois plus important que l'arriéré à la DIH (pièce R-1);

d) Qu'il avait été estimé qu'il y aurait un arriéré de 55 présentations de drogue nouvelle à la DÉPP à la fin de l’exercice 1997-1998 contre un arriéré de sept à la DIH (pièce R-1);

e) Que, lors d'une réunion du personnel tenue le 27 novembre 1997, les plaignants, entre autres, ont été informés desdits arriérés et, en fait, ont reçu une liste des arriérés existants et projetés jusqu'à la fin de l'exercice (pièce R-1);

f) Que M. Paterson a demandé l'aide de fonctionnaires travaillant à la DIH pour réduire l'arriéré à la DÉPP. Aucun des plaignants n'a été désigné à ce moment-là pour une réaffectation (pièce R-2).

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Décision Page 35 g) Que M. Paterson a indiqué qu’en l’absence de volontaires le 1 er décembre 1997 il affecterait lui-même le personnel selon les besoins du service (pièce R-2);

h) Que, le 12 décembre 1997, n’ayant pas trouvé de volontaires, M. Paterson a temporairement réaffecté MM. Vilim, Lambert et Sharma à la DÉPP à compter du 5 janvier 1998 (pièce C-2, onglet 6, pp. 655 à 657);

i) Que M. Paterson a expliqué pourquoi il avait précisément choisi ces scientifiques, explication qui n'a pas été réfutée.

j) Que, lors d'une réunion tenue le 14 janvier 1998, M. Paterson [traduction] « a insisté sur le fait que les affectations ne devaient pas être perçues comme une sanction imposée aux trois évaluateurs parce qu'ils avaient déposé des griefs » et qu’aucun des plaignants n'a alors élevé la voix pour protester (pièce R-3);

k) Que les réaffectations n'ont pas obligé les trois plaignants visés à changer de lieu de travail. Ils ont continué de travailler au bureau ils travaillaient avant leur réaffectation;

l) Que les réaffectations temporaires de MM. Sharma et Vilim ont pris fin le 19 mars 1998 (pièce R-4) tandis que celle de M. Lambert a pris fin en juillet 1998.

62. L'avocate a soutenu qu’en raison du temps qui s’est écoulé entre la détermination officielle de l'arriéré et l'affectation des trois plaignants à la DÉPP «il y a lieu de s’interroger sérieusement sur l’« urgence » d’éliminer l'arriéré ». Elle a en outre fait valoir que les plaignants s'étaient vus confier des tâches qui n'avaient rien à voir avec l'élimination de l'arriéré. Enfin, elle a soutenu que les préoccupations des plaignants et le fait que les réaffectations ont eu lieu après le dépôt des griefs suffisaient à la Commission pour conclure que les réaffectations « visaient à pénaliser les plaignants et à exercer des représailles contre eux parce qu'ils s'étaient prévalus des droits que leur accorde la Loi ».

Argumentation écrite des plaignants, paragr. 31 et 39

63.Comme c'est le cas, généralement parlant, de l'ensemble de l'argumentation des plaignants, ces allégations sont

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Décision Page 36 fondées sur des soupçons, des conjectures et de la méfiance, mais elles ne s’appuient pas sur des preuves matérielles.

64. Il y a lieu de faire remarquer que, quoique l'avocate fasse maintenant ces allégations pour établir le bien-fondé de son argumentation, elle n’a jamais demandé à M. Paterson, au cours du contre-interrogatoire de ce dernier, pourquoi il avait fallu tant de temps pour réaffecter les plaignants.

65. Il y a également lieu de faire remarquer que, même si les trois plaignants peuvent ne pas avoir été affectés exclusivement à des projets de la DÉPP, aucun n'a produit de preuve directe qu’il n’avait pas aidé d’une manière ou d’une autre à réduire l'arriéré à la DÉPP, selon la pièce R-1.

66. En outre, et contrairement à ce que soutient l'avocate, M. Paterson a fourni des éléments de preuve irréfutables que l'arriéré à la DÉPP, du fait de ces réaffectations temporaires, avait été réduit, mais pas autant qu'on le souhaitait.

67. Enfin, pour poursuivre l'argumentation de l'avocate jusqu’à sa conclusion absurde, lorsque des griefs ou des plaintes sont en cours contre un gestionnaire, celui-ci ne réaffectera pas les plaignants comme si « les affaires continuaient » par crainte de faire encore les frais de ses décisions.

68. En terminant, d'après les éléments de preuve présentés, nous soutenons que non seulement M. Paterson avait le pouvoir de réaffecter temporairement les plaignants en cause à la DÉPP, mais aussi qu’il a agi en toute bonne foi.

69. Les allégations relatives à la réaffectation des plaignants devraient être rejetées.

CONCLUSION 70.C’est peu dire qu’il y avait absence complète de preuve claire et convaincante étayant les allégations des plaignants que les droits que leur accorde l'article 8 ont été violés, puisqu’en fait il n’y avait aucune preuve.

71.Nous demandons, par conséquent, que les deux plaintes soient rejetées.

LE TOUT RESPECTUEUSEMENT SOUMIS

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Décision Page 37 Réfutation Pour les plaignants 1. En ce qui a trait aux paragraphes 8 à 12 de la réfutation de M e Snyder, nous faisons simplement remarquer que M. Paterson a déclaré, en réponse à une question de M e Snyder, que les témoignages de MM. S. Chopra et Haydon au sujet des graves problèmes d’innocuité et d'efficacité que posait l'utilisation des médicaments STbr et Revalor H étaient justes et exacts. M e Snyder a choisi de présenter ce témoignage corroboratif lors de l'interrogatoire de son propre témoin. Il a jugé bon de ne pas limiter ou qualifier le témoignage de M. Paterson. Nous soutenons respectueusement que la Commission a le droit d'examiner ce témoignage pour déterminer si l'employeur a cherché à ramener les importantes préoccupations d’ordre scientifique à des problèmes interpersonnels qui seraient résolus dans le cadre d'un examen visant à miner, marginaliser et autrement discréditer les scientifiques. Nous soutenons respectueusement que ce qui précède constitue de l'« intimidation » ou d'« autres » mesures ayant pour but d'empêcher les fonctionnaires de déposer des griefs.

2. En ce qui concerne les paragraphes 13 à 20 de la réfutation de M e Snyder, nous reprenons la terminologie employée par ce dernier pour faire valoir qu'il est « inapproprié » de sa part d'avoir la « témérité » de chercher effectivement à présenter, dans son argumentation, de nouveaux éléments de preuve qu'il n'a pas jugé bon de produire lors de l'audience. Nous demandons à la Commission de ne tenir aucun compte des paragraphes 13 à 15. Certes, la Commission a beaucoup de latitude pour admettre des éléments de preuve qui pourraient ne pas être admissibles devant une cour de justice, mais elle n’a pas la latitude d’examiner de nouveaux éléments de preuve présentés dans une argumentation juridique qui revient à dire : « voici la preuve que nous aurions produite si nous avions su que la Commission allait accorder une certaine importance à la preuve des plaignants ».

3. En ce qui concerne le paragraphe 19, M mal la décision de la Commission. Bien que celle-ci ait réservé son jugement sur la question de la pertinence de la preuve documentaire, l'objection de M au ouï-dire a été rejetée. Plus particulièrement, M s’est opposé à la partie du témoignage de M. Chopra celui-ci a déclaré que M. Lachance avait dit à tous les

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e Snyder interprète e Snyder relative e Snyder

Décision Page 38 plaignants qu'ils pourraient être mutés à un endroit l'on « n'entendrait plus parler » d'eux en faisant valoir qu'il s'agissait de ouï-dire. D'après mes notes, la Commission a répondu à M e Snyder que ce n'était pas du ouï-dire (c'est quelque chose que M. Chopra lui-même a entendu) et a admis cet élément de preuve. Je ne puis trouver d'autres mentions d’objections pour ouï-dire.

4. Qu'à cela ne tienne, M e Snyder sera peut-être heureux d'apprendre que la règle du ouï-dire a été ramenée à un critère de nécessité et de fiabilité dans les affaires devant les cours de justice, y compris les affaires criminelles, dans la foulée des arrêts R. v. Smith (1992), 94 D.L.R. (4 t h ) 590 et R. v. Khan (1990), 41 O.A.C. 353 de la Cour suprême du Canada. De nouveau, nous faisons remarquer que la Commission a beaucoup de latitude pour examiner des éléments de preuve qui seraient inadmissibles devant une cour de justice. Toutefois, il serait déraisonnable de déclarer inadmissibles des éléments de preuve qui seraient autrement admissibles devant une cour de justice.

5. En ce qui concerne le paragraphe 22 de la réfutation de M e Snyder, nous faisons remarquer qu'à sa demande expresse les témoins qui ont comparu après M. Chopra et M m e Haydon ont repris le témoignage de ces derniers et se sont ainsi trouvés à le corroborer. De nouveau, à la demande de la Commission et de M e Snyder, la preuve documentaire qui a été reconnue comme étant exacte et pertinente a été admise, et les plaignants ont été informés qu'ils n’avaient pas à en faire la lecture pour qu'elle fasse partie du dossier.

6. En ce qui concerne le paragraphe 26 de la réfutation de M e Snyder, nous soulignons simplement que M. Paterson a déclaré que c’est lui qui a conseillé à M. Nymark de parler de problèmes interpersonnels dans la réponse au dernier palier de la procédure de règlement des griefs. À l’origine, le Ministère voulait régler les problèmes interpersonnels et non pas les préoccupations des employés. Les plaignants ont décidé de ne pas participer aux entrevues après que M. Basudde leur eut dit qu'on lui avait demandé ce que lui-même et ses collègues comptaient faire par la suite. Il se peut que le ciblage soit plus flagrant dans le milieu industriel. Nous soutenons respectueusement que le ciblage était suffisamment flagrant pour amener un groupe de scientifiques à conclure qu'ils étaient victimes d'un coup monté et qu'on employait toutes sortes d'« autres » moyens pour les empêcher de déposer des griefs.

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Décision Page 39 7. Pour ce qui est des paragraphes 42 à 55 de la réfutation de M e Snyder, nous soutenons respectueusement que la plainte de l'IPFPC (161-2-856) a été retirée au début de l'audience et que l'argumentation ci-dessus n'a rien à voir avec la question dont la Commission est saisie.

8. Les plaignants soutiennent que les représailles ont commencé lorsque la direction a ramené à des problèmes interpersonnels leurs graves préoccupations d’ordre scientifique. Ils n'ont pas fait valoir, relativement aux questions dont la Commission est saisie, que la réponse de l'employeur était inacceptable. M e Snyder semble vouloir amener la Commission à se prononcer sur une question dont elle n'est pas saisie. Nous demandons donc à cette dernière de ne pas tenir compte des paragraphes 42 à 55 de la réponse de M e Snyder. (Soit dit en passant, nous faisons remarquer que, d’après notre expérience, les différends qui ne sont pas réglés complètement et efficacement au départ ont tendance à s'aggraver. Par conséquent, nous n’approuvons pas la stratégie d'atermoiement et d’admission superficielle des problèmes de l’employeur. En d'autres termes, une telle stratégie mine les relations de travail et ne doit pas être encouragée.) Quoi qu'il en soit, le présent tribunal n'est pas saisi de la pertinence de la réponse au grief, mais du fait que la stratégie de représailles est exposée dans la réponse faite au grief —, une question qui n'est pas abordée dans les paragraphes 42 à 55.

9. Nous relevons toutefois avec beaucoup d’intérêt le fait que M e Snyder mentionne au paragraphe 53 de sa réfutation que le plaignant doit être « réprimandé » pour avoir déposé une plainte aux termes de l'article 23. Il n'est pas clair s’il s’agit de l'IPFPC, de M. Chopra ou de l’ensemble des plaignants. Nous estimons qu’affirmer que les plaignants devraient être pénalisés parce qu'ils ont déposé une plainte aux termes de l'article 23 dans laquelle ils allèguent qu'il y a eu violation de l'article 8 va plutôt à l’encontre du but recherché.

10. En ce qui concerne les paragraphe 56 à 69 de la réfutation de M e Snyder, nous soutenons que la seule autre « réaffectation » est celle de M. Lambert, qui a été temporairement réaffecté pendant six ans. Compte tenu de l’affectation antérieure de M. Lambert, du fait que les réaffectations ont coïncidé avec les réponses aux griefs, du fait que les réaffectations ne semblent pas avoir accéléré le traitement des demandes elles ont plutôt créé un arriéré à la DIH, du fait que l'employeur a produit des preuves de l'arriéré qui existait en octobre 1997, mais a refusé de produire la meilleure preuve possible, soit les

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Décision Page 40 rapports mensuels pendant la période de réaffectation des plaignants et immédiatement après (soit de janvier à mars 1997) et de la déclaration subséquente de M. Lachance selon laquelle les plaignants pourraient être mutés à un endroit l'on n'entendrait plus jamais parler d'eux, la Commission est en mesure de conclure qu’il s’agissait d’une stratégie (un des « autres » moyens) pour intimider les plaignants.

11. En guise de réponse générale à la réfutation de M e Snyder, nous soutenons que ce dernier n'a aucun motif (comme le lui a déjà dit la Commission) d’affirmer qu’aucun élément de preuve n’a été soumis à la Commission pour démontrer qu’il y a eu violation de la Loi. M e Snyder peut dire que la plainte était prématurée ou peut-être anticipée vu que les répercussions de la stratégie de l'employeur ne sont devenues totalement évidentes qu'après que le rapport de KPMG eut été rendu public et que M. Lachance eut fait sa remarque aux plaignants. Toutefois, nous soutenons que les plaignants ne sont pas tenus d'attendre que toutes les représailles aient été exercées pour déposer une plainte.

12. En terminant, nous supposons que c'est par inadvertance que, dans la version anglaise de sa réfutation, M e Snyder emploie le terme « docteur » pour désigner tous les plaignants, sauf M. Chopra.

Motifs de décision Les plaignants ont prétendu que le défendeur, M. Alan Nymark, sous-ministre délégué, Santé Canada, a cherché, par intimidation, par menaces ou par l'imposition d'autres sanctions, à les obliger à s’abstenir d'exercer les droits qui leur sont accordés par la LRTFP. Les dispositions pertinentes de la loi sont reproduites ci-dessous : 23. (1) La Commission instruit toute plainte dont elle est saisie et selon laquelle l'employeur ou une organisation syndicale ou une personne agissant pour le compte de celui-là ou de celle-ci n'a pas, selon le cas :

a) observé les interdictions énoncées aux articles 8, 9 ou 10; [...] (2) Dans les cas où, en application du paragraphe (1), elle juge l'employeur, une organisation syndicale ou une personne coupable d'un des manquements qui y sont énoncés, la Commission peut, par ordonnance, lui enjoindre d'y remédier ou de prendre toute mesure nécessaire à cet effet dans le délai qu'elle estime approprié.

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Décision Page 41 (3) L'ordonnance visant une personne est en outre adressée :

a) lorsque l'auteur du manquement a agi ou prétendu agir pour le compte de l'employeur, au premier dirigeant concerné, dans le cas d'un employeur distinct, ou au secrétaire du Conseil du Trésor, dans les autres cas;

b) lorsqu'il a agi ou prétendu agir pour le compte d'une organisation syndicale, au dirigeant attitré de celle-ci.

8. (2) Sous réserve du paragraphe (3), il est interdit : a) de refuser d'employer ou de continuer à employer une personne, ou encore de faire des distinctions injustes fondées, en ce qui concerne l'emploi ou l'une quelconque des conditions d'emploi d'une personne, sur l'appartenance de celle-ci à une organisation syndicale ou sur l'exercice d'un droit que lui accorde la présente loi;

[...] c) de chercher, notamment par intimidation, par menace de destitution ou par l'imposition de sanctions pécuniaires ou autres, à obliger un fonctionnaire :

[...] (ii) à s'abstenir d'exercer tout autre droit que lui accorde la présente loi.

(3) Toute action ou omission à l'égard d'une personne occupant un poste de direction ou de confiance, ou proposée pour un tel poste, ne saurait constituer un manquement aux dispositions du paragraphe (2).

Bien qu'elle soit quelque peu déconcertante, la preuve produite par les plaignants n'établit pas le bien-fondé des plaintes qui ont été déposées. Plus particulièrement, la preuve ne montre pas qu’en commandant les diverses études, et en particulier l'examen de KPMG, Santé Canada avait des motifs ultérieurs inavouables. Aucun élément de preuve n'établit que MM. Vilim, Lambert et Sharma ont temporairement été mutés à une autre division du BMV en guise de représailles pour avoir déposé de multiples plaintes et griefs. Au contraire, la preuve indique que la direction a exercé son pouvoir et assumé ses responsabilités à cet égard de façon acceptable et appropriée. Enfin, la preuve ne montre pas que l'allégation de M. Chopra selon laquelle la réponse faite par le défendeur à ses griefs ou la décision de ce dernier

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Décision Page 42 d'examiner plus en profondeur les incidents survenus entre le personnel de Santé Canada et les représentants d'Elanco plusieurs mois auparavant ont constitué une sanction ou de l'intimidation.

En revanche, la preuve montre qu'il existe des problèmes d’ordre interpersonnel et scientifique graves et troublants au BMV, mais cela ne prouve pas que les décisions prises par le défendeur ou toute personne agissant en son nom contreviennent aux interdictions énoncées à l'article 8 de la LRTFP.

La Commission des relations de travail dans la fonction publique n'a pas compétence pour examiner et évaluer les préoccupations d’ordre scientifique soulevées par les divers témoins qu'elle a entendus lors de l'audience. Les plaintes sont donc rejetées.

Le président, Yvon Tarte

OTTAWA, le 21 décembre 1998. Traduction certifiée conforme Serge Lareau

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